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LA DECOLONISATION AU

MAGHREB : L’ALGERIE
INTRODUCTION

La politique coloniale de la France en Algérie était


particulière. Le pays, considéré comme une partie
intégrante de la France, était sous l’autorité d’un
gouverneur général relevant lui-même du ministre de
l’intérieur. L’Algérie était donc considérée comme un
département français. Malgré le statut de 1947 créant une
assemblée à deux collèges (60 membres pour la minorité
française et 60 autres pour les citoyens musulmans),
l’évolution politique de l’Algérie était lente.
L’Algérie était devenu progressivement un terrain
d’affrontement entre les masses algériennes (9 millions) de
plus en plus pauvres et les européens (1 million) qui
dominait la vie économique et politique. Pour répondre à
l’immobilisation de la France, les nationalistes algériens
prennent les armes à partir de 1954.

I/ LES ORIGINES DE LA GUERRE D’ALGERIE

L’Algérie est une colonie pratiquement soumise à la


métropole. Formée de trois départements (Alger,
Constantine, Oran) rattachés au ministère de l’intérieur,
elle est dirigée par un gouverneur général. Le statut, voté
en 1947, est inégalitaire : il prévoit l’élection d’une
assemblée algérienne de 120 membres aux prérogatives
très restreintes : les 9 millions de musulmans, de statut
« coranique » élisent le même nombre de députés que le
million de citoyens français. De surcroit, les élections de
1948 ont été notoirement truquées afin de faire élire les
représentants de l’administration dans le second collège
(musulmans).
La crise du nationalisme algérienne prive la France
d’interlocuteurs représentatifs. Le nationalisme algérien est
formé de trois courants : un courant traditionaliste, celui
des Oulèmas, qui résiste à l’intégration française en
s’appuyant sur l’Islam ; un courant de moderniste,
bourgeois et intellectuels réformistes, dont le principal chef
est le pharmacien Ferhat Abbas et qui entend procéder par
la voie légale ; le courant des révolutionnaires, dirigé par
Messali Hadj, qui s’est doté en 1947 d’un groupe d’action
directe, l’Organisation Spéciale (O.S), dirigée par Ben Bella.
Tous ces mouvements sont soumis à une intense
répression, privés de perspective légale, et connaissent
déclin, crises et scissions.
Or, l’Algérie de 1954 connaît de très graves problèmes. Ils
sont d’abord d’ordre économique : il existe une agriculture
moderne qui exporte ses produits et un industrie naissante,
mais elles sont aux mains des Européens, alors que les
musulmans pratiquent une agriculture archaïque et
routinière et connaissent le chômage ou les emplois
précaires. Les problèmes sont aussi sociaux, liés au
caractère inégalitaire de la société. Les 984 000 Européens
(dont 80% nés en Algérie) sont en grande majorité des
citadins, ouvriers ou membres de la classe moyenne, au
niveau de vie assez médiocre, mais hostiles à toute réforme
qui donnerait l’égalité aux musulmans. Ceux-ci sont
8 400 000 et connaissent une véritable explosion
démographique. Si deux millions d’entre eux ont un niveau
de vie proche de celui des Européens, les autres
connaissent la pauvreté, une scolarisation et un
encadrement administratifs insuffisants.

II/L’EVOLUTION DU NATIONALISME ALGERIEN

1. AVANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE

Le nationalisme algérien était divisé en trois tendances :


 Révolutionnaire : elle est née en France en 1926 et
s’est implantée de Algérie à partir de 1936. Son
leader Messali Hadj avait créé un journal « l’Etoile
Nord-africaine », puis le Parti du Peuple Algérien
(PPA). Cette tendance réclamait l’indépendance de
l’Algérie.
 Assimilationniste : elle regroupe les intellectuels
occidentalisés comme Ferhat Abbas et Ben Bella
Djelloul. Ils ne revendiquent pas l’indépendance mais
une complète égalité avec les français.
 Réformiste ou mouvement des Oulémas : elle est
créée en 1936 par le Cheikh Ben Badis. Elle refuse
l’assimilation. Son action s’exerce dans les
mosquées, la presse et l’enseignement, la devise du
mouvement est « l’Islam est ma religion, l’Algérie est
ma patrie et l’Arabe est ma langue ».
Cette division du nationalisme algérien prive la France d’un
interlocuteur représentatif. Cependant à partir de 1936, le
front populaire au pouvoir en France décide d’accorder la
citoyenneté française à une élite algérienne de 20 000 à
25 000 personnes, mais ce projet va échouer à cause de
l’hostilité des français d’Algérie.
2.PENDANT LE SECONDE GUERRE MONDIALE

L’élite algérienne dans sa majorité se range derrière Ferhat


Abbas qui apporte son soutien aux forces françaises libres
du général De Gaulle. Le mépris du régime de Vichy à
l’égard des populations autochtones accélère la prise de
conscience des nationalistes algériens qui publient le 27
Mars 1943 le Manifeste du Peuple Algérien. Ils réclament le
droit du peuple algérien à l’autodétermination, une
constitution pour l’Algérie et la participation des Algériens à
l’assimilation coloniale. Après la publication de ce
manifeste, Ferhat Abbas sera emprisonné. Le PPA organise
des manifestations pour exiger la libération de son leader
Messali Hadji. Le 08 Mai 1945, 21 français sont abattus et le
mouvement se poursuit à travers le pays. Ces émeutes sont
réprimées de manière impitoyable (le bilan fait état de
plusieurs centaines de morts), cet événement douloureux
renforce l’opposition entre les deux communautés alors
que la France était plutôt préoccupée par sa
reconstruction.
3.A LA FIN DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE

L’après-guerre sera marquée par le regroupement du


nationalisme algérien en deux tendances :
 L’Union Démocratique du Manifeste Algérien
(UDMA) fondée en 1946 par Ferhat Abbas qui
préconise une république algérienne associée à la
France.
 Le Mouvement pour le Triomphe des Libertés
Démographiques (MTLD), le nouveau parti de
Messali Hadj est plus engagé et mieux structuré. A
l’ombre de ce parti est créée en 1947
l’Organisation Spéciale (O.S), chargée de préparer
la résistance avec Ahmed Ben Bella comme
président.

En 1950, l’Organisation Spéciale est démantelée et Messali


Hadji est assigné en résidence surveillée en France. Le
MTLD est affaibli par des divisions internes. L’une de ses
tendances crée le Comité Révolutionnaire de l’Unité
d’Action (CRUA) qui fixe la date d’insurrection au 1er
Novembre 1954 en rapport avec les maquisards de
Belkacem Kim.

III/ GUERRE D’ALGERIE (1954-1962)

1. NAISSANCE ET EXTENSION DU CONFLIT

L’insurrection commence comme prévue le 1er Novembre


1954, les radicaux du CRUA (Aït Ahmed, Belkacem Kim,
Mouhamed Boudaf…) font exploser 70 bombes sur des
symboles de la colonisation française. Le même jour, le
nationalisme algérien est restructuré autour du Front de
Libération National (FLN) et de sa branche armée l’ALN
(Armée de Libération Nationale).
Les français réagissent à l’insurrection par la fermeté tout
en faisant preuve d’une volonté de réformes. C’est ainsi
que le gouverneur général Jacques Soustelle propose le
statut de 1947 qui prévoyait une politique d’intégration. La
guerre commence véritablement avec les émeutes de
Constantine (20-21 Août 1955). Des français sont
massacrés ; l’armée et la population française de la région
ripostent par une chasse meurtrière aux musulmans qui fait
12 000 morts.
En Janvier 1956, Guy Mollet arrive au pouvoir en France et
se fixe comme objectif d’écraser le FLN, son ministre
résidant en Algérie Robert Lacoste mobilise 400 000
hommes pour faire la guerre et la propagande. Pour lutter
contre le terrorisme urbain à Alger, le général Massu chef
de la 10ème division des parachutistes mène une répression
sanglante. Le FLN est complétement brisé à la bataille
d’Alger de 1957, mais la France se trouve dans
l’impossibilité d’écraser complétement la résistance
algérienne.
Sur le plan intérieur, la guerre d’Algérie est un facteur de
déstabilisation économique et sociale. C’est un gouffre
financier qui relance l’inflation, creuse le déficit budgétaire,
détériore la balance commerciale, épuise les ressources en
devise. Dès 1957, il faut freiner l’expansion et renoncer aux
dépenses sociales. Par ailleurs, le conflit algérien provoque
une profonde crise morale : des intellectuels, des étudiants,
des jeunes, des représentants des églises réclament la fin
d’une guerre conduite contre les aspirations nationales
d’un peuple et proteste contre l’utilisation de la torture.
En fin, la guerre d’Algérie fait éclater la majorité de gauche,
victorieuse aux élections de 1956, et paralyse le pouvoir.
Une partie de la majorité rejette en effet la politique du
gouvernement Guy Mollet. Les ministères qui succèdent en
1957-1958 cherchent une solution politique à la crise
algérienne, mais sans oser le dire, car ils manquent
d’autorité pour l’imposer au Parlement, aux Européens
d’Algérie et à l’armée. Le pouvoir est paralysé et la guerre
d’Algérie débouche sur une crise de régime.
2.LA FRANCE DANS UNE CRISE POLITIQUE
a) RENFORCEMENT DES ADVERSAIRES DES REGIMES

Des partisans de l’Algérie française se rassemble dans


« l’Union pour le salut et le renouveau de l’Algérie
française », autour du gaulliste Jacques Soustelle. Ils sont
issus de tous les partis et craignent que le régime ne finisse
par accepter de négocier avec le FLN.
Mais, surtout, l’extrême-droite trouve une nouvelle
audience essentiellement en Algérie. Elle entend s’opposer
à toute négociation en installant à Paris un pouvoir qui
laisserait les coudés franches aux militaires et ferait taire
les intellectuels. Réduis en métropole à des groupuscules
fascisants comme « Jeune Nation », ce courant est
beaucoup plus puissant en Algérie, dans la population
européenne (les « Pieds Noirs »), et dans l’armée, où
certains officiers rêvent de remporter la victoire en
employant contre le FLN les méthodes de guerres
révolutionnaires qui ont vaincu les français au Vietnam ; ils
ourdissent des complots pour renverser le régime. Des
partisans du général De Gaulle attendent leur heure. Depuis
1953, le général De Gaulle a mis en sommeil le RPF
(Rassemblement pour le Peuple Français) et s’est retiré de
la vie publique. Mais la crise du régime le confirme dans ses
analyses et on commence à prononcer son nom comme
celui d’un recours possible. Ses partisans suivent avec
attention l’agitation de l’extrême-droite et les multiples
complots, bien décider, le moment venu à les canaliser
pour obtenir le retour au pouvoirs du général. Quant à lui, il
feint d’ignorer ces préparatifs, bien qu’il soit constamment
tenu au courant.
b) LA CHUTE DE LA IVe REPUBLIQUE
Le 13 Mai 1958, un pouvoir insurrectionnel se met en place
à Alger. L’annonce de la désignation, comme président du
conseil, de MRP (Mouvement Républicain Populaire) Pierre
Pflimlin, partisan d’une solution négociée en Algérie,
provoque une émeute à Alger et, avec une complicité de
l’armée, la prise du Gouvernement général. Dans la
confusion les émeutiers désignent un « Comité de salut
public », à la tête duquel il place le général Massu. Mais
celui-ci déclare demeurer sous les ordres du commandant
en chef de l’Algérie, le général Salan. De son côté, le
gouvernement nomme ce dernier Délégué général, avec
tous les pouvoirs civiles et militaires. Le 15 Mai, poussé par
les gaullistes, le général Salan fait appel au général De
Gaulle.
De Gaulle fait évoluer la crise vers son propre retour au
pouvoir. Après le 13 Mai, le gouvernement, privé
d’autorité, ne pouvant compter sur l’armée ni sur la police,
parait se décomposer. Les français redoutent un
débarquement en métropole des troupes d’Algérie et la
guerre civile qui s’ensuivrait. Dans ces circonstances, le
général De Gaulle, par une série de discours, précipite la
mort du régime agonisant en se présentant comme le
garant des libertés publiques et la seule alternative à la
guerre civile. Le ralliement des principaux chefs de parti,
l’intervention du président de la république René Coty, qui
menace de démissionner si les députés n’acceptent pas le
retour au pouvoir du général De Gaulle, sont décisifs.
Le 1er Juin, l’assemblée nationale investit De Gaulle comme
président du conseil, puis lui vote les pleins pouvoirs et lui
donne le droit de rédiger une nouvelle constitution. La IVe
république est condamnée.
3.LA MARCHE VERS L’INDEPENDANCE (1958-1962)

Le général De Gaulle impose à l’armée et au français


d’Algérie l’indépendance algérienne. Résolu à résoudre de
manière pragmatique le problème algérien, le général De
Gaulle doit tenir compte des circonstances qui vont le
conduire progressivement à l’idée d’indépendance
algérienne : la détermination du FLN qui forme un
gouvernement provisoire de la République algérienne
(GPRA), le désaveu de l’opinion internationale, la lassitude
des français devant un conflit interminable. Une série de
discours jalonne sa propre évolution et prépare
progressivement l’opinion à l’indépendance algérienne.
En Septembre 1958, De Gaulle propose en vain au FLN une
reddition honorable, « la paix des braves ». En Septembre
1959, il franchit une étape décisive en reconnaissant aux
algériens le droit à l’autodétermination. Puis, évoquera
successivement « l’Algérie algérienne », « la République
algérienne », un « Etat algérien souverain ». Les européens
d’Algérie et l’armée qui ont porté De Gaulle au pouvoir, ont
le sentiment d’une trahison et rêvent d’un nouveau 13 Mai
qui le chasserait. En Janvier 1960, les activistes d’Alger
déclenchent une semaine d’émeutes, la « semaine des
barricades ». En Avril 1961, quatre généraux (Challe, Salan,
Jouhaud, Zeller-les deux premiers étant d’anciens
commandants en chef en Algérie) provoque un putsh
militaire qui échoue devant le refus des soldats du
contingent de suivre les officiers rebelles et devant la
fermeté du chef de l’Etat. Désormais, les activistes se
retrouvent dans l’Organisation Armée Secrète (O.A.S) par
une série d’attentats en métropole et en Algérie, celui-ci
s’efforce de rendre impossible tout accord avec le FLN,
puis, une fois celui-ci acquis, d’en empêcher l’application.
Elle tente à diverses reprises d’assassiner le général De
Gaulle : le 22 Août 1962, celui-ci n’échappe à la mort que
de justesse lors de l’attentat du Petit-Clamart, près de Paris.
Les négociations reprennent avec le FLN et aboutissent à la
signature des accords d’Evian le 18 Mars 1962. Ces
négociations prévoient un cessez-le-feu qui prend effet le
19 Mars et un référendum le 1er Juillet 1962 au cours
duquel le peuple algérien se détermine à plus de 90% pour
l’indépendance. Le 03 Juillet 1962, l’indépendance de
l’Algérie est proclamée, 7 000 Pieds Noirs et Harkis doivent
quitter l’Algérie pour la France.

CONCLUSION

Pendant la longue guerre d’indépendance, la conscience


nationale algérienne se renforçait dans le sang et dans la
douleur. C’est au terme de 8 années de luttes armées que
l’Algérie accède à l’indépendance en Juillet 1962. C’est ainsi
que Ben Bella devient le chef du gouvernement. Cette
défaite française, doublée d’une tragédie humaine qui
s’élève à environ 500 000 morts (dont plus de 300 000 de la
population musulmane) a eu un impact positif sur
l’évolution de l’Afrique Noire francophone.

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