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Encyclopédies
Imprimé le 30/03/2020

Date du fascicule : 28 Février 2019


JurisClasseur Civil Code > Art. 1240 à 1245-17

F a s c . 1 4 1 : D R O I T À R É PA R AT I O N . – R e s p o n s a b i l i t é d u f a i t d 'a u t r u i . – D o m a i n e .
R e s p o n s a b i l i t é d e s p è re e t m è re

Date du fascicule : 28 Février 2019

Date de la dernière mise à jour : 28 Février 2019

A
Alliin
nee VViiggn
noon
n--B
Baarrrraau
ulltt - Professeur à l'université d'Angers

P
Pooiin
nttss--ccllééss

1. – La responsabilité des parents se justifie par l'aau


uttoorriittéé p
paarreen
nttaallee dont ils sont investis à l'égard de leurs
enfants mineurs (V.  n° 1 et 2 ).

2. – La mise en œuvre de la responsabilité parentale est subordonnée à l'existence d'un lliieen


nddee fifilliiaattiioon
n
(V.  n° 11 à 13 ).

3. – La rreessp
poon
nssaab
biilliittéé p
paarreen
nttaallee est tributaire des m
mood
daalliittééss d
d''eexxeerrcciiccee d
dee ll''aau
uttoorriittéé p nttaallee (V.  n° 16
paarreen
à 22 ).

4. – La ccooh
haabbiittaattiioon
n de l'enfant mineur avec ses parents s'entend de sa rrééssiid deen
nccee h
haab
biittu
ueellllee et constitue
un ccoonncceep
ptt p pu urreem
meen
ntt jju
urriid
diiq
quuee (V.  n° 23 à 29 ). Elle a vocation à disparaître comme condition de la
responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs si le projet de réforme du droit de la
responsabilité civile du 13 mars 2017 entre en loi (art. 1246 : « sont responsables de plein droit du fait
du mineur : – ses parents, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale […] ») (V.  n° 34 ).

5. – Le d
drrooiitt d
dee vviissiittee eett d
d''h
hééb
beerrggeem
meen
ntt n
nee ffaaiitt p
paass cceesssseerr llaa ccooh
haab
biittaattiioon
n du mineur avec le titulaire de
l'autorité parentale (V.  n° 30 à 33 ).

6. – En l'état actuel du droit positif le ssiim mppllee ffaaiitt ccaau


ussaall d
dee ll''een
nffaan
ntt suffit à déclencher la rreessp
poon
nssaab
biilliittéé
p nttaallee (V.  n° 8 et 52 à 59 ) mais cette solution a vocation à être remise en cause si le projet de
paarreen
réforme du droit de la responsabilité civile du 13 mars 2017 entre en loi (art. 1245 : « On est
responsable du dommage causé par autrui dans les cas et aux conditions posés par les articles 1246 à
1249. Cette responsabilité suppose la preuve d'un fait de nature à engager la responsabilité de l'auteur
direct du dommage ») (V.  n° 8 ).

7. – La rreessp
poon
nssaab
biilliittéé p
paarreen
nttaallee est une rreessp
poon
nssaab
biilliittéé d
dee p
plleeiin
nddrrooiitt (V.  n° 6, 7 et 62 ).

8. – Les ccaau
usseess d
d''eexxoon
néérraattiioon
nddee rreessp
poon biilliittéé des parents sont limitées (V.  n° 62 à 69 ).
nssaab

9. – LLeess p
paarreen
nttss oou
u lleeu
urr aassssu
urreeu
urr peuvent tenter de transférer tout ou partie de la charge indemnitaire
par le jeu des aaccttiioon urrssooiirreess (V.  n° 70 à 76 ).
nss rrééccu

10. – La responsabilité parentale peut entrer een n ccoon nccoou urrss avec d'autres actions en responsabilité, ce qui
pose spécialement la question de l'aarrttiiccu ullaattiioonn de la responsabilité parentale avec la rreessp
poonnssaab
biilliittéé
ffoon
nddééee ssu
urr ll'' aarrttiiccllee  11224422,, aalliin
nééaa  11eerr d
duuC Cood dee cciivviill (V.  n° 82 à 86 ).

IIn
nttrro
oddu
uccttiio
onn

11.. –– L' article 1242, alinéa 4 du Code civil ( C. civ., art. 1384, alinéa 4 ancien ) dispose que “le père et la mère, en
tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants

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mineurs habitant avec eux”. Si le texte a été modifié au fil des réformes, son esprit est demeuré fidèle à la volonté
des rédacteurs du Code civil qui envisageaient la responsabilité des parents comme la contrepartie de l'autorité
qu'ils exercent. Ainsi conçue, leur responsabilité était consubstantielle à la notion d'autorité (B. Walz, Regard
critique sur les critères de désignation du responsable du fait d'autrui : Resp. civ. et assur. 2012, étude 9 . – J.-
B. Thierry, Le rôle de l'autorité parentale dans la responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs : LPA
7 janv. 2008, p. 4 ), voire de solidarité (sur les rapports de la responsabilité parentale et de la solidarité familiale, V.
Ph. Brun, Responsabilité civile extracontractuelle : LexisNexis, 2018, n° 443 et les réf. citées). Les travaux
préparatoires du Code civil expriment ce lien nécessaire, en particulier par l'entremise de Tarrible, qui estimait
que les articles 1382 à 1386 du Code civil constituaient un encouragement à la « vigilance des hommes chargés
du dépôt sacré de l'autorité » (Recueil complet des travaux préparatoires, Fenet, t. XIII, 1828, p. 491). Aujourd'hui
encore, l'autorité est de l'essence des rapports filiaux puisque l'autorité parentale est conçue par nombre
d'auteurs contemporains comme un droit naturel lié à la filiation (V. G. Cornu, Droit civil, La famille :
Montchrestien 9e éd., 2006, n° 73. – Adde A.-M. Leroyer, L'enfant confié à un tiers : De l'autorité parentale à
l'autorité familiale : RTD civ. 1998, spéc. p. 587).

22.. –– H
Hiissttooiirree d
dee llaa rreessp
poon
nssaab
biilliittéé p
paarreen
nttaallee –– Bien que l'origine de la règle visée à l' article 1242, alinéa 4 du
Code civil soit incertaine, elle ne paraît pas remonter au droit romain mais plutôt à l'Ancien Régime qui, attribuant
un rôle prépondérant au père de famille, a facilité la reconnaissance d'une obligation de surveillance à sa charge.
Certaines coutumes médiévales ont consacré le principe de la responsabilité du père du fait de son enfant mais
en ont limité la portée en réservant à ce dernier la faculté de s'en dégager par l'abandon noxal (V. J.-L. Gazzaniga,
Introduction historique au droit des obligations : PUF, coll. Droit fondamental, 1992, p. 240). On trouve toutefois la
trace d'une responsabilité paternelle dans l'article 656 de la Nouvelle coutume de Bretagne suivant laquelle : « Si
l'enfant fait tort à autrui, tant qu'il sera au pouvoir de son père, le père doit payer l'amende civile, pour ce qu'il
doit châtier ses enfants » (sur cette question, V. M.-L. Lebreton, L'enfant et la responsabilité civile, préf. Y. Flour :
Thèse Rouen, Publications des universités de Rouen et du Havre, 1999, n° 3, p. 19). Dès le XVIIIe siècle, Devisart
s'est appuyé sur ce texte qu'il appréhendait comme une loi « suivie partout parce qu'elle est fondée en raison »
pour justifier la responsabilité des père et mère. Dans ces conditions, les parents deviennent responsables des
délits commis par leurs enfants en bas âge dès lors que « c'est à eux de veiller sur leur conduite et d'empêcher
que par malice ou imprudence ils ne causent du tort à qui que ce soit ; et si l'enfant en occasionne, c'est à eux de
le réparer » (Devisart, Collection de décisions nouvelles, de notions nouvelles et de notions relatives à la
jurisprudence, V° Délit, § III, Personnes qui répondent du délit des autres : 1784, p. 151 s., n° 5).

33.. –– ÉÉvvoollu
uttiioon
nss eett m
mééttaam
moorrp
phhoosseess d
dee llaa rreessp
poon
nssaab
biilliittéé p
paarreen
nttaallee –– Depuis plus de 20 ans, la
responsabilité parentale subit une véritable mutation sous l'effet d'un double mouvement d'objectivation qui a
affecté tant la nature que les conditions de la responsabilité parentale. En particulier, les deux fautes qui en
constituaient les piliers ont été écartées. D'une part, la faute du mineur n'est plus nécessaire de sorte que les
parents peuvent être tenus responsables quand bien même leur enfant ne pourrait l'être à titre personnel.
D'autre part, la faute des parents ne constitue plus le fondement de leur responsabilité dans la mesure où ils ne
peuvent plus s'exonérer en prouvant leur absence de faute de surveillance et d'éducation. La métamorphose s'est
opérée au prix d'un long processus de maturation qu'il convient de retracer brièvement.

44.. –– LLaa ffaau


uttee ccoom
mmmee ffoon
nddeem
meen
ntt d
dee llaa rreessp
poon
nssaab
biilliittéé p
paarreen
nttaallee –– Fondée dès les années cinquante sur une
présomption de faute de surveillance et d'éducation des parents, la responsabilité parentale s'est
progressivement muée en responsabilité de plein droit et s'est affranchie de l'exigence d'une faute de l'enfant
comme condition de sa mise en œuvre (V. C. Siffrein-Blanc, Vers une réforme de la responsabilité civile des
parents : RTD civ. 2011, p. 479 ). Doublement utile, la responsabilité fondée sur l'article 1384, alinéa 4 (devenu C.
civ., art. 1242, al. 4 ) du Code civil avait, dès l'origine, à la fois des vertus préventives et sanctionnatrices du côté
des parents et une fonction indemnitaire à l'égard de la victime. Au demeurant, cette dernière fonction s'est
trouvée considérablement amoindrie pendant deux siècles du fait de l'exigence de la faute des parents et de
l'enfant auteur. Le système reposait en effet sur une présomption de faute de surveillance et d'éducation des
parents dont le préjudice causé par l'enfant constituait le révélateur. Fondement traditionnel de la responsabilité
parentale, la faute dans l'éducation ou la surveillance aussi appelée culpa in educando ou in vigilando devait être
consacrée par un arrêt du 12 octobre 1955 ( Cass. 2e civ., 12 oct. 1955  : D. 1957, jurispr. p. 301, note Rodière ; JCP
G 1955, II, 9003 , note P. Esmein) suivant lequel : « La responsabilité du père, en raison du dommage causé par
son enfant mineur habitant avec lui, découle de ses obligations de surveillance et de direction sur la personne de
ce dernier ». De ce fondement est née, conformément à l' article 1384, alinéa 7 du Code civil (devenu C. civ.,
art. 1242, al. 7 ), la faculté offerte aux parents de combattre la présomption de faute en prouvant “qu'ils n'ont pu
empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité”, ce qui revenait à établir qu'ils avaient correctement
éduqué et surveillé leur enfant (en ce sens : Cass. 2e civ., 12 oct. 1955 , préc. : la responsabilité parentale « repose

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sur une présomption de faute et doit être écartée dès qu'il est établi que, tant du point de vue de l'éducation que
de la surveillance, le père s'est comporté comme une personne prudente et n'a pu, ainsi empêcher l'acte
dommageable ». – Adde Cass. 2e civ., 20 juill. 1957  : D. 1958, jurispr. p. 111, note E. Blanc. – Cass. 2e civ., 31 janv.
1958  : JCP G 1958, II, 10599 , note Mihura).

55.. –– IIn
nccoon
nvvéén
niieen
nttss d
dee llaa ffaau
uttee –– Suivant ce système, la victime se trouvait confrontée à deux écueils. Le
premier consistait dans l'impossibilité d'imputer une faute à l'enfant privé de discernement, le second résultait de
la faculté pour les parents de s'exonérer en prouvant leur absence de faute de surveillance et d'éducation.
Socialement indispensable, la règle se trouvait donc en pratique privée de sa pleine efficacité. C'est sans doute la
raison pour laquelle la jurisprudence marqua certaines hésitations quant au fondement de la responsabilité
parentale. En effet, tandis que certaines décisions avaient paru abandonner la présomption de faute au bénéfice
de la faute, d'autres, plus sévères, semblaient introduire l'équivalent d'un système de garantie qui ne manqua pas
de trouver un écho approbateur en doctrine en raison de « la nécessité de garantir les défauts du caractère de
l'enfant » (V. A. Tunc, H. et L. Mazeaud, Traité théorique et pratique de la responsabilité civile délictuelle et
contractuelle : Montchrestien, 6e éd., 1965. – D. Layré, La responsabilité du fait des mineurs : Thèse Paris I, 1983,
spéc. p. 282 s.).

66.. –– D
Doou
ubbllee m
moou
uvveem
meen
ntt d
d''oob
bjjeeccttiivvaattiioon
nddee llaa rreessp
poon
nssaab
biilliittéé p
paarreen
nttaallee –– Deux évolutions devaient
contribuer à la rénovation de la responsabilité parentale. D'une part, l'avènement de la faute objective a permis
d'admettre la faute de l'enfant en bas âge ; d'autre part l'émergence d'une responsabilité de plein droit du fait
d'autrui fondée sur l'article 1384, alinéa 1er (devenu C. civ., art. 1242, al. 1er ) du Code civil devait gagner par
contagion la responsabilité parentale.

Sur le premier point, les arrêts du 9 mai 1984 ont indirectement amorcé un tournant décisif en faveur de
l'objectivation de la responsabilité parentale en admettant que l'absence de discernement n'empêche pas
d'imputer une faute au jeune enfant qui n'a pas conscience des conséquences de ses actes (arrêts Fullenwarth,
Lemaire, Derguini et Djouab : D. 1984, jurispr. p. 529, concl. J. Cabannes, note F. Chabas ; JCP G 1984, II, 20555 ,
note Dejean de La Bâtie). En particulier, l'arrêt Fullenwarth ( Cass. ass. plén., 9 mai 1984  : Bull. civ. ass. plén., n° 4 )
admet que « pour que soit présumée, sur le fondement de l' article 1384, alinéa 4 du Code civil , la responsabilité
des père et mère d'un mineur habitant avec eux, il suffit que celui-ci ait commis un acte qui soit la cause directe
du dommage invoqué par la victime » (R. Legeais, Du gardien sans discernement – Progrès ou régression dans le
droit de la responsabilité civile : D. 1984, chron. p. 237). Pourtant la Cour de cassation n'est pas allée au bout de sa
logique consistant à opérer la mutation de la responsabilité parentale en responsabilité de plein droit. En effet, au
lendemain des arrêts de 1984, la Haute Juridiction a rappelé la possibilité pour les parents de s'exonérer en
prouvant leur absence de faute de surveillance et d'éducation (V. not. Cass. 2e civ., 4 mars 1987, n° 85-14.554  :
JurisData n° 1987-000376  ; Bull. civ. II, n° 63 ).

Sur le second point, l' arrêt Blieck ( Cass. ass. plén., 29 mars 1991, n° 89-15.231  : JurisData n° 1991-001098  ;
D. 1991, jurispr. p. 324, note Ch. Larroumet ; JCP G 1991, II, 21673 , concl. Dontenwille, note J. Ghestin ; RTD civ.
1991, p. 541 , obs. P. Jourdain ; Gaz. Pal. 1992, 2, p. 513 , note F. Chabas. – G. Viney, Vers un élargissement de la
catégorie des « personnes dont on doit répondre » ; la porte entrouverte à une nouvelle interprétation de l'
article 1384, alinéa 1er du Code civil  : D. 1991, chron. p. 157 ; Defrénois 1991, art. 35062, p. 729 , note J.-L. Aubert)
a consacré une nouvelle responsabilité du fait d'autrui fondée sur la garde de l'article 1384, alinéa 1er et a
influencé le régime de la responsabilité parentale. En effet, la Cour de cassation ayant admis que cette
responsabilité était de plein droit, il n'y avait plus de raison de soutenir que les parents bénéficiaient d'une
possibilité d'exonération par l'absence de faute alors que les gardiens (dont le lien avec l'enfant est par hypothèse
moins étroit) étaient soumis à une présomption quasi irréfragable de responsabilité.

77.. –– C
Chhaan
nggeem
meen
ntt d
dee n
naattu
urree  :: llaa rreessp
poon
nssaab
biilliittéé d
dee p
plleeiin
nddrrooiitt –– Il faudra attendre quelques années pour
qu'à la faveur de l'arrêt Bertrand ( Cass. 2e civ., 19 févr. 1997, n° 94-21.111  : JurisData n° 1997-000750  ; Bull. civ.
II, n° 56  ; JCP G 1997, II, 22848 , concl. Kessous, note G. Viney ; D. 1997, jurispr. p. 265, note P. Jourdain ; Gaz. Pal.
1997, 2, p. 372 , note F. Chabas. – Dorsner-Dolivet : RDSS 1997, p. 660 . – D. Mazeaud : D. 1997, somm. p. 290.
– F. Leduc, La responsabilité des père et mère : Changement de nature : Resp. civ. et assur. 1997, chron. 9 . –
Ch. Radé, Le renouveau de la responsabilité du fait d'autrui (apologie de l'arrêt Bertrand) : D. 1997, chron. p. 279.
– F. Alt-Maes, La garde, fondement de la responsabilité du fait du mineur : JCP G 1998, I, 1154 ) la Cour de
cassation affirme, on ne peut plus clairement, que « seule la force majeure ou la faute de la victime peut exonérer
les père et mère de la responsabilité de plein droit encourue du fait des dommages causés par leur enfant
mineur ». Si ce revirement a affecté les conditions et les effets de la responsabilité parentale, elle paraît lui avoir
également substitué un nouveau fondement lié, non plus à la faute, mais au risque. L'enfant est désormais

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envisagé par le prisme de son immaturité et de son insolvabilité comme constituant un risque pour les tiers,
risque dont les parents doivent garantir les conséquences dommageables. Réifié, l'enfant est alors appréhendé
comme un sujet potentiellement dangereux et susceptible d'être affecté d'un vice. Dès lors, la justification
profonde de la responsabilité parentale ne réside plus dans la nécessité de châtier une faute de surveillance et
d'éducation des parents mais s'appuie sur un besoin indemnitaire accru. L'obligation de réparer mise à la charge
des parents s'enracine ainsi dans leur statut de répondant naturel et non dans le constat de leurs défaillances (V.
A. Bénabent, Droit des obligations : LGDJ, coll. Précis Domat, 17e éd., 2018, n° 561).

88.. –– FFaaiitt ccaau


ussaall d
dee ll''een ntt –– Si l'arrêt Bertrand (arrêt préc. n° 7) a indiscutablement amorcé un changement
nffaan
de cap décisif, la jurisprudence devait franchir une étape supplémentaire avec le fameux arrêt Levert ( Cass.
2e civ., 10 mai 2001, n° 99-11.287  : JurisData n° 2001-009377  ; Resp. civ. et assur. 2001, chron. 18 , H. Groutel ;
Bull. civ. II, n° 96  ; D. 2001, p. 2851, rapp. Guerder, note O. Tournafond ; D. 2002, p. 1315, obs. D. Mazeaud ; JCP G
2001, II, 10613 , note J. Mouly ; JCP G 2002, I, 124, n° 20 , obs. Viney ; Defrénois 2001, p. 1275 , note E. Savaux ; Dr.
famille 2002, chron. 7  ; RTD civ. 2001, p. 601 , obs. P. Jourdain ; RJPF 2001, p. 22 , note F. Chabas. – Adde, F. Leduc,
Le spectre du fait causal : Resp. civ. et assur. 2001, chron. 20 ) aux termes duquel elle a admis que « la
responsabilité de plein droit encourue par les père et mère du fait des dommages causés par leur enfant mineur
habitant avec eux n'est pas subordonnée à l'existence d'une faute de l'enfant ». Peu après, la Haute Juridiction
réunie en assemblée plénière a consolidé sa jurisprudence par deux arrêts remarqués du 13 décembre 2002 (
Cass. ass. plén., 13 déc. 2002, n° 00-13.787 et 01-14.007, 2 arrêts : JurisData n° 2002-016996 et 2002-016997  ;
Bull. civ. ass. plén. n° 4  ; Resp. civ. et assur. 2003, chron. 4 , H. Groutel ; JCP G 2003, II, 10010 , note A. Hervio-
Lelong ; D. 2003, p. 231, note P. Jourdain) selon lesquels : « pour que la responsabilité de plein droit des père et
mère exerçant l'autorité parentale sur un mineur habitant avec eux puisse être recherchée, il suffit que le
dommage invoqué par la victime ait été directement causé par le fait, même non fautif, du mineur ; que seule la
force majeure ou la faute de la victime peut exonérer les père et mère de cette responsabilité ». Le principe de la
responsabilité des parents du fait du comportement non fautif de leur enfant a été réaffirmé par la suite à de
multiples reprises par la Cour de cassation (V. Cass. 2e civ., 3 juill. 2003, n° 02-15.696 : JurisData n° 2003-019819  ;
Bull. civ. II, n° 230  : JCP G 2004, n° 4, p. 136-137 , note R. Desgorces ; Dr. famille 2004, n° 4, p. 35-36 , note J. Julien.
– Cass. 2e civ., 20 oct. 2005, n° 04-19.243  : JurisData n° 2005-030472 . – Cass. 2e civ., 18 nov. 2010, n° 09-17.021  :
JurisData n° 2010-021538  ; Resp. civ. et assur. 2011, n° 2, p. 18 . – Cass. 2e civ., 17 févr. 2011, n° 10-30.439  :
JurisData n° 2011-001912  ; Bull. civ. II, n° 47  ; Resp. civ. et assur. 2011, comm. 164 , note F. Leduc ; JCP G 2011,
n° 18, n° 519, p. 859, note D. Bakouche ; D. 2011, p. 1117, note M. Bouteille ; ibid. 2012, p. 47, obs. P. Brun et O.
Gout ; Dr. famille 2011, comm. 106 , note S. Moracchini-Zeidenberg : Dr. famille 2011, comm. 122 , note S. Rouxel ;
RLDC 2011/82, n° 4234, obs. J.-Ph. Bugnicourt. – V. aussi J. Julien, La faute de la victime doit présenter les
caractères de la force majeure pour exonérer les parents de leur responsabilité du fait de leur enfant mineur :
RJPF 2011-5/30) et relayé par les juges du fond ( CA Besançon, 26 nov. 2009, n° 06/00507  : JurisData
n° 2009-020383  : enfant poussé par un camarade à la sortie du collège et qui heurte le véhicule de la victime. –
CA Chambéry, 10 mars 2009, n° 07/02343  : JurisData n° 2009-003868  : choc régulier entre deux enfants à
l'occasion d'un entraînement de football. – CA Paris, 17 mars 2008, n° 06/01357  : JurisData n° 2008-363962  :
chute non fautive d'un mineur sur le thorax de la victime. – CA Dijon, 9 nov. 2004, n° 02/01048  : JurisData
n° 2004-255935  : un enfant de 10 ans remet un pétard acheté par son père à son camarade de jeu qui provoque
un incendie en le jetant dans une usine. La cour a décidé que la fourniture du pétard constitue un fait causal
suffisant pour déclencher la responsabilité fondée sur l'article 1242, alinéa 4. – CA Amiens, 9 juin 2005,
n° 03/03093  : JurisData n° 2005-280902  : choc lors d'un exercice de gymnastique correctement exécuté. – CA
Amiens, 13 mai 2004, n° 02/04173  : JurisData n° 2004-246137  : un adolescent blesse son adversaire en exécutant
une prise de judo de façon régulière. La responsabilité parentale est engagée au motif qu'il suffit que le
dommage ait été directement causé par le fait, même non fautif, du mineur. – CA Amiens, 13 nov. 2003,
n° 02/02669  : JurisData n° 2003-235183  : collision entre deux élèves lors d'un match de football organisé à
l'école. L'un perd l'équilibre, chute et subit un traumatisme crânien. La responsabilité des parents de l'autre élève
est retenue en dépit de l'absence de faute imputable à leur fils. – CA Grenoble, 7 mai 2003, n° 02/02834  :
JurisData n° 2003-222181  : blessure consécutive à un tacle régulier pratiqué au cours d'un match de football. – CA
Aix-en-Provence, 1er déc. 2006, n° 15/21844  : JurisData n° 2006-026215  : un mineur dont les skis sont accrochés
par un autre skieur tombe sur un troisième et le projette dans un ravin).

Héritières de l'arrêt du 9 mai 1984 (arrêt préc. n° 6), ces décisions ne se bornent pas à affirmer que la faute du
mineur n'est plus nécessaire pour engager la responsabilité des parents, elles énoncent expressément qu'un
simple fait directement causal de l'enfant suffit à déclencher le mécanisme de l' article 1242, alinéa 4 du Code civil
. C'est peu dire qu'il s'agit là d'une véritable révolution qui suscite la critique quasi unanime de la doctrine en ce
qu'elle conduit à faire peser sur les parents une responsabilité excessive et injustifiée (V. Ph. Brun, préc. n° 1, spéc.
n° 436. – F. Leduc, La responsabilité des père et mère du fait de leurs enfants : Lamy Responsabilité

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civile, nov. 2018, étude 243, n° 243-23). En effet, cette jurisprudence a induit un changement de nature de la
responsabilité parentale qui, de responsabilité complémentaire et indirecte par addition à celle de l'enfant, s'est
transformée en responsabilité principale et directe. Désormais, les parents sont responsables du fait de leurs
enfants alors même qu'aucun d'entre eux (parents ou enfants mineurs) ne pourrait voir sa responsabilité
personnelle engagée en l'absence de fait générateur. La plupart des auteurs estiment ainsi qu'il eût été
préférable de s'en tenir à l'exigence d'un acte « objectivement illicite » ou « anormal ». Telle fut du reste la solution
préconisée par l'avant-projet Catala-Viney (P. Catala (dir.), Avant-projet de réforme du droit des obligations et de la
prescription, 22 sept. 2005) à l'article 1355, alinéa 2 selon lequel la responsabilité du fait d'autrui “suppose la
preuve d'un fait de nature à engager la responsabilité de l'auteur direct du dommage”. Symétriquement, mais
plus restrictivement, le projet Terré (F. Terré (dir.), Pour une réforme de la responsabilité civile, Dalloz, coll.
Thèmes et commentaires, 2011) affirmait à l'article 13 que la responsabilité du fait d'autrui « n'a lieu que
lorsqu'est caractérisé un délit civil au sens du présent chapitre ». Les avant-projets de réforme du droit de la
responsabilité des 26 juillet 2012 et du 29 avril 2016, puis le projet de réforme du 13 mars 2017 consacrent ces
préconisations. En particulier, le projet de réforme de la responsabilité civile du 13 mars 2017 revient sur cette
jurisprudence en restaurant explicitant l'exigence d'un fait générateur imputable au mineur comme condition de
la responsabilité parentale (Projet de réforme de la responsabilité civile, Chancellerie, 13 mars 2017, art. 1245,
al. 2 : la responsabilité du fait d'autrui « suppose la preuve d'un fait de nature à engager la responsabilité de
l'auteur direct du dommage »).

L'évolution ainsi amorcée voilà près de 20 ans a modifié en profondeur non seulement les conditions de la
responsabilité parentale ((II)) mais aussi sa mise en œuvre ((IIII)).

II.. -- C
Coon
nddiittiio
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dee llaa rrees p
poon
nssaab
biilliittéé p
paareen
nttaallee d
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dee ll''een
nffaan
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99.. –– La responsabilité parentale étant une responsabilité du fait d'autrui, il convient de vérifier que les
conditions imposées par l' article 1242, alinéa 4 du Code civil sont réalisées à l'égard des parents civilement
responsables d'une part ((A A)) et à l'égard de l'enfant auteur du dommage d'autre part ((BB)).

A
A.. -- C
Coon
nddiittiio
onnss rreellaattiivveess aau
uxx p
paarreen
nttss

1100.. –– L' article 1242, alinéa 4 du Code civil énonce on ne peut plus clairement que la responsabilité parentale
est consubstantielle à l'exercice de l'autorité parentale ((22°°)) elle-même tributaire de l'existence préalable d'un lien
de filiation ((11°°)). À ces conditions s’ajoute l’exigence de la cohabitation de l’enfant avec ses parents ((33°°)).

11°° EExxiisstteen
nccee d
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1111.. –– LLee lliieen


nddee fifilliiaattiioon
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dee llaa rreessp
poon
nssaab
biilliittéé p
paarreen
nttaallee –– Le droit français demeure
profondément attaché à l'image de l'autorité parentale conçue comme un droit naturel lié à la filiation. L'origine
de ce lien importe peu dès lors qu'il est établi juridiquement. Qu'il s'agisse d'une filiation adoptive, établie par
possession d'état ou biologique, elle suffit à déclencher la responsabilité parentale. La jurisprudence exprime
l'interdépendance de la filiation et de l'autorité parentale, soit qu'elle conclue à la neutralisation de la
responsabilité parentale du fait de l'anéantissement du lien de filiation ((aa)), soit qu'elle décide le cantonnement de
cette responsabilité aux seuls parents ((b b)) à l'exclusion des tiers.

aa)) N
Neeu
uttrraalliissaattiio
onn d ee llaa reessp
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biilliittéé p
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nttaallee d
duu ffaaiitt d ee ll''aan
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nttiisssseem
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duu lien
nddee fifilliiaattiio
onn

1122.. –– Un arrêt du 8 décembre 2004 ( Cass. crim., 8 déc. 2004, n° 03-84.715  : JurisData n° 2004-026416  ; Bull.
crim. n° 315  ; Resp. civ. et assur. 2005, comm. 82  ; JCP G 2005, I, 132 , obs. G. Viney ; LPA 18 juill. 2005, p. 17 , note
I. Corpart-Ourlerich ; Gaz. Pal. 22 et 23 juill. 2005, p. 4, note M. Nicoletti ; D. 2005, p. 2267, note A. Paulin) a posé le
principe suivant lequel l'anéantissement rétroactif d'un lien de filiation rend impossible toute action en
responsabilité fondée sur l' article 1242, alinéa 4 du Code civil . Il s'agissait en l'espèce d'un enfant dont la filiation
maternelle était établie et qui avait été reconnu ensuite par l'homme qui devait épouser sa mère. Par l'effet du
mariage subséquent l'enfant se trouva légitimé mais la reconnaissance fut annulée ultérieurement. Entre temps,
le mineur s'étant rendu coupable de vols et d'agression sexuelle, le père et la mère furent déclarés civilement
responsables par les juges du fond. Au soutien de leur analyse les magistrats ont considéré que l'annulation de la
reconnaissance n'en laissait pas moins subsister à la charge de son auteur une obligation naturelle d'éducation
qui suffit à justifier qu'il réponde des dommages causés par l'enfant. La Haute Juridiction a censuré leur décision
aux motifs que « cette annulation a un effet rétroactif sur l'existence du lien de filiation et, par voie de

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conséquence, sur la responsabilité civile ». Dans ces conditions, le mari de la mère a été déclaré irresponsable sur
le fondement de l' article 1242, alinéa 4 du Code civil quand bien même il aurait, depuis le plus jeune âge de
l'enfant, exercé des prérogatives inhérentes à l'autorité parentale (pour une critique de la solution, V. F. Terré,
P. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Droit civil, Les obligations : Dalloz, 12e éd. 2018, n° 1048 et les réf. citées).

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b)) C
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oddee cciivviill aau
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1133.. –– La responsabilité fondée sur l' article 1242, alinéa 4, du Code civil est cantonnée aux père et mère par la
jurisprudence qui marque depuis longtemps et de manière constante son refus d'étendre à d'autres personnes
que les parents l'application de l' article 1242, alinéa 4 du Code civil . Cela témoigne de son attachement à une
conception stricte de la notion d'autorité parentale consubstantielle au lien de filiation. En particulier, la Cour de
cassation a refusé d'étendre aux tiers auxquels les enfants ont été confiés pour une période plus ou moins
longue, l'application de l' article 1242, alinéa 4 du Code civil y compris lorsque les tiers en question sont des
membres de la famille. On se souvient que par un arrêt du 18 septembre 1996 ( Cass. 2e civ., 18 sept. 1996,
n° 94-20.580  : JurisData n° 1996-003475  ; Bull. civ. II, n° 217  ; Resp. civ. et assur. 1996, comm. 379 , note
H. Groutel ; LPA 24 févr. 1997, p. 6 , note M.-Ch. Lebreton. – C. Philippe, Les grands-parents sont-ils des
ascendants privilégiés ? (2e partie : l'autorité et la responsabilité) : RLDC 2005, p. 63. – Adde H. Bosse-Platière, La
présence des grands-parents dans le contentieux familial : JCP G 1997, I, 4030 . – Déjà en ce sens, V.  Cass. 2e civ.,
25 janv. 1995, n° 92-18.802  : JurisData n° 1995-000334  ; Bull. civ. II, n° 29  ; D. 1995, somm. p. 232, obs.
Ph. Delebecque ; RTD civ. 1995, p. 613 , obs. J. Hauser. – Adde Cass. 2e civ., 5 févr. 2004, n° 01-03.585 et 02-15.383
 : JurisData n° 2004-022463  ; Bull. civ. II, n° 50  ; Resp. civ. et assur. 2004, comm. 127 , obs. J. Julien ; RLDC 2004,
p. 19, obs. A. Marchand ; LPA 24 juin 2005, p. 14  ; RJPF 2004, p. 21 , note F. Chabas. – Comp. Cass. 2e civ., 18 mars
2004, n° 03-10.600  : JurisData n° 2004-022856  ; Resp. civ. et assur. 2004, comm. 216 ), la Haute Juridiction a
refusé d'appliquer ce texte pour le cas d'un enfant confié à sa grand-mère et à sa tante pour les vacances. Pour
rejeter les actions fondées sur l' article 1242, alinéa 4 du Code civil, la Cour de cassation s'est bornée à affirmer
que les conditions d'application de ces textes n'étaient pas réunies.

Outre l'extension de la responsabilité des père et mère aux membres de la famille, certains auteurs se sont
interrogés sur l'opportunité de l'appliquer aussi aux étrangers (sur le détail de cette question, V. G. Viney et
P. Jourdain, Traité de droit civil, (ss dir.) J. Ghestin, Les conditions de la responsabilité : LGDJ, 4e éd., 2013, n° 874).
Mais suivant la logique initiée en 1996, la Cour de cassation a maintenu sa position refusant systématiquement
d'appliquer l' article 1242, alinéa 4 du Code civil à des tiers autres que les parents. Cette position a été critiquée
(R. Legeais, La responsabilité civile introuvable, in Mél. Marty, p. 775, n° 9) mais elle s'est trouvée privée d'objet
par la suite lorsque la jurisprudence Blieck a ouvert de nouveaux cas de responsabilité, rendant du même coup
inutile l'application de l'alinéa 4 aux substituts parentaux. Ces considérations ont vocation à perdre de leur intérêt
si le projet de réforme de la responsabilité devient loi car l'article 1246 consacre un régime de responsabilité
uniforme pour les parents ou toute autre personne chargée d'organiser et contrôler à titre permanent le mode de
vie du mineur.

On peut également se demander si la responsabilité parentale fondée sur l' article 1242, alinéa 4, du Code civil
ne doit pas être étendue aux père et père ou mère et mère (V. en ce sens, F. Leduc, La responsabilité des père et
mère du fait de leurs enfants, préc. n° 8, spéc. n° 243-33) du fait de l'ouverture du mariage aux personnes de
même sexe et de la possibilité d'adopter l'enfant de son conjoint ( C. civ., art. 6-1 ).

Si le lien de filiation est la condition préalable à toute responsabilité parentale, c'est pourtant l'exercice de
l'autorité parentale qui est en est la condition légale expresse.

22°° LL''eexxeerrcciiccee d
dee ll''aau
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aa)) LL''aau
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1144.. –– LLaa ssu


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uddrrooiitt d
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dee –– Fruit de l'évolution des mœurs, la loi
n° 70-459 du 4 juin 1970 a substitué l'autorité parentale à l'ancienne puissance paternelle et a rattaché la
responsabilité des parents à l'exercice du droit de garde. Puis, le législateur a assigné à la loi Malhuret du 22 juillet
1987 ( L. n° 87-570, 22 juill. 1987  : JO 24 juill. 1987, p. 8253 ) la mission d'écarter la garde du domaine de l'autorité
parentale. Par un malencontreux oubli, l'article 1384, alinéa 4 (devenu C. civ., art. 1242, al. 4 ) du Code civil est
demeuré attaché à la garde et ce n'est que tardivement que la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993 ( L. n° 93-22, 8 janv.
1993  : JO 9 janv. 1993, p. 495 ), visant notamment à légaliser et à favoriser le maintien de l'autorité parentale
“conjointe”, a réduit le champ des hypothèses dans lesquelles un parent peut être privé de son “droit de garde” au

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sens où on l'entendait avant la loi du 22 juillet 1987 .

La notion de garde a continué de se vider peu à peu de sa substance au point de se confondre avec la
communauté de vie, ce qui renvoie à la « résidence habituelle » de l'enfant. Simultanément, la notion d'autorité
conjointe exercée sur l'enfant par les père et mère a gagné du terrain de sorte qu'elle subsiste indépendamment
de la séparation des parents. Inutile et source de confusion, la garde a finalement disparu de l'article 1384,
alinéa 4 (devenu C. civ., art. 1242, al. 4 ) du Code civil à la faveur de la réforme du 4 mars 2002 ( L. n° 2002-305,
4 mars 2002  : JO 5 mars 2002, p. 4161 ). Désormais, il est énoncé on ne peut plus clairement que c'est “en tant
qu'ils exercent l'autorité parentale” que les parents sont responsables du fait de leurs enfants.

Loin d'être une simple coquetterie de plume, cette réforme contribue à modifier sensiblement la physionomie de
la responsabilité parentale. C'est sa logique même qui change puisque ce qui est pointé, ce n'est plus la
défaillance de l'autorité en tant que pouvoir concret mais l'autorité juridique en tant que statut (V. Ch. Radé, La
responsabilité civile des père et mère – De l'autorité parentale à la responsabilité parentale, in L'autorité parentale
en question : PU du Septentrion, 2003, p. 81 s.). À cet égard, la formulation de l' article 1242, alinéa 4 du Code civil
ne paraît pas exprimer tout à fait l'état du droit positif. Le texte prévoit en effet que les parents sont responsables
en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, ce qui suggère un exercice effectif de l'autorité. Or, ce qu'il importe
d'établir pour identifier le responsable, ce n'est pas qu'il exerce son autorité mais qu'il en est titulaire en droit.

1155.. –– ÉÉccllaatteem
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nttaallee –– La
figure classique du couple parental coexiste désormais avec de nouvelles configurations inédites qui affectent les
modalités de l'exercice de l'autorité parentale, soit qu'un seul parent exerce l'autorité parentale, soit qu'elle ait été
confisquée aux deux parents.

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1166.. –– PPrriin
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dee ll''eexxeerrcciiccee ccoon
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dee ll''aau
uttoorriittéé p
paarreen
nttaallee –– L'exercice conjoint de l'autorité parentale,
également dénommé coparentalité, fait aujourd'hui figure de principe en droit français depuis que la loi
n° 2002-305 du 4 mars 2002 en a renforcé la portée (sur cette question, V. A. Gouttenoire-Cornut, La consécration
de la coparentalité par la loi du 4 mars 2002  : Dr. famille 2002, chron. 24 ). Dès lors, l'existence d'une
« coparentalité paritaire » devrait justifier une « coresponsabilité paritaire » à condition que les parents soient
effectivement titulaires de l'autorité parentale et qu'ils exercent celle-ci conjointement. (A. Ponseille, Le sort de la
condition de cohabitation dans la responsabilité civile des père et mère du fait dommageable de leur enfant
mineur : RTD civ. 2003, p. 645 ). Le Code civil prévoit que les père et mère exercent en commun l'autorité
parentale dès lors qu'un lien de filiation est établi à l'égard de chacun d'eux, conformément aux dispositions de
l'article 372. Cet exercice conjoint est imposé, que le couple soit marié ou non, et survit à la séparation des époux
ou des concubins ( C. civ., art. 373-2 ). Dans toutes ces hypothèses, les parents étant titulaires de l'autorité
parentale, ils sont solidairement responsables du fait de leur enfant à condition que les autres conditions posées
à l' article 1242, alinéa 4 du Code civil soient réunies par ailleurs.

Il convient toutefois de relever que si le législateur promeut la coparentalité, le rapport déposé en janvier 2014
par le groupe de travail sur la coparentalité (mis en place en 2013 par la Direction des affaires civiles et du Sceau
et la Direction de la cohésion sociale) a révélé un décalage entre le droit et la pratique en montrant que
l'effectivité de la coparentalité suscite des difficultés en cas de séparation des parents. Le rapport relève que si
« les parents séparés doivent pouvoir maintenir des liens avec leur enfant et exercer leurs prérogatives
parentales, certains parents n'ont plus la possibilité d'exercer leur autorité parentale et de participer
effectivement à l'éducation de leur enfant » (Rapp. sur les réflexions du groupe de travail sur la coparentalité,
Comment assurer le respect de la coparentalité entre parents séparés, 2014, p. 5). La réflexion ainsi engagée a
donné lieu au dépôt d'une proposition de loi relative à l'autorité parentale et à l'intérêt de l'enfant dite « loi APIE »
qui a été adoptée par l'Assemblée nationale le 27 juin 2014 mais qui n'a pas reçu l'onction législative.

Les modalités de l'exercice de l'autorité parentale et la responsabilité civile qui en découle pour les parents
varient selon les cas de figure. Il convient de les présenter brièvement.

PPaarreennttss m
maarriiééss .. –– En vertu de l' article 372, alinéa 1er du Code civil , l'autorité parentale est exercée en commun
par les deux parents de sorte que la responsabilité encourue pour les dommages causés par les enfants pèse
solidairement sur les père et mère ( C. civ., art. 1242, al. 4 ). Le père et la mère contribuent par moitié à cette

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obligation de réparation sans considération du régime matrimonial choisi. L' ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet
2005 ( JO 6 juill. 2005, p. 11159 ) portant réforme de la filiation (sur laquelle, V. T. Garé, La réforme de la filiation :
JCP 2005, aperçu rapide 444. – F. Dekeuwer-Defosser, Le nouveau droit de la filiation : pas si simple ! : RLDC
2005/21, n° 878) a par ailleurs supprimé toute référence aux filiations légitime et naturelle, lesquelles sont
appréhendées de manière univoque.

L'article 372, alinéa 2 issu de la loi du 4 mars 2002 ainsi que les articles 373 et 373-1 du Code civil prévoient
toutefois des exceptions à cette règle, notamment lorsque l'autorité parentale est transmise provisoirement ou
définitivement à l'un des parents, en dehors de l'hypothèse du divorce ou de la séparation de corps.

L'article 375-7 issu de la loi du 5 mars 2007 ( L. n° 2007-293, 5 mars 2007  : JO 6 mars 2007, p. 4215 ) précise que
les père et mère dont l'enfant a fait l'objet d'une mesure d'assistance éducative continuent à exercer tous les
attributs de l'autorité parentale qui ne sont pas incompatibles avec cette mesure ( Cass. crim., 25 mars 1998,
n° 94-86.137  : JurisData n° 1998-001912  ; Bull. crim. n° 114  ; D. 1998, p. 152 ; LPA 5 oct. 1999, p. 14 , note F. Alt-
Maes ; JCP G 1998, II, 10162 , note Huyette). Réciproquement, la mise en place d'un régime de protection de l'un
des parents, tel qu'une curatelle renforcée, dès lors qu'il ne fait pas disparaître l'exercice de l'autorité parentale,
n'exclut pas qu'il soit civilement responsable du fait de son enfant (en ce sens, V.  CA Caen, 2 févr. 2006,
n° 06/00007  : D. 2006, p. 2016, note G. Raoul-Cormeil).

PPaarreennttss nnoonn m
maarriiééss.. –– Les parents non mariés sont responsables de plein droit et dans les mêmes conditions
qu'un couple uni par le mariage lorsqu'ils ont reconnu l'enfant avant qu'il ait 1 an ( C. civ., art. 372, al. 2 ), s’ils en
font la déclaration conjointe auprès du greffier en chef du tribunal de grande instance ( C. civ., art. 372, al. 3 . – L.
n° 2002-305, 4 mars 2002 ) ou par l'effet d'une décision du juge ( C. civ., art. 372, al. 3 ). En revanche, l'autorité
parentale est unilatérale dans trois hypothèses :

• soit qu'un seul parent ait reconnu l'enfant ;

• soit que les deux parents aient reconnu l'enfant mais que les conditions de l'article 372, alinéa 2, ne soient
pas remplies ;

• soit qu'une décision du juge ait attribué l'autorité parentale à un seul parent.

La présomption pèse sur le (ou les) parents qui cumulent les deux conditions suivantes : il exerce seul ou avec
l'autre parent l'autorité parentale et la résidence habituelle de l'enfant est fixée chez lui (ou chez eux) étant
précisé que le père biologique qui n'est pas titulaire de l'autorité parentale n'est responsable du fait de l'enfant
que s'il a commis une faute personnelle au sens de l' article 1240 du Code civil .

PPaarreennttss ssééppaarrééss .. –– Selon l' article 373-2 du Code civil , dans la rédaction résultant de la loi n° 2002-305 du
4 mars 2002 relative à l'autorité parentale, “la séparation des parents est sans incidence sur les règles de
dévolution de l'exercice de l'autorité parentale”. Mais si l'intérêt de l'enfant le commande le juge peut confier
l'exercice de l'autorité parentale à l'un des deux parents ( C. civ., art. 373-2-1, al. 1er ).

En cas de séparation, la responsabilité de plein droit prévue à l' article 1242, alinéa 4 du Code civil incombe au
seul parent chez lequel la résidence habituelle de l'enfant a été fixée, quand bien même l'autre parent,
bénéficiaire d'un droit de visite et d'hébergement, exercerait conjointement l'autorité parentale. La responsabilité
du parent chez lequel la résidence habituelle de l'enfant n'a pas été fixée ne peut, sans faute de sa part, être
engagée ( Cass. crim., 6 nov. 2012, n° 11-86.857  : Resp. civ. et assur. 2013, comm. 47  ; JCP G 2013, doctr. 38, n° 7 ,
obs. Ch. Coutant-Lapalus ; A J fam. 2012, p. 613 , obs. F. Chénédé ; D. 2012, p. 2658, obs. I. Gallmeister ; RTD civ.
2013, p. 106 , obs. J. Hauser. – Adde : St. Moracchini-Zeidenberg, Le responsable du fait du mineur : Resp. civ. et
assur. 2013, étude 2 . – A. Batteur, La responsabilité parentale en cas de séparation du couple, in Demain la
famille, 95e congrès des notaires : LPA 28 avr. 1999, p. 69 . – S. Ben Hadj Yahia, Séparation des parents et
responsabilité parentale, in Mél. en l'honneur du professeur Claire Neirinck : LexisNexis, 2015, p. 679 et s. –
I. Corpart, Quel avenir pour l'alternance des résidences des enfants de parents séparés : Dr. famille 2014, étude
19  ; Responsabilité solidaire des parents seulement séparés de fait : RJPF 2018, n° 9, p. 42-43 ).

PPaarreennttss aaddooppttaannttss .. –– L'adoption plénière produit presque tous les effets de la filiation par le sang ( C. civ.,
art. 356 s.). Dans l'adoption simple, l'adoptant est seul investi de l'autorité parentale, sauf lorsqu'il est le conjoint
du père ou de la mère de l'enfant : dans ce cas, l'autorité parentale est exercée concurremment par eux deux,
mais le conjoint en conserve seul l'exercice, sous réserve d'une déclaration commune avec l'adoptant devant le
greffier en chef du tribunal de grande instance ( C. civ., art. 365 ). La présomption pèsera ici aussi sur la ou les
personnes qui exercent l'autorité parentale et avec laquelle (ou lesquelles) habite l'enfant.

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22)) EExxeerrcciiccee u
unniillaattéérraall d ee ll''aau
utto
orriittéé p
paarreen
nttaallee

1177.. –– A
Auuttoorriittéé p
paarreen
nttaallee eexxeerrccééee p
paarr u
unn sseeu
ull d
deess d
deeu
uxx p
paarreen
nttss –– Par exception, il arrive qu'un seul des
parents soit tenu sur le fondement de l' article 1242, alinéa 4 du Code civil car il est le seul à exercer l'autorité
parentale ( CA Dijon, ch. civ., sect. B, 20 mars 2007, n° 05/01623  : JurisData n° 2007-333923 . – CA Nîmes, ch. corr.,
13 oct. 2005, n° 05/00961  : JurisData n° 2005-292745 ). C'est le cas lorsque la défaillance de l'un des parents est
caractérisée mais également en matière d'adoption.

1188.. –– D
Dééffaaiillllaan
nccee d
dee ll''u
unnd
deess p
paarreen
nttss d
daan
nss ll''eexxeerrcciiccee d
dee ll''aau
uttoorriittéé p
paarreen
nttaallee –– Hypothèses :

• le parent est hors d'état de manifester sa volonté ( C. civ., art. 373 ) ;

• l'un des deux parents vient à décéder ( C. civ., art. 373-1 ) ;

• le juge estime que l'intérêt de l'enfant commande de confier l'enfant à l'un des parents séparés ( C. civ.,
art. 373-2-1 ) ;

• l'établissement tardif (plus d'un an après la naissance de l'enfant) ou forcé (judiciairement) du second lien
de filiation ( C. civ., art. 372, al. 2 ) en l'absence d'une déclaration conjointe ou d'une décision du juge aux
affaires familiales ayant décidé de l'exercice conjoint de l'autorité parentale ;

• l'autorité parentale a été retirée à l'un des parents condamné par une disposition expresse du jugement
pénal, soit comme auteur, coauteur ou complice d'un crime ou délit commis sur la personne de son enfant,
soit comme coauteur ou complice d'un crime ou délit commis par leur enfant ( C. civ., art. 378 ) ;

• le lien de filiation a été rétroactivement anéanti par l'effet d'une décision de justice (V.  Cass. crim., 8 déc.
2004, n° 03-84.715 , préc. n° 12).

1199.. –– FFoon
nddeem
meen
ntt d
dee llaa rreessp
poon
nssaab
biilliittéé d
duup
paarreen
ntt n
noon
n ttiittu
ullaaiirree d
dee ll''aau
uttoorriittéé p
paarreen
nttaallee –– En cas de
séparation, si un seul des parents se voit confier l'autorité parentale sur l'enfant, l'autre ne peut voir sa
responsabilité engagée, sauf à prouver sa faute sur le fondement des articles 1240 et 1241 du Code civil , et cela
même si l'enfant résidait effectivement avec lui au moment du dommage ( Cass. crim., 6 nov. 2012, n° 11-86.857 ,
préc. n° 16).

2200.. –– R
Rèègglleess ssp
péécciififiq
quueess àà ll''aad
doop
pttiioon
n –– En cas d'adoption simple par une seule personne, l'autorité parentale
est exercée par l'adoptant ( C. civ., art. 358 et 365 ) à moins qu'il ne soit le conjoint du père ou de la mère de
l'adopté (V.  n° 16 ).

33)) IIm
mppo
ossssiib
biilliittéé d
d''eexxeerrcciiccee d
dee ll''aau
utto
orriittéé p
paarreen
nttaallee

2211.. –– H
Hyyp
pootth
hèèsseess –– L' article 1242, alinéa 4 du Code civil est inapplicable quand aucun des parents n'est investi
de l'autorité parentale, ce qui recouvre les hypothèses suivantes :

• les parents sont hors d'état de manifester leur volonté ( C. civ., art. 373 ) ;

• la filiation n'est établie à l'égard d'aucun des parents biologiques ;

• l'autorité parentale a été retirée aux parents condamnés par une disposition expresse du jugement pénal,
soit comme auteurs, coauteurs ou complices d'un crime ou délit commis sur la personne de leur enfant,
soit comme coauteurs ou complices d'un crime ou délit commis par leur enfant ( C. civ., art. 378 ) ;

• un jugement a prononcé une délégation de l'autorité parentale ( C. civ., art. 377  s.).

2222.. –– C
Caass p
paarrttiiccu
ulliieerr d
duu rreettrraaiitt oou
uddee llaa d
dééllééggaattiioon
nppaarrttiieellllee d
dee ll''aau
uttoorriittéé –– En cas de retrait ou de
délégation partielle de l'autorité parentale, l' article 1242, alinéa 4 du Code civil doit-il s'appliquer afin de garantir
à la victime son droit à réparation ?

Si une réponse affirmative est à première vue séduisante du point de vue de l'indemnisation, elle se heurte à la
conception jurisprudentielle actuelle suivant laquelle une décision judiciaire prononçant une délégation ou un
retrait d'autorité parentale fait cesser la cohabitation (V.  n° 32 ). Dans ces conditions, on peut penser que la
condition de cohabitation faisant défaut, il y a là un obstacle à l'application de l' article 1242, alinéa 4 du Code civil
. En d'autres termes, si l'autorité parentale est la condition sine qua non de la responsabilité parentale, encore
faut-il établir que l'enfant cohabitait avec ses parents au moment du dommage pour qu'ils puissent être tenus à
réparation.

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33°° LLaa c o
ohhaab
biittaattiio
onn

2233.. –– Si la cohabitation demeure toujours une exigence légale ((aa)) elle n'en constitue pas moins une réalité
jurisprudentielle douteuse ((b b)) depuis qu'une interprétation de plus en plus abstraite l'a vidée de sa substance.

aa)) U
Unnee eexxiiggeen
nccee llééggaallee

2244.. –– Fidèle à sa version de 1804, l' article 1242, alinéa 4 du Code civil dispose que les parents répondent des
dommages causés par leurs enfants mineurs “habitant avec eux”. Tant que le système reposait sur une
présomption de faute d'éducation et de surveillance, une telle exigence de cohabitation se justifiait car elle
permettait de veiller à ce que les parents aient leurs enfants “à portée d'autorité” (selon le mot de De Greuille,
Rapport au Tribunat in Recueil complet des travaux préparatoires du Code civil Fenet, p. 475). Mais les fameux
arrêts Bertrand ( Cass. 2e civ., 19 févr. 1997, n° 94-21.111 , préc. n° 7) et Samda ( Cass. 2e civ., 19 févr. 1997,
n° 93-14.646  : JurisData n° 1997-000768  ; JCP G 1997, IV, 834  ; Bull. civ. II, n° 55  ; RTD civ. 1997, p. 670 , obs.
P. Jourdain ; Dr. famille 1997, comm. 97 , obs. P. Murat. – V. aussi à propos de cet arrêt, Galliou-Scanvion, Une
responsabilité civile enfin trouvable ou les voies de l'indemnisation des victimes d'enfants de parents divorcés :
Gaz. Pal. 1997, 1, doctr. p. 658  s. – Y. Dagorne-Labbe : La condition de cohabitation du mineur est-elle compatible
avec la responsabilité de plein droit de ses parents. – Cass. 2e civ., 19 févr. 1997  : LPA 1997, p. 12 ) en
transformant respectivement la responsabilité parentale en responsabilité de plein droit et en consacrant une
conception juridique de la cohabitation ont renouvelé les termes du débat. En particulier, depuis que la
responsabilité parentale est devenue une responsabilité de plein droit et que les parents ne peuvent plus
s'exonérer en prouvant leur absence de faute de surveillance et d'éducation, la cohabitation ne vient plus
renforcer la présomption de faute. C'est la raison pour laquelle on pouvait s'attendre à ce que la loi du 4 mars
2002 supprime purement et simplement cette condition, conformément aux vœux d'une partie de la doctrine (en
ce sens, V. p. ex. G. Viney et P. Jourdain, préc. n° 13, spéc. n° 876). Tel n'a pas été le cas et on peut le regretter. En
effet, la responsabilité parentale s'appuie aujourd'hui sur un système bancal dans la mesure où le juge s'attache à
neutraliser cette condition pourtant exigée par le législateur à partir d'une conception de la cohabitation qui n'en
a plus que le nom.

b
b)) U
Unnee ré aalliittéé jju
urriissp
prru
uddeen
nttiieellllee d
doou
utteeu
ussee

11)) ÉÉvvo
ollu
uttiio
onnd
dee llaa n
noottiio
onnd
dee cco
ohhaab
biittaattiio
onn

2255.. –– LLee d
doou
ubbllee vviissaaggee d
dee llaa ccooh
haab
biittaattiioon
n –– La cohabitation est susceptible de deux interprétations. Elle peut
être appréhendée de manière concrète comme le fait d'habiter avec le mineur au moment du dommage ou, de
manière abstraite, comme le fait de demeurer généralement avec l'enfant.

Si, à l'origine, la Cour de cassation a montré sa préférence pour une approche concrète, certaines décisions
paraissaient dans le même temps favorables à une conception plus abstraite fondée sur la résidence habituelle
de l'enfant.

2266.. –– D
Dee llaa ccoon
ncceep
pttiioon
n ccoon
nccrrèèttee àà llaa ccoon
ncceep
pttiioon
n aab
bssttrraaiittee d
dee llaa ccooh
haab
biittaattiioon
n –– Jusqu'à l'arrêt Samda du
19 février 1997 ( Cass. 2e civ., 19 févr. 1997, n° 93-14.646 , préc. n° 24) une conception concrète de la cohabitation
dominait. Dans cette perspective, l'enfant était réputé ne pas habiter avec ses parents, au sens de l' article 1242,
alinéa 4 du Code civil , toutes les fois que ces derniers n'étaient pas en mesure d'exercer leur mission d'éducation
et de surveillance. Toute action à leur encontre était ainsi impossible lorsque l'enfant, échappant à leur
surveillance immédiate, était confié, fût-ce temporairement et à titre bénévole, à un tiers. La responsabilité
parentale était ainsi évincée systématiquement, que l'enfant ait été confié à ses grands-parents ( Cass. 2e civ.,
24 avr. 1989, n° 88-10.735  : JurisData n° 1989-001516  ; Bull. civ. II, n° 99  ; Resp. civ. et assur. 1989, comm. 215  ;
D. 1990, jurispr. p. 519, note Y. Dagorne-Labbe. – Adde H. Groutel, La cohabitation, condition de la responsabilité
des parents du fait de leurs enfants mineurs : Resp. civ. et assur. 1989, chron. 17 ), qu'il fût placé en pension (
Cass. 1re civ., 2 juill. 1991, n° 90-12.062  : JurisData n° 1991-001823  ; Bull. civ. I, n° 224  ; RTD civ. 1991, p. 759 ,
obs. P. Jourdain) ou encore qu'il fût hébergé par son parent divorcé non gardien ( Cass. crim., 13 déc. 1982  : Bull.
crim. p. 758 ; RTD civ. 1983, p. 539 , obs. G. Durry. – Cass. 2e civ., 25 janv. 1995, n° 92-18.802 , préc. n° 13).

2277.. –– H
Hééssiittaattiioon
nss –– La ligne jurisprudentielle suivie par la Cour de cassation n'était pourtant pas parfaitement
nette dans la mesure où certaines décisions, anticipant sur une conception plus juridique de la cohabitation, se
référaient implicitement à la communauté habituelle de résidence. Dans ces conditions, certains arrêts ont pu

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écarter la responsabilité parentale lorsque l'enfant était placé en internat ( Cass. soc., 15 juin 1972  : Bull. civ. V,
n° 442  ; RTD civ. 1973, p. 347 , obs. G. Durry. – Cass. 2e civ., 2 juill. 1991 , préc. n° 26. – Cass. crim., 27 nov. 1991  :
Bull. crim. n° 443  ; Resp. civ. et assur. 1992, comm. 124 ) ou confié pour une longue durée aux grands-parents en
raison de la défaillance de ses parents ( Cass. 2e civ., 9 déc. 1954  : Bull. civ. II, n° 410 . – Cass. 2e civ., 25 janv. 1995,
n° 92-18.802 , préc. n° 13). La même solution a prévalu lorsque le mineur était mobilisé ( Cass. civ., 4 juill. 1951  :
D. 1951, jurispr. p. 587) ou qu'il habitait dans un logement indépendant de ses parents pour poursuivre ses
études ( T. civ. Clermont-Ferrand, 20 avr. 1950  : Gaz. Pal. 1950, 1, p. 336 ). Dans ces différents cas de figure,
l'absence de cohabitation résultait de l'absence de résidence habituelle du mineur au domicile de ses parents.

Réciproquement, mais suivant une logique identique, une séparation temporaire ne suffisait pas à faire cesser la
cohabitation et permettait d'engager la responsabilité des parents du fait de leurs enfants. C'était le cas, en
particulier, de la séparation de courte durée ( Cass. crim., 11 oct. 1972  : D. 1973, jurispr. p. 75, note J. L. – Cass.
crim., 18 juin 1975  : JCP G 1975, IV, p. 259 . – Cass. 2e civ., 8 juill. 1970  : Bull. civ. II, n° 242  ; RTD civ. 1971, p. 381 ,
obs. G. Durry).

2288.. –– C
Ceessssaattiioon
n iillllééggiittiim
mee d
dee llaa ccooh
haab
biittaattiioon
n –– Embarrassante, la condition de cohabitation l'était d'autant
plus lorsqu'un parent quittait le logement familial ou que l'enfant le désertait pour fuguer faisant, de fait, cesser la
cohabitation. La responsabilité des parents devait-elle, en pareil cas, être systématiquement écartée alors même
que la cessation de la cohabitation pouvait leur être imputée à faute ?

Pour répondre à cette difficulté, la Cour de cassation a très rapidement développé la notion de cessation
illégitime de la cohabitation pour refuser aux parents de s'exonérer de leur responsabilité en invoquant
l'éloignement de l'enfant (sur cette question, V. p. ex. R. Legeais, La responsabilité civile introuvable, in Mél. Marty,
préc. n° 13, spéc. p. 783). C'est pourquoi le juge a pu admettre l'application de l'article 1384, alinéa 4 (devenu
1242, alinéa 4) du Code civil lorsqu'un parent quitte le foyer ( Cass. crim., 24 juill. 1952  : S. 1953, 1, p. 69, note
E. Blanc) ou abandonne son enfant ( CA Paris, 26 nov. 1960  : D. 1961, jurispr. p. 227) et, plus généralement, en cas
de séparation de fait ( Cass. 2e civ., 4 déc. 1963  : D. 1964, jurispr. p. 159, note J. Voirin. – Cass. crim., 28 juin 1966  :
D. 1966, somm. p. 117. – Cass. crim., 26 juill. 1972  : Bull. crim. n° 258  ; RTD civ. 1973, p. 347 , obs. G. Durry. –
Comp. Cass. crim., 21 août 1996  : Bull. crim. n° 309  ; D. 1996, IR p. 235 ; JCP G 1997, IV, n° 67  : l'un des parents ne
peut se prévaloir de la séparation de fait pour échapper à sa responsabilité que s'il démontre que celle-ci est
fondée sur un accord amiable entre les époux ou que la résidence séparée avait été autorisée judiciairement).

2299.. –– A
Avvèèn
neem
meen
ntt d
d''u
unnee ccoon
ncceep
pttiioon
n aab
bssttrraaiittee d
dee llaa ccooh
haab
biittaattiioon
n –– C'est dans ce contexte que sont
intervenus les arrêts Bertrand (préc. n° 7) et Samda (préc. n° 24) qui, transformant la responsabilité parentale en
responsabilité de plein droit et consacrant la cohabitation juridique, emportent des conséquences non
négligeables.

22)) C
Coon
nssééq
quueen
ncceess d
dee llaa c o
onncceep
pttiio
onn j u r iid
diiq
quuee d
dee llaa cco
ohhaab
biittaattiio
onn

3300.. –– A
Appp
prréécciiaattiioon
n ssoou
uvveerraaiin
nee d
duu jju
uggee –– En l'absence de réforme législative, la tâche est revenue au juge de
neutraliser la condition de cohabitation. Pour ce faire, il a poursuivi dans la voie ouverte précédemment
consistant à distinguer suivant que la cause de la cessation de la cohabitation était légitime ou non tout en
consacrant, en outre, une conception de plus en plus désincarnée de la cohabitation.

Sur le premier point, la Cour de cassation n'a pas manqué, même après 1997, de se référer au caractère illégitime
de la cessation de la cohabitation pour justifier l'application de l'article 1384, alinéa 4 (devenu 1242, alinéa 4) du
Code civil. Ainsi par un arrêt de la chambre criminelle du 28 juin 2000 ( Cass. crim., 28 juin 2000, n° 99-84.627  :
JurisData n° 2000-003150  ; Bull. crim. n° 256 ), la Haute Juridiction a retenu la responsabilité d'un père de famille
pour les crimes commis par sa fille de 16 ans dont il avait la garde alors qu'elle résidait depuis 1 an chez son
amant (V. aussi Cass. crim., 7 mars 2001, n° 00-84.168  : JurisData n° 2001-009155 ). Signe de la pénétration de
cette règle jurisprudentielle en droit français, un important arrêt du 8 février 2005 ( Cass. crim., 8 févr. 2005,
n° 03-87.447  : JurisData n° 2005-027416  ; Bull. crim. n° 44  ; Resp. civ. et assur. 2005, comm. 118 , note
H. Groutel ; JCP G 2005, II, 10049 , note M.-F. Steinlé-Feuerbach ; JCP G 2005, I, 149 , obs. G. Viney ; RJPF 2005, p. 20
, note F. Chabas ; LPA 24 juin 2005, p. 14 , note D. Bertol) rappelle que « les père et mère d'un enfant mineur dont
la cohabitation avec celui-ci n'a pas cessé pour une cause légitime ne peuvent être exonérés de la responsabilité
de plein droit pesant sur eux que par la force majeure ou la faute de la victime ».

Sur le second point, le plus notable, la conception concrète de la cohabitation a cédé la place à une conception
juridique. En effet, si la cohabitation demeure une condition légale de la responsabilité parentale, elle se résume
désormais à la résidence habituelle de l'enfant au domicile de ses parents ou de l'un d'eux et, plus exactement, à

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la détermination légale ou judiciaire de la résidence de l'enfant. En effet, lorsque l'enfant est confié à un tiers, en
l'absence d'une décision de justice, la responsabilité parentale subsiste (très nettement en ce sens : Cass. 2e civ.,
20 janv. 2000, n° 98-14.479  : JurisData n° 2000-000196  ; Bull. civ. II, n° 14  ; Resp. civ. et assur. 2000, comm. 146 ,
note H. Groutel ; JCP G 2000, II, 10374 , note A. Gouttenoire-Cornut ; D. 2000, somm. p. 469, obs. D. Mazeaud ; RTD
civ. 2000, p. 340 , obs. P. Jourdain ; Dr. & patr. avr. 2000, p. 107, note F. Chabas ; LPA 4 juill. 2000, p. 10 , note A.-M.
L. – Cass. 2e civ., 5 juill. 2001, n° 99-12.428 , inédit. – Cass. 2e civ., 5 févr. 2004, n° 01-03.585 et 02-15.383 , préc.
n° 13. – Cass. crim., 29 oct. 2002, n° 01-82.109  : JurisData n° 2002-016445  ; Bull. crim. n° 197  ; Resp. civ. et assur.
2003, comm. 29  ; JCP G 2003, I, 152 , obs. G. Viney ; RTD civ. 2003, p. 101 , obs. P. Jourdain ; D. 2003, p. 2112, note
L. Mauger-Vielpeau). Dans ces conditions, l'autorité parentale croît au détriment de cette cohabitation
désincarnée pour devenir la condition unique de la responsabilité. En effet, puisque la cohabitation s'entend
désormais comme la résidence légale de l'enfant, elle fait corps avec l'autorité parentale, elle en devient un
attribut (F. Chabas, Cent ans d'application de l'article 1384 in La responsabilité civile à l'aube du XXIe siècle – Bilan
prospectif : Resp. civ. et assur. 2001, hors-série, n° 32, p. 43 ). De là à supprimer l'exigence de cohabitation, il n'y a
qu'un pas que l'avant-projet Catala n'a pas hésité à franchir (V. art. 1356 de l'avant-projet. – Pour une critique de
cette solution, V. Ph. Le Tourneau : RDC 2007, p. 109  s., spéc. I. A. – Comp. H. Bosse-Platière : JCP G 2002, I, n° 11 ,
165 ; Dr. famille, obs. ss Cass. 2e civ., 20 janv. 2000, n° 98-14.479 , préc. n° 30). La solution a ensuite été reprise
dans les différents avant-projets et projet de réforme qui se sont succédé jusqu'au dernier du 13 mars 2017 qui a
pris le parti de supprimer cette exigence de cohabitation.

3311.. –– En l'état actuel du droit positif, l'ultime étape du processus de dématérialisation de la cohabitation est le
fruit de l'arrêt précité du 8 février 2005. En l'espèce, un mineur de 13 ans demeurant avec sa grand-mère et son
mari depuis l'âge d'un an a provoqué un incendie. La cour d'appel avait déclaré ces derniers responsables sur le
fondement de l'article 1384 (devenu C. civ., art. 1242, al. 1er ), alinéa 1er du Code civil après avoir caractérisé leurs
pouvoirs d'organiser et de contrôler le mode de vie du mineur avec l'accord des parents. L'arrêt est censuré par la
Cour de cassation aux motifs « qu'en statuant ainsi, alors que la circonstance que le mineur avait été confié, par
ses parents, qui exerçaient l'autorité parentale, à sa grand-mère, n'avait pas fait cesser la cohabitation de l'enfant
avec ceux-ci, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé [ C. civ., art. 1384, al. 4 ] ». C'est dire
que l'exigence de cohabitation est satisfaite même si l'enfant n'a jamais réellement vécu avec ses parents.

3322.. –– IIm
mppoorrttaan
nccee d
dee llaa d
déécciissiioon
nddee jju
ussttiiccee –– L'examen de la jurisprudence montre que l'existence d'une
décision de justice est au cœur du dispositif. Il apparaît en effet que seule une décision de justice soit à même de
faire cesser la cohabitation, un simple accord ou un contrat étant insuffisants. La deuxième chambre civile ( Cass.
2e civ., 6 juin 2002, n° 00-19.694, 00-19.694 et 00-19.922  : Bull. civ. II, n° 120 (arrêt n° 3) : JurisData
n° 2002-014563  ; Resp. civ. et assur. 2002, comm. 283  ; JCP G 2003, II, 10068 , note A. Gouttenoire-Cornut et
N. Roget ; RTD civ. 2002, p. 825 , obs. P. Jourdain ; RJPF 2002, p. 20 , note Chabas ; LPA 9 juill. 2003, p. 21 , note
N. Roxand-Pourias ; ibid., 16 janv. 2003, p. 16, note J.-B. Laydu. – Cass. 2e civ., 7 mai 2003, n° 01-15.607 et
01-15.923  : JurisData n° 2003-018962  ; Bull. civ. II, n° 129  ; D. 2003, p. 2256, note M. Huyette ; RJPF 2003, p. 23 ,
note F. Chabas. – Cass. 2e civ., 7 oct. 2004, n° 03-16.078  : JurisData n° 2004-025077  ; Bull. civ. II, n° 453  ; Resp. civ.
et assur. 2005, étude 4 , E. Leverbe ; JCP G 2005, I, 132 , obs. G. Viney ; D. 2005, p. 819, note M. Huyette. – Pour une
confirmation, V.  Cass. crim., 8 janv. 2008, n° 07-81.725  : JurisData n° 2008-042505  ; Resp. civ. et assur. 2008,
comm. 88 , note H. Groutel ; Lexbase Hebdo – Édition privée générale – Édition Affaires, 7 févr. 2008, n° 291, note
D. Bakouche ; RLDC 2008, p. 21, obs. Cl. Kleitz-Bachelet) et la chambre criminelle ( Cass. crim., 26 mars 1997  : Bull.
crim. n° 124  ; JCP G 1997, I, 4070 , obs. G. Viney ; Resp. civ. et assur. 1997, comm. 292 , obs. H. Groutel. – Cass.
crim., 15 juin 2000, n° 99-85.240  : JurisData n° 2000-003131  ; Bull. crim. n° 233  ; JCP G 2000, I, 280 , spéc. n° 15,
obs. G. Viney) admettent ainsi d'une même voix que l'interruption de la cohabitation peut résulter d'une décision
de placement de l'enfant au titre de l'assistance éducative ou de la liberté surveillée. En pareil cas, la
responsabilité parentale s'efface au bénéfice de la responsabilité du fait d'autrui fondée sur l' article 1242,
alinéa 1er du Code civil si ses conditions de mise en œuvre sont réunies, y compris lorsque les parents
hébergeaient l'enfant (V. par ex. : Cass. crim., 8 janv. 2008, n° 07-81.725 , préc.). La cessation de la cohabitation
peut également résulter d'un divorce ou d'une séparation de corps ( C. civ., art. 373-4 ). Cette situation évoque le
cas d'un parent titulaire de l'autorité parentale mais néanmoins jugé irresponsable sur le fondement de l'
article 1242, alinéa 4 du Code civil lorsque la résidence habituelle a été fixée chez l'autre parent (pour une
application, V.  Cass. 2e civ., 21 déc. 2006, n° 05-17.540  : JurisData n° 2006-036702  ; Resp. civ. et assur. 2007,
comm. 82 , note H. Groutel). Il s'agissait en l'espèce d'un père qui exerçait l'autorité parentale avec la mère mais
qui ne résidait pas avec l'enfant en vertu d'une décision du juge aux affaires familiales rendue au titre des
mesures provisoires dans la procédure de divorce. Comme le souligne Monsieur le Professeur Groutel, en pareil
cas, le père se trouvait mutatis mutandis, dans la même situation que des parents dont l'enfant mineur a été
confié à un établissement par une décision sur l'assistance éducative, laquelle fait cesser la cohabitation. En
outre, le dommage n'ayant pas été causé au cours d'une visite chez le père, seule la mère remplissait toutes les

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conditions de l'article 1242, alinéa 4 du Code du civil.

Réciproquement, l' article 1242, alinéa 4 du Code civil s'applique à la mère, même pour le cas où le dommage a
été causé pendant que le père exerçait son droit de visite et d'hébergement ( CA Limoges, ch. civ., 1re sect., 5 août
2003, n° 00/01371  : JurisData n° 2003-227605  ; Resp. civ. et assur. 2004, comm. 59 , note Ch. Radé).

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– La question de l'incidence de la séparation parentale sur la cohabitation et, partant, sur les responsabilités
encourues, est fréquemment abordée par la doctrine depuis quelques années (V. not. : G. Hilger, La
responsabilité des parents du fait de leur enfant mineur sous l'angle de la résidence alternée : A J fam. 2018,
p. 278 . – G. Hubert-Dias, Responsabilité solidaire des père et mère divorcés, résidence habituelle et condition de
cohabitation dans la jurisprudence de la Cour de cassation : RRJ 2015/3, p. 1077 et s. – I. Corpart, Quel avenir pour
l'alternance des résidences des enfants de parents séparés : Dr. famille 2014, étude 19 . – L. Bloch, Résidence
alternée de l'enfant : responsabilités solidaires des parents ? : Resp. civ. et assur. 2013, focus 35. – P. Reynaud,
Responsabilité des père et mère et résidence alternée : RJF 2002, p. 132 ) afin de systématiser, autant que faire se
peut, les solutions dégagées en jurisprudence (V. not. : N. Blanc, Le retour de la cohabitation... épisode 2, note ss
Cass. crim., 29 avr. 2014, n° 13-84.207  : JurisData n° 2014-008605  ; Gaz. Pal. 10 juill. 2014, n° 190-191, p. 16-17 . –
M. Mekki, La cohabitation : sortez-la par la porte, elle rentrera par la fenêtre !, note ss Cass. crim., 6 nov. 2012,
n° 11-86.857  : JurisData n° 2012-024917  ; Gaz. Pal. 13 févr. 2013, n° 44-45, p. 21-23 . – S. Moracchini-Zeidenberg,
Responsabilité du parent : l'impasse devant le juge répressif en l'absence de cohabitation : Resp. civ. et assur.
2014, étude 6 . – P. Oudot, La cohabitation déresponsabilisante : Gaz. Pal. 2014, jur., p. 5 et s. – L. Perdrix,
Coparentalité et responsabilité du fait du mineur : l'embarrassant critère de la cohabitation : D. 2014, p. 1620 et s.
– A.-Cl. Réglier, Responsabilité des parents : le désinvestissement parental versus la cohabitation : RLDC 2014,
n° 121, p. 68-72).

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ntt. – L'examen de la jurisprudence montre que la séparation
des parents a des conséquences variables sur la cohabitation selon qu'une décision judiciaire ou un accord
amiable est intervenu. Ainsi, dans l'hypothèse d'une séparation de fait, la résidence habituelle du mineur n'ayant
pas été fixée par le juge, la condition de cohabitation est satisfaite à l'égard des deux parents puisqu'ils
conservent le droit de résider habituellement avec l'enfant ( Cass. crim., 21 août 1996, n° 95-84.102  : JurisData
n° 1996-003711  ; Bull. crim. n° 309 ). La même solution doit prévaloir lorsque la résidence de l'enfant est fixée en
alternance au domicile des père et mère ( C. civ., art. 373-2-9 ) puisque tous deux ont un droit de résidence
habituelle avec leur enfant (comp. pour un droit de visite et d'hébergement libre après divorce par consentement
mutuel : CA Nîmes, ch. corr., 20 juin 2006, n° 06/00673  : JurisData n° 2006-319526 ). L'évolution du droit de la
famille vers une plus grande égalité des parents a conduit à la progression de la résidence alternée depuis près
de 20 ans (V. Infostat justice n° 132, Les décisions des juges concernant les enfants de parents séparés ont
fortement évolué dans les années 2000, janv. 2015 ; Infostat justice n° 139, Le regard des divorcés sur la résidence
de leurs enfants, déc. 2015 cité par G. Hilger, préc.) afin de permettre à l'enfant de conserver des liens équilibrés
avec ses père et mère. Cette évolution qui trouve un écho dans diverses propositions législatives ( Prop. de loi
n° 1531 visant à privilégier la résidence alternée pour l'enfant dont les parents sont séparés, 18 mars 2009, Doc.
AN, XIIIe législature. – Prop. de loi n° 3834 visant à préserver l'autorité partagée et à privilégier la résidence
alternée pour l'enfant en cas de séparation des parents, 18 oct. 2011, Doc. AN, XIIIe législature. – Prop. de loi
n° 309 visant à préserver l'autorité partagée et à privilégier la résidence alternée pour l'enfant en cas de
séparation des parents, 24 oct. 2012, Doc. AN, XIVe législature. – Prop. de loi n° 1369 visant à promouvoir la
résidence alternée, le recours aux dispositifs de médiation et l'équitable implication des parents dans
l'accompagnement et la prise en charge de leur enfant en cas de divorce ou de séparation, 18 sept. 2013, Doc.
AN, XIVe législature – Prop. de loi n° 307 relative au principe de garde alternée des enfants, 17 oct. 2017, Doc. AN,
XVe législature) doit être évaluée à l'aune de la responsabilité des parents du fait de leur enfant mineur. En
pareille occurrence il apparaît que les parents sont responsables solidairement sur le fondement de l'
article 1242, alinéa 4 du Code civil (sur le détail de cette question, V. P. Reynaud, Responsabilité des père et mère
et résidence alternée : RJF 2002, p. 132 . – G. Hilger, La responsabilité des parents du fait de leur enfant mineur
sous l'angle de la résidence alternée, préc. n° 33 – L. Bloch, Résidence alternée de l'enfant : responsabilités
solidaires des parents ?, préc. n° 33 – I. Corpart, Quel avenir pour l'alternance des résidences des enfants de
parents séparés, préc. n° 33) et ce, même si l'alternance aboutit à un partage inégal du temps de présence de
l'enfant auprès de chacun de ses parents ( Cass. 1re civ., 25 avr. 2007, n° 06-16.886  : JurisData n° 2007-038492  ;
Bull. civ. I, n° 156  ; A J fam. 2007, p. 276 , obs. F. C. ; D. 2007, p. 1428 ; ibid. 2008, p. 1371, obs. F. Granet-
Lambrechts : RTD civ. 2007, p. 560 , obs. J. Hauser).

Si l'on considère que la contribution des parents repose sur la solidarité familiale, un partage égal devrait

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prévaloir systématiquement indépendamment de l'examen des fautes éventuellement commises par les parents
(sur cette question, V. G. Viney, P. Jourdain et S. Carval, Traité de droit civil, (ss dir.) J. Ghestin, Les conditions de la
responsabilité, préc. n° 13, spéc. n° 888). Cette analyse est conforme à la proposition de loi n° 307 déposée le
17 octobre 2017 à l'Assemblée nationale ( Prop. de loi n° 307 , préc.) qui prévoit que la double résidence de
l'enfant au domicile de chaque parent implique leur égale responsabilité (V. Bru, Rapp. n° 416 fait au nom de la
commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République sur la
proposition de loi n° 307 relative au principe de garde alternée des enfants, Doc. AN, XVe législature). Mais pour
que cette responsabilité automatique puisse opérer de manière satisfaisante, encore faudrait-il que les parents
soient couverts par une assurance de responsabilité, ce qui invite à réfléchir sur l'opportunité d'une couverture
assurantielle obligatoire qui pourrait prendre la forme d'une assurance de responsabilité civile chef de famille (A.
Gouttenoire-Cornut, préc. n° 16. – Ph. Brun, préc. n° 1. – C. Siffrein-Blanc, préc. n° 4. – G. Viney, P. Jourdain,
S. Carval, préc., spéc. n° 892. – Y. Lequette, F. Terré, P. Simler et F. Chénedé, Droit civil, préc. n° 12, spéc. n° 1048. –
P. Le Tourneau [dir.], Droit de la responsabilité et des contrats, Régimes d'indemnisation : Dalloz action, 11e éd.,
2018-2019, n° 2233.14. – A. Bénabent, préc. n° 7, spéc. n° 561. – Comp. l'avant-projet de réforme du droit belge
portant insertion des dispositions relatives à la responsabilité extracontractuelle dans le Code civil, 6 août 2018,
V. art. 5.156 nouveau : « Les parents, adoptants, tuteurs et accueillants familiaux, qui disposent de l'autorité sur la
personne d'un mineur, sont responsables du dommage pour lequel ce dernier doit lui-même répondre ou devrait
répondre s'il avait plus de douze ans. IIll eesstt tteen
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À rebours de la tendance favorable à une éradication complète de la condition de cohabitation, une partie de la
doctrine a proposé de la réintroduire au stade de la contribution à dette, dans sa conception matérielle, partant
de l'idée que le parent, qui n'a pas le mineur avec lui lors du fait dommageable, doit pouvoir introduire un recours
contre l'autre, notamment sur le fondement d'une faute qu'il aurait commise dans le cadre de son pouvoir de
surveillance quotidien de l'enfant (en ce sens, V. P. Reynaud, préc. – L. Bloch, préc. – V. aussi, G. Hilger, préc. – Pour
une illustration jurisprudentielle, V.  CA Chambéry, 6 oct. 2016, n° 15/01981 ).

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ntt. – La situation est tout à fait différente lorsque
la résidence habituelle de l'enfant a été fixée chez l'un des deux parents sur la base d'un accord homologué par le
juge aux affaires familiales ( C. civ., art. 373-2-7 ) ou à la suite d'une décision de justice ( C. civ., art. 373-2-9, al. 2 ).
Dans ce cas, la condition de cohabitation ne sera remplie qu'à l'égard de celui-ci ( Cass. 2e civ., 21 déc. 2006,
n° 05-17.540 , préc. n° 32). Réciproquement, la condition de cohabitation ne sera pas satisfaite à l'égard du parent
séparé exerçant conjointement l'autorité parentale mais chez qui le juge n'a pas fixé la résidence habituelle de
l'enfant et cela, même dans l'hypothèse où le fait dommageable se produit pendant l'exercice du droit de visite et
d'hébergement comme le décide de longue date la jurisprudence (V.  Cass. crim., 2 déc. 2014, n° 13-85.727  :
JurisData n° 2014-029496  ; Resp. civ. et assur. 2015, comm. 76 , par H. Groutel ; Dr. famille 2015, comm. 64 , note
S. Rouxel. – Cass. crim., 29 avr. 2014, n° 13-84.207  : JurisData n° 2014-008605  ; Bull. crim. n° 116  ; A J fam. 2014,
p. 370 , obs. A. Zelcevic-Duhamel ; D. 2014, p. 1620, note L. Perdrix ; ibid. 2015, p. 124, obs. P. Brun et O. Gout ;
RTD civ. 2014, p. 639 , obs. J. Hauser. – Cass. crim., 6 nov. 2012, n° 11-86.857  : JurisData n° 2012-024917  ; Bull.
crim. n° 241  ; A J fam. 2012, p. 613 , obs. F. Chénedé ; D. 2012, p. 2658, obs. I. Gallmeister ; RTD civ. 2013, p. 106 ,
obs. J. Hauser. – Cass. 2e civ., 20 janv. 2000, n° 98-14.479 , préc. n° 30. – Cass. 2e civ., 19 févr. 1997 , arrêt Samda,
préc. n° 24). Il en résulte que la responsabilité du parent ne pourra être recherchée que sur le fondement de l'
article 1240 du Code civil , et seulement devant le juge civil ( Cass. crim., 7 nov. 1990, n° 90-80.828  : JurisData
n° 1990-703127  ; Bull. crim. n° 370 ) puisque, devant le juge pénal, seul le prévenu ou l'accusé peut être
condamné à réparation civile en raison de sa faute personnelle ( Cass. crim., 21 juin 1990, n° 89-82.965  : JurisData
n° 1990-702065  ; Bull. crim. n° 256 . – Cass. crim., 29 avr. 2014 , préc.).

En dépit des vicissitudes jurisprudentielles précédemment décrites, la cohabitation reste encore exigée par les
juges (sur cette question, V. par ex. S. Moracchini-Zeidenberg, Responsabilité du parent : l'impasse devant le juge
répressif en l'absence de cohabitation : Resp. civ. et assur. 2014, étude 6 ) en raison de son « assise légale » (J.-B.
Laydu, Totale abstraction (Réflexions autour d'un arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du
29 mars 2001)  : LPA 8 nov. 2001, n° 223, p. 12 ). Toutefois, la conception évanescente qui prévaut aujourd'hui doit
logiquement aboutir à sa suppression si le projet de réforme de la responsabilité reçoit l'onction législative.

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3344.. –– Tirant les conséquences de l'évolution jurisprudentielle, le projet de réforme de la responsabilité civile du
13 mars 2017 abandonne purement et simplement la condition de cohabitation au bénéfice du seul droit
d'exercer l'autorité parentale (art. 1246 : “sont responsables de plein droit du fait du mineur : – ses parents, en

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tant qu'ils exercent l'autorité parentale […]”).

Cette proposition mérite d'être doublement approuvée. D'abord elle s'impose en raison de la mutation de la
responsabilité parentale, fondée à l'origine sur une faute de surveillance et d'éducation des parents, en système
de responsabilité de plein droit déconnecté du comportement parental. Ensuite, dans la mesure où la
cohabitation constitue une source de complication lorsque les parents de l'enfant auteur du dommage sont
séparés, sa suppression est de nature à simplifier la mise en œuvre de cette responsabilité du fait d'autrui. Il
convient à cet égard de souligner que l'avant-projet de réforme crée, en outre, un régime unique de
responsabilité de plein droit du fait des mineurs incluant les parents et toute personne physique ou morale
chargée, par décision judiciaire ou administrative, d'organiser et contrôler à titre permanent le mode de vie du
mineur (Projet de réforme de la responsabilité civile, 13 mars 2017, art. 1246 : outre les parents, « sont
responsables de plein droit du fait du mineur :

  son ou ses tuteurs, en tant qu'ils sont chargés de la personne du mineur ;

  la personne physique ou morale chargée par décision judiciaire ou administrative, d'organiser et contrôler
à titre permanent le mode de vie du mineur. Dans cette hypothèse, la responsabilité des parents de ce
mineur ne peut être engagée »).

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3355.. –– Si les conditions relatives à l'enfant pour engager la responsabilité de ses parents sont les mêmes depuis
1804, qu'il s'agisse de la minorité ((11°°)) ou de l'exigence d'un fait dommageable de l'enfant ((22°°)), seule cette dernière
condition est véritablement source de contentieux aujourd'hui.

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3366.. –– D
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ullaattiivveess –– L' article 1242, alinéa 4 du Code civil prévoit expressément que les père
et mère ne sont civilement responsables des dommages occasionnés par leurs enfants que dans la mesure où
ces derniers sont mineurs ((aa)) et non émancipés ((b b)).

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nttaallee –– La loi ne place l'enfant sous l'autorité de son
ou ses parents que jusqu'à sa majorité ou son émancipation. En vertu de l' article 371-1 du Code civil , l'enfant
reste sous l'autorité parentale jusqu'à l'âge de 18 ans mais il peut en être affranchi dès l'âge de 16 ans. La
responsabilité parentale ne peut alors être engagée au-delà de la majorité et ce, même si l'enfant est handicapé
et continue de cohabiter avec ses parents comme le rappelle un arrêt du 1er avril 1999 ( Cass. 2e civ., 1er avr.
1999, n° 97-18.048  : JurisData n° 1999-001436  ; RJPF 1999, p. 21 , note F. Chabas : « Mais attendu que, la
responsabilité de Mme X. n'ayant été recherchée qu'en qualité de civilement responsable de son fils majeur
handicapé sur le fondement de l'article 1384, (devenu C. civ., art. 1242 ), alinéa 4 du Code civil, c'est à raison que la
cour d'appel, après avoir énoncé à bon droit que les dispositions de cet article ne concernaient que les enfants
mineurs, a, sans violer l' article 12 du Nouveau Code de procédure civile , rejeté la demande »).

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3388.. –– Cette exigence découle directement du lien qui unit l'exercice de l'autorité à la responsabilité parentale :
dès que cesse cette autorité, la responsabilité parentale prend fin également. L’article 413-7 (créé par L.
n° 2007-308, 5 mars 2007, art. 1er  : JO 7 mars 2007, en vigueur le 1er janvier 2009, C. civ. art. 482 ancien ) prévoit
en effet que “Le mineur émancipé cesse d'être sous l'autorité de ses père et mère. Ceux-ci ne sont pas
responsables de plein droit, en leur seule qualité de père ou de mère, du dommage qu'il pourra causer à autrui
postérieurement à son émancipation”.

3399.. –– La qualité de mineur non émancipé s'apprécie au jour où le dommage est causé, peu important qu'au
jour de l'introduction de l'action en responsabilité par la victime, l'enfant soit devenu majeur ou émancipé ( Cass.
2e civ., 25 oct. 1989, n° 88-16.210  : JurisData n° 1989-003815  ; Bull. civ. II, n° 194  : « Vu l' article 1384, alinéa 4 du
Code civil  ; Attendu que pour mettre Mme Y. hors de cause en tant que civilement responsable l'arrêt se borne à
relever que son fils Olivier, auteur responsable, est devenu majeur ; Qu'en se déterminant ainsi alors que la
responsabilité civile des parents s'apprécie au jour de l'accident, la cour d'appel a violé le texte susvisé »).

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4400.. –– R
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nttss –– Puisque l' article 1242, alinéa 4 du Code civil est inapplicable si
l'enfant est majeur ou émancipé, est-il possible d'engager la responsabilité des pères et mères sur le fondement
des articles 1240 et 1241 du Code civil  ?

Cette faculté semble être implicitement ouverte à la victime puisqu'aux termes de son article 482 ( C. civ.,
art. 413-7 en vigueur au 1er janvier 2009), le Code civil prévoit que les parents “ne sont pas responsables de plein
droit, en leur seule qualité de père ou de mère, du dommage [que leur enfant] pourra causer à autrui
postérieurement à son émancipation”. Autrement dit, rien n'empêche de rechercher leur responsabilité pour
faute. À la réflexion, l'entreprise se heurte à un écueil de taille. Puisqu'en effet les parents sont libérés, du fait de
la majorité ou de l'émancipation de leur enfant, de tout devoir de surveillance et d'éducation, on voit mal où
pourrait résider cette faute. Pourtant, une telle responsabilité peut être mise en œuvre lorsque les parents ont
commis une imprudence ayant favorisé la survenance du dommage. C'est le cas, par exemple, de l'enfant majeur
ou émancipé qui, en raison d'une maladie physique et/ou mentale, représentait un risque pour les tiers qui aurait
dû inciter les parents à exercer une surveillance particulière ( Cass. 2e civ., 8 nov. 1976, n° 75-11.776  : D. 1977, IR
p. 67).

On pourrait encore songer à engager la responsabilité pour faute des parents dans la décision d'émancipation
qui pourrait répondre à la volonté d'échapper à leurs obligations parentales. Là encore, la fenêtre est étroite dans
la mesure où il appartient au juge des tutelles de se prononcer sur l'émancipation. Il ne la prononcera que dans
l'hypothèse où il a vérifié l'existence de justes motifs conformément à l' article 477, alinéa 2 du Code civil ( C. civ.,
art. 413-2 en vigueur au 1er janvier 2009).

22°° FFaaiitt d
doom
mmmaaggeeaab
bllee d
dee ll''een ffaan
ntt m
miin
neeu
urr

4411.. –– L' article 1242, alinéa 4 du Code civil subordonne la mise en œuvre de la responsabilité des père et mère à
l'existence d'un dommage causé par leur enfant mineur cependant que l'alinéa 7 se borne à viser “le fait donnant
lieu à cette responsabilité”. Ces dispositions n'ayant fourni aucune indication quant à la nature du fait de l'enfant
susceptible de déclencher la responsabilité parentale, la jurisprudence a d'abord exigé qu'il commette l'un des
faits générateurs classiques ((aa)) puis, par un glissement jurisprudentiel spectaculaire, elle a admis que le simple
fait causal de l'enfant ((b b)) suffit.

aa)) LLeess d
diifffféérreen
nttss ffaaiittss ggéén éérraatteeu
urrss d
dee rreessp
poon
nssaab
biilliittéé

11)) FFaau
uttee d
dee ll''een
nffaan
ntt

4422.. –– PPrréép
poon
nddéérraan
nccee d
dee llaa ffaau
uttee –– S'il est unanimement admis que la responsabilité parentale suppose la
preuve d'un comportement anormal de l'enfant, la question se pose de savoir si un acte illicite est suffisant ou s'il
faut établir sa faute. De prime abord, on peut penser que la faute du mineur est un révélateur des divers
manquements de ses parents. Autrement dit, la responsabilité de ces derniers viendrait s'ajouter à celle du
mineur et, réciproquement, cette primo-responsabilité de l'enfant servirait d'assise à celle, secondaire, de ses
parents. Pendant longtemps, la doctrine majoritaire s'est rangée à cette analyse. Cette conception a cependant
fait long feu. En raison d'abord de l'écueil que constitue l'exigence du discernement de l'enfant, notamment
quand le dommage est causé par un infans ou un mineur aliéné mental. En raison, ensuite, de l'impossibilité
d'engager la responsabilité parentale lorsque l'enfant se sert d'une chose et qu'il cause un dommage du fait, par
exemple, du vice indécelable de l'objet manipulé. En raison enfin de la faculté pour les parents, dans un système
de faute présumée, de s'exonérer en prouvant leur absence de faute de surveillance ou d'éducation.

4433.. –– À l'origine, la faute était une notion subjective composée à la fois d'un élément objectif, le comportement
anormal, et d'un élément subjectif, l'imputabilité de ce comportement à l'auteur du dommage.

L'exigence de discernement pour caractériser la faute était doublement embarrassante. En effet, non seulement
les enfants en bas âge ou les mineurs aliénés mentaux ne pouvaient être tenus responsables personnellement
mais encore, par ricochet, toute action contre leurs parents sur le fondement de l' article 1242, alinéa 4 du Code
civil était vouée à l'échec. L'exigence systématique d'une faute entendue strictement était ainsi particulièrement
défavorable aux victimes qui risquaient de voir la plupart de leurs actions échouer.

4444.. –– R
Reejjeett d
dee llaa ffaau
uttee –– Conscients de ces inconvénients, certains auteurs avaient préconisé l'abandon de la
faute de l'enfant comme condition de la responsabilité parentale. Le succès de cette proposition est aujourd'hui
manifeste au regard du changement de nature de la responsabilité parentale. Si la jurisprudence a finalement

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assoupli, dans l'intérêt des victimes, les conditions d'application de l' article 1242, alinéa 4 du Code civil
(F. Warembourg-Auque, Irresponsabilité ou responsabilité civile de l'infans : RTD civ. 1982, p. 329 . – G. Viney, La
réparation des dommages causés sous l'empire d'un état d'inconscience : un transfert nécessaire de la
responsabilité vers l'assurance : JCP G 1985, I, 3189, n° 12 . – Ch. Lapoyade-Deschamps, Les petits responsables
(responsabilité civile et responsabilité pénale de l'enfant) : D. 1988, chron. p. 299), l'évolution s'est opérée à la
faveur d'une plus grande souplesse de la part des juges, tant au regard du contenu de la faute que de son
appréciation.

4455.. –– LLaa q
quuêêttee d
duud
diisscceerrn
neem
meen
ntt –– Pour faciliter l'établissement d'une faute, les juges se sont d'abord
attachés, quelque peu artificiellement, à caractériser une lueur de lucidité pour admettre que l'infans et le mineur
aliéné mental avaient suffisamment de discernement pour commettre une faute ( Cass. 2e civ., 30 mai 1956  :
D. 1956, jurispr. p. 680. – Cass. 1re civ., 20 déc. 1960  : D. 1961, jurispr. p. 141, note P. Esmein ; JCP G 1961, II,
12031 , note A. Tunc. – Cass. 2e civ., 28 avr. 1965  : D. 1965, jurispr. p. 758, note P. Esmein), ou pour retenir la
responsabilité directe des parents pour faute prouvée et non plus présumée ( Cass. 2e civ., 25 janv. 1957  :
D. 1957, jurispr. p. 163).

Mais confrontés à l'insuffisance de cette méthode, la jurisprudence s'est satisfaite d'un acte objectivement illicite
de l'enfant. Dès lors, les parents devenaient responsables même si l'auteur du dommage n'était conscient ni de la
gravité ni des conséquences de son acte en raison de son extrême jeunesse ou de l'altération de ses facultés
mentales.

4466.. –– A
Accttee oob
bjjeeccttiivveem
meen
ntt iilllliicciittee –– La jurisprudence a ainsi franchi une étape supplémentaire en se
satisfaisant d'un acte objectivement illicite du mineur pour engager la responsabilité parentale ( Cass. 2e civ.,
16 juill. 1969  : Bull. civ. II, n° 255  ; RTD civ. 1970, p. 575 , obs. G. Durry. – Cass. 2e civ., 13 juin 1974  : Bull. civ. II,
n° 198  ; RTD civ. 1975, p. 311 , obs. G. Durry). Cette analyse était d'autant plus audacieuse que dans le même
temps, la Haute Juridiction demeurait attachée à la conception subjective traditionnelle de la faute civile.

Poursuivant dans cette voie, la Cour de cassation a consacré une conception purement objective de la faute. Elle
a ainsi admis que le discernement n'est pas un élément constitutif de la faute de sorte qu'un mineur peut
commettre une faute civile quand même il aurait été en bas âge ( Cass. ass. plén., 9 mai 1984, n° 80-93.031,
Lemaire  : JurisData n° 1984-700933  ; Bull. civ. ass. plén., n° 2 . – Cass. ass. plén., 9 mai 1984, n° 80-93.481,
Derguini  : JurisData n° 1984-700932  ; Bull. civ. ass. plén., n° 3  ; JCP G 1984, II, 20256 , note Jourdain ; D. 1984,
jurispr. p. 525, concl. Cabannes, note R. Legeais ; Le mineur et la responsabilité civile (à la recherche de la
véritable portée des arrêts de l'Assemblée plénière du 9 mai 1984) in Écrits en hommage à G. Cornu : PUF, 1995,
p. 253) ou atteint d'un trouble mental au moment des faits ( Cass. 1re civ., 20 juill. 1976, n° 74-10.238  : JCP G
1978, II, 18793 , note N. Dejean de la Bâtie).

4477.. –– C
Crriittiiq
quueess –– On a souligné les incohérences de cette solution qui conduisait à donner d'une main ce que
l'on reprenait d'une autre. Il était paradoxal, en effet, de renforcer le caractère objectif de la responsabilité
parentale en n'exigeant aucun fait illicite de l'enfant tout en offrant dans le même temps la possibilité aux parents
de s'exonérer en prouvant qu'ils n'avaient pas commis de faute (en ce sens, V. p. ex. J. Huet, obs. ss Cass. ass.
plén., 9 mai 1984, n° 80-93.031 , préc. n° 46). En dépit des critiques qui émaillaient cette solution, la Cour de
cassation a maintenu le cap ( Cass. 2e civ., 12 déc. 1984  : Bull. civ. II, n° 193  ; JCP G 1985, IV, 71  ; RTD civ. 1986,
p. 119 . – Cass. 2e civ., 14 nov. 1984  : Bull. civ. II, n° 168 . – CA Lyon, 16 nov. 1989  : D. 1990, jurispr. p. 207, note
A. Vialard. – Adde Cass. 2e civ., 13 avr. 1992  : Bull. civ. II, n° 122, p. 60  ; JCP G 1992, IV, 1803  ; RTD civ. 1992, p. 771
, obs. P. Jourdain) mais elles annonçaient déjà l'avènement d'une responsabilité de plein droit.

Autre signe que la jurisprudence ne cantonne pas la responsabilité parentale dans le giron de la faute, elle admet
que les parents sont responsables lorsque le dommage a sa source dans le fait d'une chose dont l'enfant a la
garde.

22)) FFaaiitt d
dee llaa cch
hoossee d
dee ll''een
nffaan
ntt ggaarrd
diieen
n

4488.. –– Il arrive fréquemment que l'enfant occasionne un dommage à l'aide d'une chose dont il avait l'usage, la
direction et le contrôle. Ce cas de figure suscite deux interrogations. L'enfant, fût-il privé de discernement ou en
bas âge, peut-il être gardien au sens de l' article 1242, alinéa 1er du Code civil et, à supposer que l'on réponde par
l'affirmative, est-ce suffisant pour déclencher la responsabilité parentale ?

Sur le premier point, l'examen d'une jurisprudence déjà ancienne montre qu'un mineur aliéné mental peut être
gardien d'une chose ( Cass. 2e civ., 14 mars 1963, n° 61-11.627  : D. 1963, p. 500. – Cass. 2e civ., 18 déc. 1964 ,

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arrêt Trichard, n° 62-10.610 : D. 1965, p. 191, concl. Schmelck, note Esmein ; JCP G 1965, II, 14304 , note N. Dejean
de la Bâtie). Par la suite, l'arrêt Gabillet ( Cass. ass. plén., 9 mai 1984, n° 80-14.994  : JurisData n° 1984-700732 )
rendu à propos d'un enfant de 3 ans qui était tombé d'une balançoire et avait éborgné son camarade avec le
bâton qu'il manipulait, a précisé qu'il n'y a pas lieu, « malgré le très jeune âge de ce mineur », de « rechercher si
celui-ci avait un discernement ».

Sur le second point, la jurisprudence admet nettement depuis l'arrêt Gesbaud ( Cass. 2e civ., 10 févr. 1966  : Bull.
civ. II, n° 192  ; D. 1966, jurispr. p. 333, concl. Schmelck ; JCP G 1968, II, 15506 , note A. Plancqueel ; RTD civ. 1966,
p. 537 , obs. Rodière. – V. aussi Ph. Simler, La notion de garde de l'enfant : RTD civ. 1972, p. 685 ) que « si la
responsabilité du père suppose que celle de l'enfant a[it] été préalablement établie, la loi ne distingue pas entre
les causes qui ont pu donner naissance à la responsabilité de l'enfant ». Si cette solution consacre le principe de
l'égalité des différentes causes qui ont donné lieu à la responsabilité du mineur, elle implique aussi l'application
cumulative du principe général de responsabilité du fait des choses et de la responsabilité des père et mère (V. à
titre d'exemple, CA Dijon, 24 juin 2003, n° 02/01431  : JurisData n° 2003-219364 . – CA Rouen, 27 oct. 2004,
n° 02/01535  : JurisData n° 2004-258061 ). On a toutefois fait observer qu'en pareil cas « il pourrait paraître plus
expédient, et parfois moins artificiel de condamner directement les père et mère en qualité de gardien de la
chose à l'origine du dommage » (Ph. Brun, préc. n° 1, spéc. n° 437. – À titre d'illustration, V.  Cass. 2e civ., 6 oct.
1982  : Gaz. Pal. 1983, pan. jurispr. 141 , obs. F. Chabas. – CA Nancy, 1re ch. civ., 26 avr. 2004, n° 01/01797  :
JurisData n° 2004-251680 ).

4499.. –– Stratégiquement, s'appuyer sur la responsabilité de l'enfant du fait des choses qu'il manipule pour
déclencher l'application de l' article 1242, alinéa 4 du Code civil peut être commode, en particulier lorsque le
dommage a été causé par un groupe de mineurs. En pratique en effet, il peut s'avérer fréquemment impossible
d'identifier celui qui avait les pouvoirs d'usage, de direction et de contrôle sur la chose au moment du dommage.
Le recours à la notion de garde en commun permet alors de contourner l'écueil en admettant la responsabilité in
solidum des parents des enfants co-gardiens. Si une telle solution a pu être consacrée par le passé, en particulier
à propos d'incendies causés par l'usage malencontreux de briquets, d'allumettes ou encore de cigarettes ( Cass.
2e civ., 24 mai 1991, n° 90-12.443  : JurisData n° 1991-001801  ; Bull. civ. II, n° 159 . – CA Nancy, 1re ch. civ., 4 avr.
2006, n° 00/02328  : JurisData n° 2006-314062 . – CA Besançon, 1re ch. civ., sect. A, 8 févr. 2007  : JurisData
n° 2007-332573 ), il n'est pas certain qu'elle constitue toujours une panacée pour les plaideurs. En effet depuis
quelques années, la Cour de cassation montre une certaine défiance à l'égard de la notion de garde en commun
comme en témoignent deux arrêts rendus par la deuxième chambre civile les 11 juillet 2002 en matière
d'incendie ( Cass. 2e civ., 11 juill. 2002, n° 00-21.346  : JurisData n° 2002-015162  ; Bull. civ. II, n° 176  ; RTD civ.
2002, p. 823 , obs. P. Jourdain) et 19 octobre 2006 ( Cass. 2e civ., 19 oct. 2006, n° 04-14.177  : JurisData
n° 2006-035403  ; Bull. civ. II, n° 281  ; JCP G 2007, II, 10030 , note M. Mekki ; RTD civ. 2007, p. 130 , obs. P. Jourdain.
– Comp. la motivation de l'arrêt d'appel : CA Versailles, 3e ch., 13 févr. 2004, n° 02/01593  : JurisData
n° 2004-238409  : co-action délibérée des enfants, responsabilité des parents des trois enfants mis en cause).

33)) IIm
mpplliiccaattiio
onnd
daan
nss u n
n aacccciid
deen
ntt d
dee llaa cciirrccu
ullaat iio
onn

5500.. –– Dans le prolongement de l'arrêt Gesbaud (arrêt préc. n° 48) qui ne distinguait pas les causes susceptibles
d'être à l'origine de la responsabilité du mineur, la Cour de cassation a admis que cette responsabilité puisse être
engagée du fait de l'implication dans un accident de la circulation d'un véhicule dont un enfant serait le
conducteur ou le gardien. Cette solution s'évince d'un arrêt du 9 mars 2000 ( Cass. 2e civ., 9 mars 2000  : JurisData
n° 2000-000951  ; Bull. civ. II, n° 41  ; Resp. civ. et assur. 2000, ss chron. 13, H. Groutel) dans lequel il s'agissait de
savoir si les père et mère d'un mineur conducteur d'une motocyclette volée impliquée dans un accident de la
circulation sont exposés au recours de l'assureur après indemnisation des victimes. La Cour de cassation a
répondu par l'affirmative sous le triple visa des articles 1384 (devenu C. civ., art. 1242 ), alinéa 4, du Code civil, 3
de la loi du 5 juillet 1985 et L. 211-1, alinéa 3 du Code des assurances.

Dans le même ordre d'idée, mais dans une configuration différente, la cour d'appel de Paris a admis la
responsabilité des parents sur le fondement de l'article 1384, (devenu C. civ., art. 1242 ), alinéa 4 du Code civil du
fait de l'implication de leur enfant dans un accident de la circulation ( CA Paris, 17e ch., sect. A, 11 juin 2007  : Gaz.
Pal. 13 sept. 2007, n° 256, p. 8 ) au cours duquel la passagère d'une moto et son conducteur avaient fait une
chute et avaient été blessés du fait de l'imprudence du mineur (comp. CA Amiens, 1re ch., sect. 1, 28 juin 2007,
n° 06/00099  : JurisData n° 2007-341031  : refus d'admettre la qualification d'accident de la circulation, enfant de 3
ans ayant mis le moteur d'un véhicule en marche, responsabilité parentale engagée sur le fondement de l'
article 1384, alinéa 4 du Code civil ). La chambre criminelle a précisé par un arrêt du 8 février 2011 ( Cass. crim.,
8 févr. 2011, n° 10-81.568  : JurisData n° 2011-001333  ; Bull. crim. n° 20 ) que : « les dispositions d'ordre public de

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la loi du 5 juillet 1985 n'excluent pas la responsabilité des parents, recherchés comme civilement responsables »).
En cas d'accident de la circulation, le recours à la responsabilité parentale est utile lorsque le véhicule conduit par
le mineur a été volé et que la victime est coauteur ou complice du vol. Dans cette situation, l'assurance obligatoire
de responsabilité relative au véhicule ne couvrira pas la réparation des dommages subis par les auteurs,
coauteurs ou complices du vol ( C. assur., art. L. 211-1, al. 2 , in fine). En revanche, il résulte de l'arrêt précité que
l'exclusion légale de garantie prévue par l' article L. 211-1 du Code des assurances ne s'applique pas à l'assurance
garantissant la responsabilité civile des parents du mineur impliqué dans l'accident (sur cette question, V. P.-P.
Alipoé et A. Ayewouadan, La primauté de la responsabilité des parents d'un mineur sur l'application de l' article
L. 211-1, al. 2, du Code des assurances  : RLDC 2011/83, n° 4264. – V. aussi. F. Leduc, La responsabilité des père et
mère du fait de leurs enfants, préc. n° 8, spéc. n° 243-17. – Comp. : CA Nîmes, 1re ch., sect. A, 30 nov. 2010,
n° 09/03262  : JurisData n° 2010-027424 ).

44)) A
Auuttrreess ffaaiittss ggéén
néérra tteeu
urrss

5511.. –– On peut d'abord imaginer que l' article 1242, alinéa 4 du Code civil soit applicable lorsque la
responsabilité personnelle du mineur est engagée sur le fondement de l' article 1343 du Code civil toutes les fois
qu'un animal lui appartenant aura causé un dommage aux tiers.

De manière plus originale, il est également loisible d'engager la responsabilité sur le fondement de l' article 342
du Code civil (mod. par Ord. n° 2005-759, 4 juill. 2005  : JO 6 juill. 2005, p. 11159 , entré en vigueur au 1er juillet
2006) suivant lequel “tout enfant dont la filiation paternelle n'est pas légalement établie, peut réclamer des
subsides à celui qui a eu des relations avec sa mère pendant la période légale de la conception”. Si l'action à fins
de subsides a un double fondement alimentaire et indemnitaire, ce dernier aspect paraît essentiel. Il repose en
effet sur l'idée que le paiement de subsides compense une possibilité de paternité liée au risque couru par un
homme d'engendrer pour avoir entretenu avec une femme des relations intimes. Cette action est fondée sur le
risque et non sur la faute (V.  JCl. Droit de l'enfant , fasc. 360 ou JCl. Civil Code, Art. 342 à 342-8 ou JCl. Notarial
Répertoire , V° Filiation, fasc. 42, par F. Granet-Lambrechts, spéc. n° 9). Les débats parlementaires expriment cette
idée par la voix du garde des Sceaux : « Nous ne sommes pas là dans le domaine de la filiation : nous sommes
simplement dans celui de la responsabilité, d'une responsabilité que l'homme encourt du fait des relations qu'il a
eues et des conséquences qui en ont découlé » ( JOAN 6 oct. 1971, p. 4282 . – JOAN 7 oct. 1971, p. 4323 . – JO
Sénat 10 nov. 1971, p. 1939 ). Dans cette perspective, une cour d'appel a pu admettre implicitement que les
parents d'un mineur puissent être déclarés civilement responsables de la dette de subsides incombant à ce
dernier sur le fondement de l' article 342 du Code civil (V.  CA Paris, 6 mai 1977  : D. 1978, jurispr. p. 145, note
J. Massip).

b
b)) LLee ssiim
mppllee ffaaiitt ccaau
ussaall d
dee l ''een
nffaan
ntt

5522.. –– La jurisprudence se contente désormais d'un simple fait de l'enfant à l'origine du dommage pour engager
la responsabilité de ses parents ; cette consécration du simple fait causal ((11)) ne va pas sans poser de sérieux
inconvénients ((22)). C'est pourquoi le projet de réforme du droit de la responsabilité du 13 mars 2017 prévoit de
revenir sur cette solution ((33)).

11)) C
Coon
nssééccrraattiio
onnd
duu ssiim
mppllee ffaaiitt ccaau
ussaall

5533.. –– C'est à l'arrêt Fullenwarth ( Cass. ass. plén., 9 mai 1984  : Bull. civ. ass. plén., n° 4  ; JCP G 1984, II, 20255 ,
note N. Dejean de La Bâtie ; D. 1984, jurispr. p. 525 ; RTD civ. 1984, p. 508 , obs. J. Huet. – G. Viney, La réparation
des dommages causés sous l'empire d'un état d'inconscience, art. préc. n° 44, spéc. note 149) que l'on doit d'avoir
soufflé le vent de la révolution en affirmant que « pour que soit présumée, sur le fondement de l' article 1384,
alinéa 4 du Code civil , la responsabilité des père et mère d'un mineur habitant avec eux, il suffit que celui-ci ait
commis un acte qui soit la cause directe du dommage invoqué par la victime ; que par ce motif de pur droit,
substitué à celui critiqué par le moyen, l'arrêt se trouve légalement justifié ». Outre que cette formulation
marquait le passage d'une présomption de faute des parents vers une présomption de responsabilité, elle
traduisait surtout l'abandon de l'exigence d'un comportement fautif de l'enfant comme condition de la mise en
œuvre de l'article 1384 (devenu 1242), alinéa 4 du Code civil. Autrement dit, tout fait en relation causale avec le
dommage suffirait à déclencher la responsabilité des père et mère alors même que la responsabilité propre de
l'enfant ne pourrait être recherchée.

Si la portée de cette décision est demeurée incertaine en raison des interprétations doctrinales divergentes qui
en ont été proposées, la jurisprudence subséquente n'a pas permis davantage de lever les doutes.

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La doctrine a d'abord glosé sur l'utilisation par la Cour de cassation de la locution « commis un acte » qui
impliquerait un acte anormal de l'enfant partant de l'idée que l'on ne « commet » pas de bonnes actions (G. Viney
et P. Jourdain, préc. n° 13, spéc. n° 880). Dans le même temps, on a souligné l'absence de réflexion sur le lien qui
unit le discernement de l'enfant et sa responsabilité éventuelle pour limiter la portée de la solution.

Par la suite, la deuxième chambre civile a importé l'attendu de l'affaire Fullenwarth ( Cass. 2e civ., 14 nov. 1984,
n° 83-11.742  : Bull. civ. II, n° 168 . – Cass. 2e civ., 13 avr. 1992, n° 90-13.384  : JurisData n° 1992-001022  ; Bull. civ.
II, n° 122  ; JCP G 1992, IV, 1803  ; RTD civ. 1992, p. 771 , obs. P. Jourdain). Néanmoins, à chaque fois qu'elle s'est
prononcée sur la responsabilité parentale, soit l'enfant était fautif, pour avoir causé un incendie ( Cass. 2e civ.,
14 nov. 1984, n° 83-11.742 , préc. – CA Lyon, 16 nov. 1989  : D. 1990, jurispr. p. 207, note A. Vialard), infligé des
coups et blessures ( Cass. crim., 4 août 1984  : Bull. crim. n° 269 ), commis des maladresses ( Cass. 2e civ., 4 mars
1987, n° 85-14.554 , préc. n° 6) ou des imprudences ( Cass. 2e civ., 4 mars 1992, n° 91-10.049  : JurisData
n° 1992-000559  ; JCP G 1992, II, 21941 , note N. Dejean de la Bâtie. – Comp. Cass. 2e civ., 2 déc. 1998,
n° 96-22.158  : JurisData n° 1998-004613  ; Bull. civ. II, n° 292 ), soit il était gardien ( Cass. 2e civ., 16 janv. 1991,
n° 89-16.382  : JurisData n° 1991-000123  ; Bull. civ. II, n° 22 . – Cass. 2e civ., 24 mai 1991, n° 90-12.443  : JurisData
n° 1991-001801  ; Bull. civ. II, n° 159 . – Cass. 2e civ., 1er avr. 1998, n° 95-20.804  : JurisData n° 1998-001478  ; Bull.
civ. II, n° 119 ). Inversement, la responsabilité parentale était volontiers écartée lorsqu'il n'était pas établi que le
mineur avait adopté un comportement fautif ou qu'il avait eu la garde de la chose à l'origine du dommage ( Cass.
2e civ., 3 janv. 1985, n° 83-13.997  : JurisData n° 1985-000039 . – Cass. 2e civ., 12 juin 1985, n° 84-10.443  :
JurisData n° 1985-701791  ; Bull. civ. II, n° 117 . – Cass. 2e civ., 13 avr. 1992, n° 90-13.384 , préc. – Cass. 2e civ.,
25 oct. 1995, n° 93-15.905  : JurisData n° 1995-003099  ; Resp. civ. et assur. 1996, comm. 44 ). Sur le fond, l'arrêt
Fullenwarth n'a donc pas réellement modifié les solutions antérieures.

5544.. –– C
Coon
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urriissp
prru
uddeen
nttiieellllee –– Il faudra attendre l'année 2001 pour que la Haute Juridiction affirme
sans ambiguïté aux termes du désormais fameux arrêt Levert ( Cass. 2e civ., 10 mai 2001, n° 99-11.287 , préc.
n° 8) que « la responsabilité de plein droit encourue par les père et mère du fait des dommages causés par leur
enfant mineur habitant avec eux n'est pas subordonnée à l'existence d'une faute de l'enfant ». Il s'agissait en
l'espèce d'un accident survenu au cours d'une partie de rugby dans la cour de récréation d'une école privée.
Blessé à l'œil à la suite d'un plaquage régulier, l'un des joueurs a, par l'entremise de ses parents, agi en
responsabilité contre les parents de l'auteur du dommage. Les juges du fond ont écarté l'application de l'
article 1242, alinéa 4 du Code civil après avoir relevé que l'auteur du plaquage avait respecté les règles du jeu
cependant que la victime avait accepté les risques. Dès lors, selon la cour d'appel, « le malencontreux plaquage »
ne devait engager la responsabilité de l'enfant ni celle, subséquente, des parents. On le constate, la configuration
relatée en l'espèce est différente de celles examinées précédemment puisqu'il n'était pas discuté que le
comportement de l'enfant n'était pas fautif et, cependant, la Haute Juridiction a saisi l'occasion de casser la
décision au motif que le simple fait causal de l'enfant mineur suffit à déclencher la responsabilité parentale.

Cette position a été confirmée et complétée peu après par l'assemblée plénière ( Cass. ass. plén., 13 déc. 2002, 2
arrêts, n° 00-13.787 et 01-14.007 , préc. n° 8) dans deux affaires mettant en scène des mineurs pratiquant une
activité sportive. Dans l'une d'elle, un adolescent avait été blessé lors d'une partie de ballon à la suite d'un
plaquage régulier. Dans l'autre espèce, un coup de pied avait été porté lors d'une séance d'éducation physique
par un élève qui avait chuté en perdant l'équilibre. Suivant leur raisonnement habituel, les juges du fond avaient
écarté les demandes fondées sur l' article 1242, alinéa 4 du Code civil en relevant l'absence de faute des enfants
mineurs. Réunie en assemblée plénière la Cour de cassation a renforcé la position de la deuxième chambre en
prenant soin de préciser que « pour que la responsabilité de plein droit des père et mère exerçant l'autorité
parentale sur un mineur habitant avec eux puisse être recherchée, il suffit que le dommage invoqué par la victime
ait été directement causé par le fait, même non fautif, du mineur ; seule la cause étrangère ou la faute de la
victime peut exonérer les père et mère de cette responsabilité ». Dès lors, l'assemblée plénière ne s'est pas
contentée de rappeler que la faute du mineur n'est pas nécessaire pour engager la responsabilité des parents,
elle a ajouté qu'il faut prouver un fait directement causal ce, qui établit une filiation évidente avec l'arrêt
Fullenwarth.

5555.. –– JJu
urriissp
prru
uddeen
nccee ccoon
nssttaan
nttee –– La solution fait depuis lors l'objet d'une application constante tant par les
juges du fond (V. pour le détail, n° 8. – CA Besançon, 26 nov. 2009, n° 06/00507 , préc. – CA Chambéry, 10 mars
2009, n° 07/02343 , préc. n° 8. – CA Paris, 17 mars 2008, n° 06/01357 , préc. n° 8. – CA Dijon, 9 nov. 2004,
n° 02/01048 , préc. n° 8. – CA Amiens, 9 juin 2005, n° 03/03093 , préc. n° 8. – CA Amiens, 13 mai 2004, n° 02/04173
, préc. n° 8. – CA Amiens, 13 nov. 2003, n° 02/02669 , préc. n° 8. – CA Grenoble, 7 mai 2003, n° 02/02834 , préc.
n° 8. – CA Aix-en-Provence, 1er déc. 2006, n° 15/21844 , préc. n° 8) que par la deuxième chambre civile (V.  Cass.
2e civ., 3 juill. 2003, n° 02-15.696  : JurisData n° 2003-019819  ; Bull. civ. II, n° 230 , JCP G 2004, n° 4, p. 136-137 ,

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note R. Desgorces ; Dr. famille 2004, comm. 63 , note J. Julien. – Cass. 2e civ., 20 oct. 2005, n° 04-19.243  : JurisData
n° 2005-030472 . – Cass. 2e civ., 18 nov. 2010, n° 09-17.021  : JurisData n° 2010-021538  ; Resp. civ. et assur. 2011,
comm. 45 . – Cass. 2e civ., 17 févr. 2011, n° 10-30.439 , préc. n° 8). En particulier, la Cour de cassation rappelle que
l' article 1242, alinéa 4 du Code civil a vocation à s'appliquer y compris lorsque le mineur a un comportement
parfaitement orthodoxe. La responsabilité parentale a ainsi été retenue à propos de dommages causés par un
enfant scolarisé à un autre élève âgé blessé au cours de tout jeu organisé et surveillé. Dès lors, il est inopérant de
rejeter l'action fondée sur l' article 1242, alinéa 4 du Code civil , motif pris de l'absence de faute de l'auteur du
dommage (à titre d'exemple, V.  Cass. 2e civ., 3 juill. 2003, n° 02-15.696  : JurisData n° 2003-019819  ; Bull. civ. II,
n° 230  ; Resp. civ. et assur. 2003, comm. 253  ; JCP G 2004, II, 10009 , note R. Desgorces. – Comp. CA Amiens,
1re ch., sect. 1, 9 juin 2005, n° 03/03093  : JurisData n° 2005-280902 ).

Si le contentieux évoqué précédemment concerne majoritairement les activités sportives, un arrêt de la cour
d'appel d'Aix-en-Provence (CA Aix-en-Provence, 3 avr. 2007 : JurisData n° 2007-344552 ) mérite d'être signalé car il
a ouvert une brèche vers un contentieux plus varié. Il s'agissait en l'espèce d'une agression sexuelle dénoncée
mensongèrement par un jeune élève de 10 ans au préjudice de son instituteur. Ce dernier a assigné la mère de
l'enfant en responsabilité sur le fondement de l'article 1384 (devenu C. civ., art. 1242 ), alinéa 4 du Code civil. Il a
été jugé que la révélation de pédophilie porte atteinte à l'honneur, la réputation et la dignité de celui qui en est
l'objet, la déclaration mensongère de l'enfant constituant la cause directe du dommage subi.

22)) IIn
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5566.. –– Sur un plan pratique, il est certain que l'admission du simple fait causal pour déclencher la responsabilité
parentale a pour effet immédiat d'améliorer le sort des victimes d'accidents corporels en allégeant le fardeau de
la preuve. Elle leur évite en particulier de rechercher des expédients pour établir artificiellement la faute du
mineur privé de discernement tout en prenant appui sur l'assureur de responsabilité des parents. Mais pour
séduisante que soit cette solution, elle n'en suscite pas moins certaines critiques, tant en raison de place qu'elle
confère à l'enfant qu'à cause du caractère illimité de la responsabilité parentale qui en découle.

En premier lieu, il est notable que l'admission du simple fait causal opère une réification de l'enfant puisque la
responsabilité parentale est encourue dès qu'il a joué un rôle dans la production du dommage. De là à considérer
que la responsabilité des père et père se rapproche de la responsabilité du fait des choses, il n'y a qu'un pas que
certains auteurs n'ont pas hésité à franchir (en ce sens, Resp. civ. et assur. 2003, chron. 4 , par H. Groutel. –
D. Mazeaud, Famille et responsabilité, Réflexions sur quelques aspects de « l'idéologie de réparation », in Le droit
privé français à la fin du XXe siècle, Études offertes à Pierre Catala : Litec, 2001, p. 576, n° 15. – M. Fabre-Magnan,
Droit des obligations, t. 2, Responsabilité civile et quasi-contrats : PUF Themis droit, 2007, n° 125).

En second lieu, les parents s'exposent à une responsabilité excessivement lourde et illimitée.

Une responsabilité excessivement lourde, d'une part, car tout comportement de l'enfant qui ne serait pas de
nature à engager sa responsabilité propre suffit à déclencher celle de ses parents.

Autrement dit, la responsabilité fondée sur l' article 1242, alinéa 4 du Code civil est encourue alors même que ni
les parents, ni leur enfant ne pourraient être tenus personnellement pour le même fait. Cela revient à dire que le
dommage causé par un enfant constitue une circonstance aggravante de la responsabilité parentale que l'on
peine à justifier. Selon certains auteurs, cette solution est « injuste et contraire à toute logique » car « aucune
raison ne peut justifier que le fait que le dommage ait été causé par un enfant mineur constitue une circonstance
aggravante de responsabilité, imposant la réparation d'un dommage que le droit commun ne commande pas de
réparer » (J. Flour, J.-L. Aubert et E. Savaux, Droit civil, les obligations, t. 2, Le Fait juridique : Dalloz-Sirey, 14e éd.,
2011, n° 197-1).

Une responsabilité illimitée, d'autre part, car déclencher la responsabilité parentale à partir d'un simple fait
causal peut engendrer des solutions aberrantes. Ainsi pourrait-on imaginer que la responsabilité parentale fût
engagée pour la transmission d'un virus ou pour les conséquences de la séduction non dolosive d'une jeune fille
par un adolescent qui conduise tout droit son rival vers la dépression (exemples cités par N. Dejean de la Bâtie,
note ss Cass. ass. plén., 9 mai 1984  : JCP G 1984, II, 20255 ).

5577.. –– Si l'on peut expliquer l'aggravation de la responsabilité parentale par l'effacement de l'exigence d'un fait
générateur de la responsabilité de l'enfant, cet effacement révèle plus profondément une véritable mutation de la
responsabilité parentale qui, de responsabilité du fait d'autrui, est devenue une responsabilité directe (Ch. Saint-
Pau, La responsabilité du fait d'autrui est-elle devenue une responsabilité directement personnelle ? : Resp. civ. et

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assur. 1998, chron. 22 ). Le changement est tel que certains auteurs n'hésitent pas à conclure que la
responsabilité parentale constitue désormais un système d'indemnisation pour les dommages accidentels causés
par les enfants mineurs qui n'ose pas dire son nom (J. Flour, J.-L. Aubert et E. Savaux, préc. n° 56, spéc. n° 197-1).

Bien que la préoccupation indemnitaire qui inspire cette évolution du droit positif ne soit pas condamnable en
soi, on peut regretter qu'elle ne s'accompagne pas d'une assurance obligatoire et d'un fonds de garantie en dépit
des propositions faites en ce sens (G. Viney et P. Jourdain, préc. n° 13, spéc. n° 892. – Adde : C. Siffrein-Blanc, Vers
une réforme de la responsabilité civile des parents, préc. n° 4, spéc. p. 479 s.). Une réforme législative est
attendue par la doctrine qui exprime des critiques quasi unanimes (V. Ph. Brun, préc. n° 1, spéc. n° 436 et les réf.
citées) jusque dans les rangs de la Cour de cassation (Rapp. du groupe de travail de la Cour de cassation sur le
Rapport Catala : www.courdecassation.fr). L'avant-projet Catala subordonnait déjà dans son article 1355 toutes les
responsabilités du fait d'autrui à l'existence d'un fait de nature à engager la responsabilité de l'auteur direct du
dommage (faute ou implication d'une chose dont celui-ci est gardien). Cette solution a été approuvée par une
large majorité du groupe composé au sein de la Cour de cassation qui a proposé de « mettre fin à la
jurisprudence qui subordonne actuellement la responsabilité des parents à un simple fait causal de la part de
l'enfant » ( Cass. ass. plén., 9 mai 1984  : Bull. ass. plén. n° 4), même non fautif ( Cass. 2e civ., 10 mai 2001 , préc.
n° 8. – Cass. 2e civ., 3 juill. 2003 , préc. n° 55). « L'idée qui justifie l'abandon de cette jurisprudence est que la
victime ne doit pas pouvoir obtenir réparation dans le cas d'une responsabilité-relais, alors qu'elle ne le pourrait
pas si la responsabilité des parents était recherchée pour un fait qui leur serait personnel » (Rapp. préc.). Ces
diverses critiques ont été entendues puisque le projet de réforme du 13 mars 2017 prévoit de restaurer l'exigence
d'un fait de nature à engager la responsabilité de l'enfant pour déclencher celle, secondaire, de ses parents.

33)) LLaa rreessttaau


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5588.. –– Le projet de réforme de la responsabilité civile du 13 mars 2017 se fait l'écho des nombreuses critiques
doctrinales en subordonnant explicitement la mise en jeu de la responsabilité parentale à un fait du mineur de
nature à engager sa responsabilité personnelle (V. art. 1245, al. 2 : la responsabilité du fait d'autrui « suppose la
preuve d'un fait de nature à engager la responsabilité de l'auteur direct du dommage »).

S'agissant des modalités de la responsabilité, en l'état actuel du droit, la rigueur de la responsabilité parentale est
de mise depuis que l'arrêt Bertrand en a révisé les conditions de mise en œuvre tout en limitant les facultés
d'exonération des parents.

IIII.. -- M
Miissee een
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5599.. –– Les bouleversements qui ont affecté le régime de la responsabilité parentale ((A
A)) soulèvent des difficultés
inédites quant à sa mise en œuvre ((BB)).

A
A.. -- R
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biilliittéé p
paarreen
nttaallee

6600.. –– Le changement de nature de la responsabilité parentale conduit à une mise en cause de plus en plus
fréquente des parents ou de leur assureur ((11°°)). Cette rigueur trouve cependant un contrepoids dans la variété de
recours ((22°°)) qu'il leur est loisible d'exercer.

11°° C
Chhaan
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6611.. –– Le régime de la responsabilité des père et mère du fait de leurs enfants mineurs résulte de la conjonction
des alinéas 4 et 7 de l'article 1242 du Code civil . En effet, si le premier texte pose les conditions de leur
responsabilité, le second dispose que “la responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les père et mère [...] ne
prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité”.

Dans un premier temps, le fait de l'enfant a été envisagé comme l'ombre portée des fautes de surveillance et
d'éducation de ses parents. Dès lors, il était logique que ces derniers puissent s'exonérer en prouvant qu'ils
n'avaient pas commis de telles fautes. Cette conception a cependant fait l'objet de nombreuses critiques
doctrinales.

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En raison, d'abord, du caractère artificiel de l'obligation de surveillance du fait de l'impossibilité pour les parents
de l'exercer de façon permanente (en ce sens, F. Leduc, La responsabilité des père et mère du fait de leurs
enfants, préc. n° 8, spéc. n° 243-64). En raison, ensuite, du large pouvoir d'interprétation laissé aux juges quant à
l'appréciation de la faute de surveillance et d'éducation. À cet égard, en effet, il apparaît que la jurisprudence s'est
révélée très fluctuante et arbitraire rendant tour à tour des décisions d'une relative indulgence ( Cass. 2e civ.,
4 mars 1987, n° 85-14.554 , préc. n° 6) pour les parents et, d'autres, d'une extrême sévérité (V. Ph. Brun, préc. n° 1,
spéc. n° 438 – V. p. ex. Cass. 2e civ., 3 mars 1988, n° 86-16.795  : Bull. civ. II, n° 58 ).

Ces critiques doctrinales, exacerbées par la poussée des besoins indemnitaires, ont fini par trouver une issue
favorable avec l'arrêt Bertrand du 19 février 1997 (préc.) qui a affirmé que les parents sont responsables de plein
droit des dommages causés par leur enfant mineur. Si ce « coup d'État prétorien » (selon le mot de Ph. Brun,
préc., spéc. n° 523) présenté par certains comme spectaculaire (Ch. Caron, La force majeure : talon d'Achille de la
responsabilité des père et mère ? : Gaz. Pal. Rec. 1998, II, doctr. p. 1130. – Comp. cependant les observations plus
nuancées de Ph. Brun, préc., spéc. n° 524) a non seulement modifié la nature de la responsabilité parentale, il a
également réduit à une peau de chagrin les causes d'exonération des parents. Ainsi, la responsabilité parentale
s'est dégagée de la faute au bénéfice selon l'analyse retenue, de la solidarité familiale (V. Ph. Brun, préc., spéc.
n° 443) et/ou du risque (V. A. Bénabent, Droit des obligations, préc. n° 7, spéc. n° 561).

L'avant-projet de réforme de la responsabilité civile du 13 mars 2017 crée pour l'avenir un régime unique de
responsabilité de plein droit du fait des mineurs incluant les parents et toute personne physique ou morale
chargée, par décision judiciaire ou administrative, d'organiser et contrôler à titre permanent le mode de vie du
mineur (art. 1246 : “sont responsables de plein droit du fait du mineur son ou ses tuteurs, en tant qu'ils sont
chargés de la personne du mineur”).

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b)) LLaa rreessttrriiccttiio
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d''eexxo
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6622.. –– Avec l'arrêt Bertrand, les parents ont perdu la possibilité d'invoquer leur absence de faute de surveillance
et d'éducation pour échapper à leur responsabilité. Désormais, « seule la force majeure ou la faute de la victime »
sont exonératoires. Si la jurisprudence reprend à l'envi cette formule depuis plus d'une décennie ( Cass. 2e civ.,
4 juin 1997, n° 95-16.490  : JurisData n° 1997-002467  ; Bull. civ. II, n° 168 . – Cass. 2e civ., 2 déc. 1998, n° 96-22.158
 : JurisData n° 1998-004613  ; Bull. civ. II, n° 292 . – Cass. 2e civ., 15 avr. 1999, n° 97-16.381  : JurisData
n° 1999-001731 . – Cass. 2e civ., 9 mars 2000, n° 98-18.095  : JurisData n° 2000-000953  ; Bull. civ. II, n° 44  ; Resp.
civ. et assur. 2000, comm. 179 , note H. Groutel ; JCP G 2000, II, 10374 , note A. Gouttenoire-Cornut ; LPA 4 juill.
2000, p. 11 , note A.-M. L. ; Gaz. Pal. 2001, n° 33, p. 47 , note F. Chabas. – Cass. 2e civ., 20 avr. 2000, n° 98-18.809  :
Bull. civ. II, n° 66 . – Cass. ass. plén., 13 déc. 2002, n° 00-13.787  : JurisData n° 2002-016997  ; Bull. civ. ass. plén.,
n° 4  ; D. 2003, p. 231, note P. Jourdain. – Cass. ass. plén., 17 janv. 2003, n° 00-13.787  : JurisData n° 2003-017431  ;
D. 2003, p. 591, note P. Jourdain. – Cass. 2e civ., 20 oct. 2005, n° 04-19.243 , préc. n° 8. – Cass. 2e civ., 19 oct. 2006,
n° 05-17.474  : JurisData n° 2006-035432  ; RJPF 2007, n° 2, p. 22 , note M. Brusorio. – Cass. 2e civ., 17 févr. 2011,
n° 10-30.439  : JurisData n° 2011-001912 ), encore faut-il déterminer ce que recouvrent ces deux notions dans le
contexte particulier de la responsabilité parentale.

La doctrine considère que le choix de la terminologie « force majeure » est délibéré et qu'elle est utilisée par
opposition à tout événement qui ne présenterait pas ses caractères. Ainsi, dans l'esprit des magistrats, tout
événement présentant les traits de la force majeure (cas fortuit, fait d'un tiers, ou de la victime) serait totalement
libératoire pour les parents cependant que la faute de la victime, à défaut de les revêtir, n'aurait qu'une vertu
partiellement exonératoire.

11)) LLaa f aau


ut ee d
dee llaa v iiccttiim
mee

6633.. –– La faute de la victime n'appelle que de brèves observations. Il suffit en effet de prouver que cette dernière
a eu un comportement anormal en rapport avec le dommage pour donner sa mesure à l'effet exonératoire. Dans
ces conditions, l'exonération sera totale lorsque la faute est imprévisible et irrésistible et au contraire partielle (
Cass. 2e civ., 19 oct. 2006, n° 05-17.474 , préc. n° 62. – CA Grenoble, 2e ch. civ., 21 févr. 2006, n° 04/00505  :
JurisData n° 2006-297041 . – CA Reims, ch. civ., sect. 2, 1er sept. 2005, n° 02/02735  : JurisData n° 2005-296419 )
dans les autres hypothèses. La Cour de cassation a ainsi censuré un arrêt d'appel qui avait totalement exonéré le
père d'un mineur sur la base d'une faute de la victime sans avoir relevé au préalable qu'elle présentait les
caractères de la force majeure ( Cass. 2e civ., 17 févr. 2011, n° 10-30.439 , préc. n° 62).

Une faute ordinaire d'imprudence ou de négligence suffit pour produire un effet exonératoire. Ainsi, la Cour de

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cassation a précisé qu'« il n'est pas exigé que la faute de la victime ait un caractère intentionnel ou inexcusable
pour exonérer les parents de l'auteur du dommage de leur responsabilité » ( Cass. 2e civ., 10 nov. 2005,
n° 04-16.289  : JurisData n° 2005-030672  ; Resp. civ. et assur. 2006, comm. 3 ) et qu'« il n'est pas exigé par les
articles 1382 (devenu C. civ., art. 1240 ), 1383 (devenu C. civ., art. 1241 ) et 1384, alinéa 4 (devenu C. civ., art. 1242,
al. 4 ), du Code civil que la faute de la victime ait un caractère volontaire pour exonérer partiellement les parents
de l'auteur du dommage de leur responsabilité » ( Cass. 2e civ., 29 avr. 2004, n° 02-20.180  : JurisData
n° 2004-023438  ; Resp. civ. et assur. 2004, comm. 214 , par H. Groutel).

22)) LLaa f o
orrccee m
maajjeeu
urree

6644.. –– Pour s'exonérer de toute responsabilité, les parents doivent établir que le dommage a pour cause un
événement de force majeure. La cour régulatrice rappelle avec constance que « seule la force majeure ou la faute
imprévisible et irrésistible de la victime peut exonérer totalement les père et mère de la responsabilité de plein
droit encourue du fait des dommages causés par leur enfant mineur habitant avec eux » ( Cass. 2e civ., 12 oct.
2000, n° 98-13.741  : JurisData n° 2000-006233  ; Resp. civ. et assur. 2000, comm. 356 . – Cass. 2e civ., 21 juin 2001,
n° 99-16.114  : JurisData n° 2001-010299  ; Resp. civ. et assur. 2001, comm. 281 , note H. G. : une fillette ayant été
bousculée dans la cour d'un collège par une camarade âgée de 11 ans et une caisse d'assurance maladie ayant
réclamé les prestations au père de cette dernière, viole l'article 1384 (devenu 1242, alinéa 4 du Code civil, le
tribunal d'instance qui énonce que le fait pour des enfants de s'ébattre dans une cour de récréation ne constitue
pas en soi un acte illicite ou anormal et en déduit que la responsabilité du représentant légal ne peut être
recherchée, alors que seule la preuve d'un cas de force majeure ou d'une faute de la victime pouvait exonérer le
défendeur de la responsabilité de plein droit encourue du fait des dommages causés par la mineure. – Cass.
2e civ., 17 févr. 2011, n° 10-30.439 , préc. n° 62).

6655.. –– D
Dééfifin
niittiioon
n –– La force majeure est susceptible de deux acceptions. Suivant une première définition
restrictive, elle se limite aux faits de la nature ou aux faits humains anonymes par opposition aux faits du tiers et
de la victime. Si l'on admet que l'arrêt Bertrand et les arrêts subséquents ont importé cette conception, cela
signifie que la jurisprudence « entend dénier au fait du tiers toute vertu exonératoire en matière de responsabilité
parentale. C'est dire que les deux seules causes d'exonération de la responsabilité parentale seraient le cas fortuit
et la faute de la victime » (en ce sens, F. Leduc, La responsabilité des père et mère du fait de leurs enfants : Lamy
Responsabilité civile, nov. 2018, étude 243, n° 243-65).

Inversement, selon une analyse plus compréhensive, la force majeure pourrait constituer « tout événement
perturbateur, quel qu'il soit (cas fortuit, fait d'un tiers, fait de la victime) présentant les caractères de la force
majeure, à savoir l'imprévisibilité, l'irrésistibilité et, le cas échéant, l'extériorité » (en ce sens, et pour une
argumentation détaillée, V. F. Leduc, La responsabilité des père et mère du fait de leurs enfants, préc., spéc.
n° 243-69). Comme le souligne Monsieur le Professeur Leduc (préc.), cette deuxième acception doit être préférée
car elle correspond au régime ordinaire de la responsabilité de plein droit, ce qu'est précisément la responsabilité
parentale.

6666.. –– A
Appp
prréécciiaattiioon
nddee llaa ffoorrccee m
maajjeeu
urree –– Mais une fois cette difficulté résolue, une incertitude subsiste que,
ni la loi, ni la jurisprudence n'ont explicitement levé : faut-il se référer à l'enfant ou à ses parents seuls pour
apprécier la force majeure ? En d'autres termes, les parents doivent-ils, pour se libérer, prouver qu'un événement
extérieur à tous, imprévisible et irrésistible est la cause du dommage ou peuvent-ils se borner à établir que
l'événement leur était personnellement extérieur, imprévisible et irrésistible ?

Suivant la première branche de l'alternative, les parents devraient, pour s'exonérer, démontrer qu'un événement
qui présente à l'égard de tous les caractères de la force majeure est à l'origine du dommage. Cette conception est
conforme à la logique des responsabilités du fait d'autrui et s'induit d'une comparaison avec la responsabilité des
commettants du fait de leurs préposés. Elle peut également s'appuyer sur une comparaison avec la responsabilité
du fait des choses partant de l'idée qu'il s'agit dans les deux cas d'une responsabilité de plein droit du fait de
l'intervention causale de l'enfant ou de la chose. Par analogie, seule la preuve d'un événement imprévisible,
insurmontable et extérieur pour l'enfant et eux-mêmes serait totalement libératoire. À la réflexion, un tel
événement a pour effet de rompre l'enchaînement causal et, permet par conséquent, aux parents de s'exclure
comme répondants pour autrui. À proprement parler en effet, ils ne sont pas exonérés de leur responsabilité
mais irresponsables parce qu'il manque une condition d'application de l'article 1242, alinéa 4 : le lien de causalité
entre le fait de leur enfant et le dommage.

6677.. –– Suivant la seconde branche de l'alternative, les parents pourraient s'exonérer de leur responsabilité en

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démontrant qu'un événement présentant à leur égard les caractères de la force majeure est à l'origine du
dommage. La formulation de l' article 1242, alinéa 7 du Code civil invite à retenir cette analyse puisqu'il prévoit
que les parents sont responsables “à moins qu'[ils] ne prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à
cette responsabilité”. En faveur de ce mode d'appréciation de la force majeure, on peut ajouter qu'il est plus
logique de se référer aux parents puisque leur responsabilité propre est recherchée (V. H., L. et J. Mazeaud
et F. Chabas, préc., spéc. n° 496. – J. Flour, J.-L. Aubert et E. Savaux, préc. n° 56, spéc. n° 199).

6688.. –– LL''eexxiiggeen
nccee d
d''eexxttéérriioorriittéé –– Mais si l'on veut bien admettre que les parents sont fondés à invoquer un
événement constituant à leur égard un cas de force majeure, leur suffit-il d'établir que l'événement est
imprévisible et irrésistible ou leur faut-il, en outre, établir son extériorité ?

L'enjeu d'une telle question gît dans la possibilité pour ces derniers de s'exonérer en démontrant que le fait
imprévisible et irrésistible de leur enfant constituait un cas de force majeure à leur égard. Cette faculté ne paraît
pas ouverte, le seul mode d'exonération pour les parents consistant à établir un événement présentant pour tous
un événement imprévisible, irrésistible et extérieur. Dans ces conditions, on peut considérer que le fait de
l'enfant, même imprévisible et irrésistible ne suffit pas à exonérer ses parents à défaut d'un élément d'extériorité
(en ce sens et sur ce point, V. J.-Cl. Bizot, La responsabilité civile des père et mère du fait de leur enfant mineur :
de la faute au risque, in Rapp. C. cass. 2002 : Doc. fr., n° 5, p. 171). D'apparence sévère, cette condition n'en est
pas moins doublement justifiée. Elle s'appuie d'abord sur l'idée qu'il est « interdit très logiquement à toute
personne visée par une règle de responsabilité pour autrui de se prévaloir, à titre de cause étrangère, du fait de
celui dont elle est appelée à répondre » (G. Viney et P. Jourdain, préc. n° 13, spéc. n° 388). Elle s'explique ensuite
par la nécessité de ne pas saper le régime de la responsabilité de plein droit des parents du fait de leurs enfants
mineurs en admettant trop largement les possibilités d'exonération en faveur des parents. À l'heure où la
responsabilité parentale est devenue un mécanisme d'indemnisation, il n'est plus temps de raisonner à partir des
concepts de la responsabilité civile.

6699.. –– SSoollu
uttiioon
nss jju
urriissp
prru
uddeen
nttiieelllleess –– De longue date, la Cour de cassation n'admet que restrictivement les
causes d'exonération. En témoigne un arrêt rendu par la Cour de cassation le 2 décembre 1998 ( Cass. 2e civ.,
2 déc. 1998, n° 96-22.158  : JurisData n° 1998-004613  ; Bull. civ. II, n° 292 ). Dans cette affaire, une mineure de 14
ans circulait normalement dans les allées d'un magasin en compagnie de sa mère lorsqu'elle a glissé inopinément
et fait choir un présentoir dont le contenu s'est brisé. Pour écarter la responsabilité de la mère, les juges du fond
ont relevé que le comportement de l'enfant avait été « suffisamment imprévisible pour qu'elle n'ait pu
l'empêcher ». La Cour de cassation a censuré cette décision pour manque de base légale en rappelant la nécessité
de caractériser l'une des causes d'exonération de la responsabilité de plein droit encourue par les parents. C'est
dire qu'un fait de l'enfant, même s'il est imprévisible et irrésistible ne constitue pas une cause d'exonération pour
ses parents. Cette solution a été reprise par la suite, la Cour de cassation ayant estimé qu'une cour d'appel ne
peut débouter le Fonds de garantie des victimes d'infraction, subrogé dans les droits des ayants droit d'une
victime, sans caractériser l'une des causes d'exonération de la responsabilité de plein droit encourue par les père
et mère ( Cass. 2e civ., 18 mai 2000, n° 98-20.468  : JurisData n° 2000-001981  ; Resp. civ. et assur. 2000, comm.
254  ; RJPF 2000, p. 22 , note F. Chabas).

Par un arrêt du 17 février 2011 ( Cass. 2e civ., 17 févr. 2011, n° 10-30.439 , préc. n° 62) la Cour de cassation paraît
admettre que les parents peuvent s'exonérer en invoquant une cause étrangère présentant, à leur égard, les
caractères de la force majeure. Dès lors, la Cour régulatrice confirme que les possibilités d'exonération sont
particulièrement réduites (F. Leduc, La responsabilité des père et mère du fait de leurs enfants, préc. n° 8, spéc.
n° 243-69. – Ph. Brun, préc. n° 1, spéc. n° 441). Pratiquement, le seul moyen de s'exonérer consiste pour les
parents dans l'invocation d'un événement extérieur à tous, imprévisible et irrésistible les plaçant dans
l'impossibilité d'éviter la survenance du fait dommageable, ce qui recouvre des hypothèses peu fréquentes. Les
plaideurs disposent cependant toujours de la faculté d'invoquer subsidiairement la faute de la victime pour
obtenir un partage de responsabilité. La jurisprudence s'est orientée en ce sens à en juger par un arrêt rendu le
20 octobre 2005 (préc. n° 8). Il s'agissait en l'espèce d'un mineur qui, au cours d'une altercation avec un camarade,
a glissé et chuté sur lui et, ce faisant, l'a projeté au sol, lui causant un arrêt cardiaque à l'origine d'une paraplégie.
La Cour de cassation a censuré les juges du fond pour absence de base légale pour avoir décidé que « ce fait,
même non fautif, est par conséquent de nature à engager la responsabilité de ses père et mère, lesquels ne
justifient en effet, ni même n'invoquent un cas de force majeure, sans répondre aux conclusions de la mère et de
son assureur, invoquant expressément la faute totalement ou partiellement exonératoire de la victime ».

Contraints par des causes d'exonération particulièrement étroites, il reste aux parents à puiser dans la variété
des recours récursoires pour tenter de faire transférer sur autrui la charge finale de l'indemnisation.

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