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HISTOIRE DE L’ÉGLISE À L’ANTIQUITÉ

TABLE DES MATIÈRES

I) LE JUDAÏSME AU IER ET IIÈME SIÈCLES 3


1) LA PALESTINE SOUS LA DOMINATION ROMAINE 3
2) LA DIASPORA 3
3) LES COURANTS DU JUDAÏSME 3
4) LES GUERRES DES JUIFS 4
A) 1ÈRE RÉVOLTE 4
B) 2ÈME RÉVOLTE 4
C) LE JUDAÏSME RABBINIQUE 4

II) LES RELIGIONS DANS L’EMPIRE ROMAIN 4


1) LES EMPEREURS AUX IER ET IIÈME SIÈCLES 4
2) LA RELIGION ROMAINE 5
B) LE CULTE IMPÉRIAL 5
C) LES RELIGIONS ORIENTALES 5

III) CHRISTIANISME ET JUDAÏSME 6


1) DÉFINIR LE JUDÉO-CHRISTIANISME 6
2) LA PREMIÈRE GÉNÉRATION CHRÉTIENNE (30-50) 6
3) LA DEUXIÈME GÉNÉRATION CHRÉTIENNE (50-70) 7
4) LA TROISIÈME GÉNÉRATION CHRÉTIENNE (70-90) 7
5) LA SÉPARATION (APRÈS 90) 7
6) LES GROUPES JUDÉO-CHRÉTIENS 8
7) LES PÈRES APOSTOLIQUES ET LE JUDAÏSME 8

IV) LES COMMUNAUTÉS CHRÉTIENNES DANS LES TROIS PREMIERS SIÈCLES 9


1) L’ÉGLISE D’ANTIOCHE 9
A) ANTIOCHE AU DÉPART 9
B) L’ÉGLISE D’ANTIOCHE, AU DÉBUT DU IIÈME SIÈCLE 9
2) L’ÉGLISE DE ROME 10
A) COMMUNAUTÉ JUIVE 10
B) LA COMMUNAUTÉ CHRÉTIENNE 10
3) L’ÉGLISE D’ALEXANDRIE 10
A) LA COMMUNAUTÉ JUIVE 10
B) LES DÉBUTS DU CHRISTIANISME À ALEXANDRIE 11
4) L’AFRIQUE CHRÉTIENNE 11
A) LA SITUATION 11
B) CYPRIEN 11
C) LA CRISE DONATISTE 12

V) LE SIÈGE ROMAIN DANS LES TROIS PREMIERS SIÈCLES 12


1) LA FIGURE DE PIERRE 12
2) LES ÉVÊQUES DE ROME AU PREMIER SIÈCLE 13
3) LES PAPES DU DEUXIÈME SIÈCLE 13
4) LES HÉRÉSIES DU DEUXIÈME SIÈCLE 14
5) LE PAPE VICTOR 14
6) LES PAPES DE LA PREMIÈRE MOITIÉ DU TROISIÈME SIÈCLE 15
7) ÉTIENNE ET CYPRIEN (254-257) 15
8) LES PAPES DE LA SECONDE MOITIÉ DU IIIE SIÈCLE 15
9) LES CATACOMBES 16

VI) LA POLITIQUE IMPÉRIALE ET LE CHRISTIANISME DANS LES TROIS PREMIERS SIÈCLES 17


1) L’OPINION DES PAÏENS À PROPOS DES CHRÉTIENS 17
2) L’INCENDIE DE ROME SOUS NÉRON 17
3) LA LETTRE DE PLINE LE JEUNE À TRAJAN (111-112) 18
4) LES PERSÉCUTIONS AU IIE SIÈCLE 18
5) LES DÉCRETS ANTICHRÉTIENS 19
6) LA DERNIÈRE GRANDE PERSÉCUTION SOUS DIOCLÉTIEN 20

VII) L’EMPIRE CHRÉTIEN 21


1) L’AVÈNEMENT DE CONSTANTIN 21
2) LA QUESTION RELIGIEUSE SOUS CONSTANTIN 22
3) LA THÉOLOGIE POLITIQUE DE L’EMPIRE CHRÉTIEN 23
A) L’EMPEREUR 23
B) LE CODE THÉODOSIEN 23
C) DE LA TOLÉRANCE DE TOUTES LES RELIGIONS À L’INTÉGRATION DE L’ÉGLISE DANS L’ÉTAT CATHOLIQUE 23
D) LA LÉGISLATION RELIGIEUSE 23
E) LE TOURNANT DE 380 24
4) ARIANISME ET PAGANISME AU POUVOIR 25
5) LA FIN DE L’EMPIRE ROMAIN D’OCCIDENT 26

VIII) LA MISE EN PLACE DES INSTITUTIONS ECCLÉSIALES 27


1) LE CANON DES ÉCRITURES 27
2) LES INSTITUTIONS DE L’ÉGLISE LOCALE DANS LES PREMIERS SIÈCLES 27
3) LES INSTITUTIONS DE L’ÉGLISE LOCALE À PARTIR DU IIIÈME SIÈCLE 27
4) L’ÉGLISE UNIVERSELLE 28
5) LES PAPES DE LA PREMIÈRE MOITIÉ DU IVÈME SIÈCLE 29

IX) LA LITURGIE DANS LES PREMIERS SIÈCLES 30


1) DÉFINITION ET SOURCES 30
2) LES PREMIÈRES ÉGLISES 30
3) LE BAPTÊME DES ADULTES DANS LES PREMIERS SIÈCLES 31
4) LE BAPTÊME DES PETITS ENFANTS 33
5) LE RE-BAPTÊME DES HÉRÉTIQUES 33
6) L’EUCHARISTIE 34
7) LE TÉMOIGNAGE D’HIPPOLYTE DE ROME 34
8) LA CRÉATION DES FORMULAIRES EUCHARISTIQUES 35
9) LA DISCIPLINE PÉNITENTIELLE ANTIQUE 36
10) LA PÉNITENCE CANONIQUE DU IVÈME AU VIÈME SIÈCLE 36

X) LES PREMIERS CONCILES (1) 37


1) LE DÉBAT TRINITAIRE AU IVÈME SIÈCLE 37
2) LE CONCILE DE NICÉE 38
3) LE PREMIER CONCILE ŒCUMÉNIQUE DE CONSTANTINOPLE 41
4) LES PAPES DAMASE ET LÉON 41

XI) LES PREMIERS CONCILES (2) 43


1) LES ORIGINES DE LA QUERELLE SUR LES DEUX NATURES 43
2) CYRILLE D’ALEXANDRIE ET NESTORIUS 43
3) LE CONCILE D’ÉPHÈSE (431) 44
4) LE “BRIGANDAGE D’ÉPHÈSE” (449) 45
5) LE CONCILE DE CHALCÉDOINE (OCTOBRE 451) 46
6) DE LA MISE EN DISCUSSION DE CHALCÉDOINE AU DÉBAT SUR LE MONOTHÉLISME 47
7) LA QUESTION PÉLAGIENNE 49

XII) LA DIFFUSION DU CHRISTIANISME 50


1) L’EXPANSION MISSIONNAIRE DANS LES TROIS PREMIERS SIÈCLES 50
2) L’EXPANSION CHRÉTIENNE À PARTIR DU IVÈME SIÈCLE 52
3) « PASSONS AUX BARBARES ! » 55
4) SAINT ANTOINE ET LES DÉBUTS DU MONACHISME 56
5) SAINT PACÔME ET LES CÉNOBITES 56
6) LES DÉBUTS DU MONACHISME EN OCCIDENT 57

I) LE JUDAÏSME AU IER ET IIÈME SIÈCLES


1) LA PALESTINE SOUS LA DOMINATION ROMAINE
 Pompée intervient en Palestine pour arbitrer le conflit entre les deux fils du roi Alexandre Jannée
(103-76 av. J.-C.).
 Il fait porter son choix sur Hyrcan II dont il fait un vassal et pénètre alors à Jérusalem.
 Mais, dans la guerre qui l’oppose à César, des juifs prennent le parti de ce dernier, qui,
après la victoire de Pharsale (46 av. J.-C.), les remercie en donnant une charte au peuple juif :
ils doivent verser un impôt et sont considérés comme « peuple ami et allié du peuple romain
».
 Hérode le Grand va régner comme roi, vassal des Romains
 À sa mort, le royaume est divisé en 4 (tétrarchie) :
 Dans le nord, Hérode Philippe
 En Galilée et Pérée, Hérode Antipas
 En Judée, Samarie et Idumée : Hérode Achelaus (remplacée par un procurateur en l’an 6)
2) LA DIASPORA
 L’empire romain a accordé le même statut aux juifs de la Diaspora qu’à ceux qui résident en
Palestine.
 Pour le culte, ils utilisent la Septante. Ils pratiquent le culte synagogal. La synagogue est le lieu
de rassemblement. Cette présence juive en milieu païen conduit à des conversions. On distingue :
 les “craignant-Dieu” : ils doivent avoir foi au Dieu unique, pratiquer le culte à la
synagogue, respecter les données fondamentales de la loi juive ; ils ne sont pas astreints à la
circoncision ;
 les “prosélytes” : ils doivent satisfaire à trois conditions : la circoncision, le baptême, le
sacrifice pour l’expiation des péchés.
3) LES COURANTS DU JUDAÏSME
 Les pharisiens
 Le courant pharisien apparaît à peu près un siècle avant Jésus-Christ, en lien avec le
développement du rôle des scribes qui s’attachent à l’interprétation de la Torah, parfois
minutieuse. Le courant pharisien sera le seul à survivre à la guerre juive et il donnera
naissance à la tradition rabbinique.
 Les Saducéens
 Leur nom semble dériver de celui du prêtre Sadoq, établi par Salomon à la tête des
prêtres de Jérusalem, ce qui est lié à la place centrale qu’ils donnent au sacerdoce.
 Attachés à la lettre de la Torah, ils récusent la Torah orale, à la différence des pharisiens,
mais, parfois, vu la force du courant pharisien, ils sont obligés de se soumettre à la lecture
que celui-ci donne des prescriptions légales
 Les Esséniens
 Ce qui les caractérise, c’est la multiplication des rites de pureté ou ablutions. Il y a aussi
un vif sentiment de solidarité avec les anges et le monde céleste. Les repas pris en commun
jouent un rôle important dans la vie de la communauté.
 Le groupe a pu voir le jour au milieu du IIème siècle avant J.-C. en réaction contre
Antiochus Épiphane
 Les Zélotes
 Le groupe des zélotes se serait organisé en 6-7 de J.-C. autour de Judas le Galiléen quand
la Judée serait devenue province romaine. Il traduit le nationalisme juif sous sa forme
virulente. Ses membres veulent restaurer une théocratie, en commençant par chasser les
occupants païens.
 Les Baptistes
 Les baptistes sont moins connus car n’ayant pas laissé d’écrits significatifs. Les rites
baptistes, pratiqués dans l’eau courante, entendent pardonner les péchés et se substituer aux
sacrifices du Temple.
4) LES GUERRES DES JUIFS
A) 1ère révolte
 La première grande révolte repose sur le terreau des mouvements prophétiques et de la
violence endémique (les sicaires).
 Mais elle est provoquée, dans le court terme, par les contraintes financières maladroites
que veut faire peser le procurateur romain Florus Gessius.
 Devant l’incapacité du procurateur à réprimer les troubles, c’est le gouverneur de Syrie, Cestius
Gallus, qui intervient. Il arrive à la tête d’une importante armée, plus de 20 000 fantassins, 2500 cavaliers,
2000 archers.
 En novembre 66, il établit son camp sur le mont Scopus, près de Jérusalem, mais échoue
dans la prise du Temple.
 Néron confie la direction de la guerre à Vespasien, issu d’une famille relativement modeste,
proconsul d’Afrique depuis 54. Il a sous ses ordres une armée de 60 000 hommes
 À la fin de 67, la Galilée est totalement réduite.
 Au début de l’année 68, les insurgés ne contrôlent plus que la ville sainte, la région de
Bethléem et les forteresses de Massada et Machéronte.
 Au début de 70, Titus (fils de Vespasien), ayant renforcé ses troupes, monte contre
Jérusalem
 la fin du mois de juillet, la forteresse, l’Antonia est prise et l’effort se porte sur le Temple,
qui est incendié à la fin du mois d’août.
 La Palestine perd toute trace d’autonomie.
 mais Vespasien n’a pas confisqué la totalité du pays pour le distribuer à des colons
romains, comme il aurait pu le faire. Il s’est contenté d’installer 800 vétérans romains à
Emmaüs.
 En outre, Vespasien a supprimé la liturgie du temple ainsi que le Sanhédrin, le conseil
du grand prêtre.
B) 2ème révolte
 Après une révolte des juifs d’Égypte en 115, un nouveau soulèvement se produit en Judée (132-
135) déclenché par un projet d’Hadrien d’installer une colonie romaine à Jérusalem.
 La rébellion est menée par Bar Kosheba, reconnu comme messie par certains rabbins
 Au cours des combats, la XXème légion, envoyée d’Égypte en Judée (5 500 hommes) est
anéantie
 Hadrien envoie son meilleur général, Iulius Severus, qu’il fait venir de Bretagne. En 135, les
derniers insurgés sont assiégés dans Bettir (Bethar, à 11 km au sud-ouest de Jérusalem), sont pris par
les Romains et massacrés.
C) Le judaïsme rabbinique
 un rabbin, Johanan Ben Zakkai, l’un des chefs du Sanhédrin, fait de Jamnia (= Jabneh) le
centre spirituel du judaïsme en adaptant celui-ci aux circonstances.
 À l’un de ses disciples qui se lamente sur la cessation des sacrifices au Temple, il répond
que la miséricorde vaut aussi pour l’expiation des péchés. Il associe la pureté du cœur à la
pratique de la Loi.
 À la manière des prophètes, il explique les malheurs d’Israël par ses fautes.
 Les maîtres des académies rabbiniques sont les interprètes de la Loi écrite. On recueille leurs
paroles et on constitue des recueils de Halakhot, normes juridiques ayant force de loi.
 La répression de la nouvelle révolte juive des années 130 entraîne la fermeture de l’académie
de Jamnia, en 132.
 Le nassi (patriarche) et les maîtres survivants se réfugient alors en Galilée et ils décident de
codifier la tradition orale : ce sera la Mishna, réalisée par Yehuda ha-Nassi, vers 200 après J.-C.
II) LES RELIGIONS DANS L’EMPIRE ROMAIN
1) LES EMPEREURS AUX IER ET IIÈME SIÈCLES
 Plutarque propose un monothéisme syncrétique comme religion unificatrice de l’empire
 Au cours du Ier siècle, selon les catégories mises en place par l’historien Tacite (55-120), deux
dynasties se succèdent :
 les Julio-Claudiens : Octave, Tibère, Caligula, Claude, Néron
 les Flaviens (jusqu’à la mort de Domitien) : Vespasien, proclamant le principe de
succession filiale, fonde la dynastie. Lui succèdent Titus et Domitien
 Succèdent ensuite :
 Nerva (96-98), un ancien consul qui désigne
 Trajan (98-117), un général qui désigne :
 Hadrien (117-138)
 Antonin le Pieux (138-161) (dynastie des Antonins)
 Marc-Aurèle (161-180), qui lui succède, nourri de stoïcisme et philosophe lui-même, est
contraint de mener des guerres incessantes, en Arménie et au nord de l’Empire, ainsi qu’à la
frontière orientale danubienne.
 Commode (180-192) son fils apparaît tout d’abord sage, mais il se montre ensuite enivré
par le pouvoir au point que la postérité le juge fou
2) LA RELIGION ROMAINE
 La religion romaine, qui est beaucoup moins une conviction qu’un ensemble de gestes cultuels,
vise à maintenir le lien de paix avec les dieux (la pax deorum).
 au niveau de la maison : les dieux “domestiques” (lares et pénates) disposent d’un petit
sanctuaire : une niche ménagée dans la muraille et fermée par deux volets. Sur un autel brûle
le feu sacré pour célébrer le culte des morts. Le père de famille, prêtre domestique, doit
apaiser leur courroux ou attirer leur bienveillance
 Au niveau de la cité, il y a le culte public. Les dieux grecs ont reçu des noms latins :
Jupiter, Junon, Minerve (la triade capitoline)
 Les prêtres sont issus des familles patriciennes ; les plus importants sont les flamines, attachés à
tel ou tel dieu. Le sacrifice est une sorte de contrat entre les dieux et les hommes : en échange d’un
sacrifice, on espère obtenir la victoire.
B) Le culte impérial
 Auguste met en place le culte impérial qui sert de garantie du loyalisme politique.
 Ainsi, au fil du temps, la titulature s’accentue : l’empereur est dominus, deus noster (le seigneur,
notre dieu).
 Dès le second siècle, les philosophes stoïciens énoncent l’idée que l’empereur est assisté
quotidiennement par une providence céleste, afin d’assurer le bon ordre de l’empire et la
sécurité de tous
 Personne n’a jamais pensé à le prier pour qu’il accorde un salut extra-terrestre post
mortem, mais seulement pour qu’il réalise le bonheur de tous, ici-bas
 Ce culte, obligatoire pour les seuls magistrats, officiers et soldats, sera étendu à tous les habitants
de l’Empire, à partir de 251, sous Dèce
C) Les religions orientales
 Ils sont très différents de la religion romaine car ils s’adressent à la sensibilité, à l’émotivité du
fidèle, et l’invitent à vivre lui-même dans des épreuves initiatiques exigeantes.
 Ce sont des religions existentielles, répondant aux besoins spirituels des individus, qui poussent
à la formation de communautés d’initiés, de fidèles.
 Ces cultes induisent une croyance en une vie nouvelle, une forme de salut. Ils amènent aussi à
l’observance d’une règle morale stricte, notamment pour les cultes d’Isis et de Mithra
 Les mystères d’Éleusis sont les plus connus de l’Antiquité
 Le culte de Cybèle est le premier culte oriental adopté à Rome
 Au IIIème siècle av. J.-C., la religion égyptienne connaît des mutations qui la rendent
acceptable aux nouveaux conquérants. Dans le panthéon égyptien, Isis est la déesse la plus
connue et la plus populaire. Elle rend à la vie Osiris, son époux défunt et s’occupe de son fils
Horus. Elle apparaît donc comme déesse funéraire et protectrice des femmes et des enfants.
 Le culte de Mithra (point 13 de l’annexe) est une religion à mystère, importée de Perse.
Il apparaît cité dans l’Avesta, livre sacré du mazdéisme, la religion de l’Iran ancien
 Le culte du soleil est introduit à Rome par l’empereur Élagabal (218-222). En 274,
Aurélien (270-275), fils d’une prêtresse du dieu solaire, né en Pannonie, chef militaire
victorieux, attribue ses succès à ce dieu et décide d’organiser un culte en son honneur.
L’hommage au soleil apparaît comme symétrique de celui de l’empereur. Ce culte se
poursuit jusqu’au règne de Constantin dont les monnaies en font mention jusqu’à 323 ; le
collège des pontifes ne s’éteint que plus tard.
III) CHRISTIANISME ET JUDAÏSME
1) DÉFINIR LE JUDÉO-CHRISTIANISME
 Le judaïsme se définit par quatre piliers :
 Le monothéisme
 l’élection d’Israël
 la Torah
 Le temple
 C’est F.C. Baur qui, en 1830, a créé la notion de judéo-christianisme
 le premier courant regroupant des chrétiens de tendance judaïsante, le second des
chrétiens de tendance hellénistique.
 Simon Claude Mimouni pose comme définition :
 « Le judéo-christianisme ancien est une formulation récente désignant des juifs qui ont
reconnu la messianité de Jésus, qui ont reconnu ou qui n’ont pas reconnu la divinité du
Christ, mais qui tous continuent à observer la Torah. » Cependant il invite à nuancer cette
définition si on veut l’appliquer à la période antérieure à la séparation, soit avant 135
environ.
 Paul Mattei voit deux acceptions au terme judéo-christianisme :
 Les chrétiens jérusalémites de la première génération
 les tenants du premier courant s’étant tournés vers une christologie adoptianiste, avec un
flou sur leurs relations avec la communauté de Jérusalem.
 S.-C. Mimouni pose une distinction entre les polémiques qui ont eu lieu à cette époque. Il en
voit trois :
 l’une entre les chrétiens et les pharisiens, portant sur le conflit des interprétations
(polémique externe),
 une autre, interne cette fois-ci, entre les judéo-chrétiens et les helléno-chrétiens,
 une autre, opposant le christianisme et le judaïsme à partir du milieu du IIème siècle, et
découlant des rivalités entre les prosélytismes menés par les deux religions.
2) LA PREMIÈRE GÉNÉRATION CHRÉTIENNE (30-50)
 La communauté de Jérusalem joue un rôle central, et même d’inspection, notamment par
rapport à celle d’Antioche.
 Pierre se consacre à une activité missionnaire
 Parmi les juifs aisés et cultivés, il y aurait un mouvement judéo-chrétien hellénophone dont les
membres, se démarquant du ritualisme et prenant de la distance par rapport au Temple, valoriseraient
au contraire une interprétation morale de la Torah, jugeant secondaires les interdits alimentaires et de
pureté. Étienne serait un porte-parole de ce courant
 La persécution qui suit son massacre (et qui épargne le groupe réuni autour de Jacques)
provoque la dispersion de ce courant, qui se met à intégrer des non-juifs, comme à
Antioche, d’où le nom de chrétiens qui leur est donné
 À partir des lettres pauliniennes et des Actes des Apôtres, Ch. Perrot distingue différentes
tendances au sein de la première génération chrétienne :
 des judéo-chrétiens radicaux (Ac 15,1.5) qui estiment que les croyants doivent continuer
d’appartenir au Peuple élu
 une tendance plus souple, avec Jacques de Jérusalem et Pierre, qui, sans aller jusque-là,
estiment que les pagano-chrétiens doivent adopter des règles alimentaires leur permettant de
garder le contact avec les chrétiens d’origine juive
 Paul, en revanche, estime que les pagano-chrétiens n’ont pas à judaïser, ils sont égaux aux
juifs dans la foi
 une tendance ultra-paulinienne va jusqu’à rejeter la loi mosaïque, cela conduira au
marcionisme qui sera récusé par l’Église
 Les pagano-chrétiens sont aussi partagés :
 certains, avant de devenir chrétiens, ont fréquenté le judaïsme, en tant que “craignant-
Dieu”
 certains, devenus chrétiens et découvrant alors la tradition juive, se mettent à judaïser,
laissant ainsi entendre que la justification serait donnée par la pratique de la loi et non plus
par l’adhésion au Christ : Paul rejette violemment cette attitude
 d’autres, approuvés par Paul, reconnaissent la pleine valeur du salut en Jésus-Christ ;
 un autre courant, enfin, extrémiste, en vient à rejeter toute loi et s’acheminera vers le
gnosticisme, se proposant d’ajouter des enseignements de sagesse à l’Évangile.
3) LA DEUXIÈME GÉNÉRATION CHRÉTIENNE (50-70)
 Le débat ne porte plus sur la question de savoir s’il faut, ou non, quitter Israël, mais chacun des
deux groupes conteste à l’autre sa légitimité.
 C’est dans ce contexte qu’intervient notamment l’exécution de Jacques de Jérusalem,
en 62
 Paul fonde des communautés mixtes où se résorbent les différences sociales aussi bien que
religieuses. Paul n’innove pas sur la structure, mais sur le statut reconnu à chacun : à la différence de la
Synagogue, hommes et femmes se voient ici reconnaître une égale dignité religieuse »
 Alors que la synagogue différenciait ses adeptes en trois cercles selon l’observance de la Torah
(juifs, prosélytes et craignant-Dieu), Paul nie ces divisions en offrant une pleine participation au salut
sans passer par la circoncision et l’obéissance à la Torah.
 Le judéo-christianisme apocalyptique, qui existait déjà à la génération précédente, porteur
d’un message de rupture radicale avec le monde, émigre en direction de la Syrie
 Les prophètes de ce courant s’estiment persécutés comme l’ont été ceux de l’Ancien
Testament. C’est alors qu’aurait été réalisée la traduction en grec de la source Q, recueillie
ensuite à Antioche par Matthieu et Luc
 L’évangile de Marc est rédigé peu avant la destruction du Temple en 70, dans un contexte
helléno-chrétien
 Les débuts de la rédaction de l’évangile de Jean (qui a dû s’étaler sur une longue période : entre
50 et 90) ont dû s’opérer dans un contexte palestinien.
 Les facteurs de séparation d’avec le judaïsme s’accentuent, ce qui se marque par une prise de
distance à l’égard des composantes qui le définissent :
 monothéisme et affirmation que Jésus est l’égal de Dieu (Jn 5,18) ;
 exclusivisme de l’élection d’Israël et intégration de non-juifs sans passage par le judaïsme
mais par appel direct de Dieu ;
 la Torah et la dispense de la circoncision, l’attachement au Christ étant valorisé ;
 la relation au Temple et l’expiation des péchés obtenue par le sacrifice du Christ sur la
croix.
4) LA TROISIÈME GÉNÉRATION CHRÉTIENNE (70-90)
 Le judaïsme se refonde sous la houlette du pharisaïsme, donc dans une perspective de stricte
orthodoxie bien encadrée (et pratiquant plus couramment l’exclusion), alors que le judaïsme préalable
à la guerre des juifs était très divers
 L’évangile de Matthieu, qui montre un judaïsme en situation de refus à l’égard du
christianisme, semble avoir été élaboré au sein d’une communauté judéo-chrétienne qui aurait été
exclue de la synagogue mais qui revendiquerait à son profit la tradition juive en s’estimant lui être
fidèle.
 La rédaction des écrits lucaniens s’opère vers 80-90. Ces textes montrent le regard qu’un
chrétien porte sur les relations entre juifs et chrétiens, alors qu’il s’adresse à un public helléno-chrétien
et qu’il écrit en dehors de la mouvance judéo-chrétienne.
 L’épître aux hébreux date de cette période
5) LA SÉPARATION (APRÈS 90)
 La séparation s’exprime dans la birkat-ha-minim, “bénédiction” – ou plutôt exclusion – pour des
non-juifs qui est insérée (vers 85-95) dans le Talmud de Babylone et dans celui de Jérusalem
 Dans ce monde pharisien, l’exclusion ne porte pas seulement sur les chrétiens, mais s’exprime
aussi à l’égard des autres groupes juifs : après l’assemblée de Yabneh, les partisans de Beth Hillel
marginalisent ceux de Beth Shamaï.
 Le début du IIème siècle marque l’émergence de “la grande Église”, c'est-à-dire un christianisme
opérant la synthèse des principaux courants : la mouvance palestinienne (y compris Luc et Actes), la
tradition de Pierre (Marc) et celle de Matthieu. C’est une période de structuration de l’identité
chrétienne, avec le lancement du processus de canonisation des Écritures, la généralisation de
l’épiscopat monarchique et l’adoption de professions de foi.
 Le portrait que l’évangile de Jean (achevée peu après 90, en Syrie ou à Éphèse) donne des juifs
témoigne bien de la rupture : ils sont présentés comme un front hostile à Jésus, non pas à cause de leur
judaïté mais parce que les juifs contemporains sont en réalité fils du démon (8,44).
 S.-C. Mimouni estime qu’« à partir de la seconde moitié du IIème siècle, les chrétiens d’origine
grecque ne semblent plus avoir conscience de tout ce qu’ils doivent au judaïsme, du point de vue
liturgique, exégétique et institutionnel
6) LES GROUPES JUDÉO-CHRÉTIENS
 Au IIème siècle, les judéo-chrétiens n’apparaissent pas dans les listes d’hérésies
 On ne distingue pas non plus entre orthodoxes et hétérodoxes.
 Sur la question de l’hérésie, il y a plusieurs théories :
 la théorie classique : l’orthodoxie précède l’hétérodoxie, présupposition d’une pureté de
la foi et compréhension de l’hérésie comme d’un abandon ou trahison ;
 l’hétérodoxie précède l’orthodoxie (cette thèse postule que les premières formes du
christianisme auraient été jugées plus tard « hérétiques ») ou bien elle se développe
simultanément (thèse de Walter Bauer, 1934) ;
 les orthodoxies (au pluriel) ont précédé l’orthodoxie (thèse d’Alain Le Boulluec en
1985).
 Les nazoréens (grec : nazoraios, latin : nazarenus) sont à considérer comme un courant judéo-
chrétien orthodoxe, à la fois observant quant à la Torah et orthodoxe quant à la divinité de Jésus.
 Justin ne juge pas répréhensible leur attachement aux principes du judaïsme s’ils n’en
font pas une condition sine qua non du salut.
 Irénée affirme que les observances proprement légales, qu’il distingue des préceptes
moraux du décalogue, sont un signe de servitude et doivent être considérées comme abolies
par le Christ libérateur.
 Ce courant dispose de son propre évangile, composé en hébreu mais très tôt traduit en
grec, dont seuls subsistent quelques fragments qui remonte à la fin du Ier ou au début du IIe
siècle : Évangile des hébreux ou des nazoréens
 Il influence par son ascèse le christianisme araméophone qui naît sur les franges de la
Syrie et en Mésopotamie
 Les ébionites
 Le mouvement semble découler en la migration à Pella de la communauté chrétienne de
Jérusalem au temps de la première guerre juive. Les ébionites auraient fait sécession d’avec
les nazoréens sur le point de la reconnaissance de la divinité de Jésus
 Un autre courant judéo-chrétien hétérodoxe est celui des Elkasaïtes
 Origène, repris ici par Eusèbe, relève quatre points de leur doctrine :
 le rejet de certains passages de l’Écriture qu’ils jugent introduits subrepticement dans
la Bible ;
 le rejet total de Paul ;
 l’acceptation d’une permission d’apostasier en temps de persécution par une apostasie
professée seulement de bouche ;
 la foi en un livre qu’ils estiment tombé du ciel dans une vision comme condition
essentielle pour recevoir la rémission des péchés.
 les Symmachiens
 ils considéreraient Jacques frère du Seigneur comme douzième apôtre et comme leur
fondateur.
 Il y aurait chez eux une influence gnostique : pour eux, le Christ s’identifie à Adam et à
l’âme universelle
 Pour Augustin (Contre Faustus), les symmachiens affirment que Jésus n’est pas venu
abroger la Loi et ils observent la circoncision et le sabbat, ainsi que l’interdiction de la
viande de porc.
7) LES PÈRES APOSTOLIQUES ET LE JUDAÏSME
 On trouve seulement une critique de la Loi et des observances juives, au nom d’une lecture
“chrétienne” de l’Écriture
 Loin de reprendre les conceptions pauliniennes de la Loi pédagogue (Ga 3,24), les Pères
apostoliques ne voient dans les prescriptions de la Loi qu’un châtiment ou un remède pour Israël au
cœur dur, infidèle et idolâtre
 Sous l’Empire chrétien, les premières lois limitant les droits des juifs sont édictées dès l’époque
de Constantin
 François Blanchetière estime que la législation sur les juifs n’occupe une place très
secondaire dans l’œuvre constantinienne et qu’on peut comprendre sa sévérité sur la
circoncision de l’esclave non seulement comme un anti-judaïsme théologique chrétien mais
aussi dans la ligne de la législation générale hostile à la conversion en général, considérée
comme abandon de la coutume des ancêtres.
 Fr. Blanchetière voit trois formes d’anti-judaïsme :
 un anti-judaïsme de différenciation : si Tertullien voit les chrétiens apparentés aux juifs,
Lactance les perçoit comme leurs successeurs. Cette différenciation se marque plus fortement
après Nicée et notamment lorsqu’on décide de dissocier la célébration de la Pâque chrétienne
de celle juive.
 un antijudaïsme d’installation : les responsables chrétiens veulent structurer la société à
la lumière de l’Évangile ; le pluralisme religieux (la pax deorum) va tendre à disparaître.
 un antijudaïsme de ressentiment : les juifs s’entêtent dans leur refus de croire, ce sont
des esprits rebelles, à la nuque raide
IV) LES COMMUNAUTÉS CHRÉTIENNES DANS LES TROIS PREMIERS SIÈCLES
1) L’ÉGLISE D’ANTIOCHE
A) Antioche au départ
 Antioche joue un grand rôle au premier siècle chrétien :
 premier lieu d’une mission vers les païens,
 perception de Pierre comme lien d’unité de l’Église,
 lieu d’élaboration de la théologie matthéenne,
 lieu de mise en place de la hiérarchie et de la synthèse théologique d’Ignace sur le Christ
et sur l’Église
 Pour les années 40-70, les sources se limitent à deux textes : Galates 2,11-21 et Actes 11-15.
 Les exégètes s’accordent pour dire que seul le parti des hellénistes a quitté Jérusalem après la
mort d’Étienne.
 C’est dans l’évangile de Matthieu, écrit à Antioche vers 80-90, qu’on trouve une évocation de la
communauté d’Antioche à la période 70-100.
 Dans les documents qui seront à l’origine des évangiles de Matthieu et de Marc, on trouverait les
éléments suivants, provenant des diverses sensibilités présentes dans l’église d’Antioche :
 Certains propos viendraient des extrémistes judaïsants qui dénient la mission vers les
païens : « Ne prenez pas le chemin des païens et n’entrez pas dans une ville de Samaritains ;
allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël » (Mt 10,5-6) ; « Avant que ne
passent le ciel et la terre, pas un iota, pas un point sur l’iota ne passera de la Loi » (Mt 5,18)
 d’autres passages viendraient des partisans de Jacques à Antioche, qui mettent l’accent
sur l’observance stricte de la Loi mosaïque mais selon l’enseignement de Jésus : la colère
proscrite aussi bien que le meurtre (Mt 5,21-24), l’adultère en intention comme en acte (Mt
5,27-29) ;
 les hellénistes seraient à la source des traditions favorables à la mission vers les païens et
hostiles à la dévotion pharisienne à l’égard de la Loi ; ils auraient produit aussi les traditions
liées à l’envoi en mission universelle (Mt 28,16-20), l’histoire des mages, le rejet des
pharisiens (Mt 15,12-14), peut-être aussi les exigences morales rigoureuses révoquant la
lettre de la Loi mosaïque : interdiction des serments et vœux (Mt 5,33-37), interdiction des
représailles légales (Mt 5,38-39a).
 « Matthieu élabore sa vision propre de l’histoire du salut dans le but d’embrasser à la fois le
nouveau et l’ancien
B) L’église d’Antioche, au début du IIème siècle
 Deux témoins :
 Les lettres d’Ignace d’Antioche
 La didachè didach
 Par rapport à la physionomie de l’église que présentait Matthieu, celle que brosse Ignace est très
différente : le groupe des prophètes et docteurs est remplacé par une hiérarchie précise : un évêque, un
groupe de presbytres et un groupe de diacres. L’autorité de l’évêque est absolue : il a le contrôle sur
toute la vie de l’Église
 Meier estime que c’est face aux menaces gnostiques que le groupe des prophètes et docteurs a dû
se structurer de manière plus forte, probablement autour de 100 car, quand Ignace écrit ses lettres,
vers 117-118, le système fonctionne depuis un certain temps
 La théologie d’Ignace combine la pensée paulinienne avec celle johannique sans beaucoup de
références à l’Ancien Testament. Face aux tendances gnostiques, il souligne l’union du divin et de
l’humain en Jésus-Christ et particulièrement l’humanité de Jésus.
2) L’ÉGLISE DE ROME
A) Communauté juive
 La première mention de la colonie juive de Rome remonte à 139 av. J.-C. quand le préteur
Gnaeus Cornelius Hispanus oblige certains de ses membres à repartir de la ville
 La colonie juive de Rome s’accroît des captifs ramenés par Pompée en 61 av. J.-C.
 Au témoignage d’Horace, les préventions contre les juifs demeurent bien vivantes dans la ville,
mais leur colonie se monte à 40 ou 50 000 personnes, avec une quinzaine de synagogues au Ier siècle
 Ils sont victimes d’une expulsion en 19 ap. J.-C., sous Tibère, peut-être à cause de leur
prosélytisme très actif.
 Les échanges demeurent constants entre le judaïsme palestinien et celui romain. On dit que, sous
le règne de Domitien (81-96), quatre rabbins étaient venus de Palestine pour prêcher dans les
synagogues romaines et notamment contre le christianisme, ce dont témoignent des midrashim
B) La communauté chrétienne
 La communauté chrétienne à Rome remonte au moins aux années cinquante car, dans l’épître
aux Romains, datée de 58, Paul dit que « la foi des Romains est célébrée dans le monde entier » (1,8).
 La ville de Rome, à l’époque de Paul, compte plus d’un million d’habitants ; elle a été divisée par
Auguste en quatorze régions administratives, cinq à l’intérieur des anciennes murailles, cinq de part et
d’autres de l’enceinte, quatre au-delà, dont l’une sur la rive droite du Tibre
 Pour la période 65-95, les sources d’information dont nous disposons sur l’église de Rome sont
constituées par la première épître de Pierre, l’épître aux Hébreux et l’épître de Clément de Rome aux
Corinthiens.
 Pour la première épître de Pierre, il y a deux hypothèses de datation :
 soit le milieu des années soixante – et elle serait de la plume même de Pierre –
 soit les années 80, par un pseudépigraphe.
 Beaucoup de commentateurs actuels estiment que l’épître aux Hébreux, dont l’auteur était ignoré
dès l’époque d’Origène, serait adressée à des judéo-chrétiens – certains pensent même à des pagano-
chrétiens – de Rome plutôt que de Jérusalem du fait de la langue grecque élégante, de l’absence totale
de mention du Temple et de la proximité entre les seules indications claires de destinataires (He 13,23-
24) et ce qu’on sait de l’église de Rome :
 L’auteur cite Timothée. Or, en Rm 16,21, Paul place le nom de Timothée au premier rang
de ceux qu’il salue à Rome. La composition de l’épître remonte vraisemblablement aux
années 65-95. R. Brown opte même pour la période 75-95, bien qu’il n’y ait pas dans la
lettre de mention de la destruction du Temple.
 À ces écrits canoniques, il convient d’ajouter la lettre de Clément de Rome. Évêque de Rome, ou
presbytre-évêque, il adresse une lettre aux Corinthiens qui ont interdit d’office des presbytres par
ailleurs irréprochables :
 Clément s’oppose à la destitution des presbytres par les fidèles en mettant en avant une
succession des apôtres qui s’est opérée par le moyen de la désignation par ceux-ci de leurs
successeurs
3) L’ÉGLISE D’ALEXANDRIE
A) La communauté juive
 La diaspora juive d’Égypte remonte au VIe siècle avant J.-C., comme celle de Babylonie.
 La ville d’Alexandrie a été fondée en 331 av. J.-C.
 deux quartiers sur cinq sont occupés essentiellement par des juifs
 Le passage de l’hébreu au grec pour l’étude du texte sacré marque un tournant décisif dans
l’histoire de la communauté juive d’Alexandrie.
 c’est une interprétation théologique qui s’opère
 l’antijudaïsme se répand
 Au moment de la conquête romaine, les juifs d’Alexandrie se rangent d’emblée du côté du
nouvel arrivant. La solidarité entre les juifs d’Égypte et ceux de Palestine joue en ce sens.
 Mais, pour les juifs de la ville, les événements ne répondent pas à leurs espoirs, ils
perdent les emplois que les Ptolémée leur avaient donnés et, bien qu’ayant respecté la
politeuma, Auguste décide en 24, une lourde taxe personnelle ou laographia
B) Les débuts du christianisme à Alexandrie
 Cette pénétration s’est produite très tôt, probablement parmi les juifs de culture hellénistique qui,
soucieux de bien s’intégrer, devaient accueillir des païens sympathisants du judaïsme
 Une école théologique nait au IIème siècle : Pantène, originaire de Sicile, s’établit vers 180 dans
la ville, attire des disciples et touche une frange aisée de la société
 Clément d’Alexandrie lui succède vers 195, puis s’exile chez son disciple Alexandre en
Capadocce
 il semble qu’il faille attendre qu’Origène ait pris la direction de l’école catéchétique (202-
203) pour que celle-ci soit reconnue par l’évêque de la cité (en l’occurrence Démétrios) et
qu’on puisse réellement parler d’école d’Alexandrie
 Alors qu’Origène promouvait une vision communautaire et spirituelle de l’organisation
ecclésiastique, il semble qu’au moment des persécutions (202-203, 206-207), l’Église d’Alexandrie se
soit structurée autour d’un corps hiérarchique (évêque, presbyterium, diacres).
4) L’AFRIQUE CHRÉTIENNE
A) La situation
 L’Afrique romaine est divisée en trois provinces :
 l’Afrique proconsulaire
 la Numidie
 la Mauritanie
 L’Afrique proconsulaire, la plus anciennement occupée et la plus romanisée, correspond à la
Tunisie et la Tripolitaine ; elle a Carthage pour capitale
 Carthage joue un rôle de capitale avec une population de plusieurs centaines de milliers
d’habitants (mais pas les 700 000 que lui attribue Strabon
 L’agriculture est relativement florissante et sert à alimenter l’Italie. La structure sociale se
répartit, pour le monde agricole, entre les grands propriétaires, les ouvriers saisonniers et les petits
paysans qui cultivent de la vigne, des oliviers ou des céréales.
B) Cyprien
 L’œuvre de Cyprien permet de connaître la vie religieuse à Carthage à cette époque.
 il invite à joindre les jeûnes et les larmes à la prière vocale. Quand il parle de « prière
publique »
 Il explique que l’eucharistie est célébrée quotidiennement, mais le matin, contrairement à
la dernière Cène, car c’est la résurrection qui est commémorée
 Il recommande particulièrement de prier trois fois dans la journée, à la troisième, la
sixième et la neuvième heure. Il invite aussi à prier le matin et à la tombée de la nuit.
(office !!)
 Mais des inventaires de biens ecclésiastiques ordonnés en 303 nous révèlent l’existence de
locaux, mobilier, livres et ustensiles cultuels. On peut donc penser qu’au milieu du IIIème siècle, il
existe des édifices à usage cultuels.
 La distinction plebs/clerus était déjà acquise chez Tertullien et Hippolyte vers 200. Cyprien la
reprend à son compte
 Cyprien mentionne sept degrés dans la hiérarchie ecclésiastique : exorcistes, acolytes, lecteurs,
sous-diacres, diacres, prêtres, évêques
 Cyprien utilise le mot presbyterium pour désigner le corps des prêtres
 Le catéchuménat est une institution organisée, au moins depuis l’époque de Tertullien
 Cyprien élabore une discipline pénitentielle. Il reprend Ga 5, 19-21 et résume ainsi, dans le De
bono patientiae, sa liste de péchés mortels : adulterium, fraus, homicidium mortale, en ajoutant
l’idolâtrie.
 L’originalité de Cyprien consiste dans l’appréciation des cas de conscience
C) La crise donatiste
 L’élection du prêtre Cécilien comme évêque est contestée par un parti emmené par Donat, qui
lui reproche d’avoir été ordonné par des “traditeurs”, c’est-à-dire des évêques qui, au moment de la
persécution de 303, auraient livré aux autorités les livres saints.
 Les donatistes en appellent à l’empereur, qui, après avoir tenté de passer le dossier à l’évêque de
Rome, prend les choses en main lui-même, envoie des enquêteurs, convoque un concile en Arles qui
condamne les donatistes.
 Il est amené, en 316, à prendre contre eux des mesures, assimilées à une véritable
persécution, mesures qu’il suspend en 320, ce qui a pour effet de perpétuer le schisme.
 Au total, les efforts d’Augustin pour ramener les donatistes à l’unité n’aboutiront pas à un plein
succès.
 Le schisme donatiste a pour cause lointaine, à la fois une certaine mentalité intransigeante,
présente déjà chez Tertullien, et aussi la terrible persécution de Dioclétien (303-305) qui ordonnait aux
chrétiens de livrer les Écritures
 Le schisme éclate en 312 quand Cécilien, peu aimé du peuple, est consacré évêque de
Carthage et quand les évêques de Numidie élisent alors un autre évêque, Majorinus, bientôt
remplacé par Donat, qui demande à Constantin de déposer Cécilien. Mais l’empereur donne
raison à ce dernier et Donat et ses partisans sont alors persécutés et se considèrent comme
“l’Église des martyrs”
 Certains se comportent comme des chefs de bande : les circoncellions, adeptes de la
méthode violente, faisaient le siège des maisons pour les brûler.
 Un certain nombre d’excès donatistes conduisent l’empereur Théodose à édicter un édit, en 405,
qui prive les donatistes de leurs droits civils en les assimilant à de purs hérétiques.
 Cette décision provoque un retour des donatistes à l’Église catholique au début du Ve
siècle.
 Les donatistes affirment qu’ils sont les défenseurs de la pureté de l’Église et que celle-ci soit être
« sainte et immaculée ». Ils s’attribuent à eux-mêmes cette pureté et ils en font la condition absolue de
la validité du baptême. Cette pureté des donatistes n’est pas seulement une pureté éthique personnelle,
mais un état de fait résultant de l’appartenance du sujet à une Église pure.
 Augustin, en revanche, n’hésite pas à dire que l’Église est à la fois sainte et formée d’hommes
pécheurs.
 C’est toute la dimension d’historicité, d’insertion dans le temps et dans l’espace, qui se
joue là.
V) LE SIÈGE ROMAIN DANS LES TROIS PREMIERS SIÈCLES
1) LA FIGURE DE PIERRE
 Raymond Brown énumère un certain nombre de points qui s’en dégagent et qu’on peut
considérer comme assurés :
 Simon, l’un des premiers appelés parmi les disciples, a tenu une place de premier plan
dans ce groupe ; il assume un rôle de porte-parole et il est toujours nommé le premier dans la
liste des douze
 il est probable qu’il ait formulé une profession de foi en Jésus, le qualifiant de messie
(Synoptiques) ou de “ Saint de Dieu ” (Jean) ;
 il n’a pas totalement compris qui était Jésus.
 Dans l’Église primitive :
 il est connu sous le nom de Céphas (Pierre) que Jésus lui a donné
 il a bénéficié d’une apparition de Jésus ressuscité, peut-être la première de toutes
 du fait du choix du Seigneur et de cette apparition, il est le personnage le plus important
des douze à Jérusalem, même si sa place à l’égard de Jacques, « frère du Seigneur », et de
Paul n’est pas totalement claire.
 Sa carrière a été celle d’un missionnaire, au moins parmi les circoncis, peut-être aussi
parmi les gentils (épisode du centurion Corneille)
 Sa position théologique semble intermédiaire entre celle de Jacques et celle de Paul, l’un
plus strict, l’autre plus large quant à l’observance de la Loi pour les païens convertis.
 Dans le Nouveau Testament, il rassemble les images du disciple, du missionnaire (Jn 21 et Lc
5) et du pasteur
 C’est très tôt que la première lettre de Pierre a été reçue comme canonique (début IIe siècle).
 Le style de 2 Pierre, plus solennel, voire pompeux, a montré aux biblistes, depuis saint Jérôme,
que ces deux écrits ne sont pas l’œuvre du même auteur
 Plusieurs écrits apocryphes ont été attribués à Pierre
 L’évangile de Pierre porte sur la Passion du Seigneur, a une visée apologétique, en vue
d’exonérer Pilate de la responsabilité de la mort du Christ au détriment d’Hérode et des juifs
 Les Actes de Pierre dont l’original grec peut être daté des années 200-210. leur utilisation
par les hérétiques a contribué à leur exclusion formelle du canonau V ème siècle, prononcée par
les papes Innocent Ier et Léon le grand. C’est là qu’on trouve des récits, peu authentifiés, sur
le ministère et le martyre de Pierre à Rome
 Une Apocalypse de Pierre
 Les Pères de l’Église fournissent encore des compléments :
 Selon Eusèbe (Chronique ecclésiastique) et Jérôme (Les hommes illustres, 1), Pierre
serait le fondateur de la première communauté d’Antioche d’origine judéenne.
 Selon Eusèbe, Pierre aurait quitté la ville en 42. Il est possible qu’il se soit rendu en
Achaïe où est attesté un parti qui lui est favorable.
2) LES ÉVÊQUES DE ROME AU PREMIER SIÈCLE
 La principale source est constituée par le Liber pontificalis, rédigé au VIème siècle, mais qui
utilise des fragments remontant pour une part aux IIème-IIIème siècles
 Certains papes sont incertains :
 Lin (68-79), pourtant attesté par Irénée de Lyon et Eusèbe de Césarée, longtemps
considéré comme martyr, ne figure plus au calendrier romain depuis 1969
 Clet ou Anaclet (80-91), dont on ne sait pas grand-chose.
 Clément de Rome (92/93-98/100) est attesté par Irénée qui recueille en 177 des indications à
son propos :
 Origène, Jérôme, Rufin et Eusèbe en font un compagnon de Paul
 Certaines chronologies d’évêques ainsi que Tertullien le placent immédiatement après
Pierre ou bien avant Anaclet
 Une lettre de l’évêque Denys de Corinthe à l’évêque de Rome, Sôter atteste que, vers 170, les
Corinthiens lisaient sa lettre pendant la liturgie dominicale.
 Sans qu’on puisse encore parler de primauté, elle témoigne de l’autorité de l’évêque de
Rome qui intervient pour apaiser un conflit à Corinthe
 L’Antiquité a mis sous le nom du pape Clément des textes apocryphes :
 une deuxième épître aux Corinthiens, en réalité une homélie, rédigée probablement vers
150, visant à appeler les nouveaux convertis à obéir aux commandements et mener une vie
ascétique pour manifester leur reconnaissance au Christ,
 deux épîtres aux vierges, du IIIème siècle et surtout
 les pseudo-clémentines, vingt homélies et dix livres de Reconnaissances (Recognitiones),
qui forment une sorte de roman ayant pour héros l’apôtre Pierre et composées vers la fin du
IVème siècle. Un fragment des Reconnaissances donne un récit de la naissance de l’Église de
Jérusalem différente de celui des Actes des Apôtres
3) LES PAPES DU DEUXIÈME SIÈCLE
 On sait peu de choses sur Évariste (99-107), et sur Alexandre Ier (105/108-115/118).
 Il en est de même sur Sixte Ier (115-125), fêté le 3 avril, à qui l’on attribue un décret prescrivant
que la vaisselle sacrée ne soit touchée que par les prêtres.
 Télesphore (125-136), peut-être d’origine grecque, aurait prescrit de faire chanter le Gloria à la
messe de Noël et à la messe quotidienne. La tradition, selon Irénée et Eusèbe, fait de lui un martyr, fêté
le 5 janvier.
 Hygin (136-140), philosophe de métier, se serait affronté à l’agitation suscitée par les gnostiques
Valentin et Cerdon.
 Pie Ier (140-155), originaire d’Aquilée et frère d’Hermas, l’auteur du Pasteur, aurait dû
polémiquer en matière doctrinale avec le gnostique Valentin et avec Marcion. Il fréquente aussi le
philosophe Justin. En juillet 144, il préside un synode de prêtres qui met Marcion au ban de l’Église.
 Anicet (155-166), serait un Syrien. Il aurait reçu Polycarpe de Smyrne, venu à Rome malgré son
grand âge, accompagné d’Irénée et de Florinus, pour traiter avec le pape de la question de la date de
Pâques. Il aurait traité Marcion de « premier-né de Satan ».
 La vie et l’œuvre de Sôter (166-175), originaire de Fondi, en Campanie, sont mal connues. C’est
lui qui fixe la date de Pâques au dimanche suivant le 14 nisân.
 Éleuthère (175-189) originaire de Nicopolis, en Épire (Grèce), ancien diacre du pape Anicet,
reçoit en 177 la visite d’Irénée venu lui demander de trancher la querelle montaniste. Il est possible
qu’il ait rejeté le montanisme en se prononçant pour une hiérarchie institutionnelle plutôt que pour des
prophètes charismatiques. On lui attribue aussi un décret dirigé contre les gnostiques et les marcionites
et portant qu’aucune nourriture ne devait être méprisée par les chrétiens
4) LES HÉRÉSIES DU DEUXIÈME SIÈCLE
 Les courants gnostiques sont mieux connus aujourd’hui depuis les découvertes de Nag
Hammadi.
 « L’un des traits essentiels du gnosticisme consiste à espérer le salut non point de la miséricorde
toute puissante du Dieu créateur et de la médiation de son Verbe incarné, Jésus de Nazareth, Christ et
Seigneur, mais d’une sorte de connaissance particulière, la gnose, qui nous délivre de ce monde
visible, infirme et imparfait, pour nous faire accéder à une divinité purement bonne et compatissante,
totalement étrangère à la création et innocente de ses vices. »
 Cerdon, peut-être originaire de Syrie, arrive à Rome sous le pape Hygin (138-142) et enseigne
que le Dieu révélé dans la Loi et annoncé par les Prophètes n’est pas le Père de Jésus-Christ, bon et
inconnaissable.
 Valentin, venant d’Alexandrie, s’installe à Rome vers 140 et fonde une école où il enseigne ses
doctrines. Il a beaucoup d’adeptes et il est l’auteur d’un Évangile de vérité. La gnose qu’il enseigne se
présente comme un principe épistémologique qui seul garantit une interprétation authentique de la loi
mosaïque.
 Le gnosticisme reconnaît l’Écriture juive, mais au prix d’une attitude critique et d’une
lecture christologique.
 Cette exégèse fait une référence constante aux Paroles du Sauveur constituant la gnose
salvatrice ; elle permet de distinguer ce qui serait de Dieu et ce qui aurait une origine
humaine. Elle s’enracine dans le mythe gnostique fondamental qui oppose le monde et son
créateur, le démiurge, au vrai Dieu.
 L’attitude des gnostiques vis-à-vis du monde est avant tout négative. Ils refusent de
collaborer avec les structures sociales et les autorités terrestres. Si certains estiment qu’il faut
annihiler le corps par l’ascèse, d’autres, en revanche, considérant qu’aucune action matérielle
ne peut souiller le pneuma, vont prôner la licence sexuelle.
 Le gnosticisme apparaît assez dangereux aux yeux des Pères car il prétend pouvoir donner
à ses adeptes des explications précises sur l’origine des êtres mais aussi l’assurance que, par
ses propres forces, si l’on adhère à la gnose, on peut avoir la certitude d’accéder au salut.
 Marcion, originaire du Pont, de la ville de Sinope, s’installe vers 135-140 à Rome. Ayant
échoué à faire adopter sa doctrine par l’Église, il en est exclu en 144 et fonde sa propre communauté
 Le Dieu miséricordieux de l’Évangile ne peut être celui qui parle et agit dans les
Écritures juives
 Rejetant les méthodes allégorique et typologique, Marcion entreprend un véritable
travail de critique textuelle, en purifiant les textes des falsifications qu’il impute aux
judaïsants. Il élimine de l’évangile de Luc et des Lettres de Paul, qui constituent le canon de
ses Écritures, toute trace d’Ancien Testament
 Pour lui, le salut est une initiative totalement gratuite du Dieu bon et le Christ sauve
l’homme en l’achetant à son légitime propriétaire, le Dieu de l’Ancien Testament.
5) LE PAPE VICTOR
 Il serait le premier pape de langue latine et aurait accéléré la latinisation de l’Église de Rome
marquée jusque-là par ses origines grecques et orientales
 Depuis le pontificat de Sôter, la question de la date de Pâques se posait : en Asie mineure, on
célébrait Pâques à la pleine lune du premier mois (14 Nisân), suivant le système juif ; à Rome, la fête
était célébrée un dimanche, le plus proche de la fête juive, mais toujours après le 14 et pas avant son
surlendemain.
 Victor revient en arrière par souci de l’unité avec les églises d’Asie, peut-être après
l’intervention d’Irénée
 L’enjeu est théologique tout autant que liturgique : quelle est la mémoire que l’on
accentue, celle de la Passion (c’est ce que font les quartodécimans) ou celle de la
Résurrection (pape Victor)
 Cette affaire montre aussi que le pape Victor se sentait investi d’une mission universelle, mais
aussi que cette vision n’était pas facilement adopté par les évêques asiates.
 Victor intervient aussi contre un adoptianiste, Théodote de Byzance et l’excommunie. Il prive
aussi un gnostique, Florinus, de la prêtrise. C’est l’époque où l’idée d’une séparation entre “l’Église
catholique” (ou “grande Église”) et les courants déviants s’impose dans l’opinion.
6) LES PAPES DE LA PREMIÈRE MOITIÉ DU TROISIÈME SIÈCLE
 Le pontificat de Zéphyrin (199-217) est marqué par une forte division entre les adoptianistes et
les modalistes.
 Calliste Ier (155-222), diacre chargé par Zéphyrin de l’administration du cimetière de la via
Appia, doit s’affronter, au moment de son élection épiscopale, au schisme suscité par Hippolyte qui
l’accuse de complaisance envers le monarchianisme et d’avoir été trop laxiste dans des appels aux
ordres. En revanche, sa mémoire est intacte dans l’Église et on lui attribue l’instauration du jeûne des
quatre-temps ; il meurt victime d’une émeute dans le quartier du Trastevere
 Le pontificat d’Urbain Ier (222-230) se déroule à une époque d’apaisement, sous l’empereur
Sévère Alexandre. En revanche, Pontien (230-235) est affronté à la persécution de Maximin le Thrace,
il est déporté aux mines de Sardaigne en compagnie d’Hippolyte. Pontien renonce au pontificat le 28
septembre 235 et meurt peu après de mauvais traitements. Fabien fera ramener les corps de Pontien et
d’Hippolyte à Rome en 236 ou 237.
 Après Anteros, qui ne reste pape que six semaines (235-236), Fabien (236-250) est élu pape sur
intervention divine (une colombe s’étant posée sur sa tête ainsi que le rapporte Eusèbe). L’Église
bénéficie de la paix et le schisme d’Hippolyte est surmonté. C’est très probablement Fabien qui partage
la ville en sept diaconies regroupant deux à deux les quatorze régions de l’administration civile.
Cependant il meurt victime de la persécution de Dèce.
 Corneille (251-253) lui succède au terme de plus d’un an de vacance du siège car la persécution
ne permet pas de faire une nouvelle élection. Une partie de la communauté refuse de le reconnaître et
désigne Novatien qui avait assuré en quelque sorte l’intérim. Les deux hommes s’opposent sur la
question des lapsi, Corneille inclinant vers l’indulgence, et Novatien vers la rigueur. Le schisme se
diffuse également en Afrique, en Gaule et en Orient. À l’automne 251, Corneille, qui a reçu l’appui de
Cyprien de Carthage, réunit un synode (avec 60 évêques) qui excommunie Novatien et cette décision
se répand en Orient grâce aux évêques Fabius d’Antioche et Denys d’Alexandrie Victime de la
persécution menée par l’empereur Trebonien Galle (251-253), Corneille est arrêté et exilé à
Civitavecchia où il meurt en juin 253.
 Lucius Ier lui succède, pour un pontificat de 8 mois (253-254). Il aurait été lui aussi victime du
pouvoir impérial
7) ÉTIENNE ET CYPRIEN (254-257)
 Il se heurte à Cyprien de Carthage à propos de deux évêques d’Espagne, qu’Etienne voulait
rétablir après qu’ils eurent chuté, mais Cyprien l’accuse de ne pas suivre l’enseignement de Corneille
qui « a décidé que de tels hommes pourraient sans doute être admis à faire pénitence mais devraient
être écartés de la cléricature et de la dignité épiscopale »
 Étienne se heurte encore à Cyprien sur la question du baptême des hérétiques revenant à la
grande Église. À Rome, il est reconnu comme valide : on ne rebaptise pas, on se contente d’une
imposition des mains avant de les recevoir dans l’Église
 Bien que Cyprien reconnaisse que le siège de Rome détient une primauté et préside à la
communion, il s’inquiète car il lui semble que ce siège peut se tromper.
8) LES PAPES DE LA SECONDE MOITIÉ DU IIIE SIÈCLE
 Sixte II (257-258) semble plus conciliant sur le baptême des hérétiques, en admettant qu’il y
ait diversité des traditions. En 314, l’Église d’Afrique renoncera à sa pratique de réitération du
baptême.
 Sixte meurt victime d’un édit de Valérien prescrivant le sacrifice païen, ainsi que quatre diacres,
dont Laurent dont on dit qu’il aurait été brûlé sur un grill. Cyprien de Carthage est exécuté un mois
plus tard (septembre 258).
 Denys Ier (259/260-268) ne peut succéder à Sixte II qu’après un intervalle d’au moins un an. Le
siège romain est consulté par l’évêque d’Alexandrie mis en cause par les sabelliensqui l’accusent
d’avoir minimisé l’unité de la substance divine, par souci d’affirmer la distinction des personnes.
 Félix Ier (269-274) est cité comme référence par l’empereur Aurélien dans un conflit qui divise
l’église d’Antioche à propos de l’usage de bâtiments. Aurélien prescrit « que la maison de l’Église soit
attribuée à ceux à qui les évêques d’Italie et de la ville de Rome l’auraient attribuée ».
 Sous la première partie du règne de Dioclétien, période de tolérance pour le christianisme, se
déroulent deux pontificats sans histoire : Eutychien (275-283) et Caïus (283-296), ce qui permet à des
chrétiens d’atteindre de hauts rangs dans l’administration.
 Le pontificat de Marcellin (296-304), commencé sous une ère de paix, s’achève sous la
persécution. L’attitude du pape a donné lieu à controverse. Certains prétendent qu’il aurait sacrifié,
mais qu’il aurait néanmoins été exécuté quelques jours plus tard. La trahison du pape deviendra dans la
suite un lieu commun de la polémique. Les historiens actuels hésitent sur la réalité de son martyre : il
serait mort durant la persécution mais non à cause d’elle.
 Après une vacance de trois ans et sept mois, due à la persécution de Dioclétien, est élu le
prêtre Marcel Ier (308-309). Il essaie de réorganiser l’Église de Rome (églises, cimetières) et se heurte
au refus des lapsi d’effectuer la pénitence qu’il prescrit. Cela conduit à des bagarres sanglantes dont
l’usurpateur Maxence le rend responsable. Il le condamne à devenir garçon d’écurie. Il meurt dans ces
conditions. Son successeur, Eusèbe, pape durant quatre mois, est condamné pour la même raison aux
travaux forcés en Sicile où il meurt.
 D’origine africaine, Miltiade (311-314) lui succède. Son pontificat coïncide avec les événements
qui voient naître la paix de l’Église : la victoire de Constantin au pont Milvius (28 octobre 312) et
l’édit de Milan (313). C’est Miltiade qui prescrit qu’une portion de pain consacré par l’évêque
(fermentum) soit distribuée aux diverses églises de Rome. Pour résoudre la querelle donatiste, il réunit
un concile d’évêques italiens chargé d’assister les trois évêques gaulois nommés par Constantin devant
arbitrer la querelle entre Caecilianus et Donat. À l’issue, Miltiade énonce le jugement qui innocente
Caecilianus. Miltiade meurt avant de connaître l’appel interjeté par les donatistes contre son jugement
auprès de Constantin en 313.
9) LES CATACOMBES
 Les catacombes, totalement abandonnées vers l’an mil, ne sont redécouvertes qu’à la fin du
ème
XVI siècle.
 Le nom de catacombes était employé dans l’Antiquité pour un lieu bien précis sur la voie
Appienne : « près de la combe », ce mot désignant une profonde dépression en contrebas de la route,
peut-être due à une carrière ancienne de pouzzolane anciennement exploitée.
 Au milieu du IIe siècle ap. J.-C., la ville de Rome connaît un très grand accroissement
démographique :
 C’est à ces besoins que répond le creusement des catacombes
 Pour la ville de Rome, la plus ancienne mention d’un cimetière chrétien figure dans l’œuvre
d’Hippolyte, qui rapporte que l’évêque Zéphyrin en avait confié l’administration au diacre Calliste.
 Ce cimetière de Calliste serait l’area I de la voie Appienne, qui rassemble des
sépultures de papes du IIIème siècle ainsi que celle de Sainte-Cécile, sur une surface d’environ
3000m²
 La réalisation des catacombes était le fait d’une main-d’œuvre spécialisée, les fossores
(fossoyeurs) qui, sans appartenir au clergé, vivaient dans la mouvance cléricale et creusaient cette
roche volcanique du sous-sol, – le tuf – à la fois aisée à travailler et suffisamment résistante pour
permettre des excavations d’envergure.
 Les tombes les plus riches sont plus proches de la surface.
 Les plus humbles sont creusées dans la paroi des galeries (les loculi) et leur fermeture
est assurée par des briques ou des tuiles, parfois par des plaques de marbre, souvent des
matériaux de rebut.
 Les plus riches sont surmontées d’une voûte, creusée dans la roche même, ou arcosolium. Elles
prennent parfois la forme d’une chambre fermée (ou cubiculum), parfois illuminée et aérée par un puits
de lumière (ou lucernaire) et dont les parois peuvent recevoir loculi et arcosolia, voire des
sarcophages. Les cubicula s’efforcent d’ailleurs de ressembler aux mausolées des cimetières de
surface. C’est là que se trouve la production picturale du premier art chrétien
 Les plus importantes nécropoles chrétiennes se trouvent sur la via Nomentana et sur
l’ancienne et la nouvelle Salaria, au nord de Rome, d’une part, et d’autre part, au sud, où les seules
nécropoles de Calixte et de Domitille couvrent chacune, tous étages confondus, plus de 16ha de
superficie, avec 15 km de galeries, de 15 à 20 000 sépultures
 Vers le Vème siècle, l’évolution démographique de Rome est négative – le sac de Rome par
Alaric (410) marque peut-être un tournant – et, peu à peu, on assiste à un déclin des inhumations dans
les catacombes. On rencontre alors les premières sépultures à l’intérieur de la Ville, dans des maisons
abandonnées, ce qui marque un changement radical dans les mœurs.
VI) LA POLITIQUE IMPÉRIALE ET LE CHRISTIANISME DANS LES TROIS PREMIERS
SIÈCLES
On caractérise souvent la période qui va de 64 (incendie de Rome par Néron) à 313 (édit de Milan par
Constantin) comme étant celle des persécutions anti-chrétiennes.
 On doit considérer qu’il n’y a persécution générale qu’à partir de l’édit de Dèce de 249.
Auparavant, il s’agit souvent de soulèvements locaux contre les chrétiens.
Les sources, que les historiens font néanmoins passer au crible de la critique historique, sont
constituées :
par des ouvrages historiques généraux (l’Histoire ecclésiastique, les Martyrs de Palestine
et la Chronique d’Eusèbe de Césarée, le livre Sur la mort des persécuteurs de Lactance) ;
par les Actes des martyrs, qui livrent des procès-verbaux d’audiences, avec des retouches
chrétiennes ;
par les Passions des martyrs, qui sont plus développés, et incluent le récit du supplice
1) L’OPINION DES PAÏENS À PROPOS DES CHRÉTIENS
 Au départ, la tolérance est basée sur le principe suivant : chaque cité (= chaque peuple) a ses
dieux : il convient d’honorer tous les dieux pour qu’ils soient favorables à Rome. Celui qui devient
citoyen romain peut garder son culte, mais doit y ajouter celui des dieux romains.
 Cependant intervient un autre principe : ces cultes ne peuvent nuire à l’ordre public
 Seul le judaïsme fait exception. Après Pompée, César confirme leur droit de ne pas sacrifier
aux dieux romains. Le judaïsme peut néanmoins justifier d’avoir été la religion d’une nation, argument
que les chrétiens ne pourront pas invoquer lorsqu’ils seront distingués des juifs.
 Aussi vont-ils apparaître comme des athées, comme niant toute divinité civique et comme
posant ainsi par leur refus un acte anti-social. Alors qu’il n’y a pas de loi pour obliger à adorer les
dieux, les chrétiens sont suspects du fait des troubles qui naissent à cause d’eux.
 Au IIIème siècle, Minucius Félix énumère les accusations portées contre les chrétiens : on
leur reproche d’adorer un âne, de pratiquer l’infanticide rituel suivi d’anthropophagie, de se
livrer à des débauches collectives et même à l’inceste. Cela tient à ce que l’eucharistie est
célébrée dans la nuit du samedi au dimanche
 Pour justifier une persécution, l’amalgame met toujours en évidence les mêmes
stéréotypes, dans une courbe ascendante de la dépravation : on évoque des rituels
nocturnes, dont on déduit la promiscuité sexuelle, qui donne à supposer débauche, viols ou
incestes, ainsi que des rituels secrets, qui permettent de supposer infanticide ou
anthropophagie.
 L’accusation de « haine du genre humain » vise l’attitude de retrait et de séparation dont les
chrétiens font preuve à l’égard du reste de la société (vers le contempus mundi ?)
 De plus, il est possible qu’une prédication chrétienne de tendance apocalyptique ait cru voir dans
l’incendie de Rome le commencement de la fin du monde et s’en soit réjouie. Aussi les calamités
naturelles sont-elles couramment imputées aux chrétiens qui servent alors de boucs émissaires
 Ceux-ci, naturellement, ont le souci de répondre aux critiques. Ils le font par le moyen
d’apologies
 Justin et Tertullien estiment que la jurisprudence est injuste, car le « nom chrétien »
n’implique aucun crime ; les apologies visent aussi à repousser les différentes accusations :
les chrétiens sont exempts de crimes, ils ne sont pas de mauvais citoyens ; ils ne sont pas des
athées
 La défense du christianisme s’accompagne d’une critique du paganisme : répugnance
du culte des idoles et immoralité des récits mythologiques, critique des vices de la société
païenne, inspirée de la conduite supposée des dieux, absurdité des religions païennes.
2) L’INCENDIE DE ROME SOUS NÉRON
 C’est Tacite qui rapporte dans ses Annales le grand incendie qui démarre dans la nuit du 18 au
19 juillet 64, qui dure neuf jours, et qui ravage dix des quatorze quartiers de la ville de Rome.
 Les chroniqueurs : Tacite, Suétone, Dion Cassius, Pline l’Ancien et le chrétien Paul Orose
ont répandu l’idée que c’était Néron le responsable.
 Ce sont probablement ses conseillers qui ont poussé Néron à massacrer des chrétiens – c’est-à-
dire de frapper une secte – pour dissiper la rumeur malveillante qui courait déjà à son endroit.
Tacite lui-même n’est pas dupe, même s’il croit les chrétiens capables des pires turpitudes.
 Quant aux faits eux-mêmes, Tacite laisse entendre que l’arrestation de quelques chrétiens a
préludé à une rafle quasi-générale, puis à un jugement sommaire, porté moins probablement par
l’empereur que par le préfet de la ville, avant le supplice, à la fois dans le cadre des jeux du cirque et
dans les jardins de Néron.
 Tertullien affirme que Néron (37-68, empereur en 54) aurait édicté une loi interdisant de
manière générale la pratique de la religion chrétienne. l’existence d’une telle loi est improbable car elle
eût dû être prise par le Sénat, ce qui n’est pas avéré. Il a suffi d’invoquer une loi romaine contre les
fauteurs de troubles.
 Eusèbe de Césarée place la seconde persécution sous Domitien (81-96). Elle semble avoir porté
principalement sur des membres de la haute société, auquel on reprochait leur christianisme, encore
que les témoignages soient fragmentaires sur ce point.
3) LA LETTRE DE PLINE LE JEUNE À TRAJAN (111-112)
 Pline le Jeune (v. 61 – v. 113/125) est gouverneur de Bithynie (région au nord-ouest de l’Asie
mineure, en bordure du Pont-Euxin, symétrique de Byzance par rapport au Bosphore). Son échange de
correspondance avec Trajan (58-117, empereur en 98) nous renseigne sur la procédure légale utilisée
contre les chrétiens
 La question qu’il pose laisse deviner qu’il n’existait pas de loi néronienne condamnant la
profession de foi chrétienne (sinon il l’aurait invoquée).
 Pline mène une enquête qui aboutit à la collecte de dénonciations anonymes. De l’interrogatoire,
le gouverneur retient trois éléments :
 À un jour fixe, les chrétiens se réunissent avant le lever du soleil et disent entre eux un
chant en s’adressant au Christ comme à un dieu.
 Ils se lient par serment à ne commettre aucun crime, en particulier le vol et l’adultère, à ne
pas manquer à la parole qu’ils ont donnée, à ne jamais refuser de restituer ce qui leur a été
confié.
 Après leur réunion du matin, ils se séparent, mais pour se retrouver plus tard, pour une
autre rencontre, au cours de laquelle ils partagent un repas, qui est, quoi qu’on en dise, tout à
fait innocent
 Il relaxe les accusés qui ont nié avoir jamais été chrétiens et ceux qui ont accepté de renier leur
religion, de maudire le Christ et de sacrifier à l’image de l’empereur. Il fait exécuter ceux qui ont
refusé d’abjurer, à l’exception des citoyens romains, qu’il envoie à Rome pour y être jugé.
 En homme éclairé, Trajan condamne avec force les dénonciations anonymes. Il invite à ne pas
rechercher les chrétiens, mais à se contenter de condamner ceux qui ont été dénoncés par des
accusateurs bien identifiés, ce qui traduit le refus de se lancer dans une répression de grande
ampleur.
 eux qui ont déjà été dénoncés et qui demeurent fidèles dans leur foi sont coupables du
délit d’association illicite (capable de troubler l’ordre public) et sont passibles de mort.
 Ce rescrit de Trajan fera date : on y fera référence jusque vers 250 pour se guider sur
l’attitude à suivre.
4) LES PERSÉCUTIONS AU IIE SIÈCLE
 Sous Hadrien (117-138), on signale des poursuites contre les chrétiens de la province d’Asie.
 Si Hadrien réprouve les dénonciations, il admet qu’une accusation en bonne et due forme
est recevable. Ainsi, une communauté chrétienne peut vivre paisiblement, mais demeure sous
la menace d’une dénonciation qui déclencherait alors des poursuites judiciaires débouchant
sur des condamnations à mort
 Sous l’empereur Antonin le Pieux (138-161), on connaît un épisode, qui semble résulter d’une
persécution locale, la Passion de Polycarpe, évêque de Smyrne, texte rédigé juste après les
événements, vers 155-157. Avant l’évêque, une douzaine de chrétiens sont arrêtés, soumis à divers
supplices puis livrés aux bêtes.
 De nombreux cas de persécutions de chrétiens sont connus sous Marc-Aurèle. Dans ses
Pensées, l’empereur n’a qu’un froid mépris pour les chrétiens : il ne voit dans leur courage face à la
mort qu’une obstination et une ostentation absurdes.
 Un témoignage des graves difficultés connues par les chrétiens à cette époque, c’est la
composition de nombreuses Apologies rédigées pour les défendre et adressées à l’empereur.
En réplique, un intellectuel, comme Celse, publie son Discours véritable qui est le premier
pamphlet connu contre les chrétiens. Origène publiera, 70 ans plus tard, une réplique à ce
pamphlet, Contre Celse.
 C’est l’époque du martyre du philosophe Justin et des martyrs de Lyon (177). La
persécution contre la communauté chrétienne, qui compte des gens de toutes conditions et
une large part d’immigrés d’Asie mineure, commence par des manifestations populaires
d’hostilité qui tendent à exclure les chrétiens des lieux de vie sociale. Le gouverneur
ordonne alors qu’on procède à une recherche des chrétiens qui résident dans la ville, ce qui
est une procédure tout à fait inhabituelle. Beaucoup de croyants zélés sont arrêtés. Quelques-
uns meurent sous la torture, parmi lesquels le vieil évêque, Pothin. D’autres sont présentés
aux bêtes, comme Blandine.
 C’est l’amphithéâtre des trois Gaules, au nord de la place des Terreaux, qui a été le lieu du
martyre de Blandine et Pothin et ce serait l’église Saint-Nizier qui occuperait l’emplacement
de cette basilique dite “des quarante martyrs” dont parle Grégoire de Tours
 Les apologies chrétiennes :
 Justin, deux Apologies (147-154)
 Tatien, Discours aux Grecs (v. 177)
 Athénagore d’Athènes, Supplique au sujet des chrétiens (177)
 Théophile d’Antioche, A Autolycos (ap. 180)
 Tertullien, Contre les païens et Apologétique (198)
 Minucius Felix, Octavius
 Miltiade, Apologie pour la philosophie chrétienne et Contre les Grecs (ouvrages perdus)
 Apollinaire de Hiérapolis, Discours à l’empereur, Aux Grecs et Sur la vérité (ouvrages
perdus)
 Eusèbe de Césarée, Préparation évangélique et Démonstration évangélique
 Lactance, La mort des persécuteurs
5) LES DÉCRETS ANTICHRÉTIENS
 Au départ, comme on l’a vu, les magistrats agissent de leur propre initiative en réprimant une
religion en contradiction avec les coutumes ancestrales, ne bénéficiant pas d’une autorisation
officielle (une superstitio nova ac malefica) et étant cause de troubles de l’ordre public.
 Les théories qui postulaient l’existence d’une loi de proscription du christianisme édictée
par Néron (Tertullien, Ad nationes, 1,7,9) ou bien par un décret du Sénat sont aujourd’hui
abandonnées.
 Le IIIème siècle marque ici un tournant, pour plusieurs raisons.
 En 212, Caracalla accorde la citoyenneté romaine à tous les habitants libres de l’Empire,
dilatant ainsi l’Urbs aux dimensions du monde habité. Il ouvre en fait la porte à l’idée d’une
religion d’État unificatrice.
 L’Église a, de plus en plus, pignon sur rue. On estime que, dans l’Empire, les chrétiens
sont passés de 40 000 vers 150 à 220 000 vers 250 (soit 10% de la population) ; à Rome
même, ils seraient, au milieu du III ème siècle, 40 000 sur 700 000 habitants. Ils ne célèbrent
plus seulement dans les maisons particulières mais l’Église devient propriétaire de ses lieux
de culte.
 Plusieurs historiens considèrent que c’est avec Septime Sévère (195-211) que la jurisprudence
établie par Trajan prend fin et que l’on entre dans l’ère des persécutions par édit.
 Septime Sévère, d’origine africaine, n’a qu’une dévotion formelle envers les dieux de l’ancienne
Rome et il est davantage attiré par les cultes orientaux. On lui attribue un édit porté en 202 interdisant
le prosélytisme juif et chrétien. Mais l’existence de ce texte, inconnu des historiens anciens, est
contestée et ce qu’on sait des persécutions sous son règne ne s’accorde pas totalement avec le fait que
cet édit ne viserait que les nouveaux convertis.
 Des persécutions localisées ont lieu, telle celle de Félicité et Perpétue en Afrique du Nord et
celle d’Alexandrie dont est victime le père d’Origène, Léonidas.
 À la mort de Septime Sévère, la persécution s’apaise ; les seuls cas de violence que l’on
connaisse sont très localisés. Peut-être faut-il voir la cause de cette recrudescence de mesures
répressives dans le fait qu’un certain nombre de chrétiens auraient refusé de s’associer aux
décennales de 202 et aux jeux séculaires de 204.
 Au début du IIIème siècle, la situation politique de l’Empire connaît de profondes mutations.
Les Germains menacent les frontières du Rhin et du Danube ; au-delà de la frontière orientale, l’empire
parthe a cédé la place à la dynastie perse des Sassanides qui montre d’emblée ses ambitions en
direction de l’Empire romain.
 selon Eusèbe, la première moitié du siècle serait à considérer comme une période de paix
relative pour les communautés chrétiennes. Tout change avec l’arrivée de Dèce au pouvoir.
 Dèce, sénateur originaire de Pannonie (plaine de Hongrie, entre les Alpes orientales et les
Carpates), est appelé à s’opposer aux invasions barbares. Après l’avoir fait avec succès, il se proclame
empereur en 249.
 En décembre de cette année-là, il publie un édit qui va préluder à une sévère persécution
des chrétiens. Un édit prescrit à tous les citoyens de manifester leur piété envers les dieux
(sacrifier, brûler de l’encens, faire des libations, manger la chair des animaux sacrifiés) et
s’associer à une supplicatio générale pour le salut de l’Empire.
 La nouveauté de cette mesure – qui, en soi, n’est pas dirigée contre les chrétiens – réside
dans son caractère obligatoire – les juifs sont exemptés du sacrifice –, qui sera contrôlé par
des commissions locales.
 Chacun doit se présenter au jour donné et accomplir un acte du culte païen, offrir un
sacrifice ou brûler de l’encens. Ceux qui se conforment à l’édit se voient remettre un
certificat (libellus), les autres sont envoyés en prison et reconvoqués ultérieurement.
 Les autorités ne veulent pas, avant tout, faire des martyrs, ils cherchent à convaincre les
chrétiens de sacrifier et leur proposent, pour cela, les gestes qui leur paraissent les plus
anodins (libation). Il semble, de plus, qu’on puisse obtenir un certificat à prix d’argent.
 Des chrétiens acceptent de se conformer à ces exigences, tel l’évêque Eutktémon de
Smyrne.
 La tradition chrétienne mettra en valeur la figure des martyrs tués à cette occasion, tels
Fabien, évêque de Rome, et Cyprien, évêque de Carthage, même si le nombre des victimes
ne semble pas considérable. L’édit ne semble plus être appliqué après 250.
 Dès ce moment, se pose le problème de la réconciliation des lapsi. Cette prérogative revient
normalement à l’évêque ou au synode local des évêques.
 Un cas épineux se pose quand ce sont des clercs eux-mêmes qui ont failli : à quelles
conditions peut-on les réadmettre dans la communauté et dans l’exercice de leur ministère ?
 Par ailleurs, il arrive que des chrétiens détenus en raison de leur foi, les confesseurs,
ayant acquis du fait de leur souffrance une certaine aura, prétendent pouvoir opérer eux-
mêmes cette réconciliation, et sont sollicités en ce sens par des lapsi.
 Les années 257-258 sont marquées par une nouvelle persécution, déclenchée par un édit de
l’empereur Valérien, probablement poussé par l’opinion sénatoriale estimant que les mesures prises
par Dèce ont été inefficaces pour empêcher l’expansion de l’Église.
 Valérien va chercher à frapper, non l’ensemble des fidèles, mais l’organisation ecclésiastique.
Les évêques, prêtres et diacres, s’ils refusent de sacrifier aux dieux, seront envoyés en exil et le culte
chrétien (ainsi que la visite au cimetière) sera interdit sous peine de mort ou de grave sanction.
 En août 258, les mesures précédentes sont aggravées par un second édit qui vise à la fois le
clergé et les classes dirigeantes de la société. Les clercs exilés qui ont refusé d’obtempérer à
l’obligation du sacrifice seront mis à mort.
 En fait, le pouvoir impérial cherche surtout à faire des exemples : le pape Sixte II et
quatre diacres sont mis à mort, et peut-être Novatien, chef d’une communauté schismatique
Il en est de même, en Afrique, pour Cyprien et sept évêques, des clercs et des laïcs, et, en
Espagne, pour l’évêque Fructueux de Tarragone.
 Gallien (218-268, empereur en 253), fils de Valérien et empereur en même temps que lui,
promulgue un édit de tolérance (260) par lequel il reconnaît aux communautés chrétiennes le droit de
posséder leurs biens. Quarante années d’apaisement suivent, à peine troublées par les menaces
d’Aurélien, lorsqu’il veut faire du culte du soleil la religion unique de l’Empire.
6) LA DERNIÈRE GRANDE PERSÉCUTION SOUS DIOCLÉTIEN
 Dioclétien (245-313), proclamé empereur par ses troupes en 284, gouverne avec trois autres
officiers : Maximien, Galère et Constance Chlore (mise en place de la tétrarchie).
 Il sacralise la fonction impériale en se présentant comme descendant de Jupiter et
Maximien comme descendant d’Hercule.
 Cette théologie impériale, restauration des traditions romaines, est incompatible avec le
christianisme
 L’entourage de Dioclétien reprend, contre les chrétiens, les arguments d’un philosophe néo-
platonicien, Porphyre (Contre les chrétiens) : contestation de la prétention chrétienne à s’approprier
l’héritage juif, mise en évidence des incohérences des évangiles, critique des dogmes chrétiens, critique
aussi de l’égalitarisme chrétien. D’autres pamphlets argumentent contre la divinité du Christ : comment
croire en la nature divine d’un homme qui s’est laissé crucifier ?
 En 299 ou 301, sont prises des mesures visant à épurer l’armée de ses éléments chrétiens.
 Le 24 février 303, au lendemain d’un attentat contre l’église de Nicomédie (capitale impériale),
avec incendie de ses livres et de son mobilier, un édit impérial ordonne de raser complètement les
églises, de jeter au feu les Écritures et d’ôter aux chrétiens des classes supérieures leurs charges et leurs
dignités ; il vise particulièrement les fonctionnaires.
 Un second édit, au printemps de la même année, prescrit de jeter en prison les chefs des églises.
 Un troisième texte complète les précédents en précisant qu’on peut les libérer s’ils acceptent de
sacrifier. Au besoin, on usera de « mille supplices » pour les obliger à cet acte.
 En janvier ou février 304, un quatrième texte couronne cette série de mesures en enjoignant à
tous les habitants du monde romain de sacrifier aux dieux de l’empire. En cas de refus, ils sont
passibles de mort ou de déportation dans les mines. Seul Eusèbe mentionne l’existence de quatre textes
différents, Lactance ne parle que d’un seul.
 Les édits de Dioclétien sont adressés aux autres tétrarques, qui les appliquent de manière
inégale. Tout le monde n’a pas la vocation du martyre et les traditeurs (ceux qui acceptent de livrer
les Écritures) sont nombreux.
 Néanmoins, pour la première fois, cette persécution trouve, de manière générale, un appui moins
efficace dans l’opinion. Dans plusieurs cas, les ordres impériaux ne sont exécutés qu’assez
mollement par les magistrats.
 Le 1er mai 305, à la surprise générale, Dioclétien abdique, suivi de Maximien. Les deux
césars, Galère et Constance Chlore, deviennent augustes et deux nouveaux césars sont nommés :
Sévère, pour l’Occident, neveu de Galère, et Maximin Daïa pour l’Orient.
 La persécution se poursuit, malgré une trêve de juin 308 à novembre 308 ou 309, pour des
raisons politiques. Maximin semble avoir réactivé la persécution de sa propre initiative, tandis que
Galère se lasse de la répression qui lui paraît avoir échoué.
 Le 30 avril 311, cinq jours avant sa mort, Galère fait publier à Sardique un édit donnant à
nouveau aux chrétiens le droit à l’existence et à la tenue de réunions cultuelles, mais Maximin Daïa
refuse de l’appliquer dans les territoires sous sa juridiction
VII) L’EMPIRE CHRÉTIEN
1) L’AVÈNEMENT DE CONSTANTIN
 Vers 250, s’exerce un peu partout une poussée des barbares sur les frontières (voir Dèce et les
persécutions)
 L’armée impériale a du mal à résister. Elle est en effet étirée le long de la frontière (le limes) en
un mince cordon, incapable de résister à une forte poussée.
 À l’exception de Rome, protégée par sa propre garnison, l’Italie et l’ensemble des
provinces sont presque totalement désarmées.
 L’armée romaine est davantage conçue pour les grandes batailles rangées que pour
résister à des combats de harcèlement
 Les Goths s’installent sur les régions danubiennes. L’empereur Dèce sera tué en cherchant à les
repousser.
 En Orient, le péril vient de l’empereur perse Shapur Ier (241-273).
 En 253, il envahit l’Anatolie, la Mésopotamie et la Syrie, où il s’empare d’Antioche,
avant d’être arrêté devant Édesse et de se replier.
 En 259, lors d’une nouvelle offensive perse, l’empereur Valérien (emp. en 253, †260) est
fait prisonnier près d’Édesse et meurt en captivité.
 En 260, les Alamans et les Francs déferlent sur la Belgique et la Gaule et vont même jusqu’en
Espagne et en Afrique avant d’être repoussés, mais la ligne de défense romaine est reculée.
 En 267, les Goths lancent des raids sur l’Anatolie, les Balkans et la Grèce, où ils atteignent
Sparte et Athènes
 En 306, à la mort de Constance, ses soldats proclament auguste son fils Constantin ; en octobre,
le fils de Maximien, Maxence, prend aussi la pourpre et son père reprend le titre d’auguste.
 La situation ne s’éclaircit qu’en 311, après la mort de Galère, quand on retrouve quatre
empereurs : en Occident : Constantin et Maxence, en Orient : Licinius, ancien compagnon
d’armes de Galère et Maximin Daïa.
 Le 30 avril 311, quelques jours avant sa mort, Galère publie un édit de tolérance, connu grâce
à Lactance et Eusèbe, où il reconnaît que non seulement la persécution a échoué, puisque les chrétiens
persistent dans leur propos, mais qu’elle a divisé l’Empire
 Il permet que le culte chrétien soit désormais public, ce qui lui donne la possibilité de le
contrôler mais la religion païenne demeure la religion officielle.
 En revanche, en Orient, Maximin Daïa veut restaurer la religion traditionnelle : il fait rebâtir ou
restaurer des temples négligés et cherche à réorganiser le clergé païen en lui donnant une organisation
hiérarchique calquée sur le christianisme.
 En 311, il reprend la persécution : il interdit aux chrétiens, dont les églises ont été
détruites, de se réunir dans les cimetières et il suggère aux cités de demander l’expulsion des
chrétiens
 En Occident, le 28 octobre 312, Maxence est écrasé par Constantin (victoire du pont Milvius)
 Celui-ci, devenu le seul Auguste d’Occident, se fait attribuer par le Sénat le titre de
premier auguste.
 Aussitôt il adresse à ses collègues une réédition de l’édit de Galère et Maximin s’incline.
il se retire en Asie mineure et meurt en 313.
2) LA QUESTION RELIGIEUSE SOUS CONSTANTIN
 Le 13 juin 313, Constantin et Licinius, les deux augustes, publient l’édit de Milan qui proclame
la liberté religieuse et précise la procédure de restitution des lieux de culte et des biens confisqués à
l’Église.
 Il ne s’agit pas, en fait, d’un texte commun.
 On dispose de deux textes, celui de Licinius et celui de Constantin, que rapportent
respectivement Lactance et Eusèbe de Césarée, textes qui ne sont pas identiques, mais
reflètent une décision commune.
 Tous les cultes sont désormais à égalité, ce qui constitue une véritable révolution, puisque cela
marque le début du détachement de l’État par rapport au culte officiel. L’État n’est pas pour autant
athée, puisqu’il cherche à obtenir la faveur divine, en prescrivant à tous les cultes de la réclamer pour
lui.
 Si Constantin fait preuve, dans les territoires placés sous sa juridiction, d’une bienveillance
croissante envers les chrétiens, Licinius agit tout autrement. Il pense en effet que ses sujets chrétiens
d’Orient sont politiquement favorables à son rival
 Il interdit les réunions d’évêques, les synodes provinciaux et les assemblées cultuelles
mixtes dans des lieux clos, sous prétexte de moralité
 La guerre que mène Constantin contre lui en 324 a toutes les allures d’une guerre de
religion et Constantin, après la victoire sur son rival (septembre 324) abroge toutes les
mesures anti-chrétiennes que celui-ci avait prises.
 Après sa victoire, Constantin réunifie l’empire.
 Il fonde une nouvelle capitale à Constantinople, à la jonction de l’Orient et de
l’Occident.
 Il engage des travaux à Rome.
 La conversion de Constantin :
 Lactance indique que Constantin « fut averti en songe de faire mettre le signe céleste de
Dieu sur les boucliers »
 Eusèbe de Césarée affirme que c’est avant la bataille que Constantin se serait converti,
faisant l’option de se tourner vers le Dieu des chrétiens et qu’il aurait été récompensé par une
vision du Christ lui demandant de prendre la croix comme emblème et lui déclarant : In hoc
signo vinces : Par ce signe tu vaincras. Il aurait alors fait confectionner un étendard portant
ce signe (le labarum).
 En revanche, à partir du Vème siècle, une autre légende se répand qui associe la conversion à la
guérison de la lèpre opérée par le pape Silvestre au bénéfice de Constantin et qui justifie par là « la
donation de Constantin ».
 Sous Constantin, malgré ce qu’on entend souvent, le christianisme n’est pas religion de l’État.
Constantin demeure tolérant envers tous les cultes, même si, personnellement, il évolue vers le
christianisme et pose des gestes en sa faveur. Il prend un certain nombre de mesures :
 en 318, il octroie la possibilité de transférer des procès aux tribunaux épiscopaux dont les
sentences sont reconnues par la juridiction civile. Cela permet aux chrétiens de ne pas devoir
recourir aux juges païens, mais il faut que les deux parties soient d’accord pour recourir à
l’arbitrage de l’évêque.
 en 321, le dimanche devient jour férié, mais à égalité avec les fêtes païennes,
 dès 315, les premiers symboles chrétiens apparaissent sur les monnaies et en 325
disparaissent les dernières figures païennes qui y étaient gravées.
 Des mesures fiscales sont prises au bénéfice du clergé catholique, mais pas au profit des
donatistes, ce qui permet à l’Église d’accroître rapidement son patrimoine.
 Une moralisation de certaines pratiques associées au polythéisme est entreprise, la
pratique des actes de divination est interdite, des limitations sont posées aux jeux du cirque et
des lois protègent la famille, les pauvres et les esclaves.
 Cependant l’État se réserve la juridiction criminelle et Constantin intervient comme arbitre dans
la vie de l’Église. Il le fait dans l’affaire donatiste et déclenche contre eux une véritable persécution, de
316 à 320. Dans la question arienne, c’est lui qui convoque le concile de Nicée.
3) LA THÉOLOGIE POLITIQUE DE L’EMPIRE CHRÉTIEN
A) L’empereur
 Eusèbe de Césarée développe cette théologie chrétienne de l’histoire qui considère la
réalisation d’un unique empire chrétien comme le but de toute l’histoire humaine.
 Le régime impérial demeure un régime sacral :
 La personne de l’empereur et son autorité en reçoivent une sacralisation accrue. Il est
l’image du Logos divin. Pendant plus d’un siècle, le culte impérial hérité de la fin du
paganisme demeurera la règle : l’adoratio reste de règle absolue, qui consiste à se prosterner
devant le souverain, à baiser le pan de sa pourpre et à s’agenouiller devant le trône.
B) Le Code théodosien
 Comme compilations de lois, on ne dispose alors que du Code grégorien composé de rescrits
des II et IIIème siècles réunis sous la tétrarchie et du Code hermogénien composé par un préfet du
ème

prétoire à la même époque.


 En 429, Théodose II, empereur d’Orient, décide la rédaction d’un code regroupant toutes les lois
émises depuis Constantin.
 Le Code théodosien est publié à Constantinople le 15 février 438 par Théodose II et par
son cousin et gendre Valentinien III à Rome le 25 décembre 438.
 Le livre XVI et ultime du Code théodosien est composé de 11 chapitres et compte 201
extraits de lois. Les lois sont classées par ordre chronologique.
C) De la tolérance de toutes les religions à l’intégration de l’Église dans l’État
catholique
 « Sous Constantin, le christianisme était devenu une religion de l’État romain ; sous ses fils, une
religion d’État ; sous la dynastie théodosienne, les Églises catholiques devinrent des Églises d’État. »
(Emmanuel Soler).
 Cela se marque notamment par le fait que la législation impériale reprend à son compte les
décisions des conciles notamment en ce qui concerne les hérésies.
 Trois constitutions sont édictées par Valentinien III et Galla Placidia (425), prévoyant
d’expulser de Rome « les manichéens, les hérétiques, les schismatiques ainsi que les
astrologues et toute secte ennemie des catholiques » et leur prescrivant de revenir à l’unité de
communion avec le pape
 La loi de Théodose II du 4 août 435 sacrifie Nestorius pour obtenir l’accord entre l’Église
d’Alexandrie dirigée par Cyrille et celle d’Antioche dirigée par Jean sur une profession de
foi commune.
D) La législation religieuse
 On discerne plusieurs étapes dans la législation religieuse :
 de 312 à 379, la législation est inspirée du droit constantinien. Le christianisme reçoit les
mêmes privilèges qu’avaient les cultes publics romains et le judaïsme ; les empereurs gardent
le titre de grand pontife jusqu’en 379
 Dès 313, le clergé chrétien (à l’instar des juifs) a reçu de Constantin la dispense des
charges municipales ; les clercs sont dispensés d’être nommés à des responsabilités ou
collecteurs d’impôts. Ils sont également exempts de diverses charges : l’hospitalitas
(obligation de loger soldats ou fonctionnaires), les impôts fonciers, les charges qui imposent
un travail physique ou manuel, le transport des denrées annonaires, etc. Ces faveurs
provoquent un afflux de candidats à la prêtrise. Ceci découle de la reconnaissance du
christianisme à l’instar des autres cultes (les prêtres païens étaient déjà dispensés des mêmes
charges).
 Le clergé va recevoir des privilèges judiciaires. Constantin crée l’audience épiscopale
permettant aux évêques de juger sans appel les causes civiles à l’instar des autorités
religieuses juives
 Constance II interdit de traîner les évêques devant un tribunal ordinaire et ordonne de les
soumettre au jugement de leurs pairs, dans le cadre d’un synode. Théodose Ier ajoute
l’interdiction de citer un évêque à témoigner et interdit de soumettre les prêtres à la question .
Pour les affaires civiles et religieuses, les clercs sont renvoyés au jugement d’un synode
présidé par l’évêque, mais ils sont déférés aux tribunaux ordinaires pour les affaires
criminelles. Le clergé reçoit le droit d’affranchir les esclaves dans les églises. On reconnaît
aussi le droit d’asile dans les églises, à l’instar des temples, autels et statues impériales..
 Constantin accorde aux églises le droit de recevoir des legs et des successions, mais
Valentinien Ier interdit en 370 aux clercs de fréquenter les maisons des veuves et des
mineures orphelines et de recevoir d’elles quoi que ce soit par testament ou donation sauf
s’ils en sont parents ou héritiers légitimes. En 434, Théodose II attribue aux églises et
établissements monastiques le droit de recueillir les successions de leurs membres décédés
intestats sans laisser de parents, ce droit de succession sur les membres du corps avait déjà
été donné aux naviculaires et aux décurions et à d’autres.
 Constance II fait enlever la statue de la Victoire qui se dressait au Sénat depuis l’époque
d’Auguste et il interdit le culte païen (356-357). À la suite de cela, de nombreux temples
sont abandonnés et l’État décide d’en protéger certains contre le pillage opéré par les
chrétiens, qui risque de faire disparaître les œuvres d’art.
 Face aux disputes post-nicéennes, Constance II décide d’imposer un credo à l’Empire et
oblige 400 évêques d’Occident, qu’il a retenu durant sept mois à Rimini, à souscrire à ce texte homéen
(359-360)
E) Le tournant de 380
 L’édit Cunctos populos de 380 marque un tournant puisqu’il stipule que seuls seront appelés
“chrétiens catholiques” ceux qui suivent la loi chrétienne reconnue par l’État et qui sont en
communion avec les évêques dont la liste est mentionnée.
 L’arianisme, comme doctrine religieuse, prend dès lors une dimension politique : il est associé
aux ennemis de l’Empire (les Goths) et combattu par les Romani, qui sont assimilés aux catholiques,
c'est-à-dire aux nicéens.
 Arcadius et Honorius confirment l’exclusion des ariens, dès la mort de Théodose (395).
Ils aggravent la législation en invitant à ne pas considérer les ariens comme chrétiens et à ne
tolérer aucun écart par rapport à la foi nicéenne.
 À partir de la chute de Rome et de la mort d’Alaric, fin 410, la politique impériale à
l’égard des donatistes est totalement intransigeante.
 Théodose est le premier à refuser le titre de grand pontife. En 381 et 385, il interdit tout sacrifice
et n’autorise les réunions dans les temples que s’il n’y a pas de sacrifice
 À la fin du IVe siècle, les subventions aux cultes païens sont supprimées, ce qui les conduit à la
ruine car leurs fidèles ne faisaient pas de dons
 Théodose (379) s’estime investi d’une mission divine ; de nombreuses lois viennent assurer
l’unité autour de la religion désormais considérée comme officielle, elles sont dirigées contre les
schismes et les hérésies et contre les païens.
 L’emprise chrétienne devient plus grande sur le calendrier :
 Les fêtes païennes ne sont plus fériées à partir de 395.
 La loi du 1er février 425, de Théodose II, réorganise le système des jours où sont interdits
les spectacles en fonction du calendrier chrétien : un temps pour la prière, un temps pour le
divertissement. : dimanche, Épiphanie, Noël, les jours du temps pascal (une semaine avant et
après Pâques), la Quinquagésime. La loi est reprise dans le code justinien. Durant le Carême,
on suspend les procès et les tortures mais on n’interdit pas les spectacles.
 Une nouvelle notion de sacrilège s’élabore. Les atteintes à la religion chrétienne deviennent des
sacrilèges à partir de 380.
 Ambroise de Milan élabore une théologie politique qui porte en germe les bases du droit public
de l’Église et la théorie médiévale de la séparation des deux pouvoirs.
 Tout en rappelant le principe paulinien que toute autorité vient de Dieu, il réaffirme que
l’empereur est assujetti à la règle commune d’obéissance à la loi divine, donc, dit-il, à
l’Église chrétienne. « L’empereur est dans l’Église mais non au-dessus, il doit chercher à
l’aider, non à la combattre »
 Toutefois, dans son œuvre, il assimile l’Empire chrétien à l’État théocratique d’Israël et
légitime ainsi la répression de l’hérétique tout comme la guerre contre le Barbare ennemi de
l’Empire.
 La prise de Rome par Alaric (410) événement qui n’a pas, en fait, de grandes conséquences,
provoque un choc psychologique considérable.
 Dans le contexte des invasions barbares, ce sera le rayonnement de la Rome pontificale qui va
supplanter celui de la Rome des Césars, notamment sous l’influence de saint Léon le Grand. Une
nouvelle théologie politique se met donc en place, tout au moins en Occident, car, en Orient, à
Byzance, c’est encore la théologie eusébienne de l’empire chrétien qui demeure.
4) ARIANISME ET PAGANISME AU POUVOIR
 Les migrations barbares, qui ont débuté vers le IIe siècle, s’accentuent aux IVème-Vème siècles
 Constantin meurt le 11 mai 337. L’empire est partagé entre ses trois fils :
 Constance (Orient),
 Constantin II (Gaule, Espagne et Bretagne) et
 Constant (le reste de l’Occident) qui élimine bientôt Constantin II et devient le seul
souverain d’Occident.
 Finalement, c’est Constance II qui devient le seul empereur d’Orient et d’Occident, de 350
à 361.
 Celui-ci, par une mesure du 1er décembre 356, interdit totalement les sacrifices païens. Il
prescrit même la démolition des temples mais semble n’avoir pas été obéi en Occident.
 Il met en place une forme de césaro-papisme (Ch. Pietri). Il s’intitule “l’évêque des
évêques” et veut placer Constantinople sur un pied d’égalité avec Rome. Il n’hésite pas à
exiler le pape Libère (†366, pape en 352) qui a défendu Athanase. La fin du règne de
Constance II est marquée par l’exil des évêques non-ariens.
 À cette époque, la menace barbare est toujours aussi présente. Les Alamans envahissent la Gaule
et les troubles sont matés par le beau-frère de Constance II, Julien.
 Ce même Julien est envoyé ensuite par l’empereur combattre les Perses qui ont envahi la
Mésopotamie. Julien est proclamé empereur par ses troupes au moment de la mort de
Constance II.
 Julien (emp. de 361 à 363), neveu de Constantin, orphelin de bonne heure, se détourne à l’âge de
l’adolescence du christianisme, à cause de la sévérité de l’éducation qu’il a reçue et de sa découverte
des philosophes. Sa religion est assez syncrétiste. C’est une pratique de rites secrets visant à faire
intervenir les dieux et les démons dans l’âme des initiés. « Julien vénère Zeus (le père), Hélios (le fils,
semblable à lui, médiateur entre l’idée de bien et la création), une troisième hypostase, la mère des
dieux, une vierge née sans mère… » (P. Maraval).
 Après son accession au pouvoir, à l’opposé de la politique césaro-papiste de Constance II, il
prône la liberté de culte. Mais, rapidement, elle devient à sens unique, en faveur d’une restauration du
paganisme. Il passe ensuite à un anti-christianisme virulent.
 Pour restaurer le paganisme, il crée un corps sacerdotal sur le modèle de la hiérarchie
chrétienne, corps qu’il invite à mener une vie austère, à donner l’exemple de la piété, de la
charité et de la fraternité.
 Il exclut les chrétiens de l’enseignement, sous le prétexte qu’on ne peut expliquer les
auteurs classiques si l’on « méprise les dieux qu’ils ont honorés ». Il les exclut ensuite des
fonctions administratives et renvoie en exil les évêques qui avaient été rappelés, dont
Athanase d’Alexandrie. Cependant, il se heurte à une certaine résistance, parfois passive,
du corps des fonctionnaires.
 Mais Julien entreprend de régler le problème perse. Il entraîne son armée, sans préparation
suffisante, dans une expédition et celle-ci échoue devant Ctésiphon, la capitale perse. L’armée vaincue,
commandée par son successeur, l’empereur chrétien Jovien (363-364), qui a traité avec les Perses,
perdant deux provinces orientales de l’Empire, entame une retraite humiliante, qui présage les
difficultés futures.
 Tout en rendant sa place au christianisme, Jovien ne rend pas au clergé l’ensemble des
privilèges dont il jouissait auparavant.
5) LA FIN DE L’EMPIRE ROMAIN D’OCCIDENT
 Le fait nouveau, ce sont les invasions barbares massives. On assiste à l’irruption en Europe de
certains peuples des steppes :
 Iraniens comme les Alains,
 Turco-mongols comme les Huns qui s’installent sur la rive gauche du Danube moyen à
partir du Vème siècle.
 L’avancée des Huns entraîne une poussée des autres peuples vers l’ouest.
 Les Wisigoths (Goths de l’Ouest ou Goths sages) obtiennent en 376 de l’empereur Valens
le droit de s’abriter dans l’empire. Il faut néanmoins attendre leur victoire sur l’armée
impériale venue mater leur soulèvement (Andrinople, 378) pour qu’un véritable statut leur
soit reconnu : le foedus convenu en 382. L’installation officielle des Wisigoths dans l’empire
conduit à un regain de l’arianisme.
 C’est Gratien (375-383), empereur d’Occident, fils de Valentinien I er (364-375), successeur de
Jovien, qui nomme le successeur de Valens (mort à la bataille d’Andrinople) à la tête de l’Empire
d’Orient : Théodose Ier (379-395). C’est un militaire originaire d’Espagne, qui est baptisé au début de
son règne (380). Comme le successeur de Gratien, Valentinien II (383-391) , est un homme jeune, de
peu d’envergure, Théodose doit s’affronter à des usurpateurs. Celui-ci restaure l’unité de l’Empire en
394, mais meurt l’année suivante à Milan.
 Théodose Ier choisit de soutenir l’orthodoxie contre les dissidences, désormais considérées
comme des hérésies et sanctionnées par les lois.
 L’arianisme s’efface (concile de Constantinople, 381), les signes du paganisme
disparaissent et la situation des juifs se dégrade lentement.
 À la mort de Théodose (395), l’empire est divisé entre ses deux fils :
 pour l’Occident : Honorius (384-423), qui a douze ans, sous l’autorité du vandale Stilicon
(360-408)
 en Orient, Arcadius (v. 377-408), dix-huit ans, sous celle du préfet Rufin. Honorius fait
tuer Stilicon, mais, après 406, il ne peut résister à l’invasion des Goths d’Alaric, qui finissent
par entrer dans Rome (24 août 410) après un long siège. Un traité est signé avec les
Wisigoths qui occupent l’Aquitaine.
 Après la mort d’Honorius et la régence de Galla Placidia (389/392-450), fille de Théodose, sur
l’Occident le fils de celle-ci, Valentinien III (419-455), monte sur le trône. Il entretient de bonnes
relations avec Théodose II (401-450, empereur d’Orient en 408) et le Code théodosien (438) est la
dernière tentative d’unification juridique entre l’Orient et l’Occident.
 439, Genséric s’empare de la province de Carthage et menace l’Italie. La paix est signée en
442 : Genséric garde les plus riches provinces d’Afrique et en est considéré comme prince souverain. Il
mène alors une politique religieuse pro-arienne.
 En Gaule, l’influence impériale se rétrécit. En 451, de surcroît, c’est l’invasion des Huns. Le
généralissime Aetius remporte sur Attila la bataille des Champs catalauniques , aidé en cela par les
Wisigoths.
 En 452, Attila envahit l’Italie du Nord. En compagnie de deux sénateurs, le pape Léon part à
sa rencontre et obtient qu’il n’envahisse pas Rome. Mais, trois ans plus tard, c’est Genséric, le
Vandale, qui met Rome au pillage pendant deux semaines.
 À la mort de Valentinien III, qui a essayé, avec le peu de pouvoir qui lui reste, de maintenir les
institutions romaines, Pétrone Maxime, élu par le Sénat, ne règne que quelques mois.
 Puis Avit se proclame empereur à Arles. Genséric est vaincu par le général Ricimer, qui
bat aussi Avit.
 Majorien, officier supérieur de nationalité romaine, est proclamé empereur. Il se fait
reconnaître aussi en Gaule et en Espagne et bat le roi wisigoth Théodoric. Face aux
Vandales, il essuie un demi-échec. Finalement, il est assassiné par le général Ricimer qui
gouverne tout en laissant à Libius Sévère un titre impérial sans contenu réel. À la mort de
Libius Sévère, Ricimer se heurte à une armée envoyée en Italie par l’empereur d’Orient pour
rétablir l’ordre.
 En 476, Odoacre, roi barbare, commandant les troupes barbares en Italie, dépose le jeune
empereur, le petit Romulus Augustule, renvoie les insignes impériaux à Constantinople et se proclame
roi d’Italie.
VIII) LA MISE EN PLACE DES INSTITUTIONS ECCLÉSIALES
1) LE CANON DES ÉCRITURES
 Si tous les juifs sont d’accord sur le Pentateuque et les Prophètes (ensemble qui inclut les livre
dits historiques), le 3ème ensemble, appelé Écrits, est moins défini
 Flavius Josèphe, ainsi que le Talmud de Babylone, considèrent que la Bible contient 24
livres.
 La décision prise par les rabbins réunis à Jamnia vers 90-100 paraît normative, mais
certains groupes juifs, de langue grecque, admettent en supplément le corpus
deutérocanonique.
 La Grande Église, au IIème siècle, a tendance à reprendre à son compte les deutérocanoniques,
avant de les placer, surtout en Orient, à partir du IIIème-IVème siècle, sur un pied d’infériorité.
 Les chrétiens adoptent la version grecque des Septante, tandis qu’elle est rejetée par le
judaïsme au milieu du IIème siècle, qui lui préfèrent les versions d’Aquila et de Symmaque.
 Vers la fin du IIème siècle, sans qu’il y ait de décision formelle, l’ensemble des communautés
chrétiennes s’accorde sur un corpus du Nouveau Testament, ce dont témoigne le canon de Muratori.
 C’est aux Ier-IIème siècle que, dans les communautés chrétiennes, le codex tend à
remplacer le rouleau de parchemin en usage dans le judaïsme
 Dans les premiers siècles, on utilise volontiers, en milieu chrétien, comme méthode
d’interprétation, la typologie et l’allégorie.
2) LES INSTITUTIONS DE L’ÉGLISE LOCALE DANS LES PREMIERS SIÈCLES
 Dans les premiers temps de l’Église, on rencontre une certaine diversité d’organisation des
ministères, qui se transforment en fonction des besoins avant de s’institutionnaliser
 On sera également rendu prudent par le fait qu’elles ont souvent été lues de façon à valider des
hypothèses liées à la situation postérieure de l’Église
 Sur la communauté primitive de Jérusalem, on dispose naturellement de ce qui se lit dans les
Actes des Apôtres, avec l’institution des Douze par Jésus, en référence aux douze tribus d’Israël.
 Plusieurs textes patristiques du IIème siècle nous révèlent l’évolution vers l’épiscopat
monarchique.
 Certaines fonctions disparaissent plus ou moins rapidement suivant les communautés :
prophètes et prophétesses, docteurs ou didascales, tandis que le mono-épiscopat se répand
progressivement. semble qu’on puisse affirmer de manière solide que cette institution est
bien établie à Rome au temps de Denys de Corinthe (170) et d’Irénée (180).
 C’est dans la première moitié du IIIème siècle que se met en place la distinction entre clercs et
laïcs. Ce n’est pas encore certain chez Clément d’Alexandrie (chez qui apparaît le mot kléros), mais
c’est plus net chez Tertullien (qui parle de clerus) et tout autant dans La tradition apostolique qui
désigne les ministres sous le nom de klérikoi.
3) LES INSTITUTIONS DE L’ÉGLISE LOCALE À PARTIR DU IIIÈME SIÈCLE
 La distinction entre clercs et laïcs est structurante pour les communautés.
 Les laïcs n’assurent plus de fonction spécifique en son sein, ils ne peuvent plus ni
enseigner ni prêcher.
 Les catéchistes laïcs que signalent les Constitutions apostoliques (VII, 32, 18) ne sont
plus qu’une exception.
 Les ordres de laïcs disparaissent :
 celui des confesseurs, avec la fin des persécutions
 celui des vierges se fond dans la vie monastique ; celui des veuves tend aussi à s’en
rapprocher ?
 Les diaconesses subsistent un peu plus longtemps, mais avec des fonctions limitées
 On trouve aussi des fidèles qui choisissent un mode de vie itinérant, marqué par l’errance et la
mendicité, et fondé sur Mt 10.
 Dans le clergé, on distingue entre les clercs du premier rang : évêques, prêtres et diacres, et ceux
qui sont subalternes. Ceux-ci assurent généralement des fonctions liturgiques.
 Les fossoyeurs (fossores) ensevelissent les morts, les portiers ont la garde des édifices
ecclésiastiques : service d’ordre aux portes, entretien du mobilier, éventuellement sonnerie
des cloches
 Le lecteur a pour mission de lire l’Écriture lors des assemblées liturgiques, mais la
lecture du psaume est souvent confiée au chantre ou psalmiste, fonction qui constitue un
dédoublement de celle du lecteur. Le lectorat est souvent confié à des jeunes enfants destinés
à l’état clérical, regroupés dans une école épiscopale.
 Les exorcistes ont pour fonction d’imposer les mains, en récitant une prière, soit sur les
catéchumènes, soit sur les malades mentaux, auxquels ils doivent aussi venir en aide
matériellement. Cette fonction, couramment exercée aux IV ème et Vème siècle, disparaît
ensuite, même si le titre demeure, sans contenu réel.
 Dans la Rome des IVème et Vème siècles, les acolytes portent l’eucharistie aux malades et
ils portent aux prêtres ne pouvant participer à la messe papale et célébrant dans les tituli, un
morceau de l’hostie consacrée par l’évêque de Rome, le fermentum, qu’ils insèrent dans le
calice.
 Les sous-diacres sont au service des diacres.
 L’inscription de l’Église dans le territoire se fait en général d’abord à partir de la cité, même si
l’on connaît quelques exemples d’évêques itinérants (en Afrique du Nord).
 La densité variable de l’urbanisation conduit donc à des situations très diverses, avec de petits
diocèses en Afrique du Nord, en Italie centrale et méridionale, voire même en Provence, et dans le
delta du Nil, ou au contraire avec des diocèses très vastes, comme en Gaule ou bien en Orient.
 Dans le premier cas, l’évêque garde le contrôle de l’ensemble de la pastorale
 dans le second, il est amené à déléguer à des clercs qui prennent en charge les
communautés locales.
 La création des sièges épiscopaux relève en général des conciles provinciaux. Outre les églises,
les évêques bâtissent des édifices à vocation charitable. Certaines églises deviennent très riches, ce qui
correspond à un patrimoine foncier très vaste
4) L’ÉGLISE UNIVERSELLE
 Bien que chaque Église autour de son évêque constitue un tout, se fait jour aussi le sentiment de
faire partie d’une même Église catholique
 Les évêques communiquent entre eux, en s’informant de leur élection, en accordant des lettres de
communion aux membres de leur église se rendant dans une autre et en annonçant les
excommunications opérées
 Cependant l’institution représentant le plus la communion de manière habituelle entre églises est
le concile :
 Les conciles interprovinciaux sont plus exceptionnels, destinés à régler des situations de
crise : le concile d’Arles réuni par Constantin en 314 rassemble des évêques gaulois,
espagnols, bretons, africains, italiens et illyriens face à la crise donatiste
 Les conciles généraux sont les plus connus
 Malgré la recherche d’une unanimité parmi les membres (les évêques qui refusent les décisions
du concile sont déclarés anathèmes), certains conciles ont du mal à s’imposer : l’exemple le plus
notoire est celui du concile de Chalcédoine.
 Certains sièges épiscopaux jouent un rôle plus important que d’autres. C’est naturellement le
cas des archevêques métropolitains, à la tête de leur province
 En Occident, il n’existe pour toute l’Italie suburbicaire (Italie centrale et méridionale),
qu’un seul métropolitain, l’évêque de Rome. Ce primat, parfois contesté, s’impose ensuite
aux Vème-VIème siècles, ce que montrent les lettres de Grégoire le Grand.
 Dans l’Italie annonaire, qui va de l’Italie du Nord au Danube, c’est le siège de Milan qui
s’impose, en tant que lieu de résidence impériale, notamment du fait de la figure d’Ambroise
 En Gaule, joue d’abord l’organisation provinciale romaine. Mais le siège d’Arles va
acquérir une certaine prépondérance.
 En Bretagne, c’est le siège de Cantorbéry qui est métropolitain ; York le devient pour le
nord à partir de 664. En Irlande, en revanche, la hiérarchie se constitue autour des
monastères.
 Les conciles œcuméniques mettent en valeur l’autorité des patriarcats orientaux :
Constantinople, Alexandrie, Antioche, Jérusalem : le titre de patriarches est donné à leurs titulaires à
partir de Justinien, celui de Constantinople prend le titre de patriarche œcuménique. Les grands sièges
entretiennent des relations régulières ; parfois un prêtre sert de représentant permanent :
l’apocrisiaire.
 En Occident, l’autorité du siège de Carthage, primat d’Afrique depuis Cyprien, s’affaiblit du
fait de la crise donatiste et disparaît lors de la conquête arabe.
 L’importance du siège romain ne fait que croître à partir du IVème siècle, alors qu’à cette
époque-là il a encore du mal à s’affirmer (aucun rôle lors des conciles d’Arles de 314 et de Nicée de
325).
 C’est le pape Damase qui assoit son autorité en la fondant sur les figures de Pierre et Paul
et non pas sur le rôle de capitale politique de Rome.
 Cette démarche est reprise et approfondie par Léon le Grand, qui s’oppose
vigoureusement au canon 28 du concile de Chalcédoine attribuant une seconde place à
Constantinople en tant que nouvelle Rome. La réception de l’autorité romaine est cependant
inégale selon les lieux.
5) LES PAPES DE LA PREMIÈRE MOITIÉ DU IVÈME SIÈCLE
 er
Sylvestre I (314-335), natif de Rome, hérite de l’affaire donatiste. Le siège de Rome joue un
rôle dans les conciles de l’époque, où il est représenté : Arles (314) et Nicée (325).
 Jules Ier devient pape (337-352) au moment de la mort de Constantin (22 mai 337). Son
épiscopat est caractérisé par la prudence et la sagacité avec laquelle il gère la crise arienne. Alors que
les partisans d’Eusèbe de Nicomédie cherchent à obtenir de lui un désaveu d’Athanase, Jules réunit à
Rome un synode d’une cinquantaine d’évêques principalement italiens, pour examiner la position des
deux parties. Athanase est reconnu comme l’évêque légitime sur le siège d’Alexandrie. Plutôt que de
faire le procès des Orientaux, Jules rappelle les règles de la discipline ecclésiastique dans les
procédures de jugement et d’appel, sans condamner ceux qui ne les ont manifestement pas respectées.
Il estime que c’est à lui qu’il revient de prononcer le jugement ultime. Mais il est désavoué par le
concile d’Antioche (automne 341). Aussi réclame-t-il que l’empereur réunisse un concile œcuménique.
Au concile de Sardique (automne 343), l’épiscopat se divise entre les Orientaux (anti-nicéens) et les
Occidentaux (pro-Jules).
 Libère (352-356), qui succède à Jules le 17 mai 352, se heurte à la politique pro-arienne
pratiquée par Constance II, qui demeure seul empereur (353).
 Au début de son épiscopat, en réponse à la synodale des Orientaux rappelant à son
prédécesseur les chefs d’accusation pesant sur Athanase, Libère décide de convoquer un
synode à Rome auquel il convoque Athanase. Mais celui-ci refuse de s’y rendre. Le pape fait
lire l’acte d’accusation des Orientaux et la lettre de défense d’Athanase signée de 80
évêques. Il envoie des légats en Arles où se trouve l’empereur pour demander à celui-ci de
réunir un concile œcuménique.
 Mais les légats (dont Vincentius de Capoue et Marcellus), sous la pression d’Ursace de
Singidunum et de Valens de Mursa, signent une condamnation d’Athanase. L’empereur
invite alors par un édit tous les évêques à condamner Athanase. Libère résiste alors, en
adressant des lettres (notamment à Ossius de Cordoue) demandant aux évêques de ne pas
suivre cet exemple.
 En 354, Libère réitère sa demande à l’empereur de réunion d’un concile.
 Au début de l’été 355, à Milan, Constance II réunit plusieurs centaines d’évêques
occidentaux et quelques orientaux. Dans une séance mouvementée, ils signent la
condamnation d’Athanase, à l’exception de Denys de Milan, Eusèbe de Verceil et Lucifer de
Cagliari, qui sont aussitôt exilés.
 Libère adresse aux trois récalcitrants une lettre de félicitation. Mais il est isolé et menacé
et il repousse les tentatives de conciliation de l’empereur portées par son chambellan
Eusebius. Le préfet de la ville, Leontius, l’arrête alors et le fait conduire à Milan, au début
de l’été 356. Devant l’empereur, il maintient son attitude de fermeté, rappelant qu’il fallait
souscrire aux actes du concile de Nicée et rappeler les exilés avant d’étudier le cas
d’Athanase. Libère est alors expédié en exil, sans procès, en Thrace, auprès de Demophilos.
Son archidiacre Félix est choisi pour le remplacer.
 Au bout de deux ans d’exil, il choisit de désavouer Athanase. Quatre lettres témoignent
des concessions successives auxquelles il a consenti. La première (ep. Studens) explique
comment, désirant rester en communion avec l’ensemble des évêques de l’Église catholique,
il déclare séparer Athanase de la communion de l’Église romaine. La seconde lettre (Pro
deifico), également adressée aux Orientaux, rappelle qu’il a condamné Athanase et
souscrit à une profession de foi (formulaire de Sirmium, 351). Il adresse une nouvelle
lettre, cette fois aux chefs du parti majoritaire (Ep. Quia scio) leur demandant d’intercéder
pour lui auprès de l’empereur. Enfin, il se tourne vers Vincentius de Capoue (Ep. Non doceo)
en suggérant la réunion d’un synode en Campanie pour « le sortir de son exil ».
 Ayant obtenu l’autorisation de revenir à Rome au second semestre 358, Libère s’abstient
ensuite de participer aux grandes querelles théologiques.
 Il n’est pas convoqué au synode de Rimini réuni par l’empereur dans l’été 359 et achevé
le 10 octobre.
 De même, en janvier 360, le siège de Rome n’est pas représenté au concile de Constantinople
qui confirme la formule de Rimini. Pourtant, quand l’accession de Valens au trône d’Orient (364)
amène les Orientaux à rechercher l’appui du pape, celui-ci leur demande de souscrire à la foi de Nicée
(concile de Tyane, 367). Le reste de son activité est peu connu, hormis quelques travaux dans Rome.
 Cette époque qui va de Constantin à la fin de l’empire romain d’Occident est marquée par la
construction des grandes basiliques romaines.
IX) LA LITURGIE DANS LES PREMIERS SIÈCLES
1) DÉFINITION ET SOURCES
 Le terme de “liturgie” vient du grec leitourgia, de leitos : public, et de ergon : oeuvre.
 Le mot français semble attesté pour la première fois en 1579 : « Ordre des cérémonies et
des prières dont se compose le service divin, tel qu'il est déterminé par l'autorité spirituelle
compétente. »
 Dans le monde païen, une leitourgia désigne une fête civique célébrée aux frais d’un riche
personnage.
 Les juifs, quant à eux, ont adopté ce mot pour désigner le service des prêtres au Temple (2
Ch 13,10).
 Ce terme, aujourd’hui classique, est d’un usage récent en Occident
 Dans l’Église grecque médiévale, le mot leitourgia a le sens précis de célébration eucharistique.
Dans le Nouveau Testament, il désigne le culte, le service divin, sans exclure des sens moins précis
comme le sacrifice spirituel ou le service de la charité
 Dans la Septante, c’est le service des lévites, traduit en latin par ministerium ou munus (la
charge) (Ex 28-39 (13 fois), Nb 4, 8...).
 Les textes magistériels contemporains ont approfondi la signification du mot.
2) LES PREMIÈRES ÉGLISES
 Les premières églises ont été établies dans des maisons particulières, ainsi qu’il est mentionné
dans les Actes des Apôtres ou lors de la confiscation de l’église de Cirta en 303 (points 3 et 4 de
l’annexe).
 Vers le IIIème siècle, les chrétiens achètent des maisons pour servir d’églises comme le titulus
equitii (la maison d’Equitius), près de l’église Saint-Martin-aux-Monts à Rome (fondée par le pape
Symmaque, 314-335). C’est une maison comportant une salle voûtée séparée en deux nefs par des
piliers, pouvant contenir 400 personnes.
 La basilique Saint-Clément, à Rome, est construite au-dessus d’une école mithriaque et
elle est aménagée à partir d’un édifice du IIIème siècle.
 Alors que le temple païen est conçu comme demeure de la divinité, l’église chrétienne est avant
tout le lieu de rassemblement de la communauté (le mot église a les deux significations). C’est la
communauté tout entière qui célèbre le culte et non pas le prêtre seul.
 D’ailleurs, le mot hiéreus est d’abord appliqué au Christ, qui est le seul médiateur. Le prêtre
apparaît d’abord comme le chef de la communauté.
 Quand on en viendra, à la fin du IIIème siècle, à construire des édifices spécifiques pour le culte
chrétien, on tiendra compte des contraintes de la célébration dominicale et on adoptera, non pas
l’architecture des temples, dont la partie principale, abritant les symboles divins, est de petite
dimension, mais celle des basiliques, édifices publics servant à rendre la justice, tenir des réunions
politiques et même à abriter les marchés.
 De forme rectangulaire, divisées en trois ou cinq nefs par des rangées de colonnes, elles
sont couvertes d’un toit à charpente apparente. À une extrémité, souvent au fond d’une
abside, se trouve le siège du juge et du président. L’adaptation est facile à réaliser pour le
culte chrétien, avec l’emplacement de l’évêque, du presbyterium, de l’autel et du pupitre
pour les lectures.
 Certains chrétiens semblent avoir repris du paganisme la coutume de saluer le soleil levant, ce
que déplore le pape Léon le grand, dans un sermon prononcé vers 450
 Cependant l’habitude est courante de se tourner vers l’Orient pour prier.
 De même que les temples grecs et romains sont bâtis de façon à ce que les rayons du soleil levant
éclairent l’idole quand les portes sont ouvertes, certaines églises ont une façade orientée vers l’Orient.
Cependant cela offre l’inconvénient pour les fidèles, lorsqu’ils font face à l’Orient, de devoir tourner le
dos au prêtre et à l’autel. C’est peut-être une raison qui a poussé à orienter, par la suite, l’abside des
églises vers l’est.
 Contrairement à ce qu’on croit souvent, les chrétiens ne se réunissent pas dans les
catacombes pour se cacher. L’emplacement de celles-ci est d’ailleurs connu de tous. Ce sont
des lieux de sépulture. Quand les chrétiens s’y réunissent, c’est pour y prier (le culte
remplace ici le banquet funéraire qui réunissait les Romains au jour anniversaire du décès de
leur proche sur leur tombe).
3) LE BAPTÊME DES ADULTES DANS LES PREMIERS SIÈCLES
 Le rite baptismal se marque d’abord par la plongée dans l’eau, rite de purification
 le rite chrétien est pratiqué, comme le dit le livre des Actes, en vue du pardon des péchés
et de l’entrée dans l’Alliance. L’eau est symbole de mort et de vie, comme le marque saint
Paul : descendre dans la piscine, c’est descendre avec le Christ au tombeau, remonter de la
piscine, c’est entrer avec lui dans la résurrection pascale.
 l’originalité du baptême chrétien par rapport aux rites d’eau alors pratiqués c’est la
référence à l’historicité de Jésus.
 La foi est présentée comme condition au baptême : « Si tu crois de tout ton cœur, tu peux être
baptisé » (Ac 8, 38).
 C’est une démarche de conversion, de changement de vie, qui va entraîner une
modification du comportement quotidien (se détourner du culte des idoles).
 Le don de l’Esprit Saint apparaît comme une dimension importante du baptême. Dans le
livre des Actes, il est parfois rattaché à un geste d’imposition des mains pratiqué par les
Apôtres : c’est le cas pour les Samaritains auxquels Philippe annonce l’évangile et pour les
disciples de Jean-Baptiste que Paul rencontre à Éphèse (Ac 8, 5-17 ; 19, 1-7) Note
personnelle : c’est de la confirmation dont il s’agit…
 Outre le Nouveau Testament, les témoignages les plus anciens sur le rite du baptême viennent
de la Didachè et de Justin.
 Chez ce dernier, le baptême est présenté comme le sacrement de la rémission des péchés
et de la nouvelle naissance et il souligne la nécessité de l’adhésion à la foi de l’Église : les
candidats reçoivent un enseignement sur la doctrine et la manière de vivre des chrétiens et
passent par une préparation dans le jeûne et la prière, préparation à laquelle participe toute la
communauté.
 C’est vers la fin du IIème siècle qu’apparaissent les premiers témoignages sur l’existence d’un
catéchuménat.
 La grande expansion du christianisme, l’affluence des candidatures, poussent à une plus
grande exigence dans la formation de ceux qui viennent à la foi, ce que soulignent, a
contrario, les persécutions et l’émergence de sectes hétérodoxes en montrant le besoin de
chrétiens solides.
 Tertullien, Cyprien et Origène soulignent l’importance d’un temps de préparation. Ce
dernier distingue les débutants des véritables candidats et cette distinction est reprise par
Hippolyte de Rome, qui consacre quatre chapitres de la Tradition apostolique à « ceux qui se
présentent pour la première fois, afin d’entendre la parole » et ceux qui « sont choisis pour
recevoir le baptême » auxquels il affecte la suite de l’ouvrage.
 Hippolyte ne mentionne pas de rite d’admission au catéchuménat, mais précise qu’on
mène une enquête à l’égard de ceux qui se présentent, enquête qui porte sur leur état de vie et
sur les métiers qu’ils professent, car ils devront renoncer à ce qui serait contraire à la
condition des disciples du Christ (point 9 de l’annexe). Le catéchuménat dure trois ans. C’est
un temps non seulement d’instruction, mais aussi de probation morale.
 C’est seulement vers la fin du IVème siècle et en Occident qu’on trouve la mention d’une
célébration consacrant la première démarche vers l’initiation chrétienne. Un élément essentiel en est
l’imposition du signe de la croix sur le front (sphragis), comme en témoigne saint Augustin. On
rencontre aussi le rite du sel et l’imposition de la main.
 Alors qu’en Orient, cette célébration semble demeurer privée et présidée par le catéchiste, il
n’en est pas de même à Rome au Vème siècle, où le Sacramentaire gélasien l’organise en faisant
précéder l’imposition de la croix d’une exsufflation qui évoque tout autant le geste créateur de Dieu
que l’exorcisme, l’expulsion des puissances du mal à l’œuvre dans les créatures.
 Pendant son cheminement, le catéchumène est assisté par un fidèle chevronné qui lui
fait partager son expérience de la vie chrétienne, un parrain pour les hommes, une
marraine pour les femmes, souvent celui qui a éveillé le catéchumène à la foi. C’est sur son
témoignage que les responsables de l’Église décideront du moment opportun pour admettre
le catéchumène aux sacrements. Il est le garant (sponsor) selon le nom qu’on lui donne
souvent, ou le père spirituel.
 Le terme d’ « auditeurs » désignant les catéchumènes montre l’importance de la catéchèse orale
pendant le temps de préparation. Celui qui enseigne peut être un clerc ou un laïc.
 Augustin d’Hippone conseille au catéchiste, tout en tenant compte de la culture du
catéchumène et de ses intentions véritables, de lui exposer l’histoire du salut, depuis la
Genèse jusqu’à la vie actuelle de l’Église, de telle façon que le débutant « croie en écoutant,
espère en croyant et aime en espérant ».
 C’est dans ce but qu’il rédige son De catechizandis rudibus [De la manière de catéchiser
les ignorants] et l’adresse à un diacre de Carthage.
 Les catéchumènes participent seulement à la liturgie de la parole dans l’Eucharistie.
 Au début du Carême, le catéchumène est présenté à l’évêque par son parrain qui témoigne de
ses bonnes dispositions.
 On célèbre alors “l’inscription de son nom”. C’est un acte officiel de candidature de la
part du futur initié et d’un choix (d’une “élection”) de la part de l’Église au nom du Seigneur.
 On l’appelle alors “élu” (electus) à Rome, “candidat” (competens) dans le reste de
l’Occident, “celui qui va être illuminé”, en Orient (mellon photitsestai ou photitsomenos).
 Pendant le Carême, il écoute des catéchèses supplémentaires expliquant les différents articles
du Credo.
 Les recherches ont été nombreuses sur l’origine du Credo, présent dans le rite du baptême tel que
le rapporte Hippolyte. Deux formules s’étaient développées, l’une trinitaire, l’autre christologique, et
ce n’est que vers 200 qu’elles se sont fondues en une seule
 Au terme de cet enseignement, le formulaire de foi est remis (traditio symboli) aux candidats.
 Ils devront l’apprendre par cœur et être capables de le redire, à la fin du Carême (la
redditio symboli), exprimant ainsi leur adhésion à la foi de la communauté.
 Les dimanches de Carême sont le lieu des scrutins, qui servent d’épreuve et d’examen.
 À côté de la préparation catéchétique et de la préparation liturgique, prend place également une
préparation ascétique des candidats.
 Ils sont engagés à correspondre, par une vie d’ascèse et de pénitence, à ce que l’Église
accomplit pour eux. Ils doivent donc s’abstenir de boire du vin, de manger de la viande, de se
baigner ; ils sont invités à partager avec les pauvres, à prier la nuit et à vivre la continence.
 LA CELEBRATION est découpée en plusieurs temps :
Rites préliminaires
 Reddition du symbole,
 Rite de l’Effeta (point 15 de l’annexe),
 Renonciation au démon et adhésion à Jésus-Christ (point 16 de l’annexe),
 Proclamation du Credo (dans l’ordo romain).
L’usage de l’huile
 L’usage de l’huile est attesté dès le IIIème siècle. Si les Églises d’Afrique ne connaissent
qu’une sorte d’huile, chrisma, d’autres en mentionnent une autre : l’huile d’exorcisme de la
Tradition apostolique (qu’on appelle aujourd’hui l’huile des catéchumènes, qui a pour but
d’aider à chasser le démon), distinguée de l’huile d’action de grâce (le saint chrême actuel)
(huile de joie). L’évêque prononce une prière d’épiclèse sur l’huile (point 17 de l’annexe).
L’huile rappelle le thème de la lutte (on frotte les lutteurs avec de l’huile avant le combat).
L’immersion
 L’onction sur tout le corps suppose déjà la nudité complète qu’exige l’immersion (La Didachè,
au chapitre 7, prévoit la possibilité du baptême par infusion) (point 18 de l’annexe).
 C’est l’occasion pour les Pères de déployer tout un symbolisme : l’abandon de la vie
passée, le renoncement au vieil homme avec sa condition mortelle, l’assimilation au
Seigneur sur la croix, l’égalité de tous les hommes devant le mystère de la régénération.
 Toutes ces significations s’enracinent dans l’évocation du Paradis : ce vêtement que le
baptisé dépose à la suite du Christ, c’est celui qu’Adam avait dû prendre quand il a ressenti la
honte après sa désobéissance.
 Par la plongée dans l’eau qui évoque la descente avec Jésus au tombeau et la résurrection
avec lui au jour de Pâques, c’est la création nouvelle qui est ici célébrée.
 L’élu franchit le rideau qui pend des architraves reposant sur les colonnes qui entourent
la piscine, descend dans la vasque remplie d’une eau courante et engage le dialogue avec le
célébrant : « Crois-tu au Père... – Je crois... au Fils... à l’Esprit... »
 Après chaque réponse, le célébrant provoque une plongée dans l’eau. Telle est la
pratique la plus répandue en Occident. Plus tard, alors qu’en Occident, se répandra la
formule : « Moi, je te baptise au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit », l’Orient gardera
une forme passive : « Est baptisé N... » afin de bien souligner que le ministre n’est que
l’instrument de la grâce.
 Le nouveau baptisé remontera de la piscine par le côté opposé à celui où il y est entré.
Rites post-baptismaux
 On constate de notables divergences entre les Églises.
 En Afrique l’onction et l’imposition de la main (Tertullien, Cyprien, Augustin) évoquent la
consécration sacerdotale et le don de l’Esprit. Toutes les Églises d’Occident connaissent la chrismation
après le bain baptismal.
 À Milan, justement, en répandant l’onguent, appelé myrum (ou myron) sur la tête, au sortir de la
piscine, l’évêque prononce une formule : « Dieu, le Père tout-puissant, qui t’a fait renaître de l’eau et
de l’Esprit et qui t’a pardonné tes péchés, t’oint lui-même dans la vie éternelle ».
 Pourtant, en règle générale, c’est la première des deux onctions qui a gardé la
signification de don de l’Esprit
 L’imposition de la main, lorsqu’elle est attestée, s’accompagne d’une prière invoquant la venue
de l’Esprit-Saint. Lorsqu’elle est absente, il semble que le même effet soit attribué à l’onction.
 C’est en Gaule, au Vème siècle, qu’apparaît le mot de confirmation. L’usage s’introduit de
réserver à l’évêque le deuxième acte de l’initiation et donc de le séparer du premier, et cette
discipline est attestée en 416 par le pape Innocent Ier.
Catéchèses mystagogiques
 La semaine suivant Pâques est consacrée à expliquer aux néophytes (nouveaux baptisés) la
signification des cérémonies du baptême qu’ils ont vécu : c’est la catéchèse mystagogique, catéchèse
des sacrements. Pendant une semaine, ils demeurent vêtus de blanc.
4) LE BAPTÊME DES PETITS ENFANTS
 Origène mentionne le baptême des petits enfants (pédobaptisme) comme remontant aux
Apôtres, mais Tertullien s’en démarque. Il s’agit généralement d’enfants âgés de quelques années,
baptisés avec leurs parents, mais Augustin mentionne que, dans le cas des bébés, ils sont baptisés
« dans la foi de l’Église »
 Cependant, on dispose d’autres attestations de pédobaptisme :
 dans le cas de Polycarpe : celui-ci confesse en effet : « Il y a quatre-vingt-six ans que je
sers [le Christ] » ;
 dans le fait que Tertullien combat le baptême des petits enfants (De baptismo, 18,4-5) ;
 dans la prescription d’un synode africain de 252 invitant à ne pas attendre le huitième jour
pour le baptême ;
 ou dans le cas d’une petite fille rapporté par Cyprien (De lapsis, 25).
5) LE RE-BAPTÊME DES HÉRÉTIQUES
 La question de la réitération du baptême pour les hérétiques provoque une vive dispute entre
Cyprien de Carthage et le pape Étienne.
 Conformément à la coutume africaine, Cyprien impose cette réitération en arguant du fait que
seule la Grande Église possède l’Esprit-Saint et peut donc le transmettre par le baptême.
 Il reçoit l’appui d’un concile réuni à Carthage en 220 et d’autres conciles à Iconium et à
Synnada vont dans le même sens dix ans plus tard.
 En revanche, à Rome, on reconnaît la validité du baptême conféré dans des groupes
hérétiques, pourvu que le nom du Christ ait été mentionné. On se contente d’imposer les
mains aux hérétiques qui demandent à entrer dans la Grande Église.
 Aussi l’évêque Étienne blâme-t-il sévèrement la position africaine. Cyprien refuse de
changer de position et s’assure l’appui de plusieurs évêques, dont Firmilien de Césarée de
Cappadoce et Denys d’Alexandrie. Les relations sont extrêmement tendues avec Rome et
l’affaire se termine par la mort des deux protagonistes en 257 et 258.
 Cependant elle apparaît comme l’une des causes du schisme donatiste au IVème siècle.
6) L’EUCHARISTIE
 Le lendemain du sabbat, jour de la Résurrection du Seigneur, est le jour de la réunion pour
la fraction du pain.
 En diverses langues, le dimanche (domenica = jour du Seigneur) porte un autre nom :
jour du soleil : Sunday, Sonntag, nom déjà employé par les païens grecs et romains. Les
chrétiens reprennent ce terme en l’attribuant au Christ surgissant du tombeau comme le soleil
après la nuit.
 La question de la date de Pâques agitera beaucoup l’Église des premiers siècles : les
communautés chrétiennes d’Asie mineure, se référant à une tradition rapportée aux apôtres Jean et
Philippe, célébraient la Résurrection au jour où les Juifs célébraient leur Pâque, le 14 Nisan. En
revanche, à Rome, on célébrait la fête le dimanche qui suivait le 14 Nisan.
 Grâce à saint Irénée, la solution romaine sera acceptée partout.
 La plus ancienne mention de l’institution eucharistique dont on dispose nous vient de la première
lettre de saint Paul aux Corinthiens, écrite vers 55 (1 Co 11, 20-26), qui témoigne que la célébration se
faisait dans le cadre d’un repas normal.
 Dans un premier temps, l’Eucharistie s’inspire du repas juif avec bénédiction ainsi que le
rapporte la prière de la Didachè (point 25 de l’annexe) : une petite Berakah pour la première
coupe, une autre pour le pain rompu et enfin une grande prière de bénédiction pour la
nourriture, la terre, l’alliance et la Loi. Les prières ont été christianisées.
 Dès le IIème siècle, l’Eucharistie est dissociée du repas communautaire et elle prend place le
dimanche ainsi que l’atteste Justin.
 La Première Apologie de saint Justin, écrite sous Antonin le Pieux (138-161) donne la
description de l’offertoire et de la prière eucharistique
 rassemblement,
 liturgie de la Parole comportant lectures de l’Ancien et du Nouveau Testament,
 homélie (exhortation à la mise en pratique de la parole proclamée),
 prière universelle
 la liturgie eucharistique :
 apport du pain et du vin,
 action de grâce consécratoire,
 fraction du pain,
 communion.
7) LE TÉMOIGNAGE D’HIPPOLYTE DE ROME
 La première prière eucharistique semblable aux nôtres est celle de la Tradition apostolique
d’Hippolyte de Rome (IIIème-IVème siècle). contestable
 La description d’Hippolyte commence avec l’offertoire. Les diacres apportent les dons. Puis
l’évêque étend les mains sur les dons, et les prêtres présents font de même, et en faisant ce geste,
l’évêque commence la prière : les prêtres participent à la messe de l’évêque (ils concélèbrent)
 La prière eucharistique se compose de l’expression des motifs qu’on a de bénir le Seigneur,
dans une formulation nettement christologique (œuvre créatrice et rédemptrice du Verbe incarné se
constituant un peuple par sa mort et sa résurrection) ; du récit de l’institution ; de la mémoire de la mort
et de la résurrection du Fils (anamnèse) débouchant sur l’offrande ; de l’épiclèse non pas en vue de la
transformation de l’offrande, mais comme appel des fruits du sacrifice sur les communiants ; après
l’action de grâce vient la supplication ; la doxologie.
8) LA CRÉATION DES FORMULAIRES EUCHARISTIQUES
Rites d’entrée
 Au cours du IVème siècle, l’entrée du célébrant dans la basilique prend l’allure d’un cortège
solennel. L’arrivée du président est doublée par une entrée et une intronisation de l’évangéliaire qui la
précède dans la liturgie romaine des VIIème-VIIIème siècles
 En même temps que l’autel, le pape vénère le livre qui y a été déposé. Puis l’évangile sera porté
par un diacre au sein de la procession des ministres. Chez les Byzantins, les honneurs rendus à la
Parole de Dieu ont rejeté dans l’ombre l’accès du prêtre au sanctuaire.
 Le chant d’entrée (Introït) s’ajoute au VIème siècle. La prière présidentielle est de peu antérieure.
 L’origine du Kyrie est antérieure au VIIIème siècle.
 Le Gloria, utilisé d’abord comme prière du matin, est introduit à la messe romaine de Noël au
ème
VI siècle, puis à celle des dimanches. Il demeure une marque de solennité.
Liturgie de la Parole
 Le concile d’Hippone (393) ordonne de ne lire que des textes de l’Écriture canonique.
 Jusque-là, en effet, les passions des martyrs ont fait l’objet d’une proclamation dans
l’assemblée, au moins en Afrique et en Gaule. Le nombre des lectures semble avoir été
variable selon les Églises.
 L’homélie revient à l’évêque qui délègue à un prêtre ou un diacre, ou, exceptionnellement, à un
laïc (en Orient).
 À la fin de la liturgie évangélique, se situe le renvoi des catéchumènes, qui précède
immédiatement la prière universelle. Celle-ci adopte une forme solennelle qui a persisté dans le
missel romain à l’office du vendredi saint : invitations suivies chacune d’un temps de silence et d’une
oraison reprenant la supplication et s’ouvrant sur l’Amen des fidèles.
 Le Credo, qui appartenait à la liturgie du baptême, n’entre dans la messe qu’au cours des luttes
contre l’arianisme.
 Il apparaît en Orient dans le premier quart du VIème siècle.
 En Occident, c’est le concile de Tolède de 589 qui décide son introduction – mais le place
avant le Pater – au moment de la conversion des Wisigoths ariens. C’est lors de la
controverse adoptianiste que Charlemagne et Alcuin, en 794, décident d’introduire le
Symbole de Nicée-Constantinople après l’évangile en y insérant le Filioque, incise que
désapprouve le pape Léon III, mais qu’il laisse opérer. Ce n’est qu’en 1014, sous la pression
de l’empereur saint Henri, que l’Église de Rome accepte d’introduire le Credo à la messe.
Liturgie eucharistique
 Dès le IIème siècle, on solennise l’apport, sur l’autel, de la patène et de la coupe, après la liturgie
de la Parole. Hippolyte de Rome précisera un peu plus tard que ce service est confié aux diacres.
 Cette valorisation des offrandes matérielles a une incidence sur la structure des églises
dont, jusque-là, le centre de gravitation était la chaire de l’évêque (la cathedra).
 L’autel, qui pouvait n’être jusque-là qu’une table de bois, est davantage solennisé. C’est à
partir du IVème siècle qu’apparaissent des autels plus solides, érigés en pierre. Le Liber
pontificalis relate comment Constantin fit don à chacun des deux basiliques Saint-Pierre et
Saint-Paul d’un autel d’argent massif incrusté d’or et de joyaux et pesant environ 350 livres.
 En matière de prières eucharistiques, les IVème et Vème siècles sont une période de création
intense, à Antioche notamment pour les prières de langue grecque.
 En Occident, si des éléments sont plus anciens, c’est seulement à l’époque de saint Grégoire
(590-604) qu’on peut considérer la prière eucharistique comme définitivement fixée. Elle est unique,
alors qu’en Gaule et en Espagne, les prières eucharistiques sont constituées de trois formules
variables encadrant le récit immuable de l’institution, deux avant et une après. Après le récit de
l’institution et l’anamnèse, elle se termine par l’appel des fruits de l’eucharistie sur les communiants.
 Grégoire le Grand place le Notre Père après le canon, alors qu’Augustin le situait après la
fraction du pain.
 À Rome, le Notre Père est dit par le prêtre seul, alors qu’en Gaule, en Espagne et chez les
Orientaux, tout le peuple est invité à s’y associer.
 La fraction du pain, évoquée déjà par saint Paul (1 Co 10, 16-17), donne lieu à un certain
déploiement dans la liturgie. Le chant de l’Agnus Dei, qui l’accompagne, a été introduit à la fin du
VIIème siècle, par un pape syrien, Serge Ier.
 Le baiser de paix, qui se situe dans les Églises de Gaule et d’Espagne au début de la liturgie
eucharistique, est placé, dans la liturgie romaine, après le canon, comme un sceau qui en marque la
conclusion.
 La bénédiction des fidèles est située avant la communion, comme l’atteste Césaire d’Arles, au
VIème siècle. Très peu de fidèles communient en effet et on ne retient pas ceux qui ne communient pas.
 La communion se fait généralement sous les deux espèces, même si la communion sous la
seule espèce du pain a toujours été pratiquée. On peut boire à la coupe, avoir recours à un
chalumeau (une sorte de paille) ou communier par intinction (tremper l’hostie dans le vin
consacré). Les clercs communient les premiers ; l’évêque et les prêtres distribuent le pain, les
diacres présentent la coupe.
 La messe se termine par une prière après la communion, la bénédiction du prêtre et le renvoi de
l’assemblée par le diacre. Il n’y a nulle part de chant de sortie.
 La langue de la liturgie demeure longtemps le grec, particulièrement à Rome, où il n’est
abandonné qu’au IVème-Vème siècle, au profit du latin, qui s’impose partout en Occident.
 D’autres langues sont en usage à partir du VI ème siècle : le copte pour l’Église
monophysite d’Égypte, le syriaque en Mésopotamie et pour l’Église jacobite de Syrie.
9) LA DISCIPLINE PÉNITENTIELLE ANTIQUE
 C’est vers le milieu du IIèmesiècle, dans Le Pasteur d’Hermas, qu’apparaît la possibilité, après le
baptême, d’un second pardon des péchés, en cas de faute grave. Alors que les chrétiens rigoristes
estiment que certains péchés sont si graves qu’ils rendent impossible la réconciliation, la discipline
générale de l’Église affirme le contraire, mais tient que la pénitence – qui ne concerne que les fautes
graves – n’est pas réitérable.
 Pour Hermas, la pénitence est un second baptême, un dédoublement de l’ablution donnée pour
le pardon des péchés. Faire pénitence consiste, selon lui, dans la volonté de se convertir, dans le
détachement à l’endroit du péché. Il est muet sur l’intervention de l’Église dans le processus
pénitentiel.
 Au IIIème siècle, dans l’Afrique de Tertullien, il est d’abord demandé au coupable ce qu’on
appelle l’exomologèse (point 36 de l’annexe). Tertullien donne des catalogues de péchés, les péchés
“quotidiens” et les péchés irrémissibles. Parmi les premiers : la colère injuste et prolongée, les coups,
les médisances, les manquements à la parole donnée, les mensonges, les indélicatesses, les excès de
table... Parmi les seconds : idolâtrie, blasphème, homicide, adultère, fornication, faux témoignage,
tromperie, mensonge, spectacles du cirque ou du stade.
 Alors que Tertullien a polémiqué avec un évêque partisan d’une possibilité de pardon aux
adultères, Cyprien de Carthage et le pape Corneille approuvent ceux qui réconcilient les apostats,
nombreux au cours de la persécution de Dèce (250), ceci à l’encontre de Novatien.
 Cyprien n’est pas laxiste, il s’élève en effet contre un trop grand empressement dans la
réadmission des apostats. Le pardon est subordonné à une expiation proportionnée aux fautes et la
réconciliation serait vaine sans une pénitence intérieure. Les rigoristes, en revanche, estiment que les
lapsi doivent rester pénitents jusqu’à leur mort, de façon à ne pas corrompre le reste de la communauté.
10) LA PÉNITENCE CANONIQUE DU IVÈME AU VIÈME SIÈCLE
 La paix de l’Église n’apporte pas de modification substantielle à la discipline de la pénitence,
toujours aussi rigoureuse.
 Saint Augustin essaie de trouver un critère pour distinguer les fautes soumises à la pénitence
ecclésiastique de celles qui n’en relèvent pas. Pour lui, la gravité de l’acte résidant dans l’intention : il
répartit les fautes entre péchés de malice pour lesquels il n’est d’autre remède que la pénitence
canonique et péchés de faiblesse et d’imprudence pour l’expiation desquels suffisent les œuvres de
mortification. Toutefois, ce critère n’a jamais été utilisé de manière généralisée.
 Césaire d’Arles (503-543), dans ses sermons, distingue entre péchés menus ou quotidiens et
péchés capitaux ou de plus grande gravité
 Le processus pénitentiel se déroule en trois temps – qui ne sont pas dissociés dans le cas du péril
de mort.
 Il y a d’abord l’entrée en pénitence.
 Durant le temps de pénitence, les fidèles peuvent assister à la synaxe eucharistique,
mais sans offrir leur oblation et sans communier. Le fidèle reconnu coupable fait partie de
l’ordre des pénitents et prend place dans le narthex. Il bénéficie des prières des fidèles. Dans
certains diocèses, l’évêque lui impose les mains à chaque messe. Parfois il est renvoyé au
moment de l’offertoire, muni d’une bénédiction spéciale de l’évêque. Il est à noter que
certains évêques gémissent de ces chrétiens qui continuent de s’approcher de la sainte Table
alors qu’étant des pécheurs notoires, ils se refusent à entrer dans l’ordre des pénitents.
 Le rite de la réconciliation, au terme, s’opère par une nouvelle imposition des mains de
l’évêque, accompagnée d’une prière, de manière solennelle, le jeudi saint à Rome et à Milan,
le vendredi saint en Espagne, de façon que les pécheurs réconciliés puissent participer à
l’Eucharistie pascale. À cette occasion, saint Augustin commente à leur intention l’histoire
de Jonas. Dans le rituel mozarabe (Espagne), est conservé pour cette cérémonie le texte d’un
sermon, suivi du psaume Miserere et ensuite, du cri Indulgentia (pardon, pardon) poussé
plusieurs centaines de fois par le peuple.
 Dans la liturgie romaine, c’est le diacre qui exprime les sentiments des pénitents et
demande à l’évêque de les réconcilier. Pour les clercs, est appliquée une discipline spéciale, à
cause des conséquences qu’aurait la pénitence habituelle sur la vie de l’Église si elle leur
était appliquée.
 Plusieurs catégories de fidèles posent de vrais problèmes : ce sont les jeunes et les mourants.
 Les pasteurs, en effet, sont bien conscients du danger, pour les personnes jeunes, de
retomber et de ne plus pouvoir, alors, être réconciliées.
 Pour les mourants, l’expiation et l’effort personnel doivent nécessairement être
pratiquement inexistants. Le problème se pose quand le pénitent réchappe à la maladie. En
effet il doit normalement être contraint de prendre place parmi les pénitents et d’accomplir
son temps d’expiation. Mais il arrive qu’il refuse. Il faut alors l’y inviter par des exhortations
pressantes.
 On en arrive donc à la situation paradoxale que, si tous les péchés peuvent être guéris par la
pénitence, ce remède est, en fait, hors de portée de la plupart. Les transfuges de l’état de pénitent
risquant l’excommunication, il ne faut les y engager qu’à bon escient. Aussi les pécheurs, bien
conscients de cela, s’efforcent d’attendre le dernier moment pour demander la pénitence. Mais la mort
peut être plus rapide. Aussi Césaire d’Arles insiste-t-il sur la nécessité de bonnes œuvres préalables
pour que la pénitence fasse son effet.
X) LES PREMIERS CONCILES (1)
 Vers 175, sont attestées des réunions de fidèles – laïcs et clergé – d’Asie mineure se donnant
pour but d’examiner les doctrines montanistes.
 Vers 190, le pape Victor réunit des synodes d’évêques pour discuter de la date de Pâques
(le 14 nisân ou le dimanche suivant).
 Tertullien évoque la tenue d’assemblées auxquelles il donne le nom de conciles
 Meunier laisse entendre que la crise montaniste aurait peut-être été la première occasion de
réunion de conciles
 L’organisation administrative de l’empire romain va servir de modèle à l’Église pour la mise en
place de sa propre répartition géographique
 Au IIIème siècle, se tiennent des synodes en Afrique et en Égypte. Certains visent à décider de
l’orthodoxie d’un évêque.
 En 251-256, Cyprien réunit sept conciles à Carthage sur la question du rigoriste Novatien
en révolte contre les prescriptions pénitentielles de l’Église
 En 268, c’est un synode à Antioche pour juger Paul de Samosate, intrus sur le siège
patriarcal d’Antioche
 On envoie à tous les évêques, notamment ceux de Rome et d’Alexandrie, des lettres
synodales mentionnant la décision juridique et leur demandant d’y adhérer
 Dès le début du règne de Constantin sur l’Occident, se produit le schisme donatiste qui divise
l’Église d’Afrique du Nord
 Constantin convoque un concile en Arles, en 314
1) LE DÉBAT TRINITAIRE AU IVÈME SIÈCLE
 C’est au cours du IIème siècle, dans le monde grec, chez Théophile d’Antioche, qu’apparaît le mot
trias et au début du IIIème siècle, dans le monde latin, chez Tertullien, celui de trinitas.
 Le Credo se structure en une triple profession adressée au Père, au Fils et à l’Esprit Saint.
Mais comment la concilier avec la confession du Dieu unique ?
 Arius (v. 260-335), un prêtre âgé, formé à Antioche dans une optique subordinatianiste diffuse
ses doctrines au moyen de cantiques qu’il compose et qui sont faciles à mémoriser.
 Il s’oppose au monarchianisme, qui, affirmant l’unicité du principe divin, réduit la
distinction entre le Père et le Fils et aboutit au modalisme : deux modalités d’une même
personne, et au patripassianisme et au sabellianisme.
 Pour Arius :
 Dieu est absolument transcendant, seul éternel et sans origine, le seul inengendré
(ἀγἐννητος).
 Le Fils, lui, a été créé, engendré par la volonté du Père avant la Création pour servir
d’instrument pour la création de tous les autres êtres. Toutefois, il ajoute que c’est une
créature d’exception, à l’insurpassable perfection morale. Il est donc la première des
créatures (au sens d’antériorité et de prééminence) mais il n’est donc pas co-éternel à Dieu.
 Il semble qu’Arius ait adopté de plus l’idée que le Christ aurait assumé seulement un
corps mortel, mais pas une âme humaine.
 Comme la génération comporte de soi une communication et donc une diminution, Arius
refuse une génération naturelle du Verbe et estime qu’il s’agit d’une filiation adoptive,
comme pour chacun des hommes.
 La doctrine d’Arius se répand parmi ses amis évêques, en Libye, Égypte et Asie mineure,
anciens élèves comme lui de Lucien d’Antioche.
 L’évêque Alexandre d’Alexandrie convoque alors un synode des évêques d’Égypte et de Libye,
une centaine en tout (en 319-320).
 Ils finissent par retrancher Arius de la communion ecclésiale et le chassent d’Alexandrie
avec deux évêques, sept prêtres, des diacres et des vierges consacrées
 Pendant ce temps, toute la troupe d’Arius se rend à Césarée de Palestine où elle est accueillie
par le savant évêque Eusèbe de Césarée. Comme Arius a essayé de provoquer un contre-concile à
Césarée, Alexandre diffuse les décisions de son concile à l’ensemble des évêques de l’Église
catholique.
 Arius quitte ensuite Césarée pour Nicomédie
 Eusèbe de Nicomédie (†341/342), est acquis à ses idées et plaide avec succès sa cause
auprès de Constantin. C’est à cette époque qu’Arius rédige un ouvrage de propagande : la
Thalie (= banquet)
 Un nouveau concile se réunit à Antioche (début 325), rassemblant 59 évêques de Syrie et
d’Asie mineure, sous la présidence d’Ossius de Cordoue,
 Il confirme la condamnation des ariens déjà portée par Alexandre, et qui excommunie
provisoirement Eusèbe de Césarée, Théodote de Laodicée et Narcisse de Néronias, parce
qu’ils ont refusé de souscrire à une profession de foi anti-arienne.
 C’est Ossius de Cordoue, théologien de Constantin qui a l’idée de réunir un concile
œcuménique (c’est-à-dire : universel, de l’oikoumènè : concernant tous les endroits habités.
 C’est Constantin qui convoque le concile, sans avoir consulté au préalable le siège de Rome.
2) LE CONCILE DE NICÉE
 Le concile s’ouvre à Nicée (Iznik) le 25 mai 325, dans un palais impérial, non loin de la
résidence habituelle de l’empereur, à Nicomédie, et rassemble entre 250 et 318 évêques.
 Nous ne disposons pas des actes du concile et la meilleure source que nous ayons – quoique
partiale – est la Vie de Constantin rédigée par Eusèbe de Césarée : il s’agit d’un document
hagiographique, où l’évêque présente l’empereur comme la réplique terrestre de Dieu.
 Après qu’a été refusée la profession de foi des ariens, Eusèbe de Césarée propose comme
base de discussion le Credo de son Église et les Pères le complètent.
 Ils promulguent aussi vingt canons disciplinaires
 Le concile entérine également l’usage romain de célébrer Pâques le dimanche suivant le
14 Nisan
 La discussion porte sur l’expression : le Fils consubstantiel (ὁμοούσιος) au Père, adoptée,
semble-t-il, malgré sa nouveauté, à l’instigation de Marcel d’Ancyre
 plus tard, on découvrira que le concile d’Antioche de 268 qui a condamné Paul de
Samosate a refusé ce terme car il y voyait l’affirmation de l’existence d’une substance
commune qui serait alors préalable au Père et au Fils.
 En revanche, à Rome, ce même mot est couramment utilisé car l’erreur à redouter en
Occident, c’est le trithéisme, séparant radicalement le Fils du Père
 À la fin du concile, Arius et deux évêques libyens qui refusent de signer sont exilés en
Illyricum.
 Cependant une ambiguïté demeure pour les Orientaux.
 En effet, le mot grec (qui vient du vocabulaire philosophique et non biblique) hypostase a
deux significations radicalement différentes
 Pour certains, si l’on dit que le Père et le Fils sont la même hypostase, cela implique que le Fils
n’a pas une personnalité distincte de celle du Père (on tombe dans le modalisme) ; pour d’autres, dire la
même chose signifie simplement qu’on reconnaît la divinité du Fils.
 Dans les années suivantes :
 Certains voudront éliminer le mot ὁμοούσιος, qui est un mot nouveau en théologie : on
les nommera anhoméens (le Logos n’est pas égal au Père) ou bien eunomiens (d’après
Eunomius).
 D’autres voudront seulement atténuer le mot litigieux et parleront d’homéousios ; le
Verbe est semblable (ομοιος) au Père. ou homoiousos, nature semblable
 Certains ajouteront « en toutes choses » : on les dira semi-ariens (homéens)
 En 330-331, Eustathe, évêque d’Antioche, est déposé par plusieurs évêques eusébiens de sa
province
 D’autres évêques, à la suite, sont écartés de leur siège. Marcel d’Ancyre est déposé en 336
 Athanase (v. 295-373) a succédé à Alexandre (†328) sur le siège d’Alexandrie
 En 335, Athanase publie un traité Sur l’incarnation du Verbe qui donne le point central
de sa théologie : c’est par l’humanité du Verbe de Dieu que nous entrons dans la communion
de Dieu
 Un concile est convoqué à Tyr en 335 par Constantin, pour aboutir, dit-on, à la pacification des
esprits.
 Athanase, qui sait qu’il sera condamné, s’échappe en bateau, apparaît devant l’empereur à
Constantinople pour réclamer justice. Le concile aboutit à sa déposition et à son exil à
Trèves.
 Quant aux évêques qui se sont transportés de Tyr à Jérusalem, ils absolvent Arius mais
celui-ci meurt subitement sur ces entrefaites. Athanase voit dans ce décès d’Arius à la veille
de sa réintégration à la communion de l’Église la justification de sa propre position.
 Constant (320-350), empereur d’Occident, est plutôt favorable à Athanase. Cependant celui-ci,
qui a regagné son siège en 339, n’a pu s’y maintenir face à son compétiteur Grégoire de Cappadoce
et s’est réfugié à Rome auprès du pape Jules Ier
 Il rentre à Alexandrie en 345, à la mort de Grégoire. C’est vers cette époque (338-350) qu’il
rédige trois Traités contre les ariens. C’est une réfutation des thèses ariennes qu’il combat en puisant
son argumentation dans la catéchèse courante et la confession de foi, mais, plus encore, dans l’Écriture.
 Des conciles se tiennent en ces années, à Sardique (Sofia), à Sirmium en Pannonie (Mitrovitzia,
en Yougoslavie) où sont élaborées des formules qui essaient de garder la doctrine de Nicée tout en
évacuant la formule d’ ὁμοούσιος.
 Le concile de Sardique (343) vise à faire entériner la 4ème formule du concile de la
dédicace par les Occidentaux
La période de Constance II
 Après la mort de Constant, Constance II (317-361), —Constance I étant Constance Chlore—
empereur d’Orient, demeure seul maître après avoir vaincu Magnence. Il se rallie au premier
formulaire de Sirmium (351) et l’impose comme une loi d’empire.
 Dans une ligne homéenne, mais opposée à l’arianisme extrême, ce texte affirme une
similitude en toutes choses entre le Père et le Fils, ce qui demeure une formule très vague
 Les adversaires d’Athanase, s’estimant soutenus, relèvent la tête.
 Constance II, pour sa part, n’aime guère Athanase
 On peut généralement considérer que, jusqu’en 361, le pouvoir politique est plutôt hostile
à Nicée.
 Plusieurs conciles vont se tenir entre 335 et 360, certains nicéens, d’autres allant en sens
contraire
 Les intrigues se nouent autour du nouveau pape, Libère (352) pour lui faire désavouer Athanase.
Le pape résiste longtemps et l’empereur Constance finit par l’exiler en Thrace, à Bérée.
 Hilaire de Poitiers et Eusèbe de Verceil sont aussi envoyés en exil, tandis qu’Athanase dont
un usurpateur a pris le siège par force, se cache chez les moines, dans le désert d’Égypte, où on le
cherche en vain (356).
 En 357, un petit concile rassemble à Sirmium des évêques illyriens et occidentaux. Il émet un
texte qui est nettement semi-arien (2ème formulaire de Sirmium)
 Passant sous l’influence de l’évêque Basile d’Ancyre, Constance évolue dans sa position. Il
réunit un petit concile à Sirmium (358) et le pape Libère accepte de signer ce troisième formulaire de
Sirmium, texte adouci et relativement flou, probablement proche du texte d’Antioche de 342, mais
actuellement perdu.
 Cependant le pape remet à l’évêque Basile d’Ancyre un texte déclarant excommuniés
tous ceux qui ne croient pas que le Fils est semblable au Père, en substance et en toutes
choses, précaution qui n’est pas inutile car les ariens font courir le bruit que le pape s’est
rangé de leur côté et a renié le consubstantiel.
 L’empereur, qui pense alors qu’on peut retrouver l’unité, propose alors une nouvelle formule (le
Credo daté) Le texte, qui se contente d’affirmer une « similitude en toutes choses » entre le Père et le
Fils sans vouloir aller plus loin dans l’analyse, ouvre la porte à l’homéisme (fils simplement
semblable au Père)
 Le concile de Rimini (fin mai 359) réunit 400 évêques d’Occident, mais le pape n’y vient pas.
Les trois-quarts des prélats refusent d’adopter la formule impériale et déclarent s’en tenir à la foi
nicéenne. L’empereur tient ferme à sa position et les oblige à se soumettre.
 Un synode se réunit à Constantinople en 360, pour entériner ces décisions. Il adopte une
formule d’accommodement vague : « Le Fils est semblable au Père selon les Écritures ; le terme
d’ousia est répudié comme une cause de trouble parmi les peuples et parce qu’il est étranger aux
Écritures ; de même, l’emploi du mot hypostase est interdit.
 Ce texte sera considéré, dans la suite, comme symbole du nouvel arianisme (le 3ème
donc, l’homéisme), —bien que le 1er arianisme (celui qui voit le Fils comme une simple
créature) soit écarté— ainsi que le 2nd, qu’on appelait l’anomisme (anhomoios, la
dissimilitude).
 Constantinople proclame que le Fils est seulement semblable au Père : cette position
qualifie les homéens ;
 Les évêques homéousiens (qui parlent d’une substance semblable) sont déposés par
Constance, de même que les nicéens.
Sous Valence
 Après la tentative de restauration du paganisme sous Julien (361-363), les règnes assez modérés
de Jovien (364) et de Valentinien Ier (364-375), survient Valens (364-378), qui règne en Orient et qui
essaie de favoriser l’homéisme
 Homéousiens et nicéens se rapprochent, ce qui est favorisé par la décision du pape Libère
de déposer Marcel d’Ancyre, dont la théologie se rapproche du sabellianisme
 La réaction nicéenne se concentre autour de grandes figures d’évêques, qui tiennent les sièges
importants :
 Athanase, qui a pu rentrer dans sa ville après le massacre de Grégoire de Cappadoce dès
l’annonce de la mort de Constance, réunit un concile à Alexandrie en 362. Il accepte
notamment qu’on puisse affirmer qu’il y ait en Dieu une ou trois hypostases, suivant le sens
qu’on donne au mot (concile des confesseurs, Alexandrie, 362)
 En Occident, Hilaire de Poitiers (300-367/368) a lutté avec persévérance contre
l’arianisme. Il a fédéré la résistance des évêques gaulois à l’arianisme et à l’homéisme. Son
exil lui a permis de séjourner en Phrygie et à Constantinople.
 Ambroise (339/340-397), évêque de Milan en 374, succède à Auxence, un arien.
 En revanche, Lucifer de Cagliari, rentré d’exil, refuse d’accorder le pardon aux évêques
ayant siégé à Rimini, ce qui suscite un schisme (les “lucifériens”).
 Après la mort d’Athanase (373) ce sont Hilaire de Poitiers en Occident et Basile de Césarée en
Orient qui apparaissent comme les champions de l’orthodoxie, tandis que c’est Eunome de Cyzique,
théologien résidant à Chalcédoine et auteur d’une Apologie de l’arianisme, qui se fait le champion de
la doctrine d’Arius.
 Contre les anoméens, les Pères cappadociens affirment la parfaite égalité du Père, du
Fils et de l’Esprit, refusant ainsi tout subordinatianisme. Ils interprètent les textes
scripturaires sur l’infériorité du Fils comme se rapportant à sa nature humaine.
 ils défendent la formule : une ουσια, trois hypostases en définissant les termes de façon
à échapper à l’accusation de trithéisme et en assurant la conformité à Nicée
 Le dialogue avec les Occidentaux permet d’accorder cette formule avec la formule latine : una
substantia, tres personae, qui inquiétait les Orientaux, portés à ne voir dans la persona qu’un
prosopôn, un masque de théâtre, ce qui avait des relents de modalisme.
3) LE PREMIER CONCILE ŒCUMÉNIQUE DE CONSTANTINOPLE
 L’arrivée sur le trône de Théodose (379) apporte à l’orthodoxie l’appui de l’empereur, qui invite
à se rallier à la foi des évêques de Rome et d’Alexandrie
 Le premier concile œcuménique de Constantinople (le synode de 360 n’est pas compté dans
la liste) se réunit de mai à juillet 381 en présence de 150 évêques orientaux
 Parmi eux, on trouve deux des Pères cappadociens : Grégoire de Nysse et Grégoire de
Nazianze (Basile de Césarée est mort trois ans auparavant), mais aussi Cyrille de
Jérusalem.
 Le concile réalise une œuvre doctrinale :
 Il reprend le Credo de Nicée, ainsi que le Symbole des Apôtres qui était en usage à Rome
et en Occident.
 Il ajoute d’autres formules venant des symboles des églises de Césarée et de Jérusalem.
 Il prend à son compte les deux mots d’hypostase et de personne pour dire la pluralité en
Dieu.
 Mais il développe surtout ce qui est dit du Saint-Esprit. Il semble en effet qu’un courant
arien en était venu à nier l’homoousie du Saint-Esprit, courant qu’Épiphane, évêque de
Salamine, appelle des pneumatomaques.
 La divinité du Saint-Esprit, en revanche, avait été défendue par Athanase (lettres à
Sérapion), Basile de Césarée (Traité du Saint-Esprit) et par Grégoire de Nazianze (Discours
théologiques).
 Le développement sur l’Esprit-Saint, en évitant le terme d’ὁμοούσιος, avait visé au
ralliement des macédoniens, mais ceux-ci refusent et quittent l’assemblée.
 Le concile promulgue aussi quatre canons disciplinaires, contre les hérésies.
 Le troisième canon affirme le primat d’honneur de Constantinople, au second rang
derrière le siège de Rome.
 La même année 381, se tient à Aquilée, sur l’Adriatique, près de Trieste, un concile, qui réunit
35 évêques, principalement d’Italie du Nord, destiné à extirper l’arianisme de l’Empire romain
d’Occident. Siégeant sous la direction d’Ambroise, il atteint son but, malgré une certaine résistance du
parti homéen d’Italie.
 L’homéisme référé au concile de Constantinople de 360 – ne subsiste que chez les peuples
barbares : Vandales, Burgondes, Wisigoths, Ostrogoths, Lombards
4) LES PAPES DAMASE ET LÉON
Damase
 Damase (305-384), probablement d’origine romaine, diacre du pape Libère, a suivi celui-ci en
exil. Il emploie les dix-huit ans de son pontificat (366-384) à renforcer la primauté du siège romain.
 Il marque la filiation directe avec Pierre en qualifiant dans tous ses actes le siège romain
de Siège apostolique.
 Dans une lettre à l’épiscopat gaulois, il trace la place du Siège romain comme garant de
la tradition unique de l’Église.
 Il renforce l’organisation de la communauté chrétienne de Rome (nouveaux lieux de culte
et de catéchèse, développement du culte des martyrs, mise en place de la chancellerie
pontificale).
 Dans le domaine doctrinal, il essaie d’imposer ses conditions à l’évêque Basile de
Césarée, qui réclame son appui pour lutter contre l’arianisme en Orient. En 377, il rédige le
tomus Damasi. Plus qu’un exposé doctrinal, c’est une reprise des condamnations précédentes
contre diverses hérésies.
 Le concile d’Antioche de 379, qui suit de peu la mort de l’empereur Valens se rallie aux
positions théologiques de Damase
 Le 27 février 380, Théodose publie l’édit de Thessalonique qui proclame que tous les peuples
doivent vivre dans la religion « que le divin apôtre Pierre a transmise aux Romains », celle « que
suivent le pontife Damase et l’évêque d’Alexandrie »
 L’année suivante, se réunit le concile de Constantinople qui complète l’apport nicéen mais
accorde au patriarche de Constantinople une primauté d’honneur juste derrière celle du pape, ce qui
désavoue implicitement toute intervention du pape en Orient.
 Outre Ursinus et les anti-nicéens, Damase doit lutter contre d’autres adversaires :
 les sectes d’inspiration manichéenne dont le préfet de la Ville confisque les salles de
réunion,
 les donatistes, qui s’obstinent malgré un arrêt d’expulsion,
 les fidèles de Novatien encore actifs à la fin du siècle.
 Il développe en outre considérablement la Curie romaine, avec un corps de notaires. Damase
recourt aussi à des experts (periti) comme Jérôme.
 Il organise les archives (scrinium, chartarium) avec la collation des actes conciliaires et des
décisions romaines à l’origine des collections canoniques futures (les décrétales).
 Par la décrétale Ad Gallos, il constitue un règlement du cursus ecclésiastique et fonde la
primauté romaine : « Puisque la loi est une, il faut que la tradition reste une, elle aussi. S’il y a une
tradition unique, il faut que les Églises tiennent une tradition unique. »
Léon le grand
 Léon le grand (440-461) est le premier pape dont on conserve un ensemble important d’œuvres,
ce qui lui a valu de devenir “docteur de l’Église”.
 Ordonné diacre par le pape Célestin, il est bientôt nommé archidiacre de Rome (432)
 À la mort de Sixte III, Léon est rappelé d’urgence à Rome pour lui succéder.
 En 443, à la faveur d’un scandale, il fait comparaître les manichéens de la ville de Rome devant
un tribunal composé d’évêques, de prêtres et de notables chrétiens. Le Sénat prend le relais, fait brûler
leurs livres et fait chasser de la ville ceux qui refusent de reconnaître leurs erreurs.
 Peu à peu, il élargit l’autorité pontificale sur l’Italie, la Gaule et l’Espagne.
 Dans la ligne de Damase, il développe, dans ses écrits et sa prédication, une véritable
mystique pétrinienne au service de la primauté romaine.
 Faisant fond sur les textes néo-testamentaires, il le place en position d’intermédiaire entre
le Maître et les autres disciples. Il souligne le lien rattachant le pape à Pierre.
 Il a plus de mal à affirmer son autorité en Orient
 Sa fermeté contre « le brigandage d’Éphèse » de 449 a été payante. Après la mort de
Théodose II (28 juillet 450), le nouvel empereur, Marcien, salue en Léon « la première
autorité dans l’épiscopat de la droite foi » et convoque le concile de Chalcédoine
 Mais les légats pontificaux ne peuvent empêcher le vote du canon 28 qui reconnaît à
Constantinople la primauté après celle de l’ancienne Rome.
 Léon doit intervenir dans le champ politique. Attila, repoussé par le général Aetius, lors de la
bataille des Champs catalauniques, revient et menace le nord de l’Italie. L’empereur Valentinien
envoie le pape Léon en ambassade.
 La correspondance de Léon comporte 173 lettres, 143 écrites par le pape et 30 qui lui sont
adressées.
 C’est avant tout dans le cadre pastoral que se déploie sa théologie. Il veut prioritairement
défendre l’orthodoxie de la foi.
 Sa théologie est avant tout christocentrique : il veut montrer le caractère exemplaire des
gestes du Christ.
 Il souligne la grandeur de l’homme racheté et restauré par le Christ à l’image de Dieu.
 Dans le Tome à Flavien, il affirme les deux natures du Christ unies en une seule
personne.
 Il considère les fêtes liturgiques comme l’actualisation salutaire des événements
salvifiques de la vie du Christ.
 L’Église est la continuation de l’incarnation du Christ, elle est le nouvel Israël.
XI) LES PREMIERS CONCILES (2)
1) LES ORIGINES DE LA QUERELLE SUR LES DEUX NATURES
 Une fois la divinité de Jésus-Christ affirmée, va se poser, au long des conciles œcuméniques des
IVème et Vème siècles, le problème de la cohabitation, en Jésus incarné, des deux natures, divine et
humaine.
 La solution proposée, vers 360, par Apollinaire de Laodicée (†381) apparaît de plus en plus
insatisfaisante.
 Elle exclut la présence, en Christ, d’une âme humaine, voire même d’un esprit humain
capable de s’auto-déterminer.
 Le Christ selon Apollinaire, est l’homme parfait, céleste, bien loin de l’homme déchu,
marqué par les passions et le péché.
 C’est le pape Damase qui prend le plus nettement position contre lui dans le tomus Damasi :
 « Si quelqu’un affirme que c’est le Verbe qui a pris la place de l’esprit humain dans le
Seigneur incarné, l’Église catholique l’anathématise. »
 Plusieurs conciles, y compris celui de Constantinople I (381) condamnent la position
apollinariste
 Pour exprimer le mystère, deux écoles s’opposent alors, celle d’Alexandrie et celle d’Antioche.
Leur opposition, tout en se situant sur le plan théologique, a aussi des composantes politiques
 À Alexandrie, on considère le Christ d’abord sous l’aspect divin
 Cette école place l’humanité au second rang, derrière la divinité
 « Puisque Jésus est Dieu, toutes ses actions sont des actions divines ; toutes ses paroles
sont des paroles divines. L’homme ne disparaît pas en lui, mais il ne compte pour ainsi dire
pas : il n’accomplit rien par lui-même, et son union avec la divinité est si complète, si
intime, si absolue, qu’il se cache en quelque sorte derrière elle. » (Pierre Labriolle)
 Cyrille d’Alexandrie va tenir compte de la condamnation d’Apollinaire et affirme que le
Christ a pris un corps doté d’une âme raisonnable, mais cela n’influe pas beaucoup sur sa
christologie, qui valorise avant tout l’unité de la personne du Christ après l’incarnation.
 À Antioche, en revanche, on considère que certains textes évangéliques concernent l’homme
Jésus alors que d’autres sont relatifs au Verbe divin qui lui est uni.
 Aussi les Antiochiens diront que c’est la chair du Christ, son humanité, qui a souffert dans
la Passion. Ils ont donc plutôt tendance à faire porter l’accent sur la dualité des natures dans
l’union.
2) CYRILLE D’ALEXANDRIE ET NESTORIUS
 Nestorius (381-ap. 451), originaire de Mopsueste en Syrie, a été élevé selon les principes de
l’Église d’Antioche, qui distingue donc, en Jésus, entre ce qui est de l’homme et ce qui est de Dieu.
 Théodose II le choisit comme nouvel évêque de Constantinople, à cause de sa réputation,
justifiée, de vertu et d’éloquence.
 Il provoque une levée de boucliers dans son église lorsqu’il choisit de s’en prendre à la
piété populaire – appuyée sur des textes de Grégoire de Nysse et de Grégoire de Nazianze –
qui qualifie Marie de “Mère de Dieu” (Theotokos).
 Il déclare qu’on peut lui donner seulement le titre de “Mère du Christ” (christotokos),
pour éviter tant l’apollinarisme que l’arianisme, en choisissant un titre qui peut se fonder
sur l’Écriture.
 Le texte de ses homélies contestées est diffusé parmi les moines d’Égypte et, de là, parvient à
Cyrille, évêque d’Alexandrie (370/380-444), qui y voit le postulat d’une division au cœur de la
personne du Christ.
 Un échange de lettres assez vives s’instaure entre les deux patriarches, la querelle étant
certainement envenimée par la rivalité entre les deux sièges, ainsi que par les différences de
sensibilité théologique entre Antioche et Alexandrie.
 B. Meunier synthétise ainsi les deux positions :
 « Pour Cyrille, tout est centré sur le Verbe fait chair, tout doit lui être attribué dans ce qui
arrive à Jésus, dans ce qu’il dit ou ce qu’il fait : si l’Évangile, en particulier celui de Jean, dit
que le Verbe divin est devenu chair, est né, alors on peut dire de même que le Verbe a
souffert, est mort, est ressuscité. Le Verbe, personne divine, est l’unique sujet de toute
l’économie du salut, de tous les événements de la vie de Jésus et du mystère de Pâques. On
peut donc bien dire que Marie est Mère de Dieu, puisque le Verbe est Dieu et qu’il est né
d’elle. […]
 Nestorius, plus soucieux de préserver la transcendance du Verbe et de distinguer les actes
humains et les actes (ou attributs) divins du Christ, voulait seulement dire Marie Mère du
Christ et non Mère de Dieu, car il voyait dans ce Dieu né, non la personne du Verbe, mais sa
divinité, ce qui devenait à ses yeux blasphématoire. »
 Le souci primordial de Cyrille est que les formulations théologiques ne puissent donner lieu à
penser à une séparation à l’intérieur de la personnalité du Christ, entre la divinité et l’humanité. On voit
aussi comment Cyrille a eu recours à l’autorité romaine et l’oppose à celle du patriarche de
Constantinople.
 De fait, le siège de Rome a été pris pour arbitre par les deux parties en présence.
 comme Nestorius a adressé ses pièces en langue grecque, le pape Célestin a chargé Jean
Cassien de les examiner et celui-ci a rédigé un traité, Sur l’incarnation du Seigneur, qui
prend nettement parti contre Nestorius.
 Au vu de ce livre et des pièces envoyées d’Alexandrie par Cyrille, et rédigées en latin , le
synode romain d’août 430 condamne Nestorius. La lettre du pape à Nestorius, par ailleurs
transmise à d’autres évêques orientaux, est rapidement suivie de celle de Cyrille évoquée ci-
dessus.
 Nestorius refuse de se soumettre et parvient à persuader l’empereur Théodose II (401-450) de
convoquer un concile pour mettre les choses au point, ce qui, à ses yeux, suspend la procédure.
 Dans lettres adressées à Célestin et à Jean d’Antioche, il concède ne pas avoir d’objection
absolue contre l’usage du terme theotokos, pourvu qu’il ne soit pas pris dans un sens
apollinariste et qu’on maintienne la distinction des deux natures après leur union.
 En revanche, il juge que les anathèmes de Cyrille sont dans la ligne apollinariste et
Théodoret de Cyr rédige une violente Réfutation des douze anathématismes.
 Le concile est convoqué à Éphèse pour la fête de Pentecôte 431 (7 juin).
3) LE CONCILE D’ÉPHÈSE (431)
 Malgré la protestation de 68 évêques, Cyrille brusque quelque peu l’ouverture (22 juin), se
prévalant du mandat que le pape Célestin lui a donné.
 160 évêques de son parti se réunissent dans la basilique d’Éphèse dédiée à la Vierge. C’est en
vain que le comte Candidien, représentant de l’empereur, essaie d’empêcher la réunion.
 Nestorius refuse de comparaître.
 On lit le Credo de Nicée, puis la deuxième lettre de Cyrille à Nestorius et la réponse de
celui-ci.
 La lettre de Cyrille est déclarée conforme à la foi nicéenne et le texte de Nestorius est
condamné.
 On lit ensuite la lettre de Célestin à Nestorius et la troisième lettre de Cyrille, avec les
anathèmes, mais sans vote de l’assemblée.
 D’autres témoignages sont alors entendus : deux évêques rapportent qu’ils ont entendu
Nestorius déclarer qu’il ne convenait pas de parler d’un Dieu enfanté et allaité par la Vierge
et qu’il croyait lui que autre était le Fils qui avait souffert la Passion et autre était le Dieu
Verbe.
 Au terme, 197 signatures sont recueillies pour appuyer la sentence de déposition de
Nestorius.
 L’assemblée notifie à l’empereur et au pape cette décision, mais le représentant de
l’empereur et Nestorius lui-même écrivent aussi, pour leur part, à Théodose II.
 Quatre jours plus tard, arrive Jean, patriarche d’Antioche (26 juin). Indigné de la manière
dont Cyrille a procédé, il refuse de se joindre à l’assemblée et réunit 42 évêques autour de lui, qui sont
rejoints par le comte Candidien qui donne lecture des lettres impériales sur le concile.
 À l’initiative de Jean, ils estiment que Cyrille a outrepassé ses droits et a cherché à éviter
que soient examinés ses douze anathématismes.
 Aussi décrètent-ils la déposition de Cyrille et celle de l’évêque Memnon d’Éphèse qui
l’a aidé. Ils donnent aussi notification de leur décision à Théodose II.
 Celui-ci réagit en désavouant les décisions du 22 juin, estimant que les évêques auraient
dû attendre l’arrivée de tous leurs confrères. Il leur interdit de quitter la ville.
 Mais Cyrille répond en dénonçant Candidien et Jean et les accusant de collusion avec les
pélagiens qui, de fait, avaient essayé de se faire reconnaître par Nestorius.
 Un nouveau retournement de situation se produit quand les légats romains (deux évêques et un
prêtre) parviennent à leur tour à Éphèse. Le 10 juillet, le concile se réunit de nouveau, cette fois en leur
présence.
 Ils donnent lecture de la lettre de Célestin qui désavoue Nestorius et se rangent donc
facilement à la sentence de déposition du patriarche de Constantinople. Cependant les légats
se tiennent ici sur un terrain plus canonique que théologique.
 Le 17 juillet, l’assemblée cyrillienne et les légats excommunient aussi Jean d’Antioche et
34 de ses partisans, dont Théodoret de Cyr.
 L’assemblée tient encore d’autres sessions et vote des décrets disciplinaires, dont certains
renforcent l’autorité des sièges de Jérusalem et de Chypre au détriment de celui d’Antioche.
On voit ici l’autorité romaine jouer un grand rôle, au profit de Cyrille.
 Pour compliquer encore la situation, survient, au début du mois d’août, un messager impérial,
le comte Jean, portant une lettre de Théodose qui approuve « la déposition de Nestorius, de Cyrille et
de Memnon » et l’affirmation de la foi nicéenne et invite tous les évêques à rentrer chez eux.
 Le messager commence d’ailleurs par faire placer en état d’arrestation les principaux
protagonistes : Nestorius, Cyrille et Memnon, l’évêque d’Éphèse ; on les garde deux mois en prison.
 L’empereur essaie un compromis et réunit des délégués des deux partis à Chalcédoine, sans
succès.
 Cyrille regagne Alexandrie tandis que Nestorius, qui a proposé de lui-même de se retirer,
reçoit un successeur sur le siège de Constantinople.
 En 433, un accord (“la formule d’union”) se fait entre Cyrille d’Alexandrie et les évêques
de la province d’Antioche Jean d’Antioche accepte d’user du terme theotokos mais se
démarque nettement de certains des anathématismes. Tous reçoivent les chaleureuses
félicitations du nouveau pape Sixte III.
 Cependant la réconciliation ne semble pas très profonde.
 Alors que le concile n’a pas rédigé de texte doctrinal, on peut néanmoins en voir l’expression
dans la lettre de Cyrille qu’il a approuvée.
4) LE “BRIGANDAGE D’ÉPHÈSE” (449)
 Si Cyrille d’Alexandrie et Jean d’Antioche ont signé la paix, il n’en est pas de même de leurs
partisans, qui les accusent d’avoir fait trop de concessions.
 Cyrille doit fournir des explications et affirme « l’union sans confusion » des deux natures dans
le Christ. Certains des cyrilliens attaquent même la mémoire de Diodore de Tarse et de Théodore de
Mopsueste mais sont rapidement désavoués. En contrepoint, Théodoret de Cyr estime que Cyrille est
apollinariste.
 De son côté, Jean d’Antioche doit calmer les évêques qui considèrent que la déposition de
Nestorius n’a pas été régulière. L’empereur intervient lui-même pour contraindre les évêques
récalcitrants à adhérer à la condamnation de Nestorius qui est exilé à Pétra puis au fond du désert
d’Égypte.
 Une loi impériale frappe sévèrement ses partisans et tous ceux qui diffusent ses livres.
 L’agitation reprend, quand, à Constantinople, un vieux moine, Eutychès (v. 378-454),
responsable d’un important couvent, homme jouissant d’une grande réputation de sainteté et d’une
grande influence à la cour, tire à l’extrême une formule de saint Cyrille :
 « Une seule nature du Verbe incarné, après l’union, il n’y a qu’une seule nature, la
nature divine » en l’expliquant ainsi :
 « Dans le Christ, la divinité a absorbé l’humanité, comme l’eau de la mer absorbe la
goutte de miel qui y serait tombée. L’humanité n’a pas été anéantie dans son union avec la
divinité, elle a été changée en elle ». C’est ce qu’on appellera le monophysisme (une seule
nature).
 Eutychès, dont les positions sont combattues par l’évêque syrien Théodoret de Cyr, a de forts
appuis à la cour. Aussi l’évêque Irénée de Tyr est déposé et Théodoret est assigné à résidence.
 Flavien, patriarche de Constantinople, convoque un synode qui se tient dans la capitale du 12 au
22 novembre 448. Eutychès refuse longtemps de comparaître mais vient pourtant le dernier jour,
entouré de soldats, de moines et de fonctionnaires.
 Il prononce la confession suivante : « Je confesse que Notre Seigneur avant l’union était
à partir de deux natures (ek duo physeôn) mais après l’union je ne confesse plus qu’une
seule nature. »
 Il est condamné par le synode qui, pour sa part, a fait sienne une formule proposée par
Flavien : « Nous reconnaissons que le Christ est, après l’incarnation, à partir de deux natures
en une hypostase et une personne (prosôpon). »
 Eutychès fait appel à Pierre Chrysologue, évêque de Ravenne, et à Léon le Grand (pape de
440 à 461) qui le désavoue dans le tome à Flavien
 Le pape enseigne ici qu’il n’y a en Jésus-Christ qu’une seule et unique personne, mais
que dans cette personne, subsistent les deux natures, la divine et l’humaine, sans confusion
ni mélange.
 Eutychès obtient néanmoins de l’empereur qu’il convoque un concile à Éphèse, en août 449,
qui se réunit en présence de 145 évêques, presque tous orientaux.
 Les seuls Occidentaux sont les évêques de l’Illyricum occidental et les quatre légats du
pape Léon qui ne parlent pas grec.
 L’empereur accorde la présidence à Dioscore, évêque d’Alexandrie, successeur de
Cyrille, et non pas à Flavien.
 Dioscore élude la demande des légats que soit lu le tome à Flavien
 Ceux qui ont condamné Eutychès n’ont pas droit à la parole, ce que l’empereur, dans une
lettre, a justifié, « puisque ce sont leurs propres jugements qui sont examinés ».
 Dioscore d’Alexandrie et Juvénal de Jérusalem obtiennent la déposition de Flavien,
d’Eusèbe de Dorylée, d’Ibasse d’Édesse, de Théodoret de Cyr (qui n’avait pas été admis à
paraître au concile), d’Irénée de Tyr et de Domnus d’Antioche. Tous sont accusés de
professer une autre foi que celle de Nicée, puisqu’ils refusent d’adhérer aux anathématismes
de Cyrille.
 L’empereur confirme par un édit les sentences du concile. Flavien, jeté en prison, y meurt trois
jours plus tard.
 C’est en vain que Léon le Grand proteste auprès de l’empereur Théodose II, qualifiant
cette assemblée de « brigandage » : latrocinium, non concilium.
 L’empereur refuse d’accéder à sa demande de réunir un nouveau concile, mais meurt peu
après, le 28 juillet 450.
5) LE CONCILE DE CHALCÉDOINE (OCTOBRE 451)
 Léon ne s’arrête pas là. Il casse les décisions prises par les évêques et convoque un nouveau
concile en Italie, avec l’appui de l’empereur d’Occident, Valentinien III.
 la mort de Théodose II rend l’influence à sa sœur, Pulchérie, qui était en désaccord avec
sa position religieuse.
 Elle épouse le général Marcien, qui devient empereur (25 août 450), elle fait assigner
Eutychès à résidence, rappelle les évêques déposés et ramène solennellement à
Constantinople la dépouille de Flavien.
 Anatole, patriarche de Constantinople, sent bien qu’il lui faut se rapprocher de Léon.
 En octobre 450, il réunit un synode à Constantinople où siègent quatre légats romains et
où le tome à Flavien est lu et approuvé.
 Dès le 22 novembre, Pulchérie annonce son intention de réunir un nouveau concile
œcuménique.
 Celui-ci est convoqué d’abord à Nicée, puis à Chalcédoine, cité plus proche de
Constantinople, le 1er septembre 451.
 Le synode rassemble un grand nombre d’évêques, tous Orientaux, à l’exception des deux légats
pontificaux et de deux Africains : le pape Léon parle de 600 évêques, mais le nombre réel avoisinerait
plutôt 350.
 Les attentes du pape et de l’empereur ne sont pas exactement les mêmes :
 le pape demande seulement que soient jugés les auteurs du brigandage d’Éphèse
 l’empereur voudrait des décisions doctrinales.
 Ce sont les fonctionnaires impériaux qui mènent les débats.
 Le concile commence par juger Dioscore.
 Il relit les actes du brigandage d’Éphèse, ce qui donne l’occasion aux évêques qui y ont
participé et qui sont à nouveau là de témoigner qu’ils ont agi sous la contrainte, alors que
Dioscore accepte d’assumer la responsabilité des décisions.
 Le concile décide de réintégrer les responsables du brigandage, à l’exception de Dioscore.
 Ensuite, les fonctionnaires impériaux obligent chaque évêque à se prononcer
individuellement sur l’orthodoxie de Flavien de Constantinople qui est réhabilité post
mortem.
 Lors de la seconde session, les fonctionnaires impériaux réclament que les Pères rédigent un
nouveau symbole de la foi.
 Tout en rappelant que le concile d’Éphèse de 431 a interdit de rédiger une formule
différente de celle de Nicée, les légats se laissent fléchir.
 Le 17 octobre, les évêques qui ont étudié le tome à Flavien déclarent que c’est bien là
l’expression de leur foi.
 Une commission est chargée de rédiger une nouvelle profession de foi, qui apparaît
comme une formule de compromis, plus proche toutefois des positions de Léon, et qui est
solennellement adoptée le 25 octobre, non sans difficultés.
 Cependant on perçoit que des différences de sensibilité subsistent…
 Le texte final, qui intègre des données provenant de quatre documents :
 la formule d’union de 433
 la deuxième lettre de Cyrille à Nestorius,
 le tome à Flavien
 la confession de foi de Basile de Séleucie au synode de Constantinople de 448,
 Ce texte se présente comme une précision apportée à la foi nicéenne, sur un point controversé et
se conçoit comme une voie médiane entre ceux qui prônent la division des personnes et ceux qui
professent la confusion des natures.
 Il condamne ceux qui parlent de deux fils comme ceux qui ne voient qu’une seule nature
après l’union.
 De plus, « à Chalcédoine naît vraiment la conscience d’une tradition conciliaire qui unit
entre eux les conciles œcuméniques » (B. Meunier).
 Par ailleurs, le concile confirme la prééminence du siège de Constantinople sur l’Orient,
prééminence qui s’appuie sur le statut de capitale accordé à la ville.
 Le pape Léon protestera vainement contre ce 28ème canon
6) DE LA MISE EN DISCUSSION DE CHALCÉDOINE AU DÉBAT SUR LE MONOTHÉLISME
 Le concile de Chalcédoine ne met pas le point final au débat. Certains perçoivent l’affirmation
des deux natures dans le Christ par le concile de Chalcédoine comme relevant d’une ligne nestorienne,
infidèle à Cyrille d’Alexandrie.
 Dès le 7 février 452, l’empereur Marcien doit faire afficher une loi interdisant aux clercs
comme aux laïcs de sa capitale de discuter les formules conciliaires.
 En 453, un décret impérial ordonne de chasser les intrus et de tuer les récalcitrants et c’est
l’armée qui rétablit Juvénal sur son siège.
 L’opposition monophysite n’est pas vaincue pour autant.
 En Égypte, beaucoup restent fidèles à Dioscore, l’empereur doit envoyer 2000 hommes à
Alexandrie pour rétablir l’ordre.
 L’opposition est souvent le fait du monde monastique.
 L’évêque chalcédonien Proterius est massacré et remplacé par un autre : Timothée Élure, qui
rédige un traité contre Chalcédoine et contre le tome à Flavien.
 Une littérature populaire voit le jour contre le concile
 La querelle théologique se couple aussi à une querelle politique :
 s’opposer au concile de Chalcédoine va de pair avec une opposition au pouvoir de
Constantinople.
 L’empereur Léon Ier, qui succède à Marcien, a du mal, lui aussi, à faire appliquer sa politique
chalcédonienne. En revanche, l’empereur Basilisque, qui a renversé Zénon l’Isaurien (empereur de
474 à 491) et dont le pouvoir est peu assuré, doit donner des gages à l’opposition et condamne les
« innovations » de Chalcédoine.
 Zénon reprend le pouvoir en 476 en s’appuyant sur les chalcédoniens, mais cherche ensuite à
refaire l’unité.
 C’est pourquoi il promulgue un texte de compromis, l’hénotique
 Tout en insistant sur l’unité du Christ et en rejetant ceux qui divisent ou confondent les
deux natures après l’incarnation (Nestorius et Eutychès), il déclare le Christ « consubstantiel
à nous selon son humanité ».
 Il ne rétablit l’unité qu’en partie : soit parmi les chalcédoniens, soit parmi les anti-
chalcédoniens, certains le refusent et il provoque de plus une rupture de la communion
entre Rome et Constantinople.
 Au fil des années, l’hénotique est de plus en plus interprété dans un sens anti-chalcédonien et
c’est ce parti qui se renforce.
 Sévère d’Antioche rédige pour l’empereur Anastase le type, un texte qui prétend donner
de l’hénotique une interprétation autorisée, dans un sens nettement monophysite.
 En revanche, l’empereur Justin, qui prend le pouvoir en 518, est nettement chalcédonien.
 Le patriarche de Constantinople doit rétablir dans les diptyques le nom de Léon le
Grand, accepter solennellement les décisions du concile et déposer Sévère d’Antioche.
 Cependant aucun réel effort n’est fait en vue d’une unité doctrinale et les deux partis sont
plus divisés que jamais.
 Justinien (482-565, empereur depuis 527), qui se croit une mission de théologien, cède à sa
femme Théodora, monophysite, dans la ligne de Sévère d’Antioche.
 En 544, il publie un édit condamnant “les trois chapitres”. Cette expression désigne
l’œuvre de Théodore de Mopsueste (v. 350-428), certains écrits de Théodoret de Cyr (v. 393-
466) hostiles à Cyrille de Jérusalem et une lettre attribuée à Ibas d’Edesse. Ce faisant, il
donne l’impression d’atténuer la doctrine de Chalcédoine.
 Dans un premier temps, le pape Vigile refuse d’adhérer à cette condamnation mais, après qu’il a
été enlevé par des soldats byzantins (22 décembre 545) et conduit en Sicile puis à Constantinople, il
accepte de le faire (11 avril 548).
 Sa décision est mal accueillie par les évêques occidentaux : les clercs romains qui l’ont
accompagné refusent de célébrer avec lui à la fête de Noël 549 et un synode africain de 550
l’excommunie. Aussi demande-t-il à retirer le judicatum qu’il a prononcé.
 L’empereur accepte mais lui fait jurer le silence avant le concile.
 Le 2ème concile de Constantinople, qui s’ouvre le 5 mai 553, avec 168 évêques, prend des
décisions conformes aux vœux de l’empereur.
 En l’absence de Vigile qui a refusé de siéger s’il n’était pas entouré d’évêques italiens, il
condamne les trois chapitres.
 Vigile refuse de souscrire à cette décision.
 L’empereur oblige alors le concile à le rayer des diptyques et à l’excommunier.
 Vigile cède à nouveau en février 554. Il peut alors regagner Rome, mais meurt sur le
trajet, à Syracuse, le 7 juin 555.
 Au total, le concile aboutit à un échec : il n’est pas parvenu à rallier les monophysites et a
suscité une violente opposition en Occident.
 Des églises monophysites se constituent dans l’Empire.
 En Syrie, l’église jacobite est favorisée après l’invasion perse (611)
 en Égypte, c’est l’église copte
 en Arménie se constitue aussi une église monophysite.
 En Perse, le nestorianisme se répand du fait que certains évêques syriens disciples de
Théodore de Mopsueste s’y sont réfugiés.
 En 628, lorsque l’empereur Héraclius envahit la Perse, c’est une époque de lutte entre
monophysites et nestoriens. Malgré une tentative de réunion avec Constantinople, la division subsiste.
 L’empereur Héraclius souhaite rétablir l’unité religieuse, garante de l’unité politique, avec
l’aide du patriarche Serge Ier de Constantinople.
 Il estime que l’union hypostatique fait qu’en Christ il y a unité d’activité, divino-humaine, c’est
le monoénergisme, dont on croit trouver l’attestation chez Denys l’Aréopagite
 Cela suscite l’opposition du moine Sophronios qui considère que l’activité relève des
natures et qu’il convient donc de parler de deux activités. Pour concilier le tout, le patriarche
parle d’un seul Christ agissant tout en maintenant les deux natures.
 Le pape Honorius, dans sa réponse, parle imprudemment « d’une seule volonté » du Christ : on
est passé au monothélisme.
 Sophronios, devenu patriarche de Jérusalem, exprime sa position dans une lettre à Serge,
qui réplique en obtenant un décret d’Héraclius, l’ekthèsis, qui affirme le monothélisme.
 En 639, Pyrrhus, successeur de Serge, fait entériner l’ekthèsis par un concile.
 Cependant le pape Théodore affirme son opposition à cette formule et reçoit l’appui de plusieurs
conciles locaux d’Afrique.
 En octobre 649, le pape Martin réunit un concile de 105 évêques au Latran, qui condamne le
monothélisme.
 L’empereur réagit violemment à cette désobéissance par rapport à l’édit, le pape Martin
est enlevé, conduit à Constantinople, et, au terme d’un procès, est envoyé à Cherson où il
meurt des suites des mauvais traitements endurés.
 C’est finalement l’empereur Constantin IV qui propose la tenue d’un concile sur le sujet, qui se
déroule à Constantinople, de novembre 680 à septembre.
 Finalement, les patriarches Georges de Constantinople et Macaire d’Antioche, qui professent
le monothélisme par crainte de retomber dans une forme de nestorianisme, sont condamnés.
7) LA QUESTION PÉLAGIENNE
 Pélage, moine breton, vit à Rome depuis les années 390 et il a acquis une certaine influence
dans l’aristocratie.
 Son expérience de directeur spirituel le pousse à professer pour ses dirigés une morale
exigeante, découlant de la nécessité d’un lien entre la foi et les œuvres, impliquant l’ascèse,
mais il estime qu’on peut atteindre, au moins en théorie, un idéal d’impeccantia (être
sans péché).
 Il estime que Dieu a donné à l’homme la possibilité de choisir entre le bien et le mal,
sans que ce choix soit limité par aucune faiblesse, il estime aussi que l’accès au salut est
possible pour tout homme, sans qu’il y ait aucune prédestination, soit positive, soit négative.
 S’il ne nie pas la grâce divine, il ne lui accorde qu’un rôle second : la grâce du Christ
n’est que l’exemple et l’enseignement qu’il a donnés, qui permettent d’obéir plus
facilement aux commandements.
 Il récuse pratiquement le péché originel, ou au moins sa transmission : pour lui, il ne peut
se transmettre que par imitation, et le petit enfant naît sans péché. Le baptême n’efface
donc pas le péché originel, mais seulement les péchés actuels commis avant sa réception.
 À l’automne 411, Célestius, disciple de Pélage, est condamné par un concile à Carthage pour
avoir professé plusieurs idées :
 refus de la transmission du péché originel, notamment aux petits enfants
 suffisance de la loi et de l’évangile pour conduire au salut
 existence d’hommes sans péché avant la venue du Christ.
 La condamnation est confirmée par deux autres conciles africains dirigés contre Pélage. Après
quelques hésitations, le pape Zosime se rallie à cette position, comme l’avait fait son prédécesseur
Innocent.
 Augustin vient au premier rang du combat contre Pélage et Julien d’Éclane.
 Il publie successivement Sur le châtiment et la rémission des péchés, Sur la perfection et
la justice de l’homme, Sur la grâce du Christ et le péché originel (dirigé contre un ouvrage
de Pélage Sur le libre arbitre).
 Il réaffirme avant tout la transmission du péché originel et la nécessité et la gratuité de la
grâce.
 La position pélagienne est moins le fait de Pélage, désormais, que de Célestius et d’un groupe
de 18 évêques d’Italie emmenés par Julien d’Éclane (petite ville proche de Bénévent) qui professent les
cinq louanges :
 louange de la création
 du mariage
 de la loi de Dieu
 du libre arbitre
 du gain des mérites.
 Mais l’empereur Valentinien III fait appliquer les décisions papales qui sont défavorables aux
pélagiens : les évêques de Gaule qui leur sont favorables doivent se soumettre et Germain d’Auxerre
est envoyé en Bretagne pour réprimer les tenants de cette position.
 Julien d’Éclane refuse que la transmission du péché originel puisse se faire par le mariage qui est
positif en tant que créé par Dieu.
 Augustin va répondre en distinguant le mariage de la concupiscence qui est un mal qui
accompagne le mariage depuis le péché originel et qui est le vecteur dudit péché.
 À une lettre de Pélage et au manifeste d’Aquilée souscrit par les évêques répondent les Quatre
livres contre deux lettres des pélagiens d’Augustin,
 puis le premier livre de son traité des noces et de la concupiscence (419) ; Julien répond par
Quatre lettres à Turbantius ;
 Augustin réplique alors par le second livre Des noces et par Six livres contre Julien, qui
réfute point par point les positions pélagiennes sur le péché originel, le mariage, la
concupiscence, le baptême des enfants et les vertus des infidèles.
 Dans des œuvres ultérieures adressées à des moines (Sur la grâce et le libre arbitre, 426 et Sur
la correction et la grâce, 427), Augustin défend la gratuité de la grâce divine et sa nécessité pour le
début de l’acte de foi. Il insiste sur la totale liberté de Dieu dans le choix des élus, ce qui conduit à un
débat sur la prédestination.
 Ce dernier point suscite une réaction de Jean Cassien qui craint qu’on en tire comme
conséquence un laisser-aller moral, dans la mesure où la volonté humaine serait purement passive.
 Ces idées, reprises et systématisées par des moines de Lérins, sont communiquées à
Augustin par Hilaire d’Arles et Prosper d’Aquitaine : sans la grâce, l’homme, incapable
d’accomplir le bien, serait néanmoins capable de le désirer ; Dieu offre à tous les hommes la
grâce du salut, les laissant libres de répondre à son offre et de s’y tenir ; il n’y a pas de
prédestination absolue.
 Augustin réplique en affirmant que l’entrée dans le bien comme la persévérance sont des
dons de Dieu et il réaffirme la prédestination positive et négative (Sur la prédestination des
saints, Sur le don de la persévérance).
 Un laïc, Prosper d’Aquitaine, répond aux moines en se tenant dans la ligne
augustinienne. Après 435, il essaie de proposer une voie moyenne dans La vocation de
toutes les nations : il estime qu’une grâce suffisante pour accéder au salut est donnée à
beaucoup, mais pas à tous au nom du mystère des desseins de Dieu. Cependant il prend
fermement position contre la thèse qui voudrait que les enfants non baptisés soient damnés.
 Vers 470, l’évêque Fauste de Riez relance la querelle dans son livre Sur la grâce. Il rejette la
prédestination absolue et estime que l’homme a la liberté et la capacité de solliciter la grâce. Une
cinquantaine d’années plus tard, il essuie la réfutation de Fulgence de Ruspe qui affirme les thèses
augustiniennes de manière radicale.
 La querelle est close (au moins provisoirement) par le second concile d’Orange (529), dont les
canons sont solennellement approuvés par le pape Boniface II et affirment à la fois la nécessité de la
grâce et la liberté de l’homme.
XII) LA DIFFUSION DU CHRISTIANISME
1) L’EXPANSION MISSIONNAIRE DANS LES TROIS PREMIERS SIÈCLES
 Les témoignages sur la première expansion missionnaire du christianisme viennent pour la
plupart de sources littéraires chrétiennes, au premier rang desquelles le livre des Actes des Apôtres.
 Sur les débuts de la mission chrétienne, Eusèbe de Césarée donne un témoignage plus
hagiographique qu’historique, qui aura néanmoins une longue postérité.
 Le christianisme recrute, au moins à la fin du IIème siècle, dans toutes les classes de la société
 On constate que la communauté judéo-chrétienne de Jérusalem, disparue après 135, a été
remplacée par une communauté pagano-chrétienne, tandis que des communautés judéo-chrétiennes
subsistent ailleurs en Palestine.
 Au IIème siècle, la diffusion du christianisme se poursuit dans les villes hellénisées, telle Néapolis
d’où est originaire le philosophe Justin. Eusèbe cite deux évêques vers 190 : Théophile de Césarée et
Narcisse de Jérusalem.
 Au IIIème siècle, Alexandre, évêque de Jérusalem, accueille Clément d’Alexandrie puis
Origène, qu’il autorise à prêcher, tandis que son confrère Théoctiste de Césarée l’ordonnera prêtre
quelques temps plus tard, avant de l’accueillir définitivement, après son éviction d’Alexandrie.
 Des chrétiens sont également implantés au-delà du Jourdain, parmi lesquels des membres
de sectes judéo-chrétiennes et des marcionites.
 Les débuts de la communauté chrétienne d’Alexandrie sont obscurs (voir séquence 4).
 à la fin du IIème siècle, on connaît le nom de Pantène qui, sous le règne de l’empereur
Commode (180-192), dispense un enseignement sur les Écritures.
 Après lui, son disciple Clément, probablement prêtre,
 Origène à qui le premier évêque connu à Alexandrie, Démétrios, confie la direction de
l’école catéchétique.
 Après le départ d’Origène pour Césarée de Palestine, c’est son disciple Héraclas qui lui
succède avant de devenir lui-même évêque. Les lettres de son successeur Denys (248-265)
font connaître l’existence de plusieurs autres communautés chrétiennes en Égypte, dotées
d’évêques.
 Au début du IVème siècle, on recense une centaine d’évêques en Égypte.
 En Phénicie, on sait que Tyr, la capitale, possède un évêque dès la fin du IIème siècle, tandis que
Damas a une communauté depuis les origines.
 Au concile de Nicée, la Phénicie enverra dix évêques.
 À Antioche, les communautés judéo-chrétiennes et pagano-chrétiennes coexistent non sans
difficulté.
 L’évêque Ignace est envoyé vers 115 à Rome pour subir son martyre. L’un de ses
successeurs, Théophile (169-188) polémique contre les marcionites. Outre cette tendance, on
sait que les gnostiques et les docètes sont aussi présents dans la ville.
 Après l’évêque Babylas, martyr en 250, Fabius soutient les novatiens.
 Paul de Samosate, son successeur, accusé de monarchianisme et d’adoptianisme, est
déposé en 272, ce qui provoque un schisme qui survit encore au moment du concile de
Nicée..
 En Mésopotamie, la Chronique d’Édesse mentionne une église chrétienne en 201, à l’occasion
de sa destruction par une inondation, mais on ignore quelle était sa tendance, du fait de la diffusion du
marcionisme dans cette ville.
 Il y a aussi des gnostiques et des encratistes.
 Malgré la légende de la conversion du roi Abgar VIII le Grand (177-212), il ne semble
pas qu’il y ait eu d’évêque à Édesse avant IVème siècle.
 Les chrétiens de cette région usent de versions syriaques de l’Ancien Testament et des
évangiles.
 C’est probablement à partir d’Édesse que le christianisme se répand en Perse. Malgré
son succès, il se heurte à la méfiance des autorités car les chrétiens sont issus de l’Empire
romain, qui est ennemi, et refusent d’adopter la religion nationale, le mazdéisme.
 Des textes tardifs évoquent l’évangélisation de l’Inde par saint Thomas. Ce n’est pas
invraisemblable, au moins dans une certaine mesure, du fait de la venue fréquente de marchands
romains sur la côte du Malabar.
 Selon les Actes des Apôtres, c’est Paul qui, le premier, fait pénétrer l’Évangile en Asie mineure.
Cinquante évêques de cette région seront présents à Nicée.
 Pline le jeune signale la présence de nombreux chrétiens en Bithynie en 112, dans les
villes et les campagnes. Certains de ceux qu’il interroge lui avouent être chrétiens depuis
plus de vingt ans.
 Plus à l’est, Sinope, vers 150, possède une communauté chrétienne d’où est issu Marcion.
 À la même époque, Lucien de Samosate estime que les chrétiens sont nombreux dans la
région du Pont. Pour la Cappadoce voisine, les témoignages sont plus rares : le premier
évêque connu à Césarée est Firmilien (230-v. 268) ;
 à Nicée, dix évêques représentent cette région peu urbanisée.
 C’est à partir de là que le christianisme se répand dans le royaume d’Arménie.
 La conversion du roi par Grégoire l’Illuminateur (294 ou 314), sera suivie de celle de tout
le peuple (conversion plus ou moins forcée suscitant des révoltes armées), selon Eusèbe
(Histoire ecclésiastique, 9, 8, 2).
 Le christianisme forme l’armature de la culture (alphabet arménien créé par le moine
Mesrop, au début du Vème siècle) et de l’identité nationale face à la Perse.
 À l’ouest, la province d’Asie aurait été évangélisée par l’apôtre Jean (lequel ?), enseveli
à Éphèse. Le livre de l’Apocalypse mentionne sept communautés de cette région (Éphèse,
Smyrne, Pergame, Thyatire, Sardes, Philadelphie, Laodicée) et Ignace d’Antioche deux
(Magnésie, Tralles).
 En Phrygie, on connaît deux évêques martyrs : Thraséas d’Euménie et Sagaris de
Laodicée, vers 160.
 Les communautés chrétiennes de Grèce sont connues par les Actes des Apôtres et les lettres de
Paul.
 En Occident, outre l’église de Rome (voir séquence 4), d’autres communautés chrétiennes sont
attestées en Italie au IIIème siècle (Naples, Syracuse, Cimitile près de Nole).
 Au début du IVème siècle, il y a environ 25 évêques en Italie, mais pour la plupart dans la
région romaine. Au nord, on ne signale guère que Milan et Ravenne.
 En Gaule, la lettre des martyrs de 177 atteste de la présence de communautés à Lyon et
Vienne. D’autres sont certainement implantées dans la vallée du Rhône ; le siège d’Arles est
antérieur à 256 (l’évêque se nomme alors Marcien), un évêque d’Autun, Réticius, participe,
en 313, à un concile à Rome. Le concile d’Arles de 314 fait connaître 16 évêchés gaulois
 Pour le reste de l’Europe, on possède des informations fragmentaires.
 On a des traces de communautés chrétiennes en Illyrie danubienne au milieu du IIIème
siècle, le nom de trois évêques de Grande-Bretagne (Londres, York et Colchester) au concile
d’Arles de 314 et ceux de trois évêques ibériques cités dans une lettre de Cyprien de
Carthage en 254, qui laisse entendre qu’ils sont plus nombreux.
 Au début du IVème siècle, à un concile d’Elvire, 38 églises sont représentées. La
persistance de pratiques païennes dans ces communautés laisse cependant entendre qu’elles
seraient peut-être de fondation récente.
 Pour l’Afrique du Nord, c’est l’œuvre de Tertullien qui donne les premières informations
importantes : les communautés sont nombreuses au début du IIème siècle, dans les différentes provinces
romaines.
 Cyprien complète ces informations pour le milieu du IIIème siècle: 87 évêques siègent au
concile de Carthage en 256 ; on considère qu’ils sont en fait autour de 150 à cette époque.
2) L’EXPANSION CHRÉTIENNE À PARTIR DU IVÈME SIÈCLE
 La Palestine est représentée par 14 ou 19 évêques à Nicée.
 Le christianisme progresse, comme en témoigne le nombre d’églises de la ville de
Jérusalem : 26, sans compter les hospices et les monastères.
 Les pèlerinages en Terre Sainte en sont pour une part la cause, ainsi que le développement
du monachisme.
 Cependant le christianisme se heurte à l’hostilité des juifs, notamment en Galilée, où ils
sont très bien implantés, ainsi que des Samaritains. La résistance païenne n’est pas à
négliger.
 Quand l’évêque Porphyre arrive à Gaza, en 395, les chrétiens ne sont qu’au nombre de 280, y
compris femmes et enfants, tandis que huit temples sont encore debout.
 L’invasion perse de 612 fait de nombreuses victimes dans la population chrétienne.
 Les Pères de l’Église les plus célèbres issus de Palestine sont
 Eusèbe de Césarée, premier historien chrétien,
 Cyrille, évêque de Jérusalem de 340 à 387, connu pour ses œuvres catéchétiques
 Épiphane de Salamine (v. 315-403), moine palestinien, protagoniste de la crise
origénienne et auteur du Panarion, qui évoque 89 hérésies.
 Au début du IVème siècle, on compte une centaine d’évêques en Égypte. La communauté
chrétienne d’Alexandrie s’affirme, avec la présence de grands évêques : Athanase (328-373),
Théophile (391-412), Cyrille (412-444).
 La lutte contre le paganisme est marquée par plusieurs épisodes violents : la destruction
du Serapeion (394) et le meurtre de la philosophe Hypatie en 416.
 Le christianisme se diffuse en milieu rural, avec également la destruction de nombreux
temples, remplacés par des églises (point 5 de l’annexe).
 Cependant les divisions sont nombreuses et durables dans cette église. Les novatiens sont
nombreux au IVème siècle, les gnostiques n’ont pas disparu (la bibliothèque de Nag Hammadi,
découverte en 1945, a été copiée vers 350), les manichéens sont très présents.
 Le schisme le plus important dans la première moitié du IVème siècle est le schisme
mélicien, un conflit de pouvoir entre l’évêque d’Alexandrie et les chrétiens de Haute-Égypte
qui refusent que sa juridiction s’étende à tout le pays. Le conflit débute sous l’évêque
Alexandre (313-328) mais se tend sous Athanase, dont les méliciens dénoncent
l’autoritarisme
 le rayonnement de cette église est très grand : on peut parler d’une “école d’Alexandrie”
aux IVème et Vème siècles.
 Vers 390, les chrétiens d’Antioche de Syrie seraient au nombre de 100 000, soit la moitié de la
population.
 Le christianisme se heurte à une forte résistance païenne, de la part du rhéteur Libanios et
du philosophe néo-platonicien Pamprépius.
 les temples sont peu à peu désertés comme le constate l’empereur Julien en 362.
 Une importante communauté juive subsiste ainsi qu’une mouvance de chrétiens
judaïsants.
 Le christianisme se répand aussi dans les campagnes de l’ensemble de la Syrie,
 On sait peu de choses de la province d’Arabie (Transjordanie) hormis un certain nombre
de vestiges archéologiques d’églises des Vème et VIème siècles, ornées de mosaïques.
 L’évangélisation de l’Isaurie est assez lente au Vème siècle, tandis que celle de Chypre a
commencé à s’opérer dès avant le milieu du IVème siècle. Les différentes dissidences de la
période précédente sont encore signalées sporadiquement.
 Alors qu’au concile de Nicée, on comptait une cinquantaine d’évêques d’Asie et une trentaine du
Pont, leur nombre augmente encore après le IVème siècle.
 C’est surtout au IVème siècle qu’émergent de grandes figures de théologiens.
 Le paganisme résiste néanmoins, ce dont témoigne l’effort des Pères cappadociens pour
intégrer la culture classique au christianisme. Au milieu du VIème siècle, l’empereur Justinien
envoie une mission qui détruit une grande quantité de lieux sacrés encore en activité.
 Lorsque Constantin fait de Byzance sa nouvelle capitale, le christianisme est déjà présent dans la
ville : il y a un évêque depuis le IIIème siècle, suffragant de celui d’Héraclée.
 Constantin prive de ressources les temples de la cité et Théodose Ier les fermera.
 Il fait édifier l’église des Saints-Apôtres, qui doit lui servir de mausolée. C’est Constance
II qui fait ériger Sainte-Sophie en 360. Après un incendie en 404, elle est reconstruite en 415.
 L’ancienne église Sainte-Irène est reconstruite et plusieurs martyria sont aussi bâtis, vers
lesquels convergent de nombreuses reliques collectées aux quatre coins de l’empire.
 Justinien, au VIème siècle, amplifie cette politique de construction. L’Église de
Constantinople, qui devient la première en Orient, est naturellement au cœur des
controverses doctrinales comme durant la crise arienne
 Une communauté de novatiens se maintient longtemps dans la ville, qu’une loi de 396
autorise à conserver églises et cimetières. Ils jouiront longtemps d’une protection impériale.
 C’est à partir de la Thrace que s’est opérée l’évangélisation des Goths. En 336, Ulfila est
ordonné évêque par Eusèbe de Nicomédie
 Cependant, c’est sa profession de foi homéenne qui se répand chez les Goths. Aussi ceux-
ci, qui vont se répandre dans l’Empire après 376, vont-ils diffuser avec eux l’arianisme, bien
qu’il existe aussi parmi eux des communautés orthodoxes.
 En Grèce et Macédoine, bien qu’on compte une cinquantaine d’évêchés ; le paganisme résiste
longtemps, notamment autour des grands sanctuaires de Delphes et Éleusis. À Athènes, les
panathénées sont toujours célébrées au milieu du IVème siècle et le sanctuaire d’Asklépios est toujours
fréquenté à la fin du siècle.
 Le roi de Perse Shapur II (340-379) déclenche une longue persécution contre les chrétiens de
son royaume, qui fait de nombreuses victimes et désorganise l’Église.
 Cependant le christianisme ne disparaît pas et la liberté est rendue à l’Église en 410,
lorsque celle-ci affirme son autonomie disciplinaire par rapport à l’Empire romain lors du
synode de Séleucie.
 Les persécutions sporadiques (420-422, 446-450, 453-454) n’empêchent pas la
progression du christianisme en Perse.
 Celui-ci est néanmoins affecté par un schisme suite à une élection épiscopale contestée,
mais l’épiscopat de Mar Aba en 540 témoigne d’une grande activité pastorale et d’un souci
de réforme des mœurs. L’Église de Perse est très missionnaire et suscite une école
théologique.
 C’est sous l’épiscopat de Nersès le Grand (353-373) que l’église d’Arménie reçoit sa véritable
organisation, elle se perçoit comme indépendante de celle de Cappadoce. Son caractère national
s’affermit encore par la suite.
 En Orient, d’autres communautés chrétiennes sont à signaler en Géorgie et dans le Caucase,
issues pour certaines de missions parties d’Arménie.
 Le christianisme s’implante en Éthiopie sous le règne de Constance II, selon Rufin (Histoire
ecclésiastique I, 9-10) mais, malgré la conversion du roi Ézana, un retour au paganisme s’opère ensuite
et il faut attendre le milieu du Vème siècle pour que le royaume devienne chrétien. Cependant il suit
l’Égypte dans la mouvance monophysite.
 Le Yémen suit un itinéraire un peu semblable mais l’Église est victime de persécutions aux Vème
et VIème siècles.
 En Occident, c’est véritablement aux IVème et Vème siècles que le christianisme s’implante dans
les provinces danubiennes, mais souvent dans une version subordinatianiste ou arienne (en Norique,
toutes les bourgades ont une église à cette époque).
 En Italie, trois villes seulement ont un évêque au début du IVème siècle : Milan, Aquilée
et Ravenne et l’influence d’Ambroise est prépondérante. Le nombre des évêchés se multiplie
dans l’Italie centrale et méridionale : on passe de 13 au début du IVème siècle à plus de 90 en
372 et à près de 200 en 600. Les populations paysannes commencent à être touchées.
 À Rome, les papes construisent une vingtaine d’églises, parmi lesquelles Sainte-Marie-
Majeure et Saint-Paul-hors-les-Murs et aménagent les catacombes pour le culte des martyrs,
accélérant ainsi la christianisation visible de la ville, même si le paganisme garde des
adeptes, notamment au sein de l’aristocratie sénatoriale, tandis que la pénétration du
christianisme se fait dans ce milieu par les femmes.
 La crise arienne provoque l’exil d’un certain nombre d’évêques sous Constance II.
Plusieurs schismes divisent la communauté romaine, notamment sous Damase.
 Dans l’Afrique romaine, les évêchés sont extrêmement nombreux, mais constituent souvent des
doublons, du fait du schisme donatiste :
 300 évêques de chaque parti en 411, avec des diocèses de tailles très diverses : si l’évêque
de Carthage dispose de 500 clercs, celui de Fussala n’a qu’un prêtre et un diacre.
 Le paganisme demeure néanmoins très vivace, tant dans l’aristocratie que chez les
paysans : dans son enfance, Augustin d’Hippone assiste aux bacchanales à Madaure et aux
processions de la Dea caelestis et de Cybèle à Carthage.
 En 429, le roi vandale Genséric (399-477) envahit l’Afrique du Nord. Après la prise de
Carthage (439), se constitue un royaume vandale indépendant de Rome, ce qui est avalisé par
Honorius en 442, mais les Vandales habitent en majorité la province Proconsulaire.
 L’arianisme de l’Église vandale, sous la dépendance royale de surcroît, la conduit à
s’opposer au clergé catholique : l’évêque de Carthage Quotvuldeus est dirigé sur l’Italie ainsi
que ses clercs et le clergé arien mène une active propagande de conversion à l’égard des
catholiques et des donatistes.
 C’est en partie pour délivrer les catholiques que Justinien entreprend la reconquête de
l’Afrique.
 Le IVème siècle voit un rapide développement du christianisme dans la péninsule ibérique,
même si les régions montagneuses ne sont touchées que plus tard. Plusieurs théologiens ont une
certaine renommée
 L’église d’Espagne est touchée par une crise qui lui est propre, le priscillianisme, qui a
des relents d’illuminisme. Le mouvement subsiste jusqu’au VIème siècle. La première moitié
du Ve siècle est une période d’invasions.
 Les Alains, les Suèves et les Vandales pénètrent en Espagne en 409, puis les Wisigoths en
414 en Tarraconaise et ensuite dans l’ensemble de la Péninsule à la fin du siècle.
 Les wisigoths, quoique ariens, se montrent tolérants envers le catholicisme et c’est
surtout en Gaule qu’Euric (466-484) sévit contre des évêques. Alors que Léovigilde (568-
586) a tenté d’unifier l’Église dans une ligne arienne, son successeur, Reccarède (586-601)
passe au catholicisme sous l’influence de l’évêque Léandre de Séville et le concile de
Tolède (589) marque le passage officiel du royaume au catholicisme.
 En Gaule, on peut considérer qu’au IVème siècle, les évêchés sont entre 70 et 80. Si les cités sont
christianisées, l’évangélisation des campagnes est très lente.
 Le monachisme participe à cette avancée. Quelques membres de l’aristocratie gauloise se
font un nom comme évêques et écrivains ecclésiastiques, tels Paulin de Nole et Sulpice
Sévère.
 Ce n’est que lorsque Constance II, après 353, veut imposer des professions de foi
surbordinatianistes que l’arianisme touche la Gaule. Trois évêques résistent : Paulin de
Trèves, Hilaire de Poitiers, Rhodanius de Toulouse.
 Dès 360, lors d’un concile tenu à Paris, l’épiscopat gaulois revient à la foi nicéenne, en
excommuniant les deux seuls opposants : Saturnin d’Arles et Paterne de Périgueux. Le
schisme priscillianiste se prolonge en Gaule autour de Félix de Trèves.
 Lors des invasions du début du Vème siècle, les Wisigoths s’installent au sud-ouest et les
Burgondes à l’est de Lyon, tandis que des Bretons s’établissent en Armorique, avant que les
Francs n’étendent leur pouvoir sur l’ensemble de la Gaule au cours du VIème siècle. Bien que
de confession arienne, les Burgondes ne persécutent pas les catholiques.
 Ce n’est pas le cas du roi wisigoth Euric (466-484) qui, lorsqu’il veut étendre son pouvoir
jusqu’à la Loire et au Rhône, se heurte à une forte résistance et décide d’exiler l’évêque de
Clermont, Sidoine Apollinaire qui a été l’âme de ce mouvement.
 Le baptême catholique de Clovis (496 ou 506) modifie radicalement la situation de
l’Église en Gaule, dans la mesure où il va soumettre les différentes autres peuplades.
 Les écrivains chrétiens sont assez nombreux aux Vème et VIème siècles.
 En Irlande, le christianisme débarque vers le IVème siècle, mais c’est au siècle suivant que le
pape Célestin Ier envoie dans l’île Palladius, qui est rapidement suivi (vers 432 ou 456) par Patrick,
d’origine bretonne, qui est considéré comme le principal évangélisateur.
 Il convertit l’un des rois du nord de l’île, alors occupée par différentes tribus et parcourt le
pays aidé par plusieurs compagnons.
 L’ensemble du peuple passe au christianisme, même s’il conserve des survivances
païennes.
 À partir du VIème siècle, le monachisme prend une place prépondérante et essaime sur le
continent, à la suite de Colomban (v. 540-615).
3) « PASSONS AUX BARBARES ! »
 À l’égard des peuplades du Nord, Rome avait hérité de l’hostilité des Grecs à l’encontre des
barbares
 À l’idée du châtiment que les Barbares infligent à un Empire romain dégradé, Paul Orose
associe l’idée que les envahisseurs sont aussi des hommes qui ont droit à l’Évangile
 Le christianisme a pénétré dans les contrées barbares, à la fois sous l’influence de prisonniers
de guerre mais aussi sous celle d’anciens militaires de l’armée romaine.
 Puis des évêques sont envoyés pour fonder vraiment l’Église. Un certain Théophile,
évêque de la Gothie, participe au concile de Nicée (325). Malgré l’influence d’Ulfila, tous les
goths ne sont pas ariens.
 Théodoret de Cyr explique comment Jean Chrysostome a fait passer nombre de Goths à
la foi nicéenne (Histoire ecclésiastique, V, 33).
 Ulfila, cependant, d’abord arien modéré, professe ensuite un Credo très subordinatianiste.
 Il traduit la Bible et crée pour cela l’alphabet national des Goths à partir de caractères
grecs, latins et runiques. Il oriente sa traduction dans un sens nettement arien.
 L’arianisme des Wisigoths se diffuse ensuite à d’autres peuples germaniques : Ostrogoths,
Vandales, Burgondes.
 Clovis, en revanche, d’origine païenne, prend pour femme Clotilde, catholique, fille du roi des
Burgondes Chilpéric II. À l’occasion d’une guerre contre les Alamans, il fait le voeu, s’il l’emporte,
d’embrasser la foi de sa femme et 3000 guerriers, dit-on, le suivent dans son baptême.
 En Grande-Bretagne, les Celtes, déjà christianisés, se retirent au Vème siècle, dans la partie la
plus occidentale et laissent la place aux Anglo-Saxons qui, au début du VIIème siècle, à l’époque de
Grégoire le Grand, ne sont pas encore christianisés. Le pape envoie auprès d’eux Augustin de
Cantorbery.
 Les Lombards, quant à eux, n’étaient que partiellement catholiques avant leur descente en
Italie. Leur christianisation, après leur implantation dans le Nord de la Péninsule, aurait été
particulièrement l’œuvre de Théodelinde, épouse du roi Autarcie (584-590), puis de son successeur
Agilulf (590-616).
 Grégoire le Grand la tourne vers la foi nicéenne et Agilulf reçoit le moine Colomban qui
fonde l’abbaye de Bobbio.
4) SAINT ANTOINE ET LES DÉBUTS DU MONACHISME
 Le monachisme chrétien, qui se caractérise par le choix d’une vie à l’écart, impliquant une
séparation physique d’avec le monde, est né en Égypte dans la seconde moitié du IIIème siècle, c’est-à-
dire au moment où disparaît le martyre.
 Antoine (251-356), d’une famille chrétienne aisée, abandonne tous ses biens vers 18-20
ans et se place sous la direction d’un vieillard qui mène la vie d’ascète (point 16 de
l’annexe). Il se retire dans le désert, dans la Thébaïde supérieure. Durant une vingtaine
d’années, il fait face au démon.
 Le moine (monachos : solitaire ou monos : unique – le moine cherche à faire l’unité de sa vie)
tente de conquérir la pureté du cœur qui s’acquiert par l’effort continu et la contrition de l’esprit : le
corps est considéré comme un ennemi qu’il faut mater. Le moine cherche à parvenir à l’apatheia
(absence de passions) prônée par les stoïciens.
 Trois sites égyptiens seront bientôt célèbres par la densité de leur population monastique :
 la montagne de Nitrie (en fait une modeste colline à 40km au sud d’Alexandrie)
 les Cellules (Kellia), à 18km au sud
 le désert de Scété, 50km au sud, qui regroupe de nombreux ermites (le terme vient
d’eremos : désert) autour de la figure de Macaire le Grand.
5) SAINT PACÔME ET LES CÉNOBITES
 Né à Latopolis (Haute-Égypte), Pacôme (v. 292-346) se convertit à l’âge de vingt ans en voyant
la charité des chrétiens de Thèbes.
 Après s’être mis pendant trois ans au service de villageois, il se place ensuite sous la
direction d’un ermite, Palamon.
 Selon Jérôme, c’est lui qui serait l’inventeur de la vie en commun, qui est le sens du mot
cénobitisme – koinodsion genos.
 Le monastère de Tabennîsi est fait d’un rassemblement de cabanes : les moines habitent dans
des cellules séparées.
 Ils travaillent, prient et mangent ensemble. La vie en commun permet un encouragement
mutuel dans la vie religieuse, la prévention des abus et la pratique du travail.
 Des modifications sont apportées dans la suite. Le monastère est formé d’une enceinte
assez vaste, entouré d’un haut mur de clôture. On y trouve une série de maisons, dont
chacune comprend une vingtaine de religieux. Chaque religieux a sa cellule.
 Plus tard, trois moines partageront la même cellule. Une église, un réfectoire, une cuisine,
un cellier, une cour ou un jardin, une hôtellerie pour les étrangers complètent l’aménagement
du monastère. Chaque maison a son chef (le praepositus). Trois ou quatre maisons forment
une “tribu”. Le service général est assuré par des semainiers, recrutés à tour de rôle dans les
diverses maisons.
 Pacôme ne tient pas à ce que ses moines soient prêtres (il ne l’est pas lui-même). Les
prêtres admis dans les monastères y sont entourés de respect, mais ne peuvent prétendre à
aucun traitement de faveur.
 Les règles pacômiennes originelles ne sont pas connues, mais seulement la traduction latine que
Jérôme en a donnée en 404.
 Saint Sabas (439-532) développe ce type de monastère : il crée le monastère des Laures près de
Jérusalem.
 Il laisse une règle importante comportant un calendrier liturgique et 46 articles
disciplinaires (point 20 de l’annexe).
 Au Sinaï, l’empereur Justinien fait bâtir un monastère-forteresse (qui prend le nom de
Sainte-Catherine au IXe siècle) où des moines de la région se rassemblent à l’abri des
incursions des Saracènes.
 Outre les Laures, la Palestine abrite les fondations réalisées par saint Jérôme et son amie
Paula (386), tandis que Mélanie l’Ancienne, veuve d’un préfet de Rome, installe vers 380
sur le mont des Oliviers un monastère de femmes qu’elle dirige.
 En Mésopotamie et en Perse, on trouve des laïcs vivant dans le monde, qui partagent en
association avec des moines un même idéal de chasteté et de détachement des biens matériels.
 En Orient, la règle de saint Basile a un certain rayonnement, qui prescrit la mise en commun des
biens, le travail, la chasteté, le tout vécu avec mesure et sans ascèse excessive, en restant au service de
l’Église : ce sont des “frères” qui gèrent la basiliade, grand hôpital charitable fondé par l’évêque de
Césarée.
6) LES DÉBUTS DU MONACHISME EN OCCIDENT
 La traduction latine de la vie d’Antoine par Évagre d’Antioche (vers 370) joue un grand rôle
dans la diffusion du modèle monastique en Occident.
 En Italie du Nord, Eusèbe de Verceil initie un monachisme clérical.
 Au IVème siècle, Marcella, une amie de saint Jérôme, appartenant à la bonne société
romaine, rassemble des femmes dans son palais de l’Aventin, à Rome, pour lire les Écritures
et chanter les psaumes
 En Gaule, le grand animateur du monachisme est un ancien militaire, saint Martin (316/317-
397) qui, formé par Hilaire de Poitiers, s’installe, vers 360, à Ligugé, près de Poitiers, pour y vivre en
ermite.
 Consacré évêque de Tours en 371 ou 372, il refuse de modifier son régime de vie et
trouve refuge dans une cabane de bois, à Marmoutier, à deux kilomètres de Tours. De
nombreux “frères” l’imitent (ils sont environ 80), vivant dans des cellules individuelles, mais
prenant les repas en commun et renonçant à toute propriété personnelle.
 À la différence des Pères du désert, saint Martin garde un souci pastoral : c’est un retrait
du monde, mais non un isolement.
 Jean Cassien (360/365-v. 435) commence sa formation religieuse dans un monastère de
Bethléem avant de passer vers 385 en Égypte, où il demeure sept ans, dans le désert de Scété.
 Il passe ensuite à Constantinople, puis à Rome, avant d’arriver à Marseille, vers 415, où il
fonde deux monastères, l’un pour les hommes et l’autre pour les femmes. Son principal
ouvrage s’intitule : Des institutions cénobitiques.
 Cassien appelle au renoncement à tout ce qui n’est pas Dieu, dans l’humilité, la discrétion
et la patience, ainsi que dans la charité envers les frères. Mais il prône, contrairement aux
maîtres égyptiens, une ascèse mesurée et ses écrits sont marqués d’une grande finesse
psychologique.
 Il invite à la lecture méditée de l’Écriture, qui transforme l’âme de l’intérieur et à la
récitation des psaumes qui deviennent la prière personnelle du moine.
 L’archipel de Lérins, en face de Cannes, devient un haut-lieu du monachisme.
 Vers 410, Honorat et Caprais y instaurent une sorte de semi-anachorétisme (chaque
moine est en rapport individuel avec l’abbé mais il n’y a pratiquement pas de vie
communautaire).
 Lérins a rapidement une certaine influence sur de nombreux monastères gaulois.
 Césaire, moine de Lérins, devenu évêque d’Arles, rédige une règle pour les vierges
consacrées.
 Vincent de Lérins (†435/450), dans son aide-mémoire (commonitorium) met en valeur le
rôle de la tradition.
 Le monachisme irlandais rayonne aussi sur le continent.
 Colomban (540-615) part avec douze religieux, parmi lesquels le futur saint Gall. Il
fonde le monastère de Luxeuil (auj. en Haute-Saône). C’est là qu’il rédige la Règle qui porte
son nom et qui conjoint une rude exhortation à l’ascétisme avec de nombreuses pénitences,
fustigations ou jeûnes, imposées aux délinquants et un ordo pour la psalmodie.
 Expulsé par Thierry II, souverain de Burgondie, il se rend en Germanie du sud et fonde
un monastère à Bregenz, sur le lac de Constance, avant de passer en Italie du nord, où il
crée l’abbaye de Bobbio où il meurt en 615. Des moines formés à Luxeuil vont essaimer à
travers la Gaule tout entière et fonder des abbayes célèbres : Jumièges, Corbie, Chelles,
Saint-Wandrille... C’est lui qui introduit en Gaule la réitérabilité de la pénitence avec
l’usage des pénitences tarifées.
 Augustin d’Hippone (354-430), devenu évêque, forme un monastère autour de lui.
 Sa règle, dont on connaît deux versions, l’une au masculin, l’autre au féminin, a été écrite
entre 400 et 430.
 Brève, elle est articulée en huit chapitres et conjugue austérité et modération.
 Elle prévoit le renoncement à la propriété personnelle et insiste sur la charité, don de Dieu
et sur l’humilité, qui peuvent seules permettre de souder la communauté.
 Il estime que, dans la vie communautaire, on doit tenir compte des différences de toutes
natures existant entre les personnes. La correction fraternelle doit conjuguer l’amour des
personnes et la haine du mal.
 Le supérieur, lui aussi, doit allier bonté et sévérité et se faire le serviteur de tous.
 La règle se montre modérée sur le chant liturgique ainsi que sur les mortifications. Elle
représente ainsi un notable adoucissement à l’égard du monachisme de l’époque.
 Saint Benoît (480-547) est issu d’une famille de petite noblesse habitant Nursie (Ombrie, Italie
centrale).
 Étudiant à Rome rebuté par la corruption des mœurs estudiantines, il quitte la ville,
interrompant ses études.
 Il est ermite pendant trois ans dans la grotte de Subiaco, sur le modèle des moines
égyptiens. Rapidement, sa popularité attire autour de lui des disciples et il organise douze
petits monastères de douze moines chacun.
 En conflit avec le clergé du voisinage, il part avec ses moines et s’établit, vers 529, dans
une antique forteresse, au Mont-Cassin, à mi-chemin entre Rome et Naples. Il y construit
deux oratoires et prêche l’Évangile aux paysans du voisinage, encore païens.
 C’est au Mont-Cassin que Benoît rédige la règle qui porte son nom, composée d’un
prologue et de 73 chapitres, à l’usage des cénobites.
 Elle emprunte surtout à une anonyme Règle du maître, connue dans la région romaine au
début du VIème siècle. Ce n’est que très progressivement qu’elle s’imposera, et surtout après
le concile d’Aix-la-Chapelle (817) qui l’imposera aux monastères.
 L’abbé exerce un pouvoir patriarcal, s’étendant à tous les aspects de la vie.
 Élu à vie, il est assisté d’un conseil d’anciens (séniorat) et, dans les affaires importantes,
il doit consulter l’ensemble des moines réunis en chapitre.
 Il nomme les responsables des différents services : le cellérier, chargé du temporel,
l’hôtelier, préposé à la réception des voyageurs, le prieur, chargé de seconder l’abbé.
 La vie du moine est partagée entre la prière et le travail. L’office divin est le pôle central
de la prière et toute autre occupation lui est subordonnée. Une certaine latitude est accordée
au moine pour l’organisation de son oraison individuelle. Le travail comporte le jardinage
et l’artisanat mais n’exige pas la participation aux gros travaux agricoles.
 Une part importante de la journée est réservée à la lectio divina, lecture spirituelle et méditation
des textes sacrés et des commentaires des Pères. L’existence se vit en communauté avec l’usage du
dortoir, qui ne sera remplacé que plus tard par les cellules individuelles.
 La Règle, par ailleurs, christocentrique, met l’accent sur la discipline intérieure, la
renonciation à la volonté propre, la pratique de l’obéissance et de l’humilité, articulée en
douze degrés.

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