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L'information géographique

Relief calcaire et phénomènes karstiques


René Clozier

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Clozier René. Relief calcaire et phénomènes karstiques. In: L'information géographique, volume 5, n°3, 1941. pp. 51-55;

doi : https://doi.org/10.3406/ingeo.1941.5081

https://www.persee.fr/doc/ingeo_0020-0093_1941_num_5_3_5081

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Mise au point

RELIEF CALCAIRE ET PHÉNOMÈNES KARSTIQUES

les régions
Par leurcalcaires
tonalitécomposent
grisâtre, launmaigreur
paysage squelettique
original. Ellesdesprésentent
sols, la raideur
une rigoureuse
et la sècheparenté
retombée
de formes
des versants,
topographiques : surfaces alvéolées de dépressions fermées, barrées de raides escarpements rocheux, crevées d'abîmes
béants.
Un tel modèle semble rompre en visière avec la hiérarchie rituelle des formes fluviales. Il est donc
légitime de parler de relief calcaire, un des plus signalétiques parmi les formes de relief terrestre. Cependant la
comparaison entre la Champagne crayeuse par exemple et les causses du Midi de la France accuse de profondes
différences. On classe alors les aspects les plus spécifiques du relief calcaire sous l'étiquette : morphologie
karstique.
Cette expression vient de karst. Ce mot a un sens local et une signification générale. Il s'applique, stricto
sensu, aux plateaux calcaires du Nord-Ouest balkanique, qui s'étendent de la Carinthie au Montenegro. Par
extension, il désigne toute région calcaire présentant le même faciès topographique que ces plateaux. C'est
donc un nom de pays devenu un terme de géographie générale.
Or les formes karstiques apparaissent quand cesse la circulation superficielle des eaux courantes. En
ordre principal elles sont donc en rapport étroit avec l'organisation du drainage souterrain dont les calcaires
ont le secret. De là trois séries de problèmes :
1° La description et la définition des formes karstiques;
2° L'hydrologie souterraine et l'explication des formes karstiques;
3° Le karst et l'évolution morphologique générale.

I. — Description et définition des formes karstiques (1)


La morphologie karstique comporte des formes de surface et des formes souterraines.
a) Le karst superficiel est caractérisé par les dépressions fermées dolines, ouvalas, polje (2).
:

Les dolines sont les formes élémentaires. Elles dessinent des cavités circulaires ou elliptiques, de dimension
réduite, dont l'observateur discerne d'un coup d'œil les contours et les limites. Ces creux sont tantôt à fond

Fig. 1 — Doline en forme de baquet. Fig. 2. — Doline en forme de cuvette.


.

plat et ceinturés par des parois redressées et rocheuses, tantôt en forme de coupe aux rebords évasés (fig. 1
et 2), parfois même dissymétriques. Ils rassemblent toujours de la terre meuble et se prêtent aux cultures.
Aux dolines — terme généralisé par Cvijic — correspondent les sotçhs des Grands Causses, les cloups
*" et les
..conques des causses du Quercy.
(1) La terminologie karstique a été surtout précisée par le géographe serbe J. CVIJI.C. qui a généralisé la toponymie
du karst dinarique. Le travail de cet auteur le plus accessible à nos lecteurs est Hydrographie souterraine et évolution
morphologique du karst (Recueil des Travaux de l'Institut de Géographie alpine, t. VI, 1918, p. 375-426, 27 fig.). D'autre
:

part G. £HABOT, en appendice à sa thèse sur les Plateaux du Jura central (Strasbourg, 1927, 350 p., 85 fig.), a annexé
un bref, mais substantiel vocabulaire karstique.
(2) En surface se trouvent également des vallées sèches et des lapiaz; les vallées sèches sont des vallées qui n'hébergent
plus de courssurd'eau; les lapiazsesont des cannelures séparées par des
elles arêtes
ne sontrocheuses
donc pasacérées. Ces deux
de laformes, particulièrement
nombreuses les calcaires, retrouvent sur d'autres roches; spécifiques morphologie karstique. 51
Les ouvalas (fig. 3) sont les grandes dépressions formées par l'interjonction de plusieurs dolines; leur
diamètre dépasse 500 mètres et peut atteindre plusieurs kilomètres. On peut les comparer à d'immenses
écumoires au tond bosselé.

Fig. 3. — L'ouvala de Martel (causses du Quercy). 1 : marnes; 2 : calcaires.

Fig. 4. — Polje de Niksic (karst monténégrin), d'après J. Cvijic.

Les polje (3) dépassent en dimension les ouvalas;


ils représentent donc les plus grandes formes
karstiques. Ils sont caractérisés : 1° par des inondations
temporaires et périodiques; 2° par l'horizontalité de
banquettes calcaires en contrebas des versants et sur
lesquelles se dressent des buttes coniques, les hums
(4); 3° par une plaine alluviale très plane et de
faible épaisseur installée au fond du polje (fig. 4).
b) Le karst profond comprend essentiellement
des grottes ou cavernes souterraines, galeries tantôt
sèches (grottes de Dargilan), tantôt suivies par des
rivières souterraines (Padirac, Han-sur-Lesse, fig. 5).
Ces grottes et ces drains intérieurs sont parfois reliés
à la surface du sol ou aux formes karstiques
superficielles par des abîmes béants appelés jamaj dans le
Fig. 5. — La perte de la Lesse et les grottes de Han Karst, aoens dans les Grands Causses, igues dans les
(Région ardennaisa). causses du Quercy.

II. — L'hydrologie karstique et la genèse des formes de terrain en pays calcaire

Les calcaires sont fissurés. Ces fissures, appelées diaclases, sont des fentes initiales de la roche
perpendiculaires au plan de"^Tratification.
De nombreuses roches sont fissurées. Par exemple les granits présentent des fissures très fines qui peuvent
exister jusqu'à une centaine de mètres et où pénètre l'eau. Ainsi s'explique l'altération superficielle de ces
roches qui, en pays tropical, peut atteindre de 60 à 1 00 mètres d'épaisseur.
Pour les calcaires, la pénétration de l'eau dans les fissures entraîne non l'altération, mais la dissolution
partielle de la roche. De cette dissolution résulte une « laisse » résiduelle (5) qui comprend toutes les impuretés
du calcaire et où l'argile entre pour une bonne part. Cette argile de décalcification est souvent rougie par
l'oxyde de fer; d'où le nom de terra rossa. Le fer se concrétionne parfois en petites boules appelées pisolith.es,
rassemblées dans des poches qui ont donné lieu jadis aux exploitations des minières sur les calcaires jurassiques.
Par la dissolution, les fissures s'élargissent, facilitant la pénétration de l'eau en profondeur, tant par les
diaclases que par les joints de stratification. Non seulement les eaux de pluies et de ruissellement sont ainsi

sens (5)
(3) Un
qu'on
(4) Polje
Hum
l'applique
mètre
aveutexactement
cube
dire
à una
champ;
d'argila
forme
la même
c'est
dekarstique;
décalcification
plus exactement
signification
les géographes
que notre
correspondrait
l'équivalent
précisent
mot à puy
dealors
80 ou
m3
notre
pech.
de
et mot
calcaire.
disent
Enchampagne;
allemand
karono polje
: c'est
Kalkkegel.
(=parpoljeunskarstique).
restriction de
52
sollicitées à s'enfouir, mais aussi les rivières obéissent aux mêmes règles et par saignées sous-fluviales ou par
disparition totale « se perdent sous terre ». Ces pertes de rivières se produisent tantôt dans des grottes allongées
suivant le plan de stratification (ex. : perte du ruisseau du Bonheur dans le causse de Camprieu), tantôt dans
des gouffres verticaux (fig. 7) appelés ponors dans le karst dinarique (6).
Le fouissement des eaux en profondeur transforme les fissures en chenaux (= Kartsgerinne) . Ces chenaux,
guidés par les diaclases et les joints de stratification, ont un tracé contourné et capricieux, et des dimensions
irrégulières, car la dissolution est activée en certains points et freinée ailleurs; d'où les formes de poches, de
dômes séparés par des étroits, par des siphona curieusement incurvés (7).
Les eaux, engouffrées par les pertes ou infiltrées dans les diaclases, sont rendues à la circulation
superficielle par les résurgences.
Les résurgences sont les grosses sources des pays calcaires; elles donnent naissance à des rivières toutes
formées (ex. : le Lison, le Loiret) avec débit abondant et pente kilométrique faible. Ces résurgences ou bien

Fig. 6. — La zone de résurgence1 et les cloups de la région de la Couze inférieure.


: grès triasique; 2 calcaires de l'infralias; 3 : marnas toarciennes; 4 : calcaires bajociens; 5 : calcaires bathoniens.
:

sourdent au milieu du talweg et sont circulaires, formant ce qu'on appelle des gours, des gourgs ou des
gouffres (ex. le gour de Moinans (vallée du Suran, Jura), ou le Blagour, fig. 6), ou bien apparaissent en
contrebas des versants dans une encoche caractéristique; on les appelle alors dou (voir fig. 6), douzes (Grands
Causses), dois (Jura), douix (Bourgogne). L'encoche, par taraudage régressif et éboulement, peut donner
naissance à des vallées encaissées sur tout leur parcours et qui, vers leur source ou leur origine, se terminent en
cul-de-sac; ces vallées prennent le nom de reculées dans le Jura, de tournées en Bourgogne (tournée de
Nolay) ou plus généralement de fin du monde, bout du monde.
Les résurgences sont sujettes à des crues subites; ces crues prouvent que si l'écoulement superficiel est
en inactivité le drainage souterrain est
245m. parfaitement organisé et joue parfois avec une intensité
comparable aux phénomènes torrentiels; ainsi la
rapidité de l'écoulement karstique et les fortes
pentes font de l'Ain un organisme tumultueux dont
le tempérament du Rhône supérieur subit les effets.
Au total l'hydrologie karstique entraîne dans
les calcaires une perte de substance qui
détermine des cavités souterraines, abîmes et grottes.
Les espaces vacuolaires internes facilitent la
filtration des eaux le long des fissures et
retentis ent ainsi sur le modelé superficiel; un déficit
de matière par dissolution se manifeste en
Fig. 7. — Un ponor : la perte du ruisseau de Cazelle surface aux endroits où la pénétration des eaux est
(causses du Quercy). activée par les fissures élargies; un creux s'amorce
qui, par son développement, donne naissance à une
doline; de proche en proche la masse calcaire apparaît toute cariée en surface et en profondeur. Même
en l'absence de grandes cavités souterraines l'élargissement des fissures détermine une véritable gerçure de
la roche qui accélère la dissolution.
Jusqu'où peut aller cette dissolution ? Peut-elle abolir le relief calcaire ?
On connaît la remarquable entreprise de démolition qu'est l'érosion par les eaux courantes, l'usure

(6) Le carbonate de chaux en dissolution peut donner lieu à des dépôts quand il est en excès. Ces dépôts, par phénomènes
de cristallisation, recouvrent les parois des grottes (enduits stalagmitiques) ou pendent des voûtes en stalactiques.
(7) Pour les plans et coupes des abîmes et grottes, copieuse illustration dans MARTEL, la France ignorée (Dalagrave,
1930, 2 volumes).
systématique du relief à laquelle elle aboutit; un déterminisme rigoureux enchaîne les phases successives du
travail des eaux courantes pour aboutir à l'élaboration d'une pénéplaine.
L'érosion karstique peut-elle arriver à un résultat analogue ?
III. — La place de l'érosion karstique dans l'évolution morphologique générale
Au premier examen, les faits semblent le confirmer.
D'une part, c'est sur les calcaires que l'on observe les surfaces d'érosion les plus parfaites (ex. : les
garrigues languedociennes) .
D'autre part, dolines, abîmes naturels, reculées, se reproduisent en série dans les régions karstiques et
font songer à une masse rocheuse asservie en bloc et sur un même rythme à l'érosion souterraine. On imagine
alors l'interdépendance des phénomènes karstiques et leur évolution dans le sens d'un déterminisme cyclique.
Un schéma analogue au cycle fluvial a par suite été conçu et formulé sous le nom de cycle karstique ou
fluvio-karstique. En voici un bref exposé :
Tandis que l'érosion normale est régressive et opère à partir d'un niveau de base, l'érosion karstique
est progressive et, sous l'action de la pesanteur, gravite vers un niveau de base qui est soit une couche
imperméable, soit le niveau d'écoulement fluvial. Selon Cvijic cet affouillement cyclique dans le sens vertical
détermine dans une morphologie karstique normalement développée trois zones superposées :
1° Une zone supérieure comportant des formes superficielles : dolines, ouvalas et vallées sèches en
rapport avec des cavités souterraines, abîmes et grottes définitivement abandonnées par les eaux.
2° Une zone inférieure avec des fissures étroites constamment parcourues par les eaux.
3° Entre les deux, une zone intermédiaire dont les amples conduits karstiques servent occasionnellement
de trop-plein quand la zone inférieure sursaturée n'assure plus l'écoulement régulier des eaux souterraines.
Quand ce dispositif zonal est normalement ordonné, la karstification atteint le stade de maturité; la
surface est toute corrodée; les vallées sèches sont désorganisées par les dolines; entre les vallées se développent
les ouvalas.
Puis le karst se dégrade par dissolution du bâti calcaire; la région retourne à l'érosion normale; c'est
la fin d!u cycle karstique.
Mais présentée sous cette forme, la notion de cycle karstique ne s'adapte pas de façon entièrement
satisfaisante à la réalité des faits :
1° L'inégale répartition des phénomènes karstiques dans une même région calcaire montre un extrême
compartimentage en secteurs différenciés et soumis à une évolution indépendante; les eaux souterraines
n'arrivent pas à constituer un réseau karstique ordonné et hiérarchisé comme un réseau fluvial; elles
s'introduisent dans de multiples vases karstiques (8), communiquant entre eux, mais discontinus et percés par le
fond ;
2° A ce cloisonnement vertical s'ajoute le plus souvent une discontinuité horizontale; par exemple dans
les Grands Causses, à un karst profond, parvenu à un stade de maturité, correspondent des formes superficielles
jeunes, ce qui suppose un arrêt dans l'évolution des formes de surface;
3° Par contre dolines et ouvalas (voir fig. 3) peuvent atteindre un stade d'évolution avancée dans une
masse calcaire peu épaisse, reposant sur un banc imperméable, ce qui exclut l'existence d'un dispositif en
trois zones étagées.
La notion du cycle karstique doit être précisée, sinon Imnjtée. Les faits essentiels qu'il convient de retenir
peuvent être résumés ainsi : ~~
1° L'existence de surfaces d'érosion parfaitement nivelées sur les calcaires prouve que ceux-ci sont
'

immunisés contre la karstification tant que l'écoulement fluvial opère sur un plan tangeant à la surface
topographique; les calcaires, dans ce cas, réagissent à l'érosion comme les autres roches, plus docilement
peut-être, car ils sont solubles et n'encombrent pas le réseau fluvial de transports alluviaux;
2° Une différence de niveau entre la surface topographique et le plan d'écoulement fluvial — par
exemple une reprise d^érosion entraînant le creusement de vallées en gorge ou canyon — déclenche une
phase de karstification. L'eau s'infiltre alors le long des diaclases jusqu'à ce qu'elle atteigne le niveau de base
karstique qui est soit un banc imperméable, soit le niveau d'écoulement fluvial;
3° Ainsi se trouve inauguré le cycle karstique, c'est-à-dire une dissolution progressive de la masse calcaire.
Mais l'évolution cyclique ne se poursuit que si l'hydrologie karstique maintient la liaison entre les formes de
surface et les cavités qui se creusent en profondeur; dolines, ouvalas et polje par des inondations périodiques
ou temporaires, demeurent solidaires de l'écoulement- karstique; les variations du niveau permettent le rythme
alternativement ascendant et descendant de filets d'eau le long des fissures qu'ils élargissent; il y a saturation
karstique ( 9 ) .
La plaine centrale d'Irlande, la Floride fournissent des exemples régionaux de saturation karstique; mais
les cas les plus typiques sont les polje karstiques avec leurs inondations périodiques et leurs abîmes tour à tour
cmissifs et absorbants.
La saturation karstique, et par suite l'évolution cyclique, existe également quand un banc imperméable
forme un niveau de base karstique assez proche de la surface pour permettre en période de pluies ou de crues
le remplissage des diaclases et conduits karstiques;

(8).
(9) Emm.
Pour leDEphénomène
MARTONNE,de Traité, p. 662.
saturation karstique, voir R. CLOZIER, les Causses du Quercy, p. 127.
4° Mais le cycle karstique cesse quand le niveau de base karstique est sollicité à s'abaisser précipitamment
à la suite de l'enfoncement rapide du réseau fluvial (ex. : les gorges du Tarn dans les Grands Causses) ; le
creusement des abîmes et des grottes s'accélère; les galeries sèches s'interposent entre les dolines de la surface
et les drains parcourus par les rivières souterraines; une discontinuité s'établit entre la croûte karstique et le
niveau de base karstique et interrompt l'évolution cyclique;
5° La ruine de l'édifice karstique se poursuit alors, mais selon une érosion différentielle guidée par les
conditions locales : nature des roches, structure, climat.
On comprend alors la variété des types de relief calcaire.

IV. — Les types de relief calcaire


Le calcaire n'est pas une entité lithologique; il existe des calcaires crayeux et des calcaires lithographiques,
des calcaires en plaquettes et des calcaires compacts, des calcaires gréseux et des calcaires dolomitiques. Chaque
calcaire a une régçtion topjjarajjhjque Dropre qui se manifeste par des versants en bosse (= downs), des
versants ruiniformes, ou des versants en corniche. Chaque calcaire a une réaction hydrdogique personnelle
qui se marque par la présence ou l'absence de dolines. «•■■^r
La structure — plissée ou tabulaire — intervient également : ainsi les polje dinariques sont en rapport
avec les dislocations tectoniques.
Mais c'est le climat surtout qui met son empreinte sur les paysages calcaires. Il est des karst de climats
tempérés, des karst méditerranéens, des karst tropicaux. Ces derniers sont les témoins les plus expressifs de
la virulence de l'érosion souterraine, hérissés de pitons (baie d'Along), de pyramides, taraudés de gouffres,
de dolines, de vallées aveugles; aucune ligne directrice; c'est le karst développé, poussé jusqu'à l'absurde.
R. CLOZIER.

Nouvelles géographiques

La formation de la pluie ( 1 ) par rayonnement), il y a transport de vapeur d'eau


vers la particule et la condensation s'amorce sur les
Pendant longtemps on a donné de la formation noyaux hygroscopiques. Et si la vitesse de
des nuages et des précipitations une explication fort condensation de la vapeur d'eau est insuffisante pour
simple; elle peut se résumer ainsi : l'atmosphère compenser l'effet de refroidissement, l'air devient saturé
contient toujours en suspension des poussières; lorsque, et même sursaturé. Lorsque les gouttelettes
par suite d'un refroidissement, la tension de vapeur acquièrent un rayon supérieur à 10 (/., elles deviennent
atteint sa valeur maxima, la condensation s'effectue perceptibles à l'œil; leur ensemble constitue un nuage
sur ces particules; elles grossissent, deviennent ou un brouillard.
visibles et constituent un nuage ou un brouillard; si Les gouttelettes des nuages aqueux ont des rayons
le refroidissement se poursuit, les éléments du nuage de l'ordre de 20 n en moyenne et de 100 \i au
continuent à grossir et tombent sous forme de pluie maximum; le rayon des éléments du brouillard varie
ou de neige^ entre 2 y. et 50 fi. Le brouillard diffère suivant les
Les recherches récentes, depuis une dizaine lieux de formation : le brouillard des villes est
d'années, ont montré l'insuffisance de cette théorie. constitué de gouttelettes plus petites et plus nombreuses
En réalité les noyaux de condensation sont de que celui des campagnes. Les gouttelettes des nuages,
trois sortes : petits ions, gros ions et particules plus grosses, ont tendance à tomber, mais comme
neutres (poussières, fumées), et ces noyaux, élec- elles se forment au sein de masses d'air ascendantes,
trisés ou non, soulevés dans l'atmosphère par elles demeurent en réalité au même niveau. Les
diffusion turbulente, sont principalement concentrés dans nuages persistent grâce à l'état colloïdal de
les couches inférieures. l'atmosphère; il n'y a pas de pluie tant que dure la
Mais, outre les noyaux de condensation, il existe stabilité colloïdale du nuage. La pluie se produit quand
en permanence dans l'atmosphère des particules cesse l'équilibre colloïdal du nuage, quand s'effectue
liquides invisibles à l'œil nu. Si, dans une atmosphère la coalescence des éléments constitutifs du nuage;
non saturée, la tension de vapeur est en équilibre les gouttes d'eau formant la pluie ont un rayon
entre chaque particule liquide et l'atmosphère, il compris entre 0,5 et 2,5 mm. La coalescence des gouttes
n'y a ni evaporation, ni condensation. Si la est due à des phénomènes d'ordre électrique (cf.
température vient à baisser (détente adiabatique de l'air grosseur des gouttes dans les averses orageuses) et
due à un mouvement ascendant, perte de chaleur d'ordre mécanique (turbulence, attraction mutuelle
des gouttes )
( 1 ) R. Trochon, « La Microphysique des nuages
.

considérés comme aérosols» (Sciences, 1939, 4e trimestre, p. 38). R. CLOZIER. 55

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