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Cours- 02- La méthode de la syntaxe spatiale -1-

(Principes et concepts généraux).


1-La morphologie urbaine :
La morphologie urbaine est l’étude de la forme physique de la ville, le processus de formation
de son tissu et les rapports réciproques entre les éléments (voirie, parcelles, bâtiments) qui le
(le tissu) composent. (Remy, 2004, p.05).

2- La forme urbaine :
La forme urbaine est l’aspect physique de la ville ou l’ensemble des éléments construits qui
s’expriment par des éléments bâti (bâtiments) et non bâti (rue, place, cour, etc.). La forme
urbaine est, souvent, le produit de la superposition de trois systèmes différents tels le système
viaire, le système parcellaire et le système bâti. L’agrégation de ces trois éléments donne
naissance à des formes urbaines ayant des caractères différents (forme dense, continue,
discontinue, monumentale, à l’échelle humaine, etc.).

La forme urbaine a été étudiée sous multiples angles par des géographes, urbanistes,
architectes, etc. qui appartiennent à plusieurs écoles de pensée dont les plus importantes sont
l’école française, l’école italienne et l’école anglaise. Ici nous allons aborder la méthode de la
syntaxe spatiale ou « space syntax » qui fait partie de l’école anglaise.

3-La méthode de la syntaxe spatiale (« Space Syntax ») :


La méthode « space syntax » est une méthode d’analyse spatiale de l’espace architectural et
urbain. Elle est conçue par l’architecte anglais Bill Hillier avec d’autres chercheurs à la fin
des années 1970. C’est une méthode quantitative, c’est-à-dire les résultats de l’analyse de
l’espace architectural et urbain se traduisent par des chiffres en utilisant des techniques qui
font appel à des formules mathématiques.

I-Objectifs de la méthode « space syntax » :

La méthode space syntax a pour objectif la description et la comparaison des systèmes


spatiaux ; et la mise en évidence de la relation entre l’espace architectural et urbain et les
activités sociales et économiques.

Elle a comme objet d’étude l’analyse de l’espace architectural et urbain. Cette analyse
s’appelle « analyse configurationnelle » ou « analyse structurelle ».

II- l’Analyse configurationnelle :

Cette analyse considère les espaces architecturaux et urbains comme des configurations. La
configuration signifie que l’étude de la relation spatiale entre deux espaces architecturaux
(chambre, bureau, dépôt, etc.) ou urbains (rue, place, segment de rue, etc.) doit prendre en
considération toutes les relations entre tous les éléments composant de la structure spatiale à

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étudier (Hillier, 1996, p.01). Cela signifie que la configuration est synonyme d’un système où
tout a une influence sur tout. De plus, pour qu’il soit une configuration, un ensemble des
espaces architecturaux ou urbains doit contenir plus de deux espaces qui composent une
structure fermée.

1 2 3

Fig. 1 : l’ensemble 1 n’est pas une configuration tandis que les ensembles 2
et 3 sont considérés comme des configurations. Source : Houamria, 2021.

Cette configuration est invisible (ou non discursive), c’est-à-dire la structure spatiale des
ensembles architecturaux et urbains est invisible. Dès lors, l’objectif de l’analyse
configrationnelle est de rendre cette structure spatiale visible (ou discursive).

1 2 3 4
Fig. 2 : structure visible et invisible d’un espace architectural et d’un espace urbain :
1) structure visible, 2) structure invisible, 3) structure visible, 4) structure invisible.
Source : Houamria, 2021.

III-La régularité ou « génotype » :

Le concept de régularité se rapport au type de bâti ou du tissu urbain, etc. c’est-à-dire, chaque
type de bâtiments (maison, mosquée, etc.) ou tissus (tissu traditionnel, colonial, moderne, etc.)
a un type de structure invisible malgré l’hétérogénéité de leurs formes physiques. Cette
structure invisible reste stable (ou régulière) malgré le changement continu des conditions
socio-économiques.

Le but de l’analyse configurationnelle est donc de mettre en évidence ces régularités ou


« génotypes » afin de procéder à un classement et à une typologie, des bâtiments et des tissus,
indispensables à la compréhension de l’espace architectural et urbain.

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IV-Les types d’analyse de la méthode space syntax :

L’analyse space syntaxe dispose généralement de cinq types d’analyse qui correspondent à
cinq outils.

A)-L’analyse des graphes:

Le graphe est un ensemble de nœuds et des liens. Le nœud (ou « node ») est un point (cercle,
carré, etc.) qui représente un espace architectural (chambre, bureau, etc.) ; tandis que le lien
(ou « link ») est une ligne qui représente une relation spatiale entre deux espaces voisins.
L’analyse des graphes a pour objectif d’identifier les rapports entre les nœuds en faisant appel
à des concepts divers (connectivité, profondeur, intégration, etc.).

Lien (« link ») Fig.03 : éléments de


composition d’un graphe.
Source : Houamria, 2021.
Nœud (« node »)

B)-L’analyse des graphes de visibilité ou « visibility graphe analysis » (VGA) :

Comme le graphe, cité ci-dessus, le graphe de visibilité ou « Visibility Graph » se compose


des nœuds et des liens. Le nœud dans le graphe de visibilité est représenté généralement par
une forme carrée ; tandis que le lien est une relation visuelle entre deux carrés intervisibles et,
dans la représentation du graphe de visiblilité, il (le lien) est invisible, mais il est pris en
considération pour effectuer des calculs divers des différentes relations visuelles entre les
nœuds (connectivité, intégration, etc.).

Nœud (« node ») Fig.04 : éléments de


composition d’un graphe
de visibilité. Source :
Lien (« link ») Houamria, 2021.

C)- L’analyse de la carte convexe (« Convex Map »):


La carte convexe est le nombre minimal des espaces les plus obèses qui couvrent le système
spatial architectural et urbain. Un espace convexe est un espace dont tous les points qui le
composent sont intervisibles (voir fig.05).
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Nœud
Espace
concave

Espaces
convexes

Lien
Carte convexe
Carte convexe (en rouge)
d’un espace
d’un espace urbain.
architectural

Fig. 5 : espace concave, espace convexe et carte convexe d’un espace architectural et d’un
espace urbain. Source : Houamria, 2021.

La carte convexe se compose des nœuds qui sont les espaces convexes et des liens qui sont les
lignes de séparation de deux espaces convexes mitoyens ayant une connexion spatiale directe.

L’analyse de la carte convexe a pour objectif d’identifier les rapports entre les nœuds en
utilisant des concepts divers (connectivité, profondeur, intégration, etc.). Elle obéit aux
mêmes principes de l’analyse des graphes (cité ci-dessus).

D)-L’analyse de la carte axiale:

La carte axiale est le nombre minimal des axes qui couvrent spatialement et visuellement tous
les points d’un espace architectural ou urbain. Elle se compose des nœuds qui sont les axes et
des liens qui sont les points d’intersection de deux axes (voir fig.06). Dans l’espace urbain, la
carte axiale représente généralement les rues ou chaque rue est considérée comme un espace.
L’analyse de la carte axiale fait appel aux mêmes concepts de l’analyse des graphes (cité ci-
dessus) avec quelques différences ; à titre d’exemple, la longueur des axes n’existe pas dans
l’analyse des graphes tandis qu’elle est présente dans l’analyse de la carte axiale.

Nœud
(« node »)

Lien (« link »)

Fig.6
E)- : la cartede
L’analyse axiale d’un espace
la carte architectural
segmentaire : et d’un espace urbain. Ici le nœud est l’axe et le
lien et l’intersection de deux axes. Source : Houamria, 2021.

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La carte segmentaire est l’ensemble des segments de lignes qui couvrent spatialement et
visuellement tout l’espace architectural ou urbain. C’est-à-dire, elle constitue une carte axiale
brisée. Si l’axe est l’élément de base dans la carte axiale, le segment et l’élément de base dans
la carte segmentaire. La carte segmentaire représente généralement les segments de rue dans
l’espace urbain.

Nœud
(« node »)

Lien
(« link »)

Fig. 7 : la carte segmentaire d’un espace architectural et d’un espace urbain. Ici le nœud est le
segment et le lien est l’intersection de deux segments. Source : Houamria, 2021.

V-Les concepts de la méthode space syntax :

A)- La distance et le mouvement :

Dans la méthode space syntax, le rapport entre le mouvement et l’espace architectural et


urbain repose sur l’idée de distance minimale. C’est-à-dire les gens, en se déplaçant dans le
bâtiment ou dans la ville, se déplacent de tous les points d’origines à tous les points de
destinations en suivant la distance la plus courte (Hillier, 2009, p. 03). Cette dernière est
utilisée dans la méthode space syntax suivant trois concepts de distances telles la distance
métrique, la distance topologique et la distance angulaire (Hillier, 2009, p. 03).

- La distance métrique est la distance en mètre entre deux espaces (entre deux nœuds).
- La distance topologique donne une valeur de 1 s’il y a une relation spatiale ou visuelle (cas
de VGA) entre deux espaces voisins et une valeur de 0 s’il n’y en a pas.
- La distance angulaire est mesurée par la valeur d’angle de changements de directions entre
deux espaces: si le changement de direction est de 90 degrés la distance est égale à 1, s’il est
de 180 degrés la distance est de 2 et si l’angle est égal à 45 degrés la distance est égale à 0.5,
etc. (Turner, 2004, p. 26).
Pour plus de détails, voir le tableau-1-.

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Type de Distance métrique Distance topologique Distance
graphe/carte angulaire
Graphe Au niveau des graphes, les distances métriques et
angulaires ne sont pas utilisées. Distance
topologique.

Graphe de La distance métrique est Ici l’angle de


La distance
visibilité la distance en mètres changement de direction
entre les centres de est entre les centres des topologique est le
deux carrés. deux carrées. nombre des
relations visuelles
entre deux carrés.

Carte Comme le graphe la carte convexe utilise souvent la distance topologique.


convexe Elle obéit aux mêmes principes utilisés au niveau des graphes.

Carte axiale Dans la carte axiale, les distances angulaires et La distance


métriques n’existent pas. topologique entre
l’axe 1 et 2 est égale
à un tandis que la
distance entre l’axe 1
et 3 est égale à deux.

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Carte La distance métrique est La distance angulaire est La distance
segmentaire la distance en mètre entre l’ensemble des angles de topologique est le
les centres de deux changement de direction nombre de
segments. entre deux segments. changements de
direction entre deux
segments.

1 1
1
2 2
3 2
3
3

Tableau-1- : les distances métrique, angulaire et topologique des 5 types d’analyse.


Source : Houamria, 2021.

B) - La connectivité ("Connectivity"):
La connectivité est le nombre des espaces connectés directement à un espace. Elle est
considérée comme une mesure locale ; c’est-à-dire elle concerne seulement le rapport entre un
espace et ses espaces immédiats.

C)- La profondeur totale (« Total Depth »):


La profondeur totale ou « TD » est la somme des distances entre un nœud et tous les nœuds
qui composent un système spatial architectural ou urbain.

D)-La profondeur moyenne (« Mean Depth ») :


La profondeur moyenne ou « MD » est la distance moyenne entre un nœud et tous les nœuds
composant un système spatial architectural ou urbain.

E)-L’intégration («Integration »):


L’intégration est une mesure normalisée des distances depuis un nœud à tous les espaces du
système architectural ou urbain. Elle est calculée sur la base de l’asymétrie relative (« relative
assymmetry » (« RA »)) qui est considérée comme une profondeur relative.

F)-Le choix (« Choice ») :


Le choix est le nombre de fois qu’un nœud est utilisé comme point de passage entre tous les
points d’origine et tous les points de destination en suivant la distance la plus courte entre
chaque deux nœuds.

- Les mesures de profondeur totale, profondeur moyenne, intégration et choix s’effectuent


dans un rayon déterminé qui peut être local ou global.

G)-Le rayon (« Redius »):


Le rayon ou « R » est l’échelle dans laquelle se font les mesures des différentes variables
syntactiques (choix, intégration, etc.) dans un système spatial architectural ou urbain. Cette

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échelle pourrait être locale ou globale. Les distances métriques, topologiques et angulaires
sont utilisées pour le, le rayon, déterminer.

H)-La valeur de contrôle (« Control Value ») :


C’est le degré de contrôle visuel ou spatial d’un nœud de ses nœuds immédiats en tenant
compte la connectivité de ces derniers (nœuds immédiats) avec leurs nœuds immédiats.

I)-La contrôlabilité (« controllability »):


C’est le degré de facilité de contrôle visuel ou spatial d’un nœud par les nœuds de son
voisinage en tenant compte la connectivité de ces derniers (nœuds immédiats) avec leurs
nœuds immédiats.

- Comme la connectivité, la valeur de contrôle et la contrôlabilité sont considérées comme des


mesures locales.

VI)- Les types topologiques

Les concepts de perméabilité et de séquençages sont importants pour l'analyse des graphes
justifiés. Plus précisément, la perméabilité renvoie au degré de contrôle exercé sur la manière
dont il est possible d'évoluer d'une cellule à l'autre. Le séquençage réfère aux modes de
connexion des espaces sous forme d'anneaux, chaine, etc. (Letesson, 2009). Les types
typologiques constituent l'outil pertinent pour analyser la perméabilité et le séquençage. Il
s'agit de regrouper les cellules d'un bâtiment en quatre types: A, B, C, et D (Al‐Sayed et al.
2014) (voir figure 8). Le type A possède un seul lien avec le graphe. Le type B possède plus
d'un lien et appartient à un complexe, sous forme d'un arbre, de connexions dont le nombre de
liens est inférieur d'une unité au nombre des cellules qui le composent. Chacun de ces liens
est de type coupé du fait que son élimination entraîne la séparation d'une ou plusieurs cellules
du complexe. Le type C possède plus d'un lien et s'inscrit dans un complexe de connexions
qui ne contient pas des espaces de types A et B et dans lequel le nombre de liens est égal au
nombre de cellules. De plus, toutes les cellules de type C se trouvent toujours sur le même
anneau. Le type D possède plus de deux liens et fait partie d'un complexe de connexions qui
ne contient pas d'espaces de types A et B et qui se compose d'au moins deux anneaux ayant au
minimum un espace en commun.

En ce qui concerne les implications spatiales de ces types d'espace en matière de mouvement
et d'occupation, le type A est un espace d'occupation qui n'est jamais traversé par un
mouvement. Le type B est un espace qui permet un mouvement transitoire et dispose des
valeurs de contrôle fortes du fait que chaque chemin qui passe à travers cet espace est unique
car le mouvement de retour doit employer le même espace. Le type C permet également un
mouvement transitoire mais la route qui le traverse n'est pas unique. L'espace de type D offre
une grande possibilité de mouvement.

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Fig. 8 : Les types topologiques. Source : Letesson, 2009.

Bibliographie:
1-Ouvrages:

- Al_Sayed K., Turner A., Hillier B., Iida S. et Penn A., Space syntax methodology, Bartlett
School of Architecture, UCL, London, 2014.
- Hillier B., Space is the Machine: a Conigurational Theory of Architecture, Cambridge,
Cambridge University Press, 1996.
- Hillier B. et Hanson J.,The social logic of space, Cambridge university press, New York,
1984.
- Remy A., Morphologie urbaine, géographie aménagement et architecture de la ville,
édition Armand Colin, Paris, 2004.
- Turner A., Depthmap 4, A Researcher's Handbook, Bartlett School of Graduate
Studies,UCL, London, 2004.

2- Thèses:

- Letesson Q., Du phénotype au génotype : analyse de la syntaxe spatiale en architecture


minoenne (MM IIIB-MR IA), thèse de doctorat, Louvain-la-Neuve : Presses
Universitaires de Louvain, 2009.

3- Articles:

- Hillier B., Space Syntax as a Theory as well as a Method, London: University College,
1970.
- Hillier B., Spatial Sustainability in Cities, Organic Patterns and Sustainable Forms
Proceedings of the 7th International Space Syntax Symposium Edited by Daniel Koch,
Lars Marcus and Jesper Steen, Stockholm: KTH, 2009.
4- Site web:

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- University College de Londres (ULC), Glossary Space Syntax – Online Training
Platform, Consulté le 30-01-2021, https://www.spacesyntax.online/glossary/

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