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UNIVERSITE DE YAOUNDE II THE UNIVERSITY OF YAOUNDE II

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FACULTE DES SCIENCES FACULTY OF LAWS AND
JURIDIQUES ET POLITIQUES POLITICAL SCIENCE
BP 1365 YAOUNDE, BP 18 SOA P.O Box 1365 YAOUNDE, P.O BOX 18 SOA

DROIT DES SUCCESSIONS ET DES LIBERALITES


MARSTER I
UNIVERSITE DE YAOUNDE – II SOA - année académique 2023- 2024
Enseignants:
- Pr NDOCKO Nicole Claire
- Dr OLOMO BELINGA née BESSOMO Thérèse Dieudonnée

I - OBJECTIFS:
I.1- OBJECTIFS GÉNÉRAUX
• Acquérir les notions fondamentales de dévolution successorale et des libéralités ;
• Permettre à l’apprenant à maîtriser les relations entre le droit des successions et toutes les autres
disciplines juridiques, notamment le droit des personnes, le droit de la famille, le droit judiciaire
privé et les régimes matrimoniaux
• Développer chez l’apprenant des connaissances théoriques et des habiletés reliées à la gestion du
patrimoine familial ;
• Donner à l’apprenant des capacités de proposer une réponse juridique aux problèmes relatifs au
Droit patrimonial de la famille
• Amener l’apprenant à comprendre les enjeux de cette discipline sur les plan politique, social
économique et culturel

I.2- OBJECTIFS SPÉCIFIQUES


À la fin de ce cours, l’étudiant(e) pourra :
• Connaître, définir et expliquer les techniques de dévolution successorale ;
• Maîtriser les spécificités du système juridique camerounais du fait de la dualité juridique et da la
dualité judiciaire
II - CONTENU
- LA DEVOLUTION SUCCESSORALE

- LA TRANSMISSION DE LA SUCCESSION

1
PLAN DU COURS
INTRODUCTION
I - DEFINITION ET OBJET
II – LES CONDITIONS D’OUVERTURE D’UNE SUCCESSION

TITRE I – LA DEVOLUTION SUCCESSORALE

SECTION PRELIMINAIRE : LES QUALITES REQUISES POUR SUCCEDER


§ 1 – La capacité de succéder
§2 - La dignité successorale
§ 3 – la vocation héréditaire

CHAPITRE I – LA DEVOLUTION DE LA SUCCESSION PAR LA LOI : « SUCCESSION LEGALE » OU


« SUCCESSION AB INTESTAT »
SECTION I – LES DROITS SUCCESSORAUX DES HERITIERS AYANT AVEC LE DE CUJUS UN LIEN DE
PARENTE
§ 1 - Les principes directeurs de la dévolution de la succession aux héritiers
§ 2 - L’application des principes : la détermination des droits successoraux des différents
SECTION II - LA VOCATION HEREDITAIRE DU CONJOINT SURVIVANT
§ 1 – la vocation en pleine propriété du conjoint survivant
§ 2 – la vocation en usufruit du conjoint survivant
§ 3 – la conversion de l’usufruit en rente viagère

SECTION III – LES DROITS DE L’ETAT


SSECTION IV – LES DEROGATIONS AUX REGLES ORDINAIRES DE DEVOLUTION : LES SUCCESSIONS
ANOMALES

CHAPITRE II– LA DEVOLUTION DE LA SUCCESSION PAR LE POUVOIR DE LA VOLONTE : LES


LIBERALITES
SECTION I – LES MANIFESTATIONS DU POUVOIR DE LA VOLONTE
§1 - La donation
§2 – le testament : études des successions testamentaires
SECTION II – LES LIMITES AU POUVOIR DE LA VOLONTE : L’ORDRE PUBLIC SUCCESSORAL
§ 1 – La réserve héréditaire
§ 2 – L’interdiction des substitutions fidéicommissaires
§ 3 – L’interdiction des pactes sur succession future

TITRE II - LA TRANSMISSION DE LA SUCCESSION

CHAPITRE I - LE MODE DE TRANSMISSION


SECTION I – LA SAISINE
§1 – L’attribution de la saisine
§2 – les règles applicables à défaut de saisine
SECTION II : LE DROIT D’OPTION DES HERITIERS ET DES LEGATAIRES
§ 1 – L’étude générale du droit d’option
§ 2 – L’étude particulière des différents termes de l’option

SECTION III- LA PÉTITION D’HÉRÉDITÉ

CHAPITRE II – LA LIQUIDATION DU PASSIF SUCCESSORAL

SECTION I – LE DROIT COMMUN DE LA LIQUIDATION DU PASSIF


§ 1 – La détermination des obligations passives des héritiers et des successeurs testamentaires
§ 2 – le règlement du passif successoral

2
SECTION II - LA LIQUIDATION DU PASSIF HEREDITAIRE EN CAS D’ACCEPTATION SOUS BENEFICE
D’INVENTAIRE ET DE SEPARATION DES PATRIMOINES
§ 1 - Le bénéfice d’inventaire
§ 2 - - De la liquidation du passif en cas de séparation des patrimoines

CHAPITRE III – LA LIQUIDATION DE L’ACTIF SUCCESSORAL : LA DISTRIBUTION DE LA SUCCESSION


SECTION I – L’INDIVISION SUCCESSORALE
§ 1 – Le contenu de l’indivision
§2 – La gestion des biens indivis
§3 – Les droits et obligations des indivisaires
§ 4– La durée de l’indivision
§ 5– Le compte d’indivision
SECTION II - LES OPÉRATIONS PRÉALABLES AU PARTAGE
§ 1 – L’existence d’héritiers réservataires : Les proportions respectives de la réserve et la quotité disponible
§ 2 - La réduction des libéralités excessives
SECTION III –LE PARTAGE DE LA SUCCESSION
§ 1 – le droit au partage
§ 2 – Les formes et les effets du partage

3
INTRODUCTION
Ce cours aborde chronologiquement les règles de dévolution, de gestion, de liquidation et
de partage d’une succession.
Il traite également des libéralités les plus importantes – testament, donation – dans le cadre de
la dévolution volontaire. Cette troisième édition actualisée est agrémentée de nouveaux exemples et
propose un certain nombre de solutions aux questions liquidatives les plus fréquentes.
Le droit des successions organise juridiquement l’aspiration des hommes à transmettre leur
patrimoine.
Il convient de définition le contenu et l’objet et de présenter les conditions d’ouverture d’une succession.

I - DEFINITION ET OBJET
Le mot succession est utilisé dans deux sens :
- il désigne d’abord la transmission à une ou plusieurs personnes vivantes du patrimoine
d’une personne décédée. La succession est à cet effet un mode de transmission à cause de mort, donc
un mode dérivé d’acquisition de la propriété au décès du propriétaire des biens (art. 711 c.civ.), et du point
de vue de cette transmission, le patrimoine du défunt ou de cujus 1 est envisagée, en principe, entant que
tel, i.e. comme une universalité dans tous ses éléments actifs et passifs.
Les successions et les libéralités (donations et testaments) sont les deux modes de transmission de
la propriété. Deux outils utilisés concurremment pour transmettre ses biens d’une génération à l’autre.
- Il désigne également le patrimoine transmis. On dit alors d’une personne qu’elle recueille
la succession du de cujus ; dans ce cas, succession est synonyme d’hérédité.
Les personnes appelées à recevoir l’hérédité ou succession sont qualifiées de successeurs,
d’héritiers ou, pour les opposer à leur auteur, d’ayants cause ou ayants droit de celui-ci.
Qu’il s’agisse des successions ou libéralités, il constitue des modes de transmission de biens à titre
gratuit. Cette transmission peut s’opérer aussi bien entre vifs qu’à cause de mort.
Pour ouvrir une succession il faut d’abord faire un jugement d’hérédité. Avant de saisir le tribunal,
il faut que la famille se rassemble et tienne un conseil au cours duquel des résolutions seront prises par
rapport aux biens laissés par le dé cujus et un procès-verbal sera établi.
Le droit des successions est alors l’ensemble des règles juridiques qui s’organisent à l’occasion de
la mort d’une personne et qui ont pour but d’établir des rapports avec les personnes dont cette personne
(de cujus) dépend ou qui dépendent d’elle (du de cujus), ainsi que le sort qui sera réservé à son patrimoine.
Le droit successoral subit également l’influence du principe jurisprudentiel selon lequel l’option
de juridiction emporte option de législation du fait du maintien de la coexistence du droit dit moderne,
hérité du colon, et des lois traditionnelles. Ainsi, dans les contentieux en matière des successions, le citoyen
camerounais a le choix entre la juridiction de droit traditionnel (TPD) ou la juridiction de droit écrit (TGI).
S’il choisit le tribunal du Premier Degré, celui-ci applique les règles traditionnelles mais si ces règles vont
à l’encontre des normes du droit écrit, ses décisions peuvent être invalidées par un tribunal. Et selon la
région du Cameroun où se déroule le jugement, ce tribunal utilisera le code civil issu du colonisateur
français ou le Common Law hérité des colons anglophones.

II – LES CONDITIONS D’OUVERTURE D’UNE SUCCESSION


L’ouverture de la succession doit être motivée. Ainsi ne saurait-on ouvrir la succession d’une
personne vivante. Cette ouverture se fait à un moment donné et à un lieu déterminé, éléments qui
permettent de déterminer un certain nombre de paramètres. Dès lors, l’ouverture de la succession soulève
au préalable trois (03) questions :
- aux causes de l’ouverture ;

1
De l’expression latine « is de cujus successione agitur » i. e. de la succession de qui il s’agit.
4
- à la date d’ouverture ;
- au lieu d’ouverture ;

1 – Les causes d’ouverture de la succession


Depuis que la mort civile2, qui frappait autrefois certains condamnés à des peines perpétuelles, a
été supprimée3seule la mort naturelle est une cause d’ouverture de la succession art. 718c.civ.).
La disparition est également une cause d’ouverture de la succession en droit camerounais. Elle est
constatée par un jugement déclaratif de décès qui est l’aboutissement de la procédure de disparition.
L’absence n’est pas encore une cause d’ouverture de la succession en droit camerounais.

2 – la date d’ouverture de la succession


La connaissance de la date d’ouverture de la succession est importante pour plusieurs raisons. En
effet, c’est au moment du décès que s’ouvre la succession. C’est à ce moment :
- que l’on détermine la loi applicable;
- que l’on se place pour savoir qui est héritier, qui est capable de succéder au de cujus ;
- que l’on détermine le jour où commence l’indivision entre les héritiers et par suite le moment auquel
remonte l’effet déclaratif du partage ;
- que l’on détermine la loi applicable en droit international privé : loi nationale ou loi étrangère.
La preuve de la date du décès est généralement simple à rapporter : elle se fait par l’acte de décès,
qui doit mentionner le jour et l’heure du décès ou par le jugement déclaratif de décès en cas de disparition.
Le cas de décès ou de disparition d’une seule personne ne présente pas de difficultés. Cependant,
des complications peuvent surgir lorsque plusieurs personnes, successibles les unes des autres périssent
dans un même évènement (naufrage, incendie accident d’avion, bombardement, etc.). En effet, il peut être
important de savoir lequel a survécu à l’autre et a hérité.
Le code civil s’est efforcé de résoudre ce problème par la théorie des comourants dans ses
articles 720 à722.

3 – Le lieu d’ouverture de la succession


Lorsque la succession s’ouvre par le décès ou la disparition, ce n’est pas au lieu de ce décès ou de
disparition, mais au dernier domicile du de cujus que s’ouvre la succession. Ce fixe la compétence judiciaire.

L’étude du droit des successions comprend deux volets, à savoir :


- la dévolution de la succession ;
- la transmission de la succession.

TITRE I – LA DEVOLUTION SUCCESSORALE


La dévolution consiste à savoir qui recueille une succession, c’est à – dire qui sont les héritiers et
quelles est la part qui leur est reconnue. La dévolution de la succession répond à la question de savoir par
qui et pour quelle quotité, en propriété ou en usufruit, seront recueillis les biens du de cujus. Autrement
dit, il s’agit d’étudier ici les règles nécessaires pour déterminer comment une succession s’ouvre, à qui elle
est destinée et comment sera-t-elle répartie, bref quels seront les droits des uns et des autres.
Il convient dès lors de relever que la dévolution peut avoir lieu de trois façons différentes :
- par l’effet de la loi directement ;

2
La mort civile est le fait de remplacer une personne vivante à la tête de tous ses biens. Elle est différente de la mort naturelle, i.e. la
mort biologique, le décès.
3
Loi du 31 mai 1854
5
- par l’effet d’un testament ;
- par l’effet d’une convention ;
Mais avant d’examiner ces différents modes de dévolution il faut dégager les conditions
d’ouverture d’une succession (section préliminaire).

SECTION PRELIMINAIRE - LES QUALITES REQUISES POUR SUCCEDER


Pour succéder, trois conditions doivent être remplies :
- le successeur doit exister et être capable ;
- le successeur doit avoir la dignité successorale ;
- Le successeur doit être appelé à la succession par la loi : avoir la vocation héréditaire.

§ 1 – LA CAPACITE DE SUCCEDER
L’incapacité de jouissance qui frappait les « morts civils » ayant été supprimée, l’article 725 c.civ.
dispose : «pour succéder, il faut nécessairement exister à l’instant de l’ouverture de la succession ».
Ainsi, conformément aux principes généraux, sont considérées comme existantes, non seulement les
personnes vivantes, mais aussi celles qui sont simplement conçues.
Par conséquent est incapable de succéder :
- celui qui n’est pas encore conçu ;
- celui qui n’est pas viable
L’incapacité de succéder n’est pas alors une incapacité de jouissance, ni même une incapacité
d’exercice ; elle tient à l’existence même de la personnalité (il faut exister).
En revanche, l’enfant qui est seulement conçu peut succéder, car tenu pour né, toutes les fois qu’il
y va de son intérêt. En revanche, un mort-né ou celui qui ne naît pas viable ne sera pas considéré comme
ayant recueilli la succession au cours de sa gestation pour ensuite la transmettre.

§2 - LA DIGNITE SUCCESSORALE
L’indignité successorale est une déchéance du droit de succéder qui frappe un héritier en raison
des torts très graves qu’il a pu avoir envers le défunt, et même parfois envers la mémoire du défunt.
L’indignité a tendance à ressembler à la révocation des libéralités pour ingratitude, mais, les causes
qui font encourir l’une et l’autre ne sont pas les mêmes.
L’Indignité ne doit pas être confondue avec l’Incapacité de succéder. Car, l’indigne est exclu d’une
succession déterminée, celle de la personne envers laquelle il s’est mal conduit. Il demeure apte à recueillir
toute autre succession.
Il convient d’examiner successivement les causes d’indignité successorale (A) et les effets qu’elle
produit (B).

A – Les causes d’indignité successorale


Aux termes de l’art 727 c. civ. « sont indignes de succéder et, comme tels, exclus des successions :
- celui qui sera condamné pour avoir donné ou tenté de donner la mort au défunt ;
- celui qui a porté contre le défunt une accusation capitale jugée calomnieuse ;
- l’héritier majeur, qui, instruit du meurtre du défunt, ne l’aura pas dénoncé à la justice ».
Il y a donc 3 cas d’indignité :

1 – la condamnation pour attentat à la vie du de cujus


Est donc exclu comme indigne, l’héritier condamné pour avoir donné ou tenté de donner la mort
au défunt.
En effet, selon une vieille formule : « on n’hérite pas de celui que l’on assassine ». Par conséquent,
il faut qu’il y ait eu des poursuites et qu’une condamnation ait été prononcée pour homicide ou tentative

6
d’homicide volontaire. Ainsi, l’homicide par imprudence ou des coups et blessures ayant entraîné la mort
sont sans intention de donner la mort ne peuvent être retenus.
2 – L’accusation calomnieuse
Est exclu de la succession, l’héritier condamné pour dénonciation calomnieuse de son auteur,
susceptible d’entraîner, à l’encontre de ce dernier, la peine capitale.
Cette seconde cause suppose la dénonciation du défunt ou une plainte portée contre lui.
Cette accusation doit être capitale, i.e. que l’héritier doit avoir accusé le défunt d’un crime passible
de la peine de mort.
Et accusation doit également avoir été jugée calomnieuse, i.e. que l’héritier doit avoir été
condamné à ce titre.
3 – La non dénonciation du meurtre du de cujus
Est indigne, et donc exclu de la succession, l’héritier majeur qui, instruit du meurtre du de cujus,
ne l’a pas dénoncé à la justice. En effet, on considère qu’il avait le devoir d’obtenir autant que possible, la
condamnation du meurtrier. S’en abstenir est une faute envers la mémoire du défunt.
L’héritier doit être majeur, il est tenu de dénoncer le meurtre et non le meurtrier. Toutefois,
l’héritier majeur échappe à l’indignité si le meurtrier est son conjoint ou un proche parent, (art728). Dans
ce cas, la dénonciation cesse d’être un devoir moral pour lui.
L’indignité découle de la décision de justice.

B – les effets de l’indignité


L’indignité fait obstacle à la succession légale: elle écarte l’indigne de la succession ab intestat,
mais non de la succession testamentaire ou contractuelle4. C’est une peine privée rétroactive.
1 - Le caractère limité de cette peine
L’indignité a naturellement pour effet d’exclure l’indigne de la succession.
Etant une peine privée, pour cette raison, elle ne frappe directement que la personne qui se trouve
dans l’un des cas énumérés à l’art 727. L’indignité est donc personnelle au coupable. C’est ainsi que des
enfants de l’héritier indigne, venant à la succession de leur chef et sans représentation, ne sont pas exclus
par la faute de leur père ou de leur mère, mais celui-ci (ou celle-ci) ne pourra pas exercer sur les biens de
la succession son droit de jouissance légales (art 730 c. civ.).
En plus, l’indignité ne ‘applique qu’à la succession même du défunt envers qui a été commise la
faute prévue par la loi et non à toute autre succession qui pourrait s’ouvrir ultérieurement dans la famille.
Il s’ensuit que, curieusement par le jeu des ricochets, l’indigne finira par recevoir les biens dont il été
d’abord privé.
Exemple : un père de 02 enfants est tué par l’un d’eux. Le meurtrier n’hérite pas de lui. Son frère
recueille toute la succession. Mais si, ce frère meurt plus tard sans enfant, toute sa fortune, y compris celle
qui provient du père va à l’indigne.
De même, l’indigne n’est pas privé du droit de représenter plus tard le de cujus dans une autre
succession, i. e. qu’il peut être appelé à une succession en représentation de la personne à laquelle il était
indigne de succéder ; ainsi une personne indigne de succéder à son père peut recueillir la succession de
son grand-père en représentation de son père prédécédé.

2 – La rétroactivité de l’indignité
En outre, l’indignité écarte celui qui en est frappé, rétroactivement : l’indigne n’a jamais été
héritier. Aussi, si l’indigne est a en possession des biens du défunt avant la découverte de son indignité,

4
Ici s’appliquent les articles 955 et 1046 c. civ. qui permettent la révocation de libéralités pour cause d’indignité.
7
d’une part, il devra les restituer, et d’autre part, considéré comme possesseur de mauvaise foi, il devra
rendre les fruits et revenus dont il ont eu la jouissance depuis l’ouverture de la succession (art 729 c. civ.)5.
En plus, les actes de disposition qu’il aura accomplis, en consentant des droits réels à autrui sont
en principe résolus. En effet, n’ayant aucun droit, il n’a pu transmettre à autrui. Ceux qui ont traité avec lui
connaissent le sort des acquéreurs a non domino, sous réserve, néanmoins de l’application de la théorie de
l’héritier apparent.

§ 3 – LA VOCATION HEREDITAIRE
Pour succéder, il faut être appelé à recueillir tout ou partie de la succession par la loi : c’est la
vocation héréditaire. Il faut être parent du défunt par le sang et non par alliance conformément à l’ancienne
maxime : « l’alliance n’hérite pas » (bien sûr en dehors du conjoint survivant et de la famille adoptive).

CHAPITRE I – LA DEVOLUTION DE LA SUCCESSION PAR LA LOI : « SUCCESSION


LEGALE » OU « SUCCESSION AB INTESTAT »
Elle représente le droit commun, la toile de fond du droit des successions 6, car les règles légales
s’appliquent à défaut de manifestation de volonté contraire exprimée, soit bilatéralement dans une
convention, soit unilatéralement par le défunt.
La loi détermine à cet effet les différentes catégories d’héritiers et leur ordre de succession suivant
la nature de leur lien avec le de cujus. Aussi existe-t-il des règles ordinaires de dévolution qui déterminent
les droit successoraux des héritiers ayant avec le de cujus un lien de parenté.
La loi détermine également les droits successoraux du conjoint survivant.
Au cas où ces deux catégories font défaut pour une raison ou un autre, la loi fait appel à l’Etat.
Elle est donc considérée comme un testament présumé, mieux, un devoir de famille.

SECTION I – LES DROITS SUCCESSORAUX DES HERITIERS AYANT AVEC LE DE CUJUS


UN LIEN DE PARENTE

Elle se réalise suivant des principes directeurs dont la mise en application permet de déterminer
les droits successoraux des différentes catégories d’héritiers.

§ 1 - LES REGLES OU PRINCIPES DIRECTEURS DE LA DEVOLUTION


DE LA SUCCESSION AUX HERITIERS

La vocation héréditaire par l’effet de la loi est fonction de deux éléments : l’ordre et le degré qui
ont pour correctifs la fente et la représentation.
En effet, la détermination des héritiers est fondée sur trois principes qui se combinent entre eux
et dont le second et le troisième limitent la portée du 1er ou tout au moins, en sont des correctifs.
- Le 1er principe est la classification des héritiers en ordres et en degré.

5
L’héritier exclu de la succession pour cause d’indignité « est tenu de rendre tous les fruits et tous les revenus dont il a eu la jouissance
depuis, l’ouverture de la succession (art. 729 c.civ.).
6
Comme le régime matrimonial légal représente le droit commun des régimes matrimoniaux.
8
- Le 2è est celui de la fente.
- Le 3è est celui de la représentation.
L’ordre, le degré, la fente et la représentation constituent les principes directeurs de la dévolution
successorale.

A- La classification des héritiers en ordre et par degré

I - L’ordre
La classification principale se fait par ordres, i. e. par catégories de successibles.
C’est la catégorie héréditaire à laquelle appartient le successible et qui donne vocation à un rang
déterminé.
Elle désigne une catégorie de parents, soit en ligne directe – descendante (ordre des descendants)
ou ascendante (l’ordre des ascendants) – soit en ligne collatérale (ordre des collatéraux) i. e les successibles
ayant avec le de cujus un auteur commun.
En effet, entre les héritiers, la loi établit plusieurs ordres suivant un rang de préférence :
- d’abord, l’ordre des descendants, enfants et autres descendants du défunt (petits-fils)
- ensuite, celui des privilégiés qui est un ordre mixte comprenant deux groupes :
• d’une part les ascendants privilégiés i.e. père et mère du défunt,
• d’autre part les collatéraux privilégiés i.e. frères et sœurs du défunt et leurs descendants
(neveux, nièces)
- puis les ascendants ordinaires i.e. les ascendants au 2e et 3e degré et au-delà s’il en existe i.e. les
grands parents et arrières grands parents.
- Enfin l’ordre des collatéraux ordinaires qui comprend les collatéraux autre que les collatéraux
privilégiés i.e. les oncles et tantes, les cousins et cousines, jusqu’au 6e degré.
Tels sont les 4 ordres d’héritiers par le sang.
Mais depuis une loi de 1957, le conjoint survivant, considéré, à l’époque du droit civil comme un
étranger à la famille alors fondée sur la consanguinité, s’est installée finalement lorsqu’il succède en
propriété, entre le 3e et le 4e ordre, i.e. au sein même de la famille, encore que sa vocation héréditaire
demeure particulière.
Le principe est que les ordres sont rangés dans un rang de préférence : tous les parents d’un ordre
donné passent avant ceux d’un ordre suivant. A titre d’exemple, aucun ascendant n’est appelé à la
succession tant qu’il y a des descendants, même éloignés.

II - Le degré
La classification par degré est subsidiaire ; elle ne joue qu’à l’intérieur de chaque ordre pour faire
venir effectivement à la succession le parent le plus proche en degré dans l’ordre considéré.
Exemple, si la succession est dévolue à l’ordre des descendants, ce sont les enfants (1er degré) qui
héritent par priorité sur les petits-fils (2nd degré). Si elle est dévolue à l’ordre des ascendants, les père et
mère héritent par priorité aux grands-parents.
L’art 735 c.civ. en donne la définition lorsqu’il déclare que « la proximité de parenté qui
s’établit par le nombre de génération ; chaque génération s’appelle un degré ».
Le degré désigne donc l’intervalle qui sépare deux générations tant en ligne directe qu’en ligne
collatérale.
a) en ligne directe, i.e. dans les rapports des héritiers qui descendent les uns des autres (arrière -
grand-père, grand père, père, fils petit fils) on applique le système de l’échelle simple et on compte
un degré entre chacune des générations qui séparent l’héritier du de cujus ; ainsi, le père et le fils
sont au premier degré l’un par rapport à l’autre, le grand père et le petit fils sont au 2e degré (le fils
est au 1er degré et le petit-fils au second, le père est au 1er et le grand - père au second).

9
b) En ligne collatérale s’applique le système de l’échelle double, en additionnant le nombre de
générations qui séparent l’héritier et le de cujus. Pour cela, on remonte à l’auteur commun, et on
redescend de celui-ci pour s’arrêter à la personne dont on recherche le lien de parenté par rapport
à la 1ère. Le degré le plus proche dans cette ligne est le 2nd ; ainsi deux frères et sœurs sont au 2e
degré, un oncle et un neveu au 3e degré (une génération entre l’oncle et l’auteur commun et deux
générations entre celui-ci et le neveu), deux cousins germains sont au 4e degré et ainsi de suite.
De cette double classification, et précisément du fait que la 1ère est principale et la 2nde subsidiaire, il
résulte qu’un parent déterminé peut parfaitement être écarté par un parent d’un degré plus éloigné, si
celui-ci appartient à un ordre plus préférable.
Exemple : l’arrière-petit-fils, 3è degré mais dans l’ordre des descendants passent avant le père, 1 er
degré, mais dans l’ordre des ascendants).
Il en résulte 4 ordres d’héritiers :
- le 1er est celui des descendants
- le 2nd est un ordre mixte composé des ascendants privilégié et des collatéraux privilégiés ;
- le 3è est celui des ascendants ordinaires ;
- le 4è celui des collatéraux ordinaires
Mais le code a apporté deux correctifs au jeu de l’ordre et du degré par le jeu de la fente et de la
représentation.

B - la fente et la représentation les correctifs


I - la fente
Dans le cas où une succession est dévolue soit à des ascendants, soit à des collatéraux, elle se
divise en deux parts égales (art. 733 c. civ.).
La fente consiste donc en une pré-division de la succession, la moitié de celle-ci étant attribuée
aux héritiers de la ligne paternelle (parents consanguins), l’autre moitié aux héritiers de la ligne maternelle
(parents utérins).
La ligne est en effet la parenté considérée par rapport à celui, père et mère, d’où elle procède. Il y a
donc deux lignes, une ligne paternelle et une ligne maternelle.

a) – Le domaine d’application de la fente


La fente ne s’est jamais appliquée dans le cas d’une succession dévolue aux descendants, car ceux-
ci se rattachent à la fois à la ligne paternelle et à la ligne maternelle.
La fente ne s’applique pas non plus dans les rapports entre les collatéraux et les autres successibles,
ce alors même que le collatéral privilégié ne serait parent du de cujus que dans une ligne.
Exemples : Un frère utérin a les mêmes droits en face du père qu’aurait un frère germain. Ce même frère
utérin exclut tout autre parent, même du côté paternel, notamment les grands-parents paternels, (art. 752
in fine).
La fente joue par contre dans les cas suivants :
- dans les rapports des collatéraux privilégiés les uns les autres, i.e. pour la répartition entre eux de la
part de succession qui leur revient. La moitié va aux frères consanguins, la moitié va aux frères
utérins ; Quant aux frères germains, ils participent à la répartition des deux côtés ;
- dans les rapports entre ascendants appartenant aux deux lignes. Ainsi, au cas où le de cujus ne laisse
que des ascendants, sans descendants, ni collatéraux privilégiés, une moitié ira aux ascendants
paternels, l’autre aux ascendants maternels.
- dans les rapports entre collatéraux ordinaires appartenant aux deux lignes, la moitié allant aux
collatéraux de chaque ligne.
Il découle de ces applications de la fente que la succession n’est dévolue en totalité aux parents d’une
ligne qu’en l’absence de tout parent de l’autre.
Mais la fente peut ne représenter pas seulement une dérogation à la règle du degré.
10
b) – La fente, dérogation au principe de la hiérarchie des ordres et à la règle du degré
La fente se définit comme une technique dérogatoire au classement par degré à l’intérieur d’un même
ordre.
Supposons que le de cujus ne laisse que des ascendants. D’un côté son père, et l’autre sa grand-
mère maternelle ; si la fente n’existait pas, le père appartenant à un ordre (privilégié) qui vient avant celui
auquel appartient la grand-mère (ascendant ordinaire) recueillerait la totalité de la succession. La fente
conduit, au contraire, à diviser la succession en deux ; le père, représentant la ligne paternelle, prend la
moitié, et l’autre moitié est dévolue à la grand-mère maternelle représentant la ligne maternelle.
Dans ce cas, la fente constitue une dérogation au principe de la hiérarchie des ordres.
Elle est également une dérogation à la règle du degré. Ainsi, conformément à l’art 733 c. civ. la
fente joue à l’intérieur de l’ordre des collatéraux ordinaires.
Exemple : le de cujus ne laisse comme seuls héritiers au degré successible, dans la ligne maternelle,
qu’un cousin issu du germain (6e degré). Le cousin germain d’un degré plus proche, devrait venir avant le
cousin issu du germain de degré plus éloigné et prendre toute la succession. La fente conduit au contraire, à
attribuer à chacun d’eux la moitié de la succession.

c) – Combinaisons entre les droits des héritiers et ceux du conjoint survivant


La fente, mécanisme déjà complexe, est souvent perturbée lorsque les droits du conjoint survivant
s’interfèrent avec ceux des héritiers de sang. On relève deux interférences essentielles :
- d’une part, la présence du conjoint en face d’ascendants d’une seule ligne fait obstacle à la
dévolution d’une ligne à l’autre. Les ascendants existant ne recueillent alors que la moitié de la
succession, l’autre moitié est dévolue au conjoint survivant (art. 767 al. 2).
- D’autre part, la présence du conjoint survivant en face de collatéraux ordinaires exclut ces derniers.
Le conjoint succède alors pour le tout, par préférence à eux.

II - La représentation
La représentation est une institution en vertu de laquelle certains successibles descendant d’une
même souche, et en concours avec des successibles d’autres souches, exercent dans la succession des droits
qu’y aurait eus leur ascendant prédécédé s’il avait survécu au de cujus. C’est donc une fiction juridique.
La représentation déroge à la règle du classement des héritiers par degré à l’intérieur d’un même
ordre.
A cet effet, l’art 739 c.civ. définit la représentation comme une fiction de la loi, dont l’effet est de
faire enter le représentant dans la place, dans le degré et dans le droit du représenté.
Prenant la place du représenté, le représentant vient en concours avec des héritiers d’un degré plus
proche que le sien.
La représentation est donc un moyen employé par le législateur pour éviter que l’ordre des
successions qu’il a établi ne soit faussé par des décès contraires à l’ordre naturel (par exemple, le cas d’un
fils décédant avant son père)
Exemple : Supposons qu’un homme ait eu deux enfants (F1 et F2), l’un d’eux, (F2) meurt avant lui, en
laissant deux enfants (PF1 et PF2) qui sont les petits fils du de cujus. Si la représentation n’existait pas,
l’intégralité de la succession serait dévolue au fils survivant, qui est héritier au premier degré, au détriment
par conséquent des petits enfants, héritiers du 2nd degré.
La représentation permet aux petits enfants de venir prendre la place de leur père prédécédé et
concourir avec leur oncle à la succession de leur grand-père.
(F1 = ½ ; PF1 et PF2 > ½ donc PF1 = ¼ et PF2 = ¼).
La représentation se justifie donc au nom de l’équité. Elle traduit un devoir égal du de cujus à l’égard
des diverses souches issues de lui.

11
a) – le domaine de la représentation
Elle ne joue qu’en cas de succession ab intestat, à l’exclusion de la succession testamentaire7.
Et en matière de succession ab intestat, la loi limite la représentation à la ligne directe
descendante (art 740) et aux collatéraux privilégiés (art 742).
Dans l’ordre des descendants, l’article 740 dispose que, là où elle est admise, la représentation a
lieu à l’infini. Elle permet non seulement aux descendants du 2d d° de concourir avec ceux du 1er degré,
mais elle le permet aussi à ceux du 3è ou 4è degré.
Exemple : le de cujus a eu 2 fils, l’un est vivant, l’autre est décédé ; les enfants du fils décédé sont
également décédés. La 3è génération (les arrières petits fils du père des deux et petits fils du frère prédécédé)
viendra en concours avec la 1ère (1er d°).
Dans l’ordre des collatéraux privilégiés, la représentation suppose que le de cujus (qui par
hypothèse ne laisse aucun descendant) a eu plusieurs frères et/ou sœurs dont certains ou tous sont morts
avant lui. Les frères et sœurs prédécédés seront tous représentés par leurs propres enfants et descendants.
Autrement dit, vont recueillir cette succession, les neveux et nièces, les petits-neveux et petites-nièces du
de cujus.
Par contre, la représentation ne joue pas dans l’ordre des ascendants (art 741) car elle ne joue pas à
rebours. Exemple : Un grand père ne peut pas représenter son fils dans la succession de son petit-fils. Si celui-
ci décède en laissant un frère, ce dernier prendra toute la succession et non pas les ¾ seulement comme
l’aurait voulu la représentation jouant au profit du grand père représentant son fils.
De même, si le de cujus laisse dans une ligne (par exemple ligne paternelle), son grand père, ainsi
que sa grand-mère maternelle décédé, son arrière-grand-père et son arrière-grand-mère, ceux-ci ne sont
appelés par représentation de leur fille, la grand-mère.
Elle ne joue non plus dans l’ordre des collatéraux ordinaires.
Exemple : le de cujus a eu du côté de son père 2 cousins germains dont l’un est mort avant lui. Le cousin
germain vivant prend toute la part dévolue à la ligne paternelle. Les enfants du prédécédé ne prennent rien.

b) – Les conditions de la représentation


La représentation est soumise à des conditions :
- Le prédécès ou la disparition (art 91) du représenté : d’une part, il est nécessaire que le représenté
soit décédé, car l’art 744 dispose « on ne représente pas les personnes vivantes » et qu’il ait été capable
de succéder s’il avait vécu. A cet effet, on ne peut représenter ni un indigne (art 730) ni celui qui a
renoncé à la succession (art 787).
Exemple : le de cujus a 2 enfants A et B. A accepte la succession et B y renonce ou en est exclu pour
indignité. Les enfants de B ne le représenteront pas, tout revient à A.
- La capacité du représenté ou l’absence d’indignité du représenté: d’autre part, le représentant doit
avoir lui-même la capacité successorale, i. e. ne pas être indigne au regard de la succession du cujus
et un être un enfant du représenté ; mais il n’est pas nécessaire qu’il ait accepté la succession ou
qu’il ait été frappé d’indignité à l’égard du représenté.

c) – les effets de la représentation


- Le partage par souches : la représentation conduit au partage par souche (art. 743 (c.civ.). Aussi,
en cas de pluralité de représentants, ils prennent tous ensemble la part qu’aurait recueillie le représenté s’il
avait survécu, rien de moins, rien de plus.
Exemples :
• 2 enfants, dont l’un est vivant, l’autre prédécédé et ayant laissé 3 enfants. L’enfant vivant recueille la moitié
de la succession, l’autre moitié va aux 3 petits-enfants, dont 1/6è chacun.

7
civ 2 juillet 1924, sp 1926. 1. 102
12
• 2 enfants, tous 02 prédécédés, mais l’un a laissé 01 enfant Y, l’autre 04 A, B, C, D. Il y a la moitié pour Y
qui est seul de son côté, l’autre moitié est partagée entre A, B, C, D qui sont 04 de leur côté, soit 1/8è
chacun.
De ces 2 exemples, il ressort que, tantôt la représentation fait concourir les héritiers de degré inégal,
tantôt elle fait attribuer des parts inégales à des héritiers de même degré
- Le partage par tête lorsque la représentation n’est pas admise :
Exemple : les deux fils sont tous des renonçants ou des indignes, ou bien l’un des deux est renonçant l’autre
indigne. Les cinq (05) petits-fils succèdent, mais de leur chef et non par représentation (art. 787 c. civ.).
Ils viennent alors à égalité : on dit qu’ils partagent par tête et chacun aura le 1/5è de la succession.

§ 2 - L’APPLICATION DES PRINCIPES : LA DETERMINATION DES DROITS


SUCCESSORAUX DES DIFFERENTS ORDRES D’HERITIERS

Il s’agit de combiner les trois principes directeurs sus analysés : classement par ordre et par
degré, fente et représentation successorale.
La succession est dévolue suivant un ordre et on en distingue quatre : d’abord les descendants ;
en leur absence aux ascendants et collatéraux privilégiés ; puis aux ascendants ordinaires ; enfin aux
collatéraux ordinaires.

A - l’ordre des descendants


C’est l’ordre appelé au 1er rang et qui exclut tous les autres. Un descendant, aussi éloigné soit-il,
prime tout autre héritier.

I – La composition de l’ordre des descendants


Dans son préambule, la constitution du Cameroun consacre l’égalité de tous les hommes en
droits et en devoirs. Cette déclaration abolit toutes les discriminations, telles que celles qui sont fondées
sur le sexe et la primogéniture.
L’article 745 alinéa 1 du Code civil consacre aussi cette égalité en ces termes « Les enfants ou
leurs descendants succèdent à leurs père et mère, aïeuls, aïeule ou autres ascendants, sans
distinction de sexe, ni de primogéniture, et encore qu’ils soient issus de différents mariages ».
L’alinéa 2 précise qu’ « ils succèdent par égales portions et par tête, quand ils sont tous au 1er degré
et appelé de leur chef : ils succèdent par souche, lorsqu’ils viennent tous ou en partie par représentation. »
Ce texte vise surtout les enfants légitimes, légitimés et adoptifs8.
Les enfants naturels, simples ou adultérins, reconnus, bien qu’ayant la même vocation
successorale que les légitimes, ne succèdent pas par égales portions comme eux, ils ont la moitié de ce qu’il
aurait eu s’ils avaient été légitimes (art 758 c. civ.). L’art 756 subordonne leur droit successoral à la
reconnaissance i.e. s’ils succèdent à leurs père et mère, il faut que leur filiation soit légalement établie,
qu’ils aient été reconnus, or, à l’égard de la mère, l’accouchement vaut reconnaissance.

8
Les enfants adoptifs, qu’ils bénéficient de l’adoption plénière (art. 358 c. civ.) ou d’une adoption simple (art. 368 c.civ.) font partie de
l’ordre des descendants. Cependant, si l’enfant bénéficiaire d’une adoption plénière perd tout droit dans sa famille par le sang pour devenir
héritier de ses ascendants adoptifs, l’héritier simple garde ses droits héréditaires dans sa famille d’origine (art. 364 c. civ.). L’adopté simple,
contrairement à celui qui bénéficie d’une adoption plénière, n’acquiert cependant pas la qualité d’héritier réservataire à l’égard des
ascendants de l’adoptant.
Tout enfant adoptif vient non seulement dans la succession des adoptants, mais encore des ascendants de l’adoptant.
Les descendants de l’enfant adoptifs ont les mêmes droits que ce dernier dans la succession des adoptants et de leurs ascendants, que ces
descendants soient légitimes, naturels ou adoptifs. En effet, l’article 368 assimile à l’adopté simple uniquement « ses descendants
légitimes ». Mais ses descendants naturels (art.757 c.civ.) et ses descendants adoptifs (art. 368c.civ.) ont les mêmes droits que les enfants
légitimes dans la succession de leurs ascendants.
13
Une discrimination reste quand même présente à l’égard de l’enfant naturel sur la consistance
de ses droits successoraux. 9
Les enfants naturels incestueux ne peuvent avoir de filiation légalement établie à l’égard de leurs
parents que si la cause d’inceste tombe. En cas d’inceste en ligne absolue, i. e. entre parents en ligne directe
ou collatérale au degré prohibé ; ce lien ne peut être établi.
L’égalité de sexe dans le droit de succéder est renforcée par l’article 21. 2 du Protocole a la Charte
Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples Relatif aux Droits des Femmes qui dispose que, « Tout comme
les hommes, les femmes ont le droit d’hériter des biens de leurs parents, en parts équitables ».

II – Les modalités de la dévolution de la succession dans l’ordre des descendants


C’est la règle du degré qui prévaut. Mais, elle est parfois atténuée par la représentation.
Aussi, la dévolution est-elle régie par le classement selon le degré qui se présente lui-même sous
un double aspect.
- D’une part, les plus proches en degré excluent les plus éloigné.
- D’autre part, entre héritiers de même degré (entre enfants notamment), le partage se fait à parts
égales.
Comment ces descendants succèdent-ils ?
Ils succèdent par tête quand ils sont tous du 1er degré. Par portions égales quand ils sont tous
légitimes ou naturels, mais par moitié si les naturels sont en concours avec les légitimes.
Ce double principe est corrigé par la représentation, lorsque les conditions de cette représentation
sont réunies.
Aussi, tout enfant prédécédé – pourvu qu’il n’ait pas encouru l’indignité par rapport au de cujus- est
représenté par ses propres descendants. Ce qui provoque le partage par souches et a en conséquence pour
résultat :
- soit de faire concourir des descendants de degré inégal ;
- soit de faire recueillir des parts inégales par des descendants du même degré.
Autrement dit, les descendants succèdent par souche, lorsqu’ils viennent tous ou en partie par
représentation i.e. lorsque l’un d’eux, plusieurs d’entre eux, ou tous sont morts en laissant une postérité
(art 745 al 2)
Ex : si l’un des enfants sur 3 est mort au moment du décès du père, ses 2 enfants (petits-enfant du de cujus)
le représenteront dans la succession i.e. qu’ils se partageront la part de leur père prédécédé ; le partage par
tête aurait conduit au contraire, à diviser la succession en 4 et à donner le ¼ à chacun des héritiers en
présence.
La présence d’un seul des descendants, quelle que soit la qualité de sa filiation, exclut tous les autres
parents par le sang.

B - L’ordre des privilégiés, ascendants privilégiés et collatéraux privilégiés

Cet ordre n’est évidemment appelé à la succession qu’à défaut de tout descendant.

I - la composition de l’ordre des ascendants et des collatéraux privilégiés10


Il s’agit des héritiers appartenant au 2nd degré.

9
Même si la loi camerounaise continue de faire un distinguo entre les enfants légitimes et les enfants naturels.
En effet, l’article 489 de l’avant-projet du Code des personnes et de la famille indique que « les descendants, sans distinction de sexe,
succède aux ascendants. Ils succèdent à part égale et par tête ».
De surcroît, la convention CEDEF ratifiée par l’Etat camerounais voudrait que les enfants qu’ils soient naturels ou légitimes disposent
des mêmes droits au niveau du partage des biens laissés par leur père.

10
Le qualificatif de privilégiés indique qu’il s’agit, des 2 côtés, des parents les plus proches.
14
Les ascendants privilégiés sont le père et la mère du de cujus.
Les collatéraux privilégiés sont les frères et sœurs et leurs descendants (neveux, nièces, petits-
neveux, petites – nièces, etc.) et ceux-ci ont cette qualité aussi bien quand ils viennent de leur chef que
quand ils viennent par représentation.
Aussi, à défaut de descendants (légitimes, adoptifs ou naturels), la succession est dévolue aux
ascendants privilégiés (légitimes ou naturels) que sont le père et la mère du de cujus, et aux collatéraux
privilégiés (légitimes ou naturels) i.e. les frères et sœurs du de cujus et à leurs descendants, car la
représentation joue.
C’est ce qu’expriment les articles 746 à 755 c.civ.

II – Les modalités de dévolution de la succession à l’ordre des privilégiés


Si le de cujus ne laisse que des ascendants et s’ils sont tous deux présents, chacun ne prend
que la moitié, le reste va aux ascendants les plus éloignés de l’autre ligne par le jeu de la fente.
Par contre, lorsqu’il y a les ascendants et les collatéraux privilégiés, la détermination des
droits respectifs des ascendants et des collatéraux privilégiés fait ressortir trois situations, sans application
de la fente :
1°) – le de cujus laisse à la fois des collatéraux et des ascendants privilégiés, (), la dévolution
s’opère de moitié pour les frères et sœurs, quel qu’en soit le nombre, et ½ pour les père et sa mère
ascendants privilégiés, soit ¼ pour chacun des père et mère.
2°) – Le de cujus laisse des collatéraux privilégiés et un seul de ses père et mère, les collatéraux
ont les ¾, et l’ascendant survivant a le ¼.
3°) – Le de cujus ne laisse que des collatéraux privilégiés, ceux-ci prennent tout, excluant tous
les autres parents.
Toutefois, la fente intervient dans la répartition entre les collatéraux privilégiés de la part
globale qui leur revient : la moitié, les ¾ ou la totalité.
- S’ils sont tous du même lit que le de cujus, il n’y a pas de difficulté, les collatéraux les plus
proches en degré prennent tout ce qui revient au groupe, en excluant les plus éloignés (les frères excluent
les neveux et les nièces) et ils se partagent à égalité. Toutefois, les neveux et nièces peuvent recueillir par
le jeu de la représentation.
- si les frères et sœurs sont de lits différents, on procède à la fente. La part globale des
collatéraux privilégiés est divisée en deux portions : une pour les frères et sœurs consanguins (ou leurs
descendants), une pour les utérins (ou leurs descendants). Et s’il y a des frères et sœurs germains, ils
participent à la répartition des deux côtés, puisqu’ils appartiennent aux deux lignes.

C - l’ordre des ascendants


Il faut souligner que lorsqu’il n’existe pas de collatéraux privilégiés, les père et mère perdent
leur qualité de privilégiés. Dans ce cas, ils font partie du 3è ordre. Cet ordre comprend alors les père et mère
légitimes, adoptifs ou naturels. Et on applique la fente. Lorsque les deux parents survivent à leur enfant, la
succession se partage par moitié. Lorsqu’il n’y a que le père ou la mère, celui-ci ne recueille que la moitié,
l’autre moitié va aux ascendants ordinaires, même éloignés de l’autre ligne.
Mais, lorsqu’ils ont la qualité de privilégiés, les autres ascendants, à savoir, les grands - parents et
arrière-grands-parents du défunt forment ce 3è ordre qui dans ce cas est l’ordre des ascendants ordinaires,
avec application de la fente dans les mêmes conditions qu’avec les père et mère.
Les ascendants ordinaires sont dont tous les ascendants autres que le père ou la mère i.e. les grands
parents. Lorsque le défunt laisse des ascendants ordinaires, il y a fente de la succession, avec exclusion dans
chaque ligne, des ascendants de degré plus éloigné ; l’ascendant qui se trouve au degré plus proche,
recueille la moitié i.e. affectée à sa ligne.

15
D - l’ordre des collatéraux ordinaires
Il s’agit des oncles et tantes et de leurs descendants.
La vocation des collatéraux ordinaires s’étend jusqu’au 6è degré (art. 755 c.civ.).
La répartition de la succession à l’intérieur est réglée par la fente qui domine le classement
par degré. S’il y a des collatéraux ordinaires dans les deux lignes, le partage se fait par moitié. Mais, à
l’intérieur de chaque ligne, le plus proche exclut les plus éloignés et ceux du même degré concourent par
têtes. S’il n’y a de collatéraux ordinaires que dans une ligne, ils recueillent toute la succession.
Mais aux termes de l’art 765 c.civ, si le défunt ne laisse que des collatéraux ordinaires et le
conjoint survivant, ce dernier recueille toute la succession, et il recueille la moitié de la succession lorsque
le défunt ne laisse dans une ligne que des collatéraux ordinaires (art 766 c.civ.). Par ailleurs, à défaut de
frères et sœurs ou des descendants d’eux et à défaut d’ascendants dans une ligne, la succession n’est pas
dévolue aux collatéraux ordinaires ; elle l’est en totalité aux ascendants de l’autre ligne (art 753 c.civ.).
Les collatéraux ordinaires ne viennent donc plus à la succession que s’il n’y a pas de conjoint
survivant et que si le défunt ne laisse d’ascendant dans aucune des deux lignes.
Dans ce cas, la fente joue, et dans chaque ligne, le collatéral le plus proche exclut le plus éloigné
(art 753 c.civ.). S’il y a concours de parents collatéraux au même degré, ils partagent par tête, et s’il n’y a de
collatéraux que dans une ligne (en l’absence du conjoint survivant), la totalité de la succession leur est
dévolu (art 755 al 3 c.civ.).

SECTION II - LA VOCATION HEREDITAIRE DU CONJOINT SURVIVANT

Elle est définie par l’article 767 c.civ.


Le conjoint survivant, autrefois considéré comme un étranger, dans une famille fondée sur la
consanguinité n’était appelé à recueillir la succession de son conjoint que lorsque le de cujus ne laissait
aucun parent au degré successible, ni dans une ligne, ni dans l’autre. Il n’était à cet effet appelé qu’avant
l’Etat, i.e. à défaut des collatéraux ordinaires. Il avait alors la qualité de successeur irrégulier. Cette
exclusion s’expliquait aussi par le souci de la conservation des biens dans la famille. Dans ce cas, il recueillait
l’intégralité de la succession.
Mais, avec la promotion de la famille –foyer, la situation du conjoint survivant a également
connu une promotion et a cessé d’être classé parmi les successeurs irréguliers, il est désormais un
successeur régulier au même titre que les parents par le sang.
C’est ainsi que l’article 21. 1 du Protocole a la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des
Peuples Relatif aux Droits des Femmes dispose, concernant le Droit de succession que « La veuve a le droit à
une part équitable dans l’héritage des biens de son conjoint. La veuve a le droit, quel que soit le régime
matrimonial, de continuer d’habiter dans le domicile conjugal. En cas de remariage, elle conserve ce droit si le
domicile lui appartient en propre ou lui a été dévolu en héritage ».
Ainsi, bénéficie-t-il soit des droits successoraux en usufruit, soit des droits successoraux en
pleine propriété en fonction des successibles avec qui il se retrouve en concours.
Quoi qu’il en soit, la loi n’accorde de droits successoraux au conjoint survivant qu’autant que certaines
conditions relatives à la situation matrimoniale de celui-ci sont remplies.
1°) - Il faut tout d’abord qu’il n’y ait pas eu divorce, sinon le survivant n’est pas conjoint, mais un ex-
conjoint. Le conjoint survivant n’est appelé à recueillir la succession de son conjoint qu’à la condition qu’il
ait encore la qualité de conjoint au moment du décès du conjoint prédécédé.
2°) – Il faut ensuite que le mariage n’ait pas été annulé, cependant, si le mariage est putatif, à cause de la
bonne foi du survivant, ce dernier hérite du prédécédé, à la condition que l’ouverture de la succession soit
antérieure au jugement de nullité.
3°) - En cas de séparation de corps (par jugement), le survivant conserve ses droits, car la séparation de
corps laisse subsister le mariage. L’époux séparé de corps est exceptionnellement privé de ses droits, si la
séparation de corps est prononcée contre lui i.e. si la séparation de corps est prononcée à ses torts exclusifs.
16
Les droits successoraux du conjoint survivant sont tantôt des droits en pleine propriété tantôt
des droits en usufruit.

§ 1 – la vocation en pleine propriété du conjoint survivant

Aux termes de l’article 767 al1 c.civ. « Lorsque le défunt ne laisse ni parent au degré successible, ni
enfants naturels, les biens de sa succession appartiennent en pleine propriété au conjoint non divorcé qui lui
survit et contre lequel il n’existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée ».
La quotité des droits successoraux en pleine propriété varie selon la proximité de parenté des
autres héritiers avec le de cujus. En principe, le conjoint survivant, appelé en pleine propriété à la
succession du conjoint prédécédé dans deux cas, peut recueillir soit la totalité, soit la moitié de la
succession:
- il est appelé à recueillir la totalité de la succession lorsque le défunt ne laisse aucun parent au degré
successible i.e. aucun parent jusqu’au 6e degré ou lorsqu’il laisse seulement des collatéraux
ordinaires (art 76 c.civ.) prime les collatéraux ordinaires, le conjoint survivant forme à lui tout seul
un ordre d’héritiers intermédiaire entre le 3è et le 4è, en quelque sorte, le 3è ordre bis.
- il est appelé à recueillir la moitié de la succession par le jeu de la fente, lorsque le de cujus ne laisse
dans l’une des lignes aucun parent au degré successible ou lorsque le défunt ne laisse dans l’autre
ligne que des collatéraux ordinaires. La fente joue entre les ascendants d’une ligne (ordre 3) et le
conjoint (ordre 3 bis)11.
En effet (depuis 1957) la famille qui met un obstacle à la vocation en pleine propriété du conjoint
survivant ne comprend plus les collatéraux ordinaires. Le conjoint survivant est donc installé, lorsqu ‘il
appelé en pleine propriété entre l’ordre des privilégiés et celui des collatéraux ordinaires qu’il prime.

§ 2 – la vocation en usufruit du conjoint survivant

Elle a été introduite par une loi du 09 mars 1891. Une loi du 29 avril 1925 l’a, par la suite augmentée.
L’appel en usufruit a pour but de concilier les intérêts en présence : assurer à la fois les revenus du
conjoint survivant et la conservation des biens dans la famille par le sang, car, au décès du conjoint
usufruitier, l’usufruit fera retour à celle-ci.
➢ une condition supplémentaire est nécessaire pour que le conjoint succède en usufruit : il ne
doit pas déjà succéder en pleine propriété. Car, la vocation en usufruit et la vocation en pleine propriété ne
se cumulent pas. L’article 767 c. civ. dispose : « Le conjoint survivant…qui ne succède pas à la pleine
propriété…a…un droit en usufruit. » En plus, il ne doit pas exister de jugement de séparation de séparation
de corps passé en force de chose jugée contre lui.
Lorsqu’il succède en usufruit, il recueille une quotité des droits, et cette vocation en usufruit a
une nature juridique.
Les problèmes principaux portent sur la quotité de l’usufruit et sur sa liquidation.
Par ailleurs, pour pallier les inconvénients économiques d’un démembrement de la propriété, la
loi permet aux nus-propriétaires de demander la conversion de cet usufruit en rente viagère.

A – la quotité des droits en usufruit du conjoint survivant

La vocation en pleine propriété étant incompatible avec la vocation en usufruit, cette dernière
existe dans les cas suivants :
- lorsque la succession est dévolue au 1er ordre d’héritiers, celui des descendants ;

11
Mais cette répartition ne s’applique pas si les ascendants sont naturels, l’article 765 disposant que la succession de l’enfant naturel
décédé sans postérité est dévolue au père ou à la mère qui l’a reconnu, le conjoint est donc en principe exclu. Cette règle aboutit de façon
générale à protéger le conjoint contre les ascendants légitimes et non contre les ascendants naturels au 1 er degré.
17
- lorsque la succession est dévolue au second ordre, celui des collatéraux privilégiés, en concours ou
non avec les ascendants privilégiés ;
- lorsque la succession est dévolue au 3ème ordre, ascendants, mais à condition que ceux-ci se trouvent
dans les deux lignes.
Celle-ci varie suivant la qualité des héritiers avec lesquels le conjoint est appelé à concourir : 3
situations sont prévues par la loi :
- sa vocation est du quart (1/4) en usufruit si le défunt laisse un ou plusieurs enfants légitimes
(légitimés, adoptifs) issus du mariage. Elle est d’une part d’enfant légitime le moins prenant, sans
qu’elle puisse excéder le ¼ si le défunt a des enfants légitimes d’un précédent mariage. Il en ressort
que les enfants communs retirent un bénéfice successoral de la présence de leurs frères ou sœurs
consanguins, car la part d’usufruit ainsi retranchée au conjoint survivant par la présence d’enfant
d’un 1er mariage n’est pas réservée à ceux-ci, elle est partagée entre tous les descendants venant à la
succession. Cette situation se produit lorsque quand un enfant légitime au moins étant né d’un
précédent mariage, le nombre d’enfants est tel que chaque enfant légitime a moins du quart de la
succession : il y a par exemple 03 légitimes et 01 naturel. La difficulté consiste au calcul des parts des
divers successeurs. Dans ce cas, on distribue d’abord la nue- propriété de l’hérédité (sur laquelle le
conjoint n’a aucun droit) suivant le concours entre les enfants légitimes et naturels, puis on répartit
l’usufruit en assimilant le conjoint à un enfant légitime de plus12.
- elle est de la moitié en usufruit si le défunt laisse des enfants naturels ou descendants légitimes
d’enfants naturels, des frères et sœurs, des descendants des frères et sœurs ou des ascendants. Si le
défunt laisse des collatéraux privilégiés (légitimes ou naturels) ou leurs descendants et des
ascendants (légitimes ou naturels), l’usufruit du conjoint grève uniquement la part des collatéraux,
il ne s’impute pas sur la part des ascendants (1/2 en pleine propriété s’il y en a dans les 2 lignes et ¼
en pleine propriété s’il n’y en a que dans une ligne), cette part correspond à leur réserve héréditaire
(art. 914 c.civ.) à laquelle il est interdit de porter atteinte.
- Elle est de la totalité dans tous les autres cas, quels que soient le nombre et la qualité des héritiers.
En cas de nouveau mariage l’usufruit du conjoint cesse s’il existe des descendants du défunt.

B – La liquidation de l’usufruit du conjoint survivant

Il s’agit des opérations de calcul de cet usufruit qui tendent à constituer successivement la masse
de calcul et la masse d’exercice de l’usufruit et l’imputation des libéralités.

I – La formation de la masse de calcul


L’usufruit est du quart ou de la moitié : mais le1/4 ou la ½ de quoi ?
Il s’agit de déterminer les biens qui figurent dans cette masse. En effet, le droit du conjoint
survivant est calculé d’après la masse des biens formant la succession du défunt. L’art. 767 al. 3 c.civ indique
que cette masse comprend deux sortes de biens :
- les biens dont le défunt était encore propriétaire au moment de son décès : ce sont les biens
existants ;
- ceux qui sont réunis fictivement à cette masse par l’effet du rapport. Ce sont ceux qui ont été donnés
entre vifs à un des successibles sans dispense de rapport ou ceux qui ont été légués avec obligation
de les rapporter en moins prenant (art. 843 c. civ.).

12
Exemple : une succession est partagée entre 3 enfants légitimes dont 01 au moins d’un précédent mariage, 01 naturel et le conjoint. Le
partage de la nue – propriété donne à l’enfant naturel 1/8, chaque enfant légitime a 7/24. Quant à l’usufruit, on fait comme s’il y avait 04
enfants légitimes au lieu de 03, l’enfant naturel a 1/10 de l’usufruit et chaque enfant légitime et le conjoint 9/40. Au total, chaque enfant
légitime a en pleine propriété 216/960 et en nue-propriété 64/960. L’enfant naturel a en pleine propriété96/960 et en usufruit 24/960. Le
conjoint a en usufruit216/960
18
II – La formation de la masse d’exercice
Il s’agit de déterminer les biens à soustraire de la masse de calcul pour apprécier l’étendue réelle
des droits du conjoint, la masse des biens qui pourront être effectivement grevés de l’usufruit du conjoint.
Pour former cette masse, on procède par soustraction, en excluant de la masse de calcul certains
biens.
Sont exclus de la masse d’exercice :
- les biens soumis au rapport (art. 767 al 3 c.civ.)13 ;
- les biens frappés d’un droit de réserve (art. 767 al. 4 c.civ.). Les biens qui font partie de la réserve
doivent parvenir aux réservataires en pleine propriété ;
- les biens frappés d’un droit de retour (art. 767 al. 5 c.civ.).

III- L’imputation des libéralités reçus par le conjoint survivant du défunt


Lorsque le de cujus a gratifié le survivant, le montant de ces libéralités est déduit du montant de
l’usufruit (art. 767 al 5), et l’art. 767 al.7 c.civ interdit même le cumul des libéralités avec l’usufruit.

C - la nature juridique de la vocation en usufruit du conjoint survivant


La vocation en usufruit du conjoint, droit de succession éventuel dans son principe.
La vocation en usufruit du conjoint est un droit de succession. Il en résulte que, outre l’absence
de divorce ou de séparation de corps à ses torts, le conjoint survivant ne doit pas non plus être indigne
conformément à l’article 727 c.civ.
Par ailleurs, il faut qu’il accepte la succession, car selon l’article 775 c.civ « nul n’est tenue
accepter une succession qui lui est échue »
Toutefois, la vocation en usufruit du conjoint est un droit éventuel dans son principe- cela tient
à ce que le conjoint survivant n’est pas un héritier réservataire. Il en résulte que son conjoint peut
l’avoir privé de toute vocation, en usufruit ou en pleine propriété, soit directement par voie testamentaire,
soit indirectement en léguant tous ses biens à d’autres personnes, en disposant de toute la quotité
disponible.
La vocation en usufruit du conjoint survivant, droit incertain dans sa réalisation au regard de la
masse de calcul et de la masse d’exercice.

§ 3 – la conversion de l’usufruit en rente viagère

Normalement l’usufruit du conjoint s’exerce en nature ; il consiste à percevoir les revenus


produits par tel ou tel bien de la succession, suivant un partage entre l’usufruitier et les nus-propriétaires.
Ainsi, au lieu que le conjoint jouisse de tels ou tels biens en nature, il ne percevra chaque année
qu’une prestation pécuniaire. L’exploitation et l’administration même des biens, la perception des revenus
resteront alors aux héritiers (nus – propriétaires).
L’usufruit légal du conjoint ne peut être converti qu’en rente viagère, jamais en capital.

I – Le droit à la conversion

Le droit de demander la conversion n’appartient qu’aux héritiers à qui l’existence d’un usufruit
risque d’être préjudiciable. Le conjoint survivant, qui souhaiterait se libérer des charges de l’administration
des biens, n’a pas le droit de la réclamer.

13
Exemple : Il y a 2000 000 de biens existants et 8000 000 de biens rapportés. Le de cujus ne laisse que des collatéraux privilégiés :
usufruit de 1/2. on a masse de calcul = 2000 000+8000 000 = 10 000 000 ; usufruit légal de ½ = 5000 000, (5000 000= nue – propriété)
mais la masse d’exercice = 2000 000 .
S’il y avait 5000 000 biens existants et 5000 000 biens à rapporter, on a masse de calcul = 10000 000 et usufruit de 5000 000.
19
Quand tous les héritiers sont d’accord pour la demander, la conversion est obligatoire, elle est
de droit. Lorsqu’ils ne sont pas unanimes, elle est facultative pour le tribunal saisi.
Par ailleurs, ce n’est pas une faculté d’ordre public, car le de cujus peut en priver ses héritiers en
obligeant ceux-ci à subir l’usufruit et dispenser son conjoint d’avoir à subir la conversion. Les héritiers de
leur côté valablement renoncer à la faculté de demander la conversion.

II – Les conditions de la conversion

Elles sont au nombre de deux.


a) -L’équivalence: en 1er lieu, la rente viagère doit être équivalente à l’usufruit ;
b) – La garantie par des sûretés suffisantes : sûretés personnelles ou réelles.

III – Les effets de la conversion


Elle est considérée comme le partage. Aussi est-elle soumise au principe de l’effet déclaratif du
partage. Le conjoint est censé n’avoir jamais été usufruitier, mais créancier de la rente depuis le jour du
décès du de cujus. Il s’en suit que si, dans l’intervalle, il a constitué des droits réels – notamment une
hypothèque – sur son usufruit, la conversion entraîne la résolution rétroactive de tels droits.
Par ailleurs, le paiement de la rente est garanti par le privilège du copartageant et la conversion
est rescindable pour lésion de plus du ¼, comme le partage lui-même.

Mais en dehors des droits purement successoraux reconnus au conjoint survivant par le code
civil, d’autres législations spéciales lui attribuent également des droits en sa qualité de conjoint survivant.
Tout d’abord, il peut bénéficier de la pension alimentaire à la charge de la succession, en cas
d’insuffisance de l’usufruit (art 205 c. civ.).
Cette pension est fixée d’après l’importance de l’actif successoral, et non d’après les ressources
des héritiers. En plus, le conjoint doit demander la pension dans un bref délai. Enfin, il est communément
affirmé qu’une fois la pension fixée, elle n’est susceptible d’augmentation.
Par ailleurs, il y a la législation sociale qui prévoit la pension de survivant selon qu’on est conjoint
survivant d’un travailleur régi par le code du travail, d’un fonctionnaire, d’un militaire ou d’un député. Mais
c’est une législation discriminatoire qui ne prend pas en compte par exemple la situation du conjoint
survivant d’un commerçant, d’un artisan, d’un avocat, etc.
On peut également citer la législation sur la propriété littéraire et artistique.

SECTION III – LES DROITS DE L’ETAT

Aux termes de l’article 768 c.civ. « A défaut de conjoint survivant, la succession est acquise à
l’Etat ». On dit dans ce cas que la succession est en déshérence et succession vacante. Il a alors la qualité
de successeur irrégulier. Il doit demander l’envoi en possession. Il n’a donc pas la saisine.
Une succession est vacante lorsqu’elle n’est acceptée par aucune des personnes désignées par la
loi pour la recevoir, pas même par l’Etat. Le plus souvent, il s’agit d’une succession déficitaire i.e. dans
laquelle le passif est supérieur à l’actif.
La succession en déshérence est celle dans laquelle il n’existe pas d’héritiers au degré successible
pour la recueillir.
Dans les deux cas, déshérence et vacance, c’est l’administration des domaines qui est chargé de sa
liquidation (art769).

SECTION IV – LES DEROGATIONS AUX REGLES ORDINAIRES DE DEVOLUTION : LES


SUCCESSIONS ANOMALES

20
« Anomales » vient d’un mot grec qui signifie « irrégulier » i.e. contraire à la règle.
Les successions anomales constituent effectivement une « anomalie » dans la mesure où elles
dérogent aux règles du droit des successions, et notamment à celles formulée par l’article 732 cc selon
laquelle « la loi ne considère ni la nature, ni l’origine des biens pour en régler la succession. »
Le droit né d’une succession anomale, appelée « droit de retour légal », est le droit prévu par la
loi en vertu duquel une chose, transmise à titre gratuite à une personne, retourne, à certaines conditions,
après le décès du bénéficiaire, à celui dont elle est provenue, ou à ses descendants.
Le droit de retour légal s’oppose au droit de retour conventionnel, lequel résulte d’une clause
insérée dans une donation et qui prévoit que celle-ci sera résolue, soit si le donataire seul, soit, si le
donataire et ses descendants, meurent avant le donateur. La validité du droit de retour conventionnel est
admise par l’article 951 cc.
Le retour conventionnel n’est pas un droit de succession alors que le droit de retour légal est un
droit de succession, sans effet rétroactif, par conséquent, son bénéficiaire est appelé « héritier anomal ». Il
doit être capable de succéder, ne pas être indigne, il est tenu des dettes de la succession,
proportionnellement à la valeur des biens donnés. Enfin, c’est un héritier comme les autres, y renoncer ou
l’accepter sous bénéfice d’un inventaire.
Pour que le droit de retour légal soit exercé, il faut que le de cujus décède sans postérité.
Le code civil prévoit 4 cas de successions anormales au profit :
- d’une part, de l’ascendant donateur ;
- d’autre part, des parents par le sang de l’enfant adoptif ;
- de l’adoptant donateur ou de ses descendants ;
- Enfin, des frères et sœurs légitimes de l’enfant naturel.

CHAPITRE– LA DEVOLUTION DE LA SUCCESSION PAR LE POUVOIR DE LA VOLONTE : LES


LIBERALITES

La loi donne à toute personne la possibilité d’organiser soi-même la dévolution de ses biens par
le biais des libéralités. Ces libéralités modifient la dévolution légale. Il s’agit de la manifestation ordinaire
du pouvoir de la volonté14. Toutefois, ce pouvoir de la volonté connaît une atténuation, c’est l’ordre public
successoral qui interdit à un disposant de porter atteinte à la réserve héréditaire.
En effet, le testateur ou le donateur ne dispose pas d’une entière liberté pour assurer la
dévolution de ses biens. Et dès qu’il y a une libéralité, la succession se divise en 2 parts : la réserve et la
quotité disponible.
La réserve revient aux proches parents qualifiés d’héritiers réservataires et ne peut alors
valablement disposer à titre gratuit que d’une partie des biens, la quotité disponible.

SECTION I – LES MANIFESTATIONS DU POUVOIR DE LA VOLONTE


Il existe au Cameroun variétés de libéralités : la donation et le testament. Seuls le testament et la donation
seront examinés. En effet, une personne peut procéder à une transmission gratuite en amendant celle que
la loi organise à sa mort : la donation neutralise la succession légale alors que le legs la contredit.
La capacité à faire des libéralités et la pacatité à recevoir les
libéralités.
§1 - LA DONATION

14
La libéralité peut être adressée à un membre de la famille ou à un tiers. Lorsqu’elle gratifie un étranger, elle prive la famille de sa
vocation héréditaire, mais lorsqu’elle est consentie à un membre de la famille, la libéralité peut rompre l’égalité que la loi établit entre
les membres d’une famille.
21
L’article 894 c. civ. définit la donation comme « un acte par lequel le donateur se dépouille
actuellement et irrévocablement de la chose donnée, en faveur du donataire qui l’accepte ».
La donation est un contrat, car elle suppose, pour sa formation, la rencontre des consentements
du gratifiant et du gratifié.
Elle est aussi une libéralité des biens présents, un acte de disposition entre vifs.
La donation est toujours faite à titre particulier, en ce sens qu’elle ne porte que sur un ou plusieurs
biens déterminés, et jamais sur la totalité ou une quote-part du patrimoine. Elle réalise une transmission
du patrimoine entre vifs.
Par ailleurs, la donation est irrévocable, le donateur se dépouille « irrévocablement », car d’après
un dicton « donner c’est donner, reprendre c’est voler ».
Cette irrévocabilité résulte de l’article 1134 c. civ. qui fait des contrats la loi des parties. En effet, les
conventions légalement formées tenant lieu de loi à ceux qui les ont faites (art 1134 al.1), elles ne peuvent
être révoquées que de leur consentement mutuel (al2). Par conséquent, le donateur ne peut reprendre ce
qu’il a donné.
La donation est soumise aux conditions de fond et aux conditions de forme
A – Les conditions de fond
La donation est un contrat dont la conclusion est subordonnée aux diverses conditions de fond
liées à la volonté, l’intention libérale, à l’héritage. L’originalité de ce contrat par rapport aux autres se
manifeste par une règle importante : l’irrévocabilité de la donation.
Même si la donation est soumise à l’irrévocabilité générale des contrats consacrée par l’article 1134
al 1 et 2 cc, il fait également l’objet d’une irrévocabilité spéciale découlant d’une interdiction propre aux
donations et qui est souvent exprimée par l’adage « donner et retenir ne vaut ». Ainsi aux termes de
l’article 894 du C Civil « la donation est un acte par lequel, le donateur se dépouille irrévocablement
de la chose donnée en faveur du donataire qui l’accepte »
Le Code Civil en son article 945 interdit en principe de mettre à la charge de donataire le paiement
des dettes futures du donateur, qui pourront diminuer la valeur de la libéralité. Cela n’est admise
exceptionnellement qui seraient exprimés dans l’acte de donation, ou dans l’état qui devrait y être annexé.
La donation entre vifs ne pourra comprendre que les biens présents du donateur (art 943). Si elle
comprend les biens à venir, elle sera nulle à cet égard.
L’expression bien à venir désigne deux (02) catégories de biens : ceux sur lesquels le donateur est
dépourvu de droits lors de la donation et ceux qu’il laissera à son décès. Or, l’on ne peut donner ce sur quoi
l’on a aucun droit.
B – Les conditions de forme
Plusieurs aspects se rapportent au formalisme des donations
• Il y a les formalités fiscales du fait de l’exigence du paiement des droits de mutation à titre gratuit.
• Place que la donation est un acte important, des formes habilitantes particulières sont
généralement requise
• Enfin, il y a des formalités de publicité des donations de biens susceptibles d’hypothèques.
La donation est un contrat en principe solennel, qui admet quelques exceptions.
1 - Le principe de la solennité

Trois (03) raisons justifient le formalisme des donations


La 1ere raison se relie au désir de protéger le donateur contre les actes aboutissant à le priver d’un bien
sans contrepartie. Car, il y a une certaine méfiance à l’égard de l’intention libérale et, par conséquent, des

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actes à titre gratuit. La volonté du donateur doit être particulièrement libre, c’est-à-dire à l’abri des
pressions, nettement éclairé sur la portée de son acte. Devront être conscient, dans ces circonstances, de
l’importance de ce qu’il fait, l’auteur de la libéralité est porté à réfléchir davantage, ce qui place mieux son
consentement à l’abri des vices.
La 2eme raison, liée à la première, se rattache principalement au désir d’assurer une certaine
protection du patrimoine familial. Il s’agit du souci de la conservation des biens dans les familles.
La 3ème raison est liée à la règle de l’irrévocabilité des donations, qui s’explique par le désir de
protéger à la fois le donateur et le donataire, en exigeant en acte notarié en minute et dont un original reste
au rang des minutes du notaire.
En définitive, la donation se fait par un acte notarié, c’est une exigence posée par l’article 931 cc, aux
termes duquel « Tous actes portant donation entre vifs seront passés devant notaire, dans la forme
ordinaire des contrats ; et il en est minutes, sous peine de nullité »
Le donateur doit être en principe. Mais il peut donner par procuration. Dans ce cas la procuration
doit être rédigée selon les mêmes formes que l’acte portant donation. Elle doit être explicite.
Le donataire, doit nécessairement accepter par lui-même, car l’article 932 al1 dispose formellement
« la donation entre vifs n’engagera le donateur, et ne produira aucun effet, que du jour qu’elle
aura été accepté en termes exprès » et l’article 938 ajoute que « la donation dûment acceptée sera
parfaite par le seul consentement des parties… »
L’acceptation de la donation est un acte personnel qui ne peut émaner des héritiers ou des créanciers
du donataire.
Lorsque le donataire est majeur, l’acceptation doit être faite par lui ou en son nom par la personne
fondée de sa procuration, portant pouvoir d’accepter la donation faite ou un pouvoir général d’acceptation
toutes les donations qui auraient été ou qui pourraient être faites (art 933 al1)
Du fait du caractère solennel de l’acceptation, on est porté à déduire qu’il n’est pas possible au gérant
d’affaires d’accepter une donation pour autrui.
En cas de représentation légale, la donation sera nécessairement acceptée par un autre que le
donataire (art 935 al 1) « la donation faite à un mineur non émancipé ou un majeur en tutelle devra
être acceptée par son tuteur… » et selon l’article 463 « le tuteur peut accepter sans autorisation, les
donations ou les légis particuliers advenus au pupille, à moins qu’ils ne soient grevés de charges »
S’il y a des charges, l’autorisation du Conseil de famille est requise.
La sanction de l’exigence de la solennité est la nullité de la donation irrégulière.
Destinée à protéger le donateur ainsi que sa famille, l’exigence de la solennité semblait justifier une
nullité relative.
Le caractère absolu de la nullité encourue l’emporte du vivant du donateur.
2 - EXCEPTIONS
Au principe de la solennité existent des exceptions portant sur :
• Les donations déguisées
• Le don manuel
• Les donations indirectes
La donation déguisée est une libéralité réalisée sous l’apparence d’un acte à titre onéreux, ce qui implique
le recours à la simulation

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Le don manuel n’implique pas le recours à la simulation. La technique utilisée qui supplée l’absence
d’un acte notarié consiste dans la remise matérielle des biens donnés. Le don manuel est une donation de
meubles corporels accomplie par leur remise de la main à la main.
La donation indirecte ne repose pas le recours à la simulation, car l’acte passée n’est pas seulement
apparent, il est réel, mais la technique utilisée supplée également l’absence d’acte notarié, un transfert de
titres nominatifs peut, par exemple servir de réalisations d’une libéralité.

C- Les effets de la donation


1 – L’exécution de la donation

Le double caractère du contrat de donation : la donation est à la fois un contrat translatif de


droits et un contrat créateur d’obligations. En cela, il est semblable au contrat de vente dont elle est le
pendant du côté du titre gratuit. Une fois que les exigences de solennité sont remplies après le
consentement du donateur et du donataire le transfert du droit donné-droit de créance ou droit réel-
s’opère par le seul effet des consentements, sans formalités. Dès que l’acceptation est parfaite, la propriété
des objets donnés est transférée au donataire (art 938), sans qu’il soit besoin d’autres traditions.
Cet effet attaché au seul contrat concerne les rapports entre les parties. A l’égard des tiers ; il en va
différemment ; la donation d’immeubles ou de biens susceptibles d’hypothèques ne leur est opposables
qu’après l’accomplissement des formalités de publicité foncière (art 939). Celle des créances civiles ne l’est
opposables qu’après l’accomplissement des formalités prévues par l’article 1690 du Code Civil. Si la
donation porte sur un meuble corporel, on appliquera les dispositions de l’article 2279 cc.
a) - Les obligations du donateur
Elles sont au nombre de deux (2), comme en matière de vente. Mais leur contenu n’est pas
nécessairement le même.
• L’obligation de délivrance
Le donateur est en premier lieu tenu d’une obligation de délivrance. Il doit livrer le bien donné,
ainsi que, sauf clause contraire, ses fruits et revenus depuis le jour de la donation ; lorsque la libéralité est
un don manuel, l’existence’ de celui-ci est d’ailleurs subordonnée à la réalisation de la tradition du vivant
du donateur. Dans les autres cas l’obligation de délivrance pèse non seulement sur le donateur, mais aussi
sur ses héritiers, ceux-ci recueillant dans ses successions ses droits et ses obligations.
La délivrance du bien donné peut être réclamée par le donataire ou par ses héritiers, si ses
créanciers ne peuvent accepter à sa place, une offre donation, ils peuvent agir en délivrance.
• L’obligation de garantie
Le donateur n’est pas tenu, comme le vendeur, de garantir les vices cachés de la chose donnée, et
s’agissant de l’éviction, il ne doit garantir que son fait personnel et non celui des tiers. Autrement dit, il est,
dans ce cadre, uniquement tenu de garantir le donataire contre son dol ou sa mauvaise foi.
b) - Les obligations du donataire : le devoir de reconnaissance
La donation étant un contrat unilatéral, elle refait naitre des obligations qu’à la charge du donateur
et, par voie de conséquence, de ses héritiers, il en résulte notamment que le donataire n’est pas tenu de
payer les dettes du donateur, même si la libéralité porte sur tous les éléments actifs de son patrimoine.
Mais cette exigence est tempérée d’une double matière.

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D’une part, un devoir de reconnaissance pèse sur le donataire, de caractère moral il se manifeste aussi
sur le terrain du droit, par la possibilité d’obtenir une révocation de la donation en cas d’ingratitude du
donataire.
D’autre part, des clauses de la donation peuvent imposer des obligations au donataire.
Lorsque les obligations résultent des conditions et charges de la donation confère plus ou moins à la
libéralité le caractère d’un contrat synallagmatique imparfait. Se traduisant selon, le cas par des obligations
de donner, de faire ou de ne pas faire - par exemple de ne pas aliéner le bien donné –ces contraintes pesant
sur le donataire revêtant selon les cas le caractère d’une condition ou d’une charge.

D - L’anéantissement des donations


Trois causes d’anéantissement des donations sont possibles : la nullité, l’inopposabilité, la réduction.
Autrement dit, dans diverses circonstances, la volonté libérale peut être contrecarrée.
En dehors de la nullité qui sanctionne l’inobservation des conditions de fond et de forme, la
donation peut aussi être inopposable à certaines personnes. Cette sanction peut résulter de l’action
paulienne intentée par les créanciers du donateur (en cas de donation faite en fraude de leurs droits, ou en
cas de donation faite par un commerçant en état de cessation des paiements.
La réduction de la donation portant atteinte à la réserve héréditaire est aussi une cause
d’inefficacité, totale ou partielle de la libéralité.
La résolution ou la révocation des donations
La donation est un contrat dont l’anéantissement peut résulter d’une clause qui affecte la libéralité
d’une condition résolutoire. En pareil cas, la résolution opère de plein droit, exemple, l’inexistence d’une
clause de retour conventionnel.
- La résolution de la donation peut aussi être la conséquence d’un mécanisme légale connu ; celui de
la résolution judiciaire, du fait de l’existence de charges, on peut donc avoir la résolution pour
inexécution des charges prévue par l’article 954 cc.
Le particularisme des donations s’affirme davantage avec l’existence de deux (02) autres causes de
révocation : l’ingratitude et la survenance d’enfant. En effet, selon l’article 953 cc « la donation entre vif
ne pourra être révoquée que pour cause d’inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite, pour
cause d’ingratitude et pour cause de survenance d’enfants ».
Mais il existe une autre de révocation, opérant d’ailleurs de plein droit, à savoir ; la perte des
donations qui est encourue dans certains cas par un époux en matière de divorce ou de séparation de corps.

1°) La révocation pour non-exécution des charges


L’inexistence des charges oblige le donataire ou ses héritiers. S’ils ne les exécutent pas le donateur peut, s’il
en est encore temps, suspendre la délivrance de la chose en invoquant l’exceptio non adimpletti contractus.
a) – Les conditions de la révocation
Elles sont au nombre de deux (02), à savoir, les exigences de fond et la nécessité d’une décision
judiciaire.

Les exigences de fond


Elles ont trait à la donation à la charge et à l’inexécution.
- Il existe une révocation des donations pour inexécution des charges, comme pour les legs (donations
ostensibles, donations non ostensibles, donations déguisées, donations indirectes, dons manuels,
donations rémunératoires, donations par contrat de mariage …)
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- Bien qu’il soit fait état, à l’article 954 du cc, d’inexécution des conditions, c’est de charges qu’il s’agit,
la survenance d’une condition résolutoire entrainant de plein droit l’anéantissement de la donation.
La clause d’inaliénabilité du bien donné est une charge ; mais la loi autorise le donataire à obtenir, dans
certaines conditions, une levée judiciaire de l’interdiction.
- Il n’est pas nécessaire que l’inexécution de la charge soit fautive. Elle peut résulter d’un cas fortuit ou
de force majeure.
Il n’est pas non plus nécessaire que l’inexécution soit totale.
La nécessité d’une décision judiciaire
• L’action en révocation peut être intentée par le donateur ou, après son décès, par ses héritiers ; elle
peut l’être aussi au moyen de l’action oblique par ses créanciers. Mais elle ne peut pas l’être par les tiers
bénéficiaires de la charge, lequel ne peut agir qu’en exécution forcée.
• L’action en révocation est intentée contre le donataire ou ses héritiers. Mais
à condition de ne pas adopter cette solution trop tard, ils peuvent écarter la résolution en offrant, même
seulement en cause d’appel, d’exécuter ; ce pouvoir de mettre obstacle à la révocation est reconnu aux
créanciers du donataire et aux tiers détenteurs des biens donnés.
• Appelé à prononcer la résolution (et non pas à la constater simplement), le
jugée dispose, lui-aussi, d’un assez large pouvoir d’appréciation qui correspond, tout à la fois, à la
nécessité de contrôler, voire de cantonner le mécanisme résolutoire, et aux possibilités procédurales
laissées aux parties. Il vérifie si la stipulation de la charge a constitué pour le disposant le motif déterminant
et ne prononce la résolution que dans l’affirmative.
b) – Les effets de la révocation
Dans le cas de la révocation pour cause d’inexécution des conditions, les biens rentreront dans les
mains du donateur, libres de toutes charges et hypothèques du chef du donataire ; et le donateur aura,
contre les tiers détenteurs des immeubles donnés, tous les droits qu’il aura contre le donataire lui-même
(art. 954). Ainsi, comme la résolution judiciaire des contrats à l’article 1184 cc, la révocation des donations
pour inexécution des charges a un effet rétroactif.

Dans les rapports entre les parties, les biens donnés doivent être restitués au donateur ou à ses
héritiers, qui disposent d’une action en revendication si la restitution en nature est possible. Si la chose a
péri par la faute du donataire ou de ses héritiers, il y a lieu à restitution en valeur ; si la perte est due à un
cas fortuit, il n’y a pas lieu à une telle restitution en raison du caractère rétroactif de la résolution et de
l’application de la maxime res perit domino. Si le bien a été détérioré par la faute du donataire ou de ses
héritiers, une indemnité est due. En sens inverse, le donataire peut obtenir la restitution de sommes qu’il
y a, le cas échéant, versées en capital, ce qui suppose qu’il a, en partie, exécuté les charges.
Les rétrocessions donnent lieu à un règlement de comptes afférents aux fruits et aux impenses.
A l’égard des tiers, il y a aussi résolution rétroactive de la donation (art. 954 cc), de sorte que se
trouvent anéantis les droits réels que le donataire ou ses héritiers ont pu, dans l’intervalle, consentir sur les
biens donnés. Au sujet des actes de disposition, il y a des tempéraments : la règle en fait de meubles
possession vaut titre, si la donation a porté sur des meubles corporels ; la publicité foncière destinée à
informer les tiers, si la donation porte sur les immeubles ou sur des
Biens susceptibles d’hypothèques.
20) – La révocation pour cause d’ingratitude
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La rétroactivité qui caractérise la révocation pour inexécution des charges est écartée en cas de
révocation pour ingratitude du donataire.
La révocation pour cause d’ingratitude est la sanction du devoir de reconnaissance pendant sur le
donataire.
a) - Les conditions de la révocation
Selon les conditions, la révocation pour ingratitude est admise plus ou moins largement.
Quant aux donations exposées à cette cause de destruction, le domaine est vaste : sont
révocables les donations ostensibles, les donations déguisées, les donations indirectes et les dons manuels.
Il existe trois (03) cas d’ingratitude
L’ingratitude se rapproche de l’indignité successorale qui prive l’héritier de sa vocation successorale
ab intestat.
La donation entre vifs ne pourra être révoquée pour cause d’ingratitude que dans les cas suivants :
➢ si le donataire a attenté à la vie du donateur ;
➢ s’est rendu coupable envers lui de sévices, délits ou injures graves ;
➢ s’il lui refuse les aliments (at. 955 cc)
• L’attentat à la vie du donateur
Tandis que l’indignité successorale frappe celui qui a été condamné pour avoir donné ou tenté de donner
la mort au défunt, il y a ingratitude, au sens de l’article 955 cc, même en l’absence de poursuites. Ce qui est
pris en considération c’est l’infraction d’homicide ; la tentative d’homicide est donc signe d’ingratitude ;
inversement, celle-ci ne se manifeste pas à travers un homicide par imprudence.
• Les sévices, délits ou injures graves
A condition qu’ils soient graves, certains faits constituent des cas d’ingratitude. Par sévices, l’on vise
les mauvais traitements physiques, ce qui laisse place à un chevauchement des catégories. Par délits, l’on
entend en effet, les infractions pénalement sanctionnées (délits, crimes), encore faut-il qu’elles aient été
commises volontairement. Par injures, il faut entendre, au sens large, les offenses et blessures tendant
intentionnellement à atteindre le donateur dans son honneur ou sa réputation.
L’exigence de gravité concerne tous les faits révélateurs d’ingratitude. Ce qui confère aux tribunaux
un large pouvoir d’appréciation.

• Le refus d’aliments
Le devoir de reconnaissance qui pèse sur le donataire le rend coupable d’ingratitude lorsque le
donateur étant dans le besoin il lui refuse les aliments que ses ressources lui permettraient de fournir. L’on
incline souvent à penses qu’il n’y a pas d’obligation alimentaire véritable à la charge du donataire, parce
que le donateur ne peut agir en exécution forcée et doit se contenter, en cas d’inexécution, de la révocation.
• La nécessité d’une décision judiciaire
De même que pour la révocation pour inexécution des charges, une décision judiciaire est exigée.
La révocation n’aura jamais lieu de plein droit (art. 956 cc).
La révocation ne peut être demandée que contre le donataire, compte tenu du caractère privé, voire
intime des faits servant de base à l’action et qui lui imprime un caractère très personnel. Elle ne peut donc
être demandée contre ses héritiers (art. 957 al 2 C civ.). Ce qui ne semble pas exclure la possibilité de
poursuivre l’instance intentée par le donateur de son vivant. La révocation ne peut être demandée par les

27
héritiers du donateur contre le donataire, à moins que, dans ce dernier cas l’action n’ait été intentée par le
donateur, ou qu’il ne soit décidé dans l’année du délit (art. 957 al. 2 C civ) ; elle ne peut être intentée par
les créanciers du donateur, agissant par voie oblique.
La demande de révocation pour cause d’ingratitude devra être formée dans l’année, à compter du
jour du délit imputé par le donateur au donataire, ou du jour que le délit aura pu être connu par le donateur
(art. 957 al 1er CCiv).
b) -Les effets de la révocation
Le caractère personnel de la révocation pour ingratitude se manifeste aussi à propos de ses effets. A
la différence de la révocation pour inexécution des charges, la révocation pour ingratitudes est, à l’égard
des tiers, sans effet rétroactif ; elle ne préjudiciera ni aux aliénations faites par le donataire, ni aux
hypothèques et autres charges réelles qu’il aura pu imposer à l’objet, pourvu que le tout soit antérieur à la
publication, au bureau des hypothèques de la situation des biens, de la demande en révocation (art. 958 al.
1er C. civ).
Entre les parties, la révocation produit, dans une large mesure, un effet rétroactif. Il y a des objets
aliénés, eu égard au temps de la demande, et les fruits, à compter du jour de cette demande (art. 958 al. 2
C Civ). Le donateur est indemnisé tant des droits réels, tels que les hypothèques, qui lui sont normalement
opposables, que des détériorations dues à la faute du donataire ; si le bien a péri par cas fortuit, le donataire
est libéré en raison de la rétroactivité de la révocation et de l’application de la maxime res perit domino.
Les actes d’administration accomplis sur le bien donné ne sont pas anéantis.
30) - La révocation pour survenance d’enfant
Un donateur consent une donation alors qu’il n’a pas d’enfant, il en a ultérieurement, la donation
est révoquée. La révocation repose sur une clause résolutoire.
a) - Les conditions de la révocation
Elles ont trait aux donations et à la survenance d’enfant. « Toute donation faite par une personne
qui n’avait pas d’enfants ou de descendants actuellement vivants dans le temps de la donation, de quelque
valeur que ces donations puissent être, et à quelque titre qu’elles aient été faites ; ou encore qu’elles fussent
mutuelles ou rémunératoires, même celles qui auraient été faites en faveur de mariage par autres que les
descendants en faveur de mariage par autres que les descendants aux conjoints, ou par les conjoints l’un à
l’autre, demeureront révoqués de plein droit par la survenance d’un enfant légitime du donateur, même
d’un posthume ou par la légitimation d’un enfant naturel par mariage subséquent, s’il est né depuis la
donation » art 960 C Civ.
Les donations révoquées

Quant aux donations exposées à la révocation, il s’agit non seulement des donations formelles, mais
aussi des donations déguisées, les donations indirectes et les dons manuels. La loi vise expressément les
donations mutuelles et les donations rémunératoires, ce qui suppose que celles-ci ont un caractère d’actes
à titre gratuit. Par conséquent, y échappent, les présents d’usage, les donations faites par les conjoints l’un
à l’autre et même par les futurs époux par contrat de mariage.
La survenance d’enfant
Deux situations sont prises en compte : ante et post.
Pour qu’il y ait ultérieurement révocation, il faut qu’au moment de la donation, le donateur ait été
sans enfant ou descendant « actuellement vivant ». Cette révocation aura lieu, encore que l’enfant du
28
donateur ou de la donatrice fût conçu au temps de la donation art. 961 C Civ – en application de la maxime
infans conceptus… L’existence d’un enfant légitime ou légitimé au moment de la donation met obstacle à
la révocation. La situation n’est pas la même en cas d’existence d’un enfant naturel. Par contre l’enfant
adoptif (légitimation adoptive) est assimilé à l’enfant légitime quant à sa filiation et quant à ses droits. En
cas d’adoption simple, on retient la même solution, car l’adopté et des descendants légitimes ont, en
principe, dans la famille de l’adoptant, les mêmes droits successoraux qu’un enfant légitime.
En cas de naissance posthume de l’enfant, la donation est révoquée.
L’automatisme de la révocation
La révocation des donations pour survenance d’enfant diffère des deux autres cas de révocation en
ce qu’elle opère de plein droit (art. 960)
Plusieurs conséquences en découlent.
Tout d’abord, une décision judiciaire n’est pas nécessaire.
Toutefois l’office du juge consistera à constater celle-ci, et non à la prononcer.
Puisque la révocation précède l’action, l’action peut être intentée non seulement par le donateur,
mais aussi par ses créancier, agissant par voie oblique (art. 1166 C. civ) et après sa mort par ses héritiers.
Il n’est pas possible au donateur de renoncer à la révocation et la confirmation de la donation
révoquée est exclue (art. 964 C. civ.) « Les donations ainsi révoquées ne pourront revivre ou avoir de nouveau
leur effet, ni par la mort de l’enfant du donateur, ni par aucun acte confirmatif, et si le donateur veut donner
les mêmes biens au même donataire, soit avant ou après la mort de l’enfant par naissance duquel la donation
avait été révoquée il ne pourra le faire que par une nouvelle dispositions » (art 964 C civ)
La prescription
Si la donation révoquée de plein droit ne peut plus être ressuscitée, une prescription dérogatoire au
droit commun, de type acquisitif, peut mettre cependant obstacle à l’action en revendication du bien ou
encore aux actions personnelles résultant de révocation a profit du donateur ou de ses héritiers.
b) - Les effets de la révocation
La révocation pour cause de survenance d’enfant est dotée d’un effet rétroactif, tant à l’égard des
tiers que dans les rapports entre les parties.
Si les actes d’administration accomplis par le donataire ne sont pas affectés par la révocation, il en
va autrement des actes de disposition, sous réserve de l’application de l’article 2279 C civ. en ce qui
concerne les donations de meubles corporels.
Entre les parties, la rétroactivité entraine, quant aux impenses, les conséquences identiques à celles
des deux autres causes de révocation. Quant à la restitution des fruits, ceux qui sont échus ou ont été perçus
avant la naissance de l’enfant restent acquis au donataire, ainsi que ceux qu’il a perçus après la naissance,
tant que celle-ci ne lui a pas été notifiée. Il doit restituer ceux qu’il a perçus après la notification, car il est
devenu possesseur de mauvaise foi.

§2 – LE TESTAMENT : ETUDES DES SUCCESSIONS TESTAMENTAIRES


L’article 895 cc définit le testament comme étant « un acte par lequel le testateur dispose,
pour le temps qu’il n’existera plus, de tout ou partie de ses biens, et qu’il peut révoquer ».
Le testament est donc un acte juridique unilatéral à cause de mort, c’est-à-dire, dont les
effets ne se réalisent qu’au décès du testateur, et qui est essentiellement révocable.
C’est aussi un acte solennel.
Lorsqu’il y a testament, la loi cède sa place à la volonté du testateur pour assurer la dévolution
de tout ou partie de la succession.
29
Le législateur édicte des règles qui concernent les formes du testament, son contenu, et prévoit
des sanctions, en l’occurrence la révocation et la caducité des legs.

A – LES FORMES DU TESTAMENT


Certaines règles sont communes à tous les testaments ; d’autres sont particulières à chaque sorte
de testament. Mais, toutes ont pour but d’assurer le respect des dernières volontés du de cujus.

I - LES REGLES COMMUNES A TOUS LES TESTAMENTS


Ce sont d’une part, la nécessité d’un écrit ; d’autre part, l’interdiction du testament
conjonctif.

a) – La nécessite d’un écrit


L’écrit est un élément de formation, une condition de validité du testament et non pas une simple
condition de preuve. On dit alors que l’écrit est exigé ad solemnitatem et non pas ad probationem. Le Code
civil n’admet pas la validité du testament oral.

b) – L’interdiction du testament conjonctif


Le testament est un acte personnel. Aussi, aux termes de l’article 968 cc « un testament ne
pourra pas être fait dans le même acte par deux ou plusieurs personnes, soit au profit d’un tiers,
soit à titre de disposition réciproque mutuelle ».
Autrement ledit code interdit à deux ou plusieurs personnes de tester dans le même acte.
L’interdiction a pour but d’assurer le respect du principe de la révocabilité du testament.

II – LES REGLES DE FORME PARTICULIERES A CHAQUE SORTE DE TESTAMENT

Il existe 3 formes de testament (en dehors des testaments privilégiés soumis à des formes
spéciales et simplifiées parce qu’établis dans des circonstances exceptionnelles (art 981 à 983, art 985, art
987, 988 à 994 ; 999 et 1000) :
- le testament olographe ;
- le testament authentique ;
- le testament mystique.

a) – Le testament olographe
C’est la forme la plus usitée, car elle est la plus simple. C’est un acte solennel rédigé de la main
du testateur, daté et signé par lui (art 970 c. civ.), il n’est assujetti à aucune autre forme.

1– Les conditions de validité du testament olographe


- le testament olographe doit être écrit en entier de la main du testateur. Le mot olographe
vient du grec « OLOS » (entier) et graphein (écrire). Peu importe l’objet sur lequel le testament est
écrit : feuille, planche, carton, sur le sable…Peu importe également l’instrument par lequel on le
rédige : un crayon, un stylo, un pinceau, un couteau, du charbon, du sang, un diamant sur une vitre.
L’important est de reconnaître l’écriture du testateur ; un testament olographe comportant
l’écriture d’une personne autre que le testateur est nul.
Mais la validité du testament à main guidée est discutée, ainsi que celle des testaments
dactylographiés15.

15
La cour de cassation française s’est prononcée sur leur validité.
30
- le testament olographe doit être daté de la main du testateur. La date doit être lue sans
discussion : la date qui doit préciser, sous peine de nullité, le jour, le mois, et l’année, doit être écrite
de la main du testateur est importante à un double point de vue :
• d’une part, elle permet de déterminer si le testateur était capable, le jour de la rédaction de
son testament.
• D’autre part, lorsque le testateur a fait plusieurs testaments successifs, la date permet de
déterminer lequel est le plus récent et exprime par conséquent les dernières volontés du de
cujus.
- le testament olographe doit être signé de la main du testateur.
La signature est moins le procédé d’identification que la marque de la volonté de sceller les
dispositions contenues dans le testament, au même titre que la formule, non obligatoire « ceci est mon
testament » il faut une véritable signature. Peu importe sa place.

2) – La force probante du testament olographe


Il convient de distinguer selon qu’il s’agit de l’écriture du testament, de la signature ou de la date.
- s’il s’agit de l’écriture ou de la signature, les héritiers ab intestat, à qui le testament est opposé,
peuvent le contester, conformément à l’article 1323 al 2 cc16. Car, le testament olographe est un acte sous
seing privé, dont la force probante s’attache à cette catégorie d’actes i.e. qui fait foi jusqu’à preuve
contraire17.
- S’agissant de la date du testament olographe les règles applicables aux actes sous-seing privé sont
écartées.
3) – Les formalités postérieures à la rédaction du testament olographe
Les formalités postérieures, i.e. qui doivent être accomplies au moment de l’ouverture du testament,
sont prévues par l’article 1007 du Code civil.

b) – Le testament authentique
Il s’agit du testament dicté par le testateur lui-même à un ou deux notaires en présence de deux
témoins. Il en est ensuite fait lecture au testateur (art 971cc)
C’est un acte notarié, ainsi est-il soumis à toutes les conditions de forme des actes notariés, mais
il est en outre, soumis aux conditions spéciales suivantes :
- tout d’abord le testament doit être dicté par le testateur aux deux notaires ou d’un notaire, de sorte
qu’un muet ne peut pas tester sous cette forme.
- Ensuite le testament doit être écrit par le notaire ou l’un des eux notaires sous la dictée du
testateur. L’art 972cc (loi 8 déc. 1950) admet que le notaire puisse le faire écrire par une autre
personne, à la main ou mécaniquement.
- Par ailleurs, le notaire doit donner lecture du testament afin que le testateur puisse vérifier que sa
pensée a été fidèlement reproduite
Puis le notaire doit faire mention dans l’acte que ces diverses formalités ont été accomplies.
Ensuite le testament doit être signé par le testateur, en présence des témoins et du notaire (art
973) ainsi par les témoins et le notaire (art 974).
Et au cas où le testateur déclare qu’il ne sait ni ne peut signer, mention express en est faite dans
l’acte, de sa déclaration, ainsi que de la raison qui l’empêche de signer (art 973).
Enfin le testateur doit porter indication au lieu dans lequel il a été fait.
Acte authentique, ce testament fait foi jusqu’à inscription de faux des constatations
matérielles qu’a faites le notaire dans l’exercice de ses fonctions.

16
Celui auquel on oppose un acte sous-seing privé est obligé d’avouer ou de désavouer formellement son écriture ou sa signature.
Ses héritiers ou ses ayants cause peuvent se contenter de déclarer qu’ils ne connaissent point l’écriture ou la signature de l’auteur.
17
28 fevr 1928. DP 1929 1. 8
31
Il présente l’avantage d’assurer la liberté du testateur, la conservation de l’acte, la précision du
langage et sa production au moment du décès. En outre, il peut être fait par une personne qui ne sait pas
écrire.
Il présente, cependant, l’inconvénient de ne pas être secret et entraîne des frais dès sa rédaction.

c – Le testament mystique
Le testament mystique ou secret est celui que le testateur rédige lui-même ou fait rédiger par un
tiers, sans l’assistance d’un officier public, mais dans les deux cas, il doit signer, et présenter clos, cacheté
et scellé à un notaire, en présence de deux (02) témoins, ou qu’il fait clore, cacheter et sceller en leur
présence. Autrement dit, c’est un testament fait par le testateur, ou sous sa direction, et présenté sous
enveloppe close, cachetée et scellée à un notaire qui dresse un acte de suscription sur l’enveloppe (certificat
des lieux, date, description du pli etc.…), en présence de 2 témoins (art 976)
La force probante du testament mystique varie suivant qu’il s’agit d’une suscription ou de l’acte
qui contient des dispositions testamentaires.
En effet, l’acte de suscription, acte authentique, fait foi jusqu’à inscription de faux, alors que
l’acte qui contient les dispositions testamentaires, acte sous seing privé, peut être contesté selon les règles
de droit commun (par la preuve contraire)
Ce testament présente l’avantage de pouvoir être fait que par une personne sachant pas écrire
et de conserver le secret de son contenu, sauf au cas où il n’a pas été rédigé par le testateur lui-même.
Il présente cependant l’inconvénient d’obliger à des formalités compliquées.
Il est soumis aux mêmes formalités que le testament olographe lors de son ouverture.

L’absence ou la violation des formes de chaque testament entraîne la nullité absolue du


testament (art. 1001cc).

B – LE CONTENU DU TESTAMENT
Le testament est constitué essentiellement par les legs. Le legs est une disposition testamentaire
qui a pour effet de transmettre à celui qui en est bénéficiaire, le légataire, tout ou partie des biens du
testateur.

I – Les conditions de validité des legs


Ces conditions sont relatives :
- à la désignation du légataire et
- à l’objet du legs.

a) – La désignation du légataire
La désignation du légataire doit être certaine et nette.
Elle peut être directe ou indirecte.

b) – L’objet du legs
Il doit être déterminé ou du moins déterminable. Le legs doit porter sur une chose qui est la
propriété du testateur ; le legs de la chose d’autrui est nul (art 1021).

II – La classification des legs


Consacrant une classification tripartite des legs en fonction de leur objet, l’art 1002 cc distingue :
- le legs universel ;
- le legs à titre universel ;
- le legs à titre particulier.

32
a) - Le legs universel
Selon l’art 1003 c.civ. « le legs universel est la disposition testamentaire par laquelle le
testateur donne à une ou plusieurs personnes l’universalité des biens qu’il laissera à son décès »
Sont considérés comme legs universels, non seulement le legs de tous les immeubles et de tous
les meubles mais aussi le legs de la nue-propriété de tous les biens, le legs de toute la quotité disponible ou
le legs du surplus des biens après la désignation de légataires particuliers. Le légataire universel a la saisine
en l’absence de réservataire et ne l’a pas en leur présence.

b) – Le legs a titre universel


Il est défini par l’article 1010cc comme étant « celui par lequel le testateur lègue une quote-
part de ses biens dont la loi lui permet de disposer, telle qu’une moitié, un tiers, ou tous ses
immeubles , ou tout son mobilier, ou une quotité fixe de tous ses immeubles ou de tout son mobilier »
Le légataire à titre universel n’a jamais la saisine, il doit demander la délivrance du legs aux
héritiers réservataires, ou aux légalitaires universels.
c) – Le legs à titre particulier
Le code civil n’en donne qu’une définition négative. Après avoir défini le legs à titre universel
ainsi selon l’art 1010 al 2 c.civ., tout autre legs ne forme qu’une disposition à titre particulier.
Le légataire particulier n’a pas la saisine, il doit demander la délivrance de son legs…
La validité du legs à titre particulier est subordonnée à la condition que la chose, objet du legs,
soit la quotité du testateur.

III- La sanction des legs : La révocation et la caducité

- La nullité sanctionne l’inobservation des conditions de forme et de fond, communes aux libéralités
ou spéciales aux legs.
- La réduction des legs sanctionne le dépassement de la quotité disponible. Mais l’inefficacité du
testament ou des dispositions qu’il contient résulte soit de leur révocation, soit de leur caducité.

a) - La révocation des legs


A la différence de la donation entre vifs, le testament est révocable. Il existe donc un cas de
révocation de plein droit et la révocation judiciaire, en plus de la révocation par la volonté du testateur.

1) – la révocation par la volonté du testateur


La révocation dont la faculté est d’ordre public peut être express ou tacite (art. 1035 à 1038 c.civ).
La révocation expresse résulte soit d’un testament postérieur, soit par acte notarié (art. 1035).
La révocation tacite résulte soit de la rédaction d’un nouveau testament incompatible avec le
premier, soit de l’aliénation de la chose léguée, soit de la destruction du testament par le testateur.

2) – La révocation de plein droit


Elle est prévue en cas de divorce ou séparation de corps (art. 304 c.civ) et joue lorsque le divorce
ou la séparation de corps a été prononcée aux torts exclusifs de l’un des époux (art. 267 c.civ).

3) – La révocation judiciaire
Elle peut être demandée en justice : (art 1046 c.civ., art 955 c.civ)
- d’une part pour inexécution des charges, en cas de legs avec charges.
- D’autre part, pour ingratitude.

b) – La caducité des legs

33
Plusieurs éléments rendent un legs caduc, parce qu’ils en rendent l’exécution impossible. Il en
est ainsi :
- lorsque le légataire meurt avant l’avènement de la condition en cas de legs sous condition suspensive
(art 1040 c.civ)
- lorsque la chose léguée est perdue en totalité avant le décès du testateur (art 1042 al 1er). Mais si la
perte est postérieure au décès du testateur, le legs n’est caduc que si cette perte résulte de la force
majeure (art 1042 al 2)
- lorsque le légataire devient incapable, après la confection du testament, de recueillir le legs ou le
refuse (art 1043 c.civ).

c) – Les conséquences de la révocation et de la caducité des legs


La révocation et la caducité des legs, ainsi que leur nullité, les privent d’efficacité de sorte que les
biens légués ne sont pas recueillis par les légataires désignés. Trois situations sont, à cet effet, possibles :
- les règles générales qui varient suivant que le testament tombe totalement ou partiellement ;
- la volonté du testateur ;
- Le mécanisme de l’accroissement.
1 - En règle générale, lorsque le testament tombe en entier, le testateur meurt ab intestat. Les biens
compris dans le legs révoqué ou caduc sont recueillis par les héritiers ab intestat.
Lorsque certains legs seulement sont frappés d’inefficacité, la situation profite à ceux qui étaient
en charge de les acquitter i.e. selon les cas, l’héritier ab intestat ou le légataire universel, à titre universel
ou à titre particulier. Ainsi, l’inefficacité du legs profite à l’héritier ab intestat.
2 – Le de cujus peut avoir prévu le bénéficiaire de la révocation ou de la caducité en désignant un
légataire de seconde ligne au cas où celui choisi en première ligne ne pourrait pas recueillir le legs qui lui
est fait, on parle alors de substitution vulgaire, à la différence de la substitution fidéicommissaire.
3 – le mécanisme de l’accroissement joue lorsqu’une même chose (maison, somme d’argent…) a
été léguée conjointement à deux légataires, les légataires conjoints. Dans ce cas, le colégataire conjoint
profite du legs au cas où l’autre ne le recueille pas. Car quand les deux le recueillent, il y a partage entre
eux. Si aucun ne le recueille, il y a dévolution ab intestat.

C –L’EXECUTION DU TESTAMENT
Le testament n’est exécuté que dans la mesure où les dispositions qu’il contient ont été acceptées
par les légataires. C’est l’option des légataires.
En principe, il appartient aux héritiers et légataires d’exécuter les dernières volontés du de cujus.
Toutefois, le testateur peut avoir désigné une personne pour veiller, après sa mort au respect de
ses dernières volontés : c’est l’exécuteur testamentaire.
Il jouit d’un mandat intuitu personae (art. 1025 cc), qui n’est ni légal, ni conventionnel.
Pour être exécuteur testamentaire, il faut être capable (art. 1028 cc). Ses missions reposent sur une
combinaison de pouvoirs et d’obligations et prennent fin soit par son décès, soit par démission ou par
destitution prononcée par une décision judiciaire.

SECTION II – LES LIMITES AU POUVOIR DE LA VOLONTE : L’ORDRE PUBLIC SUCCESSORAL

Loin d’être absolue la liberté de modifier la dévolution légale se bute à trois limites, à savoir, la
réserve, l’interdiction des substitutions fidéicommissaires, et l’interdiction des pactes sur succession future.
Ces trois limites à la liberté d’amender la dévolution légale constituent l’ordre public successoral.

34
Les deux premières ne concernent que les libéralités tandis que la 3ème, de portée plus large,
interdit que soit disposé d’une succession non ouverte autrement que par testament18.
§ 1 – La réserve héréditaire
La réserve est définie comme la portion de ses biens dont une personne ne peut disposer à titre
gratuit, et qui se trouve ainsi réservée à ses héritiers qualifiés de réservataires. La part laissée à sa libre
disposition constitue la quotité disponible.
Si le défunt outrepasse cette quotité disponible et entame la réserve, ses héritiers réservataires ont
le droit, à son décès, de demander la réduction des libéralités excessives.
La réserve héréditaire borne alors la faculté de disposer dont jouit une personne capable. Elle
limite la plénitude de sa propriété et sa liberté contractuelle.
Institution difficile, sa nature est basée sur des considérations familiales. En effets, son fondement
conduit à la protection des proches parents (ascendants et descendants).
En 1er lieu, la réserve est un instrument de conservation des biens dans la famille et contribue ainsi
à la cohésion du groupe familial.
En 2d lieu, elle est l’expression d’un devoir d’assistance économique qui existe entre proches
parents, et dont sont spécialement tenus les plus anciens envers les plus jeunes.
Par ailleurs, elle assure une égalité minimum entre les enfants lorsque la dévolution ab intestat
s’opère selon le principe d’égalité, car c’est seulement dans la limite de la quotité disponible que le de cujus
peut gratifier l’un d’eux
Aussi convient-il d’examiner successivement ses bénéficiaires (A), son taux (B) et sa sanction (C).

A – Les bénéficiaires de la réserve héréditaire


La personne qui se prévaut de la qualité de réservataire doit remplir deux conditions cumulatives :
elle doit avoir la qualité d’héritier réservataire et venir à la succession.

I – La qualité d’héritier réservataire


C’est la loi qui attribue cette qualité aux héritiers. Sont réservataires, les descendants (art. 913
c. civ.) et les ascendants (art. 914 c. civ.). Il s’agit des parents auxquels on a donné la vie et ceux de qui
on la tient.
La réserve n’est donc reconnue qu’aux parents en ligne directe, envers qui le devoir d’assistance
est vif.
Peu importe le degré de parenté, ni la nature de la parenté : légitime, naturelle ou adoptive.
Sont exclus de la qualité de réservataires, les collatéraux et le conjoint survivant.

II – La nécessité de venir à la succession


La réserve étant pars hereditatis, un héritier ne peut faire valoir ses droits réservataires que s’il
vient à la succession, i.e. qu’il soit appelé et qu’il n’y renonce pas.
Comme héritier non appelé, on cite :
- le réservataire indigne
- le réservataire primé par un héritier préférable19.
Le réservataire qui renonce à la succession ne peut se prévaloir de ses droits dans la réserve. Il ne
peut donc pas la réclamer.

18
Elle concerne aussi bien les actes à titre onéreux que les actes à titres gratuit, les actes passés sur la succession d’autrui que sur sa
propre succession.
19
Il en résulte que :
- si les enfants n’attaquent pas une libéralité qui entame la réserve par l’action en réduction des libéralités excessives, les petits-enfants, primés par les enfants, ne peuvent
pas le faire à leur place ;
- si le de cujus laisse des ascendants ordinaires et des collatéraux privilégiés, les 1ers étant exclus par les seconds, ne peuvent réclamer leur réserves, et les libéralités
consenties par le de cujus ne sont donc pas exposées à un risque de réduction. C’est seulement si les collatéraux renoncent que les ascendants ordinaires pourront bénéficier
de leur réserve et engager des actions en réduction
.
35
B – Le taux de la réserve héréditaire

Le taux de la réserve peut se fixer de deux manières.


Primo, considérée comme la part successorale de chaque héritier réservataire, la part de réserve
de chacun peut être fixée à une fraction de sa part héréditaire ; secundo, considérant l’ensemble des biens,
elle peut aussi être fixée à une quote-part de cet ensemble. On est alors conduit, suivant les deux procédés,
à distinguer la réserve globale et les parts de la réserve individuelle en déterminant positivement la quotité
disponible et en déduisant la réserve par soustraction.
Le taux de la quotité disponible, et partant de la réserve, varie en fonction de trois paramètres : la
qualité des héritiers (ascendants, descendants), leur nombre et la qualité du gratifié (conjoint survivant ou
autre).
Sur la base du dernier paramètre, on distingue la quotité disponible ordinaire (I) de la quotité
disponible entre époux (II), dont il ne peut disposer qu’au bénéfice de son conjoint. Et s’il a consenti des
libéralités à d’autres, on procède à la combinaison des deux quotités (III)

I – La quotité disponible ordinaire


C’est la qualité de réservataire, avant leur nombre, qui est considérée. On distingue donc la réserve
des descendants de celle des ascendants.

a) – La réserve des descendants


1) – La réserve globale
Aux termes de l’article 913, le taux de la quotité disponible varie suivant le nombre d’enfants. Aussi
est-elle de la moitié (1/2) si le de cujus ne laisse qu’un enfant, du tiers (1/3) s’il en laisse deux, du quart (1/4)
s’il en laisse trois ou plus.
La quotité disponible ne tombe donc jamais au-dessous du quart.
Corrélativement la réserve est établie à la moitié (½) en présence d’un enfant, à deux tiers (2/3) en
présence de deux enfants et à trois quarts (¾) en présence de trois enfants ou plus. En cas de représentation
d’un enfant prédécédé, ses représentants ne sont comptés que pour un.
La renonciation ou l’indignité n’influencent pas le taux. Si parmi trois un renonce ou est indigne,
la réserve est toujours de trois quarts (¾) et la quotité disponible du quart (1/4).

2) – Les parts de réserve individuelles


Ici on applique les règles de la dévolution légale. En effet, dès lors qu’il existe plus d’un descendant,
la réserve globale se répartit entre eux. Cette répartition tient au fait que la réserve, pars hereditatis, n’est
qu’une fraction de la succession ; fraction dont la dévolution est soustraite à toute emprise de la volonté
du de cujus et qui constitue de ce fait une succession ab intestat résiduelle. Ce qui justifie sa répartition
suivant les règles de la dévolution légale, en respectant la double égalité entre descendants : égalité de
souches et égalité de personnes.
Exemples :
1 – Un enfant ayant une réserve globale de la ½ recueille cette ½. S’il est prédécédé et laisse quatre enfants, petits-fils du de cujus, ceux-ci se divisent
cette ½ par 4 et auront chacun 1/8.
2 – Deux enfants E et F recueillent une réserve globale de 2/3, chacun a 1/3 (E=F=1/3).
3 – Trois enfants X, Y, Z. Y étant prédécédé et laisse quatre enfants (Y1, Y2, Y3). La réserve globale est de 3/4. Le partage se fait par souche et à l’intérieur
de chaque souche on partage par tête. Les ¾ se divisent par 3. Ainsi :
- souche X = ¼
- souche Y =1/4
- souche Z = ¼ et Y1, Y2, Y3 se divisent ce ¼.

b) – La réserve des ascendants


1) La réserve globale

36
L’article 914 fixe la quotité disponible de la moitié (½) si le de cujus laisse des ascendants dans les
deux lignes, paternelle et maternelle, et aux trois quarts (¾) s’il n’en laisse que dans une seule.
Corrélativement, la réserve est du quart (1/4) par lige.
Il en résulte que, d’une part, il n’existe pas une réserve unique pour les ascendants à l’instar des
descendants ; la loi attribue à chaque ligne une réserve globale d’un quart (1/4) qui est réparties entre les
représentants de la ligne concernée et d’autre part, en présence de collatéraux privilégiés, les père et mère
ont chacun droit à une réserve qui coïncide avec leur part successorale, soit un quart (1/4).
La renonciation ou l’indignité n’influencent pas le taux de la réserve comme dans le cas des
descendants.

2) Les parts de réserve individuelles


Etant pars hereditatis, les règles de la dévolution légale s’appliquent dans la répartition de la
réserve globale au sein de la ligne à laquelle elle est attribuée.
Exemple : si le de cujus laisse sa mère et ses grands-parents paternels, la réserve de la ligne
maternelle revient à sa mère, seule appelée dans sa ligne, soit le ¼ et la réserve de la lige paternelle sera
répartie également entre le grand père et la grand-mère paternels à vocations héréditaires égales, soit 1/8
chacun.
II – La quotité disponible entre époux
Les libéralités entre époux sont souvent considérées comme l’expression d’une affection naturelle,
mais aussi parfois comme la captation ou un entraînement irréfléchi.
Sa quotité varie suivant que l’époux gratifié est présence des enfants qu’il a eus avec le de cujus ou
des enfants que le disposant a eus d’un autre lit. Seuls les 1ers qui sont les héritiers des deux époux peuvent
espérer récupérer l’objet de la libéralité dans la succession du gratifié.
En présence d’ascendants, la quotité disponible entre époux est plus importante que la quotité
disponible ordinaire. Ainsi, aux termes de l’article 1094, le de cujus peut disposer au bénéfice de son
conjoint non seulement de ce dont il pourrait disposer au bénéfice d’un étranger, mais aussi de la nue-
propriété de la réserve des ascendants. Chacune des lignes ne peut opposer au conjoint survivant qu’une
réserve d’un quart (1/4) en usufruit.
Dans ce cas, la réserve de l’ascendant est conçue dans une optique alimentaire, car elle assure des
ressources aux ascendants vieillissant et non la conservation des biens dans la famille.
En présence de descendants, la quotité est multiforme. Elle est soit d’un quart (1/4) en pleine
propriété et d’un quart (1/4) en usufruit, soit de la moitié (1/2) en usufruit (art 1094 c. civ.)
Mais, en présence d’enfants d’un précédent lit, le disponible entre époux est restreint. L’article
1098 c. civ. ne permet au conjoint de recevoir que dans la double limite du quart (1/4) de la part de l’enfant
légitime le moins prenant.

III – La combinaison des deux quotités disponibles


La coexistence de deux quotités disponibles crée des difficultés lorsque le de cujus a consenti des
libéralités à son conjoint et à un tiers20.
Ces quotités ne se cumulent pas, car elles excèderaient le tout. Aussi faut-il les combiner.
Ainsi, s’agissant du maximum assigné à chaque libéralité, on relève que chacun des gratifiés ne
peut percevoir que dans les limites de la quotité que la loi lui permet de recueillir.
Quant au maximum assigné à l’ensemble des libéralités, le total des libéralités ne doit pas excéder
la quotité la plus forte.
S’agissant de l’imputation de la libéralité adressée au conjoint, en cas de libéralités successives,
celle faite au conjoint s’impute principalement sur le disponible ordinaire.

20
Le tiers est toute personne autre que le conjoint, héritière ou pas.
37
C – La sanction de la réserve héréditaire
Il s’agit d’examiner le mécanisme par lequel les réservataires peuvent faire rétablir le taux légal de
la réserve lorsque le de cujus a fait des libéralités outrepassant la quotité disponible.
A cet effet, il faut d’abord déterminer les dispositions pouvant porter atteinte à la réserve (I) avant
d’analyser les modalités de leur sanction (II).

I – Les dispositions portant atteinte à la réserve


Il s’agit essentiellement des libéralités. Toutefois, diverses clauses, ne constituant pas des actes de
disposition, peuvent accessoirement y porte atteinte.

a) – Les libéralités
On distingue les libéralités qui empiètent sur la réserve de celles, sans l’entamer, affectent sa
composition.
Pour les libéralités entamant la réserve, la règle de principe est que la réserve se définit à la fois
par la quotité (la moitié (½), les deux tiers (2/3), les trois quarts (¾)) et par la nature des droits dont elle
assure l’intangibilité.
La libéralité affecte la composition de la réserve lorsque le disponible est localisé sur tels biens,
leur réserve se trouve ainsi cantonnée sur le surplus.

b) – Les clauses diverses ne constituant pas des actes de disposition


Il s’agit des charges. En effet, la réserve ne saurait être grevée ni d’une clause d’inaliénabilité, ni
d’une substitution.
L’héritier doit donc recevoir sa réserve libre de toute charge. Sur les biens qui la composent, le de
cujus ne saurait, par une « libéralité », qu’il lui adresserait en l’assortissant d’une charge, entraver ou limiter
ses prérogatives de propriétaire.

II – Les modalités de leur sanction


La libéralité excessive est réductible à la quotité disponible, lors de l’ouverture de la succession
(art. 920 c. civ.).
La charge qui grève la réserve l’est aussi.
La réduction doit être demandée et elle ne peut l’être que par un héritier réservataire.
Par ailleurs, la réduction peut se faire soit en nature soit en valeur.
Lorsqu’elle est faite en nature, et s’il s’agit d’un legs ou d’une donation, elle paralyse l’exécution de
la libéralité ou l’efface par la restitution. S’il s’agit d’une charge, la réserve s’en trouve libérée.
Lorsqu’elle est faite en valeur, le gratifié peut réclamer le bien légué ou retenir le bien donné et
récompenser les réservataires en argent.

§ 2 – L’interdiction des substitutions fidéicommissaires


Il convient de distinguer au préalable la substitution fidéicommissaire de la substitution vulgaire.
La substitution vulgaire est définie dans le vocabulaire juridique comme étant la clause en vertu
de laquelle « le disposant désigne subsidiairement une seconde personne qui recueillera le don ou le legs, mais
seulement pour le cas où le donataire ou la légataire, appelé en 1ère ligne, ne le recueillerait pas »21. La seconde
personne n’est donc instituée qu’à défaut de la 1ère, en sous-ordre. La libéralité ne doit profiter qu’à l’une
seule d’entre les deux personnes.

21
CORNU : Vocabulaire Juridique, Association Henri Capitant.
38
La loi autorise expressément cette forme de substitution en vertu de l’article 898 et ne la considère
pas comme une substitution fidéicommissaire.
La substitution fidéicommissaire est la clause d’une libéralité par laquelle « le disposant charge la
personne gratifiée de conserver toute sa vie les biens à elle donnés ou légués en vue de les transmettre à son
décès à une autre personne désignée par le disposant lui-même »22. La seconde personne n’est pas instituée
à défaut de la 1ère, mais après elle. Au lieu qu’il y ait une seule libéralité devant bénéficier à l’une ou à
l’autre, il y en a deux, devant bénéficier successivement à l’une et à l’autre. Le 1 er bénéficiaire qui devra
conserver et transmettre le bien donné ou légué, est dit grevé de substitution ; le second est dit appelé à la
substitution.
On reconnaît à la substitution fidéicommissaire à la fois, une fonction psychologique (illusion de
l’immortalité), familiale (conservation des biens dans la famille), mais avec un inconvénient économique,
à savoir qu’elle place les biens hors du commerce, de les rendre incessible et de créer des situations de
mainmorte. Certains auteurs trouvent recourir à ce mécanisme « c’est constituer pour les générations
futures l’état et l’organisation de la famille ; c’est faire acte de législation plutôt qu’exercer un droit privé »23
Il convient de définir au préalable la notion de substitution (A) avant de voir les substituions qui
son exceptionnellement permises (B).

A – La notion de substitution
L’article 896 al 2 définit la substitution comme « toute disposition par laquelle le donataire,
l’héritier institué, ou le légataire, sera chargé de conserver et de rendre à un tiers » ;
La substitution suppose la conjonction de trois éléments :
- l’existence de deux libéralités successives ;
- la charge pour le 1er gratifié de conserver et de transmettre ;
- le report de l’exécution de la seconde libéralité au décès du 1er gratifié. Au cas où l’un seul de ces
éléments manque, la libéralité est sauve. Si tous sont réunis, la sanction tombe : la substitution est nulle,
les deux libéralités successives tombent. La nullité de la substitution peut être demandée par tout intéressé
(le disposant, ou s’il est décédé, ses successeurs universels ou à titre universel ; ni le grevé, ni l’appelé n’ont
pas intérêt à agir en nullité.

B – Les substitutions exceptionnellement permises


L’article 897 excepte certaines substitutions du principe prohibitif de l’article 896. Certaines
conditions relatives aux personnes et aux biens sont exigées.
En effet, la substitution n’est permise que dans le cadre familial et entre proches parents. Ce qui
justifie les conditions relatives à la personne du grevé et de l’appelé.
Le grevé ne peut être qu’un enfant (art. 1048), un frère ou une sœur (art. 1049) du disposant. Dans
cette dernière hypothèse, le disposant doit être décédé sans enfant.
L’appelé ne peut être qu’un enfant du grevé (art. 1048, 1049), donc soit un petit fils, soit un neveu
ou une nièce du disposant.
Quant aux biens, la substitution ne peut porter que sur la quotité disponible.

§ 3 – L’INTERDICTION DES PACTES SUR SUCCESSION FUTURE


Tout pacte portant sur une succession non encore ouverte, i.e. sur la succession d’une
personne vivante, est nul. Le principe de la prohibition des pactes sur succession future est fermement
énoncé par l’article 1130 al2 c. civ. en ces termes « On ne peut cependant renoncer à une succession non
ouverte, ni faire une stipulation sur une pareille succession, même avec le consentement de celui de la
succession duquel il s’agit ». L’art. 1389 le rappelle à propos du contrat de mariage « …les époux ne peuvent

22
Vocabulaire juridique, ibidem.
23
BIGOT de PREAMENEU, Fenet, t. XII, p. 277
39
faire aucune convention ou renonciation dont l’objet de changer l’ordre légal des successions ». Les articles
791 et 1600 en font application à la renonciation et à la vente « on ne peut, même par contrat de mariage,
renoncer à la succession d’un homme vivant, ni aliéner les droits éventuels qu’on peut avoir de cette
succession » (art. 791) ; « on ne peut vendre la succession d’une personne vivante, même de son
consentement » (art. 1600).
La prohibition est donc générale ; elle frappe toute stipulation et il est indifférent que le de cujus
soit ou non partie à l’acte : le pacte sur sa succession est prohibé comme celui sur la succession d’autrui
(art 1130…même avec le consentement de celui de la succession duquel il s’agit », art. 1600 « …même de
son consentement »).
La protection de l’héritier et la sauvegarde de la liberté de tester justifient la prohibition de
principe.
On définira le pacte sur succession future (A) avant de voir les pactes sur succession future
exceptionnellement autorisés (B).

A – La définition du pacte sur succession future


Un certain nombre de critères sont indifférents à la qualification d’un acte juridique comme
constituant ou non un pacte sur succession future. Seul compte l’objet du pacte qui doit porter sur une
succession future : notion délicate à préciser.
I – Les caractères indifférents
La prohibition légale est conçue en termes très généraux : « on ne peut… faire aucune
stipulation… ». Ainsi sont indifférents :
- la nature unilatérale ou conventionnelle de l’acte ;
- le caractère gratuit ou onéreux ;
- l’étendue des pactes ;
- la nature de la succession (légale, testamentaire) ;
- le doute sur l’existence du de cujus en cas d’absence.

II – L’objet du pacte
Le pacte peut avoir pour objet
- les actes par lesquels l’héritier présomptif dispose de ses droits dans une succession future. Il en est
ainsi de la renonciation et de l’aliénation ;
- les actes par lesquels le de cujus dispose de sa succession future. Il s’agit ici de protéger le de cujus
lui-même et non l’héritier. La loi lui interdit de disposer irrévocablement de sa succession.
B – les pactes sur succession future exceptionnellement autorisés
On distingue des pactes autorisés :
- par faveur pour la famille : clause commerciale24, renonciation anticipée à la succession du conjoint
au cas de séparation de corps (droit français) ;
- par souci de sécurité juridique (art 918 et 930 c. civ) ;
- dans l’intérêt des entreprises : clauses des statuts sociaux, clauses hors statuts (société anonyme)

24
C’est la clause d’un contrat de mariage conférant à l’un des époux la faculté de recueillir à titre onéreux dans la succession de son
conjoint tel bien personnel (époux séparés de biens) ou tels biens propres (époux communs en biens) de ce dernier. Elle est dite
commerciale parce qu’elle a été conçue par la pratique pour le fonds de commerce exploité par le ménage, mais qui appartient
exclusivement à l’un des époux ; elle permet à l’autre, s’il survit, de conserver l’instrument de sa profession moyennant indemnisation
des héritiers.
40
TITRE II : LA TRANSMISSION DE LA SUCCESSION

Par le fait de la succession, un héritier ou un légataire universel ou à titre universel devient titulaire
du patrimoine ou d’une partie du patrimoine du de cujus.
Contrairement à la dévolution, la transmission est commune à la succession ab intestat et à la
succession testamentaire.

CHAPITRE I : LE MODE DE TRANSMISSION


Il convient de déterminer successivement :
- le mode de transmission ;
- le droit d’option des héritiers ;
- la pétition d’hérédité ;
- la prohibition des actes sur succession future.

Deux questions fondamentales, mais fondamentalement différentes, sont abordées ici, la question
de l’acquisition des droits du de cujus et celle de l’exercice de ces droits.
En termes plus concrets, l’une et l’autre question se posent par rapport aux biens corporels que le
de cujus a laissés, à savoir : l’acquisition de la propriété desdits biens par l’héritier ou le légataire nécessite-
t-elle une formalité ? L’exercice de son, droit de propriété, notamment quant à l’appréhension matérielle
de ces mêmes biens, est-il subordonné à une formalité ?

41
La réponse est négative pour la 1ère question.
Elle est tantôt négative, tantôt affirmative pour la 2de.
Les droits et biens du de cujus sont acquis par l’héritier ou le légataire sans formalité : c’est le
principe de l’acquisition immédiate et sans formalité. Elle se produit de plein droit. En effet, l’article 711cc
classe la succession parmi les modes d’acquisition de la propriété.
Mais on peut devenir propriétaire des biens ou titulaires des droits du de cujus sans pouvoir exercer
ces droits. La faculté d’appréhender les biens successoraux sans formalité est accordée à certains
successeurs : on dit qu’ils ont la saisine.
Cette faculté est refusée à d’autres qui, s’ils sont ab intestat doivent se soumettre à une autorisation
judiciaire et s’ils sont testamentaires, doivent s’adresser aux héritiers ab intestat pour obtenir la délivrance
de leurs legs. Ils n’ont pas la saisine.

SECTION I – LA SAISINE
Signifiant originairement « possession », la saisine est devenue plus que la possession pour être
comprise comme l’aptitude à exercer la possession et par conséquent comme le droit d’appréhender les biens
successoraux.
Aussi, certaines règles ne se rattachent à la saisine :
- la saisine est sans rapport avec la transmission de la propriété des biens successoraux. Cette
transmission s’opère immédiatement et de plein droit au profit de tous les successeurs, alors que
tous ne sont pas saisis. Par conséquent, une personne peut avoir la propriété d’un bien dont elle
n’est pas saisie.
- La saisine n’est pas davantage la possession des biens du de cujus. Un héritier qui a la saisine peut
ne pas avoir matériellement la possession des biens héréditaires.
- La saisine n’est pas la transmission à l’héritier de la qualité juridique de possesseur des biens
successoraux. Cette qualité est automatiquement et instantanément transmise à tous les
successeurs, qu’ils aient ou non la saisine.

Par conséquent et positivement, la saisine concerne simplement la prise de possession de


l’hérédité (biens corporels et incorporels), l’exercice par le successeur des droits dont le de cujus était le
titulaire.
Plus précisément, on peut la définir comme étant l’habilitation, légale, reconnue à certains
successeurs, à l’effet d’exercer les droits et actions du défunt sans avoir besoin d’accomplir aucune formalité
préalable ; ou encore, l’autorisation légale de se comporter de plano en possesseur de l’hérédité ;
l’investiture légale de la possession de l’hérédité.
De ces définitions découlent des effets, à savoir que la saisine s’effectue sous deux formes
différentes suivant qu’elle s’applique aux biens héréditaires eux-mêmes ou aux actions en justice.
1°) – En ce qui concerne les biens héréditaires, la saisine est la faculté de l’héritier saisi de les
appréhender, de s’en mettre en possession sans délai et de sa seule autorité, ce qui inclut le droit de les
administrer et d’en percevoir les revenus.
2°) – En ce qui concerne les actions en justice, la saisine se traduit par la substitution de plein droit
de l’héritier au de cujus, activement et passivement. Dès l’instant du décès, l’héritier saisi a qualité pour
intenter toutes les actions de toute nature qui appartenait au défunt (poursuivre ses débiteurs en
paiement), ainsi que pour défendre à celles qui appartenaient à des tiers contre le défunt (défendre à
l’action en paiement d’un créancier, par exemple).
C’est ces deux points, et sur eux seulement, que la situation des successeurs saisis diffère de la
situation de ceux qui ne le sont pas.
Toutefois, les héritiers saisis ne peuvent pas s’emparer des biens de la succession quand il y a
apposition des scellés.

42
Au vu de ce qui précède il convient d’examiner l’attribution de la saisine et les règles applicables
à défaut de la saisine.
A – L’attribution de la saisine
Aux termes de l’art. 724 cc dispose : « les héritiers légitimes, les enfants naturels et le conjoint
survivant sont saisis …». C’est la reproduction de la célèbre règle coutumière « le mort saisit le vif, son hoir
le plus proche ».
L’alinéa 2 de cet article prévoit que ceux qui ne sont pas saisis se fassent envoyer en possession ; ce
qui suppose un jugement. Etre saisi c’est être dispensé de cette formalité.
Dès il faut déterminer les successeurs auxquels la saisine est attribuée et les caractères de cette
attribution.
I – Les attributaires de la saisine
Elle est attribuée à tous les héritiers ab intestat.
Initialement héritiers irréguliers et privés de la saisine, le conjoint survivant25 et les enfants
naturels ont bénéficié d’une évolution. Seul l’Etat est demeuré successeur irrégulier.
Elle est aussi attribuée aux légataires i.e. aux successeurs testamentaires.

II – Les caractères de la saisine


La saisine est d’ordre public. Il n’appartient pas au de cujus d’en priver les successibles auxquels la
loi l’accorde.
Elle est individuelle.
Elle est indivisible, car s’il y a plusieurs héritier, chacun est saisi pour le tout jusqu’au partage.
Elle est successive ; en effet, en cas de renonciation des plus proches, elle passe aux suivants, i.e. à
ceux du degré ou de l’ordre subséquent.

B – les règles applicables à défaut de saisine


A l’Etat, aujourd’hui seul successeur irrégulier, il est imposé la formalité de l’envoi en possession.
Il s’agit de vérifier judiciairement son droit.
Les légataires doivent simplement demander la délivrance de leurs legs qui leur est due, dans le
cas le plus fréquent, par les héritiers ab intestat.
I – L’envoi en possession de l’Etat successeur irrégulier
Des formalités préalables sont imposées, à savoir, l’apposition des scellés et la confection d’un
inventaire. Il s’agit d’établir officiellement la consistance de l’hérédité pour le cas où un héritier apparaîtrait
plus tard ou en réclamerait la restitution.
L’Administration des Domaines demande un jugement au TGI du lieu d’ouverture de la
succession. L’Etat ne pourra appréhender les biens et exercer les actions héréditaires qu’après obtention
de l’envoi en possession.
Une fois que l’envoi en possession a été obtenu, le successeur irrégulier se trouve dans la même
situation qu’un héritier saisi. L’envoi en possession lui confère une saisine judiciaire.
II – La délivrance des legs
La délivrance des legs constitue une condition de mise en possession des légataires saisis.
N’exerçant pas leurs droits de plano, ils doivent s’adresser aux successeurs ab intestat.

SECTION II - LE DROIT D’OPTION DES HERITIERS ET DES LEGATAIRES


Bien que la transmission de la succession s’opère de plano, elle ne saurait être imposée à l’héritier.
Il doit donc d’abord prendre parti, i.e. opter. En effet, suivant l’ancien droit « nul n’est héritier qui ne veut ».
L’article 775 c. civ. dispose à cet effet que « nul n’est tenu d’accepter une succession qui lui est échue ».

25
O La saisine a été attribuée au conjoint survivant par l’ordonnance du 23 décembre 1958.
43
Dès lors, on appelle successible, l’héritier qui n’a pas encore exercé son droit d’option. Cette option
comporte trois termes :
- l’héritier peut accepter purement et simplement, quand il a la certitude que la succession est bonne ;
- il peut accepter sous bénéfice d’inventaire, ce qui oblige certaines formalités, mais le dispense de
payer un passif supérieur à l’actif. C’est le parti à adopter quand il y a doute sur l’importance
comparée de l’actif et du passif, i.e. sur la solvabilité du défunt
- il peut renoncer à la succession : c’est le parti le plus simple lorsque la succession est déficitaire.
Quant aux légataires, la loi ne disant rien, le principe du droit d’option leur est étendu.

§ 1 – L’ETUDE GENERALE DU DROIT D’OPTION


Trois questions se posent : l’époque de l’option, les caractères juridiques qu’elle présente, les
causes d’annulation qui peuvent l’atteindre.
A – Le moment de l’option
Un double délai est ouvert à l’héritier à compter de l’ouverture de la succession. Un premier
principe est que l’option n’est exercée avant l’ouverture de la succession. Toute option anticipée serait nulle
par application du principe général de la prohibition des pactes sur succession future.
Il y a un premier délai pendant lequel l’héritier ne peut être contraint à prendre parti. C’est le délai
de réflexion, dénommé « délai pour faire inventaire et délibérer ».
Tant qu’il ne s’est pas écoulé trente ans depuis l’ouverture de la succession, il demeure libre
d’opter ; après trente ans, son droit d’option est prescrit.

I – Le délai pour faire inventaire et délibérer


L’héritier a un délai de trois mois pour faire l’inventaire. Cette opération le renseignera sur
l’importance de l’actif. Il a ensuite un délai de quarante jours pour délibérer, i.e. pour se décider du parti à
prendre (art. 795).
Le délai de trois mois court à compter du jour de l’ouverture de la succession, celui de quarante
jours, à compter de l’expiration des trois mois ou du jour de la clôture de l’inventaire.
Ce délai peut être prorogé par une décision du tribunal.
Pendant ce délai, il dispose d’une exception dilatoire contre les créanciers de la succession.

II – La prescription du droit d’option


Aux termes de l’article 789 c. civ., « la faculté d’accepter ou de répudier une succession se prescrit
par le laps de temps requis pour la prescription la plus longue des droits immobiliers », c’est-à-dire le délai
du droit d’option est de trente ans. Cette prescription a pour point de départ le jour de l’ouverture de la
succession. S’il n’a pas opté au bout de ce temps, il devient étranger à la succession, car il perd son droit
héréditaire lui-même.

B - les caractères de l’option


I - La liberté de l’option et ses exceptions
En principe l’option est libre. Il appartient à chacun de choisir entre les trois partis que la loi lui
offre. Mais en principe comporte deux exceptions :
1°)- Le cas d’une succession qui échoit à un mineur non émancipé ou un incapable majeur
Le représentant du mineur non émancipé peut librement accepter la succession sous bénéfice
d’inventaire. En revanche, pour l’acceptation pure et simple et la renonciation, il doit obtenir l’autorisation
du conseil de famille en cas de tutelle et du juge chargé des mineurs en cas d’administration légale sous
contrôle judiciaire.

44
Ces règles sont applicables au majeur en tutelle. Quant au majeur en curatelle, il peut accepter
seul sous bénéfice d’inventaire, mais l’assistance de son curateur sera nécessaire pour l’acceptation pure
et simple ou la renonciation.
2°)- Le cas où un héritier meurt après l’ouverture de la succession, mais avant d’avoir opté
Son droit héréditaire et son droit d’option sont transmis à ses propres héritiers.
II – L’indivisibilité de l’option
L’option doit être indivisible, car un héritier ne peut pas prendre un parti différent sur les divers
éléments de la succession, i.e. accepter celle-ci pour certains biens et y renoncer pour d’autres. Ainsi, en
cas de pluralité d’héritiers, l’acceptation de l’un porte sur la totalité de la succession, si les autres renoncent
leur part lui accroît et cet accroissement est forcé (art. 786 c.civ).
III – Le caractère pur et simple de l’option
L’option est nécessairement pure et simple, i.e. qu’elle ne peut comporter aucune modalité, tel un
terme ou une condition.
Par ailleurs, elle est définitive et irrévocable, surtout l’acceptation pure et simple.
C - les causes d’annulation de l’option
L’incapacité et les vices du consentement.
§ 2 – L’ETUDE PARTICULIERE DES DIFFERENTS TERMES DE L’OPTION

I – L’acceptation pure et simple (art. 778 cc)


C’est la renonciation au droit d’adopter un autre parti. Elle a pour effet de confirmer l’acquisition
de l’hérédité faite dès l’instant de la mort du de cujus. Par ailleurs, elle a pour effet d’obliger l’héritier aux
dettes et charges de la succession ultra vires successionis i.e. au – delà des forces de la succession, de l’actif
de celle –ci.
L’acceptation pure et simple peut être expresse ou tacite.
Il y a acceptation expresse lorsque l’héritier prend la qualité d’héritier dans un acte authentique ou
privé.
Il y a acceptation tacite quand l’héritier a fait un acte qui suppose nécessairement son intention
d’accepter. Il s’agit des actes qu’il n’aurait pas pu faire s’il n’était pas héritier acceptant. Ces actes peuvent
porter sur des biens ou droits successoraux, individuellement considérés, tels que les actes de disposition,
d’administration et de jouissance ou sur la part successorale de l’héritier, telles que la cession des droit
successifs, la renonciation gratuite ou onéreuse au profit de cohéritiers déterminés.
L’acceptation peut être forcée lorsqu’elle résulte du recel ou du divertissement. Il y a recel ou
divertissement lorsqu’un héritier cache certains effets de la succession avec l’intention de se les approprier
exclusivement en les soustrayant du partage (art. 792 cc.). Il est déchu tout à la fois de la faculté de renoncer
et d’accepter sous bénéfice d’inventaire. En plus, il est privé de sa part sur les objets recelés .Le recel est
donc une faute entraînant une peine privée.
Pour qu’un acte constitue un recel il faut :
- qu’il intéresse le partage ;
- qu’il y ait un élément intentionnel, l’intention frauduleuse : la volonté de déséquilibrer le partage à
son profit.
Le recel a pour effet l’attribution de la qualité d’héritier pur et simple et la privation de sa part dans les
objets qu’il a cherché à s’approprie. Toutefois, sa contribution normale au passif n’est pas diminuée.

II – l’acceptation sous bénéfice d’inventaire


C’est le parti qui présente l’avantage de limiter pour l’héritier la charge d’acquitter le passif
successoral non ultra vires successionis. Cette obligation n’existe alors que dans les limites de l’actif
recueilli, intra vires successionis.

45
Elle est faite par déclaration au greffe du TGI du lieu d’ouverture de la succession après un inventaire
exact des biens de la succession par un notaire.
La déchéance de la faculté d’accepter sous bénéfice d’inventaire a plusieurs causes telles que :
- l’expiration du délai de prescription de trente ans ;
- l’accomplissement d’un acte préalable valant acceptation pure et simple.

III – la renonciation
C’est le parti qui fait perdre à l’héritier tout droit sur l’actif et le libère de toute obligation au passif.
La renonciation est un acte formaliste, elle ne se présume pas. Elle doit donc être expresse et faite
par déclaration au greffe du TGI du lieu d’ouverture de la succession sur un registre tenu à cet effet.
L’’héritier qui renonce est censé n’avoir jamais été héritier, il devient étranger à la succession. La
renonciation a un effet rétroactif.
Corrélativement, il échappe au paiement des dettes et charges de la succession.
La part du renonçant accroît celle des cohéritiers, et s’il est seul, la succession est dévolue aux
héritiers du degré subséquent (art. 786 cc.).

SECTION III - LA PÉTITION D’HÉRÉDITÉ


Par le fait du décès, l’héritier devient de plein droit titulaire du patrimoine du de cujus. Mais, il
peut arriver que tout ou partie des éléments de ce patrimoine lui échappent, soient détenus par un tiers.
Si ce tiers ne se prétend pas être lui-même héritier ou légataire parce que ayant acheté le bien qu’il
détient au défunt, l’héritier exercera contre lui une action en revendication.
Au contraire, si le tiers prétend lui-même avoir droit à la succession comme héritier ou légataire,
l’action à engager contre lui portera uniquement sur le point de savoir lequel des adversaires a
véritablement la qualité d’héritier ou de légataire : c’est l’action en pétition d’hérédité.
La pétition d’hérédité est, à cet effet, l’action par laquelle un héritier ou un légataire universel entend
faire reconnaître sa qualité, à l’effet de recouvrer tout ou partie du patrimoine successoral.
Le succès de cette action entraîne la restitution des biens au demandeur. Le défendeur de mauvaise
foi restitue les fruits, celui qui est de bonne foi les conserve.
A l’égard des tiers on applique la théorie de l’apparence.

CHAPITRE II – LA LIQUIDATION DU PASSIF SUCCESSORAL


Par liquidation du passif, on entend, d’une part, les modes de règlement du passif et d’autre part, la
détermination de la charge du passif.
Même si le défunt est mort insolvable, ses héritiers sont tenus d’acquitter le passif sur leurs biens
personnels.
De même, lorsque les héritiers sont insolvables, les créanciers personnels viennent en concours avec
les créanciers successoraux.

SECTION I – LE DROIT COMMUN DE LA LIQUIDATION DU PASSIF


Il porte sur la détermination des obligations passives des héritiers et des successeurs testamentaires
et des modalités de règlement du passif successoral.

§ 1 – La détermination des obligations passives des héritiers et des successeurs testamentaires


Il s’agit pour les héritiers d’acquitter les dettes qui constituent stricto sensu le passif successoral,
l’obligation d’acquitter les legs particuliers et les charges de la succession.

46
A – Le paiement des dettes
Cette obligation d’acquitter les dettes du défunt pèse sur les successeurs universels - héritiers ab
intestat, légataires universels ou à titre universel -, mais n’est pas imposée aux légataires particuliers.
Deux problèmes se posent ici : la détermination des dettes transmissibles aux successeurs universels
et l’étendue de l’obligation aux dettes.
S’agissant de la détermination des dettes, en principe, toutes les dettes du défunt quelle que soit
l’origine ou la nature doivent être payées aux créanciers par les successeurs universels. L’origine importe
peu : obligation contractuelle ou extra - contractuelle.
Seules sont exclues les obligations qui s’éteignent par le décès du débiteur, celles qui ont un
caractère viager, nées des contrats conclus intuitu personæ (mandat contrat de société, louage de service
ou d’ouvrage).
Quant à l’étendue de cette obligation, il a toujours été admis que les héritiers ab intestat, saisis sont
tenus ultra vires des dettes du défunt (art. 724 cc.), (héritiers légitimes, naturels, conjoint survivant). Pour
les successeurs testamentaires, le légataire universel qui n’est pas en concours avec des héritiers
réservataires, parce qu’il est saisi est tenu ultra vires.

B – Le paiement des legs particuliers


Une distinction est à faire. Lorsqu’il s’agit d’un legs de corps certain, le légataire devient propriétaire
par l’effet du décès. A ce titre, il a une action réelle en revendication. Lorsqu’il s’agit d’un legs de chose de
genre, spécialement de somme d’argent, le légataire se présente comme un créancier des successeurs
universels.
L’obligation de payer les legs particuliers pèse donc en principe sur les successeurs universels :
héritiers ab intestat, légataires universels ou à titre universel.
Quant à l’étendue de cette obligation, elle pose le problème de l’obligation ultra vires, même
solution que dans l’obligation aux dettes.
S’agissant des modalités de paiement de ces legs particuliers, on consacre la préférence des
créanciers sur les légataires ; les légataires sont primés par les créanciers du défunt. Néanmoins, les
légataires particuliers ont certaines garanties de paiement destinées à les protéger contre l’insolvabilité
éventuelle des créanciers universels : ils ont la faculté de demander la séparation des patrimoines et ils
bénéficient d’une hypothèque légale portant sur les immeubles laissés par le défunt. Cette hypothèque leur
confère un droit de préférence, et un droit de suite, en plus elle est indivisible et le légataire peut donc
réclamer le total de son legs à chacun de ceux qui détiennent des immeubles héréditaires.

C – Le paiement des charges


Le mot charges désigne au sens large toutes les obligations qui pèsent sur les successeurs universels,
y compris au premier chef, les dettes du défunt. C’est dans ce sens que l’emploie l’article 724.
Au sens restreint, il désigne les dettes qui n’ont jamais pesé sur le de cujus, mais qui résultent même
du fait du décès, plus nettement, les frais funéraires.
On les assimile aux dettes successorales, le défunt étant considéré comme en étant la source.
Il s’ensuit que les créanciers de ces charges ont les mêmes droits que les créanciers successoraux et
non les mêmes droits que les créanciers personnels de l’héritier.
Comme les créanciers successoraux et contrairement aux créanciers personnels, les créanciers des
charges peuvent demander la séparation des patrimoines, et peuvent, jusqu’au partage, saisir l’ensemble
des biens du défunt. En cas d’acceptation bénéficiaire, leur situation est pareille à celle des créanciers
successoraux. Ils n’ont pas la faculté de demander le partage ou le rapport au nom des héritiers. Et surtout,
ils ne peuvent pas se faire payer sur les biens personnels de ceux-ci, mais seulement sur le patrimoine
successoral.
Quant à la détermination de ces charges, il s’agit des dettes qui constituent une conséquence directe
et nécessaire du décès, à savoir, les frais funéraires, les frais de deuil de la veuve, les frais utiles de

47
liquidation (i.e. les frais de scellé, d’inventaire et de compte (art. 1481 et 1750 al.2)), la créance de salaire
différé.

§ 2 – LE REGLEMENT DU PASSIF SUCCESSORAL


Il s’agit de la liquidation au sens étroit du mot, i.e. principalement de la réponse aux questions
suivantes : comment l’héritier (ou autre successeur universel) réalise – t-il l’actif afin de régler le passif ;
dans quel ordre paie-t-il ses créanciers successoraux ; comment s’établit le concours entre ceux-ci et les
créanciers personnels ?
La réponse à ces questions passe par le dégagement un principe général avant l’examen de la
situation particulière de la pluralité de successeurs universels.

A – Le principe général
mort du défunt, son patrimoine ne conserve pas une individualité. Il y a donc confusion immédiate du patrimoine
successoral et du patrimoine personnel de l’héritier, dès lors il n’y a plus qu’un seul actif et un seul passif.
L’héritier succède ainsi à l’actif brut ; et s’il y a plusieurs héritiers, ils se partagent cet actif brut, chacun
ayant ensuite à régler sa part de passif.

B – Le règlement du passif en cas de pluralité de successeurs universels


La pluralité de successeurs universels fait naître un double problème, comme dans tous les cas où
plusieurs personnes répondent d’une même dette.
- problème du droit de poursuite ou de l’obligation aux dettes qui se pose entre ces successeurs et les
créanciers successoraux : pour quelle part ceux-ci peuvent-ils poursuivre chacun d’eux ?
- problème de la contribution aux dettes qui se pose dans les rapports des successeurs entre eux : pour
quelle part chacun doit-il supporter la charge définitive de la dette ?

I – L’obligation aux dettes


Elle est régie par le grand principe de la division des dettes.
D’après ce principe, chaque héritier n’est tenu de payer la dette que pour la part dont il est saisi ou dont
il est tenu comme représentant le débiteur.
Concrètement, le créancier doit diviser ses poursuites entre les héritiers, et il ne peut réclamer à
chacun qu’une part de la dette proportionnelle à la part d’actif que celui-ci a recueillie. Dans une succession
dévolue à 04 enfants, il réclame 1/4 à chacun.
Il résulte des dispositions de l’article 1120 cc que l’héritier poursuivi par un créancier du défunt est
en droit de ne payer qu’une portion de la dette, celle correspondant à sa vocation héréditaire26.
La règle de la division des dettes présente des avantages :
- d’une part, elle permet aux créanciers de poursuivre le paiement contre chaque héritier, dès le
décès, sans attendre par conséquent le partage ;
- d’autre part, et surtout, elle assure la protection des cohéritiers, lesquels n’ont pas à supporter
l’insolvabilité de l’un d’eux, chacune ne pouvant être poursuivi qu’au prorata de sa vocation
héréditaire.
Les biens héréditaires constituent le gage indivisible des créanciers successoraux qui y ont un
droit exclusif.
Mais, la règle de la division des dettes connaît des exceptions légales (article 1221 cc).
Il existe des circonstances où la dette est indivisible soit de par sa nature, dette hypothécaire, soit
par la volonté du de cujus ou du successeur universel.

26
Si le défunt laisse son père et son frère, le père a vocation à recueillir le ¼ de la succession et le frère recueille les ¾. Par conséquent,
le père peut être poursuivi pour le ¼ de chaque dette et le frère pour les 3/4.
48
II - La contribution aux dettes
En principe, le passif est réparti proportionnellement aux parts successorales : c’est le principe de
la proportionnalité entre l’actif et le passif.
En effet, la part que doit définitivement supporter chaque héritier dans les dettes héréditaires doit
correspondre à sa vocation héréditaire. Ainsi, toutes les fois qu’un héritier paie plus que sa part, il a un
recours contre les autres successeurs tenus au passif pour se faire rembourser ce qu’il a payé au-delà de sa
contribution.

SECTION II - LA LIQUIDATION DU PASSIF HEREDITAIRE EN CAS


D’ACCEPTATION SOUS BENEFICE D’INVENTAIRE ET DE SEPARATION DES
PATRIMOINES

§ 1 - LE BENEFICE D’INVENTAIRE
Il est réglementé par les articles 793 à 810 du code civil.
Il n’a pas lieu de plein droit ; il doit être demandé.
Il conduit au résultat que le successeur qui en bénéficie n’est plus tenu qu’intra vires et non plus
ultra vires ; ici le successeur bénéficiaire n’est tenu au passif de la succession que dans la limite de l’actif.
L’acceptant bénéficiaire, qui continue aussi la personne du de cujus, bénéficie de la séparation
entre son patrimoine et celui du défunt dont il reste saisi. C’est lui au contraire, qui est chargé de
l’administration de le liquider.

A – Le maintien de la séparation entre le patrimoine du défunt et celui de l’héritier


Cette séparation a deux effets : l’héritier bénéficiaire est tenu des dettes héréditaires à
concurrence seulement de la valeur des biens qu’il a recueillis : c’est là le but même de cette
institution. Les créanciers et légataires (de somme d’argent) de la succession ne pourront se payer que sur
les biens de la succession. Lorsqu’ils les auront épuisés, ils ne pourront pas se retourner contre l’héritier
(art. 802 c. civ.)…

B – L’administration et la liquidation de la succession bénéficiaire


C’est l’héritier qui procède à cette administration et à cette liquidation.
En administration, l’héritier est propriétaire du patrimoine successoral ; gérant de sa propre chose,
il n’est responsable que de ses fautes graves. (Art. 804). S’il est présumé déficitaire, les créanciers et
légataires peuvent faire apposer les scellés, exiger un inventaire des biens (Art. 810) ; de plus, l’héritier ne
peut vendre les biens que dans des formes déterminées par les articles 805 et 806. Enfin, l’héritier doit
rendre compte, faute de quoi il pourrait être contraint sur ses biens personnels (Art.803). Quant à la
liquidation de la succession, elle oblige l’héritier à réaliser l’actif, à vendre les biens et avec l’argent ainsi
obtenu, à régler le passif, payer les créanciers.

C - La cessation du bénéfice d’inventaire


Le bénéfice d’inventaire cesse à la suite de la renonciation au bénéfice par l’héritier bénéficiaire ;
l’héritier bénéficiaire peut en effet se porter acceptant pur et simple, et il peut le faire soit expressément,
soit tacitement.
Le bénéfice d’inventaire cesse aussi en cas d’échéance de l’héritier du bénéfice d’inventaire pour
divertissement ou recel ; dans ce cas, il est réputé acceptant pur et simple.

§ 2 - - DE LA LIQUIDATION DU PASSIF EN CAS DE SEPARATION DES PATRIMOINES


C’est un bénéfice que la loi accorde aux créanciers du défunt pour éviter le concours des créanciers
de l’héritier acceptant pur et simple, sur les biens successoraux (art. 878 et 2111 cc). C’est dire que le droit
de demander la séparation des patrimoines est refusé aux créanciers personnels de l’héritier (Art. 881).
49
Ceux-ci n’ont que le droit de faire révoquer, pour fraude, l’acceptation que leur débiteur, héritier, aurait
faite d’une succession déficitaire.
Il y a lieu d’examiner les rapports des séparatistes et de l’héritier, les rapports des séparatistes et
des ayants cause de l’héritier et les rapports des séparatistes et des ayants cause de l’héritier.

A - Les rapports des séparatistes et de l’héritier


En principe, la séparation des patrimoines ne produit ici aucun effet, elle est destinée à protéger
les créanciers successoraux et les légataires contre les créanciers de l’héritier. Les séparatistes sont donc
autorisés à procéder à des mesures purement conservatoires : apposition des scellés, inventaire, mise du
mobilier sous séquestre. Des mesures plus énergiques peuvent aussi être prises, telle que l’obligation
imposée à l’héritier de fournir caution ou celle vendre le mobilier et d’en consigner le prix.

B - Les rapports des séparatistes et des ayants cause de l’héritier


Il peut s’agir des créanciers personnels de l’héritier ou des tiers acquéreurs des biens successoraux.
Les séparatistes ne bénéficient pas d’un droit de suite contre le tiers acquéreur lorsque
l’acquisition porte sur un meuble. Admission mitigée de ce droit de suite en cas d’immeuble.
Dans les rapports entre les séparatistes et les créanciers personnels de l’héritier, il n’y a pas de
concours sur les biens successoraux.
Les créanciers personnels de l’héritier ne peuvent pas agir sur les biens successoraux, car le
patrimoine successoral constitue le gage exclusif des créanciers et légataires séparatistes. La séparation des
patrimoines constitue un privilège. Elle confère aux séparatistes un droit de préférence sur les biens
successoraux.
Les séparatistes priment donc les créanciers hypothécaires qui se sont inscrits avant eux du chef
de l’héritier.
Sur les biens personnels de l’héritier, les créanciers personnels de l’héritier n’ont pas de préférence.

C - Les rapports des créanciers successoraux et des légataires entre eux


Si tous ont demandé la séparation des patrimoines, aucune difficulté ne se présente. Il s’en suit
que les créanciers sont préférés aux légataires.
Mais un problème difficile se pose lorsque, parmi les créanciers successoraux et les légataires,
certains seulement ont demandé la séparation des patrimoines.
Dès lors on tranche la difficulté en deux temps :
Dans un premier temps on donne aux séparatistes les sommes qu’ils auraient eues si tous les
intéressés avaient demandé la séparation. Les diligentes ne souffrent ni ne profitent de la négligence des
autres.
Dans un deuxième temps, le surplus se partage égalent entre les non – séparatistes et les créanciers
personnels de l’héritier. Les non – séparatistes souffrent alors de la diligence des autres.

CHAPITRE III – LA LIQUIDATION DE L’ACTIF SUCCESSORAL : LA DISTRIBUTION


DE LA SUCCESSION

Si l’on fait abstraction des créances qui, aux termes de l’art. 122 OCC, se divisent de plein droit
comme les dettes, dès le jour du décès, entre les héritiers, au prorata de leur vocation héréditaire :
- La masse partageable comprend, les biens existants au décès du de cujus, les biens que celui-
ci a laissés. A ceux-ci, il faut ajouter les biens remplaçant un bien induis par suite de la subrogation réelle
(bien acquis en remploi).
Ces biens sont évalués, en vue du partage, au jour de celui-ci ou du moins, à une date plus
proche du partage, à la veille du partage et dans leur état à cette date
50
- La masse partageable comprend d’autre part, les biens rapportés (libéralités sans dispense
de rapport et dettes).
En cas de pluralité d’appelée, avant le partage, les biens successoraux sont indivis. C’est l’indivis
successoral qui prend fin par le partage, en même temps, bien souvent que l’indivis post-communautaire,
lorsque le mariage (en communauté) aurait été dissout par le décès de l’un des époux.
Par ailleurs, l’existence d’obligation pouvant exister entre la succession et un successeur (héritier
créancier ou débiteur de la succession) conduit à l’établissement d’un « compte d’indivision » pour chaque
successeur ab intestat ou testamentaire, seul le solde de ce compte positif ou négatif donne lieu à
règlement.

SECTION I – L’INDIVISION SUCCESSORALE


Lorsque la succession ne comprend qu’un seul héritier, tout l’actif successoral lui revient dès que le
passif est liquidé.
En cas de pluralité d’appelés, avant le partage, les biens successoraux sont indivis, c’est l’indivision
successorale qui prend fin avec le partage, en même temps, bien souvent que l’indivision post –
communautaire, lorsque le mariage, en communauté avait été dissous par le décès de l’un des époux.
Les cohéritiers se trouvent donc d’abord placés dans un état d’indivision. Il y a lieu ensuite, pour
eux de procéder au partage. Encore faut-il déterminer ce qui doit être partagé, former la masse partageable.
C’est principalement à quoi tendent les rapports : rapport des libéralités que le de cujus avait faites à ses
successibles, rapports des dettes dont ceux-ci étaient tenus envers celui-là.
Techniquement les rapports sont liés au partage lui-même, ils constituent l’une des opérations de
partage.
Par ailleurs, l’existence d’obligations pouvant exister entre la succession et un successeur (héritier
créancier ou débiteur de la succession) conduit à l’établissement d’un compte d’indivision pour chaque
successeur ab intestat ou testamentaire, seul le solde de ce compte positif ou négatif, donne lieu à
règlement.
L’indivision successorale est une situation dans laquelle les droits des cohéritiers ne portent pas
directement sur les biens successoraux, matériellement considérés, mais sur une fraction correspondant à
la quotité pour laquelle chacun est appelé à la succession.
Le code civil avait conçu une indivision de courte durée et ne l’avait pas organisée.
En effet, tout d’abord, il l’a conçue comme un état essentiellement temporaire pouvant cesser à
chaque instant de la seule volonté d’un seul indivisaire demandant le partage (art. 815 cc).
Ensuite, ce partage ayant un effet déclaratif (art. 883 cc), chacun est considéré comme étant
propriétaire de son lot depuis le décès. L’indivision est ainsi effacée, même pour le passé.

§ 1 – LE CONTENU DE L’INDIVISION
Si l’on fait abstraction des créances qui, aux termes de l’article 1220 cc, se divisent de plein droit
comme les dettes, dès le jour du décès, entre les héritiers au prorata de leur vocation héréditaire, la masse
partageable qui forme l’indivision comprend les biens suivants :
- les biens existants au décès du de cujus, i.e. les biens que le de cujus a laissés, ceux dont il était
propriétaire lors de son décès ;
- les biens subrogés aux biens successoraux, i.e., les biens remplaçant les biens indivis par subrogation
réelle: les biens acquis en remploi27. Si un nouvel immeuble a été acquis en remploi du prix d’un bien

27
Par exemple, l’indemnité d’assurance qui remplace l’immeuble indivis détruit tombe dans l’indivision. Le mécanisme de subrogation
joue surtout dans le cas où un bien du défunt a été vendu avec l’accord des cohéritiers pour le compte de la masse successorale. Dans un
arrêt de principe, l’arrêt CHOLLET – DUMOULIN, la Cour de cassation a décidé que la créance du prix entre dans l’actif à partager pour
y être soumise, « comme l’aurait été l’immeuble même qu’elle remplace », aux règles du partage : ch. réun., 5 décembre 1907, D. 1908.
1. 113, note A. COLLIN, S. 1908. 1, note LYON –CAEN et concl. BAUDOUIN.
51
héréditaire vendu, c’est celui-là et non le prix de celui-ci qui figure dans l’indivision. Enfin, si le bien
acquis en remploi a été revendu, c’est le prix de revente qui fait partie de la masse indivise. La
subrogation réelle joue donc, selon l’expression pertinente d’un auteur, « au premier, au second ou au
troisième degré »28. Ces biens sont évalués en vu du partage au jour de celui-ci ou, du moins, à une date
plus proche du partage, i.e. la veille du partage et dans leur état à cette date ;
- les biens rapportés (libéralités sans dispense de rapport et dettes). L’indivision comprend aussi les biens
qui avaient été donnés par le de cujus à l’un de ses successibles, et qui sont soumis au rapport, rapport
effectué tantôt en nature, tantôt en moins prenant. Ils font donc partie de l’actif successoral ;
- les fruit et revenus des biens indivis.

§2 – LA GESTION DES BIENS INDIVIS


Deux principes caractérisent l’indivision : sa précarité et sa gestion unanime des biens. Ce qui
suscite l’examen de la jouissance des biens indivis ainsi que la situation des créanciers.
L’accord unanime des indivisaires est exigé en ce qui concerne les actes d’administration que
nécessite la gestion de l’indivision.
La précarité de l’indivision a été consacrée par l’article 815 cc selon lequel « Nul ne peut être
contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué ».

§3 – LES DROITS ET OBLIGATIONS DES INDIVISAIRES


Deux catégories de droits et obligations doivent être distinguées. Certains sont liés à la jouissance
des biens indivis ; d’autres ont trait à la cession par un indivisaire de ses droits dans l’indivision.
A – Les droits et obligations liés à la jouissance des biens indivis
Les indivisaires ont le droit d’usage et de jouissance; chaque indivisaire a le droit d’user et de jouir
des biens indivis.
Toutefois, ils ont le droit d’user et de jouir des biens indivis à une double condition : ils doivent
respecter la destination du bien dont ils jouissent ; ils doivent ne porter aucune atteinte aux droits des
autres indivisaires. La règle est traditionnelle. Cependant, si le bien indivis est grevé d’usufruit – usufruit
du conjoint survivant par exemple- seul l’usufruitier a le droit d’en user et d’en jouir.
Ils ont également droit aux fruits. Les fruits et revenus des biens indivis accroissent l’indivision.

B– Les droits pour un indivisaire de céder ses droits dans l’indivision


L’héritier indivisaire conserve les prérogatives de tout titulaire de droit patrimonial et en
particulier le droit de disposition.
Il peut à cet effet aliéner ses droits dans un bien indivis déterminé, auquel cas l’acte n’est pas nul
ipso facto, mais son efficacité est subordonnée aux résultats du partage.29
Il peut aussi céder durant l’indivision sa quote part dans la masse indivise : son droit à la moitié,
au tiers, au quart… de la succession. C’est une cession de droits successifs30.
Ils ont également le droit du retrait successoral31.

§ 4– LA DUREE DE L’INDIVISION

28
MALAUREI, pp. 164 et 165.
29
Si le bien dont une quote part a été cédée a été attribué à celui qui, en a disposé, l’aliénation est rétroactivement validée. Mais, s’il est
attribué à un autre, la cession ne produira aucun effet, le cédant étant alors réputé par l’effet déclaratif, n’avoir aucun droit sur le bien.
L’opération est donc très dangereuse pour les tiers acquéreurs.
30
En principe, cette cession opère substitution complète du cessionnaire au cédant : celui-là acquiert tous les droits de celui-ci,
notamment, le droit de prendre part au partage, et se trouve tenu de ses obligations.
31
Par ce droit, les cohéritiers du cédant ont la possibilité d’évincer l’acquéreur de droits successifs s’il est étranger à la succession. Ils
exercent alors le retrait successoral (art 841cc). En remboursant au tiers le prix de son acquisition, ils se substituent à lui. Ce droit de
retrait a pour but de sauvegarder l’unité familial de la dévolution : d’empêcher un étranger de participer au partage, d’une part parce
qu’il risquerait d’y surprendre les secrets de famille.
52
La cause normale de cessation de l’indivision est le partage. Et le principe fondamental est que
ce partage peut être provoqué, à tout instant, par tout indivisaire. Il dépend de chacun de mettre fin à
l’indivision quand il lui plaît. C’est la règle dite du partage forcé, énoncée à l’article 815 cc « nul ne peut être
contraint à demeurer dans l’indivision ».
Le partage est donc le droit, en ce sens qu’il ne peut être refusé à celui qui le demande, serait-il
seul contre tous.
Toutefois, les héritiers peuvent régler l’indivision par une convention d’indivision.
Cette convention doit être établie par écrit comportant la désignation des biens indivis et
l’indication des quotes parts appartenant à chaque indivisaire.
La convention peut être conclue soit pour une durée déterminée qui ne peut excéder 05 ans, soit
pour une durée indéterminée.
Dans ce ces, la gestion de l’indivision est assurée par un gérant nommé par les indivisaires qui
décident également de sa révocation, de ses pouvoirs et de ses droits.
Cette indivision peut également être prolongée par une décision judiciaire (art. 815 al. 5 à7 cc).

§ 5– LE COMPTE D’INDIVISION
Le compte regroupe en éléments « actif » et « passif » les rapports d’obligations existant entre
chaque successeur et la masse (héritier débiteur ou créancier de la masse). L’établissement des éléments
d’actif et de passif permet d’opérer la balance afin de déterminer le solde du compte. Enfin, il faut régler ce
solde. Le solde peut être soit favorable, soit défavorable à l’héritier.

SECTION II - LES OPÉRATIONS PRÉALABLES AU PARTAGE


Trois opérations principales sont nécessaires à faire avant le partage : la détermination de la réserve
héréditaire et de la quotité disponible, la réduction des libéralités et des legs, le rapport des libéralités, des
legs et des dettes.

§ 1 – L’EXISTENCE D’HERITIERS RESERVATAIRES : LES PROPORTIONS RESPECTIVES DE LA


RESERVE ET LA QUOTITE DISPONIBLE
La réserve et la quotité disponible s’expriment, l’une et l’autre, dans des fractions d’une unité qui est
le patrimoine du de cujus.
De la double fonction qui est attribuée à la réserve32, il résulte que ces fractions sont les mêmes
quelque soit le bénéficiaire de la libéralité. Le principe est que l’on ne peut pas donner ou léguer à un parent
plus qu’à un étranger.
La réserve héréditaire est une part de la succession soustraite à la volonté de du de cujus. Plus
précisément c’est une part de la succession ab intestat dont certains héritiers ne peuvent être privés par
des dispositions à titre gratuit. La part restante de la masse successorale dont le de cujus peut librement
disposer à titre gratuit est la quotité disponible.
Par souci de protection de la famille, le législateur interdit au de cujus de faire des libéralités et les
legs excessifs qui dépassent la quotité disponible et entament la réserve.
La réserve et la quotité disponible sont au préalable calculées par les cohéritiers avant toute autre
opération. Article 913-919 CC tiennent compte du nombre d’héritiers et de l’ordre des héritiers.
Selon l’article 913cc cette réserve dépend du nombre d’héritiers. Ainsi est elle (la
quotité disponible) :
- de la moitié si le de cujus laisse un seul enfant
- du tiers s’il en laisse deux
- du quart s’il en laisse trois ou plus
Ce qui fait une réserve de :

32
La réserve protège la famille contre les étrangers et protège les membres de la famille les uns contre les autres, de façon à limiter les
inégalités entre eux.
53
- la moitié s’il y a un enfant
- 2/3 s’il y en a deux
- 3/4 s’il y en a trois ou plus.
Si le défunt ne laisse que des descendants dans chacune des lignes est de 3/4 et la réserve est de 1/4
(art paternelle et maternelle, la quotité disponible est de la moitié (et la réserve de la moitié) et s’il n’en
laisse que dans une ligne la quotité disponible. 914)
Les héritiers réservataires sont donc les descendants (légitimes, adoptifs ou naturels reconnus) et
les ascendants, i.e. les parents en ligne directe ascendantes et descendante.

§ 2 - LA REDUCTION DES LIBERALITES EXCESSIVES


Le législateur a prévu certaines opérations comptables révélant qu’il existe des libéralités excessives :
c’est la réduction des libéralités et legs.
La réduction est la sanction de la réserve. Elle a pour fonction de reconstituer la part et les parts des
réserves entamées. Elle menace les legs de caducité et les donations de réduction.

A - La réduction des libéralités


Les libéralités et soit par acte entre vifs, soit par testament qui portent atteinte à la réserve sont
réductibles à la quotité disponible.
Les personnes admises à demander la réduction sont les suivantes : héritiers réservataires, leurs
propres héritiers ou ayants cause.

B - La réduction des legs


C’est le cas lorsque certaines dispositions du testament excèdent la quotité disponible

§ 3 – LES RAPPORTS
Le rapport est une institution qui se présente sous un double aspect.
Un héritier a-t-il été gratifié par le de cujus, il doit rapporter sa libéralité, i.e. la joindre aux biens
existants pour constituer la masse partageable ;
Un héritier est – il – débiteur du défunt, il doit rapporter sa dette, i.e. que le montant de celle-ci
figurera à la masse partageable, comme un élément de l’actif successoral.
Sous ces deux modalités, le rapport est un instrument d’égalité entre cohéritiers. Il tend à rétablir
entre eux une égalité qui avait été rompue du vivant du de cujus. Le résultat recherché est que le successible
qui avait été gratifié, ou celui qui avait contracté une dette envers le de cujus, ne reçoive pas, en fin de
comptes et tout compris, plus que les autres.

A – Le rapport des libéralités


Il est réglementé par les articles 829 et 843 à 862 c. civ.
Les dons à un héritier censés être fait par avancement d’hoirie ie qu’ils s’imputent sur sa part
successorale. Les legs sont fait par préciput et ne peuvent être rapportables que selon la volonté du testateur
et le rapport ne peut être qu’en valeur et non en nature. L’on est préciputaire lorsque l’on a le droit de
prélever, avant tout partage, une somme d’argent ou certains biens dans la masse à partager.
Dans le rapport des libéralités, l’héritier rend compte à la succession des libéralités qu’il a reçues du
de cujus. Il doit les rapporter à la masse successorale qui se reconstituera et sera partagée entre tous les
héritiers proportionnellement à la vocation héréditaire de chacun.
Exemple : Il existe trois héritiers Pierre, Paul et Jean. Paul a reçu par donation 1 million, mais le père
laisse deux (02) millions. Paul est tenu de rapporter sa donation à la masse partageable qui s’élèvera à 3
millions qui se partageront entre les trois, chacun devant recevoir un million.

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I - La détermination des personnes qui peuvent demande le rapport, de celles qui le doivent et
des bénéficiaires du rapport

a) - Les débiteurs du rapport


Quatre conditions doivent être réunies pour que le rapport soit dû :
- il faut d’abord, être héritier ab intestat. Le rapport n’est pas dû par les légataires
- il faut ensuite avoir accepté la succession, même bénéficiaire. A l’exclusion de l’héritier du
renonçant, du moins jusqu’à concurrence de la quotité disponible. Si le conjoint survivant est appelé en
pleine propriété, il y est tenu ; s’il est appelé en usufruit, les libéralités reçues s’imputeront sur sa vocation
usufructuaire, ce qui constitue pour lui une forme de rapport.
- il faut aussi être donataire ou légataire, en même temps qu’héritier au jour de l’ouverture de
succession
- il faut, enfin, être personnellement légataire ou donataire.

b) – Les créanciers du rapport


Peuvent seuls demander le rapport, les héritiers qui en seraient eux-mêmes tenus : héritiers ab
intestat. Mais ni les légataires, ni les créanciers de la succession ne peuvent le demander.
Cependant, lorsque les héritiers ont acceptés purement et simplement la succession, les créanciers
héréditaires, devenant créanciers personnels des cohéritiers, peuvent comme les créanciers, demander le
rapport par le jeu de l’action oblique (article 1166 cciv)

c) – Les bénéficiaires du rapport


Selon l’article 850cc « le rapport ne se fait qu’à l a succession du donateur »

II - La détermination des libéralités rapportables


Toutes les libéralités sont rapportables ; du moins toutes les donations le sont (art 843 CC) –
donations directes ou donations indirectes ou donations déguisées.
Cependant certaines libéralités sont dispensées de rapport par la loi elle-même ; d’autres le sont par
la volonté du disposant. Enfin le gratifié lui-même peut se soustraire à l’obligation de rapporter.
- dispense de rapport par la loi (art 843 al 2 CC art 852 – 853 – 854 – 856).

III - Les modes de rapport


Le rapport peut s’effectuer de deux façons : en nature ou en moins prenant. Lorsqu’il y a rapport en
nature, l’héritier remet le bien même qui lui a été donné dans la succession, alors que dans le rapport en
moins prenant, on impute la valeur sur la part ab intestat de l’héritier.

a) - Le principe est le rapport en moins prenant (art 858 al1cc)


Le rapport des legs ne se fait qu’en valeur.
Tout rapport se fait, en principe, en moins prenant, qu’il s’agisse de donation, ou de legs, e quelque
soit l’objet de la libéralité, meubles ou immeubles.
Il a l’avantage de laisser la propriété de l’objet de la libéralité au bénéficiaire de celle-ci et les
constitutions du droit réel qu’il a pu consentir restent valables. Mais le bénéficiaire supporte le risque de
la chose, ie qu’il doit le rapport même si la chose a péri par cas fortuit.

b) - L’exception : le rapport en nature


Il ne peut, en fait, concerner que les donations, pas les legs. Le rapport a lieu en nature d’abord si le
donateur l’a prévu (art 858cc)

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Il l’est aussi si l’héritier choisit de rapporter en nature le bien donné, à la double condition que le
bien lui appartienne encore et qu’il soit libre de toute charge ou occupation (par exemple le bail) dont il
n’était pas grevé au moment de la donation.
Avec le rapport en nature, les risques ne sont plus pour le gratifié, mais pour la succession – en
effet, le bien qui a péri par cas fortuit et sans faute du donataire n’est pas sujet à rapport… (art 855 c. civ.).
Le rapport en nature anéantit la donation à l’égard des héritiers.

B – Le rapport des dettes


L’article 829 1 c. civ. dispose : « chaque cohéritier fait rapport à la masse, suivant les règles…
établies, des dons qui lui ont été fait et des sommes dont il est débiteur ».
Ainsi, lorsqu’un cohéritier est débiteur de la succession, il ne paie pas sa dette, il la rapporte à la
succession.
Le rapport des dettes a pour but de respecter, comme le rapport des libéralités, l’égalité entre les
héritiers, il donne aux cohéritiers créanciers de l’héritier débiteur une situation préférentielle par rapport
aux autres créanciers de cet héritier.
Les dettes de toute nature sont soumises à rapport (contractuelles ou délictuelles). La dette n’est
rapportable que dans la mesure de la part hiérarchique du débiteur, pour le surplus, elle devra être payé et
est soumise aux règles du paiement.
Enfin, le rapport des dettes ne peut être qu’en moins prenant.

SECTION III –LE PARTAGE DE LA SUCCESSION


Il faut étudier successivement :
- le droit au partage
- les formes et les effets du partage

§ 1 – LE DROIT AU PARTAGE
Il est prévu par l’article 815 CC selon lequel « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision »
et « le partage peut être toujours provoqué », à moins qu’il y est eu sursis par jugement ou convention.
Le partage peut être demandé par tout successeur universel ou à titre universel, se trouvant dans
l’indivision, ou par ses créanciers par de l’action oblique. Il peut également être demandé par le
cessionnaire de droits successifs de tout ou partie de la part indivise d’un indivisaire.
Le partage peut être demandé dès l’ouverture de la succession, et le droit au partage est
imprescriptible.
Cependant, la loi permet aux indivisaires de convenir de demeurer dans l’indivision, mais pour un
temps limité (5 ans maximum), renouvelable.

§ 2 – LES FORMES ET LES EFFETS DU PARTAGE


Le partage a pour rôle de substituer aux droits indivis de chaque coïndivisaire, sur l’ensemble de la
masse partageable, des droits exclusifs, privatifs, sur tels ou tels biens qui fermer son lot.
Le partage est soumis à certaines formes, et certains effets lui sont attachés de plein droit.

A - Les formes du partage


Une fois que le réserve héréditaire et la quotité disponible sont déterminées, les réductions et les
rapports des dons et legs fait, la masse partageable est connue, il faut la partager.
Le partage peut s’opérer après le décès du de cujus – c’est celui là qui nécessite les opérations
préalables (rapport, réduction, quotité disponible, réserve) le partage peut aussi avoir été fait par le de
cujus lui-même de son vivant. Celui là ne nécessite pas en principe toutes ces précautions : c’est le partage
d’ascendant.

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I – Le partage après le décès du de cujus : le partage de succession
Le partage de succession peut être amiable ou judiciaire.

a) - Le partage amiable
C’est celui là qui a lieu lorsque la loi n’exige pas le partage judiciaire, les coïndivisaires se mettent
d’accord sur la composition des lots et sur leur attribution.
Aucune forme particulière n’est exigée – le partage peut théoriquement avoir lieu par acte sous seing
privé ou par acte authentique ou même être verbal.
La présence de tous les copartageants n’est pas indispensable (les absents pouvant se faire
représenter)
Les co-indivisaires peuvent aussi décider de vendre tel ou tel bien pour s’en répartir le prix : la
licitation
Si un co-indivisaire a reçu un bien dont la valeur excède celle de la part des autres, il aura la charge
de payer la soulte aux autres copartageants.

b) – Le partage judiciaire
Le partage judiciaire est nécessaire dans les cas suivants :
- en cas de présence d’héritiers incapables parmi les copartageants : mineur non émancipé ou
majeur en tutelle. Un partage amiable peut, en cas de tutelle, avoir lieu, mais avec l’accord du conseil de
famille, à la condition qu’il soit notarié, l’état liquidatif, joint à la délibération du conseil de famille, doit
être soumis à l’homologation du tribunal compétent ;
- en cas de désaccord des héritiers soit pour procéder au partage, soit pour la composition des lots,
ou bien sur leur attribution
- au cas où il y a des « présumés absents » ou lorsque les non présents ne sont pas représentés.
Pour demander le partage, il faut être en principe capable d’aliéner. Ainsi le mineur non émancipé
ne peut-il pas demander le partage ; seul l’administrateur légal le peut, pour le pupille, le tuteur le fera avec
l’autorisation soit du juge, soit du conseil de famille. Quant au majeur en tutelle, il lui faut l’assistance de
son curateur.
A l’égard de l’absent, l’action en partage appartient aux parents envoyés en possession.
Le partage judiciaire exige le respect de nombreuses opérations soumises à des règles de forme
précises qui sont :
- l’apposition des scellés sur les biens en présence de d’héritiers absents ou incapables. Opérations
suivie d’un inventaire.
- la demande en partage devant le Tribunal de Grande Instance du lieu d’ouverture de la succession,
par assignation contre tous les cohéritiers, soit par requête collective, si tous les héritiers sont d’accord.
- le jugement du tribunal ordonnant le partage et nommant un notaire pour les opérations de
partage.
- une estimation des biens si elle n’a pas été faite dans l’inventaire par un expert au jour de la
jouissance.
En principe, le partage a lieu en nature, mais, les biens peuvent aussi être vendus pour payer les
dettes et les charges de la succession – les immeubles sont vendus aux enchères publiques.
Viennent ensuite les opérations de liquidation. Le notaire liquidateur procède à la formation de la
masse à partager, il procède à la composition des lots soit par les héritiers d’accord, soit par un expert.
Les lots sont formés conformément au nombre d’héritiers ou en cas de représentation, au nombre
de souches copartageantes. Les lots doivent en principe contenir des lots d’égale valeur.
Puis les lots doivent être tirés au sort soit devant le notaire, soit devant le juge.
Enfin, le partage, une fois effectué, remise doit être faite à chacun des copartageants des titres
particuliers aux objets qui lui sont échus (art 842 c. civ.)

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Le partage judiciaire constitue donc une opération complexe et compliquée. Il présente plusieurs
inconvénients : il est onéreux ; il conduit au morcellement des propriétés pour établir l’égalité en nature ;
il allotit souvent les héritiers des biens qui ne leurs conviennent pas parce qu’elle aboutit au tirage au sort.
Pour éviter ces effets néfastes, le législateur a prévue l’attribution préférentielle de certains biens
par voie de partage.

c) - L’attribution préférentielle
L’attribution préférentielle a été introduite dans le code civil par le décret loi de 1938 qui l’avait
admise pour les exploitations paysanne de faible importance.
C’est une attribution judiciaire.
Par cette forme de partage, l’un des cohéritiers va recevoir un bien de la succession qui peut dépasser
sa part héréditaire et même représenter toute la succession. Ce qui peut sembler contraire à l’idée de
partage. Mais l’héritier bénéficiaire de l’attribution préférentielle doit une soulte à ses cohéritiers pour
l’égalité en valeur.
Quelle que soit la forme du partage, le partage consiste à la division de la masse partageable déjà
constituée, en lots égaux, à distribuer aux cohéritiers, en évitant de morceler les héritages et de diviser les
exploitations.
S’il y a contestation, le notaire commis dresse un procès-verbal des difficultés et des « dires
respectifs » des parties et les renvois devant le tribunal.
Les lots sont tirés au sort – le notaire et les autres autorités dressent un procès-verbal. Ce partage
doit ensuite être homologué par le tribunal.
d) – les sanctions et les effets du partage
La sanction est ici celle de tous les actes juridiques, à savoir, la nullité du partage pour les causes
connues en droit commun : nullité relative ; la rescision pour lésion de plus du quart.
Quant aux effets, le partage, a principalement un effet déclaratif qui obéit aux conditions de l’article
883cc:« chaque héritier est sensé avoir succéder seul et immédiatement à tous les biens compris dans son
lot ». Il s’agit d’un effet rétroactif : le partage déclare les droits qu’on a dès le décès du de cujus et non dès
le partage. La période d’indivision est rétroactivement effacée.

II – le partage par le de cujus lui-même : le partage d’ascendant


Le code civil permet à l’ascendant de régler d’avance le partage de sa succession en distribuant ses
biens entre ses descendants.
Ce partage anticipé comprend deux formes. Il peut, d’une part, se réaliser sous la forme d’une
donation entre vifs nécessitant l’accord du donataire et soumise aux règles de ce contrat à titre gratuit :
c’est la donation-partage. Le parent peut, d’autre part, recourir à la forme testamentaire, i.e. décider seul
de la répartition de ses biens entre ses descendants : c’est le testament partage.

a) – La donation partage
La donation – partage est un contrat entre vifs par lequel un ascendant fait actuellement et
irrévocablement donation de tout ou partie de ses biens présents à tous ses enfants et descendants et en
opère le partage entre eux.
C’est une libéralité car, la gratuité de la transmission et la répartition des biens de l’ascendant
entre ses descendants sont les deux traits fondamentaux qui caractérisent, depuis sa formation jusqu’à
l’épuisement de ses effets la donation – partage. La distribution des biens est faite à titre gratuit.
C’est un partage anticipé, cas d’un ascendant qui se dépouille irrévocablement de ses biens présents
en les partageants entre ses descendants. Il procède seul ou à l’aide des descendants à la fixation des lots
pour montrer sa volonté ferme, non de faire des libéralités, mais de partager sa succession. Il procède
ensuite à des attributions divises.

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Le droit de consentir une donation – partage est réservé aux père, mère et autres ascendants (art.
1075 cc), légitimes, naturels ou adoptifs.
L’ascendant doit être capable de disposer à titre gratuit entre vifs tant en ce qui concerne la capacité
d’exercice que la capacité de jouissance.
Les bénéficiaires de la donation – partage ne peuvent être que les enfants et descendants légitimes,
naturels ou adoptifs du donateur.
La donation-partage, avec son nom composé, revêt une nature mixte : elle comporte à la fois les
effets de la donation et les effets du partage.
En tant que donation, ce sont les effets des libéralités entre vifs, dans les rapports entre l’ascendant
et ses descendants : attributions irrévocable.
Toutefois, la donation peut être révoquée pour ingratitude.
En tant que partage, ce sont les effets du partage dans les rapports des descendants entre eux : avant
le décès les ascendants ne sont pas des copartagés de la succession mais de biens composant la donation.
Ils ne deviennent copartageants qu’à partir décès.
Quant à la sanction, si les conditions de la donation ne sont pas respectées, le partage anticipé est
nul de nullité absolue ou relative en matière contractuelle. Si l’ascendant a porté atteinte à la réserve
héréditaire, on fait la réduction de l’excès.

b) – Le testament- partage
Le testament – partage est un acte de dernière volonté par lequel l’ascendant répartit son patrimoine
entre ses descendants. Il emprunte ses règles de forme au testament, il a les effets du partage et se trouve
soumis aux mêmes sanctions que celles de la donation – partage.
C’est le partage que l’ascendant fait de son vivant, mais par testament. Bien que soumis aux formes
du testament, le testament – partage ne s’analyse nullement en une libéralité. Sa fonction est uniquement
de répartir les biens du testateur entre ses descendants qui gardent leur qualité d’héritiers ab intestat, ils
ne prennent aucunement celle de légataires.
C’est aussi un acte de nature mixe qui ne peut avoir d’effet et être sanctionné si les conditions du
testament et du partage sont remplies : nullité, réduction.

1) - Conditions du testament - partage


Quant au testament partage : l’ascendant qui opte pour le testament partage doit choisir l’une
des formes du testament. En plus toutes les autres conditions doivent être respectées (forme, capacité,
biens, objets, legs). Le testament ici est irrévocable.
- Quant au partage : l’ascendant doit avoir la volonté sans équivoque de partager sa succession
entre ses descendants : formation des lots, leur partage dans le testament, le respect de l’égalité en valeur,
la réserve héréditaire.
2) - Effets du testament - partage
Les descendants ne bénéficient du testament partage qu sils acceptent la succession. Le partage fait
s’impose à eux.
Du vivant du testateur, le testament – partage ne produit aucun effet. Il est révocable, comme un
testament ordinaire, par la seule volonté du testateur.
Après le décès du testateur, le testament – partage ne produit aucun effet dévolutif, mais seulement
un effet répartiteur entre les descendants qui recueillent les lots composés par le testateur en qualité
d’héritiers et non à titre de légataires. Ils ne peuvent donc renoncer au testament pour réclamer un nouveau
partage de la succession (art. 1079 cc). Le partage leur est imposé : ils doivent soit accepter en bloc et la
succession et le lot qui leur est destiné, soit renoncer au tout. Le testament – partage abolit toute période
d’indivision entre copartagés, ainsi que toutes les règles et tous les mécanismes du partage ordinaire :
partage judiciaire, tirage au sort des lots, licitation, attribution préférentielle.

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L’héritier qui accepte purement et simplement est tenu ultra vires successionis des dettes du défunt.
S’il accepte sous bénéfice d’inventaire, il n’est tenu du passif héréditaire que jusqu’à concurrence de la
valeur des biens qu’il recueille.

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