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Fac des Lettres, des Arts

Et des Humanités de Manouba


Département de français Ben Mustapha.H

Bibliographie

Arrivé M., Gadet F. et Galmiche M., La Grammaire d’aujourd’hui, guide


alphabétique de linguistique française, Paris, Flammarion, 1986.

Bonnard H., Code du français courant, Paris, Magnard, 1981.

Grevisse M., Le Bon Usage, Paris-Gembloux, Duculot, 1982, 12ème édition.

Le Goffic P. Grammaire de la phrase française, Paris, Hachette, 2000.

Riegel M., Pellat J-C. et Rioul R., Grammaire méthodique du français, Paris,
P.U.F, 2004 (3ème édition).

Wagner R-L., et Pinchon J., Grammaire du français classique et moderne, Paris,


Hachette, 1962.

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SYNTAXE (2 année de la licence de Français)
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Le verbe : description morphosyntaxique

Description morphologique :

En tant que partie de discours, ou de la langue, le verbe est un élément


qui se distingue de tous les autres par ses marques morphologiques,
puisqu’il est le seul à présenter des variations en temps, en personne et
en nombre. Il est, en effet, la combinaison de deux morphèmes : le
radical et la désinence.
Exemple dor-t/ dorm-ait
Le radical est la partie du verbe qui renvoie à sa composante lexicale,
alors que la désinence, ou terminaison, réfère à sa composante
grammaticale. La base lexicale constitue la composante sémantique du
verbe et la désinence marque les catégories grammaticales du mode, du
temps, de l’aspect et de la personne.
Or, bien que satisfaisante comme définition de départ, dire que le verbe
se compose de ces deux morphèmes reviendrait à signifier qu’il est
foncièrement de nature monolexicale. Autrement dit, cela laisserait
entendre que l’élément verbal ne se présente que sous la forme d’une
seule unité lexicale. Si cela est souvent le cas en français, il n’est pas
chose rare que le verbe se compose de deux unités. Evidemment, nous
ne faisons pas allusion aux formes verbales composées où
surcomposées. Nous renvoyons aux périphrases et aux locutions
verbales.
Observons les occurrences suivantes :
[Elle veut partir.]
[Elle va partir.]
[Elle rendra compte de sa théorie dans ce journal spécialisé.]
Dans le premier exemple, la phrase se compose d’un SN (elle) et d’un SV
(veut partir). Le syntagme verbal comporte un verbe (veut) et un

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complément du verbe (partir). Nous remarquons, dans cet énoncé, que


L’infinitif « Partir» est pronominalisable [partir, elle le veut]. Cela indique
qu’il s’agit là d’un emploi nominal de l’infinitif. Une autre preuve de cet
emploi nominal est fournie par la possibilité de commutation avec un
groupe nominal [elle voulait son départ1].
Dans le second énoncé, il est impossible de souscrire à l’idée que
« partir » est complément direct du verbe « aller ». D’abord, on
remarquera que la reprise pronominale de l’infinitif est, dans ce cas,
impossible [*partir, elle le va]. On remarquera également que la
commutation avec un SN n’est pas possible [*elle va son départ], étant
donné que, d’une part, le verbe « aller » est intransitif et que, de ce fait,
on s’attend à ce que son complément soit introduit par une préposition
ou alors que la préposition soit sous-entendue comme dans [il va
travailler] où la préposition « pour » est sous-entendue. Une telle
construction [aller+nom] n’est en effet possible que dans la construction
« aller son (bonhomme de) chemin ».
Cette impossibilité est, en effet, due au sémantisme du verbe, qui, dans
l’occurrence que nous observons, ne correspond pas à « se déplacer », ni
à n’importe quelle autre acception : la phrase signifie « prochainement,
elle part ». En d’autres termes, le sémantisme du verbe se réduit à
l’indication d’un repère temporel, le futur. Par conséquent, il change de
statut grammatical et devient un semi-auxiliaire : il devient l’équivalent
d’une désinence verbale indiquant le futur (-ra). Ce phénomène, que l’on
appelle grammaticalisation, est doublé d’un autre processus que l’on
appelle le figement lexical : une fois son statut de verbe perdu, « aller »
n’exprime, dans ce type d’emploi, que les catégories de la personne et
du temps. Sur le plan distributionnel, il voit sa distribution de semi-
auxiliaire réduite au schéma « aller+inf.» Cette construction correspond à
ce qu’on appelle une périphrase verbale. Du reste les périphrases

1- dans cette phrase le possessif « son » ne renvoie pas au sujet du verbe. Si cela était le cas, l’énoncé serait
agrammatical.

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verbales sont de trois sortes : des périphrases modales, des périphrases


temporelles et des périphrases aspectuelles.
Dans le troisième exemple proposé, [Elle rendra compte de sa théorie
dans ce journal spécialisé.] on constate la difficulté de considérer
l’élément rendre comme noyau de SV. D’une part, l’omission de l’article
devant « compte » ne permet pas de l’analyser comme GN à part entière
fonctionnant comme COD de rendre. Cela se vérifie par l’impossibilité
d’introduire une expansion du nom [* Elle rendra excellent compte de sa
théorie dans ce journal spécialisé]. D’ailleurs, il est impossible de
restituer le déterminant devant le nom [*Elle rendra compte de sa
théorie dans ce journal spécialisé]. Il ressort que les deux éléments
fonctionnent en tandem pour former ce qu’on appelle une locution
verbale paraphrasable par un autre verbe « résumer, présenter ». Les
locutions verbales sont, elles aussi, le résultat d’un figement lexical. Elles
se caractérisent par l’absence d’article ou alors la présence d’un article
figé, auquel on ne peut substituer aucun autre déterminant et que l’on
ne peut mettre au pluriel [rendre la pareille] [*rendre une (les, ces)
pareille(s)]. Le test d’extraction du nom montre également la solidarité
syntaxique de l’élément nominal et de l’élément verbal [*c’est compte
qu’elle devra rendre de sa théorie dans ce journal spécialisé].
Remarque : il s’agit là de tendances générales observées sur l’ensemble
des loc. verbales. Cela dit, on peut toujours trouver des cas qui ne
fonctionnent pas selon ce modèle. Des contre-exemples à ces tests
peuvent bien exister [c’est faim qu’il avait et non chaud].

Description syntaxique :
Cerner le statut syntaxique du verbe suppose que l’on réfléchisse le rôle qu’il
joue dans la structuration de l’énoncé. Dans les grammaires traditionnelles, le
verbe est identifié comme le prédicat de la phrase. Il s’agit là d’une définition
fondée sur la logique qui veut que chaque phrase soit analysée selon le schéma
thème et prédicat.

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Au cours du 20ème siècle, voulant dépasser cette définition, les linguistes vont se
focaliser sur le rôle syntagmatique du verbe. On retiendra particulièrement
deux thèses : la première, développée par L.Tesnière, pose que le verbe est
l’élément central de l’opération syntaxique dans la mesure où il domine
syntaxiquement aussi bien ses compléments que le sujet lui-même. La seconde
orientation est celle des paradigmes transformationnalistes,
distributionnalistes et générativistes. Selon les linguistes qui s’inscrivent dans le
sillage de ces écoles, le verbe est l’élément central du syntagme verbal. Ainsi ne
domine-t-il que les compléments qu’il régit.

Du reste, divers classements ont été proposés depuis les grammaires


traditionnelles. Si les premières grammaires rangeaient les verbes en fonction
de leur sémantisme (action, état, opinion…etc.), à l’époque moderne deux
types de classement retiennent l’attention : les verbes sont en effet classés, soit
en fonction du nombre d’actants que requiert le verbe, soit en fonction de se
construction syntaxique. Dans la première logique, il y a distinction entre des
verbes monovalents, divalents, trivalents et avalents. Il s’agit du classement
que propose Tesnière dans sa théorie de la valence. Un verbe monovalent est
un verbe dont la construction ne prévoit qu’un seul actant (dormir), un verbe
divalent suppose deux actants (parler) ; un verbe trivalent se construit avec
trois actants (donner). Quant aux verbes avalents, leur construction ne prévoit
pas d’actants (pleuvoir).

La seconde logique classificatoire repose sur la construction verbale comme


critère de classement. Il y est fait distinction, en gros, entre des verbes
transitifs et des verbes intransitifs. La classe des transitifs compte des verbes
transitifs directs et d’autres transitifs indirects. Quant à la classe des verbes
intransitifs, elle subsume les verbes attributifs et les véritables intransitifs.

Parallèlement à ces deux grandes classes, il existe des verbes ayant deux
fonctionnements syntaxiques. Ils sont en effet tantôt transitifs tantôt
intransitifs. Ces verbes sont dits « verbes à retournement », ou verbes
symétriques (cuire, casser).

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Les catégories grammaticales rattachées au verbe :

Les catégories grammaticales qui se rapportent au verbe sont le mode, le


temps verbal, la personne, le nombre, l’aspect et la voix.

Le mode :

Le mode se présente comme un système dont les composantes se définissent à


travers les ressemblances, les oppositions et la complémentarité des uns par
rapport aux autres. Cette catégorie se définit comme la manière dont un procès
est appréhendé.

Dans la tradition grammaticale, il y a distinction entre des modes personnels et


des modes impersonnels. Les modes personnels sont l’indicatif, le subjonctif, le
conditionnel et l’impératif, alors que les modes impersonnels sont l’infinitif, le
participe et le gérondif. Cette opposition est d’ordre morphologique : en effet,
les modes personnels actualisent la personne à travers la désinence. Au
contraire, les formes verbales des modes impersonnels ne contiennent pas
d’indication de personne, donc n’actualisent pas la personne grammaticale.

Par ailleurs, ces deux types de mode présentent une autre opposition
significative : cela consiste en ce que les modes impersonnels n’actualisent pas
le temps. Cela veut dire que ces modes ne précisent pas les époques du procès.
Or, on pourrait opposer l’argument que les grammaires aussi bien
traditionnelles que modernes distinguent des formes du présent et des formes
du passé (marcher, avoir marché ; marchant, ayant marché). Peut-on donc dire
que les modes impersonnels excluent le temps ? En vérité l’étiquette présent
vs passé n’est là que pour distinguer une forme simple et une forme composée.
Observons en effet ces exemples :

Tu peux marcher.

Il faut avoir payé son ticket pour entrer.

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Dans le premier énoncé, rien n’indique que c’est le présent qui est marqué par
l’infinitif, puisque le verbe peut bien indiquer un futur. La phrase peut signifier
« tu peux marcher immédiatement » ou alors « tu peux marcher après ».
L’étiquette s’avère donc quasiment inadéquate. D’ailleurs, que faut-il penser
lorsque le même infinitif est combiné à un verbe conjugué au passé « il fallut
marcher jusqu’à la rivière » ? L’infinitif présent signale-t-il un passé ? Si l’on se
fie au passé simple de « falloir », tout porte à croire qu’il s’agit bien de l’époque
passée. Et en cela, il ne s’oppose aucunement à la forme « avoir marché », qui
peut bien lui être substituée :

Il fallut avoir marché jusqu’à la rivière.

Toutefois, les deux formes ne sont pas strictement équivalentes, car elles
s’opposent à un autre niveau : celui de la temporalité interne du verbe, en
effet. Autrement dit, ces deux formes s’opposent au niveau de l’aspect verbal,
car « marcher » nous présente un procès en cours alors que « avoir marché »
signale que le procès est borné et plutôt accompli.

Quant au second énoncé, elle n’indique pas non plus un procès situé au passé.
Imaginons que cette phrase soit réalisée par le contrôleur de tickets d’une salle
de cinéma, qui veut signifier à un client qui n’a pas encore acheté son ticket
qu’il faut qu’il aille d’abord acheter son ticket. Dans ce contexte, cette forme
composée situe le procès dans le présent, car elle signifie « allez acheter
(maintenant) votre ticket et entrez (maintenant).» Aucun rapport donc au
passé présupposé par l’étiquette d’infinitif passé. Là encore, c’est l’opposition
aspectuelle qui est en jeu. Nous reviendrons plus tard à cette notion d’aspect.

De ce fait, il est possible de conclure que le mode impersonnel présente une


image floue du temps dans la mesure où il ne discrimine pas les époques. Le
procès peut en effet appartenir à n’importe laquelle des trois époques.

Le temps verbal :

A la distinction entre modes personnels et modes impersonnels, il faudrait


ajouter celle qui oppose les modes temporels et les modes non-temporels.

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Dans la tradition grammaticale, les modes personnels sont également


considérés comme des modes temporels. Le temps linguistique, ou temps
externe, est crée par le locuteur. Lorsqu’un locuteur s’exprime, en effet, il situe
sa parole dans le temps (présent, passé, futur). Mais, dans quelle mesure peut-
on affirmer que les modes personnels expriment le temps ? Autrement dit, les
modes temporels expriment-ils les trois époques du temps externe ?

Traditionnellement, les grammairiens considéraient comme modes


personnels, donc temporels, l’indicatif, le conditionnel, l’impératif et le
subjonctif. Les recherches linguistiques modernes ne considèrent comme
mode temporel que l’indicatif. En effet, il est proprement le mode verbal
capable d’opérer une distinction assez rigoureuse. Le passé simple, par
exemple, situe le procès rigoureusement dans le passé, le futur dans une
époque ultérieure. Néanmoins, certains tiroirs de l’indicatif n’opèrent pas
avec la même rigueur. Tel est le cas de l’imparfait dans cet emploi :
Une circonscription de plus et il était président.

Dans cette phrase, il est impossible d’affirmer que l’imparfait situe le


procès dans le passé : en réalité, il situe le procès à une époque éventuelle
ultérieure.que son fonctionnement modal est restreint à certain emplois (par
ex. les emplois avec si, les atténuations, la réserve etc.) En dehors de ces
emplois, le conditionnel fonctionne plus comme un temps du futur. Comparez
les deux énoncés suivants :

Je pense qu’il ne viendra pas.

Je pensais qu’il ne viendrait pas.

Il s’agit ainsi d’un emploi situant le procès dans une époque future et
surtout réelle, ce qui n’est pas attendu. De même, l’opposition entre la forme
passée du conditionnel et la forme du présent ne marque point deux repères
temporels distincts, le présent et le passé. D’une part, ainsi qu’on vient de le
remarquer, le conditionnel présent dans l’exemple précédent n’indique pas un
présent. En plus, quand bien même on remplacerait cet emploi par un

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conditionnel passé « je pensais qu’il ne serait pas venu », le conditionnel dit


passé situe le procès dans une époque ultérieure à l’acte psychologique de
« penser ». De ce fait, l’opposition des deux formes est moins temporelle
qu’aspectuelle. D’ailleurs, on pourrait faire les mêmes remarques sur les
oppositions que manifestent les temps de l’impératif et ceux du subjonctif.

Dans l’étude des rapports temporels, on peut s’appuyer, selon la


situation de communication, sur deux repères :

Le repère fondamental est le point d’énonciation, c’est-à-dire le moment de la


parole que l’on pourra appeler T0.

Un repère dérivé qui est le point de l’évènement et que l’on désignera par T’.
Ses repères permettront deux types de rapport temporel :

Un rapport de coïncidence, auquel cas le procès est dit concomitant


(simultané) par rapport au repère choisi :

« Lorsque le professeur explique la notion, les étudiants prennent note.»

« Lorsque le professeur expliquait la notion, les étudiants prenaient note.»

Dans ces deux exemples, le repère dérivé est l’explication du professeur par
rapport auquel se situe la prise de notes.

Un rapport de décalage qui se décline de la façon suivante : un rapport


d’antériorité, indiquant que le procès est situé avant le point de repère, et un
rapport de postériorité, indiquant que le procès est situé après le repère
temporel.

« Tu iras à la bibliothèque nationale chercher une bibliographie pour ce


thème. »

« Il a choisi de se présenter aux élections présidentielles, à la grande surprise


de tout le monde. »

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Dans le premier exemple, le repère est le moment de l’énonciation, par rapport


auquel, le procès « aller à la bibliothèque nationale » est ultérieur (postérieur).
Et dans le second énoncé, le procès « choisir » est antérieur au moment de la
parole.

La voix :
On distingue traditionnellement, deux voix sont distinguées par les linguistes :
le passif est l’actif. La voix active se caractérise sur le plan syntaxique par la
concordance du sujet syntaxique avec le sujet réel. Tout verbe se met à l’actif
sans exception et quelle que soit sa construction grammaticale : « il va à la
bibliothèque » ; « il se dirige vers la salle polyvalente » ; « il a réussi son
examen avec brio ».

Pour ce qui de la voix passive, il y a lieu de remarquer que seuls des verbes
transitifs directs admettent cette tournure. Nous remarquerons au passage que
certains verbes comme « vouloir » n’admettent pas cette transformation. La
transformation passive repose sur l’interversion de l’ordre sujet et complément
d’objet direct de la phrase active: en effet, le régime direct monte en tête de
phrase alors que le sujet est repoussé en fin de phrase sous la forme d’un
complément d’agent. A côté de ce changement de place des arguments du
verbe, le verbe lui-même change de forme. Le noyau verbal de phrase active se
transforme en participe passé et se combine avec le verbe être conjugué au
temps du verbe de la phrase active :

Phrase active : « Les Etats-Unis d’Amérique ont envahi l’Irak en 2003 .»

Phrase passive : « L’Irak a été envahi par les Etats-Unis d’Amérique en 2003. »

Sur le plan énonciatif, la transformation passive opère une thématisation du


régime du verbe, qui occupe désormais la position initiale de l’énoncé (donc se
pose comme ce dont on parle), alors que le thème de la phrase active (le sujet
du verbe actif et sujet réel) propos sur le thème, ou mieux rhème.

Le passif n’est pas uniquement indiqué par la transformation passive. En effet,


des constructions pronominales peuvent avoir un sens passif :

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« Une dissertation se lit soigneusement. »

L’interprétation passive se fonde sur le fait que la phrase entretient avec la


phrase active « on lit soigneusement une dissertation » le même rapport que la
phrase passive « Une dissertation est lue soigneusement.»

L’aspect verbal :
L’aspect verbal est la catégorie rattachée à l’image interne du verbe, c’est-à-
dire non plus sous l’angle d’un déroulement externe où trois époques
temporelles s’opposent, mais plutôt sous l’angle de ce que la forme elle-même
peut indiquer par elle-même étant donné que tout procès implique un temps
interne, ou mieux un certain déroulement. De ce point de vue, le procès peut -
être présenté de façon globale ou alors être présenté en fonction des phases
successives de son déroulement interne. Pour le comprendre, observons les
deux exemples suivants :

« Il lut le livre » ; « Il lisait le livre ».

Certes, nous avons affaire au même procès : il s’agit de la lecture d’un livre.
Toutefois, ce procès n’est pas présenté de la même manière : dans « il lut », le
procès est présenté dans sa globalité, il est accompli, même si le sémantisme
initial du verbe implique une certaine durée. Au contraire, dans « il lisait », le
procès nous indique un processus en cours, donc inaccompli.

Dans l’étude de l’aspect verbal, on distingue l’aspect lexical et l’aspect


grammatical. L’aspect lexical est indiqué par la partie lexicale du verbe, alors
que l’aspect grammatical du verbe est marqué par la désinence du verbe et pas
certains compléments circonstanciels lorsque ceux-ci sont présents dans la
phrase.

1.4.1- les principales oppositions aspectuelles :

Pour l’étude de l’aspect lexical, on dispose de l’opposition perfectif vs


imperfectif. Cette opposition se manifeste donc à travers le sens du verbe.

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L’aspect perfectif nous renvoie au terme du procès. Autrement dit, le procès


n’a d’existence véritable que s’il est complètement achevé et parvenu à son
terme final. Ainsi, le procès « naître », par exemple, n’est-il réalisé qu’après la
venue au monde de quelqu’un. De même l’action de s’enrichir n’est-elle
réalisée qu’après que la personne n’est réellement devenue riche. A l’inverse,
l’aspect imperfectif présente le procès dans son déroulement : il est indéfini et
prolongeable, à moins d’être interrompue par un évènement externe. Nager,
par exemple, peut sur le plan linguistique se prolonger indéfiniment même si
une réalité externe peut y mettre fin (un orage, la fatigue).

Accompli vs inaccompli : L’aspect accompli présent el procès au –delà de son


terme comme étant achevé, alors que l’aspect inaccompli saisit le procès dans
son déroulement. (il a mangé/ il mange). Du reste, cette opposition est
systématique en français. Elle oppose les temps simples qui indiquent un
procès inaccompli (à l’exception du passé simple), tandis que les temps
composés expriment un procès complètement achevé.

Sécant vs non-sécant : cette opposition, qui est signalée par le temps du verbe,
s’articule avec l’opposition perfectif/imperfectif, marquée par le sens du
lexème verbal. L’aspect sécant saisit le procès sans limites, alors que l’aspect
non-sécant présente le procès comme étant enfermé dans des limites. Du
reste, cette opposition ne se distingue pas trop de la dichotomie
accompli/inaccompli. Elle est appliquée au couple imparfait/passé simple
(passé compsé)

Inchoatif/terminatif : cette opposition est exprimée particulièrement par des


périphrases verbales comme « se mettre à, commencer à » pour l’aspect
inchoatif et « finir de, cesser de, arrêter de, achever de » pour l’aspect
terminatif. Néanmoins, le sens du verbe peut intégrer l’aspect inchoatif
« s’endormir », « se familiariser », rougir etc.

Semelfactif/itératif : il s’agit d’opposer des procès qui ne se passent qu’une fois


à d’autres qui se répètent. L’aspect itératif est surtout indiqué par des
compléments circonstanciels tels souvent/parfois/rarement/ tous les jours…

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L’aspect progressif : le procès y est saisi dans sa progression. En français


moderne il n’est rendu que par la périphrase « être entrain de ». Dans un
emploi archaïque, le progressif était rendu par la construction « va+participe
présent ».

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