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OÙ VA LE
PHILOSOPHER ITALIEN ?
Paolo Quintili
2015/4 N° 87 | pages 1 à 9
ISSN 1144-0821
DOI 10.3917/rdes.087.0001
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-rue-descartes-2015-4-page-1.htm
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PAOLO QUINTILI *
produit aussi une tendance à la clôture et du coup une certaine provincialisation de la pensée
(localismes). C’est une tendance à la clôture qui engendre un revers très fécond : la
dissémination des penseurs italiens dans le monde entier. Il faudrait donc concevoir un
huitième pôle, ou centre de diffusion du philosopher en Italie, hors des frontières nationales,
notamment aux États Unis et en Europe (France, Allemagne, Angleterre).
Cette pluralité de voix du philosopher en Italie et hors d’Italie a permis de contourner, en
quelque sorte, la contraposition bien connue aujourd’hui entre philosophes « analytiques » et
« continentaux », l’univers italien étant beaucoup plus complexe et différemment découpé.
On pourra repérer ici encore les trois grands axes de la réflexion italienne classique : les
naturalismes (y compris les « analytiques » et les philosophes des sciences), les philosophies de
l’histoire (y compris l’herméneutique et la déconstruction) et les philosophies de la politique,
avec les déclinaisons de la biopolitique et annexes. L’univers conceptuel de ce philosopher se
dessine ainsi sous les contours métaphoriques de son origine : une péninsule et un archipel,
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les marxismes en général, etc. voir dans ce numéro la contribution de V. Morfino : « Marx en
Italie au début du XXIe siècle »). Une opération philosophico-politique et culturelle qui a
connu une chute, après une faillite cuisante à partir des années quatre-vingt. Puis, il y a eu la
recherche de G. Agamben et de quelques autres, mais il s’agit de penseurs indépendants et
prestigieux, et non pas d’une tendance unitaire, ni d’une « école » à retentissement
international.
L’idée d’une Italian Theory est valable pour les XVIe et XVIIe siècles de notre histoire
moderne, pour le Rinascimento (de Bruno à Campanella), Vico et les Lumières, lorsque
l’Italie a connu réellement une ligne de recherche unitaire, non-cartésienne (ou anti-
cartésienne), dans laquelle a émergé une sorte d’« histoire naturelle», c’est-à-dire un sens
très fort de l’historicité du monde et de l’homme, mais enraciné dans les traits permanents
de la nature humaine (voir ici la contribution de P. Virno : « Histoire naturelle. La dispute
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politique et au linguistic turn interprété à l’italienne, est abordée par C. Stancati dans « La
philosophie du langage en Italie aujourd’hui ». L’« École de Rome » de philosophie du
langage, fondée par Antonino Pagliaro (1898-1973) après la Seconde Guerre mondiale à
« La Sapienza », se présentait comme un mélange original de philologie, linguistique,
idéalisme (de marque gentilienne) et structuralisme. Ses élèves – Tullio de Mauro (1932)
par exemple, professeur de Linguistique générale à « La Sapienza », traducteur et
interprète de Saussure et déjà ministre de l’Éducation nationale – ont élargi, peu à peu,
cette approche, introduisant d’autres points de vue, plus ouverts vers les traditions
analytiques et naturalistes. Dans les années quatre-vingt, à Rome, on étudiait
Wittgenstein, Saussure, Benveniste, Hjelmslev et Chomsky, mais on étudiait plutôt
l’histoire et la philosophie des langues. Le parcours de la philosophie italienne du langage
semble suivre une voie qui mène, encore une fois, de l’histoire à la nature (et à la vie), et
de la langue (parole) – historiquement et structurellement considérée – au langage.
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NOTES