Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
1. Au début, le FLE (la langue enseignée) et la didactique du FLE (la théorie et la méthodologie de l’enseigne-
ment apprentissage du français langue non maternelle) sont confondus. L’enjeu de la formation universitaire va
consister précisément à bien distinguer ces deux niveaux complémentaires. Les débats qui suivent vont plutôt
concerner le lien entre didactique des langues (transversalité des théories et des méthodologies) et didactique
du FLE (spécificité théorique et méthodologique). Galisson joue un rôle important dans cette construction,
cf. son article « Problématique de l’autonomie en didactique des langues (contexte français) » en 1989. Ces
débats restent vivaces.
2. En 1976, Galisson & Coste dirigent le premier Dictionnaire de didactique des langues qui constitue aussi
un indice dans ce processus de légitimation.
3. Voir aussi l’ouvrage de Germain, Évolution de l’enseignement des langues : 5000 ans d’histoire, paru en
1993.
8
Présentation. Didactique du français langue étrangère et seconde : histoire et historicités
pays concerné. Dès 1988, la SIHFLES publie sa revue Documents 4 pour l’histoire
du français langue étrangère et seconde qui reste à ce jour la seule du domaine.
Le FLE se présente donc, au début des années quatre-vingt-dix, comme
une nouvelle discipline qui ne semble plus avoir de lien avec une histoire de
la diffusion et de l’enseignement du français, marquée par l’impérialisme et
la colonisation auxquels on ne fait que très peu référence. C’est un fait aussi
que le FLE prend alors place dans une construction épistémologique organisée
par le thème de la synchronie. La tutelle de la linguistique et les apports des
recherches sur l’apprentissage et la cognition prévalent, lui conférant alors
une légitimité inédite. Le principe d’universalité didactique tend à recouvrir
la question des contextes : c’est la période de production de méthodes et de
manuels ‹universalistes›, légitimés par une approche scientifique que la variable
culturelle déstabilise peu. L’adaptation aux différents contextes d’enseignement
du français reste superficielle.
La première étape de ‹disciplinarisation› a donc pour effet intéressant de
reléguer l’histoire en tant que domaine de recherche et l’histoire de la discipline
elle-même dans un arrière-plan peu actif.
4. http://fle.asso.free.fr/sihfles/Documents/
5. À distinguer du français deuxième langue, qui désigne la place éventuelle du français dans le répertoire d’un
apprenant, généralement après l’anglais, ou la place du français dans le curriculum. Actuellement, de manière
générale, le français, quand il est présent dans le répertoire d’un apprenant, occupe plutôt la troisième ou la
quatrième place.
10
Présentation. Didactique du français langue étrangère et seconde : histoire et historicités
6. Le second dictionnaire de référence dans le domaine s’intitule Dictionnaire de didactique du français langue
étrangère et seconde (Cuq (éd.) 2003).
7. Voir Bertrand, Viala & Vigner (éds) (2000).
8. La première classe d’initiation (CLIN), destinée aux enfants de migrants, ouvre à Aubervilliers, en Seine-
Saint-Denis, en 1965. En 1975, les centres de formation et d’information pour la scolarisation des enfants de
migrants (CEFISEM) sont créés, remplacés en 2002 par les Centres académiques pour la scolarisation des
nouveaux arrivants et des enfants du voyage (CASNAV).
12
Présentation. Didactique du français langue étrangère et seconde : histoire et historicités
peut considérer qu’elle s’inscrit dans l’ordre du politique, au sens large du terme
et qu’elle a besoin d’histoire.
Faire appel à l’histoire, c’est d’abord prendre de la distance et faire ce pas
de côté caractéristique de la démarche historienne, c’est aussi procéder à l’histo-
ricisation des objets qui nous intéressent (méthodologies, idéologies, manuels,
pratiques, etc.), c.-à-d. à l’étude de leurs conditions de productions politiques,
idéologiques, intellectuelles, discursives, à leur sémantisation, à leur réception, à
leur transformation. Cette historicisation permet de redonner de l’épaisseur aux
historicités, aux temps vécus qui s’entrecroisent sans cesse, mais qui finissent par
être lissés par le temps. L’histoire des méthodologies d’enseignement illustre bien
ce dernier biais : il faut admettre en effet, dans ce cas, que l’histoire intellectuelle
et technologique de ces méthodologies a peu à voir avec la réalité des pratiques
d’enseignement que les différentes générations d’enseignants ‹bricolent› toutes
ensemble.
L’objectif est de fournir des points de repère dans une histoire complexe,
d’en comprendre, de manière consciente, les différents cadres idéologiques et
méthodologiques et d’y trouver aussi des réponses pour le présent.
Mais, on nous opposera que cette histoire est d’une richesse inépuisable
car elle s’inscrit dans le temps long, intéresse des contextes diversifiés et met
nécessairement en scène le thème de la rencontre et des conflits. La nature
interprétative de la démarche historique s’impose (Koselleck 1979). Il y a, en
effet, plusieurs histoires possibles en fonction du regard que l’on porte, des
bornes temporelles que l’on assigne, des rencontres et contacts que l’on privilégie.
© Armand Colin | Téléchargé le 12/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 14.169.162.207)
10. La revue Le français dans le monde a été créée en 1961. Actuellement gérée par la FIPF (Fédération
Internationale des Professeurs de Français), elle a été l’unique publication régulière dans le domaine du FLE
pendant plus de vingt ans, à la fois lieu d’information, de formation et de construction du domaine.
11. « Même une histoire égoïste est obligée de reconnaître l’existence de l’Autre » (Subrahmanyam, 2014 : 24).
14
Présentation. Didactique du français langue étrangère et seconde : histoire et historicités
12. La notion de ‹régime d’historicité›, élaborée par Hartog (2003), désigne la manière dont les catégories
du passé, du présent et du futur sont articulées dans un temps historique donné. L’entrelacs des échelles
temporelles est caractéristique du processus de transmission et d’apprentissage, fortement marqué par les
tensions « du non-simultané qui se passe dans le temps chronologiquement égal » (Koselleck, 1979 : 334).
13. Le programme CLIODIL (histoire et historicités en didactique des langues) a été créé, en 2017, au sein
de l’UR DILTEC EA 2288 (Didactique des langues, des textes et des cultures) de la Sorbonne Nouvelle, pour
promouvoir la recherche en histoire dans la didactique du FLES.
16
Présentation. Didactique du français langue étrangère et seconde : histoire et historicités
Références bibliographiques
18
Présentation. Didactique du français langue étrangère et seconde : histoire et historicités
GRUZINSKI S. (2004), Les quatre parties du monde : histoire d’une mondialisation, Paris, Éditions
de La Martinière.
HARTOG F. (2003), Régimes d’historicité : présentisme et expériences du temps, Paris, Seuil.
HOUIS M. (1971), Anthropologie linguistique de l’Afrique noire, Paris, Presses Universitaires de
France.
KOSELLECK R. ([1979] 2016), Le futur passé : contribution à la sémantique des temps historique,
Paris, éditions EHESS.
LÜDI G. (1994), « Qu’est-ce qu’une frontière linguistique ? », Babylonia (no speciale), 7-17. [en
ligne]
LYON-CAEN J. (2019), La griffe du temps : ce que l’histoire peut dire de la littérature, Paris,
Gallimard.
MEILLET A. ([1918] 1928), Les langues dans l’Europe nouvelle, avec un appendice de L. Tesnière,
Paris, Payot.
PORCHER L. (1987), Champ de signes : état de la diffusion du français langue étrangère, Paris,
Didier.
PUREN C. (1988), Histoire des méthodologies de l’enseignement des langues, Paris, Nathan/CLE
International.
PUREN L. (2004), L’école française face à l’enfant alloglotte : contribution à une étude des
politiques linguistiques éducatives mises en œuvre à l’égard des minorités linguistiques
scolarisées dans le système éducatif français du XIX e siècle à nos jours, Thèse de
l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3.
RUBIO C. (2018), Une langue en mission : histoire des politiques linguistiques et didactiques
françaises en Palestine, Thèse de l’Université François Rabelais de Tours.
SPAËTH V. (1997), La formation du français langue étrangère : le paradigme africain et ses
enjeux de la colonisation aux indépendances, Thèse de l’Université Sorbonne Nouvelle.
SPAËTH V. (2007), Théories, politiques et pratiques de la langue. L’enseignement du français :
© Armand Colin | Téléchargé le 12/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 14.169.162.207)
ZARATE G. (éd.) (1983), Le français dans le monde no 181 : D’une culture à l’autre. Soi et les
autres, Paris, Hachette/Larousse.
© Armand Colin | Téléchargé le 12/01/2024 sur www.cairn.info (IP: 14.169.162.207)
20