Vous êtes sur la page 1sur 19

1

Expertise France
Formation des auditeurs de justice et élèves-greffiers
Décembre 2022
Djaffar Ahmed Saïd Hassani, expert national
Marc Brisset-Foucault, expert international

1. LES SOURCES DES PRINCIPES DIRECTEURS DU PROCÈS PÉNAL ..................................................................2


1.1. DROIT INTERNATIONAL ........................................................................................................................... 3
1.1.1. Extraits de la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 ........................................ 3
1.1.2. Extraits de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.......................................... 5
1.2. DROIT INTERNE ..................................................................................................................................... 6
1.2.1. Constitution de l’Union des Comores......................................................................................... 6
1.2.2. Extraits de la loi n° 20-020/AU du 12 décembre 2020 relative à l’organisation judicaire en Union
des Comores ............................................................................................................................................. 8
2. LES PRINCIPES RELATIFS AUX FONCTIONS DU MAGISTRAT ET À L’ORGANISATION JUDICIAIRE ................9
2.1. LE PRINCIPE GENERAL D’INDEPENDANCE ET D’IMPARTIALITE DU TRIBUNAL. ........................................................... 9
2.2. LA SEPARATION DES FONCTIONS JUDICIAIRES DE POURSUITE, D’INSTRUCTION ET DE JUGEMENT ................................ 10
2.2.1. Séparation entre les fonctions de poursuite et les fonctions d’investigation ............................. 11
2.2.1.1. le juge d’instruction de s’autosaisit pas. .................................................................................. 12
2.2.1.2. Le parquet ne peut pas s'immiscer dans la conduite des investigations du magistrat instructeur.
12
2.2.2. La séparation des fonctions d’investigation et les fonctions de jugement................................. 13
2.2.3. La séparation des fonctions de poursuite et les fonctions de jugement .................................... 15
2.3. LE PRINCIPE DU DOUBLE DEGRE DE JURIDICTION........................................................................................... 15
2.4. LE PRINCIPE DE L’UNITE DE LA JURIDICTION QUI STATUE SUR L’ACTION PENALE ET L’ACTION CIVILE. ........................... 18
2.5. LA COLLEGIALITE, L’IMPARITE ET LE SECRET DES DELIBERES. ............................................................................. 18
3. LES GARANTIES PROCÉDURALES PENDANT LE PROCÈS PÉNAL ................................................................ 18

1
2

LES PRINCIPES DIRECTEURS DU PROCÈS PÉNAL

Les principes directeurs du procès pénal, sont les règles de droit qui dominent et dirigent le
processus qui se termine (sauf classement ou non-lieu) par une audience de jugement
généralement publique. Il ne s’agit donc pas uniquement du procès public qui va, le cas échéant,
terminer le processus.
Ces principes directeurs ne doivent pas être considérés comme un catalogue d’orientations
générales qui ne répondent pas à des normes écrites. En ce qui concerne les Comores, ils
trouvent principalement leur source dans des textes à valeur constitutionnelles cités par le
préambule de la Constitution et qui ont été ratifiés par l’Union des Comores comme nous
l’avons vu lors des précédentes sessions, dans la Constitution elle-même et dans les dispositions
de la loi du 12 décembre 2020 relative à l’organisation judicaire en Union des Comores.

Nous allons étudier :


1) Les sources des principes directeurs du procès pénal,
2) Les principes relatifs à l’organisation judicaire,
3) Les garanties offertes pendant la durée de la procédure pénale.

1. LES SOURCES DES PRINCIPES DIRECTEURS DU PROCÈS PÉNAL

Il s’agit des principes sur lesquels se fondent les règles de la procédure pénale qui doivent
concilier deux objectifs en apparence contradictoires et parfois présentés, à tort, comme
inconciliables : la nécessaire répression indispensable à la protection de la société et des
individus qui la composent et les garanties des droits des citoyennes et des citoyens. Cette
protection fait aussi partie des libertés et de la protection des droits fondamentaux. Par exemple,
si une personne est agressée dans la rue et que l’agresseur n’est pas arrêté et puni, c’est la liberté
d’aller et venir des personnes qui est mise en cause. Punir celui qui agresse une femme protège
les droits des femmes, punir le voleur ou l’escroc protège le droit de propriété etc…

Mais cette nécessaire répression ne peut, dans un état de droit, se concevoir que si certaines
garanties fondamentales sont respectées par les autorités en charge de la mettre en œuvre, les
magistrats, juges et procureurs et les enquêteurs chargés de la police judicaire, policiers et
gendarmes, qui travaillent sous l’autorité des magistrats. Cette autorité doit s’exercer
effectivement et non rester du domaine de la pure théorie.
Il ne s’agit pas seulement d’une question de principes.
Il s’agit aussi une question d’efficacité.

Notre mission ne consiste en effet pas à faire arrêter, le cas échéant emprisonner et à faire
condamner des innocents mais à faire condamner les coupables. Les garanties procédurales qui
trouvent leurs sources dans les grands principes que nous avons étudiés lors des sessions

2
3

précédentes et que je vais brièvement rappeler répondent, certes, à des principes idéologiques
mais ils sont surtout des garanties pour éviter ou du moins limiter le risque de faire condamner
des innocents.

À quoi servent des aveux obtenus sans garantie qui ont pas été obtenus sous la contrainte, voire
pire ?
À quoi servent des preuves collectées irrégulièrement ?
À quoi sert la version des faits du plaignant si elle n’a pas été comparée à celle de la personne
mise en cause ?

Ces garanties sont essentielles.

Nous avons étudié lors de notre précédente session un certain nombre de textes fondamentaux
dont la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 et la Charte africaine des droits
de l'homme et des peuples.

Outre ces normes internationales, et constitutionnelles, dont je rappellerai rapidement certaines


dispositions qui constituent des sources des principes directeurs du procès pénal, je citerai les
dispositions de la loi du 12 décembre 2020 relative à l’organisation judicaire en Union des
Comores.

1.1. Droit international

1.1.1. Extraits de la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948


Article 3
Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne.
Article 4
Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude ; l'esclavage et la traite des esclaves
sont interdits sous toutes leurs formes.

Article 5
Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants.

Article 6
Chacun a le droit à la reconnaissance en tous lieux de sa personnalité juridique.

Article 7
Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans distinction à une égale protection de la
loi. Tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination qui violerait la
présente Déclaration et contre toute provocation à une telle discrimination.

Article 8

3
4

Toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales


compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par
la constitution ou par la loi.

Article 9
Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ou exilé.

Article 10
Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue
équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera,
soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière
pénale dirigée contre elle.

Article 11
1. Toute personne accusée d'un acte délictueux est présumée innocente jusqu'à ce
que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès public où toutes les
garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées.

2. Nul ne sera condamné pour des actions ou omissions qui, au moment où elles ont
été commises, ne constituaient pas un acte délictueux d'après le droit national ou
international. De même, il ne sera infligé aucune peine plus forte que celle qui était
applicable au moment où l'acte délictueux a été commis.

Article 12
Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile
ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne
a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes.

4
5

1.1.2. Extraits de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples

Cette charte a été adoptée par la 18ème conférence de l’organisation de l’unité africaine
(maintenant l’Union Africaine) qui s’est tenue à Nairobi (Kenya) le 27 juin 1981
Elle a été ratifiée par les Comores le 1er juin 1986.
Nous avons vu que le préambule de la constitution de l’Union des Comores la cite
explicitement.
Article 2

Toute personne a droit à la jouissance des droits et libertés reconnus et garantis


dans la présente Charte sans distinction aucune, notamment de race, d'ethnie, de
couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion,
d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.

Article 3

1- Toutes les personnes bénéficient d'une totale égalité devant la loi.


2- Toutes les personnes ont droit à une égale protection de la loi.

Article 4

Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude ; l'esclavage et la traite des esclaves


sont interdits sous toutes leurs formes.

Article 5

Tout individu a droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine et à la


reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes formes d'exploitation et
d'avilissement de l'homme notamment l'esclavage, la traite des personnes, la torture
physique ou morale, et les peines ou les traitements cruels inhumains ou dégradants
sont interdites.

Article 6

Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut être privé
de sa liberté sauf pour des motifs et dans des conditions préalablement déterminées
par la loi ; en particulier nul ne peut être arrêté ou détenu arbitrairement.

Article 7

1- Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue.

Ce droit comprend :

5
6

a) Le droit de saisir les juridictions nationales compétentes


de tout acte violant les droits fondamentaux qui lui sont
reconnus et garantis par les conventions, les lois,
règlements et coutumes en vigueur ;

b) Le droit à la présomption d'innocence, jusqu'à ce que


sa culpabilité soit établie par une juridiction
compétente ;

c) Le droit à la défense, y compris celui de se faire assister


par un défenseur de son choix ;

d) Le droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une


juridiction impartiale.

2- Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui ne constituait pas,
au moment où elle a eu lieu, une infraction légalement punissable.
Aucune peine ne peut être infligée si elle n'a pas été prévue au moment où
l’infraction a été commise. La peine est personnelle et ne peut frapper que le
délinquant.

1.2. Droit interne


Je citerai des dispositions de la Constitution de l’Union des Comores et des
dispositions de la loi du 12 décembre 2020 relative à l’organisation judicaire en
Union des Comores qui fixent les principes généraux et le cadre général dans lequel
se situent les dispositions du code de procédure pénale qui régissent de manière
détaillée le procès pénal.

1.2.1. Constitution de l’Union des Comores


Extraits du préambule

Le peuple comorien affirme solennellement sa volonté de (…) marquer son


attachement aux principes des droits fondamentaux tels qu’ils sont définis par la
Chartre des Nations Unies, celle de l‘Unité Africaine, le Pacte de la Ligue des Etats
Arabes, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme des Nations Unies, la
Chartre Africaine des Droits de l’Homme et des peuples, ainsi que les conventions
internationales, notamment celles relatives aux droits de l’enfant et de la femme.

Il affirme également sa détermination à asseoir un Etat de droit fondé sur le principe


de la souveraineté du peuple et de la démocratie, instituant un éventail de droits, de
devoirs, de libertés et de garanties pour tous les citoyens et un système de
gouvernement fondé sur la séparation des pouvoirs, et une administration publique au
service des citoyens et du développement (…)

Ce préambule fait partie intégrante de la Constitution.

6
7

Quelques articles

Article 12 alinéa 3
Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont dès leur publication
une autorité supérieure à celle des lois de l’Union, sous réserve, pour chaque accord
ou traité, de son application par l’autre partie. »

Article 15
Le droit d'accès à la justice et à la défense est garanti à tous les citoyens, de même
que le droit d’obtenir des tribunaux des décisions dans un délai raisonnable.

Article 20
L‘intégrité physique et morale des personnes est inviolable.
Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou des traitements cruels,
dégradants ou inhumains.

Article 22
Tous les citoyens jouissent du droit à la liberté et à la sécurité. Nul ne peut être privé
dc sa liberté en totalité ou en partie, qu’en vertu de la loi ou d’une décision de justice.

Article 26
Le domicile est inviolable sauf dans les cas prévus par la loi.

Article 27
La confidentialité de la correspondance et des télécommunications est garantie, sauf
dans les cas prévus par la loi.
La Ioi garantit la protection des données informatiques individuelles.

CHAPITRE IV : DU POUVOIR JUDICIAIRE

Article 94
Le Pouvoir Judiciaire est indépendant, du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. Il
s’exerce par la Cour suprême et les autres cours et tribunaux.
Les juges ne sont soumis dans l’exercice de leurs fonctions, qu’à l’autorité de la loi.
Les magistrats du siège sont inamovibles, sauf pour les cas de nécessité de service.

Article 95
Le Président de l’Union est garant de l’indépendance de la Justice.
Il est assisté par le Conseil Supérieur dc la Magistrature.
Une loi organique porte statut des magistrats et du Conseil Supérieur de la
Magistrature.
L’organisation judiciaire est déterminée par la loi.
Article 96

7
8

La Cour Suprême est la plus haute juridiction de l’union en matière judiciaire,


administrative, constitutionnelle, électorale et des comptes.
Elle juge le Président de l’Union en cas de haute trahison.
Les décisions de la Cour Suprême ne sont susceptibles d’aucun recours et s’imposent
au Pouvoir Exécutif, au Pouvoir Législatif ainsi qu’à toutes les juridictions du territoire
national.
Les modalités d’application du présent article sont fixées par une loi organique.

1.2.2. Extraits de la loi n° 20-020/AU du 12 décembre 2020 relative à


l’organisation judicaire en Union des Comores

Article 4
Le pouvoir judicaire s’exerce avec pour mission d’assurer l’observation des lois et
règlements par les décisions rendues en matière contentieuse et en matière gracieuse.

Article 6
Les décisions sont rendues en toute impartialité, dans un délai raisonnable
conformément aux textes régissant la matière

Article 7
Les juges ne sont soumis dans l’exercice de leurs fonctions qu’à l’autorité de la Loi.
Les juges ne doivent faire l’objet d’aucune pression de quelque nature que ce soit,
dans l’exercice de leurs fonctions ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions.

Article 8
L’impartialité des juridictions est garantie par les dispositions de la présente loi.

Article 10
Devant les juridictions, les justiciables bénéficient des mêmes droits et des garanties
prévues pour leur défense conformément au préambule de la Constitution.

Article 11
Le Pouvoir Judicaire est indépendant du Pouvoir Législatif et du Pouvoir exécutif
conformément à l’article 94 de la Constitution.

Article 12
En toute matière, nul ne peut être jugé sans être mis en demeure de présenter ses
moyens de défense.

Sous réserve des conditions fixées pour leur admission à la Cour Suprême, les
Avocats ont libre accès devant toutes les juridictions.

La défense et le choix des défenseurs sont libres

Article 13
La permanence et la continuité du service de la justice demeurent toujours assurées.

8
9

Article 15
Les conjoints, parents et alliés jusqu’au troisième degré ne peuvent, sauf dispense,
être simultanément membres d’un même tribunal ou d’une même Cour en quelque
qualité que ce soit.

Article 18
Seule une juridiction légalement constituée peut rendre la justice.

Article 50
En toute matière, à peine de nullité, les audiences ordinaires des Cours d’Appel sont
tenues par trois Magistrats assistés d’un Greffier.

Toutefois, les arrêts de la Cour d’Appel sont rendus en matière criminelle par une
formation collégiale de cinq Magistrats au moins

Article 84
Le tribunal de Première instance siège et statue en formation collégiale de trois Juges
y compris le Président, avec l’assistance d’un greffier

Article 106
La Cour d’assises connaît de toutes les infractions qualifiées de crime commises dans
leur ressort sauf les exceptions prévues par la loi.

Toutefois, les infractions criminelles commises par un mineur de moins de dix-huit abs
relèvent de la compétence du Tribunal pour mineur.

Article 107
La Cour d’assises siège et statue avec sept magistrats ayant une expérience effective
de dix ans.

2. LES PRINCIPES RELATIFS AUX FONCTIONS DU MAGISTRAT ET À


L’ORGANISATION JUDICIAIRE

2.1. Le principe général d’indépendance et d’impartialité du tribunal.

Comme vous le savez, l’article 10 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948
pose le principe selon lequel « toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit
entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera,
soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toutes accusations en matière pénale
dirigée contre elle ».
De plus, les articles 6, 7 de la Loi du 12 décembre 2020 disposent que « Les décisions sont
rendues en toute impartialité, dans un délai raisonnable conformément aux textes régissant la
matière, que les juges ne sont soumis dans l’exercice de leurs fonctions qu’à l’autorité de la
loi » (art 6), que « les juges ne sont soumis dans l’exercice de leurs fonctions qu’à l’autorité de

9
10

la loi [et qu’ils] ne doivent faire l’objet d’aucune pression de quelque nature que ce soit, dans
l’exercice de leurs fonctions ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions » (art 7).
L’article 8 ajoute que « l’impartialité des juridictions est garantie par les dispositions de la
présente loi »
Il résulte de ce qui précède que les magistrats ne doivent pas être subordonnés aux autres
pouvoirs, qu’il s’agisse du pouvoir exécutif ou du pouvoir législatif. Le juge doit interpréter et
appliquer la loi votée par le pouvoir législatif mais celui-ci n’a pas à s’immiscer dans le cours
de la justice et à chercher à influencer les décisions du juge.
Mais les magistrats ne doivent pas non plus être subordonnés à d’autres influences : politiques,
médiatiques ou autres, ni à des influences familiales ou amicales.
Pour être impartiaux, les magistrats doivent aussi être indépendants par rapport à leurs propres
convictions politiques ou autres et à leurs préjugés éventuels.

Il y a deux sortes d’impartialité, l’impartialité objective et l’impartialité subjective.


- L’impartialité objective concerne les fonctions exercées par le magistrat (nous parlerons
plus tard des incompatibilités entre fonctions différentes).
- L’impartialité subjective concerne le magistrat lui-même ou elle-même : Par exemple
un magistrat ne doit pas exprimer une opinion sur la culpabilité du prévenu ou exprimer
des préjugés. Il y a aussi les liens qui peuvent exister entre le magistrat et une des parties,
lien familial ou amical, par exemple. Dans certains cas, le magistrat a obligation de se
déporter, c’est-à-dire de demander à son supérieur hiérarchique de ne pas traiter un
dossier car, par exemple, il connait une des parties.
- L’impartialité doit être apparente. Cette apparence résulte notamment du comportement
personnel du juge et du parquetier et à des situations dans lesquelles il peut se trouver.
Il est, par exemple, des invitations qu’il vaut mieux éviter d’accepter, des manifestations
publiques auxquelles il est préférable de ne pas participer etc…
Il ne suffit pas d’être impartial ; il faut aussi le paraître.

2.2. La séparation des fonctions judiciaires de poursuite, d’instruction et de jugement

Le procès pénal se caractérise par l'exercice de trois fonctions qui correspondent aux trois
phases du procès pénal : la poursuite, l’investigation et le jugement.
- La fonction de poursuite est exercée par le procureur de la République, qui incarne
« l’autorité de poursuite » également appelé le ministère public ou encore le parquet.

- La fonction d’investigation est exercée par le juge d’instruction dont l’organe de


contrôle est la chambre d’accusation.

- La chambre d’accusation exerce un rôle très important sur les mesures de contraintes
qui peuvent être imposées à l’inculpé puisqu’elle statue en appel des décisions du juge
d’instruction relatives à la détention provisoire et au contrôle judiciaire.

10
11

- La chambre d’accusation peut infirmer une décision du juge d’instruction qui place une
personne en détention provisoire ou refuse de la mettre en liberté.
Inversement, elle peut, sur appel du ministère public, infirmer la décision du juge
d’instruction qui refuse de placer un inculpé en détention provisoire ou fait droit à une
demande de mise ne liberté.
Il en est de même en matière de contrôle judicaire.
La chambre d’accusation peut également se réserver le contentieux de la détention ou
du contrôle judicaire pour la suite de l’information si elle infirme une décision du juge
d’instruction dans ces domaines.
- Le juge d’instruction n’est saisi que dans les affaires les plus graves et/ou les plus
complexes (parfois le juge des enfants lorsque le mis en cause est un mineur). Dans la
plupart des affaires, les investigations sont menées sous l’autorité du procureur. Nous
verrons comment se répartissent les rôles.

- La fonction de jugement est exercée par les juges de jugement.


L’idée de cette séparation, qui n’est donc que très partielle s’agissant de la poursuite et de
l’investigation, est d’éviter une confusion des pouvoirs qui serait risque d’abus ou même
simplement d’erreur. L’insertion dans le processus de contre-pouvoir peut être vue comme une
source de complexité et de lenteur (en caricaturant, on pourrait dire que nous passons parfois
notre temps à défaire ce que d’autres ont fait) mais ce processus a pour avantage de limiter le
risque d’abus de pouvoirs et d’erreur judicaire.
Il est, en quelque sorte, nécessaire que « le pouvoir arrête le pouvoir ».
Nous possédons des pouvoirs considérables sur les individus, leur liberté et leur honneur. Ainsi,
il serait dangereux pour les libertés qu'elles soient laissées aux mains d'un inquisiteur dénué de
tout contrôle.
Imaginons un monde où un procureur-juge serait à la fois maître de l’investigation puis
déciderait de la culpabilité de celui ou celle qu’il accuse et prononce la peine ?

2.2.1. Séparation entre les fonctions de poursuite et les fonctions


d’investigation

Cette affirmation de principe doit être fortement nuancée.


En effet, cette séparation n’existe que pour une partie des affaires puisque seule une partie des
dossiers sont soumis à une juge d’instruction. Il y a les cas où le recours à cette procédure est
obligatoire : pour les crimes et les affaires dans lesquelles un mineur est mis en cause. Il y a les
cas où la saisine d’un juge d’instruction n’est pas légalement obligatoire mais où en pratique
elle l’est parce que des mesures coercitives (détention provisoire ou contrôle judicaire) sont
jugés nécessaire par l’autorité de poursuite et/ou que l’affaire paraît suffisamment complexe
et/ou « sensible » pour que son traitement par un juge d’instruction apparaisse nécessaire.

11
12

Ceci étant, lorsque les investigations sont conduites sous la direction d'un juge d’instruction, la
séparation entre le parquet et le magistrat instructeur est stricte. Le juge d’instruction est un
organe juridictionnel qui doit être indépendant et impartial.
À noter que si un juge d’instruction a, au cours de sa carrière antérieure à ses prises de fonction,
exercé au parquet, il ne peut instruire une affaire dont il a eu à connaître comme parquetier.

2.2.1.1. le juge d’instruction de s’autosaisit pas.

Le juge d’instruction est saisi de faits (on dit qu’il est saisi « in rem ») par un réquisitoire
introductif ou une plainte avec constitution de partie civile de la personne qui se dit victime
directe et personnelles de l’infraction supposée. Dans ce dernier cas, la plainte avec constitution
de partie civile sera suivie d’un réquisitoire introductif du parquet (qui n’est pas lié par la
qualification des faits retenue par la partie civile).
Si, dans le cadre de l’information judicaire qu’il mène, le juge d’instruction découvre des faits
dont il n’est pas saisi, il doit les porter à la connaissance du parquet. Le procureur décidera
souverainement de la suite à donner : extension de la saisine du juge d’instruction à ces faits
nouveaux par un réquisitoire supplétif, classement sans suite, ouverture d’une enquête sous son
autorité (en flagrance ou enquête préliminaire). Il peut même arriver que le parquet ouvre une
autre instruction, dont le même juge ou un autre sera saisi. Il peut aussi arriver que le parquet
envoie le dossier à une autre parquet qui se trouve territorialement compétent.
Dans toutes les situations, le juge d’instruction ne peut adresser des injonctions au procureur de
la République.

2.2.1.2. Le parquet ne peut pas s'immiscer dans la conduite des


investigations du magistrat instructeur.

Le procureur de la République a accès en permanence au dossier mais il ne peut pas donner des
ordres au juge d’instruction. Il peut, s’il estime que tel ou tel acte doit être accompli, adresser
un réquisitoire supplétif aux fins de nouvelles mesures d’instruction. Si le juge d’instruction
refuse de les accomplir, il devra rendre une ordonnance en ce sens dont le procureur pourra
interjeter appel. La chambre d’accusation décidera.
De plus, le procureur peut assister aux actes d’instruction, interrogatoires, auditions,
confrontations, transports sur les lieux (par exemple les reconstitutions), perquisitions etc…
Lorsque le juge d’instruction se déplace à l’étranger pour assister à l’exécution d’une
commission rogatoire internationale par une autorité étrangère, un magistrat du parquet peut
décider de l’accompagner.
À noter que le juge d’instruction effectue certains actes qui peuvent s’apparenter à des actes
de poursuites. Ainsi, lorsqu’il inculpe une personne sans que cela ait été requis par le parquet,
il place cette personne en situation de défenderesse à l’action publique alors que l’autorité de
poursuite détentrice de l’action publique, c’est-à-dire le procureur de la République ne lui a
pas demandé. Parfois même, le procureur n’est même pas informé de cette inculpation.

12
13

Cependant, si le juge le juge d’instruction envisage de placer l’inculpé en détention provisoire,


il transmettra le dossier au procureur de la République pour que ce magistrat donne son avis
(article 145 dernier alinéa du CPP).
De même, lorsque le juge d’instruction décide d’ordonner le renvoi d’une personne devant le
tribunal correctionnel, il place cette personne en défenderesse à l’action publique devant la
juridiction pénale de jugement. Il peut même le faire alors que le parquet ne le lui a pas demandé
(situation très rare). Idem pour la chambre d’accusation lorsqu’elle ordonne la mise en
accusation d’une personne devant la cour d’assises.
Ces situations font dire à certains commentateurs, notamment des observateurs étrangers, que
le juge d’instruction, bien que magistrat du siège est plus un procureur indépendant qu’un
véritable juge.
Dans la plupart des pays (et notamment dans la majorité des pays d’Europe), il n’y a pas de
juge d’instruction. Dans ces pays, c’est le procureur qui dirige les investigations. Un juge
n’intervient au cours de la phase d’enquête pour autoriser les actes intrusifs (par exemple les
perquisitions et écoutes téléphoniques) et coercitifs (détention provisoire ou contrôle judicaire).
En France, avec l’extension des pouvoirs du juge des libertés et de la détention (JLD), nous
avons beaucoup d’enquêtes préliminaires qui sont menées sur des faits graves et complexes.
Dans ces cas, si certaines conditions sont réunies, le parquet saisit le JLD pour obtenir
l’autorisation de procéder à certains actes intrusifs (perquisitions sans assentiment de la
personne dont le domicile est perquisitionné, écoutes téléphoniques etc…)
En France, on arrive donc de plus en plus à un système « hybride ». On peut se demander si
cette évolution ne marque pas le début de la fin de l’institution du juge d’instruction en France.

2.2.2. La séparation des fonctions d’investigation et les fonctions de


jugement

Cette séparation est justifiée par l'exigence d'impartialité.


Pour les affaires criminelles, elle figure à l’article 253 du code de procédure pénale comorien.

Article 253 :
Ne peuvent faire partie de la cour en qualité de président ou d'assesseur les magistrats qui, dans
l'affaire soumise à la cour d'assises, ont, soit fait un acte de poursuite ou d'instruction, soit
participé à l'arrêt de mise en accusation ou à une décision sur le fond relative à la culpabilité de
l'accusé.
En effet, le juge d’instruction qui a renvoyé une affaire devant la juridiction de jugement ou,
pour les crimes, ordonné la transmission du dossier en vue de la saisine de la cour d’assises, a
nécessairement une idée des charges qui pèsent contre le prévenu ou l’accusé puisque c’est en
se fondant c’est charges qu’il motive sa décision.
Dès lors, si le juge d’instruction participait à la composition du tribunal correctionnel ou, pour
les crimes, de la cour d’assises devant juger le ou les personnes prévenues ou accusées, le procès
serait biaisé. Ainsi, s’il s’apercevait à l’issue des débats que les charges sont insuffisantes pour
déclarer un prévenu ou un accusé coupable des faits qui lui sont reprochés, le juge d’instruction
concerné devrait, de fait, se déjuger. De plus, ayant une parfaite connaissance du dossier, il ou

13
14

elle exercerait nécessairement une influence certaine sur ses collègues composant la juridiction
de jugement.
À noter que cette exigence existe aussi bien en première instance qu’en appel et qu’elle existe
aussi pour les membres de la chambre d’accusation qui ne peuvent siéger au sein d’une
formation de jugement saisie d’une affaire qu’ils ont connue.
Il suffit qu’un magistrat instructeur ou membre d’une chambre d’accusation ait accompli en
cette qualité un seul acte d’instruction dans un dossier pour qu’elle ou il ne puisse pas siéger
dans la formation de jugement.
Or les juges d’instruction sont avant tout des juges et il arrive qu’un chef de juridiction demande
à un juge d’instruction de siéger dans le tribunal correctionnel ou dans une cour d’assises pour
participer au jugement d’affaires qu’il ou elle n’a pas instruites. Cette pratique demande une
grande vigilance du greffe car, s’il est facile d’identifier le magistrat qui a instruit un dossier, il
peut échapper au greffe ou au président de la formation de jugement que tel juge d’instruction
a, pendant les congés d’un ou une collègue, remplacé ce dernier pour accomplir un acte urgent,
par exemple répondre à une demande de mise en liberté. Le juge d’instruction concerné doit
être lui-même très vigilant car il ne se souviendra pas nécessairement d’un acte ponctuel
accompli, il y a parfois plusieurs années, dans un dossier instruit par un de ses collègues. Il en
est de même des membres des chambres d’accusation.
Ceci étant, il existe des atténuations à ce principe de séparation.
Ainsi, la juridiction d'instruction peut être amenée à prendre des décisions juridictionnelles
touchant au fond. Tel est le cas lorsque la juridiction d’instruction ou la chambre d’accusation
ordonne le renvoi de l’inculpé devant la formation de jugement ou, à l’inverse le met hors de
cause une personne par une ordonnance (ou un arrêt s’il s’agit de la chambre d’instruction) de
non-lieu.
Par ailleurs, les juridictions de jugement disposent du pouvoir d'effectuer des investigations. Si
la juridiction de jugement (cour ou tribunal) estime qu’elle n’est pas suffisamment informée sur
les faits dont elle est saisie, elle peut ordonner un supplément d’information qu’elle exécutera
ou fera exécuter par un juge ou un service de police ou de gendarmerie auquel elle délivrera
une commission rogatoire. Elle peut également ordonner une expertise. Elle peut le faire
d’office ou à la demande du ministère public ou des parties (voir article 463 du CPP comorien)

Article 463
S'il y a lieu de procéder à un supplément d'information, le tribunal commet par jugement un de
ses membres qui dispose des pouvoirs prévus aux articles 151 à 155.
(…)
Ce supplément d'information obéit aux règles édictées par les articles 118 à 121
Le procureur de la République peut obtenir, au besoin par voie de réquisitions, la
communication du dossier de la procédure à toute époque du supplément d'information, à
charge de rendre les pièces dans les vingt-quatre heures.
Il existe par ailleurs, en matière de procédure pénale des mineurs une dérogation nette au
principe de séparation des autorités d'investigation et de jugement puisque le juge des enfants
qui instruit une affaire à la possibilité de juger lui-même l'affaire au fond en chambre du conseil.

14
15

2.2.3. La séparation des fonctions de poursuite et les fonctions de jugement

S’agissant de la cour d’assises, ce principe est affirmé dans l’article 253 précité.

En conséquence de ce principe, les juridictions de jugement ne peuvent pas s'auto-saisir.

Seul le parquet ou la juridiction d’instruction peuvent saisir les juridictions de jugement.

De même, la juridiction de jugement ne peut donner d’injonction au ministère public.

On voit parfois des juridictions de jugement surseoir à statuer et demander au parquet


d’effectuer un complément d’enquête. Ceci est totalement prohibé. Dans ce cas, le tribunal ou
la cour doivent eux-mêmes ordonner un supplément d’information comme dit plus haut et
l’effectuer ou le faire effectuer.

Ce que peux faire le parquet si la juridiction de jugement le souhaite, c’est procéder à des
recherches ou vérifications purement administratives du type recherche d’un casier judiciaire
ou de pièces d’un dossier archivé.

2.3. Le principe du double degré de juridiction

Toute décision prise par une juridiction de première instance, qu’elle soit d’instruction ou de
jugement, peut faire l’objet d’une voie de recours. Ceci est fondé sur le principe selon lequel
toute personne condamnée a le droit de faire examiner sa condamnation par une autre
juridiction. Le parquet et la partie civile disposent également de ce droit.
Il convient de préciser que la cour d’appel ne peut aggraver les peines prononcées en première
instance si le procureur de la République n’a pas interjeté appel incident de l’appel principal du
prévenu.
En pratique, cela signifie qu’une affaire jugée par un tribunal peut être de nouveau jugée par
une juridiction d’appel composée de juges plus expérimentés et sélectionnés sur leur
compétence professionnelle.
Il existe, ici aussi, un strict principe d’incompatibilité. Un juge qui a participé au jugement
d’une affaire en première instance ne pourra pas faire partie de la cour d’appel qui le jugera de
nouveau en appel.
Rappelons l’article 14 de la loi du 12 décembre 2020 : Ne peut faire partie d’une formation de
jugement du second degré le juge qui a précédemment connu de l’affaire en premier ressort

Ce principe ne s’applique pas au ministère public. Rien n’empêche qu’un magistrat du parquet
ayant requis dans une affaire en première instance aille représenter le ministère public devant
la cour d’appel pour la même affaire.
Ne pas confondre l’appel et le pourvoi en cassation : la cour d’appel va rejuger l’affaire sur le
fond. La cour de cassation juge le droit, pas les faits. Mais l’incompatibilité est identique. Un

15
16

magistrat de cour d’appel promu la Cour de cassation ne peut statuer sur un pourvoi formé
contre un arrêt de cour d’appel qu’il a contribué à rendre.
Atténuation au principe du double degré de juridiction
Pour les contraventions, l’appel est limité aux cas où lorsque le jugement a prononcé une peine
d'emprisonnement ou lorsque la peine encourue excède cinq jours d'emprisonnement ou 160
francs d’amende (article 546 du code de procédure pénale comorien).
Article 546
La faculté d'appeler appartient au prévenu, à la personne civilement responsable, au procureur
de la République et à l'officier du ministère public près le tribunal de police, lorsque le jugement
prononce une peine d'emprisonnement ou lorsque la peine encourue excède cinq jours
d'emprisonnement ou 160 francs d’amende.
Lorsque des dommages et intérêts ont été alloués, la faculté d'appeler appartient également au
prévenu et à la personne civilement responsable.
Cette faculté appartient dans tous les cas à la partie civile quant à ses intérêts civils seulement.
Dans les affaires poursuivies à la requête de l'administration des eaux et forêts, l'appel est
toujours possible de la part de toutes les parties, quelles que soient la nature et l'importance des
condamnations.
Le procureur général peut faire appel de tous les jugements rendus en matière de police.
S’agissant des jugements avant-dire droit, qui sont les décisions qui statuent sur des incidents
de procédure soulevées au cours du procès devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de
police.
L’appel contre ces décisions n’est immédiatement recevable que s’il s’agit d’un jugement qui
a mis fin à la procédure. Par exemple si le jugement a annulé la citation ou encore a annulé
l’ensemble de la procédure de police dont il est saisi). En revanche, le jugement qui a ordonné
une expertise, par exemple, ne met pas fin à la procédure. L’appel ne sera pas recevable devant
la cour. IL sera éventuellement examiné par la cour avec l’appel sur le fond.
Article 507
Lorsque le tribunal statue par jugement distinct du jugement sur le fond, l'appel est
immédiatement recevable si ce jugement met fin à la procédure.
Dans le cas contraire et jusqu'à l'expiration des délais d'appel, le jugement n'est pas exécutoire
et le tribunal ne peut statuer au fond.
Si appel n'a pas été interjeté ou si, avant l'expiration du délai d'appel, la partie appelante n'a pas
déposé au greffe la requête prévue à l'alinéa suivant, le jugement est exécutoire et le tribunal
statue au fond.
La partie appelante peut déposer au greffe, avant l'expiration des délais d'appel, une requête
adressée au président de la chambre des appels correctionnels et tendant à faire déclarer l'appel
immédiatement recevable.
Article 549

16
17

Les dispositions des articles 505 à 509, 511 à 520 , sont applicables aux jugements rendus par
les tribunaux de police.
(…)

17
18

2.4. Le principe de l’unité de la juridiction qui statue sur l’action pénale et l’action
civile.

C’est une spécificité du système français et de ceux qui en sont inspirés : d’une manière
générale, ce sont les mêmes juridictions et donc les mêmes juges qui rendent la justice civile et
la justice pénale (sous réserve de spécialisations dans l’organisation interne des tribunaux et
des cours d’appel). S’agissant plus particulièrement du pénal, lorsqu’une affaire vient au pénal
et qu’il y a une partie civile, l’affaire sera jugée sur l’action publique et sur l’action civile par
le même tribunal, généralement lors de la même audience (il arrive cependant que l’affaire,
après avoir été jugée au pénal, soit renvoyée sur les intérêts civils à une audience ultérieures,
par exemple s’il y a une difficulté relative à l’évaluation du préjudice, d’où parfois des renvois
en série lorsqu’il y appel sur le pénal).

Le système de la partie civile, qui n’existe pas dans tous les pays, est très favorable aux
victimes.

2.5. La collégialité, l’imparité et le secret des délibérés.

Les crimes et les délits sont jugées par des juridictions composées de plusieurs juges qui
siègent en nombre impair, trois pour les chambres correctionnelles et sept pour la cour
d’assises.

Ce principe a pour objectif de garantir l’indépendance et l’impartialité des juges et de limiter,


si ce n’est d’éviter complètement, car le risque zéro n’existe pas, le risque d’erreur judiciaire.
La collégialité a également pour but de préserver la liberté de décision du juge car elle
« anonymise » dans une certaine mesure la décision. Ce n’est pas le ou la juge X ou Y qui rend
la décision, c’est « le tribunal » ou « la cour ». En cas de désaccord entre les magistrats qui
composent la décision, on procède à un vote. Le président n’a pas voix prépondérante. Il peut
être mis en minorité. Le délibéré est secret. On ne sait pas quel juge a voté dans quel sens.

Tel n’est pas le cas dans les pays anglo-saxons. Ce qu’ils appellent les « dissent opinions »
c’est-à-dire les opinions des juges mis en minorité au sein de la juridiction sont rendues
publiques. Ce qui signifie qu’à côté de l’édition de l’arrêt ou du jugement, sera édité l’avis du
juge mis en minorité. Il en est de même au sein de certaines juridictions internationales. Ce
système est totalement contraire à nos lois, à notre pratique et à nos traditions judicaires.

Le secret des délibérés limite le risque de pression sur le juge avant le jugement et celui de
représailles après. Il renforce également la crédibilité et l’autorité de la décision rendue. Nul ne
sait si elle a été rendue à l’unanimité ou à la majorité des juges.

3. LES GARANTIES PROCÉDURALES PENDANT LE PROCÈS PÉNAL

Ces garanties sont les mises en application, notamment, des dispositions constitutionnelles et
internationales que nous avons rappelées précédemment.

18
19

Le respect de ces principes garantit le procès équitable.

Doivent être appliquées la présomption d’innocence, le contradictoire, l’égalité des armes, la


célérité de la procédure la publicité de la procédure au stade du jugement.

La procédure pénale et l’organisation judicaire doivent notamment garantir effectivement le


respect des droits de la défense et de l’organisation du jugement des affaires dans un délai
raisonnable.

Article 15 de la Constitution

Le droit d'accès à la justice et à la défense est garanti à tous les citoyens, de même que le droit
d’obtenir des tribunaux des décisions dans un délai raisonnable.

Ces principes s’étendent à toute la durée de la procédure.

Ils impliquent que la personne soupçonnée soit informée dès le début de la procédure des faits
qui lui sont reprochés et de leur qualification juridique et qu’elle puisse être rapidement assistée
d’un avocat après le début de sa mise en cause effective et lors du jugement.

En pratique, le respect de ces principes implique notamment que le dossier soit mis à la
disposition des parties qui peuvent en obtenir copie et que le juge ne pourra fonder sa conviction
que sur des preuves qui lui seront apportées au cours des débats et contradictoirement discutées
devant lui, le tout, dans un délai raisonnable.

Par ailleurs, une personne nulle ne peut être poursuivie ou punie pénalement une seconde fois
à raison des mêmes faits. C’est l’application de la règle « non bis in idem » qui signifie en latin
« pas deux fois la même chose ». C’est cette règle qui fonde l’article 368 du code pénal qui
dispose : « Aucune personne acquittée légalement ne peut plus être reprise ou accusée à raison
des mêmes faits, même sous une qualification différente. ». Ce principe s’applique et doit faire
l’objet d’une particulière vigilance lorsqu’une personne a été jugée à l’étranger pour les mêmes
faits ou allègue l’avoir été.

Enfin, bien entendu, la personne mise en cause doit profiter du bénéfice du doute.

Marc Brisset-Foucault
Avocat général honoraire

19

Vous aimerez peut-être aussi