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Lévi Israël. Les Dix-huit Bénédictions et les Psaumes de Salomon. In: Revue des études juives, tome 32, n°64, avril-juin
1896. pp. 161-178;
doi : https://doi.org/10.3406/rjuiv.1896.4107;
https://www.persee.fr/doc/rjuiv_0484-8616_1896_num_32_64_4107;
Dieu est appelée sur les justes, les scribes, les prosélytes, et non sur
les prêtres, est purement pharisienne ou consacrée à d'anciens
partis révérés par les Pharisiens *. Enfin, la 11e, qui demande le
retour de bons juges, semblables à ceux d'autrefois, pourrait
être une critique des juges sadducéens. Seulement, allant plus
loin, Isidore Loeb voulait attribuer notre Schemonè-Esré à ces
« pauvres » dont le parti ne nous est attesté par aucun texte his¬
torique.
La lumière qui, pour nous, se dégage de la bénédiction finale,
va éclairer bien d'autres paragraphes.
La 5e est ainsi conçue : « Ramène-nous, ô notre Père, à ta Loi,
et approche-nous, ô notre Roi, de ton culte, et fais-nous revenir
devant toi par une pénitence complète I Sois loué, Eternel, qui
agrées la pénitence » .
Isidore Loeb 2 croit qu'ici culte signifie culte des sacrifices, nous
ne le pensons pas 3 ; mais, si c'était vrai, l'observation que nous
allons présenter n'en aurait que plus de poids : n'est-il pas remar¬
quable que ces mots « approche-nous de ton culte » soient suivis
immédiatement de la phrase : « et fais-nous revenir à tòi par une
pénitence? » Cette addition, qui est la partie essentielle de la
prière, témoin la finale, signifierait : « l'essentiel n'est pas le sa¬
crifice, mais la pénitence ». Pourquoi ces Israélites, priant loin du
sanctuaire et sachant que chaque jour sont offerts des sacrifices
pour tout Israël, ne demandent-ils pas que ces offrandes soient
agréées comme une expiation? Un pareil silence ne peut s'expli¬
quer que parle parti-pris de ne pas tenir compte de l'existence du
temple ou d'en réduire l'importance.
Le paragraphe suivant confirme cette impression, car là encore
les sacrifices sont passés sous silence : le fidèle, plein de la pensée
de son péché, implore son pardon en invoquant seulement la mi¬
séricorde divine.
Cette prière a comme son doublet dans la dernière rédac¬
5e
tion de la 17e. Là il est question des sacrifices, mais avec un sem¬
blable correctif : lima brapn ünVam biniïr « et tu accueilleras
1 Dans l'Ecclésiastique , écrit avant la lutte des Pharisiens et des Sadducéens, les
prêtres sont encore qualifiés de « saints » (ch. xlv).
* Ret me, t. XIX, p. 17.
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II
3 Ibid. 11 faut lire toute cette page, en la comparant au texte de Josèphe, pour
prendre sur le l'ait un des procédés de composition historique de l'illustre orien¬
taliste.
LES DIX-HUIT BÉNÉDICTIONS ET LES PSAUMES DE SALOMON 169
ó ,
[ (?)] [ (*?]] .
1 Tout le Psaume iv, qui commence par ces mots : Pourquoi siégez-vous dans le
«
grand Conseil , mondains, puisque votre cœur est loin du Seigneur... ? est dirigé
>
contre les Sadducéens, « ces mondains, ces tP23í"J> 1ui repoussent la crainte de
Dieu, mais se font les serviteurs d'un homme et prennent pour Dieu un houime».
C'est aussi l'opinion de Wellhausen, Die Pharisäer m. die Sadducäer, p. 145 et suiv.
2 M. Wellhausen rattache aussi le chap, xn au iv· (p. 156).
LES DIX-HUIT BÉNÉDICTIONS ET LES PSAUMES DE SALOMON 171
Ils l'ont arraché (?) avec farce, ils n'ont pas glorifié ton nom digne
d'honneur : dans leur orgueil ils ont mis un diadème sur leur tète
comme symbole de leur puissance. Tis ont vidé le trône de David
dans leur folie de changement. Et toi, tu les renverseras, Seigneur,
et tu ôteras leur race de dessus la terre (17, 5-8).
, .
, 0
,. , , ,
.
. ' .
Ils viennent du Nord, pleins de la joie de leur Dieu ; des îles loin¬
taines Dieu les a rassemblés (1 , 3). 1
' - ( ,
ò .
Heureux ceux qui naissent dans ces jours pour voir le bonheur
d'Israël dans la réunion des tribus que Dieu accomplira (17, 44) !
, '
, ó 1 .
1 L' Ecclésiastique, plus d'un siècle avant, demande aussi la réunion de toutes les
' tribus de Jacob (x XXIII, 13-16).
LES DIX-HUIT BÉNÉDICTIONS ET LES PSAUMES DE SALOMON 173
Il les conduira tous dans la sainteté ; il n'y aura point parmi eux
l'orgueil d'exercer la domination (17, 41).
- .
1 M. Joseph Derenbourg, Revue , XIV, 26, supprime cette proposition pour re¬
trouver partout cette trichotomie qui s'observe dans les 3·, 4% 5·, 6e et 7e, 10" et 14·
bénédictions. La coupe et la division de ces formules sont, en effet, curieuses à noter,
mais peuvent-elles être érigées en lois? La trichotomie était-elle un principe im¬
muable, suivi lors de la rédaction du premier fond et lors de l'addition des groupes
nouveaux? Nous ne le pensons pas. D'abord, il y a tel de ces paragraphes et des plus
anciens comme le 1er, le 17" et le dernier qui ne peuvent certainement pas être ré¬
duits à ces trois propositions. En outre, et nous appelons l'attention sur cette obser¬
vation, il nous semble que le Schemonè-Esré est composé de groupes de morceaux
constitués d'une manière semblable. Ainsi, les n°3 1 et 2 se signalent par une finale
commençant par "jbto :
pm yüj-iTr, im btt
rpftitWT -» ma»
Les n0> 5 et 6 par les mots et 13Sb72 :
,
. .
' ,
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" " ' ,,
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Par contre, dans ces Psaumes, il est plusieurs fois question des
synagogues. Ce mot peut se rendre, dans certains passages, par
communauté hïïp, mais, en d'autres, il désigne sûrement la réunion
des fidèles :
' .
Ceux qui aiment les synagogues des saints ont fui loin d'eux :
' .
1 La liaison de ces idées et même les termes sont empruntés à Isaïe, i, 26-28.
LES DIX-HUIT BÉNÉDICTIONS ET LES PSAUMES DE SALOMON 17b
Et les saints de Dieu seront comme des agneaux dans leur inno¬
cence, au milieu d'eux (8, 23).
.
Oí /).
Et la justice de tes saints est devant tes regards, Seigneur (9, 3).
ai < , .
Ceux qui aiment les synagogues des saints ont fui loin d'eux
(17, 46).
' oí cov.
1 II est très remarquable que jamais il n'est question de la Loi dans le Psautier.
Pareillement, le 4e paragraphe du Schemoné-fîsrè, qui implore le don de la sagesse,
n'y a pas de correspondant. Il en faut conclure que l'auteur était un Pharisien
laïque , si l'on peut ainsi s'exprimer, passionné surtout pour les idées morales du
parti, brûlant de la même indignation contre le clergé officiel, attaché au même
genre de patriotisme et rêvant les mêmes transformations sociales, mais indifférent,
en somme, à la scliolastique rabbinique. Les partis ont de tout temps compté des
serviteurs zélés qui n'embrassaient pas avec un égal enthousiasme toutes les parties
du programme.
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1 L'ère messianique envisagée comme le châtiment des mauvais juges est une con¬
ception qui a disparu de bonne heure. Si elle semble reprendre vie dans une assertion
de R. Yosé b. ELischa ( Schabbat , 139 a), ce n'est qu'accidentellement et sous une
forme qui ne permet pas d'assurer qu'elle désigne l'ère messianique : Dieu n'établira
«
sa résidence en Israël que lorsqu'auront cessé les mauvais juges en Israël (d'après
Isaïe, , 25-26) >. Ce passage du Talmud Schabbat a été repris dans Sanhédrin , 98 a,
mais là l'opinion est mise par R. Simlaï dans la bouche d'un autre docteur et la
pensée est défigurée : Le fils de David ne viendra que lorsqu'auront cessé tous les
«