SPECTRUM Formation en cours d’emploi
Un portfolio pour améliorer sa
manière d’agir
Durant l’année 2001, Retravailler-Corref a été mandaté pour accompagner une démarche portfolio s’adressant à un
groupe de 17 infirmières suivant une formation en cours d’emploi à l’École du personnel soignant de Fribourg (EPS).
Retravailler-Corref a proposé d’adapter la démarche traditionnelle de portfolio pour la centrer sur «l’intégration des
acquis».
Nicolas Perrin, Janine Voit,
Catherine Bonfils
A l’origine, l’École du personnel soignant
de Fribourg (EPS) avait lancé un appel
d’offre en précisant que cette démarche
devait aider les participantes à faire un
lien entre les cours qu’elles suivaient et
leur expérience professionnelle, parfois
longue de plusieurs années. Cette dé-
marche devait aussi permettre de ren-
forcer une position réflexive fortement
sollicitée dans des situations profession-
nelles complexes.
Pour répondre à cet appel d’offre, Re-
travailler-Corref a proposé d’adapter la
démarche traditionnelle de portfolio de
manière à mettre en évidence les situa-
tions professionnelles de référence, en
identifiant les éléments de diagnostic et
les actions à mener pour y faire face.
Principes-clés d’un portfolio
Au-delà de ces spécificités, un portfolio
s’articule autour de deux étapes-clés: l’ana-
lyse et la synthèse. Un portfolio centré sur
«l’intégration des acquis» revient à profiler
encore un peu plus ces deux étapes.
L’analyse s’articule autour des actions
entreprises, du contexte de ces actions, et
des ressources mises en œuvre. Elle s’effec-
tue à l’aide d’un tableau composé de trois
colonnes, voir tableau ci-dessous:
Ce travail est repris dans la deuxième
phase, celle de la synthèse. Les participantes
doivent alors opérer une lecture transver-
Situations – Contexte
Dans quelles conditions ai-je agi?
A quoi devais-je faire attention?
Quels comportements étaient requis?
PANORAMA 2/2003
sale de leurs diverses expériences pour en
dégager les points communs. Cette syn-
thèse peut favoriser une meilleure com-
préhension du déroulement de l’action.
Nous demandons alors de préciser les
étapes de processus-types en caractérisant
les situations emblématiques (ce qui per-
met d’orienter les décisions) et en déter-
minant quelles sont les activités.
Faciliter une intégration des acquis
Notre recherche nous a amenés à identi-
fier quelques points qui requièrent une
attention particulière lorsqu’on souhaite
faciliter une démarche réflexive qui puisse
être transposable dans l’action.
Pour effectuer ce travail relativement
ardu, il est nécessaire d’expliciter la fonc-
tion du portfolio. De notre point de vue,
il existe trois types de fonction attribuable
à un portfolio: la reconnaissance person-
nelle, la démonstration et la conceptua-
lisation de l’action. Ces trois fonctions
impliquent un rapport différent à la
démarche pour les participantes. La re-
connaissance personnelle nécessite de
nommer, mais de manière assez libre, afin
de pouvoir s’approprier ses expériences,
de pouvoir les reconnaître siennes. La
démonstration exige quant à elle d’utiliser
un vocabulaire spécifique, contenu dans
un référentiel, même s’il n’est pas totale-
ment approprié par la participante. En-
fin, la conceptualisation nécessite de
pouvoir adopter une métaposition pour
clarifier la définition de concepts qui
Activités
Quels étaient mes grands domaines
d’activité? Qu’est-ce que j’ai fait
concrètement?
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devront être intégrés afin d’élaborer l’ana-
lyse. Ces trois fonctions ne sont pas
exclusives; elles correspondent plutôt à
trois pôles d’un continuum.
Il nous est aussi apparu important de
tenir compte des catégories d’analyse
utilisées spontanément par les partici-
pantes, lorsqu’elles sont différentes de
celles que nous avions imaginées. En
effet, ces dernières risquent d’être écartées
de nos trois catégories (situations-con-
texte, activités, ressources). Les partici-
pantes utilisent par exemple – plus ou
moins explicitement – les buts, les inten-
tions ou les enjeux liés à une action. La
notion de responsabilité, voire de rôle, est
également utilisée pour préciser le sens de
l’action. Enfin, les ressources contenues
dans l’environnement sont souvent men-
tionnées. Il est alors nécessaire de faire
préciser comment les mobiliser.
Notre tentative d’expliciter la mobili-
sation des ressources nous amène à être
vigilants face aux «formulations automa-
tiques» – par exemple: l’utilisation du
gérondif, l’expression «faire preuve de» –
qui structurent l’écrit. Ces formulations
quasi systématiques nous semblent indi-
quer que la participante juxtapose les
éléments de son analyse (activités, res-
sources, situations) et ne les intègre pas,
ne les met pas en regard. Nous avons aussi
été vigilants face à l’utilisation d’expres-
sions professionnelles ou populaires
censées décrire des ressources, souvent
précédées par le verbe être (être empa-
Ressources
Qu’est-ce que j’ai mobilisé pour
réussir? Que puis-je réutiliser dans
une autre expérience?
 SPECTRUM Formation en cours d’emploi
Photo: CRS-ARP
Une démarche portfolio destinée à des infirmières en cours d’emploi.
thique, être vigilant, etc.).Nous avons
essayé alors de mieux comprendre les
dimensions implicites de ces expressions.
Enfin, dans le prolongement de cette
réflexion, il nous semble primordial de
distinguer les ressources mobilisées et les
ressources apprises. Des formulations
comme «j’ai appris» sont ambiguës. Pour
favoriser une alternance théorie-pratique,
il est nécessaire de dépasser l’évocation
des connaissances déclaratives pour se
centrer sur la mobilisation de savoirs
appropriés. Il s’agira donc d’évoquer par
exemple des stratégies reproductibles, des
manières de s’y prendre, des outils au sens
générique du terme, qui permettent de
construire l’action.
Pour tendre vers ce résultat, il est primor-
dial d’élaborer des consignes précises
pour permettre aux participantes de dis-
tinguer et aborder les situations-contexte,
les actions et les ressources mobilisées du-
rant l’analyse.
Puis la démarche portfolio aborde une
synthèse ou un regroupement. Nous
avons proposé trois modes de regroupe-
ment: par ressources, par activités, par
processus-types. Ce dernier regroupe-
ment consiste donc à relier les expériences
selon les situations-contexte (prescrip-
tion, auto-prescription et contexte).
Discriminer des catégories d’analyse dans
chacune des expériences puis les relier
n’est pas chose facile. Peut-être faudrait-il
faire précéder l’analyse d’un récit du dé-
roulement des activités. «Revivre» l’activi-
PANORAMA 2/2003
té, en favorisant une évocation libre de
celle-ci, éviterait peut-être de «parler sur»
en gommant toutes les aspérités du tra-
vail. Or ces dernières peuvent engendrer
une analyse visant l’intégration des acquis.
Appréciation des participantes
Réflexivité, changement de rôle, cons-
truction et renforcement d’une nouvelle
identité professionnelle, tels sont les élé-
ments forts nommés par les participantes
après coup. Grande est la satisfaction,
lorsqu’il y a prise de conscience de ses
propres ressources et compétences et lors-
qu’il y a contextualisation de celles-ci.
C’est tout un travail sur soi qui se réalise
«en mettant à jour des choses et en trouvant
du sens à ces choses». La pratique et le sens
de l’analyse dans les situations profession-
nelles s’affinent: les liens entre la théorie et
la pratique sont renforcés, la formulation
est plus précise, les questions des prati-
ciennes en formation deviennent plus
ciblées. Autant de pas en direction d’une
posture réflexive nécessaire pour faire face à
la complexité des situations professionnelles.
Ces observations nous ont amenés à
véritablement tenir compte des différents
paramètres définissant une compétence!
Nicolas Perrin a développé et accompagné durant
cinq ans des démarches de bilan portfolio à
Retravailler-Corref. nicolasperrin@swissonline.ch
Janine Voit accompagne et développe des dé-
marches de bilan-portfolio à Retravailler-Corref
(Lausanne). formation.grancy@corref.ch
Catherine Bonfils est responsable de formation
à l’Ecole du personnel soignant (Fribourg).
BonfilsC@fr.ch
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Ein Portfolio für
ein kompetenteres
Verhalten
2001 wurde Retravailler-Corref mit der
Begleitung eines Projekts beauftragt, bei
dem es um die Erstellung eines Portfolios
für 17 Krankenschwestern ging, die einen
berufsbegleitenden Weiterbildungskurs
besuchten. Dieses Projekt sollte den Teil-
nehmerinnen dabei helfen, eine Verknüp-
fung zwischen dem besuchten Kurs und
ihrer in manchen Fällen mehrere Jahre
umfassenden Berufserfahrung herzustel-
len. Es sollte auch zu einer verstärkten
Selbstreflexion führen.
Zur Erfüllung dieser Vorgaben schlug
Retravailler-Corref vor, die herkömmliche
Form des Portfolios abzuändern und den
Schwerpunkt auf die «Integration des
Erlernten» zu legen. Ziel war, über eine
blosse Analyse des Gelernten hinaus auf
der Grundlage des Kompetenzmodells
die Aktivitäten zu analysieren und die
Schlüsselparameter der beruflichen Situ-
ationen zu identifizieren.
Die Idee, die «Integration des Erlernten»
mit der Erstellung eines Portfolios zu
kombinieren, war eine rein intuitive. Wir
identifizierten einige Punkte, die beson-
derer Aufmerksamkeit bedürfen, wenn
man eine in Aktion umsetzbare reflek-
tierende Vorgehensweise fördern möchte.
Dabei galt es zuerst, die wichtigsten
Funktionen eines Portfolios zu klären
(Selbsterkenntnis, Nachweis der Fähig-
keiten bzw. Konzeptualisierung der Ak-
tion). Es schien uns wünschenswert, die
spontan von den Teilnehmerinnen ent-
wickelten Analysekategorien zu verwen-
den: Ziele, Absichten, Herausforderungen.
Wir achteten auch auf «automatische
Formulierungen» und Fachausdrücke
um sie näher erläutern zu können.
Wichtig war uns eine Unterscheidung
zwischen mobilisierten und erworbenen
Ressourcen.
Möglicherweise muss in allen derartigen
Projekten bei der Synthese ein analytischer
und ein chronologischer Ansatz kombi-
niert werden. Aus diesem Grund schlagen
wir insbesondere eine Synthese nach
Prozessen vor. YMR/MR