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car ils rendent les cigarettes plus agréables et augmentent une source de consommation augmentée et de rechute
la part de nicotine sous forme de base libre. lors d’arrêt.
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facilement et neuf sur dix que l’arrêt tabagique est plus fa- rité.13 Il existe également un gradient dose-réponse (plus
cile à respecter dans un environnement sans fumée. Parmi la consommation de tabac est importante, plus le risque
les personnes qui ont continué à fumer, deux tiers décla- augmente) et l’arrêt du tabac diminue ce risque.14 Dix pour
rent fumer moins qu’avant et près de la moitié sont relati- cent de l’incidence du diabète serait dus au tabagisme (ris-
vement prêtes à arrêter de fumer. que attribuable).
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rieure à une monothérapie.18 En moyenne, l’odds ratio pour doses plus faibles que les recommandations usuelles.24
l’arrêt du tabac d’une combinaison de substituts nicotini- Une faible proportion d’entre eux utilisent au contraire les
ques (versus monothérapie) est de 1,4, confirmant qu’il ne produits plus longtemps que prévu, surtout si ceux-ci sont
faut pas hésiter à combiner un substitut de courte durée en vente libre. Dans les pays où les gommes de nicotine
d’action, tel que gomme, inhalateur ou comprimé à sucer sont en vente libre, entre 5 et 46% des fumeurs continuent
ou à croquer, avec un patch de 16 ou 24 heures. à les utiliser au-delà des trois mois recommandés tradi-
tionnellement, dont une partie continuent à fumer, mais la
Poursuite du traitement au-delà de trois mois majorité des utilisateurs préviennent ainsi une reprise du
Les schémas de traitement pharmacologiques de la dés- tabagisme. Seul 1% environ développe une véritable dé-
accoutumance sont en principe limités à trois mois, mais il pendance au produit.25
existe plusieurs arguments pour remettre en question cette Par ailleurs, les taux sanguins de nicotine obtenus par
limite. En effet, le traitement a pour but non seulement d’ai- l’emploi des substituts n’atteignent pas les taux induits
der le fumeur à cesser de fumer en diminuant les symp- par la cigarette et la montée des taux est moins rapide (à
tômes de sevrage mais aussi de lui permettre d’éviter la l’exception peut-être des taux induits par l’emploi du spray
nasal).26 En outre, les effets physiologiques positifs asso-
vies subites (craving) peuvent en effet survenir longtemps
reprise du tabagisme à moyen voire à long terme. Les en-
ciés à l’usage des substituts nicotiniques sont beaucoup
après l’arrêt. Or, cette prévention à moyen et long termes plus faibles que ceux qui sont associés à la cigarette et leur
de la reprise du tabagisme est difficile. Aucune intervention potentiel addictogène est ainsi beaucoup moins marqué.19
de type comportemental n’a, par exemple, démontré son Enfin, même si certains fumeurs développent une dépen-
efficacité.19 Les fumeurs qui fument une seule cigarette dance aux produits de substitution, il n’existe aucune preu-
après une tentative d’arrêt recommencent très souvent à ve que celle-ci ait des conséquences néfastes pour la santé.
fumer dans les semaines qui suivent.8 Il est donc légitime On peut donc admettre que l’emploi des substituts nico-
d’envisager des schémas thérapeutiques qui mettent les tiniques ou des traitements pharmacologiques peut être
fumeurs à l’abri des rechutes. Plusieurs études ont récem- envisagé à long terme chez certains fumeurs très dépen-
ment montré que l’emploi prolongé des substituts à action dants. La tendance est de considérer ces fumeurs comme
rapide pouvait augmenter le taux d’abstinence à long terme. des personnes atteintes d’une forme de dépendance chro-
Dans une étude randomisée, 27,1% des fumeurs qui nique, qui nécessitent un traitement à long terme. Il est
avaient reçu un substitut à action rapide (en l’occurrence le par contre évident que la poursuite du tabagisme simulta-
spray nasal) pendant un an en plus d’un patch de nicotine nément à l’utilisation des substituts nicotiniques témoigne
pendant cinq mois étaient abstinents après un an, contre d’un échec de la tentative d’arrêt et doit inciter à repren-
10,9% de ceux qui avaient reçu un spray placebo en plus dre avec le fumeur la discussion sur les motifs et les condi-
du patch de nicotine.20 Après six ans, 16,2% des participants tions de l’arrêt.
du premier groupe étaient encore abstinents, contre 8,5%
des autres.
SÉCURITÉ DES SUBSTITUTS DE NICOTINE ET
Une étude observationnelle a montré que chez les pa-
tients libres d’utiliser des substituts nicotiniques selon leurs DU BUPROPION
besoins, et qui avaient reçu l’instruction de poursuivre le La sécurité des substituts de nicotine sur le plan cardio-
traitement au moins deux semaines après avoir ressenti vasculaire a récemment été confirmée par une étude ob-
pour la dernière fois une envie de fumer, 27% utilisaient servationnelle se basant sur un registre englobant 33 247
encore les substituts nicotiniques à six mois. Parmi eux, 65% fumeurs à qui un substitut de nicotine avait été prescrit. Il
étaient abstinents, contre 27% de ceux qui avaient cessé n’y a pas eu d’augmentation du risque d’infarctus du myo-
d’utiliser le traitement substitutif.21 carde, d’AVC ou de mort chez ces patients durant la pres-
Deux essais cliniques randomisés ont montré que l’admi- cription du substitut.27
nistration de bupropion prolongée était efficace. Le premier a Les récentes données de pharmacovigilance ont confirmé
montré qu’un traitement de six mois et un an permet d’aug- les données des essais randomisés au sujet de la sécurité
menter le taux d’abstinence ou de prolonger le délai avant la liée à la prescription de bupropion. Une étude observation-
reprise du tabagisme par rapport au groupe traité seulement nelle à large échelle sur plus de 3000 patients suivis pen-
pendant deux mois.22 Dans une autre étude, la poursuite du dant huit semaines a montré un risque de crise épileptique
bupropion combiné aux substituts nicotiniques chez des inférieur à un 1%.28
fumeurs qui avaient échoué au cours des deux premiers mois
de traitement a permis d’améliorer le taux d’abstinence à un
UN NOUVEAU MÉDICAMENT-CANDIDAT
an (10% contre 1% dans le groupe placebo).23
Aucune étude n’a montré une augmentation ou une mo- POUR AIDER LES FUMEURS : LA VARENICLINE
dification des effets secondaires en cas d’emploi prolongé. Le mécanisme d’action de la varenicline est original. Il
Par contre, vu le potentiel de dépendance induit par la ni- s’agit d’un produit dérivé d’une substance naturelle, la cy-
cotine du tabac, il est légitime de craindre que l’emploi des tisine, qui agit en tant qu’agoniste sélectif mais partiel des
substituts nicotiniques crée également une dépendance. récepteurs acétylcholinergiques de type alpha-4 bêta-2.29
Dans la pratique, le phénomène est rare, cela pour plusieurs La stimulation des récepteurs par la varenicline provoque,
raisons. D’une part, la tendance générale des fumeurs est comme la stimulation par la nicotine, une libération de do-
d’utiliser les substituts nicotiniques peu longtemps et à pamine et la cascade des réactions qui lui sont liées au
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niveau mésolimbique et préfrontal, mais la stimulation s’ac- bloquer les récepteurs du système naturel endocannabi-
compagne d’un blocage de l’effet ultérieur de la nicotine.30 noïde impliqué non seulement dans le contrôle de l’équi-
De ce fait les récepteurs occupés par la varenicline ne réa- libre énergétique, mais également dans le largage dopa-
gissent plus à la nicotine et l’apport de cette dernière ne minergique impliqué dans la dépendance au tabac. Les
provoque plus de libération de dopamine. Sur le plan pra- résultats préliminaires sont partiellement prometteurs dans
tique, il en résulte une atténuation des phénomènes de une étude avec une abstinence au terme des dix semaines
sevrage lors de l’arrêt du tabac (puisque la dopamine est de traitement de 36% dans le groupe 20 mg, versus 20%
libérée en quantité suffisante pour activer les autres cen- dans le groupe 5 mg et placebo.33 Par contre, les résultats
tres nerveux), mais une prévention des risques de reprise préliminaires d’une autre étude sont négatifs. Ces résul-
du tabagisme, puisque la nicotine administrée ou inhalée tats doivent donc être confirmés, peut-être avec d’autres
en cours de traitement reste sans effet. antagonistes CB1 et avec un suivi d’une année au moins.
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réponse cellulaire de type B.35 Plusieurs équipes sont ac- Implications pratiques
tuellement en train de développer un tel vaccin. Des ré-
sultats encourageants d’études de phase I et II ont été ré- > La fumée active et passive est associée à un nombre impor-
cemment publiés.36,37 Les études de phase III pourraient tant de maladies, et le risque existe pour une faible consom-
démarrer dans quelques années. mation déjà. Il est donc important que les médecins fassent
prendre conscience aux fumeurs de l’importance du problème
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