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Delerm, Philippe – Autumn

Editions Folio
Autumn, c'est une fin qui n'en finit pas (celle de Lizzie, celle des préraphaélites, celle de
Dante), Autumn c'est le sacre de l'Automne et de ce qui meurt dans la beauté, Autumn c'est la
version poétique de Nous ne vieillirons pas ensemble.

p.14
"Rossetti dévala l'escalier, renversant un frêle guéridon d'aspect gothique : un vase japonais
en camaïeu bleu pâle vola en mille éclats, mais il n'y prit pas garde."
Très cinématographique.

p.46
"Il parlait sans les regarder, les yeux tournés vers la fenêtre battue d'une averse de pluie
gelée". Cinématographique et plein de sens symbolique.

p.56
"Rossetti éprouvait une étrange jouissance à voit ainsi bafoués l'ordre public et la propriété.
Au fond des bas quartiers, toutes les valeurs de l'establishment britannique étaient perverties,
renversées. Dante Gabriel aimait qu'il en fût ainsi. Il aurait pu se sentir en danger, devenir la
proie des swell mobs; mais quelque chose dans son attitude devait le situer d'emblée de
l'autre côté, du côté des voleurs, des criminels, des prostituées."
Description intéressante d'une sensation, qui fait que tout le monde n'est pas, soit un flic soit
un bandit.

p.60
"Moi, je suis celui qui reste en dehors de la danse. Il y a cette nuit dans Londres des gens qui
dorment à poings fermés, et tant d'autres qui dansent. Et moi, je ne voudrais jamais ni dormir
ni danser, pourquoi ?"

p.87
Une lettre de Rosseti à Ruskin.

p.99
"L'épisode" de la baignoire

p.101
Dans l'atelier de Millais, la toile inachevée, qu'il poursuit :
"au milieu de l'eau sombre, une grande tâche blanche demeurait"

p.102
Elisabeth Siddal pense : "devenir folle, pourquoi pas"

p.130
De Ruskin à Euphémia
"Puisque vous tenez à connaître en public ma pensée intime, je vous dirai tout net que, pour
le véritable créateur, les enfants ne peuvent être que des parasites, des obstacles

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supplémentaires sur un chemin déjà semé d'embûches. Pour ma part, je ne pourrais imaginer
bâtir une œuvre en leur présence" […]
puis à Millais et à Brown, qui dit s'épanouir artistiquement depuis qu'il est père :
"Sottises ! L'art est par lui-même un enfantement. LE créateur, s'il veut l'être vraiment, doit
devenir à la fois l'homme, la femme, et l'enfance. J'ai l'enfance, appuya t-il, en faisant glisser
sur l'assistance son regard de glacier menaçant. L'enfance, et non l'enfant. L'enfance, ce
pouvoir miraculeux de fondre les sensations, de ne rien séparer, de devenir les choses et de
supprimer les frontières. Comme dans le principe divin, il y a chez l'artiste ce mystère d'une
trinité, qui fait sa force et son déchirement. Un homme qui se sent père, regarde avec
satisfaction croître en lui l'idée de la paternité, efface nécessairement en lui la femme,
l'enfance, et son pouvoir de bouleverser le monde, de réinventer l'univers."
[…]
Et Dante, quand on l'interroge sur son avis, répond cela :
"Pour moi, l'artiste n'existe pas sans l'amour. Un amour impossible souvent, comme celui de
Dante cherchant dans l'au-delà sa Béatrice. Mais, même quand les amants sont réunis, s'ils
ont l'art pour chemin, ils ne doivent pas je crois se dissoudre dans l'enfance, la création d'un
être différent, mais se chercher infiniment dans le regard de l'autre, aller toujours plus loin
vers le secret de ce miroir. L'artiste ne cherche pas le bonheur d'un épanouissement terrestre,
mais reste au bord de la fontaine, sans étancher jamais sa soif d'image et de secret".

p.206
Dans une très belle lettre de Lizzie à Dante, elle parle de sa fonction de modèle :
"Vous m'aviez dit un jour que vous étiez né pour concevoir, non pour réaliser. Je me sens
pour ma part faite pour refléter, et non pour être".

p. 210
"tout indiquait ici qu'on ne recevait pas, qu'on avait pas conçu une vitrine pour le regard des
autres, mais une pièce où le visiteur aurait envie de parler doucement, de choses simples et
vraies, entre deux silences sans gêne, en feuilletant un vieil album, ou en regardant le jardin
se découper par la porte-fenêtre"

p.294
"Des toiles d'araignées pendaient des plafonds et voilaient les lambris. Les hamsters
dévoraient les tapis, les paons venaient mourir sur les sofas"

p.254
Le suicide d'Elizabeth Siddal

p.272
La séance de pose avec Charles Dodgson

p.290
La lettre de Ruskin à propos de la pureté de l'enfance

p.293
Très beau chapitre de déchéance

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