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LA POSTMODERNITE
Collection dirigée par François Cusset
et Rémy Toulouse
LES ORIGINES DE
LA POSTMODERNITE
traduit de l'anglais par Natacha Filippi
et Nicolas Vieillescazes
LES P R A I R I E S O R D I N A I R E S
COLLECTION • PENSER/CROISER •
Avant-propos
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tôt était désormais plus claire dans son esprit Dans son huitième
volume, publié en 1954, Toynbee qualifia l'époque qui avait débuté
avec la guerrefranco-prussienne« d'âge postmoderne ». Mais la
définition qu'il en donnait restait essentiellement négative. « Les
communautés occidentales devinrent "modernes", écrivait-il, dès
qu'elles purent produire une bourgeoisie à la fois assez importante
et assez compétente pour devenir l'élément prépondérant de la
société dans son ensemble5. » A l'inverse, à l'ère postmoderne, cette
classe moyenne n'était plus en position de domination. Toynbee se
montrait plus imprécis quant à ce qui allait lui succéder, mais il était
convaincu que cette époque était marquée par deux évolutions : l'ap-
parition d'un prolétariat industriel occidental, et la tentative menée
successivement par diverses élites intellectuelles, à la périphérie
du monde occidental, de maîtriser les secrets de la modernité pour
les retourner contre ce dernier. Les réflexions les plus élaborées de
Toynbee sur l'époque postmoderne se concentraient sur ce dernier
aspect, prenant comme exemples le Japon de l'ère Meiji, la Russie
bolchevique, la Turquie kémaliste et la jeune Chine maoïste6.
Si Toynbee n'admirait pas ces régimes politiques, il critiquait
avec virulence les illusions arrogantes de l'Occident impérial dans
ses dernières années. A lafindu XIXe siècle, écrivait-il, « une classe
moyenne occidentale, prospère et opulente, comme il n'en avait
jamais existé auparavant, supposait naturellement que la fin d'une
époque dans l'histoire d'une civilisation était synonyme de la fin
de l'Histoire elle-même - du moins en ce qui les concernait, eux
et leurs semblables. Ds imaginaient que, dans leur intérêt, une
Vie Moderne saine, sûre et satisfaisante s'était miraculeusement
maintenue sous la forme d'un présent intemporel7 ». En décalage
total avec l'époque, « au Royaume-Uni, en Allemagne et au Nord
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9. Charles Oison et Robert Creeley, The Complété Correspondence, vol. 7, Black Sparrow
Press, Santa Rosa, 1987, pp. 75,115, 241, lettres datées du 9/8/1951, 20/8/1951 et
3/10/1951. La dernière lettre est une longue démonstration, intitulée «The Law»,
selon laquelle l'âge moderne s'est achevé avec l'avènement de la terreur nucléaire.
« Assez récemment, une porte s'est fermée dans un claquement », écrit Oison. « La
biochimie est post-moderne. Et l'électronique est déjà une science de la communica-
tion - "l'humain" est déjà "l'image" de la machine à calculer. », p. 234.
10. Twentieth Century Authors. First Supplément, New York, 1995, pp. 741-742.
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11. Voir Tom Clark, Charles Oison. The Allegory of a Poet's Life, Norton, New York,
1991, pp. 84-93,107-112,138.
12. «Notes for the Proposition: Man is Prospective», boundary 2, vol. 2, n° 1-2,
automne 1973-hiver 1974, pp. 2-3.
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13. Robert Payne, Forever China, Dodd, Mead & co, New York, 1945 ; Journal de Chine,
Stock, Paris, 1950.
14. Sur la note manuscrite d'Oison opposant son poème à celui d'Eliot (fera Vaine, Le
Seuil, Paris, 1995), voir l'essai remarquable de George Butterwick, « Charles Oisons
"The Kingfishers" and the Pœtics of Change », American Poetry, vol. VI, n° 2, hiver
1989, pp. 56-57.
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Mao concluait :
Nous devons
nous lever
et agir P6 »
16. NdT : en français dans le texte. L'appel de Mao clôt son Rapport lors de la réunion
du Comité central du PCC du 25 au 28 décembre 1947 à Yangjiagou, dans le Shaanxi.
Voir « The Present Situation and Our Tasks », Selected Works, vol. 4, Foreign Languages
Press, Pékin, 1969, p. 173. Les citations du discours dans leur traduction française lui
ont été communiquées par Jean Riboud.
17. « LesMartins-Pêchéurs», in LesMartins-Pêcheurs..., op. cit., p. 74.
18. Ibid., p. 76.
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23. « Nous nous trouvons à la fin de ce qu'on appelle les Temps Modernes. De
même que l'Antiquité fut suivie de plusieurs siècles d'hégémonie orientale, que les
Occidentaux, avec leur esprit de clocher, appellent les Siècles de Ténèbres, de même
aujourd'hui, aux Temps Modernes succède une période postmodeme. », Charles
Wright Mills, L'Imagination sociologique. Maspero, Paris, 1967, p. 176.
24. Irving Howe, « Mass Society and Post-Modem Fiction », Partisan Review, été 1959,
pp. 420-436 ; réimprimé dans The Décliné of the New. Harcourt, New York, 1970,
pp. 190-207, avec une postface. L'article d'Howe, bien qu'il ne fasse aucune référence,
repose à l'évidence sur le travail de Mills, et plus particulièrement sur Les Cols blancs :
cf. sa description de « la société de masse », « à moitié protection sociale et à moitié
garnison », dans laquelle « les différents publics homogènes se désagrègent ».
25. Harry Levin, « What was Modemism ? », The Massachusetts Review, août 1960,
pp. 609-630 ; réimprimé dans Harry Levin, Refractions, Oxford University Press, New
York, 1966, pp. 271-295, avec une note péliminaire.
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26. Leslie Fiedler, «The New Mutants», Partisan Review, été 1965, pp. 505-525 ;
et dans Collected Essays, vol. 2, Harcourt, New York, 1971, pp. 379-400. Comme on
pouvait s'y attendre, Howe a critiqué ce texte dans une enquête acerbe, « The New
York Intellectuals », Commentary, octobre 1968, p. 49, réimprimé dans The Décliné of
the New. op. cit.. pp. 260-261.
27. « Cross the Border, Close the Gap », Playboy, décembre 1969, pp. 151,230,252-
258 ; et dans Collected Essays, vol. 2, op. cit., pp. 461 -485.
28. The Active Society, Free Press, New York, 1968, pp. vii, 528.
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29. L'émergence d'Oison et des poètes du Black Mountain College signa la fin de la
tradition du modernisme métaphysique, qui n'avait rien d'une tradition « moderniste »
mais qui constituait une anomalie spécifique à la poésie américaine et anglaise. Celle-
ci résultait d'une collision entre d'une part des penchants fortement anti-modernistes
et provinciaux et d'autre part le modernisme hybride de Pound et celui, plus authenti-
que, de Gertrude Stein et de William Carlos Williams : boundary 2, vol. 1, n° 1, p. 120.
Antin considérait le remarquable poème d'Oison « As the Dead Prey Upon Us » comme
l'emblème de cette nouvelle poétique.
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31. En 1930, Ismaël Sidky, soutenu par le Palais et la Couronne britannique, fit
dissoudre le Parlement égyptien. Des émeutes éclatèrent aux quatre coins du pays
et furent réprimées avec violence. Le nombre de victimes fut particulièrement élevé
à El Mansura. « À la fin de la journée, au milieu de la rue, on comptait six morts, dont
quatre jeunes étudiants. On ne compta pas les blessés... Je me sentais écartelé entre
mon père et ses ennemis. Trois ans plus tard, Mustapha el Nahas devenait Premier
ministre d'Égypte. Mon père dut démissionner. » Ihab Hassan, Out of Egypt. Scenes
and Arguments of an Autobiography, Southern Illinois University Press, Carbondale,
1986, pp. 46-48 : un récit évocateur à plusieurs égards. Pour une description quelque
peu angoissée du massacre par un témoin de onze ans, qui se trouvait sur un balcon au
moment du drame, se reporter au récit très différent de la féministe égyptienne Latifa
Zayyat: The Search, Quartet, Londres, 1996, pp. 41-43. Le contexte dans lequel se
déroulèrent ces événements est présenté dans Jacques Berque, L'Égypte. Impérialisme
et Révolution. Gallimard, Paris, 1967, pp. 452-460.
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38. NdT : Les mots en italique suivis d'une astérisque étaient en français dans le texte
original.
39. Ibid.. p. 229.
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56. « J'ai inventé des histoires, j'ai fait référence à de nombreux livres que je n'avais
pas lus, apparemment cela a impressionné les gens, c'est un peu comme une paro-
die. .. C'est tout simplement le plus mauvais de mes bouquins, ils sont presque tous
mauvais, mais celui-là c'est vraiment le pire », Lotta Poetica, 3e série, vol. 1, n° 1,
janvier 1987, p. 82 : un entretien intéressant sur le plan biographique.
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67. « Billet pour un nouveau décor » (1985), in Le Postmodeme expliqué aux enfants,
op. cit., pp. 131-134.
68. « Une fable postmodeme », in Moralités postmodemes, op. cit., pp. 86-87.
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Francfort-Munich
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Bien qu'il ait été largement perçu, du fait de la proximité des dates
de publication, comme une réponse au livre de Lyotard, il fut vrai-
semblablement écrit en toute ignorance de ce dernier. Habermas
réagissait en fait à la Biennale de Venise de 1980, vitrine de la
version du postmodernisme défendue par Jencks73 - soit exacte-
ment ce dont Lyotard n'avait aucune connaissance quand il écrivit
son propre texte. Un ironique chassé-croisé * se trouvait donc à l'ori-
gine de ces échanges intellectuels.
Habermas commençait par reconnaître que l'esprit de la
modernité esthétique, articulé sur une nouvelle perception du
temps comme présent chargé d'un futur héroïque, né à l'époque de
Baudelaire et ayant atteint son apogée avec Dada, s'était de toute
évidence estompé ; les avant-gardes avaient vieilli. L'idée de post-
modernité tirait sa force de ce changement indéniable. Toutefois,
des théoriciens néo-conservateurs comme Daniel Bell en avaient
tiré une conclusion perverse. Ils prétendaient que la logique anti-
nomiste de la culture moderniste avaitfinipar imprégner le tissu de
la société capitaliste. Au moment même où elle avait cessé d'être la
source d'un art créatif, cette culture avait affaibli lafibremorale de
notre société et déstabilisé sa discipline de travail, en propageant
un culte de la subjectivité absolue. En conséquence, seul un retour
à la foi religieuse, résurgence du sacré dans un monde profane,
pourrait empêcher l'effondrement hédoniste d'un ordre social
autrefois respectable.
73. Jûrgen Habermas, « Die Moderne - ein unvollendetes Projekt », Kleine politische
Schriften (l-V), Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1981, p. 444. Le discours en allemand
était bien plus long et incisif que sa version anglaise, donnée par Habermas lors d'une
« James lecture » au New York Institute l'année suivante et publiée dans New German
Critique, hiver 1981, pp. 3-15. Dès les premières lignes, il pose directement la ques-
tion : « La modernité est-elle aussi obsolète que le prétendent les post-modemes ? Ou,
à l'inverse, la post-modernité proclamée par tant de voix n'est-elle pas pour sa part pur
battage ? », in « La modernité : un projet inachevé », Critique, octobre 1981, n° 413,
pp. 950-967,951.
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nier que ce terme désignât autre chose qu'un pli interne au moder-
nisme. Habermas, plus enclin à analyser les arts de son époque,
reconnut l'existence d'un passage du moderne au postmoderne,
sans guère se montrer capable de l'expliquer. Aucun des deux ne
s'aventura à examiner les formes postmodernes d'une façon aussi
poussée que l'avaientfaitHassan ou Jencks. D'où, aufinal,un éclate-
ment discursif : d'une part, une vue d'ensemble philosophique sans
contenu esthétique significatif, de l'autre, une vision esthétique sans
horizon théorique cohérent Une cristallisation thématique s'était
certes produite - le postmoderne était désormais, selon Habermas,
« à l'ordre du jour ». Mais il était dénué de cohésion intellectuelle.
Sur un autre plan cependant, ce champ présentait une unité :
il était tdéologiquement cohérent Telle qu'elle s'imposa dans cette
conjoncture, l'idée du postmoderne était sans conteste l'apanage
de la droite. Hassan, célébrant le jeu et l'indétermination comme
symboles du postmoderne, ne cachait pas son aversion pour la
sensibilité qui constituait leur antithèse : le joug de fer de la gauche.
Jencks se réjouissait du déclin du moderne, synonyme de liberté de
choix pour le consommateur, arrachement à la planification dans un
monde où le commerce des peintres serait aussi libre et mondialisé
que celui des banquiers. Aux yeux de Lyotard, les paramètres de
cette nouvelle condition étaient liés au discrédit jeté sur le dernier
grand récit le socialisme - ultime version d'une émancipation
désormais privée de toute signification. Habermas, qui restait sur
ses positions de gauche et refusait d'adhérer au postmoderne, n'en
abandonna pas moins le concept à la droite, le concevant dès lors
comme l'incarnation du néo-conservatisme. Tous souscrivaient
aux principes de ce que Lyotard - jadis le plus radical d'entre
eux - appelait la démocratie libérale, comme horizon indépassable
de cette ère. Le capitalisme pour seule possibilité. Le postmoderne
représentait la condamnation des illusions alternatives.
Chapitre 3 : Capture
Telle était la situation lorsque Fredric Jameson donna sa première
conférence sur le postmodernisme à l'automne 1982. Deux de ses
ouvrages l'avaient déjà fait reconnaître comme le plus important
critique littéraire marxiste (même si, à cette époque, ces termes
étaient déjà trop réducteurs). Au travers d'études consacrées à
Lukàcs, Bloch, Adorno, Benjamin et Sartre, Marxism and Form
(1971) proposait une reconstruction originale du canon intellectuel
du marxisme occidental dans sa quasi intégralité - d'Histoire et
conscience de classe à la Critique de la raison dialectique - du point
de vue d'une esthétique contemporaine fidèle à la diversité de cet
héritage. Quant h The Prison-House ofLanguage (1972), il offrait une
description complémentaire du modèle linguistique développé par
Saussure et de son influence sur le formalisme russe et le structura-
lisme français. Ce livre, s'achevant par l'évocation des sémiotiques
de Barthes et Greimas, était un véritable tour d'horizon, admiratif
maisrigoureux,des mérites et limites d'une tradition synchronique
déterminée à résister aux tentations de la temporalité.
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6. Fredric Jameson, Marxism and Form, Princeton University Press, Princeton, 1971,
pp. xvii-xviii.
7. Jameson fait état des sources dont il s'est inspiré dans « Marxism and
Postmodernism », in Fredric Jameson, The Cultural Tum. Selected Writings on the
Postmodem, 1983-1998, Verso, Londres, 1998, pp. 34-35. Baudrillard constitue un cas
particulier pour toute généalogie du postmodeme. Car bien que ses idées aient sans
nul doute contribué à sa cristallisation, et que son style puisse être perçu comme para-
digmatique dans sa forme, lui-même n'a jamais théorisé le postmodemisme. Pire, dans
le seul texte où il en traite un peu longuement, il rejette catégoriquement cette notion :
voir « The Anorexie Ruins », in Dietmar Kamper et Christoph Wulf (dir.), Looking Back
at the End of the World, SemiotexKe). New York, 1989, pp. 41 -42. C'est un intellectuel
dont le caractère, pour le meilleur ou pour le pire, ne peut approuver aucune notion
collectivement entérinée.
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8. Fredric Jameson, The Political Unconscious, Comell University Press, Ithaca, 1981,
pp. 19-20.
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13. Michael Fried, « Art and Objecthood juin 1967 ; réimprimé dans Gregory
Battcok (dir.), Minimal Art, University of Califomia Press, Berkeley et Los Angeles, 1995,
p. 141. Article traduit en français dans Michael Fried, Contre la théâtralité, Gallimard,
2007, sous le titre « Art et objectité ».
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son investigation. Selon lui, cet art s'était développé en deux cycles
distincts. Lors d'un premier cycle, lefilmmuet était passé du réalisme
au modernisme, bien que ce fut - du fait de l'apparition tardive de
sa possibilité technique - en décalage avec la transformation d'un
capitalisme national en un capitalisme impérialiste, qui avait par
ailleurs présidé à cette transition. Mais avant qu'une phase postmo-
derne n'ait pu être initiée, l'avènement du parlant vint interrompre
ce développement Un deuxième cycle répéta alors les mêmes
étapes, à un niveau technologique différent : Hollywood inventa un
réalisme de l'écran à l'aide d'une panoplie nouvelle de genres narra-
tifs et de conventions visuelles, alors que le cinéma d'art et d'essai
européen des années d'après-guerre engendra une nouvelle vague
de haut modernisme. Si le cinéma postmoderne qui était depuis lors
apparu était marqué par les compulsions de la nostalgie, le destin de
l'image animée ne leur était pas entièrement lié. La vidéo était sans
doute le médium postmoderne par excellence - que ce soit dans les
formes dominantes de la télévision commerciale, où divertissement
et publicité avaient quasiment fusionné, ou bien dans les pratiques
oppositionnelles de la vidéo underground. À l'avenir, la critique
devrait inévitablement se pencher sur ces genres.
Le monde du graphisme et de la publicité se mêlait toujours
davantage aux beaux-arts, qui servaient soit d'inspiration stylis-
tique, soit de matière première. Dans le domaine pictural, l'absence
de profondeur propre au postmoderne trouvait son expression la
plus parfaite dans les surfaces lisses de l'œuvre de Warhol, images
hypnotiquement vides, qui tenaient du magazine de mode, de l'éta-
gère de supermarché, de l'écran de télévision. C'est là que Jameson
proposa la plus audacieuse des juxtapositions du haut modernisme
et du postmodernisme, en comparant les souliers de paysan de Van
Gogh, emblèmes du travail de la terre rédimé par une explosion
de couleurs, avec une série d'escarpins de Warhol, simulacres
vitreux sans ton ni fond, suspendus dans un vide glacé. Cela faisait
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25. Peter Wollen, Raiding the IceBox. Reflections on Twentieth Century Culture, Verso,
Londres, 1993, p. 124.
26. Ibid.
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30. NdT : Référence plus évidente dans la traduction anglaise, qui porte le titre La te
Capitalisme capitalisme tardif).
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2003, p. 48) - lui-même d'une grande beauté - sur la fenêtre à double battant ou
les délicates clenches de porte, et sur les claquements de portes de voiture ou de
frigidaire, avec la rêverie de Jameson sur les lévitations d'un garage californien dans
Signatures of the Visible{Routledge, New York, 1991, pp. 108-108).
35. Voir, notamment, Michael Sprinker, « The Place of Theory », New Left Review,
n° 187, mai-juin 1991, pp. 139-142.
36. Fredric Jameson, The Political Unconscious, op. cit., p. 102.
Chapitre 4 : Répercussions
Avec sa capture du postmoderne, Jameson a posé les bases des
débats à venir. D n'est guère surprenant qu'après lui, les interven-
tions les plus marquantes dans ce champ théorique soient égale-
ment venues du marxisme. On peut voir les trois contributions
principales comme autant de tentatives d'enrichir ou de corriger la
description proposée par Jameson : Against Postmodemism (1989),
d'Alex Callinicos, offre une analyse plus précise du contexte poli-
tique du postmoderne ; The Condition of Postmodernity (1990),
de David Harvey, propose une théorie bien plus complète de ses
présupposés économiques ; et The Illusions of Postmodemism
(1996), de Terry Eagleton, examine pour sa part les effets de sa
diffusion idéologique. Tous ces travaux posent des problèmes de
démarcation spécifiques. Comment périodiser le postmoderne ? A
quelle configuration intellectuelle correspond-il ? Quelle réponse
lui apporter ?
Périodisation
1. Voir Mike Davis, « Urban Renaissance and the Spirit of Postmodemism », NewLeft
Review, n° 151, mai-juin 1985, pp. 106-113.
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4. « Modemity and Révolution », New Left Review, n° 144, mars-avril 1984 ; réédité,
accompagné d'un post-scriptum (1985), dans Perry Anderson, A Zone of Engagement,
Verso, Londres, 1992, pp. 25-55.
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9. Fredric Jameson, Signatures of the Visible, op. cit., p. 61 ; voir également Le post-
modernisme. .., pp. 81-82.
10. L'expression est de Robert Hughes : Nothing if Not Critical, Penguin Books, New
York, 1990, p. 14.
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Selon lui, ces deux discours avaient toujours été analysés séparé-
ment, puisque les historiens de l'art - à de rares exceptions près -
n'avaient jamais eu grand chose à dire sur l'art de leur époque,
tandis que les avant-gardes avaient systématiquement eu tendance
à rejeter en bloc* l'art du passé. Tous deux étaient cependant des
mystifications historiques. L'art ne possédait ni essence unitaire ni
logique qui se déploierait linéairement ; il revêtait les formes les
plus diverses, et remplissait des fonctions radicalement différentes
selon les sociétés et les époques de l'histoire humaine.
En Occident, la prédominance de la peinture sur chevalet ne
remontait qu'à la Renaissance, et avait désormais pris fin. Face à
la désintégration de ses genres traditionnels, il était légitime de se
demander si l'art occidental n'avait pas épuisé ses possibilités, de
même qu'en Extrême-Orient on estimait que les formes artistiques
classiques avaientfaitleur temps. En tout état de cause, il semblait
désormais impossible d'établir une « histoire de l'art » cohérente
- ou plus précisément, une histoire de ses variantes occidentales,
puisqu'il n'avait jamais été question d'une histoire universelle
- mais seulement de mener des recherches séparées, consacrées à
des épisodes particuliers appartenant au passé. Il apparaissait aussi
clairement que l'« œuvre d'art » ne possédait pas de nature perma-
nente, en tant que phénomène singulier, et ne pouvait recevoir une
interprétation universellement valide. Belting proposa finalement
une illustration volumineuse de sa thèse dans Image et Culte (1990),
où il étudiait les représentations de la piété de l'Antiquité tardive à
lafindu Moyen Âge, retraçant « l'histoire de l'image avant l'avène-
ment de l'art ».
Quand il entreprit de réviser sa théorie au milieu des années
1990, Belting n'avait plus aucun doute sur le fait que l'histoire
de l'art, telle qu'elle avait été conçue précédemment, était désor-
mais finie. Il se tourna alors vers la destinée de l'art lui-même.
Auparavant, l'art était perçu comme une image de la réalité, à
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20. Das Ende der Kunstgeschichte. Eine Revision nach zehn Jahre, op. cit., p. 12. J'ai
analysé les origines intellectuelles de l'idée de Posthistoiredans « The End of History »,
A Zone of Engagement, op. cit., pp. 279-375.
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23. Voir François Alphonse Aulard, La Société des Jacobins. Recueil de documents,
vol. V, Cerf, Paris, 1895, pp. 601-604. Aucun historien ne remet en cause le fait que
Danton et Hébert aient également fait partie de la Révolution.
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25. Pour une analyse de cette dualité, voir en particulier Raymond Williams, The
Politics ofModemism, Verso, Londres, 1989, pp. 55-57 sqq.
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29. Le Retour du réel. op. cit., pp. 249-251. On pourrait avancer que les remarques
de Foster reflètent la déception générale des membres de la revue October, dans
laquelle elles furent d'abord publiées, et dont il reste à analyser précisément le
rôle clé dans la proposition de versions radicales des possibilités postmodemes au
sein des arts visuels, à la suite des essais pionniers de Rosalind Krauss, Douglas
Crimp et Craig Owens de 1979-1980. Le volume collectif édité par Foster en 1983,
The Anti-Aesthetic, The New Press, New York, qui inclut le discours de Jameson
au Whitney, est représentatif de ce tournant. Sur le changement de ton à la fin
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des années 1980, se reporter par exemple au virulent article de Patricia Mainardi :
« Postmodern History at the Musée d'Orsay », October, n° 41, été 1987, pp. 31-52.
Cette trajectoire se trouve déjà chez Hassan ou Lyotard. Les points de vue « citra »
ne se heurtent pas aux mêmes difficultés - même s'il serait préférable qu'ils y soient
parfois confrontés. Pour un exemple amusant de suivisme* imperturbable, applau-
dissant à ce qui avait initialement été décrié, voir la fable complaisante de Robert
Venturi et Denise Scott Brown sur la manière dont le « hangar décoré » s'est fait
supplanter par le « canard » dans leur ville du désert : « Las Vegas after its Classic
Age », in Iconographyand Electronics upon a Generic Architecture-A view from the
Draft in Room, MIT Press, Cambridge (Mass.), 1996.
30. « Thatcher s Artists », London Review ofBooks, 30 octobre 1997, p. 9.
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Inflexions
La théorie jamesonienne du postmoderne indique-t-elle un semblable
déplacement d'accent ? On trouve des tonalités similaires dans son
étude sur Adorno, que l'on peut lire non seulement à la lumière de
son titre [Late Marxism], mais également comme une manière de
renouer, ainsi que le suggère la remarque de Wollen, avec l'héritage
dialectique du modernisme tardif. Jameson le dit explicitement : « Le
modernisme d'Adorno exclut toute possibilité d'assimilation avec le
jeu aléatoire et libre de la textualité postmoderne, ce qui revient à
dire qu'une certaine notion de vérité est encore présente dans ces
questions verbales ou formelles » ; et Jameson de persévérer dans le
choix de cet exemple jusque dans ses aspects les plus provocateurs.
Malgré ses faiblesses, l'examen impitoyable de Hollywood contenu
dans La Dialectique de la Raison, nous rappelle qu'« aujourd'hui peut-
être, à un moment où le triomphe des théories utopiques de la culture
de masse semble quasiment hégémonique, nous avons besoin du
correctif que peut apporter une nouvelle théorie de la manipulation
et de la forme proprement postmoderne de la marchandisation31 ».
Dans les circonstances actuelles, les limitations idiosyncrasiques
d'autrefois sont devenues des antidotes essentiels. « Adorno était un
allié pour le moins douteux à l'époque où il existait encore de puis-
sants courants d'opposition politique, dont son quiétisme capricieux
et acariâtre pouvait détourner le lecteur engagé. Maintenant que ces
courants sont (pour l'instant) assoupis, sa bile est un joyeux contre-
poison et un solvant corrosif pour la surface de "ce qui est"32. » Voici
donc l'expression politique de la même exigence.
Le livre de Jameson sur Adorno est quasiment contemporain du
Postmodernisme, ou la logique culturelle du capitalisme tardif. Son
31. Fredric Jameson, Late Marxism. Adomo, or, the Persistence ofthe Dialectic, Verso,
Londres, 1990, pp. 11,143.
32. Ibid., p. 249.
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43. Gramsci reprit une grande partie de son argumentation de Croce, mais l'orienta
plus nettement en faveur de la Réforme. Pour ses réflexions les plus importantes, voir
Quademidel Carcere, Einaudi, Turin, 1977, vol. Il, pp. 1129-1130,1293-1294; vol. III,
pp. 1858-1862.
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dien. Sur le plan intellectuel, elle n'a guère d'intérêt : mélange facile
de notions, qui débouche sur un conventionnalisme déconcertant
Néanmoins, puisque la circulation des idées dans le corps social n'est
généralement pas liée à leur cohérence, mais à leur conformité à des
intérêts matériels, cette idéologie continue d'exercer une influence
considérable - loin de se cantonner au monde universitaire, elle
a envahi l'ensemble de la culture populaire. Terry Eagleton lui a
consacré une analyse brillante dans The Illusions of Postmodemism.
Distinguant le postmoderne comme développement artistique du
postmoderne en tant que système d'idées reçues*, il précise d'em-
blée qu'il ne traitera que du second. D examine alors successive-
ment tous les tropes habituels de la rhétorique anti-essentialiste et
anti-fondationnaliste - le rejet de toute notion de nature humaine ;
la conception de l'histoire en tant que processus aléatoire ; la mise
en équivalence de la classe avec la race et le genre ; la renonciation
à la totalité ou à l'identité ; les spéculations sur l'indétermination du
sujet - et méticuleusement, il les démonte un par un. D existe peu
de dissections aussi efficaces et englobantes de ce qu'on pourrait
appeler, en adaptant ironiquement Gramsci à Johnson, le non-sens
commun de l'époque.
Le but d'Eagleton n'est cependant pas d'établir un simple sotti-
sier*. Il cherche également à situer historiquement l'idéologie du
postmodernisme. Selon lui, le capitalisme avancé nécessite deux
systèmes de justification contradictoires : une métaphysique de
vérités impersonnelles durables - le discours de la souveraineté et
du droit du contrat et de l'obligation - dans le domaine politique,
et dans le domaine économique, une casuistique des préférences
individuelles pour les modes perpétuellement changeantes et les
gratifications de la consommation. Le postmodernisme donne à ce
dualisme une expression paradoxale, puisque, si d'un côté la révot
cation du sujet centré au profit du fourmillement erratique du désir
est en parfait accord avec l'hédonisme amoral du marché, d'un autre
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46. Comparer avec The Illusions of Postmodernism, op. cit., pp. 19,134.
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Portée théorique
Les avant-gardes classiques restèrent occidentales, même si les
courants hétérodoxes du modernisme, dont elles constituaient
une tendance, puisèrent à maintes reprises leur inspiration dans
le monde oriental, africain ou amérindien. La portée théorique de
l'œuvre de Jameson dépasse ce cadre occidental. On peut néan-
moins se demander si, cefaisant,il ne conçoit pas un univers exces-
sivement homogène, façonné sur le modèle nord-américain. « Le
modernisme, écrit Wollen, n'est pas suivi d'un postmodernisme
occidental totalisant, mais d'une esthétique hybride où les nouvelles
formes de communication et d'exposition seront constamment
confrontées à de nouvelles formes vernaculaires d'invention et
d'expression », dépassant « le discours eurocentrique étouffant »
du modernisme tardif comme du postmodernisme47. Ce genre
d'objection revêt une forme plus doctrinale dans le corpus de « la
théorie postcoloniale ». Cette école critique s'est développée à
partir du milieu des années 1980, notamment en réaction directe à
l'influence des idées postmodernistes dans les pays métropolitains,
et plus particulièrement contre la manière dont Jameson a struc-
turé ce champ théorique.
On reproche à ce dernier d'ignorer ou d'exclure les pratiques
issues de la périphérie, des pratiques qui non seulement ne peuvent
s'inscrire dans les catégories postmodernes, mais qui les rejettent
activement Pour ces critiques, la culture postcoloniale est par
nature plus oppositionnelle, et bien plus politique, que le postmo-
dernisme du Premier Monde. Défiant les prétentions démesurées
de la métropole, elle n'hésite pas en règle générale à mobiliser ses
propres formes radicales de représentation ou de réalisme, pros-
crites par les conventions postmodernes. Les avocats des études
postcoloniales « veulent une fois pour toutes montrer que la nature
47. Raiding the Icebox, op. cit.. pp. 205,209.
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à ces facteurs et, depuis lors, il n'a cessé d'insister sur les origines
spécifiquement américaines de ce phénomène. D semblait donc
légitime de penser que là où les niveaux de consommation étaient
bien plus bas et le développement industriel bien moins avancé
prédominait une configuration plus proche du modernisme - telle
qu'elle existait à une autre époque en Occident C'était du moins
une hypothèse qui me paraissait séduisante53. Dans ces conditions,
ne devait-on pas s'attendre à trouver un dualisme marqué entre
des formes culturelles hautes et basses, comparable à la distinction
existant en Europe entre les avant-gardes et la culture de masse,
avec peut-être un écart plus grand ? Le cinéma indien semblerait
en être l'exemple type : le contraste entre les films de Satyajit Ray
et l'avalanche de comédies musicales en provenance des studios
de Bombay paraît tout aussi marqué qu'il l'est dans les pays dits
développés. Toutefois, cet exemple relève d'un marché national
qui, dans les années 1960, était extrêmement protégé. De nos jours,
grâce aux systèmes de communication mondiaux, la pénétration
culturelle du Premier Monde des Second et Tiers Mondes est
incomparablement plus forte. Et du même coup, l'influence des
formes postmodernes devient inévitable - dans l'architecture de
villes comme Shanghai ou Kuala Lumpur, dans les expositions de
Caracas ou de Pékin, dans les romans et les films de Moscou à
Buenos Aires.
Mais influence ne signifie pas nécessairement domination. La
présence importante de groupes d'artistes ou de bâtiments qui
se réfèrent clairement au postmoderne n'atteste pas d'une hégé-
monie locale. Selon les termes employés par Jameson, eux-mêmes
repris de Raymond Williams, le postmoderne pourrait bien n'être
qu'« émergent » - et le moderne « résiduel ». Telle est en tout cas,
la position d'un critique aussi compétent que Jonathan Arac, qui
s'est intéressé à ces questions là où elles sont probablement le plus
53. « Modemity and Révolution », A Zone of Engagement, op. cit., pp. 40,54.
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55. Julian Stallabrass, Gargantua. Manufacturer! Mass Culture, Verso, Londres. 1996,
pp. 6-7,10-11,75-77,214,230-231.
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Politique
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63. The Cultural Turn. op. cit., pp. 136-144 sqq., 184-185 sqq.
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Avant-propos s
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Chapitre 1 : Prodromes
Lima - Madrid - Londres 9
Shaanxi - Angkor - Yucatân 13
New York - Harvard - Chicago 20
Chapitre 2 : Cristallisation 25
Athènes - Le Caire - Las Vegas 27
Montréal - Paris 38
Francfort-Munich 54
Chapitre 3 : Capture 67
Sources 69
Cinq déplacements 78
Aboutissements 93