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Département de Mathématiques et Informatique

École Nationale Supérieure d’Arts et Métiers,


Université Moulay Ismail,
Meknès.

Cours & Travaux Dirigés de Mathématiques


Intitulé de l’élément de module : Algèbre 1

Chapitre 3 : Polynômes
Filière : Cycle préparatoire Intégré
Volume horaire : 34h
Année universitaire : 2020/2021

Mohamed BENDAOUD
Email : m.bendaoud@ensam-umi.ac.ma

..........................................................................................................................
École Nationale Supérieure d’Arts et Métiers, Marjane II, B.P. 15290, Al Mansour, Meknès
Tél : +212(0)535457160/61- +212(0)648313896
Fax : +212(0)535467163, E-mail : m.bendaoud@ensam-umi.ac.ma
Table des matières

1 Théorie des ensembles 4

2 Strucures algébriques 5

3 Polynômes 6
3.1 Algèbre des polynômes à une indéterminée . . . . . . . . . . . . . . . . 6
3.2 Arithmétique dans K[X] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
3.2.1 Division Euclidienne dans K[X] . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
3.2.2 P gcd et ppcm des polynômes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
3.2.3 Décomposition primaire dans K[X] . . . . . . . . . . . . . . . . 10
3.3 Dérivation et racines des polynômes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
3.4 Etude de R[X] et de C[X] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
3.5 Décomposition en éléments simples d’une fraction rationnelle . . . . . . 16

2
Table des figures

3
Chapitre 1

Théorie des ensembles

4
Chapitre 2

Strucures algébriques

5
Chapitre 3

Polynômes

Les propriétés des fonctions polynômes

P : R −→ R
x 7−→ P (x) = a0 + a1 x + ... + an xn
se déduisent des coefficients a0 , a1 , ..., an ; ce qui motive l’introduction et l’étude des po-
lynômes "formels" à coefficients dans un anneau commutatif quelconque. Ce chapitre a
pour objectifs la construction et l’utilisation des polynômes, la mise en place de l’arith-
métique dans l’anneau des polynômes à coefficients dans un anneau analogue à celle dans
l’anneau Z, l’étude des racines des polynômes, la décomposition primaire des polynômes
et la décomposition des fractions rationnelles en éléments simples.

3.1 Algèbre des polynômes à une indéterminée


Définition 3.1.1 Soit (A, +, .) un anneau commutatif unitaire. On appelle polynôme à
une indéterminée à coefficients dans A toute suite (an )n∈N de A nulle à partir d’un certain
rang, c-à-d., il existe N ∈ N : an = 0, ∀n ≥ N . L’ensemble des polynômes à une
indéterminée à coefficients dans A se note A[X] (cette notation sera justifiée plus loin).

Opérations sur A[X] : On muni A[X] des lois "+" et "." définies par

(an )n∈N + (bn )n∈N = (an + bn )n∈N et (an )n∈N .(bn )n∈N = (cn )n∈N

pour tous (an )n∈N , (bn )n∈N ∈ A[X] ; où cn = k=n


P
k=0 ak bn−k pour tout n ∈ N. On véri-
fie aisément que (A[X], +, .) est un anneau commutatif unitaire de zéro 0 = (0, 0, ...) et
d’unité 1 = (1, 0, 0, ...).

Notation : On pose X = (0, 1, 0, 0, ...) et X 0 = 1. On remarque que X 2 = (0, 0, 1, 0, 0, ...),


n zéros avant le 1
z }| {
X 3 = (0, 0, 0, 1, 0, 0, ...) et X n = (0, . . . , 0, 1, 0, 0, ...).
Pour P = (an )n ∈ A[X] et λ ∈ A, on pose λP = (λan )n . Ainsi,
X
P = a0 .1 + a1 X + a2 X 2 + ... = ak X k ,
k≥0

6
Chapitre 3 3.2. Arithmétique dans K[X]

et X
A[X] = { ak X k : ak ∈ A, (k ≥ 0) sont tous nuls sauf un nombre fini}.
k≥0

X s’appelle l’indéterminée, et la notation A[X] se trouve alors justifiée.


k
P
Définition 3.1.2 Soit (A, +, .) un anneau commutatif unitaire et P = k≥0 ak X ∈
A[X] un polynôme non nul. On appelle :
— Le degré de P l’entier d◦ (P ) := sup{k ∈ N : ak 6= 0}.
— La valuation de P l’entier val(P ) := inf{k ∈ N : ak 6= 0}.
— Le monôme de degré k de P le terme ak X k , et l’élément ak s’appelle le coefficient
de X k dans P .
Si P = 0, on convient que d◦ P = −∞ et val(P ) = +∞.

Remarque 3.1.3 L’application i : A → A[X] est un homomorphisme


a 7→ a.1
injectif d’anneaux unitaires. On identifie ainsi le polynôme a.1, de degré 0 et appelé un
polynôme constant, avec l’élément a de A ; et ainsi A se trouve identifié à l’ensemble des
polynômes constants de A[X].

Les propriétés suivantes sont faciles à vérifier.


X
Proposition 3.1.4 Soit (A, +, .) un anneau commutatif unitaire, P = ak X k et Q =
k≥0
X
k
bk X ∈ A[X].
k≥0
p=n
X X X
k k
1) P + Q = (ak + bk )X et P Q = ck X ; où ck = ap bk−p , pour tout
k≥0 k≥0 p=0
k ≥ 0.
2) d◦ (P + Q) ≤ max(d◦ (P ), d◦ (Q)) et val(P + Q) ≥ min(val(P ), val(Q)).
3) Si de plus A est intègre, alors

d◦ (P Q) = d◦ (P ) + d◦ (Q) et val(P Q) = val(P ) + val(Q).

Preuve. A faire en exercice. 

Dans la suite, K désigne un corps commutatif.

Proposition 3.1.5
1) Les seuls polynômes inversibles de K[X] sont les polynômes constants non nuls.
2) K[X] est un anneau intègre.

Preuve. 1) Si P est inversible, alors il existe P 0 ∈ K[X] tel que P P 0 = 1. En particulier,


0 = d◦ 1 = d◦ P + d◦ P 0 . Ainsi, d◦ P = 0 et la conclusion désirée s’en découle.
2) Il suffit de montrer que K[X] est sans diviseur de zéros. Si P Q = 0, alors d◦ P +
d Q = −∞. Par conséquent, d◦ P = −∞ ou d◦ Q = −∞ ; ce qui achève la preuve.



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Chapitre 3 3.2. Arithmétique dans K[X]

3.2 Arithmétique dans K[X]


3.2.1 Division Euclidienne dans K[X]
Définition 3.2.1 Soient A, B ∈ K[X]. On dit que :
— A divise B (ou B est un multiple de A) s’il existe C ∈ K[X] tel que B = AC, et
on écrit A/B ;
— A est associé à B si A/B et B/A et on écrit A ∼ B.

Remarque 3.2.2
1) A/A, 1/A et A/0 pour tout A ∈ K[X].
2) ∀A ∈ K[X] : 0/A =⇒ A = 0.
3) ∀A, B, C ∈ K[X] : A/B et B/C =⇒ A/C.

Notation. Pour A ∈ K[X], on note par (A) = {P A : P ∈ K[X]} l’ensemble des


multiples de A, c-àd., l’idéal de l’anneau K[X] engendré par A.

Proposition 3.2.3 Soient A, B ∈ K[X].


1) A/B =⇒ (B) ⊆ (A).
2) A ∼ B ⇐⇒ (A) = (B).
3) A ∼ B ⇐⇒ ∃λ ∈ K ∗ : A = λB.
4) λ ∈ K ∗ ⇐⇒ (λ) = K[X].

Preuve. Les assertions 1) et 2) sont claires. L’assertion 3) est une conséquence du fait que
l’anneau K[X] est intègre.
4) Si λ ∈ K ∗ , alors pour tout P ∈ K[X], P = λ−1 λP ∈ K[X], et par suite (λ) =
K[X]. Inversement, si (λ) = K[X], alors il existe P ∈ K[X] tel que 1 = λP , c-à-d., λ et
inversible. 

Proposition 3.2.4 (Division Euclidienne dans K[X])


Soient A, B ∈ K[X] tels que B 6= 0. Alors il existe P, Q ∈ K[X] uniques tels que
A = BQ + R avec d◦ R < d◦ B.

Preuve.
 Existence. Ecrivons A = k=n
P k
Pk=m k
k=0 ak X et B = k=0 bk X avec bm 6= 0, et procé-
dons par récurrence sur n = d◦ A. 
Q = 0 et R = A, si d◦ B ≥ 1 ;
Pour d◦ A = 0, il suffit de prendre
Q = b−1
m A et R = 0, si d B = 0.

Supposons que la propriété est vraie pour tout polynôme de degré < n = d◦ A.
Si d◦ A < d◦ B, alors pour Q = 0 et R = A, on a bien A = 0.B + A, et le résultat
est vérifié.
Si d◦ A > d◦ B, écrivons an b−1
m X
n−m
B = b00 + b01 X + ... + b0n−1 X n−1 + an X n . Soit
A1 = A − an b−1m X
n−m
B = (a0 − b00 ) + (a1 − b01 )X + ... + (an−1 − b0n−1 )X n−1 .
On a d A1 ≤ n − 1 < d◦ A, et l’hypothèse de récurrence s’applique à A1 . Donc il

existe Q1 , R ∈ K[X] tels que A1 = BQ1 + R avec d◦ R < d◦ B. Ainsi,

A = A1 + an b−1
m X
n−m
B = [Q1 + an b−1
m X
n−m
]B + R

avec d◦ R < d◦ B, et le résultat est aussi vérifié pour A.

Mohamed BENDAOUD 8
Chapitre 3 3.2. Arithmétique dans K[X]

 Unicité. Supposons que A = BQ + R = BQ1 + R1 avec d◦ R < d◦ B et d◦ R1 <


d◦ B. Alors Q1 = Q. Car sinon, Q1 − Q 6= 0 et d◦ B ≤ d◦ B(Q1 − Q) = d◦ (R1 −
R) < d◦ B ; ce qui est absurde. Donc Q1 = Q, et par suite R1 = R ; ce qui achève
la preuve. 

Exemple 3.2.5 Soient A = 5X 4 +3X 3 +X 2 −2X +4 et B = X 2 −2X +1. En faisant la


division Euclidienne de A par B, on trouve que A = BQ + R avec Q = 5X 2 + 13X + 22
et R = 29X − 18.

Théorème 3.2.6 L’anneau K[X] est principal, c-à-d., K[X] est intègre et tout idéal de
K[X] est principal.

Preuve. Soit I un idéal de K[X]. Si I = {0}, alors I = (0) est principal. Si I 6= {0},
considérons A = {d◦ P : P ∈ I et P 6= 0}. A est une partie non vide de N, donc admet
un plus petit élément m ∈ N. Soit B ∈ I tel que d◦ B = m. Montrons que I = (B). On a
B ∈ I, donc (B) ⊆ I. Inversement, soit P ∈ I. Ecrivons P = BQ + R avec d◦ R < d◦ B.
On a R = P − BQ ∈ I et d◦ R < d◦ B ; ce qui entraine que d◦ R∈ / A et R = 0. Par
conséquent P = BQ ∈ (B) et I = (B), c-à-d., I est principal. Et comme, d’après la
Proposition 3.1.5, K[X] est intègre, l’anneau K[X] est alors principal. 

3.2.2 P gcd et ppcm des polynômes


Définition 3.2.7 On dit qu’un polynôme P ∈ K[X] est unitaire si son coefficient de plus
haut degré vaut 1.

Proposition 3.2.8 Soient P1 , P2 , ..., Pn ∈ K[X]. Il existe un unique polynôme unitaire D


(resp., M ) tel que (P1 ) + (P2 ) + ... + (Pn ) = (D) (resp., (P1 ) ∩ (P2 ) ∩ ... ∩ (Pn ) = (M )).
Le polynôme unitaire D (resp., M ) s’appelle le plus grand diviseur (resp., le plus petit
multiple) commun de P1 , P2 , ..., Pn et se note pgcd(Pi )1≤i≤n ou P1 ∧ P2 ∧ ... ∧ Pn (resp.,
ppcm(Pi )1≤i≤n ou P1 ∨ P2 ∨ ... ∨ Pn ).
Si pgcd(Pi )1≤i≤n = 1, on dit que les Pi , 1 ≤ i ≤ n, sont premiers entre eux.

Preuve. Il est bien connu que (P1 ) + (P2 ) + ... + (Pn ) et (P1 ) ∩ (P2 ) ∩ ... ∩ (Pn ) sont des
idéaux de K[X] ; voir la Proposition ??. Donc, d’après le théorème précédent, il existe
D, M ∈ K[X] tels que (P1 ) + (P2 ) + ... + (Pn ) = (D) et (P1 ) ∩ (P2 ) ∩ ... ∩ (Pn ) = (M ).
D’autre part, si D0 est un autre polynôme tel que (P1 ) + (P2 ) + ... + (Pn ) = (D0 ), alors
(D0 ) = (D), c-à-d., D0 ∼ D. Par conséquent, il existe λ ∈ K ∗ tel que D0 = λD. Ainsi,
si on impose à D d’être unitaire, il est alors unique. De même, si on impose à M d’être
unitaire, il est aussi unique. 

Remarque 3.2.9 Soient P1 , P2 , ..., Pn ∈ K[X].


 D unitaire et D/Pi pour tout 1 ≤ i ≤ n,
1) D = pgcd(Pi )1≤i≤n ⇔ et
∃(Ui )1≤i≤n ⊆ K[X] : D = U1 P1 + ... + Un Pn .

2) P1 , P2 , ...Pn sont premiers entre eux si et seulement s’il existe U1 , U2 , ..., Un


dans K[X] tels que 1 = U1 P1 + U2 P2 + ... + Un Pn .

Mohamed BENDAOUD 9
Chapitre 3 3.2. Arithmétique dans K[X]


 M unitaire et Pi /M pour tout 1 ≤ i ≤ n,
3) M = ppcm(Pi )1≤i≤n ⇔ et
∀M ∈ K[X] : Pi /M 0 , ∀1 ≤ i ≤ n ⇒ M/M 0 .
0

Définition 3.2.10 On dit qu’un polynôme P ∈ K[X] est irréductible (ou premier) s’il est
non constant et si les seuls diviseurs de P sont les constants non nulles et les polynômes
associés à P .

Remarque 3.2.11
 ◦
 d P ≥ 1,
P est irréductible ⇔ et
∀P1 , P2 ∈ K[X] : P = P1 P2 ⇒ P1 ou P2 est constant.

Exemple 3.2.12 Le polynôme P = X 2 + 1 est irréductible dans R[X], mais il n’est pas
irréductible dans C[X].

Proposition 3.2.13 Soient A, B, C ∈ K[X].


1) A ∧ B = 1, A/C et B/C =⇒ AB/C.
2) A ∧ B = 1 et A ∧ C = 1 =⇒ A ∧ BC = 1.
3) A/BC et A ∧ B = 1 =⇒ A/C.
4) A irréductible et A/BC =⇒ A/B ou A/C.

Preuve. 1) Ecrivons 1 = AU + BV , C = AA0 et C = BB 0 . Alors C = AU C + BV C,


c-à-d., C = AU BB 0 + BV AA0 = AB(U B4 + V A0 ) et AB/C.
2) Si AU + BV = 1 et AU 0 + CV 0 = 1, alors AU 0 + (AU + BV )CV 0 = A(U 0 +
U CV 0 + BCV V 0 = 1 ; ce qui entraine que A ∧ BC = 1.
3) Si BC = AA0 et AU + BV = 1, alors C = AU C + BV C = A(CU + V A0 ) ; ce
qui implique que A/C.
4) Supposons que A ne divise pas B, et montrons que A divise C. Pour cela, d’après
l’assertion 3), il suffit de montrer que A ∧ B = 1. Soit D un diviseur commun de A
et B. Comme A est irréductible, alors D ∈ K ∗ ou D ∼ A. Si D ∼ A, alors A/D. Et
comme D/B, il s’en suit que A/B ; ce qui est absurde. Donc D ∈ K ∗ , et par conséquent
A ∧ B = 1. 

3.2.3 Décomposition primaire dans K[X]


Théorème 3.2.14 Tout polynôme non nul A de K[X] admet une décomposition unique à
i=n
Y
l’ordre des facteurs près de la forme A = λ Piαi avec λ ∈ K ∗ , n ∈ N∗ , αi ∈ N pour
i=1
tout i ∈ {1, 2, ..., n} et les Pi , 1 ≤ i ≤ n, sont des polynômes irréductibles unitaires deux
à deux non associés.

Preuve.

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Chapitre 3 3.3. Dérivation et racines des polynômes

 Existence de la décomposition. Soit A ∈ K[X] un polynôme non nul. Si A n’ad-


met pas de telle décomposition, alors en particulier A∈ / K ∗ et A est non irréduc-
0 0
tible. Donc A s’écrit A = P1 P1 avec P1 et P1 ne sont pas des polynômes constants.
L’un parmi P1 et P10 n’admet pas de telle décomposition. Supposons que c’est P1 .
Notons de plus que (P ) (P1 ). Comme pour A, on peut écrire P1 = P2 P20
avec P2 et P20 des polynômes non constants, P2 n’a pas de telle décomposition
et (P1 ) (P2 ). On construit ainsiSune suite P0 = A, P1 , ... ∈ K[X] telle que
(Pi ) (Pi+1 ), ∀i ≥ 0. Soit I = i≥0 (Pi ). Clairement, I est un idéal de K[X]
puisque la suite (Pi )i≥0 est strictement croissante. Donc il existe D ∈ K[X] tel
que I = (D). En particulier, il existe i0 ∈ N tel que D ∈ (Pi0 ). Ainsi,
(D) ⊆ (Pi0 ) (Pi0 +1 ) ⊆ (D);
ce qui est absurde.
i=n
Y i=m
Y
 Unicité de la décomposition. Supposons que A = λ Piαi =λ 0
qiβi . En ra-
i=1 i=1
joutons des p0i et qi0 , on peut supposer que m = n et Pi = qi pour tout 1 ≤ i ≤ n.
Supposons qu’il existe Y i, 1 ≤ i ≤ Y n, tel que αi 6= βi . On peut supposer que
αi −βi αj 0 β
αi > βi . On a λPi Pj = λ pj j . Ainsi, Pi divise le premier membre,
j6=i j6=i
et par suite Pi divise le deuxième membre ; ce qui est absurde puisque pi est pre-
mier avec chaque Pj , j 6= i, il est alors premier avec leur produit. La preuve est
alors complète. 
Remarque 3.2.15 (Calcul pratique du pgcd et du ppcm).
i=n
Y i=n
Y
1) Si A = λ αi
Pi et B = λ 0
Piβi avec les Pi , 1 ≤ i ≤ n, sont des polynômes
i=1 i=1
unitaires, irréductibles et non associés deux à deux, alors
i=n
Y i=n
Y
min(αi ,βi ) max(αi ,βi )
A∧B = Pi et A ∨ B = Pi .
i=1 i=1

2) Algorithme d’Euclide. Si A = BQ+R avec d R < d◦ B, alors A∧B = B ∧R. En


effet, si D = A∧B, écrivons D = AU +BV et notons que D = (U Q+V )B+U R.


De plus D est unitaire, D divise A et D divise R = A − BQ ; ce qui implique que
B ∧ R = D.
Et en itérons ce procédé, comme dans le cas de Z, le pgcd de A et B est le dernier
reste non nul normalisé dans la suite des divisions euclidiennes successives.
3) Soient A, B ∈ K[X] \ {0}. Alors il existe µ ∈ K ∗ tel que et
AB = µ(A ∧ B)(A ∨ B),
c-à-d., (A ∧ B)(A ∨ B) est le polynôme normalisé de AB. Ainsi, du calcul de
A ∧ B on peut en déduire celui de A ∨ B.
Exercice 3.2.16 Soient A = X 3 + X 2 − X − 1 et B = X 4 − X 3 − X − 1.
1) Calculer, par l’algorithme d’Euclide, D = pgcd(A, B), et en déduire U, V ∈
R[X] tels que D = AU + BV .
2) Déterminer ppcm(A, B).

Mohamed BENDAOUD 11
Chapitre 3 3.3. Dérivation et racines des polynômes

3.3 Dérivation et racines des polynômes


k=n
X
Notation. Soient P = ak X k ∈ K[X] et Q ∈ K[X]. On note par
k=0
k=n
X
P (Q) := ak Qk .
k=0
Avec cette notation, on a :
1) P (X) = P .
k=n
X
2) ∀λ ∈ K : P (λ) = ak λ k .
k=0
La fonction λ 7→ P (λ) définie de K vers K s’appelle la fonction polynômiale associée à
P.

Définition 3.3.1 Soient P ∈ K[X] et a ∈ K. On dit que a est une racine (ou zéro) de P
si P (a) = 0.

Proposition 3.3.2 P ∈ K[X] et a ∈ K.


1) a est une racine de P ⇐⇒ ∃Q ∈ K[X] : P = (X − a)Q.
2) Si P 6= 0 et a est une racine de P , alors il existe m ∈ N et Q ∈ K[X] uniques tels
que P = (X − a)m Q avec Q(a) 6= 0 et 1 ≤ m ≤ d◦ P .
L’unique entier m s’appelle la multiplicité (ou l’ordre) de a. On dit que a est une
racine simple (resp., multiple) de P si m = 1 (resp., m ≥ 2).

Preuve. 1) Ecrivons P = (X − a)Q + R avec d◦ R < d◦ (X − a) = 1. On a d◦ R ≤ 0 et


R ∈ K. De plus, le fait que 0 = P (a) = R entraine P = (X − a)Q comme désiré.
2) Existence de m. Soit A = {k ∈ N : P = (X − a)k Qk , Qk ∈ K[X]}. D’après 1),
A 6= ∅. De plus A est majorée puisque pour tout k ∈ A, on a

k + d◦ Qk = d◦ (X − a)k Qk = d◦ P ;

ce qui entraine que k ≤ d◦ P . Donc A admet un plus grand élément, notons le m. Soit
alors Qm ∈ K[X] tel que P = (X − a)m Qm . On a Qm (a) 6= 0. Car sinon, Qm s’écrit
sous la forme P = (X − a)Qm+1 , et par suite P = (X − a)m+1 Qm+1 et m + 1 ∈ A ; ce
qui contredit que m est le plus grand élément de A.
Unicité de m. Si P = (X − a)m Q = (X − a)m1 Q1 avec Q1 (a) 6= 0 et 1 ≤ m1 ≤ d◦ P ,
alors m1 = m. Car sinon, si par exemple m1 < m, alors

P = (X − a)m1 (X − a)m−m1 Q = (X − a)m1 Q1 ;

ce qui implique que Q1 = (X − a)m−m1 Q et Q1 (a) = 0. Ainsi, m = m1 et Q = Q1 ; ce


qui achève la preuve. 

Corollaire 3.3.3 Soit P ∈ K[X].

Mohamed BENDAOUD 12
Chapitre 3 3.3. Dérivation et racines des polynômes

1) Si P 6= 0 et a1 , a2 , ..., ak sont des racines de P de multiplicité m1 , m2 , ..., mk


respectivement, alors P s’écrit sous la forme

P = (X − a1 )m1 (X − a2 )m2 ...(X − ak )mk Q

avec Q ∈ K[X] et Q(ai ) 6= 0 pour tout 1 ≤ i ≤ n.


En particulier, m1 + m2 + ... + mk ≤ d◦ P .
2) Si d◦ P < n et P admet au moins n racines distinctes, alors P = 0.

Preuve. L’assertion 1) est une simple conséquence de la proposition précédente. Tandis


que la deuxième assertion se découle du fait que si P 6= 0, on aura, d’après 1),

n ≤ m1 + m2 + ... + mn ≤ d◦ P < n;

ce qui est absurde. 


k=n
X
Définition 3.3.4 Soit P = ak X k ∈ K[X]. On appelle le polynôme dérivé de P ,
k=0
k=n
X
le polynôme P 0 = kak X k−1 . On définit par récurrence P (k+1) = (P (k) )0 pour tout
k=1
k ≥ 1, et on convient que P (0) = P .

Les propriétés suivantes sont faciles à vérifier.

Proposition 3.3.5 Soient P, Q ∈ K[X].


i=k
X
1) (P + Q) (k)
=P (k)
+Q(k) (k)
et (P Q) = P (i) Q(k−i) .
i=0
2) (P (Q))0 = Q0 × P 0 (Q).

Preuve. A faire en exercice. 

Théorème 3.3.6 (Formule de Taylor)


i=n
X
Soit P = ak X k ∈ K[X] avec an 6= 0, et soit a ∈ K. Alors il existe α0 , α1 , ..., αn ∈ K
i=0
P (k) (a)
uniques tels que P = α0 + α1 (X − a) + ... + αn (X − a)n avec αk = pour tout
k!
k ∈ {1, 2, ..., n}.

Preuve. Raisonnant par récurrence sur d◦ P = n. Pour n = 0, on pose α0 = a0 =


a0 (X − a)0 ; et la propriété est vérfiée.
Supposons que la propriété est vraie pour tout polynôme de degré < n = d◦ P . On a
P (n) (a) = n!an . Posons

Q = P − an (X − an )n = a00 + a01 (X − a) + ... + a0n−1 (X − a)n−1 .

L’hypothèse de récurrence appliqué à Q entraine que Q s’écrit sous la forme

Q = α0 + α1 (X − a) + ... + αn−1 (X − a)n−1

Mohamed BENDAOUD 13
Chapitre 3 3.3. Dérivation et racines des polynômes

Q(k) (a)
avec αk = , ∀k ∈ {1, 2, ..., n − 1}. D’autre part,
k!
Q(k) = P (k) − n(n − 1)...(n − k + 1)an (X − a)n−k , ∀k ∈ {1, 2, ..., n − 1}.

Ainsi, Q(k) (a) = P (k) (a) pour tout ∀k ∈ {1, 2, ..., n − 1}, et par suite

P = Q + an (X − an )n = α0 + α1 (X − a) + ... + αn (X − a)n

P (n) (a) P (k) (a)


avec αn = an = et αk = pour tout k ∈ {1, 2, ..., n − 1}.
n! k!
Une simple récurrence entraine l’unicité des αk , k ∈ {1, 2, ..., n − 1}, et la preuve est
alors complète. 

Corollaire 3.3.7 Soit P ∈ K[X] et a ∈ K. Alors a est une racine de P de caractéristique


m si et seulement si P (a) = P 0 (a) = ... = P m−1 (a) = 0 et P m (a) 6= 0.

Preuve. D’après le théorème ci-dessus, P s’écrit sous la forme

P = α0 + α1 (X − a) + ... + αn (X − a)n

P (k) (a)
avec αk = pour tout k ∈ {1, 2, ..., n}.
k!
Si P (a) = P 0 (a) = ... = P m−1 (a) = 0 et P m (a) 6= 0, alors

P = αm (X − a)m + ... + αn (X − a)n


= (X − a)m [αm + αm+1 (X − a) + ... + αn (X − a)n−m ]

avec Q(a) = αm 6= 0.
Inversement, si a est une racine de P de caractéristique m, écrivons alors P sous la
forme P = (X − a)m Q avec Q(a) 6= 0. D’après le Théorème 3.3.6, les polynômes P et
0 0
Q s’écrivent P = α0 + α1 (X − a) + ... + αn (X − a)n et Q = αm + αm+1 (X − a) + ... +
(k) (k)
P (a) Q (a)
αn0 (X − a)n−m avec αk = , 0 ≤ k ≤ n, et αk0 = , 0 ≤ k ≤ n − m. Ainsi,
k! k!
0 0
P = αm (X − a)n + αm+1 (X − a)(X − a)n+1 + ... + αn0 (X − a)n ,

et par l’unicité des coefficients dans la formule de Taylor, on aura

P (m) (a) 0
α0 = α1 = ... = αm−1 = 0 et αm = = αm = Q(a) 6= 0;
m!
ce qui montre que P (k) (a) = 0 pour tout 0 ≤ k ≤ m − 1 et P (m) (a) 6= 0. 

Définition 3.3.8 On dit qu’un polynôme P ∈ K[X] est scindé sur K s’il s’écrit sous la
forme
P = λ(X − a1 )m1 (X − a2 )m2 ...(X − ak )mk
avec λ, ai , mi ∈ K, 1 ≤ i ≤ k.
Si tout polynôme de K[X] est scindé sur K, on dit que K est algebriquement clos.

Mohamed BENDAOUD 14
Chapitre 3 3.4. Etude de R[X] et de C[X]

Exemple 3.3.9 R n’est pas algébriquement clos puisque X 2 + 1 n’est pas scindé sur R.

Proposition 3.3.10 (Relations entre coefficients et racines)


k=n
X
Soit P = ak X k un polynôme scindé sur K et x1 , x2 , ..., xn les zéros de P (non né-
k=1
k=n
Y
cessairement distincts deux à deux) de sorte que P = an (X − xk ). Notons σk =
X k=1
xi1 xi2 ...xin , 1 ≤ k ≤ n, les fonctions symétriques élémentaires de x1 , x2 , ..., xn .
1≤i1 <i2 <...<ik ≤n
an−k
Alors σk = (−1)k , ∀k ∈ {1, 2, ..., n}.
an

Preuve. Il suffit de développer et d’identifier les coefficients dans l’égalité


k=n
Y
an (X − xk ) = a0 + a1 X + ... + an X n . 
k=1

Exemple 3.3.11 Pour n = 2 et P = aX 2 + bX + c ∈ R[X] avec a 6= 0, il est bien connu


que si x1 et x2 sont des racines de P alors P = a(x − x1 )(x − x2 ), le produit des deux
b c
racines est σ1 = x1 x2 = − et leur somme est σ2 = x1 + x2 = .
a a

3.4 Etude de R[X] et de C[X]


Théorème 3.4.1 (Théorème de d’Alembert)
Tout polynôme non constant dans C[X] admet au moins une racine dans C.

Ce théorème possède des démonstrations courtes, mais utilisant des outils mathéma-
tiques sophistiqués hors programme. Grâce à ce théorème, on déduit la forme des poly-
nômes irréductibles de R[X] et de C[X].

Proposition 3.4.2 (Décomposition primaire dans C[X])


1) Les seuls polynômes irréductibles de C[X] sont les polynômes de degré 1.
2) Tout polynôme dans C[X] est scindé sur C, c-à-d., C est algébriquement clos.

Preuve. 1) Soit P un polynôme irréductible de C[X]. Clairement, d◦ P ≥ 1. Si on suppose


que d◦ P ≥ 2, P admettrait une racine α et serait donc divisible par X −α ; ce qui contredit
l’hypothèse. Donc d◦ P = 1. Et comme tout polynôme de degré 1 est irréductible par
définition, l’assertion 1) est alors prouvée.
2) Est une conséquence immédiate du Théorème 3.2.14 et du Théorème 3.4.1. 

Proposition 3.4.3 (Décomposition primaire dans R[X])


1) Les seuls polynômes irréductibles de R[X] sont les polynômes de degré 1 et les
trinômes de degré 2 à discriminant négatif.

Mohamed BENDAOUD 15
Chapitre 3 3.5. Décomposition en éléments simples d’une fraction rationnelle

2) Tout polynôme P ∈ R[X] se factorise sous la forme


Y Y
P =λ (X − ai )αi (X 2 + bjX + cj )βj
1≤i≤n 1≤j≤m

avec m, n, αi , βj ∈ N, λ, ai , bj , cj ∈ R et 4j = b2j − 4cj < 0 pour tous 1 ≤ i ≤ n


et 1 ≤ j ≤ m.

Preuve. Soit P ∈ R[X] un polynôme irréductible. Etant donné P ∈ C[X], d’après le


Théorème 3.4.1, P admet une racine α = a + ib ∈ C \ R. Notons que α = a − ib est aussi
k=n
X
une racine de P . En effet, si P = ak X k avec ak ∈ R, 1 ≤ k ≤ n, alors
k=1

k=n
X k=n
X
k
0 = P (α) = ak α ⇐⇒ ak (α)k = 0 ⇐⇒ P (α) = 0.
k=1 k=1

Ainsi, A = (X − α)(X − α) divise P dans C[X]. Par suite A divise P dans R[X] puisque
A = X 2 − 2Re(α)X + |α| ∈ R[X]. Or P est irréductible dans R[X], donc P = λA avec
λ ∈ R∗ et P est un trinôme de degré 2 à discriminant

4 = Re(α)2 − 4|α|2 = −4Im(α)2 < 0.

Réciproquement, tout polynôme de degré 1 est irréductible. De plus, si P = aX 2 +


bX +c avec 4 = b2 −4ac < 0, alors P est irréductible. Car sinon, il existe D = αX +β ∈
R[X] avec α 6= 0 tel que D divise P . Or D( −β α
) = 0. Donc P ( −β
α
) = 0 et P admet une
racine réelle, ce qui contredit 4 < 0. Ainsi, la première assertion est prouvée.
Et puisque la deuxième assertion est une conséquence de 1) et du Théorème 3.2.14, la
preuve est alors complète. 

Exemple 3.4.4 Décomposons dans R[X] le polynôme

P = 2X 3 + 13X 2 + 24X + 9

sachant qu’il admet une racine multiple.


Si α est une racine multiple de P , alors P (α) = P 0 (α) = 0 ; ce qui entraine que
α = −3. Et comme P 00 (−3) 6= 0, on en déduit que −3 est une racine double de P et
P = (X + 3)2 (2X + 1).

3.5 Décomposition en éléments simples d’une fraction ra-


tionnelle
L’objectif de ce paragrahe est de décomposer une fraction rationnelle en une somme
de fractions rationnelles plus simples en vue, entre autres, du calcul des primitives de cette
fraction rationnelle et du développement en série entière de cette fraction rationnelle.

Mohamed BENDAOUD 16
Chapitre 3 3.5. Décomposition en éléments simples d’une fraction rationnelle

Définition 3.5.1 Soit R la relation d’équivalence définie sur l’ensemble E := K[X] ×


K[X] \ {0} par

∀(P, Q), (P 0 , Q0 ) ∈ E; (P, Q)R(P 0 , Q0 ) ⇐⇒ P Q0 = QP 0 .

L’ensemble quotient E/R s’appelle le corps des fractions rationnelles à une indéterminée
à coefficients dans K (ou le corps des fractions de l’anneau K[X]) et se note K(X).

P
Notation. Pour (P, Q) ∈ E, on note par la classe de (P, Q) modulo la relation R.
Q
Ainsi, pour tous (P, Q), (P 0 , Q0 ) ∈ E on a :

P P0
= 0 ⇐⇒ P Q0 = QP 0 .
Q Q
P
On vérifie aisément que K(X) = { : P ∈ K[X], Q ∈ K[X] \ {0}} muni des lois
Q
internes "+" et "." définies par :
P P0 P Q0 + QP 0 P P0 PP0
+ 0 = et . =
Q Q QQ0 Q Q0 QQ0
pour tous P, P 0 ∈ K[X] et Q, Q ∈ K[X] \ {0}, est un corps commutatif unitaire.

P
Définition 3.5.2 Foit F = ∈ K(X) une fraction rationnelle. On appelle :
Q
P P0 P P0
— représentation irréductible de toute fraction rationnelle 0 telle que = 0
Q Q Q Q
et P 0 ∧ Q0 = 1 ;
— zéro de F toute racine de P ;
— pôle de F toute racine de Q.

Théorème 3.5.3 (Décomposition en éléments simples)


A
Soit F = α1 α2 ∈ K(X) avec A ∈ K[X], αi ∈ N∗ et les Pi , 1 ≤ i ≤ n, sont des
P1 P2 ...Pnαn
polynômes irréductibles non associés daux à deux. Alors F s’écrit d’une manière unique
sous la forme
i=n j=α
X Xi Ai,j
F =E+ ( );
i=1 j=1
Pij
où E, Ai,j ∈ K[X] avec d◦ Ai,j < d◦ Pi pour tout i ∈ {1, 2, ..., n} et j ∈ {1, 2, ..., αi }.
Cette forme s’appelle la décomposition en éléments simples de la fraction rationnelle F
dans K(X), et E s’appelle la partie entière de F .

Preuve. On divise la preuve de ce théorème en plusieurs étapes.

A
Etape 1. Soit F = B ∈ K(X) une fraction rationnelle. Alors il existe un couple (E, R) ∈
K[X] unique tel que
R
F =E+
B

Mohamed BENDAOUD 17
Chapitre 3 3.5. Décomposition en éléments simples d’une fraction rationnelle

et d◦ R < d◦ B.

En effet, l’existence d’un tel couple est assuré par la division euclidienne de A par B.
0
De plus si F = E 0 + RB et d◦ R0 < d◦ B, alors d◦ (E − E 0 ) ≤ max(d◦ R, d◦ R0 ) − d◦ B < 0.
Ainsi, E = E 0 et par suit R = R0 ; ce qui entraine l’unicité d’un tel couple.

Etape 2. Soient n ≥ 1 et F = S1 S2A...Sn ∈ K(X) une fraction rationnelle telle que les Sk ,
1 ≤ k ≤ n, sont premiers entre eux deux à deux. Alors il existe A1 , A2 , ..., An ∈ K[X]
tels que
A A1 An
= + ... + .
S1 S2 ...Sn S1 Sn
Raisonnons par récurrence. La propriété est claire pour le cas n = 1. Pour n = 2,
puisque S1 et S2 sont premiers entre eux, il existe, d’après l’identité de Bezout, U, V ∈
K[X] tels que S1 U + S2 V = 1. Ainsi,

A AU AV
= +
S1 S2 S1 S2
et la propriété est vraie pour n = 2.
Supposons que la propriété est vraie pour un entier n ≥ 1, et soit S1 , S2 , ..., Sn+1 ∈
K[X] premiers entre deux à deux. Alors S1 S2 ...Sn et Sn+1 sont premiers entre eux, et
d’après l’étude du cas n = 2, il existe C, An+1 ∈ K[X] tels que

A C An+1
= + ;
S1 S2 ...Sn+1 S1 ...Sn Sn+1
et le résultat s’en découle de l’hypothèse du récurrence.

Etape 3. Soient n ≥ 1 et F = S1 S2A...Sn ∈ K(X) une fraction rationnelle telle que les Sk ,
1 ≤ k ≤ n, sont premiers entre eux deux à deux. Alors il existe A1 , A2 , ..., An ∈ K[X]
uniques tels que
A A1 An
=E+ + ... +
S1 S2 ...Sn S1 Sn
◦ ◦
avec d Ak < d Sk pour tout 1 ≤ k ≤ n.

D’après l’Etape 2, il existe A1 , A2 , ..., An ∈ K[X] tels que

A A1 An
= + ... + .
S1 S2 ...Sn S1 Sn

De plus, d’après l’Etape 1, il existe EK , Rk ∈ K[X], 1 ≤ k ≤ n tels que ASkk = Ek + RSkk .


Ainsi, en posant E = E1 + ... + En , on obtient l’existence désirée.
Montrons l’unicité par récurrence. Le cas n = 1 est une conséquence de l’Etape 1.
Pour le cas n = 2, supposons que

A A1 A2 A0 A0
=E+ + = E0 + 1 + 2
S1 S2 S1 S2 S1 S2

Mohamed BENDAOUD 18
Chapitre 3 3.5. Décomposition en éléments simples d’une fraction rationnelle

avec d◦ Ak < d◦ Sk et d◦ A0k < d◦ Sk pour tout 1 ≤ k ≤ 2. On a

S1 (A2 − A02 ) = S1 S2 (E 0 − E) + S2 (A01 − A1 ).

En particulier, d’après le théorème de Gauss, S1 divise A01 − A1 . Or d◦ (A01 − A1 ) < d◦ S1 ,


donc A01 = A1 . De même A02 = A2 , et par suite E1 = E2 .
Supposons que la propriété est vraie pour un n ≥ 1. Supposons
n+1 n+1
A X Ak 0
X A0k
=E+ =E +
S1 S2 ...Sn+1 k=1
Sk k=1
Sk


avec dP Ak < d◦QSk et d◦ A0k < d◦ Sk pour P
tout 1 ≤ kQ≤ n + 1. En posant T = S1 S2 ...Sn ,
B = k=1 (Ak ( 1≤k≤n,j6=k Sk )) et C = nk=1 (A0k ( 1≤k≤n,j6=k Sk )) , on a T et Sn+1 sont
n

premiers entre eux, et

A B An+1 C A0
=E+ + = E 0 + + n+1 .
T Sn+1 T Sn+1 T Sn+1

L’étude du cas n = 2 entraine que E = E 0 , C = B et An+1 = A0n+1 . Par conséquent,


d’après l’hypothèse de récurrence, Ak = A0k pour tout 1 ≤ k ≤ n.

Etape 4. Soient α ∈ N∗ et SAα ∈ K(X) une fraction rationnelle telle que d◦ S ≥ 1. Alors
il existe A1 , A2 , ..., An ∈ K[X] uniques tels que

A A1 Aα
α
=E+ + ... + α
S S S
avec d◦ Ak < d◦ S pour tout 1 ≤ k ≤ α.

Existence. Pour n = 1, le résultat est une conséquence de l’Etape 1. Supposons que la


propriété est vraie pour un α ∈ N∗ . Alors il existe E1 , A2 , ..., Aα+1 ∈ K[X] tels que

A A2 Aα+1
α
= E1 + + ... + α
S S S
avec d◦ Ak+1 < d◦ S pour tout 1 ≤ k ≤ α. D’après l’Etape 1, il existe E, A1 ∈ K[X] tels
que, ES1 = E + AS1 avec d◦ A1 < d◦ S. Ainsi,

A A1 Aα
=E+ + ... + α+1
S α+1 S S
avec d◦ Ak < d◦ S pour tout 1 ≤ k ≤ α + 1.

Unicité. Pour n = 1, le résultat est une conséquence de l’Etape 1. Supposons que la


propriété est vraie pour un α ∈ N∗ . Soient E, A1 , ..., Aα+1 , E 0 , A01 , ..., A0α+1 ∈ K[X] tels
que
A A1 Aα+1 0 A01 A0α+1
= E + + ... + = E + + ... +
Sα S S α+1 S S α+1
avec d◦ Ak , d◦ A0k < d◦ S pour tout 1 ≤ k ≤ α + 1. En multipliant par S α , on aura

Mohamed BENDAOUD 19
Chapitre 3 3.5. Décomposition en éléments simples d’une fraction rationnelle

A A1 α−1 Aα+1
= (ES α + Aα + Aα−1 S + ... + )+
S S S
0 α−1 A0α+1
0 α 0 0 A1
= (E S + Aα + Aα−1 S + ... + )+ .
S S
Ainsi, d’après l’Etape 1, A0α+1 = Aα+1 , et par suite, par l’hypothèdse de récurrence,
A0k = Ak pour tout 1 ≤ k ≤ α et E 0 = E.
En combinant les quatre étapes, le résultat du théorème s’en découle, et la preuve est
alors complète. 

Dans la pratique, pour décomposer une fraction rationnelle F , on détermine les pôles
de F ainsi que leurs multiplicités. En suite, on écrit la forme a priori de la décomposition
de F et on utilise la méthode de multiplication et remplacement, ou la division suivant les
puissances croissantes, ou on utilise par fois la dérivée.

Exemple 3.5.4
1) Dans R[X] on a :

2X(X − 2)(X 2 + X + 1) + 2X 2 + 3X 2 1
2
= 2X + + 2 .
(X − 2)(X + X + 1) X −2 X +X +1

2) Dans C[X] on a :

3X 3 3i 3
= − − .
(X − 1)(X 2 + 1) 2(X − 1) 2(X − i) 2(X + i)

Mohamed BENDAOUD 20
Bibliographie

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