Vous êtes sur la page 1sur 112

Michel Estève

Comprendre
la planification
de projet

Produit et diffusé par innovaxion

www.innovaxion.net
Michel Estève

Comprendre
la planification
de projet

Innovaxion
05 avenue d'Armagnac 87170 ISLE
contact@innovaxion.net

www.innovaxion.net

© Innovaxion 2011
ISBN 978-2-9539251-0-4

-2-
Cher lecteur

En téléchargeant ce livre numérique vous avez acquis un droit


d'usage de ce document dans les conditions définies ci-après et à
l'exclusion de toute autre utilisation, notamment commerciale.
Ce droit comprend :
- Le droit d'utiliser ce livre à titre documentaire, dans le cadre
personnel et privé.
- Le droit de reproduire le fichier en un exemplaire pour copie
de sauvegarde.
- Le droit d'en imprimer un exemplaire papier pour utilisation
personnelle.
- Le droit d'en publier de courts extraits sous réserve de men-
tionner la source du document et l'identité de son auteur.
Tout autre usage que ceux décrits ci-dessus est soumis à autori-
sation préalable et écrite de l'auteur.
Sont notamment interdits : La présentation publique du docu-
ment. La revente, l'échange, la location ou le transfert du document
à un tiers. La mise à disposition d'autres utilisateurs sur un serveur
de fichiers, sur un site ou un serveur internet ou par tout autre
moyen.

© innovaxion 2010 -3- www.innovaxion.net


SOMMAIRE
Contenu
Introduction 6
Chapitre 1 - Le projet 7
1.1- Qu'est-ce qu'un projet ? 7
1.2- Tâches, ressources et livrables 9
1.3- La portée du projet 11
1.4- Phases, jalons et ligne de temps. 12
Chapitre 2 - Structurer le projet 14
2.1- Les outils de structuration du projet 14
2.2- La PBS : Référentiel du produit 15
2.3- La WBS : référentiel des travaux 16
2.4- La fiche de lot 18
Chapitre 3 - Planifier par les durées 20
3.1- Pourquoi planifier 20
3.2- La liste des activités du projet 21
3.3- L'estimation des durées de tâche 22
3.4- Notion d'antériorité et réseau logique 27
3.5- Le calendrier du projet 33
3.6- Le diagramme de Gantt 36
3.7- Un peu d'histoire 38
3.8- Les marges 42
3.9- Le calcul des marges 46
3.10- Chemins critiques multiples 49
3.11- Typologie des activités du projet 51
3.12- Les attributs de tâche 52
3.13- Les différents types de liens 53
3.14- La contrainte de localisation temporelle 57
3.15- Les rétro-plannings 58
3.16- Echelles de durée et calendrier 60

-4-
Chapitre 4 - Planifier les ressources 64
4.1- Les ressources du projet 64
4.2- L'équilibre charge - capacité 67
4.3- L'affectation des ressources 69
4.4- Surcharges, nivellement et lissage 70
4.5- Les règles de lissage 74
4.6- La planification des coûts 77
Chapitre 5 - Piloter la réalisation 81
5.1- Figer le planning prévisionnel 81
5.2- Les méthodes de suivi de l'avancement 81
5.3- La mesure de l'avancement de tâche 82
5.4- Les lignes isochrones 87
5.5- Le Gantt-suivi 89
Chapitre 6 92
Rendre compte de l'avancement 92
6.1- Le diagramme temps-temps 92
6.2- Le calcul de l'avancement global du projet 94
6.3- Les courbes d'avancement 98
6.4- Le pilotage par les coûts 100
6.5- Du diagramme de Gantt aux courbes en S 101
6.6- La lecture des courbes en S 103
Conclusion 108
Annexes 109
Quelques logiciels de planification : 109
Abréviations 111

-5-
Introduction

Je rencontre beaucoup d'utilisateurs autodidactes de logiciels de


planification de projets. La plupart ne comprennent pas le fonc-
tionnement du logiciel et peinent à obtenir un résultat à peine mé-
diocre. La solution à leur problème consiste simplement à leur
transmettre quelques notions de base de planification.
L'ambition de cet ouvrage est de vous expliquer le plus simple-
ment possible les principes de la planification de projets. Ces prin-
cipes seront illustrés à l'aide d'exemples de la vie courante : vous
serez très vite familiers de la famille Giraud, dont le projet nous
servira de fil conducteur.
Microsoft Project étant le plus utilisé des logiciels de planifica-
tion, c'est naturellement à partir de captures d'écran de celui-ci
qu'ont été réalisées la plupart des illustrations de ce livre. Les utili-
sateurs d'autres solutions ne seront pas dépaysés : les principes de
fonctionnement et les codes visuels sont désormais standardisés.
Bien entendu la totalité des concepts présentés dans cet ouvrage
sont valables dans l'absolu, indépendamment de toute solution in-
formatique.
Chaque fois qu'il existe un terme français précis pour désigner
telle ou telle notion de gestion de projet c'est celui que nous utilise-
rons. Nous ne ferons d'exception à cette règle que lorsque les ter-
mes anglophones sont plus clairs ou plus facilement mémorisables.
Je vous souhaite une bonne lecture.

Michel Estève

© innovaxion 2010 -6- www.innovaxion.net


Chapitre 1 - Le projet

1.1- Qu'est-ce qu'un projet ?

C'est soirée football à la télé. Pendant que mari et enfants


gesticulent bruyamment devant le téléviseur, Joséphine Giraud
achève seule la vaisselle. L'avantage des tâches ménagères, c'est
que ça laisse l'esprit libre de divaguer.
— « L'appartement est bien petit et bien triste... Et la ferme des
grands-parents qui se dégrade, envahie de ronces... Quelle belle
maison de campagne cela ferait... C'est décidé, demain je leur en
parle. »

C'est ainsi que naissent tous les projets, du constat d'une insatis-
faction. Mais au fait, qu'appelle-t-on un projet ? L'AFNOR (Asso-
ciation Française de Normalisation) définit le projet comme suit :
Une démarche spécifique qui permet de structurer méthodique-
ment et progressivement une réalité à venir. En voici une autre,
non officielle et qui ne contredit en rien la précédente : le projet est
le processus, borné dans le temps, qui conduit du constat d'un be-
soin au résultat qui satisfait ce besoin.
Voici ce qui caractérise un projet :
- Un besoin spécifique. Il n'y a pas deux projets strictement
identiques.
- Un résultat à atteindre, qui satisfera ce besoin.

© innovaxion 2010 -7- www.innovaxion.net


- Une durée limitée et fixée à l'avance (le processus projet est
borné).
- Un ensemble d'activités qui contribueront chacune pour partie
à l'obtention du résultat.

Besoin
Processus projet Résultat

Axe du temps

Si le rêve de Joséphine Giraud n'est pas encore un projet, ce


pourrait bien le devenir. Mais parlons un peu des projets tels que
nous en connaissons dans notre vie professionnelle.
A l'origine du processus projet se trouve la prise de conscience
d'un besoin, réel ou supposé. Dans les projets du type "affaire" ou
projets externes, le déclencheur est la formulation d'un besoin
(sous la forme d'un appel d'offres) par un client ou un prospect.
Les projets internes ont pour origine la volonté de résoudre un pro-
blème ou la volonté de faire progresser l'entreprise dans un do-
maine précis.
Le résultat du projet est appelé "ouvrage" dans les métiers du
bâtiment et des travaux publics. Plus généralement le terme d'ou-
vrage convient aux objets physiques uniques (par exemple, dans
l'industrie, une machine spéciale). De plus en plus souvent le résul-
tat du projet est un ensemble comprenant des éléments matériels et
des éléments immatériels (logiciels, procédures...) on parle alors de
système (système d'organisation, système informatique). Une troi-
sième famille est constituée par les projets de création de produit
de série. Le résultat de ces projets est le système (machines, docu-
ments, procédures, moyens de contrôle....) qui fabriquera les pro-
duits en question (véhicules automobiles, plats cuisinés...). Dans ce

© innovaxion 2010 -8- www.innovaxion.net


dernier cas le projet est terminé lorsque le système de production
est apte à produire en quantité et en qualité.

Définition :
Le projet est un processus, borné dans le temps, qui conduit du cons-
tat d'un besoin au résultat qui satisfait ce besoin.

1.2- Tâches, ressources et livrables

Le Réal de Bruxelles a gagné hier soir par 4 à 2 contre le Dynamo


de Belgrade. Le repas de midi s'achève. Joséphine, qui a de la suite
dans les idées, a négligemment amené la discussion sur la maison
des grands-parents. Chacun s'accorde à trouver dommage qu'on
laisse une si belle bâtisse se dégrader.
— Et si on passait les prochaines vacances à la retaper ! lance
Sophie, la cadette. Malik, le père de famille, qui n'avait rien dit
jusque là saisit la balle au bond.
— Eh bien d'accord, mais je vous fait remarquer que mes vacances
commencent début juillet, soit exactement dans trois mois, que la
maison des grands-parents est à deux cents kilomètres d'ici et que
je n'ai que quatre semaines de vacances. Il va donc falloir jouer
serré.
— Je me charge d'organiser tout ça, lance Julien. Il faut dire que
Julien, l'aîné des quatre enfants, commence des études supérieures
et se considère comme le scientifique de la famille.
La discussion s'anime.
— Il faut réparer la toiture, dit Joséphine.
— Je veux une salle de jeux, et une piscine, intervient Sophie.
— Au dixième jour il faudra que les tuiles neuves soient sur place,
précise Malik...
Je vous fais grâce des deux heures de discussion acharnée qui ont

© innovaxion 2010 -9- www.innovaxion.net


suivi.
Julien a tout noté et se retrouve avec une liste un peu hétéroclite de
travaux à faire, de contraintes diverses et variées, de demandes des
uns et des autres.
Son intuition lui dit qu'il va falloir classer intelligemment tout cela.
Il va en parler à Monsieur Panazol son prof de gestion de projets.

Le processus projet est découpé en activités. Les activités élé-


mentaires du projet sont appelées des tâches. Chaque tâche néces-
site une certaine durée pour être réalisée dans des conditions opti-
males, elle consomme des matériaux et elle est réalisée par des in-
dividus utilisant des matériels. Les personnes, les matériels et les
matériaux sont appelés des ressources.
Chaque tâche produit des livrables. Les livrables d'une tâche
sont la plupart du temps nécessaire à la réalisation d'une ou plu-
sieurs autres tâches. Les livrables peuvent être des objets matériels
(ouvrages de maçonnerie, machines informatiques, prototypes...),
des documents (plans, schémas, programmes informatiques, notic-
es d'utilisation....) quel que soit le support (papier, CDROM et mê-
me en l'absence de support matériel (fichiers transmis par le réseau
internet), des éléments immatériels comme par exemple une for-
mation, ou même des décisions. Les livrables du projet constituent
le résultat, ou produit. Les livrables de tâche ne sont pas forcément
des livrables du projet : un croquis, une consigne de sécurité sont
des livrables de tâche, mais leur utilité est éphémère.
Les termes d'extrant ou de délivrables sont quelquefois utili-
sés. Ils sont synonymes de livrable.
Dans notre petit récit, "réparer la toiture" est une tâche, la salle
de jeux est un livrable, les tuiles neuves sont une ressource de type
matériau. Nous reviendrons un peu plus loin sur ces notions.

© innovaxion 2010 - 10 - www.innovaxion.net


Point-clé :
Les tâches sont les activités élémentaire du projet. Chaque tâche uti-
lise des ressources qui produisent le ou les livrable(s) de la tâche.

1.3- La portée du projet

Les Giraud sont réunis pour ce qui tient plus de la revue de projet
que du repas de famille. C'est Malik qui prend la parole.
— Julien et moi nous sommes livrés à une étude exploratoire du
projet Cévennes. La ferme est en très mauvais état : il pleut dans le
bâtiment, les menuiseries sont très abîmées et les ronces ont envahi
le terrain. Par ailleurs, nous ne sommes que quatre et, même avec
l'aide de quelques voisins il ne faut pas espérer rendre les lieux
habitables en un mois. Ma petite Sophie, je crois qu'il faut remettre
le creusement de la piscine à plus tard.
Julien prend la suite :
— Nous avons défini la portée du projet : notre objectif sera
d'assurer la sauvegarde du bâtiment et la propreté des abords. En
conséquence les seuls travaux que nous mènerons à bien
concerneront la toiture et les menuiseries extérieures d'une part, la
remise en état du terrain et du chemin d'accès d'autre part. Je
confirme pour Sophie que la piscine et la salle de jeux sont hors
périmètre.

Julien a vite assimilé le vocabulaire de la gestion de projets. Dé-


finir la portée du projet, c'est tout simplement faire la liste de ce
qui est inclus dans le projet et éventuellement et par précaution, de
ce qui n'y est pas. L'expression "hors périmètre" est couramment
employée pour désigner ce qui est exclu du projet.
La portée du projet se définit de deux façons : par les livrables

© innovaxion 2010 - 11 - www.innovaxion.net


(ce qui est produit au cours du projet) et par les travaux. Dans le
cas du projet Cévennes la portée produit se définirait par la liste
des livrables attendus : un bâtiment rendu étanche aux intempéries
et un terrain rendu présentable. La portée travaux se définirait par
la liste des travaux prévus : remettre en état le bâtiment et défricher
le terrain. Dans le cas très simple du projet Cévennes les deux des-
criptions ne diffèrent que par la façon de les formuler. Dans des
projets faisant intervenir de nombreux acteurs, cela peut être moins
simple. Définir la portée d'un projet est une action importante :
nombre de litiges viennent d'une vision différente de la portée par
les différents acteurs du projet.

Point-clé :
La portée (ou périmètre) du projet définit la limite entre les livrables et
travaux qui font partie du projet et ceux qui en sont exclus.

1.4- Phases, jalons et ligne de temps.

Les repas de la famille Giraud sont de plus en plus animés. Ce


premier jour de mai, Julien a dessiné sur la nappe le schéma
reproduit ci-dessous.
— Notre projet se déroulera en deux temps. Nous attaquons le
premier juin la phase de préparation, que nous piloterons depuis
l'appartement à l'exception d'un ou deux week-ends sur place. La
phase de préparation se terminera le 2 juillet, jour de notre départ
en vacances et jalon N°2 du projet. La phase de mise en œuvre
commencera alors et se terminera le 30 juillet.

© innovaxion 2010 - 12 - www.innovaxion.net


Phase 1 Phase 2
Préparation à distance Mise en œuvre

J1 J2 J3
01 juin 02 juillet 30 juillet

Julien a bien assimilé les notions de base de la gestion de pro-


jets.
Un projet est généralement divisé en phases successives sépa-
rées par des jalons inter-phases. D'une façon plus générale un ja-
lon est un événement clé choisi pour son importance par rapport au
projet. Le passage d'un jalon est l'occasion de valider les livrables
des tâches qui l'on précédé.
On appelle "ligne de temps" (ou chronologie, ou encore en an-
glais timeline), la représentation des phases et jalons du projet sur
l'axe du temps. Ce dernier est figuré par un axe horizontal orienté
vers la droite. Le schéma réalisé par Julien est une "ligne de
temps". Elle va constituer ce que l'on appelle couramment le plan-
ning directeur du projet.

Point-clé :
- Le projet est divisé en phases successives séparées par des jalons.
- Les jalons, datés et disposés sur la ligne de temps, constituent le
premier des outils de pilotage du projet : le planning directeur.

© innovaxion 2010 - 13 - www.innovaxion.net


Chapitre 2 - Structurer le projet

Nos amis les Giraud sont-ils bien raisonnables de se lancer dans


pareille aventure ? Ont-ils les moyens financiers de leurs ambi-
tions ? Questions on ne peut plus pertinentes, mais qui ne sont pas
dans le champ de nos préoccupations. Les Giraud ont passé le mois
de mai à en discuter entre eux et ont pris la décision de poursuivre
le projet. Les voici désormais dans un processus inéluctable. Ils
sont condamnés à réussir.
Julien a bien travaillé pendant ce mois de mai. Nous allons pas-
ser en revue les différents documents qu'il a préparés.

2.1- Les outils de structuration du projet


Pour faire une exception à la règle fixée au début de ce livre,
nous allons désigner les outils de structuration par leur intitulé
abrégé anglo-saxon. Les termes français sont peu clairs, souvent
ambigus, difficilement mémorisables, et pour tout dire peu em-
ployés. Les désignations francophones vous seront données entre
parenthèses pour information, mais nous ne les utiliserons plus par
la suite.
Comme nous allons le voir, les outils de structuration sont des
listes hiérarchisées.

© innovaxion 2010 - 14 - www.innovaxion.net


2.2- La PBS : Référentiel du produit
- La PBS - Product Breakdown Structure - est la liste hiérar-
chisée des livrables du projet. (En français OTP pour Organi-
gramme Technique Produit ou encore AP pour arborescence pro-
duit)
Voici la PBS établie par notre ami Julien.

PBS (Livrables du projet)


Bâtiment principal hors d'eau
Charpente réparée
Tuiles remplacées
Menuiseries extérieures réparées
Voie d'accès praticable
Nids de poule rebouchés
Chaussée désherbée
Espaces verts défrichés et plantés
Terrain engazonné
Arbustes plantés

Julien a regroupé les livrables en trois catégories. La logique de


regroupement des éléments de la PBS est une logique structurelle.
Le nombre de niveaux hiérarchiques est affaire de circonstances,
mais il faut résister à la tentation de les multiplier. Dans la plupart
des projets, même très importants, trois niveaux suffisent.
Dans notre PBS, les noms des objets sont affectés d'un adjectif
(remplacé, réparé...). C'est un cas particulier dû au fait qu'il s'agit
de remettre en état un bien existant. Dans le cas général, il n'est pas
nécessaire de décrire l'état des objets. En voici pour preuve deux
exemples qui concernent l'un le projet de réalisation d'un système
informatique, l'autre celui d'une machine spéciale.

© innovaxion 2010 - 15 - www.innovaxion.net


Système de gestion Cetech Machine de tronçonnage
Matériels Partie opérative
Serveur Bâti
Postes de saisie Système de bridage
Logiciels Mâchoires
Système d'exploitation Vérin
Base de données Système de coupe
Formations Moteur
Formation administrateur Transmission mécanique
Formation opérateurs Lame circulaire
Documentation technique Partie commande
Manuel d'utilisation Armoire d'automatisme
Livret de maintenance Armoire de puissance

2.3- La WBS : référentiel des travaux


La WBS - Work Breakdown Structure - (en français OT pour
organigramme des tâches) est la liste hiérarchisée des activités du
projet.
- La WBS est constituée principalement des activités directe-
ment issues de la lecture de la PBS (on les appelle "tâches indui-
tes). A chaque ligne de la PBS correspond une ou plusieurs lignes
de la WBS traduisant les actions à accomplir sur cet élément. Les
verbes "concevoir", "définir", "approvisionner", "transformer",
"assembler", "contrôler", "tester" et quelques autres suffisent à éta-
blir la liste des tâches du projet à partir de la PBS.
- Aux tâches issues de la PBS s'ajoutent des activités liées à la
gestion du projet : Coordination, communication, surveillance,
etc...
- La WBS est une liste hiérarchisée. Plusieurs logiques de re-
groupement des activités peuvent s'imbriquer : Logique géographi-
que, logique structurelle (produit), logique temporelle (phases) et

© innovaxion 2010 - 16 - www.innovaxion.net


logique métier. Au dernier niveau de décomposition de la WBS fi-
gurent les lots de travaux.

Julien a de nouveau réuni son équipe.


— Voici la WBS de notre projet. Celui-ci se décompose en quatre
lots.

Tâches de
WBS (Lots de travaux) gestion
1 Coordonner les travaux Tâches induites
2 Mettre le bâtiment hors d'eau issues de la PBS
3 Remettre en état la voie d'accès
4 Remettre le terrain en état

— Comme nous sommes quatre, chacun d'entre nous aura la


responsabilité d'un lot. Je serai en charge du lot 1 coordination.
Malik s'occupera du lot 2, Sophie du lot 3 et Joséphine du lot 4
— Mais, intervient Sophie, ce n'est pas juste ! je n'ai que 10 ans, et
toi qui en a 18, tu n'as aucun travail physique à réaliser.
— Sophie, tu confonds structure de responsabilité et structure de
contribution. Je m'explique : Etre responsable d'un lot ne signifie
pas que l'on va réaliser seul les travaux de ce lot. Chacun de nous
est responsable d'un lot et contributeur potentiel sur tous les autres
lots. Lorsque tu travailleras sur le lot 4 tu devras obéir aux ordres
de Joséphine, responsable de ce lot, et lorsque nous travaillerons
sur ton lot, nous exécuterons tes ordres.
— Alors, je vais pouvoir vous commander ?
— Oui, Sophie. Tu commanderas et tu seras responsable du bon
aboutissement du lot 3. D'ailleurs, pour notre prochaine réunion,
tu prépareras la "fiche de lot" du lot 3. Je t'expliquerai en quoi cela
consiste.

Noter que dans la WBS du projet Cévennes chaque expression

© innovaxion 2010 - 17 - www.innovaxion.net


commence par un verbe à l'infinitif. Ceci est parfaitement logique
puisqu'il s'agit d'actions à accomplir. Il en sera de même lorsque
nous déclinerons chaque lot en tâches élémentaires.
Si notre WBS ne comporte qu'un niveau, c'est que le projet de la
famille Giraud est d'une portée modeste. Dans un projet du monde
professionnel les WBS comportent 2, 3 ou même 4 niveaux pour
de très grands projets.
Dans les entreprises bien organisées qui gèrent de nombreux
projets, on rédige des WBS-type. A chaque nouveau projet, plutôt
que de partir d'une page blanche, le chef de projet utilise la WBS-
type qu'il modifie pour l'adapter au contexte. Cette façon de tra-
vailler offre plusieurs avantages : elle permet un gain de temps,
elle standardise les pratiques des différents chefs de projet et sur-
tout elle permet d'éviter des oublis.

2.4- La fiche de lot


Nous avons vu que la décomposition des travaux s'arrête, pour
la WBS, au niveau des lots de travaux. Pour planifier le projet, il
est nécessaire de descendre à un plus petit niveau de détail, celui
des tâches. La transition entre les deux niveaux est réalisée par la
fiche de lot, qui, entre autres renseignements, comporte la liste des
tâches du lot.
Voici d'ailleurs la fiche de lot rédigée par notre amie Sophie :

Lot N° 3 : Remettre en état la voie d'accès


3.1 Reboucher les nids de poule
3.2 Désherber la vois d'accès

© innovaxion 2010 - 18 - www.innovaxion.net


Bien entendu une fiche de lot comporte bien d'autres informa-
tions, mais notre préoccupation étant de planifier le projet nous
n'irons pas plus loin sur ce sujet.

Point-clé :
Le projet est découpé en lots de travaux, eux-même divisés en tâ-
ches. La fiche de lot en décrit le contenu.

© innovaxion 2010 - 19 - www.innovaxion.net


Chapitre 3 - Planifier par les durées

3.1- Pourquoi planifier

Ce dimanche midi l'oncle Raymond est venu déjeuner à la maison.


Julien a invité son prof de gestion de projets, monsieur Panazol. Le
repas promet d'être animé, monsieur Panazol est aussi optimiste et
enthousiaste que l'oncle Raymond est acariâtre. D'ailleurs le voici
qui attaque :
— A quoi cela sert-il de planifier ? tout le monde sait que les cho-
ses ne se passent jamais comme prévu. A peine terminé, votre plan-
ning sera déjà faux.
— Je conviens avec vous, Raymond, que les choses ne se passent
jamais comme prévu. Cela dit, je n'en tire pas les mêmes conclu-
sions, bien au contraire. Partiriez-vous pour un long trajet en voi-
ture sans même avoir consulté une carte routière, et sans
l'emporter avec vous ? Vous ne sauriez pas si le trajet que vous
avez choisi est le plus court. En chemin vous ne sauriez pas faire
un pronostic sur votre heure d'arrivée. Enfin en cas d'aléa - par
exemple une route barrée - vous seriez bien en mal de prendre la
bonne décision. Le planning en gestion de projet, c'est la carte rou-
tière. Il vous permet d'attaquer les travaux en étant certain que vo-
tre scénario vous assure au moins théoriquement de tenir vos ob-
jectifs. En cours de réalisation il sert à détecter un retard éventuel
sur une tâche. Il permet même de connaître l'impact de ce retard
sur la suite du projet et donc de prendre les bonnes décisions. En

© innovaxion 2010 - 20 - www.innovaxion.net


deux mots, le planning est un outil d'anticipation et un outil de visi-
bilité. C'est déjà beaucoup.

Condamner la planification au motif que les choses ne se passe-


ront pas comme prévu, c'est jeter le bébé avec l'eau du bain. C'est
pourtant un comportement fréquent. Aux arguments de Monsieur
Panazol on peut en rajouter quelques autres et non des moindres :
Le planning est un excellent outil de communication. Il rassure le
commanditaire sur votre capacité à gérer le projet. Il vous permet
de distribuer le travail à vos contributeurs et de les faire s'engager
sur des dates précises de livraison. En cas de conflit avec un retar-
dataire il permet de le mettre face à ses responsabilités en lui mon-
trant les conséquences de son manque de sérieux.

Point-clé :
- Le planning est un outil de visibilité pour le chef de projet et pour ses
interlocuteurs. Il permet d'anticiper et de réagir aux aléas avec perti-
nence.

3.2- La liste des activités du projet

Le projet prend forme. Julien a de nouveau réuni ses équipiers.


— Je vous remercie de m'avoir remis en temps utile vos fiches de
lot. J'en ai extrait la liste des activités du projet, que voici :

© innovaxion 2010 - 21 - www.innovaxion.net


Projet Cévennes
1 Coordonner les travaux
2 Mettre le bâtiment hors d'eau
2.1 Approvisionner les tuiles et le bois de charpente
2.2 Déposer les tuiles
2.3 Réparer la charpente
2.4 Reposer les tuiles
2.5 Remettre en état les menuiseries extérieures
3 Remettre en état la voie d'accès
3.1 Reboucher les nids de poule
3.2 Déserber la voie d'accès
4 Remettre le terrain en état
4.1 Défricher le terrain
4.2 Approvisionner les plantes
4.3 Travailler le terrain
4.4 Planter les arbustes
4.5 Semer le gazon

3.3- L'estimation des durées de tâche

Julien, qui décidément est passionné par le projet familial, a com-


plété le tableau des tâches par une estimation des durées. La
famille est réunie autour du tableau.

© innovaxion 2010 - 22 - www.innovaxion.net


Liste des tâches Durée
Mettre le bâtiment hors d'eau
Approvisionner les tuiles et le bois de charpente 3 jours
Déposer les tuiles 4 jours
Réparer la charpente 8 jours
Reposer les tuiles 5 jours
Remettre en état les menuiseries extérieures 3 jours
Remettre en état la voie d'accès
Reboucher les nids de poule 2 jours
Déserber la voie d'accès 2 jours
Remettre le terrain en état
Défricher le terrain 6 jours
Approvisionner les plantes 2 jours
Travailler le terrain 3 jours
Planter les arbustes 3 jours
Semer le gazon 2 jours

— Julien, comment peux-tu estimer la durée d'une tâche sans sa-


voir qui va faire le travail ? interroge Joséphine.
— Je me suis placé dans un monde idéal où l'on disposerait de
toutes les ressources nécessaires en quantité et qualité. Dans ce
monde-là il y a pour chaque tâche une durée optimale. Dans le
monde réel on peut quelquefois réduire cette durée en augmentant
le nombre de ressources et inversement, mais nous verrons cela
plus tard. Dans un premier temps, on fait un planning idéal,
ensuite on l'adapte.
— Et que connais-tu de ce monde, aussi idéal soit-il, toi qui n'a de
ta vie jamais arraché une mauvaise herbe ni raboté un bout de
bois ?
— Maman, le miracle de la gestion de projets, c'est précisément
que des gens sans connaissance d'un métier puissent parfaitement
organiser les activités de ce métier. J'ai fait une estimation à dire
d'expert.
— Et donc tu as demandé à monsieur Panazol de t'indiquer les
durées des tâches.

© innovaxion 2010 - 23 - www.innovaxion.net


— Non. Monsieur Panazol est expert de la gestion de projet, pas
des travaux manuels.
— J'ai du mal à te suivre. Où as-tu donc trouvé un expert ?
— A la maison ! C'est Papa qui m'a indiqué les durées de tâche.
— Voilà donc Malik promu au grade d'expert ! conclut Joséphine.
Au tour de Sophie de poser une question fort intéressante :
— Dis, Julien, on va travailler aussi le dimanche ?
— Non, sois rassurée, on se reposera le samedi et le dimanche, et
on ira même à la plage. Les durées que j'ai indiquées sont en jours
ouvrés. La tâche "Défricher le terrain" dure 6 jours ouvrés. Si par
exemple elle commence le mardi matin, elle se déroulera les mardi,
mercredi, jeudi, vendredi, puis le lundi et le mardi de la semaine
suivante.

La durée d'une tâche s'exprime généralement en temps ouvré,


plus rarement en temps calendaire. Pour les tâches sur lesquelles
vont travailler des individus, c'est à dire pratiquement toutes les tâ-
ches d'un projet, on exprime leur durée en temps ouvré, c'est à dire
en tenant compte des périodes de présence des ressources. Nous
reviendrons plus loin sur la question des calendriers.
La durée de certaines tâches est de nature technique, et donc in-
dépendante du travail humain. C'est le cas par exemple pour les es-
sais de fatigue ou les essais climatiques d'un prototype, lorsque ces
essais sont effectués sur des installations automatisées. Des tâches
de ce type sont planifiées en temps calendaire. Une journée de
temps calendaire vaut 24 heures, une semaine 7 jours et ainsi de
suite.
L'estimation de la durée de tâche suppose réunies les conditions
suivantes : La présence de ressources en quantité suffisante. Des
ressources de qualité normale (efficacité des hommes et des maté-
riels, qualité intrinsèque des matériaux). Des conditions matérielles
satisfaisantes (météo, conditions initiales....). Enfin la disponibilité

© innovaxion 2010 - 24 - www.innovaxion.net


et la qualité des "intrants" de la tâche (informations, plans, sché-
mas, échantillons...)
La durée réelle ne sera identique à la durée prévue que si tous
les critères ci-dessus sont au nominal... et si l'estimation était
juste !
Compte tenu de l’extrême hétérogénéité des tâches du projet, il
est rare que l'estimateur puisse seul déterminer la durée de toutes
les tâches. C'est encore plus vrai dans le cas du chef de projet dé-
butant chargé d'établir le planning. L'estimation des durées se fait
de différentes façons : Les entreprises bien organisées utilisent des
standards de temps. Le bilan des projets antérieurs a permis d'en-
richir la base de temps standards de l'entreprise. L'estimateur dis-
pose ainsi, pour toutes les tâches similaires à des cas connus, des
données indispensables à l'évaluation des durées.
Pour toute tâche pour laquelle on n'a pas de référence anté-
rieure, on peut estimer la durée "à dire d'expert". La méthode
consiste à interroger l'expert du domaine (souvent l'une des res-
sources pressenties pour la réalisation). Signalons la méthode de
Delphes qui est un perfectionnement de celle-ci puisqu'elle con-
siste à réunir plusieurs experts dans des conditions garantissant au
mieux leur indépendance. Lors de l'estimation des durées "à dire
d'expert" il convient de se méfier du comportement humain. Il y a
les optimistes et les pessimistes. Les uns sous-évaluent et les autres
sur-évaluent en toute bonne foi. Il y a les faibles qui annoncent une
durée trop courte pour éviter de fâcher leur supérieur ou le client.
Il y a les malins qui surévaluent pour pouvoir ensuite travailler
confortablement, ou pour anticiper d'éventuels aléas, ou encore
pour éviter un jugement négatif en cas de dépassement. Il y a le
sous-traitant malhonnête qui annonce - pour obtenir la commande -
un délai qu'il sait ne pas pouvoir respecter. Autant de comporte-
ments dont le chef de projet doit tenir compte.

© innovaxion 2010 - 25 - www.innovaxion.net


Comme nous l'a indiqué Julien, à ce niveau de connaissance du
projet l'estimateur doit prendre en compte des conditions idéales de
réalisation, et en particulier un effectif lui-même idéal. Ceci peu
paraître théorique, mais en fait cela ne pose pas de problème : les
professionnels savent très bien quel est l'effectif idéal pour exécu-
ter telle ou telle tâche.

Vous ai-je dit que l'oncle Raymond a quelquefois des plaisanteries


d'un goût douteux ?
— Combien de temps faut-il pour faire un enfant ? demande-t-il à
Joséphine.
— 9 mois, non ?
— Non, 5 minutes !
Quand je vous disais que les bons mots de Raymond sont un peu...
à la limite du convenable !

Cette petite anecdote n'est pas sans rapport avec l'estimation des
durées de tâche dans les projets. Prenons l'exemple d'une tâche
dont l'intitulé serait "Approvisionner le motoréducteur". S'agissant
d'un matériel standard dont la référence est connue, l'unique res-
source de cette tâche va lui consacrer moins d'une journée. L'erreur
serait d'affecter cette tâche d'une durée de 1 jour, en oubliant de
prendre en compte le délai de livraison. Ceci conduirait à une large
sous-évaluation de la durée du projet.
La marge pour aléas est une durée que le chef de projet se ré-
serve pour se garantir des incidents imprévisibles pouvant compro-
mettre le délai global. Les marges pour aléas peuvent être gérées
de façon visible en intercalant en fin de chaque phase un tampon
de sécurité. Le plus souvent les marges pour aléas sont masquées :
l'estimateur les intègre de façon discrète en surestimant les durées
de tâches. Les marges pour aléa sont sans aucun rapport avec les
marges calculées, marge libre et marge totale, dont nous parlerons
un peu plus loin.

© innovaxion 2010 - 26 - www.innovaxion.net


Point-clé :
Il existe pour chaque tâche un effectif optimal et une durée optimale
pour lesquels le coût de tâche est minimal.

3.4- Notion d'antériorité et réseau logique

— A ton avis, Sophie, quelle est la durée du projet ? demande


Julien.
— Facile, je suis première de ma classe en calcul mental, répond
Sophie, 3 plus 4 plus 8 plus 5 plus...... ça fait 45 jours !
— Eh bien non, Sophie, je vais te montrer que la durée du projet
est de 17 jours ouvrés et non de 45.
— Mais, je suis sure que mon calcul est juste !
— Ton calcul est juste, Sophie, mais il ne vaudrait que dans des cas
très particuliers. Le premier de ces cas serait que, pour des raisons
techniques, aucune tâche ne puisse être réalisée en même temps
qu'une autre. Le second et dernier cas de figure serait que
techniquement parlant, des tâches puissent être réalisées
simultanément, mais que l'on ne dispose pas de suffisamment de
moyens pour qu'il en soit ainsi. Dans notre projet, ce n'est pas le
cas
— Je ne comprend rien à ce que tu me dis.
— Prenons un exemple : rien n'empêche que maman désherbe
l'allée pendant que papa répare la charpente. Comme nous sommes
quatre, plus quelques voisins, certaines tâches pourront être
menées parallèlement et donc la durée du projet sera inférieure au
total des durées de tâche.
— Mais comment tu sais que la réponse est 17 jours ? Tu te
moques de moi.
— Sophie, il est temps que je t'explique le principe de base de la
planification de projets, la notion d'antériorité, et que nous

© innovaxion 2010 - 27 - www.innovaxion.net


construisions ensemble le réseau logique de notre projet. Nous
allons réfléchir à l'ordre logique des tâches. Prenons comme
exemple les deux tâches "réparer la charpente" et "déposer les
tuiles". Dans quel ordre doivent-elles absolument se dérouler ?
— Malik m'a expliqué qu'il faut d'abord enlever les tuiles pour
pouvoir ensuite démonter les pièces de charpente abîmées.
— Eh bien Sophie, tu as compris la notion d'antériorité : il y a un
ordre qui ne dépend que des contraintes techniques. C'est cet ordre
logique qui est traduit dans le réseau logique. Nous allons
représenter chaque tâche par un rectangle. Les rectangles auront
tous la même taille quelle que soit la durée de la tâche qu'ils
représentent. Puis nous allons lier les rectangles entre eux par des
flèches. Les flèches représentent les contraintes d'antériorité et rien
d'autre.
— Et pour le lot dont j'ai la charge, maman m'a expliqué qu'il
faudra d'abord désherber l'allée, sinon on ne verrait pas les nids de
poule. Donc il faut mettre une flèche depuis "Désherber la voie
d'accès" vers "Reboucher les nids de poule"
— Parfaitement, Sophie
— Mais pour les 17 jours ?
— Patiente encore une petite minute, je vais t'expliquer ça aussi.

Voici ci-dessous le schéma réalisé par Julien et Sophie. Vous ai-


je dit que notre ami Julien travaille, avec la complicité de son Pro-
fesseur Monsieur Panazol, sur le logiciel de planification de projets
de l'école ?

© innovaxion 2010 - 28 - www.innovaxion.net


Capture d'écran Microsoft Project 2010, affichage réseau logique

Avant de laisser nos amis poursuivre leur passionnante discus-


sion, voyons quelques points de théorie.
Dans la suite logique des tâches du projet, chaque tâche peut
avoir une ou plusieurs tâches antérieures, on dit aussi antécédents
ou encore prédécesseurs, et une ou plusieurs tâches postérieures,
ou successeurs. L'utilisation du masculin est un usage. La notion
d'antériorité est essentielle en planification.
Voici une règle fondamentale en gestion de projets : On ne peut
planifier que dans un univers certain. Autrement dit il ne peut y
avoir dans un planning aucune place pour l'inconnu. Ceci a trois
conséquence pratiques.
Premièrement, les relations du type "ou" n'existent pas en plani-
fication. Julien ne nous l'a pas expliqué, mais sur son schéma cha-
que fois que plusieurs flèches convergent vers une tâche il faut y

© innovaxion 2010 - 29 - www.innovaxion.net


voir une fonction "et". Par exemple pour réparer la charpente il
faut avoir approvisionné les matériaux et déposé les tuiles. De
même, pour planter les arbustes il faut avoir travaillé le terrain et
approvisionné les plantes. Bien entendu, lorsqu'une tâche possède
plusieurs tâches antérieures, cette tâche ne peut commencer que
lorsque tous ses prédécesseurs sont achevés. C'est donc toujours la
tâche la plus tardive qui pilote.
Deuxièmement les choix (si.....alors) ne sont pas pris en compte
dans un planning. Prenons encore un exemple dans le projet de nos
amis. La ferme se situe dans une zone rocheuse. Julien peut légiti-
mement penser que le creusement des trous pour planter les arbres
posera problème si l'on trouve du rocher. Sa réponse pourrait être
la suivante : si l'on trouve du rocher, on louera un brise-roche et on
allongera la durée de la tâche "planter les arbustes". Réponse logi-
que mais inacceptable en planification. En effet plus question de
garantir un délai et un coût si le planning comporte des incertitu-
des. S'il y a des incertitudes et des choix à faire (et il y en a tou-
jours), les incertitudes doivent être levées et les choix effectués
avant d'entreprendre la planification. En pratique, Julien doit, avant
de planifier le projet, se rendre sur place et sonder le terrain. Il aura
ainsi une certitude quant à devoir louer ou pas un brise-roche. Ceci
peut paraître anecdotique, mais c'est fondamental.
Enfin et pour les mêmes raisons la planification ne supporte pas
les itérations (boucles de calcul), sauf si le nombre de ces itérations
est connu. Supposons que Malik souhaite faire des économies et
qu'il fasse le raisonnement suivant : Je dépose les tuiles, je rem-
place quelques pièces de charpente, je repose les tuiles. Si la char-
pente se déforme trop sous le poids des tuiles je recommence, et
ainsi de suite jusqu'à atteindre une planéité satisfaisante. Dans un
pareil cas il devient impossible de prévoir une durée de projet (et
un coût). Les itérations ne sont acceptables que si leur nombre est
connu à l'avance. Par exemple dans le cas des projets innovants ou

© innovaxion 2010 - 30 - www.innovaxion.net


des développements de logiciels, il est classique de réaliser en bou-
cle plusieurs versions, de plus en plus abouties, du produit.

Points-clé :
1- Les liens d'antériorité traduisent les contraintes techniques et rien
d'autre
2- On planifie dans un univers certain. Les incertitudes doivent être le-
vées dans la phase de faisabilité.

— Sophie, il faut que je te parle du chemin critique.


— Tu veux parler de l'allée de la maison de Florac ?
— Non, le chemin critique c'est la notion la plus importante du
domaine de la planification de projets. Reprenons le réseau logique
du projet et notons sur chaque tâche sa durée. Tu te souviens que
la durée du projet n'est pas la somme des durées de tâches.
— Oui, Julien
— Pour l'instant nous faisons de la planification par les durées,
c'est à dire que nous travaillons à ressources illimitées.
— Encore une fois ton monde parfait, dit Joséphine, qui suivait la
discussion d'une oreille distraite.
— Oui, la planification c'est comme les romans : l'auteur construit
l'intrigue progressivement, en ajoutant un ingrédient nouveau à
chaque paragraphe. En planification, c'est pareil. On commence
comme vous l'avez vu par établir la liste des tâches, puis on
construit le réseau logique, ensuite on détermine la durée idéale
des tâches, puis on calcule la durée du projet. A ce stade la durée
calculée est théorique puisque à ressources illimitées. Nous en
sommes là. Pour la suite de ma démonstration, j'ai provisoirement
codifié les tâches de notre projet de A à L. Ne cherche pas de
logique dans la codification, elle est totalement arbitraire. Es-tu
d'accord, Sophie, sur le raisonnement suivant : pour aller, sur

© innovaxion 2010 - 31 - www.innovaxion.net


notre schéma, du jalon début au jalon fin il y a plusieurs chemins,
donnes-m'en la liste.

A J

B H
L
F

I
C

— Eh bien, il y a les chemins AJK - EJK - G - DH - BFIL et CIL


— Très bien, Sophie, maintenant parmi ces six chemins quel est, en
jours ouvrés, le plus long ?
— Le plus long chemin, c'est EJK qui fait un total de 4+8+5 soit 17
jours ouvrés.
— Sophie, tu viens de me donner deux informations capitales sur
notre projet : sa durée, 17 jours, et son chemin critique qui est tout
simplement la suite des tâches E, J et K.
— Tu veux dire, Julien, que nous n'allons réaliser que trois tâches
de notre projet.
— Non, bien sur, toutes les tâches seront réalisées. Mais je te
rappelle que nous disposons (fictivement) de ressources en quantité

© innovaxion 2010 - 32 - www.innovaxion.net


illimitée. En conséquence toutes les tâches autres que E, J et K
seront réalisées en même temps que ces trois-là. On dit aussi en
temps masqué. La durée du projet est tout simplement la durée de
la plus longue suite de tâches. En toute logique, les tâches qui
constituent le réseau logique sont appelées tâches critiques. En
planification de projets, il est d'usage de signaler les tâches
critiques par la couleur rouge.

Définition :
Le chemin critique est la suite des tâches à marge nulle.

3.5- Le calendrier du projet

— D'accord pour 17 jours, Julien, mais quel jour doit-on


terminer ?
— Très simple, Sophie. Voici le calendrier du mois de juillet. Les
samedi et dimanche sont grisés car nous ne travaillerons pas ces
jours-là. Le 14 juillet est grisé pour signaler que nous ne
travaillerons pas non plus ce jour-là : c'est fête nationale et nous
assisterons au défilé et au feu d'artifice. Sachant que nous
commençons les travaux le lundi 5 au matin, dis-moi, Sophie, quel
jour nous devons finir ?

© innovaxion 2010 - 33 - www.innovaxion.net


Capture d'écran MS Project 2010.
Boite de dialogue "modifier le temps
de travail".

— Eh bien 1, 2, 3.... 17. Nous finissons le 28 juillet au soir !


— Bravo Julie, tu as compris les base de la planification. Nous
allons pouvoir bientôt quitter notre monde idéal et passer à la
vraie vie des projets...

Oublions les codes alphabétiques que Julien avait utilisés par


pur souci pédagogique. Voici ci-dessous le réseau logique avec la
mise en évidence (en trait fort) du chemin critique et avec les dates
de fin de chaque tâche. Le projet se termine effectivement le 28
juillet.

© innovaxion 2010 - 34 - www.innovaxion.net


Capture d'écran Microsoft Project 2010, affichage réseau logique

Si vous avez déjà utilisé le logiciel Microsoft Project vous ve-


nez probablement de découvrir l'affichage réseau logique ou au
moins l'usage que l'on peut en faire. La plupart des utilisateurs de
logiciels de planification ignorent cette fonction pourtant essen-
tielle de leur logiciel. Cent pour cent des utilisateurs travaillent sur
le diagramme de Gantt, que nous allons présenter au prochain pa-
ragraphe. Nous verrons plus loin qu'ils ont parfaitement raison,
mais faute de s'être intéressés au réseau logique il leur arrive de
s'interroger sur la présence de tâches de couleurs différentes, et
surtout d'utiliser les liens logiques à contre-sens.
L'outil "réseau logique" a deux qualités indéniables : Sur le plan
pédagogique il permet de mettre en évidence les notions fonda-
mentales d'antériorité des tâches et de chemin critique. De façon
plus opérationnelle, utilisé en phase de faisabilité c'est un formida-

© innovaxion 2010 - 35 - www.innovaxion.net


ble outil de simulation et d'animation de réunion. Pour bénéficier
de toute sa puissance il faut Bien entendu travailler sur un logiciel
de planification et utiliser un vidéoprojecteur pour l'animation.

3.6- Le diagramme de Gantt


Nous avons vu le grand intérêt du réseau logique. Pourquoi
donc les utilisateurs utilisent-ils essentiellement cet autre outil
qu'est le diagramme de Gantt ? La réponse est simple : Le réseau
logique a deux défauts majeurs qui sont le parfait symétrique de
ses qualités : La taille des rectangles ne rend pas compte de la du-
rée des tâches, et surtout il ne comporte pas d'échelle de temps.
Conséquence de ce dernier point : les acteurs du projet ne trouvent
pas de façon évidente la réponse aux questions pour eux essentiel-
les : "quelle est la période de déroulement de telle tâche" et surtout
"telle et telle actions sont-elles simultanées ou pas".
Voici ci-dessous le diagramme de Gantt du projet Cévennes. Il y
a peu de commentaires à faire sur cet outil tant sa lecture est aisée.
A gauche la liste des tâches. A droite des barres horizontales figu-
rant la position des tâches sur l'échelle de temps. Les flèches repré-
sentant les liens d’antériorité sont présentes, même si leur lecture
est moins aisée que sur le réseau logique.

© innovaxion 2010 - 36 - www.innovaxion.net


Capture d'écran Microsoft Project 2010, affichage diagramme de gantt.

Le diagramme de Gantt est un excellent outil de prévision et par


conséquent d'anticipation. C'est aussi, du fait de sa facilité de lec-
ture un très bon outil de communication. Nous verrons plus tard
que c'est aussi, en phase de réalisation des travaux, un outil de pi-
lotage parfait, au sens où il nous permettra de détecter immédiate-
ment toute dérive, d'en simuler l'impact et de prendre en toute con-
naissance de cause les bonnes décisions.
C'est par simple facilité que les illustrations de ce document
sont réalisées avec un logiciel de planification. Beaucoup de chefs
de projet réalisent leurs diagrammes de Gantt sur des logiciels de
bureautique, tableur ou traitement de texte. Le principal intérêt des
logiciels de planification est l'automatisation des calculs, ce qui les
rend aujourd'hui si utiles. En contrepartie l'utilisation des logiciels
de planification requiert une très bonne compréhension de toutes
les finesses de la discipline dont nous n'avons à ce stade découvert
qu'une petite partie.

© innovaxion 2010 - 37 - www.innovaxion.net


3.7- Un peu d'histoire
Nous venons de découvrir les deux outils essentiels et actuels
de la planification de projets que sont le réseau logique et le dia-
gramme de Gantt. Peut-être le lecteur que vous êtes a-t-il suivi un
enseignement en gestion de projets au cours de ses études scolaires
ou universitaires. Si c'est le cas vous êtes peut-être surpris de
n'avoir pas retrouvé dans ce texte des mots que vous avez appris
comme "PERT", méthodes "PDM" et "MPM". Je me propose dans
ce paragraphe de remédier à votre frustration.
Si l'homme sait depuis des milliers d'années gérer de grands
projets comme la construction des pyramides et des cathédrales ou
encore les conquêtes militaires, il est singulier de constater que la
plupart des techniques de planification (à l'exception notable du
diagramme de Gantt) ont vu le jour en une décennie, dans les an-
nées 1950. Il est vrai que dans ces années-là la guerre froide justi-
fiait le lancement de grands projets militaires, que les pays déve-
loppés vivaient la période des "trente glorieuses" favorables aux
grands projets civils, que les mathématiciens développaient la
théorie des réseaux, et que l'informatique naissait.
Commençons par le début. Il ne nous reste rien des méthodes
d'organisation de projet en vigueur au temps des pyramides. Si el-
les nous étaient parvenues il est peu probable qu'elles nous seraient
utiles tant les conditions ont changé. Main d’œuvre pléthorique et
corvéable, financements illimités et délais comptés en décennies
ne sont plus vraiment d'actualité !
C'est du domaine militaire qu'est venue la première approche
méthodique de la gestion des projets. Au XVII° siècle, l'ingénieur
militaire français Vauban lance de grands chantiers de fortification.
Il fait effectuer le chronométrage des tâches élémentaires, aboutis-
sant ainsi à une meilleure maîtrise des délais. Il fait le constat que
l'effort d'organisation est plus que largement compensé par la ré-

© innovaxion 2010 - 38 - www.innovaxion.net


duction des délais de réalisation.
Nous voici trois siècles plus tard, au début de l'ère industrielle,
aux Etats-Unis. En 1917, Henry Gantt, disciple de Frédéric Tay-
lor doit organiser la production d'un atelier. Il développe un sys-
tème de représentation graphique des activités en fonction du
temps. Le diagramme de Gantt était né !
En 1957, toujours aux Etats-Unis, La société Du Pont De Ne-
mours vient de mettre au point la première méthode de planifica-
tion à chemin critique, baptisée CPM (pour Critical Path Method).
l'US Navy adopte la méthode CPM et la baptise PERT (pour Pro-
gram Evaluation and Review Technic). La méthode PERT est une
méthode de type AOA pour "Activity On Arrow". En voici une re-
présentation, les lecteurs qui l'auraient pratiquée au cours de leurs
études la reconnaîtront instantanément tant son graphisme si parti-
culier.

Le graphe PERT.
D = 3 jours G=
jo urs rs
2 jo
F
A =4 jou
4
urs

=
D
B = 2 jours
C
=8
jou E = 5 jours
rs

Décrivons en quelques mots le réseau ci-dessus. Les cercles


sont les nœuds du réseau, ils correspondent à des dates, on les ap-
pelle "étapes". Les flèches (ou arcs) correspondent aux tâches. Le
chemin critique est représenté en trait fort. Quant à la flèche notée
"F", elle correspond à une "tâche fictive". La notion de tâche fic-

© innovaxion 2010 - 39 - www.innovaxion.net


tive est une exclusivité des méthodes AOA, elle sert à lever une
ambiguïté du graphe. Elle matérialise le lien d'antériorité entre A et
D (D est successeur de A). Si cette notion de tâche fictive n'est pas
claire pour vous, pas d'inquiétude, vous avez peu de chance d'en
avoir besoin dans votre vie professionnelle, nous allons voir pour-
quoi.
Si la planification par chemin critique est née aux USA, les
Français ne sont pas en reste. En 1957 EDF met au point la mé-
thode PERL (Planification d'Ensemble par Réseau Linéaire), très
proche du PERT américain. La différence essentielle est que les
segments représentant les tâches sont horizontaux et que leur lon-
gueur est proportionnelle à la durée. On peut considérer le graphe
PERL comme un Gantt fléché.
Toujours en France, en 1958 Bernard Roy met au point la mé-
thode MPM (Méthode des Potentiels Métra). Celle-ci sera utilisée
pour la construction des centrales nucléaires et du paquebot
"France" Il s'agit d'une méthode potentiel-tâches ou AON (Activity
On Noddles). Inutile de vous en montrer un exemple, c'est tout
simplement celle que nous avons utilisée jusqu'à présent sous le
nom de "réseau logique". La méthode MPM est d'utilisation plus
aisée que PERT car très intuitive et ne nécessitant pas le recours
aux tâches fictives.
Quoi de neuf depuis les années 1950 ? Peu de choses. Quelques
perfectionnements ont été apportés à la méthode MPM pour la ren-
dre plus réaliste : le lien d'antériorité (ou fin-début) n'est plus le
seul type de lien pris en compte. La méthode MPM est devenue au
fil de ces évolutions méthode PDM (Precedence Diagram
Method). Nous consacrerons un paragraphe aux liens particuliers
qui font la différence entre MPM et PDM.
Qu'en est-il de ces méthodes aujourd'hui ? La situation est ex-
trêmement simple : N'ont survécu des années cinquante que le dia-

© innovaxion 2010 - 40 - www.innovaxion.net


gramme de Gantt et le réseau PDM !
Pardon : Le PERT survit et prospère en France dans les milieux
de l'éducation nationale ! On pourrait en sourire si nos enfants
n'avaient pas mieux à faire que d'apprendre une méthode parfaite-
ment obsolète. Par ailleurs beaucoup de spécialistes continuent
d'utiliser, par abus de langage, le terme "PERT" pour désigner le
réseau PDM. Pour éviter toute ambiguïté je vous conseille
d'utiliser comme je le fais dans ce document l'expression "réseau
logique".
Les logiciels de planification (dont Microsoft Project) représen-
tent graphiquement le projet sous les deux formes qui nous sont
désormais familières : le diagramme de Gantt et le réseau logique.
En dehors du réseau logique et du diagramme de Gantt, y a-t-il
d'autres outils de planification ? Oui. Citons-en deux. D'abord le
"communigramme", tout à fait compatible avec Gantt et réseau
logique. Le communigramme offre l'avantage de centrer l'attention
sur les flux de communication et les responsabilités dans la circu-
lation de cette information. Malgré son intérêt nous ne parlerons
pas plus du communigramme tant son utilisation est confidentielle.
Enfin pour être complet citons le planning "chemin de fer". Plus
question ici de Gantt ni de réseau logique, le planning chemin de
fer est adapté à un cas particulier pour lequel le modèle en réseau
n'est pas pertinent : les chantiers linéaires. Il s'agit là des projets
comme la construction d'autoroutes, de tunnels ou de voies ferrées.
Dans ces projets il est hors de question d'attendre la fin d'une acti-
vité (par exemple la mise en place du ballast sur une voie ferrée)
pour entreprendre l'activité suivante (la pose des rails). La seule
exigence est que la pose des rails en un point donné soit toujours
postérieure à la mise en place du ballast. A cette condition les deux
activités peuvent être simultanées. Les lecteurs curieux d'en savoir
plus sur le communigramme ou le planning chemin de fer trouve-
ront sans problèmes sur internet de la documentation sur ces deux

© innovaxion 2010 - 41 - www.innovaxion.net


méthodes.

3.8- Les marges

— Sophie, sais-tu que notre planning est ordonnancé au plus tôt ?


— Peux-tu me traduire ça en français, Julien ?
— Tu te souviens que nous avons trois tâches critiques, qui forment
le chemin critique.
— Oui, et que toutes les autres seront réalisées en temps masqué.
— Voici une question simple : Quand doit-on approvisionner les
plantes ?

chemin critique

— Eh bien si j'en crois notre diagramme de Gantt, les lundi 4 et


mardi 5 juillet ?
— Très bien. Maintenant supposons que ce soit moi qui achète les
plantes, Joséphine qui les plante et Malik qui sème le gazon. Je
voudrais que tu me dises ce qui se passe si on retarde d'une
semaine, soit 5 jours ouvrés, l'achat des plantes.

© innovaxion 2010 - 42 - www.innovaxion.net


— Ça évitera qu'elles ne soient flétries quand on va les planter du
13 au 20 juillet.
— Remarque très intelligente, Sophie, et nous y reviendrons plus
loin, mais ma question avait un autre signification : Ce retard a-t-il
une incidence sur la suite du déroulement du projet ?
— Non, je ne crois pas

— Je suis de ton avis. Encore une question : Maintenant, on


retarde la tâche approvisionner les plantes non pas de 5 jours mais
de 9 jours.
— Eh bien comme on ne peut planter les arbustes que si on les a
acheté, Joséphine commencera les plantations avec 2 jours de
retard
— Et Malik sèmera le gazon les lundi et mardi au lieu de jeudi et
vendredi.

— Dernière question. C'est maintenant avec un retard non pas de


5, non pas de 9, mais de 12 jours que l'on va retarder l'achat des
plantes. Quelles conséquences sur la suite du planning ?

© innovaxion 2010 - 43 - www.innovaxion.net


— Les plantations vont commencer avec 5 jours de retard, et pareil
pour la tâche "semer le gazon"
— Et la date de fin de projet est retardée de 2 jours. Vois-tu une
autre modification importante ?

chemin critique

— Le chemin critique n'est plus le même ! Les barres qui étaient


rouges sont bleues et trois tâches bleues sont devenues rouges !
— Il est temps de théoriser tout ça, Sophie. Tu as vu que la tâche
"Approvisionner les plantes" peut être retardée d'une certaine
durée D1 sans aucune conséquence sur la suite du projet. Tu as vu
que si la valeur du retard est comprise entre D1 et une valeur D2,
certaines des tâches successeurs de "Approvisionner les plantes"
sont retardées mais sans que la date de fin de projet ne soit
compromise. Enfin si le décalage est supérieur à D2 la date de fin
de projet se décale. Eh bien D1 s'appelle marge libre et D2
s'appelle marge totale. Bien entendu ces deux valeurs de marge ne
valent que pour la tâche "Approvisionner les plantes". Encore une
question, Sophie : Quelles sont les valeurs de marge de la tâche
"Approvisionner les plantes" ?

© innovaxion 2010 - 44 - www.innovaxion.net


— On peut faire glisser la barre de 7 jours sans décaler aucun
successeur, puis encore de trois jours avant de décaler la date de
fin de projet. Donc la marge libre est de 7 jours et la marge totale
de 7+3 soit 10 jours.
— Une dernière question : Quelles sont les marges d'une tâche
critique?
— Si je fais glisser la barre d'une tâche critique, la date de fin de
projet se décale aussitôt, donc les tâches critiques n'ont pas de
marge, ni libre ni totale.
— Très juste, Sophie, et c'est précisément le fait qu'elle n'ait pas de
marge qui définit une tâche critique. Maintenant je t'explique les
changements de couleur des barres. Le logiciel signale en rouge
les tâches critiques. A partir du moment ou nous avons décalé (de
deux jours) la date de fin de projet, nous avons de fait donné deux
jours de marge au chemin critique, qui a donc cessé de l'être. Par
contre les trois tâches qui jusque là avaient de la marge l'ont
perdue. Fin de cette très importante leçon !
— Eh ! Tu m'avais parlé d'ordonnancement au plus tôt, expliques-
moi donc ce que cela signifie !
— Dans notre planning initial, nous avions, sans le dire, planifié
les tâches non critiques à leur position "dès que possible". Voilà ce
que l'on appelle la planification (ou l'ordonnancement) au plus tôt.

Définitions :
- La marge libre d'une tâche est la durée dont on peut décaler sa date
de fin sans retarder la date de début au plus tôt du plus précoce de
ses successeurs.
- La marge totale d'une tâche est la durée dont on peut décaler sa
date de fin sans retarder la date de fin du projet.

Nos amis viennent de nous expliquer la question des marges


d'une façon très visuelle, en imaginant le glissement des barres sur
le diagramme de Gantt. Vous imaginez bien qu'il existe une mé-

© innovaxion 2010 - 45 - www.innovaxion.net


thode de calcul des marges. Voici rapidement décrite cette mé-
thode.

3.9- Le calcul des marges


Même si aujourd'hui les calculs de marge sont informatisés, il
n'est pas inutile de comprendre la logique de ces calculs très sim-
ples et auxquels se sont livrés des générations de planificateurs.
Par ailleurs la lecture de ce paragraphe sera utile à ceux, ensei-
gnants et étudiants appelés à calculer les marges sans l'aide de l'in-
formatique.
Prenons l'exemple d'un projet comprenant seulement quatre ac-
tivités distinctes codifiées de A à D. Le réseau logique de ce projet
est représenté ci-dessous. Les durées sont indiquées en jour ouvrés.

Début au + tôt Fin au + tôt


A = 12 j Légende
Début au + tard Fin au + tard

Début 0j
B=6j Fin 0j

D=2j

C=3j

Dans les cellules vides du schéma ci-dessus nous allons mettre


les dates de début et de fin des tâches.
Pour simplifier les calculs, nous ferons deux conventions : Tout
d'abord nous allons considérer que la première tâche commence le

© innovaxion 2010 - 46 - www.innovaxion.net


jour zéro. Enfin les dates sont données de matin à matin c'est à dire
que pour une tâche qui finirait le soir du jour 5 nous mettrons la
valeur 6.
Le calcul se fait en deux temps : Nous allons tout d'abord réali-
ser l'ordonnancement au plus tôt en travaillant de gauche à
droite. Pour cela nous mettrons dans les cellules du haut les dates
de début au plus tôt et de fin au plus tôt de tâche. Du fait de nos
conventions, la tâche A commence le matin du jour zéro. Elle se
termine 12 jours plus tard le soir du jour 11. Toujours selon nos
conventions nous indiquons comme date de fin de A la valeur 12.
Il en est de même pour toutes les tâches. Seul le cas des tâches
ayant plusieurs antécédents demande quelques instants de ré-
flexion car il faut reporter la date de fin du prédécesseur le plus tar-
dif.
Voici ci-dessous le réseau logique ordonnancé au plus tôt. Grâce
à nos conventions la valeur de date du jalon fin correspond à la du-
rée du projet, soit 12 jours.

0 12 Début au + tôt Fin au + tôt


A = 12 j Légende
Début au + tard Fin au + tard
0
Début 0j 0 6 12
B=6j Fin 0j

6 8
D=2j
0 3
Ordonnancement aval
C=3j
Dates au plus tôt

Nous allons maintenant réaliser l'ordonnancement au plus


tard, c'est à dire en choisissant les dates les plus tardives de cha-

© innovaxion 2010 - 47 - www.innovaxion.net


que tâche. Pour cela nous allons travailler de droite à gauche et
remplir les cellules du bas. Attention. Pour les tâches qui ont plu-
sieurs successeurs la date à retenir comme date de fin au plus tard
du prédécesseur est la plus petite des valeurs.

0 12 Début au + tôt Fin au + tôt


A = 12 j Légende
0 12 Début au + tard Fin au + tard
0
Début 0j 0 6 12
0 B=6j Fin 0j
4 10 12
6 8
D=2j
0 3
10 12
Ordonnancement amont
C=3j
Dates au plus tard
7 10

Voici donc entièrement renseigné notre réseau logique. Il nous


reste à en tirer les conclusions.
Vous constatez que pour l'une des tâches les valeurs au plus tôt
et au plus tard sont identiques. Il s'agit de la tâche A. C'est tout
simplement l'indication que cette tâche n'a pas de marges, donc
qu'elle est critique.
Prenons maintenant comme exemple le tâche C. Elle se termine
au plus tôt le jour 3 et au plus tard le jour 10. Sa marge totale est
donc de 10 - 3 = 7 jours. Quant à sa marge libre, il faut pour la cal-
culer s'interroger sur le début au plus tôt de ses successeurs. C se
termine au plus tôt le jour 3. Son seul successeur commence le 6
au plus tôt. La marge libre de C est de 6 - 3 = 3 jours.

— Viens voir, Sophie ! Monsieur Panazol m'a montré comment on


peux paramétrer le logiciel pour visualiser les marges. Les marges

© innovaxion 2010 - 48 - www.innovaxion.net


sont calculées par le logiciel, il suffit d'en demander l'affichage.
J'ai choisi de fines barres noires pleines pour la marge libre et
hachurées pour la marge totale. Comme ma marge libre est, par
définition, au mois égale à la marge libre, j'ai superposé les barres,
noir plein sur noir hachuré pour améliorer la lisibilité. J'ai masqué
les liens, toujours par souci de lisibilité. Comme tu peux le voir, le
logiciel trouve les mêmes valeurs que toi pour la tâche
"Approvisionner les plantes" : La barre noire occupe 7 jours
ouvrés et la barre hachurée 7 + 3 soit 10 jours.
— D'accord, Julien, mais j'avais trouvé avant le logiciel !

Capture d'écran Microsoft Project 2010, affichage diagramme de Gantt

3.10- Chemins critiques multiples


Une question couramment posée par les débutants en planifica-
tion est de savoir s'il peut exister plusieurs chemins critiques dans
un même planning. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit ainsi. Il peut
y avoir deux chemins critiques ou même plus.

© innovaxion 2010 - 49 - www.innovaxion.net


Le chemin critique une notion fondamentale de la planification
de projets. Cependant l'idée d'un chemin critique unique reliant
sans discontinuité le jalon début au jalon fin est une vision scolaire
des choses, qui ne vaut que si toutes les tâches sont ordonnancées
au plus tôt. Nous avons vu que le fait que des tâches prennent du
retard peut faire disparaître le chemin critique initial au profit d'un
nouveau chemin critique, partiel celui-ci. Le même résultat s'ob-
tient lorsque, comme nous le verrons plus loin, des contraintes
temporelles sont introduites dans la planification.
L'intérêt de visualiser le chemin critique sur un planning est
d'attirer l'attention du chef de projet sur les tâches qu'il doit contrô-
ler avec une vigilance particulière car elles ont une marge nulle. Il
existe un risque qu'une tâche assortie d'une marge très faible
n'échappe à la vigilance du chef de projet. Sur un projet d'une du-
rée de plusieurs mois il n'y a pas de différence réelle d'importance
entre une tâche critique, apparaissant en rouge, et une tâche qui au-
rait un seul jour de marge, apparaissant en bleu. Les bons logiciels
de planification autorisent l'affichage des tâches qui auraient une
marge totale inférieure à une certaine valeur, paramétrable. Les
suites de tâches sous-critiques forment le ou les chemins sous-cri-
tiques.
Traditionnellement les plannings sont ordonnancés au plus tôt à
partir d'une date de début, la date de fin étant calculée. Nous parle-
rons plus loin des "rétro-plannings" qui sont des plannings délibé-
rément ordonnancés au plus tard. Dans un rétro-planning, toutes
les tâches sont critiques.
Les techniques modernes de planification tendent à prendre en
compte au plus près les réalités de terrain, de façon que le planning
prévisionnel soit l'image la plus exacte de la réalité à venir. Il s'en-
suit que le chemin critique perd son apparence initiale et que le ré-
seau logique se trouve parsemé de tronçons de chemins critique.
Cette apparence de désordre ne manque pas de troubler les planifi-

© innovaxion 2010 - 50 - www.innovaxion.net


cateurs inexpérimentés.

3.11- Typologie des activités du projet


Depuis le début de cet ouvrage, nous avons parlé de tâches, de
phases, de lots de travaux et de jalons. Il est temps de brosser un
tableau complet des différentes activités du projet.
Une tâche est une activité qui contribue à l'élaboration du résul-
tat du projet. Généralement elle a une durée, elle mobilise des res-
sources et elle contribue à la réalisation de livrables.
Les tâches peuvent être regroupées en phases. Les phases cor-
respondent à des périodes de durée du projet. A chaque fin de
phase le produit du projet change d'état. Classiquement le produit
se trouve successivement à l'état conçu, puis défini, puis réalisé,
puis qualifié, puis enfin opérationnel.
Les tâches sont également regroupées en lot de travaux. Comme
nous l'avons vu le regroupement en lots correspond à une logique
d'attribution de responsabilité (ou de marché).
Sur le diagramme de Gantt, phases et lots de travaux sont repré-
sentés par des tâches récapitulatives. Il est d'usage que les barres
des tâches récapitulatives soient représentées sur le diagramme de
Gantt par un segment de couleur noire dont les extrémités pointent
vers le bas. Les tâches regroupées sous une même récapitulative
sont appelées subordonnées.
Un jalon est une tâche de durée nulle ou négligeable mais qui
marque un événement important pour le déroulement du projet. Le
jalon n'a pas d'existence naturelle dans un planning. Le planifica-
teur l'introduit dans une intention précise. On positionne des jalons
pour marquer la fin d'une phase ou d'un lot de travaux, dans le
principal but de contrôler la progression du projet et de rendre
compte de cette progression aux instances supérieures : comité de

© innovaxion 2010 - 51 - www.innovaxion.net


pilotage du projet ou client. Le planificateur peut avoir d'autres
motivations : les chefs de projet expérimentés, qui ont vécu l'expé-
rience de nombreuses difficultés et échecs, positionnent des "ja-
lons d'entrée". Le but est de marquer la date à laquelle le client
s'est engagé à fournir des éléments (souvent des données) indis-
pensables à la poursuite du projet. Il n'est pas rare, en effet, que le
client soit à l'origine des retards du projet... et reproche ensuite à
l'équipe projet ces mêmes retards ! Classiquement et quelle que
soit leur nature les jalons sont représentés sur le diagramme de
Gantt par des losanges.
Une tâche externe appartient à un autre projet mais elle condi-
tionne le déroulement du projet considéré. Sa représentation dans
le diagramme de Gantt est appelée "tâche fantôme". Par exemple
l'acheminement des matériaux de construction du projet B peut
être conditionné à la réalisation d'une route, constituant elle-même
le livrable d'un projet A sur lequel le chef de projet de B n'a aucun
pouvoir.
- Une tâche répétitive (ou périodique) se reproduit avec régula-
rité. Elle est caractérisée par une certaine périodicité et un certain
nombre d’occurrences. Le cas typique est constitué par les revues
de projet. L'intérêt de la tâche répétitive est de ne mobiliser qu'une
ligne du planning quel que soit le nombre d'occurences.

3.12- Les attributs de tâche


Une tâche est caractérisée par son code dans la WBS, par son
nom, par ses liens avec ses successeurs et prédécesseurs, par sa du-
rée. Celle-ci peut éventuellement être exprimée en terme probabi-
liste. Le planificateur définit alors pour chaque tâche non pas une
mais trois valeurs de durée : optimiste, modale et pessimiste. Le
logiciel calcule alors la valeur la plus probable de durée du projet,
quelquefois avec un algorithme trop simpliste pour que le résultat

© innovaxion 2010 - 52 - www.innovaxion.net


soit vraiment crédible.
Une tâche peut disposer ou non de marges. Une tâche qui n'a
pas de marge est dite "critique". Une tâche peut devenir critique en
cours de réalisation si ses prédécesseurs ont pris du retard.
Chaque tâche est successivement à venir, en cours puis achevée.
Son pourcentage d'avancement passe progressivement de la valeur
0% (à venir) à la valeur 100% (achevée).
- Une tâche peut être fractionnée c'est à dire interrompue puis
reprise plus tard. Bien que pénalisant en terme de productivité, le
fractionnement permet, comme nous le verrons plus loin, de résou-
dre certains cas de sur-utilisation des ressources.

3.13- Les différents types de liens


Le réseau PERT, dont nous avons parlé, n'autorisait que le sim-
ple lien d'antériorité. Le progrès était énorme puisque le PERT ren-
dait possible le calcul du projet, manuellement ou à l'aide des tout
premiers ordinateurs.
L'avènement de la micro-informatique a permis de mettre à la
disposition du plus grand nombre des logiciels de planification.
Ceux-ci sont de plus en plus performants. Aujourd'hui la plupart
des logiciels de planification offrent la possibilité de lier les tâches
entre elles avec un réalisme accru, par des liens autres que le sim-
ple lien d'antériorité.
Reprenons le projet de nos amis les Giraud et intéressons-nous
à la remise en état de la voie d'accès. Ce lot comporte deux tâches.
On a compris que la logique d’enchaînement des tâches est d'abord
d'arracher les mauvaises herbes, ce qui permet de repérer les "nids
de poule" pour pouvoir ensuite les reboucher. Voici le planning de
Julien et Sophie pour ce lot :

© innovaxion 2010 - 53 - www.innovaxion.net


La simple logique d'antériorité ne résiste pas à une analyse plus
fine. La voie d'accès fait 200 mètres de long. Rappelons que nous
planifions par les durées c'est à dire sans nous préoccuper de la
disponibilité des ressources. Le simple bon sens amène à se de-
mander s'il est bien nécessaire de désherber les 200 mètres d'allée
avant de reboucher le premier nid de poule. Nous reprendrons cet
exemple un peu plus loin, après avoir fait un peu de théorie.
Le tableau ci-dessous présente les 3 types de lien de dépen-
dance : Début-début, fin-fin et début-fin.

Lien de fin à début


(ou lien d'antériorité)

Lien de début à début

Lien de fin à fin

Lien de début à fin

Le lien reliant la fin d'une tâche au début de la tâche successeur


est le seul à mériter le nom de lien d'antériorité. Pour les trois au-
tres types on parlera de liens de dépendance. De la même façon,
les termes "prédécesseur" et "successeur" deviennent inappropriés,
notamment dans le cas du lien début-fin. On parlera plutôt de tâche
"pilotante" et de tâche "pilotée".

© innovaxion 2010 - 54 - www.innovaxion.net


A un lien peut être associé un décalage positif (retard) ou néga-
tif (avance). La valeur du décalage s'exprime en temps ouvré, en
temps calendaire ou en pourcentage de la durée de la tâche pilo-
tante. Il est fréquent d'associer un retard à un lien d'antériorité. A
l'époque où les logiciels de planification en étaient à leurs balbutie-
ments, les planificateurs devaient créer des tâches pour tenir comp-
te des temps d'attente obligatoires entre certaines activités, comme
par exemple le temps de prise du béton ou de séchage de la pein-
ture. Ceci ne posait aucun problème sinon de rigueur intellec-
tuelle : une tâche représente une activité et non une absence d'acti-
vité. Par ailleurs l'ajout de tâches nuit toujours à la lisibilité. Au-
jourd'hui le planificateur représente le séchage de la peinture ou
tout autre temps d'attente imposé par un lien de fin à début affecté
d'un retard.
S'il est facile d'imaginer l'usage que l'on peut faire des liens de
type début-début et fin-fin, le lien de début à fin constitue pour
beaucoup une énigme, à tel point que des experts reconnus de la
gestion de projets le considèrent comme strictement inutile.
Voici un petit exemple qui va nous permettre d'illustrer quel-
ques utilisations possibles des liens de dépendance et des décala-
ges.
Imaginons un local vide vers lequel on doit déménager des ar-
chives et le mobilier qui les contient. Le local est disponible 13
jours. Ce local nécessite une mise en peinture du sol. Le projet se
clôture par une fête qui réunit les participants autour d'un buffet.
La préparation de ce buffet, essentiellement composé de produits
frais, doit être effectuée la veille pour des raisons évidentes de qua-
lité.

© innovaxion 2010 - 55 - www.innovaxion.net


- Le lien de "peinture du sol" vers "transfert rayonnages" prend
en compte le temps de séchage de la peinture. Notez que sa durée
s'exprime en jours calendaires car la peinture sèche aussi pendant
les week-ends ! Dans Microsoft Project version française, la lettre
"é" est reconnue comme le marqueur des durées calendaires. Il faut
traduire "jourséc" par "jours écoulés"
- Le lien de "transfert rayonnages" vers "transfert archives" est
un lien début-début avec décalage positif. Pourquoi en effet atten-
dre d'avoir amené la totalité du mobilier pour commencer à trans-
férer le contenu ? Notez que le décalage s'exprime ici en pourcen-
tage de la durée de la tâche prédécesseur.
- Pour comprendre le lien début-fin sans décalage de "Fête de
fin de chantier" vers "Préparation des buffets" il faut avoir en tête
que le planning doit être conçu pour que sa mise à jour soit la plus
automatisée possible. Imaginez que la tâche "Transfert des archi-
ves" ait pris du retard. La saisie de ce retard décale la fin de la tâ-
che "Fête". Grâce au lien début fin la tâche "Préparation des buf-
fets" se trouve automatiquement retardée. J'invite ceux qui dispo-
sent d'un logiciel de planification à planifier ce petit projet et à vé-
rifier par quelques simulations que la modification d'une tâche
quelconque se répercute intelligemment sur le reste du projet.
Revenons un instant au projet des Giraud, et plus précisément
au lot "Remettre en état la voie d'accès". Rappelons que notre sou-
ci était de prendre en compte une réalité de simple bon sens : il
n'est pas nécessaire d'avoir désherbé la totalité de l'allée pour com-

© innovaxion 2010 - 56 - www.innovaxion.net


mencer le rebouchage des trous. Nous avons désormais la solu-
tion : il suffit de relier les deux tâches par un lien de début à début
avec un décalage en retard.

Correctement employés, les liens de dépendance et les décala-


ges apportent un grand réalisme aux plannings.

3.14- La contrainte de localisation temporelle


De même que tous les liens d'un planning ne sont pas des liens
d'antériorité, certaines tâches ne doivent pas être ordonnancées au
plus tôt. Voici quelques exemples de ces exceptions : Une tâche à
laquelle est associée une dépense importante, une tâche dont le li-
vrable est un produit fragile ou périssable, devront être planifiées
le plus tard possible. D'autres tâches dépendent d'un événement ex-
térieur au projet, par exemple la participation à un salon profes-
sionnel. Ces tâches doivent bien entendu être planifiées à la date de
l’événement indépendamment des dates de fin des tâches antérieu-
res.
Encore une fois, les bons logiciels de planification permettent
de fixer des contraintes du type "doit commencer le...", "doit finir
le...", "début au plus tard le..." et plusieurs autres.
La seule précaution que doit prendre le planificateur est de ne
pas abuser des contraintes car elles "rigidifient" le planning et en
conséquence limiterons le logiciel dans les calculs d'optimisation
dont nous parlerons un peu plus loin.

© innovaxion 2010 - 57 - www.innovaxion.net


Points-clé :
- Les liens particuliers et les décalages servent à rendre le planning
plus réaliste.
- Les contraintes temporelles doivent être utilisées avec parcimonie
car elles limitent les calculs d'optimisation du logiciel de planification.

3.15- Les rétro-plannings


En matière de planification de projet la règle a longtemps été
l'ordonnancement au plus tôt qui consiste, rappelons-le, à débuter
chaque tâche dès que la plus tardive des tâches antérieures est ter-
minée. Cette logique qui débouche, nous l'avons vu, sur les notions
de chemin critique et surtout de marges, ne semblait pas pouvoir
être remise en cause tant elle est précieuse pour le Chef de projet,
la présence des marges constituant une assurance contre les aléas.
Puis un bouleversement est intervenu dans un domaine qui n'est
pas la gestion de projets mais la gestion de production. Les japo-
nais ont montré que le modèle prudent, qui consiste, donc, à ordon-
nancer au plus tôt (et à constituer de stocks) n'était pas le bon. Le
juste à temps et les flux tendus sont devenus la règle dans bon
nombre d'organisations.
Cette logique de "tension des flux" a été introduite en gestion de
projets sous la forme de plannings ordonnancés au plus tard, ou
"rétro-plannings". Les tenants du rétro-planning avancent de
nombreux arguments, parmi lesquels le syndrome de l'étudiant et
la loi de Parkinson.
Les étudiants ont la réputation d'attendre le dernier moment
pour effectuer leur travail personnel. Ils ne sont pas les seuls ! En
réalité, la plupart des activités du projet, même planifiées au plus

© innovaxion 2010 - 58 - www.innovaxion.net


tôt, sont réalisées au dernier moment. Alors pourquoi ne pas pren-
dre en compte dès la planification ce qui sera la réalité de la phase
de réalisation ? Voilà ce que l'on appelle le syndrome de l'étudiant.
Quant à la loi de Parkinson on peut résumer la comme suit : "le
temps passé à accomplir une tâche intellectuelle s'adapte automati-
quement au temps disponible". Il ne s'agit pas là d'un comporte-
ment malhonnête des ressources en charge de la tâche considérée,
mais au contraire le plus souvent de perfectionnisme. Les consé-
quences de la loi de Parkinson sont les suivantes : Les marges pré-
vues sont consommées et ne sont donc plus disponibles pour pré-
venir les aléas. Le surcroît de temps passé par la ressource entraîne
un surcoût, le paradoxe étant qu'à ce surcoût ne correspond pas
l'amélioration de qualité du résultat que l'on serait en droit d'en at-
tendre.
Dans un planning ordonnancé au plus tard, la "crise de temps"
créée artificiellement a toutes les chances de générer un plus grand
dynamisme.
Autre avantage : pour toute tâche à laquelle est associée un
achat, le fait de la positionner au plus tard entraîne mécaniquement
une amélioration de la trésorerie du projet.
Le gros argument des japonais en faveur du "juste à temps" est
que ce mode d'organisation est révélateur des dysfonctionnements,
et en conséquence oblige à prendre des mesures correctives. Ceci
vaut également en gestion de projets. Les marges permettent de to-
lérer un certain niveau de laxisme, d'incompétence, d'approxima-
tion. En ordonnancement au plus tard, plus de parachute ! Les
laxistes et les incompétents doivent corriger leur comportement...
ou disparaître du paysage !

© innovaxion 2010 - 59 - www.innovaxion.net


3.16- Echelles de durée et calendrier
Le travail de planification nécessite la définition d'un calendrier
au moins, dans lequel figurent les horaires de travail et les jours fé-
riés correspondant à la catégorie d'acteurs la plus représentée. C'est
le calendrier standard du projet. Dans les exemples de ce paragra-
phe, l'horaire de travail est de 7 heures par jour cinq jours par se-
maine.
En théorie l'échelle de durée du projet devrait être choisie en
fonction de la durée du projet lui-même : en minutes pour le dérou-
lement d'un spectacle, en heures pour un chantier de maintenance
d'usine, en jours pour un chantier de construction d'immeuble, en
semaines pour la conception d'un produit, en mois pour la con-
quête d'un nouveau marché... En pratique, et comme le montre la
simulation ci-dessous les logiciels de planification permettent le
panachage des unités de temps.

Les barres du Gantt représentant les 5 tâches de l'exemple ci-


dessus commencent et finissent simultanément. Ceci peut sembler
simple et évident. Nous sommes pourtant sur une question parmi
les plus mal comprises de la planification. En effet, si la conver-
sion des minutes en heures ou inversement ne pose pas de pro-
blème, il n'en est pas de même pour la conversion des heures en
jours, semaines ou mois. En France il peut paraître naturel qu'une

© innovaxion 2010 - 60 - www.innovaxion.net


semaine d'activité soit l’équivalent de 35 heures. Mais qu'en est-il
aux USA, en Chine ? En pratique l'utilisateur d'un logiciel de pla-
nification doit absolument paramétrer une durée "standard" pour la
journée, la semaine et le mois.
La meilleure façon d'expliquer une notion difficile est souvent
la caricature. Voici un planning qui pourrait laisser penser que le
logiciel sur lequel il a été réalisé est devenu fou. Il n'en est rien et
nous allons voir pourquoi.

Pour commencer, observons qu'il n'y a pas d'anomalie dans la


conversion des heures en minutes. C'est ensuite que les choses de-
viennent surprenantes : à une tâche de 5 jours correspond une barre
du Gantt qui occupe plus de 8 jours de calendrier. Plus surprenant
encore, une tâche de durée une semaine occupe seulement trois
jours de calendrier et la durée du mois est inférieure à la durée de
la semaine ! Cause de tout ceci : un paramétrage volontairement
aberrant du logiciel. Voici les valeurs standard saisies :

Capture d'écran MS Project 2010.


Boite de dialogue options, onglet
"planification"

Nous avons dit plus haut que le calendrier du projet prévoit 7

© innovaxion 2010 - 61 - www.innovaxion.net


heures de durée par journée travaillée. Les débutants ont du mal à
admettre que le logiciel ait besoin d'une valeur "Heures par jour" et
d'autre part que cette valeur puisse être différente de la durée des
journées du calendrier. C'est pourtant l'inverse qui serait anormal :
imaginez une entreprise dirigée par un fantaisiste qui aurait choisi
des horaires de travail parfaitement chaotiques : 2 heures le lundi
(les salariés rentrent généralement fatigués de leur week-end) 12
heures le mardi (il faut bien rattraper le temps perdu la veille) et
ainsi de suite. Dans une telle entreprise et avec un logiciel sim-
pliste, une tâche de durée 1 jour aurait du mal a être achevée si elle
tombe un lundi. A l'inverse la même tâche retardée d'un jour béné-
ficierait de 12 heures de présence des salariés et aurait toutes les
chances d'être réalisée. D'ailleurs, voici ci-dessous comment Pro-
ject 2010 traite le cas. La durée standard de la journée a été para-
métrée à 8 heures. Les plages horaires sont de 8 heures à 10 heures
le lundi et de 8 heures à 20 heures le mardi.

On constate que, quelle que soit la position du début de la tâche


sur l'échelle de temps, le logiciel ajuste la position de fin de façon
que la durée effective corresponde à la valeur de la journée stan-
dard, ici 8 heures.
Nous avons parlé du calendrier du projet. Les bons logiciels de
planification offrent la possibilité de créer une quantité illimitée de
calendriers. Ces calendriers peuvent être affectés au choix à des
projets, à des tâches ou a des ressources. Néanmoins on ne peut
que déconseiller l'abus de cette fonctionnalité : les conflits de ca-
lendriers peuvent amener à des situations qui, logiques du point de
vue du calcul et compréhensibles par un expert, dérouteront la ma-

© innovaxion 2010 - 62 - www.innovaxion.net


jorité des utilisateurs, même expérimentés.

Point-clé :
La durée standard des unités de temps (jour, semaine, mois) doit être
cohérente avec les plages de temps ouvré du calendrier.

© innovaxion 2010 - 63 - www.innovaxion.net


Chapitre 4 - Planifier les ressources

4.1- Les ressources du projet


Est considérée comme ressource toute entité contribuant à la
réalisation d'une tâche. En pratique, les ressources sont des indivi-
dus, des groupes d'individus, des matériels ou des marchandises.
Les ressources humaines peuvent être soit des individus dési-
gnés nommément (Jean, Sarah...) et on parlera alors de ressources
nominatives, soit des ressources dites "génériques" c'est à dire dé-
signées par leur savoir-faire (programmeur, maçon...). Le choix en-
tre ressources nominatives ou génériques est assez simple, plu-
sieurs cas peuvent se présenter : Lorsqu'on planifie un projet qui
doit se dérouler plusieurs mois plus tard, il n'est généralement ni
utile ni possible de savoir nommément qui fera telle ou telle tâche.
L'intérêt de la planification des ressources à ce stade très amont est
double : connaître la charge de travail globale du projet (et le coût
qui en découle) et anticiper sur le besoin futur, spécialité par spé-
cialité, plusieurs mois ou plusieurs années avant. Cette connais-
sance est indispensable pour une bonne gestion prévisionnelle des
effectifs de l'entreprise.
Lorsque la date de début des travaux approche, il devient utile
de remplacer les ressources génériques par les individus qui réali-
seront effectivement le travail.

© innovaxion 2010 - 64 - www.innovaxion.net


Les ressources génériques peuvent être simples, ce qui signifie
que lors du remplacement des ressources génériques par des indi-
vidus, le remplacement se fera un pour un. Elles peuvent être mul-
tiples, une ressource générique représentant alors plusieurs person-
nes. Cette façon de faire offre de nombreux avantages : D'abord
moins de travail pour la création des ressources : il est plus rapide
de créer une ressource "Maçons" représentant 20 personnes que 20
ressources "Maçon 1", "Maçon 2" etc... Ensuite et surtout, L'opéra-
tion de "nivellement" que nous décrirons plus loin sera infiniment
plus facile avec des ressources multiples. Lorsqu'on a choisi des
ressources multiples, deux options se présentent au moment de lan-
cer les travaux : soit le planificateur remplace les ressources géné-
riques par des individus comme nous l'avons vu précédemment,
soit ce sont les responsables de travaux qui puisent dans l'effectif
disponible le nombre de personnes prescrit par le planning.

Simples
Ressources Génériques Programmeur
Maçon
Humaines
Multiples
Les voisins
5 ingénieurs

Nominatives
Sophie
Frédéric

Matériels
Ressources Banc d'essai
Pont roulant
matérielles

Marchandises (matériaux et consommables)


Câble électrique
Béton

© innovaxion 2010 - 65 - www.innovaxion.net


Les matériels (Banc d'essai, engin de chantier, ordinateur), sont
des ressources au même titre que les ressources humaines au sens
où ces biens sont mis temporairement à disposition d'une tâche du
projet, et se retrouvent intacts et disponibles pour une autre affec-
tation une fois la tâche achevée.
Les marchandises (câble électrique, gravier, outillage, ordina-
teur), sont consommées par le projet au sens où ces marchandises
une fois utilisées ne sont plus disponibles pour un autre usage.
Contrairement aux ressources humaines et matérielles les mar-
chandises sont disponibles au niveau du projet en quantité illimi-
tée, et leur utilisation n'est pas liée à un calendrier.
Le calendrier d'une ressource humaine est la description jour
par jour du nombre d'unités de temps (en général des heures) que
cette ressource peut consacrer aux tâches du projet et aux autres
activités.

— Dis moi, Julien, c'est quand que l'on passe du monde idéal -
celui des ressources illimitées - au monde réel ?
— Ne sois pas impatiente, Sophie, nous y arrivons. Voici la liste
des ressources du projet Cévennes :

— Ça veut dire quoi, la capacité maximale de 0,5 sur la ligne qui


me concerne ?
— Tout simplement que tu ne travailleras que la moitié du temps

© innovaxion 2010 - 66 - www.innovaxion.net


sur le projet. Cela te laissera du temps pour ta console de jeu et
l'internet. Pour ce qui me concerne, j'ai réservé un quart de mon
temps à des activités hors projet.
— Et les voisins, ils travaillent le jour et la nuit ?
— Non, bien sur. Le chiffre 3 signifie que j'ai prévu un maximum
de trois voisins pour nous aider.

4.2- L'équilibre charge - capacité


Avant d'aller plus loin avec nos amis les Giraud, nous allons
passer en revue les principales notions de la gestion des ressources.
Les termes utilisés ci-après sont les plus couramment admis. Cha-
que fois qu'il existe un terme normalisé c'est celui que nous utilise-
rons. Malheureusement ces termes ne correspondent pas toujours à
ceux utilisés par les éditeurs de logiciels.
La Capacité d'une ressource, que nous noterons "Ca" c'est, jour
par jour le nombre d'heures de travail que cette ressource peut as-
sumer. La Capacité d'une ressource est directement liée à son ca-
lendrier.

Capacité La gestion des ressources du


projet consiste à rechercher
Charge l'équilibre charge capacité. Si,
sur une période de temps, la
charge d'une ressource dépasse
sa capacité, il y a sur-utilisation
de cette ressource.

Le taux de disponibilité d'une ressource sur un projet, que nous


noterons Td est la part, en pourcentage, de sa capacité journalière
qu'elle peut consacrer à ce projet. Le taux de disponibilité est appe-
lé capacité maximale dans Microsoft Project.

© innovaxion 2010 - 67 - www.innovaxion.net


La disponibilité d'une ressource sur un projet que nous note-
rons D c'est, jour par jour, le nombre d'heures que cette ressource
peut consacrer à ce projet. D = Td x Ca
L'intensité d'une ressource sur une tâche que nous noterons I
est la part en % de sa capacité journalière qu'elle va pouvoir consa-
crer à cette tâche. Dans Project, l'intensité est appelée "unités"
La Charge d'une ressource sur une tâche c'est, jour par jour, le
nombre d'heures consacrée par cette ressource à cette tâche.
Ch = Ca x I
La Charge d'une ressource sur le projet c'est, jour par jour, le
nombre d'heures consacrée par cette ressource au projet. Σ(projet) Ch

Le tableau de charge d'une ressource détaille la charge de cette


ressource jour par jour et tâche par tâche.
Le plan de charge d'une ressource c'est l'histogramme de la
charge de cette ressource en fonction du temps.
Le Plan de charge cumulé est l'intégrale de la courbe de charge.
Le taux de charge d'une ressource c'est, jour par jour, le ratio
entre la charge et la disponibilité de cette ressource.
Tc = (Ch x 100) / D
Le Travail d'une tâche est le total du temps consacré à cette tâ-
che par les différentes ressources (individus) affectés à cette tâche.
Pour éviter toute confusion avec la durée, le travail s'exprime en
heures.homme, jours.homme, semaines.homme ou mois.homme.
T =Σ(tâche) Ch

Lorsque le taux de charge d'une ressource est supérieur à 100


cette ressource est en surcharge, on dit aussi que la ressource est
sur-utilisée. La sur-utilisation n'est pas acceptable. Le traitement
des surcharges se fait comme nous le verrons un peu plus loin par

© innovaxion 2010 - 68 - www.innovaxion.net


nivellement et/ou par lissage.
Lorsque le taux de charge d'une ressource est inférieur à 100 la
ressource est en sous-charge. Cette situation, si elle n'est pas opti-
male, ne perturbe pas le planning.

4.3- L'affectation des ressources

— Sophie, voilà la planification des ressources que je te propose.


Les affectations figurent à droite des barres de tâche. Les valeurs
entre crochets correspondent aux unités d'affectation de la
ressource sur la tâche. On dit indifféremment unité d'affectation ou
intensité.

— Et quand il n'y a pas de valeur ?


— Ça signifie simplement que la ressource est affectée à plein
temps sur la tâche.
— Donc "les voisins" c'est un seul voisin, et "les voisins[ 2]" c'est
deux voisins ?
— Exactement, Sophie
— Et le point-virgule, c'est quand deux ressources travaillent

© innovaxion 2010 - 69 - www.innovaxion.net


simultanément sur la tâche.
— Tout à fait.
— Et les petits bonshommes rouges dans la colonne marquée d'un
point d'exclamation ?
— Le logiciel nous signale une sur-utilisation de ressources sur la
tâche. Autrement dit pour l'une au moins des ressources affectées à
la tâche il y a une période où elle est affectée également sur une
autre tâche, la somme des deux intensités dépasse le taux de
disponibilité de la ressource.
— Par exemple les quatre premiers jours du projet on a besoin de
4 voisins alors que tu n'en as prévu que trois ?
— Oui, et pour ce qui me concerne, les trois premiers jours je suis
affecté pour 25% à la tâche "Approvisionner" et pour 75% de mon
temps à la tâche "Restaurer les menuiseries", ce qui fait 100%, ce
qui est supérieur aux 75% - autrement dit 0,75 unités - que je me
suis autorisé.
— Mais pourquoi avoir mis des sur-utilisations ? Tu crée exprès
des problèmes ?
— Non, bien sur, mais je fais comme si le projet était très
complexe, et je veux tester l'algorithme de nivellement du logiciel.
— L'algo quoi ?
— Et bien le logiciel qui, nous avons vu, connaît les marges de
toutes les tâches, va tenter de retarder certaines des tâches pour
résoudre les sur-utilisations..
— Comme tu aurais pu le faire toi-même !
— Mieux que je ne l'aurais fait car le logiciel teste toutes les
possibilités et choisit la meilleure.

4.4- Surcharges, nivellement et lissage


Nous venons de voir ce qu'est une surcharge. Le traitement des
surcharges se fait par les opérations de nivellement et de lissage.
Le nivellement, qu'il soit manuel ou automatique, c'est ce que

© innovaxion 2010 - 70 - www.innovaxion.net


vient de nous expliquer Julien. Lorsque deux tâches requièrent tou-
tes les deux une même ressource et que la somme des intensités est
supérieure au taux de disponibilité, la ressource est sur-utilisée et
l'on dit que les deux tâches sont en conflit. Il est fréquent que le
conflit puisse être résolu tout simplement en retardant l'une des tâ-
ches jusqu'à une période ou la ressource est de nouveau disponible.
Bien entendu on choisira de décaler la tâche qui dispose d'une
marge suffisante. L'objectif du nivellement est de conserver in-
changée la date de fin de projet.
Le graphique ci-dessous illustre la logique du nivellement.

Charge en Heures.homme Histogramme


de charge de la
ressource

Temps

Disponibilité de la ressource
Charge avant nivellement (en ordonnancement au plus tôt)
Surcharge
Charge nivelée

— Alors, Julien, tu me montres l'algorithme ?


— L'algorithme, non mais le résultat de son travail, oui. Regarde
bien, c'est magique. En un clic de souris les bonhommes vont
disparaître !

© innovaxion 2010 - 71 - www.innovaxion.net


Tâches
retardées
par le
nivellement

— Magique ! le logiciel a décalé la tâche "Restaurer les


menuiseries" et la tâche "désherber la voie d'accès"
— Et aussi la tâche "Reboucher les nids de poule" car le logiciel
respecte nos contraintes d'antériorité, comme d'ailleurs toutes les
autres contraintes que nous aurions pu mettre.
— Mais si les marges n'avaient pas été suffisantes ?
— Le logiciel ne fait pas de miracles. Il n'aurait pas trouvé de
solution et nous l'aurais signalé.
— Et alors ?
— Alors, cela aurait été à moi de trouver une solution. Demander à
un quatrième voisin de venir nous aider, ou inviter l'oncle
Raymond à venir en vacances avec nous
— Ce casse-pieds, il n'en est pas question !
— C'était un exemple. Je veux dire que la solution est de modifier
l'affectation des ressources ou de faire appel à du renfort. on
appelle ça le lissage et mon logiciel ne sait pas faire.
— Et dans les vrais grands projets, comment on fait : nivellement
ou lissage ?
— Les deux. Regarde le schéma - ou plutôt le logigramme - que

© innovaxion 2010 - 72 - www.innovaxion.net


m'a donné monsieur Panazol. Il explique comment font les
spécialistes.

Planification par les durées Fin à date T1

Affectation des ressources

Détection des surcharges

Oui Non
FIN OK ?

Nivellement à date de fin inchangée

Oui Non
FIN OK ?

Oui jusqu'à T2 La date de fin peut-elle Non


glisser ?
Nivellement T1 => T2

Oui Non
FIN OK ?

Lissage (Augmentation ou ré-affectation des ressources)

FIN

© innovaxion 2010 - 73 - www.innovaxion.net


4.5- Les règles de lissage

— Julien, je ne suis pas sûre d'avoir bien compris les notions


d'intensité, de charge, de travail... Pourrais-tu me l'expliquer de
façon simple ?
— Eh bien, on va prendre l'exemple de notre planning. Regarde :
j'ai ajouté une colonne "travail" dans le planning.

— Et tu as calculé la valeur de travail de chaque tâche ?


— Non, Sophie, tu sais bien que c'est le logiciel qui fait tous les
calculs. Tu te souviens que la journée standard est de 7 heures.
Prenons la tâche "Approvisionner les tuiles". Elle dure trois jours.
Mon intensité sur cette tâche étant de 0,25, je travaille pour un
quart de mon temps sur cette tâche soit 7/4 = 1, 75 heure par jour.
Sur trois jours cela fait 3 x 1,75 = 5,25. C'est bien ce qu'a calculé
le logiciel. Avant d'aller plus loin il faut que je te transmette le
conseil que m'a donné monsieur Panazol : Le travail ne s'exprime
pas en heures comme semble le laisser penser le logiciel. On ne

© innovaxion 2010 - 74 - www.innovaxion.net


peut exprimer en heure que des valeurs de durée. Le travail
s'exprime en heures.homme ou en jours.homme, ou encore en
mois.homme. La tâche "Approvisionner les tuiles" pèse donc 5,5
heures.homme.
— Et si c'est une femme qui fait le travail ? questionne Joséphine
qui se trouvait là.
— C'est aussi des heures.homme. Je reconnais bien là ton
militantisme, Maman ! Maintenant, Sophie, donnes-moi la valeur
de travail de la tâche "Déposer les tuiles".
— Deux personnes travaillent à plein temps pendant 4 jours, le
travail de la tâche vaut donc 4 jours de 7 heures pour 2 personnes,
donc 56 heures.homme
— Très juste. Tu vois que c'est simple. Remarques aussi que le
logiciel a totalisé (on dit aussi consolidé) le travail au niveau des
récapitulatives et pour l'ensemble du projet.
— 390,25 heures.homme. Je crois que j'ai tout compris.
— Tant mieux parce que nous allons maintenant voir ce qui se
passe quand on modifie les affectations. Voici un petit exemple qui
va nous servir d'exemple. Supposons que la ville de Florac soit en
ce moment régulièrement fréquentée par une bande de brigands. Le
maire de Florac a imposé qu'un représentant de chaque famille
assiste à une formation de 6 jours dédiée à la sécurité. Supposons
qu'il ait également imposé qu'une personne soit affectée à plein
temps à la surveillance des environs. Il a même fourni pour cela
une paire de jumelles. Voici donc planifiées ces deux tâches ainsi
que, pour l'exemple, la tâche "défricher le terrain"

— Et donc c'est toi qui surveilles et Maman qui assiste à la forma-

© innovaxion 2010 - 75 - www.innovaxion.net


tion.
— Oui. Tu vois que les valeurs numériques des trois tâches sont
identiques. Maintenant une petite série de questions : Supposons
qu'un voisin se propose pour aider Malik à défricher. Quel
changement sur la tâche ?
— En toute logique la tâche sera plus vite achevée ?
— Et comme les logiciels ne connaissent que l'arithmétique simple,
la durée sera réduite de moitié. Et la valeur de travail ?
— Elle ne change pas ?
— Très juste. Maintenant on décide que l'oncle Raymond, qui
finalement vient en vacances avec nous, assiste lui aussi à la
formation.
— Tant mieux, pendant ce temps là il ne nous cassera pas les
pieds !
— Je suis bien d'accord, mais j'attendais une réponse quant aux
valeurs numériques. La durée de la formation sera-t-elle diminuée
de moitié ?
— Non, bien sûr. C'est le travail de la tâche qui va doubler ?
— Oui, exactement. Dernière question, tu vas m'aider pour
surveiller les travaux. Quel changement sur la tâche ?
— La durée ne change pas, donc c'est comme pour la formation, le
travail double.
— Est-ce bien raisonnable, il n'y a qu'une paire de jumelles. L'un
de nous deux va s'ennuyer.
— Alors on se partage le travail, toi le matin et moi l'après-midi.
— Exactement, c'est donc notre intensité sur la tâche qui passe de
la valeur 1 à la valeur 0,5. Voici le résultat de nos ré-affectations
de ressources.

© innovaxion 2010 - 76 - www.innovaxion.net


Lorsque le planificateur modifie les affectations, la plupart des
logiciels de planification recalculent automatiquement les valeurs
de la tâche modifiée. Le logiciel fait en sorte que l'équation [ Tra-
vail = Durée x Somme des intensités ] soit toujours vérifiée.
Comme nous l'avons vu avec le petit exemple de Julien, la valeur
modifiée dépend de l'activité. Le planificateur doit donc avant
toute modification paramétrer le type de tâche. On peut dire que la
tâche "Défricher le terrain" est à travail fixe, que la tâche "Assister
à la formation" est à durée fixe et que la tâche "Surveiller les envi-
rons" est à durée fixe et travail fixe.

Points-clé :
- L'affectation des ressources aux tâches entraîne naturellement des
surcharges.
- Le nivellement consiste à retarder l'une des tâches en conflit pour
supprimer une surcharge.
- Si le nivellement retarde exagérément la date de fin de projet, on uti-
lise la technique du lissage, qui consiste à modifier les affectations.

4.6- La planification des coûts

Joséphine a été reçue par Monsieur le maire, qui lui a expliqué que
la famille Giraud peut bénéficier d'une aide financière de la
région, au titre de la revitalisation des zones rurales. La seule
condition est de fournir un prévisionnel des dépenses.

© innovaxion 2010 - 77 - www.innovaxion.net


— L'administration est tatillonne. Monsieur le maire souhaite un
état très détaillé. Les matériaux doivent y figurer pour leur coût
réel, de même pour les locations de matériels s'il y en a. Les heures
de travail sont prises en charge au taux de 6 euro de l'heure.
Julien, pourras-tu faire un tableau des dépenses ?
— Mieux que cela, c'est le logiciel de planification qui va faire le
calcul des coûts. Malik, de quoi aurons-nous besoin pour les
travaux ?
— Le seul engin que nous devrons louer est un monte-matériaux,
une sorte d’ascenseur qui nous permettra d'amener les tuiles sur le
toit. le prix de location est de 50 euro par jour. Pour le reste les
voisins sont agriculteurs, ils viendront avec leurs engins agricoles.
Le pépiniériste nous a fait un devis pour un montant forfaitaire de
1500 euro il nous fait cadeau du gazon. Les tuiles sont vendues par
palettes de 240 tuiles, au prix de 210 euro la palette. Je pense qu'il
en faudra 5 palettes. Pour la charpente j'ai estimé le besoin à 3
mètres-cube de sapin au prix de 350 euro le m3. Ça te convient,
Julien ?
Parfait, dans 10 minutes le budget est calculé ! Je commence par
compléter le tableau des ressources.

— Bravo, Julien, quatre minutes seulement. Mais tu as oublié le


devis du pépiniériste, et tu n'as pas mis les quantités de tuiles et de
bois.
— Ce ne sont pas des oublis, Julie. Je t'explique. D'abord, le

© innovaxion 2010 - 78 - www.innovaxion.net


tableau des ressources ne correspond pas aux consommations.
C'est simplement la description des ressources. Les quantités
consommées seront déclarées dans l'affichage diagramme de
Gantt. D'ailleurs je te rappelle que c'est déjà fait pour les
ressources humaines. Ensuite, pour le devis du pépiniériste j'aurais
pu le mettre ici mais ce n'est pas logique car contrairement aux
tuiles et au bois dont nous consommerons plusieurs unités d’œuvre,
la somme correspond à la dépense globale. Il est d'usage de mettre
les dépenses forfaitaires directement dans le diagramme de Gantt.
On appelle ça un coût de tâche. Maintenant que nous sommes
d'accord la-dessus retour au diagramme de Gantt
— Et il te restes 6 minutes pour annoncer le budget du projet !

— Voilà le travail ! Budget 6191,50 € exactement. Tu peux voir,


Sophie, que j'ai mis le forfait de 1500 euro dans la colonne des
coûts fixes qui correspond aux coûts de tâche. Pour le reste je me

© innovaxion 2010 - 79 - www.innovaxion.net


suis contenté d'affecter à chaque tâche les ressources
consommables qui lui correspondent, avec la quantité
correspondante. le logiciel a fait tout le reste. La colonne "coût"
correspond à la somme coût de tâche + coût de ressource.
— Et le logiciel a consolidé les coûts au niveau des tâches
récapitulatives et pour le projet entier.
— Tout à fait, Sophie. Tu vois comme c'est facile.
— Et si les choses ne se passent pas comme prévu ?
— Les choses ne se passeront pas comme prévu, mais notre
planning nous permettra de tout contrôler, de détecter tout de suite
les écarts et de les corriger. D'ailleurs je te rappelle que le mois de
juin s'achève et que nous attaquons les travaux la semaine
prochaine.

Que rajouter à la brillante démonstration de Julien ? Le calcul


des coûts est la partie la plus simple de la planification, et les logi-
ciels sont pour cette opération d'une aide précieuse.

© innovaxion 2010 - 80 - www.innovaxion.net


Chapitre 5 - Piloter la réalisation

5.1- Figer le planning prévisionnel


Le moment où l'on passe de la préparation à l'action est un mo-
ment clé du projet. Il est important pour le chef de projet de faire
valider son planning par l'instance supérieure, que cette dernière
s'appelle commanditaire, client, comité de pilotage ou autre. A
partir de cette acceptation, le planning sera pour tous les acteurs le
référentiel de déroulement. Dès l'ors c'est au chef de projet et à lui
seul qu'il appartient de détecter les écarts et de prendre les mesures
correctrices.

5.2- Les méthodes de suivi de l'avancement


Nous allons dans ce chapitre présenter la plupart des méthodes
de suivi de projet. Nous allons d'ailleurs abandonner tout de suite
le terme "suivi", pourtant très utilisé, pour celui de pilotage. Sim-
ple question de sémantique, mais le symbole est fort : suivre est
une activité passive, contraire à l'esprit du management de projets.
Le mot piloter est plus dynamique et plus conforme à ce que l'on
attend du chef de projet.
Pourquoi plusieurs méthodes de pilotage ? C'est que tous les
projets n'ont pas la même complexité, et quand bien même ils se-
raient semblables, les différents acteurs n'ont pas besoin du même

© innovaxion 2010 - 81 - www.innovaxion.net


niveau de visibilité. Le chef de projet doit avoir une vision des dé-
tails, le commanditaire a besoin d'une vision synthétique.
Dans la suite de ce chapitre nous traiterons des outils du
pilotage opérationnel, à usage du chef de projet. Les outils du pilo-
tage stratégique, destinés à rendre compte de l'avancement à l'ins-
tance supérieure, seront traités au chapitre suivant.

5.3- La mesure de l'avancement de tâche


Avant d'aller plus loin dans ce passage en revue des outils de pi-
lotage, nous devons nous interroger sur la façon de mesurer l'avan-
cement des tâches du projet. Dans tous les cas, cet avancement
s'exprimera en pourcentage, la seule difficulté étant d'estimer le
pourcentage d'avancement d'une tâche en cours de réalisation.

— Juliens, as-tu entendu parler du syndrome CQFD ?


— Non, monsieur Panazol, de quoi s'agit-il ?
— Avant d'enseigner la planification de projets, je dirigeais un
bureau d'études. Tous les vendredi soir, je demandais à mes
collaborateurs la valeur d'avancement des tâches en cours. L'un
d'eux, Stéphane, faisait toujours à peu près la même réponse :
«C'est Quasiment Fini Demain.» Stéphane était un gentil garçon :
il détestait donner des mauvaises nouvelles ! Il faut se méfier de ce
comportement beaucoup plus répandu qu'on ne le pense. Le
syndrome CQFD peut s'exprimer comme suit : "Toute tâche com-
mencée atteint très vite un niveau d'avancement de 90% et y reste
beaucoup plus longtemps que prévu."

Cette petite anecdote avait pour seul but d'insister sur la diffi-
culté et sur l'importance d'une mesure fiable de l'avancement de tâ-
che.
En planification de projet on ne recherche pas la précision mais
la visibilité. Pour des tâches de durée courte le plus simple est de

© innovaxion 2010 - 82 - www.innovaxion.net


considérer la valeur à 0% jusqu'au moment ou la tâche est achevée.
L'avancement passe alors brutalement à 100%. Cette méthode est
dite "zéro cent".
Pour les tâches dont la durée est significative et qui sont en
cours de réalisation à la date de mise à jour du planning, il devient
nécessaire de mesurer leur avancement à cette date.

— Dis-moi, Sophie, tu te souviens que nous avons prévu deux jours


de travail à une personne pour reboucher les trous de l'allée.
— Oui, Julien, ce que tu appelles les "nids de poule", Je me
souviens aussi que nous ferons ce travail après avoir désherbé
l'allée de façon à bien repérer ces fameux trous.
— Supposons que les travaux soient en cours et qu'une journée ait
été consacrée à ce travail. A ton avis quel est le pourcentage
d'avancement ?
— 50%, non ?
— Peut-être 50%, peut être 25%, peut être 75% ou peut-être une
autre valeur. Peut-être même y a-t-il plusieurs réponses différentes
et aussi justes les unes que les autres.
— Et voudrais-tu bien m'expliquer cette énigme ?
— D'abord il faut que je te donne les informations dont on dispose
au soir du premier jour : Premièrement on avait estimé le nombre
de trous à 100. Deuxièmement au lieu d'une personne c'est deux
qui ont travaillé le premier jour. Troisièmement ils ont rebouché
100 trous.
— Alors c'est 100%, le travail est terminé !
— Attends, tu ne sais pas tout. En désherbant l'allée on s'est aperçu
qu'il y avait non pas 100 mais 150 trous à reboucher. On ne
dispose que d'une personne pour finir ce travail. Enfin comme la
météo annonce de fortes chaleurs pour les jours à venir on estime
que pour boucher les 50 trous restants cette personne mettra deux
jours. Voilà, tu disposes désormais de toutes les données du
problème, je te donne rendez-vous dans une heure pour reprendre
cette discussion.

© innovaxion 2010 - 83 - www.innovaxion.net


Si, comme nous le disions, en planification on ne recherche pas
la précision, en revanche on cherche le réalisme. Aussi lorsqu'on
mesure l'avancement, on prend en compte dès qu'elles sont con-
nues les éventuelles erreurs d'estimation. Il faut donc comparer ce
qui est fait non pas à ce qu'il était prévu de faire, mais à ce qu'il
faudra réellement faire. La formule générale de l'avancement est
donc la suivante :

fait
Avancement % = x 100
fait + reste à faire

Reprenons les informations que nous a données Julien : certai-


nes concernent les durées : on a travaillé une journée et il en faudra
deux de plus. D'autres concernent les ressources et plus exacte-
ment le travail des ressources : deux jours.homme ont été consom-
més et il en faudra deux de plus pour finir. Enfin Julien a parlé en
nombre de trous à boucher : prévision 100, réalisés 100 et restant
50. Si nous voulons injecter les valeurs données par Julien dans la
formule ci-dessus quelle unité faut-il employer ? Et bien il y a trois
réponses !
L'avancement peut se calculer en temps, la formule générale de-
vient alors :

durée écoulée
Avancement en temps = x 100
durée écoulée + durée restante

La mesure de l'avancement en temps n'est fiable que si l'on est

© innovaxion 2010 - 84 - www.innovaxion.net


certain que la progression vers l'objectif est constante tout au long
de la tâche. Si ce n'est pas le cas il faut choisir une autre méthode.
La deuxième méthode consiste à se baser sur la quantité de tra-
vail, exprimée, rappelons-le en heures.homme ou en jours.homme.

travail fait
Avancement en charge = x 100
travail fait + travail restant

Là encore il faut s'assurer que le travail humain est significatif


de la progression vers l'objectif.
La troisième méthode consiste à mesurer directement la part du
résultat acquise à la date de mise à jour. L’avancement technique
(ou physique) d'une tâche s'exprime en % d'atteinte du résultat de
cette tâche.

production acquise
Avancement technique = x 100
production acquise + reste à faire

La mesure de l'avancement technique suppose de choisir pour


chaque l'unité d’œuvre la plus pertinente : m2, m3, Tonne, nombre
de pages d'un document, etc... La seule précaution à prendre est de
s'assurer de l’homogénéité de la tâche. Prenons le cas de la rédac-
tion d'un document. Le choix du nombre de pages n'est valide que
si l'effort à fournir est identique pour chaque page. Dans le cas
contraire la mesure peut être optimiste si par exemple le rédacteur
a gardé pour la fin les pages les plus difficiles à rédiger car com-
portant des illustrations ou une recherche documentaire.

© innovaxion 2010 - 85 - www.innovaxion.net


— Alors, Sophie, reprenons notre discussion de tout à l'heure. Je te
rappelle la question : quel est, au soir du premier jour de travail
sur cette tâche, le pourcentage d'avancement de "Reboucher les
nids de poule". Je te donne la réponse, ou plutôt les réponses. Tout
d'abord l'avancement en temps : la tâche a duré une journée et il
en faudra deux de plus pour finir.
Donc avancement en temps = 1 / (1+2) = 33%
Maintenant avancement en charge : 14 heures.homme ont été
dépensées (deux personnes pendant une journée) et il en faut
autant pour finir (une personne pendant deux journées).
Donc avancement en charge = 14 / (14 x 2) = 50%
Enfin l'avancement technique. 100 trous sont rebouchés, il en reste
50
Donc avancement technique = 100 / (100 + 50) = 66%
— C'est pas très satisfaisant, tout ça. Et alors en vrai, quel est la
valeur d'avancement ?
— Les trois valeurs sont rigoureusement exactes. De toute façon le
choix de la méthode de mesure de l'avancement se fait comme tous
les choix de planification avant le début des travaux.

Comme nous l'indique Julien le choix de la méthode de mesure


de l'avancement se fait au moment de la planification prévision-
nelle. Ajoutons que ce choix dépend essentiellement de la façon
dont sera consolidé l'avancement au niveau du projet, ce dont nous
parlerons un peu plus loin.
Avant d'en arriver là il nous reste à traiter d'une dernière mé-
thode de mesure de l'avancement, le jalonnement de tâche. Certai-
nes tâches résistent à la mesure de l'avancement par l'une ou l'autre
des trois méthode que nous venons de décrire, ces trois méthodes
étant, rappelons-le, trois déclinaisons de la même formule géné-
rale. Ces tâches récalcitrantes sont soit des tâches par nature non li-
néaires, soit des tâches confiées à des tiers, souvent des sous-trai-

© innovaxion 2010 - 86 - www.innovaxion.net


tants, et sur lesquelles le chef de projet n'a pas de visibilité directe,
tant sur les heures de travail engagées que sur le degré de réalisati-
on atteint. La mesure de l'avancement de ces tâches reste cepen-
dant possible à condition d'identifier les livrables intermédiaires de
la tâche et de leur associer des jalons. La tâche est alors considérée
comme un mini-projet.

5.4- Les lignes isochrones

Nous sommes le 12 juillet. Les travaux sont en cours. L'oncle


Raymond et monsieur Panazol sont venus prendre le repas du soir
avec nos amis.
— De mon temps... commence l'oncle Raymond
— Voilà qu'il va encore nous raconter sa guerre, marmonne Sophie
— De mon temps, c'est à dire bien avant l'informatique, dans mon
entreprise le planning des travaux occupait tout un pan de mur. Les
tâches étaient figurées par des rubans de couleur que l'on déplaçait
le long de gouttières horizontales.
— Un diagramme de Gantt, donc ! l’interrompt Julien. Et comment
visualisait-on l'avancement ?
— On tendait des fils en laine de couleur verticalement à la date de
mise à jour. Le fil était dévié vers la gauche ou vers la droite pour
marquer le retard ou l'avance des tâches.
— Eh bien on fait toujours pareil aujourd'hui. Sauf que le fil de
laine est désormais virtuel. D'ailleurs je viens de mettre le projet à
jour. Regardez plutôt :

© innovaxion 2010 - 87 - www.innovaxion.net


— Nous sommes en avance, poursuit Julien, sur la tâche
"Reboucher les nids de poule", qui est terminée alors qu'elle devait
seulement commencer demain. Par contre, et c'est une mauvaise
nouvelle, Nous avons plus d'une journée de retard sur la
réparation de la charpente.
— C'est formidable, le fil de laine ! s'exclame Sophie
— D'abord, l'appellation "fil de laine" est un peu datée, intervient
monsieur Panazol. Dans certains logiciels cela s'appelle la courbe
d'avancement. Appellation impropre : on devrait appeler ce tracé
la ligne isochrone. Si l'on veut conserver l'historique des mises à
jour successives on peut conserver les lignes isochrones des dates
antérieures. Ensuite, Sophie, je ne suis pas du tout fanatique de cet
outil qui, quoique très visuel, a un très gros défaut. A votre avis
quelles sont les conséquences du retard de la tâche "Réparer la
charpente ?"
— C'est une tâche critique, répond Sophie, donc la date de fin de
projet va être retardée.
— Voilà bien le problème, reprend monsieur Panazol. Comme les
dates de début et de fin de tâche restent à la valeur prévue, la suite

© innovaxion 2010 - 88 - www.innovaxion.net


du planning n'est pas re-calculée en tenant compte du retard
constaté. Pour moi l'outil est plus orienté vers la recherche des
coupables que sur le pilotage du projet.
— Alors quel outil nous conseillez-vous ? demande Julien.
— Le "Gantt-suivi". Laissez-nous dix minutes, à Julien et moi, et
nous vous présentons une vision bien plus pertinente du projet à la
date d'aujourd'hui.

Comme nous l'ont expliqué Julien et son professeur, les logi-


ciels de planification tracent les lignes isochrones. Bien entendu le
planificateur doit saisir tâche par tâche le pourcentage d'avance-
ment. Il s'agit là du pourcentage d'avancement en temps. Comme
on peut le voir sur la capture d'écran, le pourcentage d'avancement
est représenté sur la barre du Gantt par une ligne noire. Pour plus
de lisibilité, la ligne isochrone ne pointe ni vers les tâches achevées
à la date de mise à jour ni vers les tâches à venir.

5.5- Le Gantt-suivi

— Et voilà le travail ! annonce Julien. Nous avons disposé une


ligne verticale rouge pour marquer la date de mise à jour le soir du
lundi 12 juillet. Les barres grises correspondent à la planification
de référence. Les barres de couleur correspondent à la position
réelle des tâches pour ce qui est dans le passé...
— Donc à gauche de la ligne verticale rouge, ajoute Sophie.
— Et ces mêmes barres de couleur correspondent à la position ré-
estimée pour les tâches à venir, à droite de la ligne rouge.
— Où l'on voit, Sophie, que la date de fin de projet est retardée
comme tu le pressentais, précise monsieur Panazol.
— Oui, d'une journée, ajoute Julien, en tout cas si nous ne prenons
aucune mesure correctrice. Je vous rappelle que la planification ne
sert pas seulement à constater des retards, mais surtout à
permettre de prendre les bonnes décisions.

© innovaxion 2010 - 89 - www.innovaxion.net


— J'ajoute, intervient monsieur Panazol, que la partie foncée des
barres de couleur figure le pourcentage d'avancement en temps.
— Julie, tu nous as signalé une différence entre lignes isochrones
et Gantt-suivi : la mise en évidence du retard pris sur le chemin
critique. Vois-tu d'autres différences ?
— La tâche "déposer les tuiles" s'est achevée avec une journée de
retard. Elle a duré 6 jours au lieu de 5 prévus.
— Oui, c'est de la que vient notre journée de retard. Il a fait très
chaud et Malik a travaillé plus lentement que prévu. D'autres
différences ?
— On voit que le désherbage de la voie d'accès a commencé avec
deux jours d'avance, ce qui explique notre avance sur la tâche
"reboucher les nids de poule" qui a elle aussi pris deux jours
d'avance.
— Oui, j'ai profité qu'un quatrième voisin a proposé de venir nous
aider pour l'affecter à ces deux tâches.

Le gantt-suivi est l'outil de pilotage par excellence du chef de


projet. Il fournit instantanément l'information utile sur les consé-
quences des retards constatés. Le chef de projet peut en connais-

© innovaxion 2010 - 90 - www.innovaxion.net


sance de cause décider d'une mesure correctrice et en simuler les
effets. Il peut accepter le retard si celui-ci n'a pas d'impact sur la
date de fin de projet. Dans ce dernier cas et si une ou plusieurs tâ-
ches à venir sont décalées il peut prendre les mesures nécessaires
comme par exemple en informer les responsables de ces tâches.

© innovaxion 2010 - 91 - www.innovaxion.net


Chapitre 6

Rendre compte de l'avancement

Cet ouvrage s'arrêterait ici si le chef de projet était seul au


monde, nous venons en effet de le doter des meilleurs outils de vi-
sibilité et donc d'aide à la décision. Il nous reste à traiter des outils
de "reporting" qui vont lui permettre de fournir à ses supérieurs la
vision synthétique dont ils ont besoin. Pas question en effet de
transmettre à son dirigeant ou au comité de pilotage du projet un
planning de plusieurs centaines de lignes ou un compte-rendu de
plusieurs dizaines de pages.

6.1- Le diagramme temps-temps


Le diagramme temps-temps, également appelé diagramme da-
tes-dates (DDD) est l'une des façons de rendre compte d'une éven-
tuelle dérive des jalons du projet.
Beaucoup de projets de faible envergure et pour lesquels le chef
de projet a une visibilité suffisante pour se passer d'un planning dé-
taillé, peuvent être pilotés avec cet outil d'une grande simplicité de
mise en œuvre. Pour des projets plus importants, le diagramme
temps-temps est le plus simple des outils de "reporting". Cet outil

© innovaxion 2010 - 92 - www.innovaxion.net


trouve donc sa place au niveau opérationnel pour les petits projets
et au niveau stratégique pour les projets de plus grande ampleur.
Il suffit, pour utiliser le diagramme temps-temps, d'avoir dé-
composé le projet en phases successives et déterminé quelques ja-
lons interphase (de 2 à 7 en fonction de la durée du projet). Il faut
bien entendu de connaître la date prévisionnelle d'atteinte de ces
jalons. Comme le projet de la famille Giraud n'a pas été phasé et
jalonné, nous allons prendre un exemple fictif.
Le pilotage se fait sur un graphe en coordonnées orthogonales.
Les dates prévisionnelles d'atteinte des jalons sont portées en or-
donnée. A chaque révision le chef de projet annonce l'atteinte
éventuelle d'un jalon et donne un pronostic sur la date d'atteinte de
chacun des jalons à venir. Il suffit de pointer, sur la ligne d'état (la
verticale correspondant en abscisse à la date de révision) le jalon
atteint (à l'intersection de la ligne d'état et de la diagonale du dia-
gramme) et les dates pronostiquées par le chef de projet pour les
jalons à venir.
Dans l'exemple ci-dessous, la périodicité des revues d'avance-
ment est de 1 semaine. Le projet comporte un jalon intermédiaire
J1 et le jalon final J2. La planification initiale prévoyait l'arrivée au
jalon intermédiaire fin de semaine 4 et la fin du projet fin de se-
maine 6. Nous sommes à fin la semaine 6. Le jalon intermédiaire
a été atteint fin de semaine 3 donc avec une semaine d'avance. Le
projet s'est déroulé normalement pendant les quatre premières se-
maines mais il semble qu'il soit stoppé depuis 2 semaines. A condi-
tion qu'il reprenne, sa fin est pronostiquée pour fin de semaine 8.

© innovaxion 2010 - 93 - www.innovaxion.net


Date prévue Date d'état

J2

J1

Date réelle

Le seul inconvénient du diagramme temps-temps est sa lecture


peu évidente pour un non initié. Il peut être tracé manuellement ou
avec un simple tableur.

6.2- Le calcul de l'avancement global du projet


Nous avons vu précédemment que, moyennant quelques pré-
cautions, on peut mesurer avec une bonne fiabilité l'avancement
d'une tâche. Il est tentant de vouloir consolider l'avancement des
tâches au niveau du projet. D'autant plus tentant que les logiciels
de planification effectuent ce calcul de façon automatique.
Malheureusement nous allons voir immédiatement que les cho-
ses ne sont pas aussi simples.
Nous allons illustrer le mécanisme de consolidation de l'avance-
ment sur le cas extrêmement simple présenté ci-dessous. Le projet

© innovaxion 2010 - 94 - www.innovaxion.net


est constitué de deux tâches seulement.
La tâche A est prévue pour durer 50 jours. Elle mobilise 4 per-
sonnes, toutes bénévoles, qui travaillent 10 heures par jour, ce qui
donne une valeur de travail de 50 x 4 x 10 = 2000 heures.homme.
Le coût prévu de A est de 2000 €
La durée prévue de B est de 5 jours. Son travail est également
de 2000 heures.homme, ce qui correspond à un effectif de 40 per-
sonnes travaillant 10 heures par jour. Le coût prévu de B est de
200 000 €

Supposons qu'à la date de mise à jour on constate les valeurs


d'avancement suivantes :
Tâche A :
- Durée réelle 5 jours, durée restante 45 jours
d'où avancement en temps = (5/50)x100 = 10%
- Avancement physique 10%
- Travail réel 200 hh, travail restant 1800 hh
d'où avancement en charge = 10%

Tâche B :
- Durée réelle 4,5 jours, durée restante 0,5 jours
d'où avancement en temps = 90%
- Avancement physique (4,5/5)x100 90%
- Travail réel 1800 hh , travail restant 200 hh
d'où avancement en charge = 90%

© innovaxion 2010 - 95 - www.innovaxion.net


Ces valeurs d'avancement ont été saisies manuellement dans le
tableau ci-dessous. Le logiciel (Microsoft Project) a consolidé les
valeurs d'avancement au niveau de la tâche récapitulative du pro-
jet.
Voyez dans quel abîme de perplexité nous plonge le résultat des
calculs : quelle est la valeur d'avancement du projet : 17%, 89% ou
50% ? Avant de tenter une réponse, nous allons expliquer la façon
dont le logiciel effectue les calculs.

Avancement en temps :
Comme nous l'avons vu, l'avancement en temps est basé sur les
durées en jour.
Appelons durée ré-estimée le total durée réelle+durée restante.
Dans le cas de notre exemple durée ré-estimée = durée prévue,
mais dans le cas d'une tâche dont la durée aurait été sous-estimée
ou sur-estimée, les deux valeurs seraient différentes.
La formule de l'avancement en temps est de la forme :
A(t) = ((Σ durées réelles)/(Σ durées ré-estimées)) x100
Dans cette formule le sigle "Σ" signifie "somme des.."
Dans notre exemple le calcul est le suivant :
(((50x10/100)+(5x90/100))/(50+5))x100 = 17 %

Avancement physique :
La consolidation de l'avancement physique pose le problème de

© innovaxion 2010 - 96 - www.innovaxion.net


l’hétérogénéité des tâches, consubstantielle de la gestion de pro-
jets. Comment en effet calculer l'avancement physique moyen en-
tre une tâche qui consiste à dessiner un plan, une autre consistant à
bâtir un mur et une troisième à approvisionner une machine infor-
matique ? Dans l'absolu il y a deux réponses possibles. La pre-
mière est la pondération des tâches. On peut sans problème de-
mander au planificateur de saisir pour chaque tâche une valeur nu-
mérique significative de son poids dans le projet. Cette méthode
est utilisée par beaucoup de chefs de projet. La deuxième méthode
consiste, comme on le fait souvent en gestion, à utiliser l'argent
comme unité de mesure d'activités de natures différentes. C'est
cette dernière méthode qui est utiliser dans les logiciels de planifi-
cation comme Microsoft Project.
Dans ces conditions la formule de calcul de l'avancement physi-
que est la suivante :
A(ph) = (Σ coûts réels)/(Σ coûts ré-estimés) x100
Ce qui donne dans le cas de notre exemple :
(((2000x10/100)+(200000x90/100))/(202000))x100 = 89 %

Avancement en charge :
L'avancement en charge est basé sur le travail des tâches. La
formule générale est :
A(ch) = (Σ travail réels)/(Σ coûts ré-estimés) x100
et dans notre exemple :
(((2000x10/100)+(2000x90/100))/(4000))x100 = 50 %

En conclusion :
Rappelons la question posée plus haut : des trois valeurs calcu-
lées : 17%, 89% et 50%, laquelle est significative de l'avancement
de notre projet ? Notre petit exemple était volontairement caricatu-
ral par l’hétérogénéité des deux tâches qui le composent. Bien en-
tendu aucun des trois indicateurs d'avancement utilisé seul n'est

© innovaxion 2010 - 97 - www.innovaxion.net


pertinent pour donner une vision claire de l'état de ce projet. Nous
verrons un peu plus loin la méthode à utiliser pour des projets à
forte hétérogénéité.
Fort heureusement il est des projets qui se satisfont de l'un ou
l'autre des trois indicateurs d'avancement. En voici quelques exem-
ples :
Les projets informatiques sont souvent réalisés par une équipe
interne à l'entreprise. La dominante dans ces projets est le travail
des ressources. Pour les projets de ce type l'avancement en charge
est un très bon indicateur.
Beaucoup de projets d'organisation, eux aussi réalisés en in-
terne, sont pilotés sans grand souci du nombre d'heures de travail
des ressources ni des sommes dépensées. Dans ces projets le souci
du dirigeant est surtout "que les choses avancent". La mesure de
l'avancement en temps est une bonne réponse à ce souci.

6.3- Les courbes d'avancement


Quel que soit celui des trois indicateurs d'avancement choisi
pour rendre compte de la progression du projet, la mesure de sa va-
leur à une date donnée ne répond pas directement à la question
"sommes-nous en avance ou en retard". La réponse à cette ques-
tion suppose de connaître la valeur d'avancement qui aurait dû être
atteinte à cette date si le planning de référence avait été respecté.
Mieux encore. Vous vous souvenez des notions de chemin criti-
que, de marge, d'ordonnancement au plus tôt et au plus tard. A une
date donnée il est intéressant de situer la valeur d'avancement
constatée à deux valeurs issues du planning de référence : L'avan-
cement à cette date en ordonnancement au plus tôt ainsi que celle
obtenue en ordonnancement au plus tard.
Ces trois valeurs peuvent être portées sur une série de trois

© innovaxion 2010 - 98 - www.innovaxion.net


courbes comme présenté ci-dessous. Ces courbes portent le nom de
courbes d'avancement. La plage située entre les deux courbes-en-
veloppe est la "zone de marge"

Date d'état
100 %
Avancement

Zone de
marge
Avancement
au plus tôt
50 % Avancement
au plus tard

Avancement
constaté

0% Axe du temps

La situation idéale est que la courbe correspondant à l'avance-


ment constaté soit en haut de la zone de marge. Une baisse de cette
courbe doit être considérée comme une alerte et bien entendu dé-
clencher des mesures correctives, dont on constatera l’effet lors
des mises à jour ultérieures.
Cet outil d'un intérêt incontestable a comme seul inconvénient
de ne pas tenir compte de la criticité des tâches. On peut en effet se
trouver dans la situation ou une avance sur des tâches non critiques
compense un retard sur des tâches critiques. Dans ce cas la courbe
d'avancement présente une vision optimiste alors que le projet est

© innovaxion 2010 - 99 - www.innovaxion.net


en danger. Une parade élégante consiste à utiliser deux outils de re-
porting : la courbe d'avancement pour un suivi global et le dia-
gramme temps-temps pour le suivi des jalons critiques du projet.

6.4- Le pilotage par les coûts


La méthode dont nous allons parler maintenant est née aux
Etats-unis dans les années 1980 à l'initiative de trois grands don-
neurs d'ordre institutionnels (La Nasa, le ministère de la défense et
le ministère de l'énergie). Le but était d'imposer une méthode uni-
verselle de suivi de l'avancement. Cette méthode est connue en
France sous les noms de "indicateurs de la Norme C", de "courbes
en S" ou encore de "méthode de la valeur acquise"
La méthode nécessite de connaître à la date de mise à jour la va-
leur de trois indicateurs :
- Le CBTP : Coût Budget du Travail Prévu. Il s'agit du prévi-
sionnel. Le CBTP à une date donnée (dite date d'état) est la part du
budget correspondant aux tâches qui auraient dues être achevées
ou en cours à cette date. La valeur du CBTP est connue pour toute
date passée ou à venir.
- Le CRTE : Coût Réel de Travail Effectué. Il s'agit des dépen-
ses réellement engagées, compte tenu des écarts de délai (avances
et retards) et des écarts de coût (économies et surcoûts)
- Le CBTE : Coût Budget du Travail Effectué. Il s'agit de la va-
lorisation au coût budget des travaux réellement effectués. On
parle aussi de "valeur acquise" pour désigner le CBTE. D'où le
nom de la méthode.
Les valeurs de ces trois indicateurs sont reportées sur une série
de courbes que l'on appelle les courbes en "S", eu égard à leur
forme caractéristique.

© innovaxion 2010 - 100 - www.innovaxion.net


6.5- Du diagramme de Gantt aux courbes en S
Nous allons dans un premier temps nous intéresser à la façon
dont sont obtenues les courbes en S.
Le projet qui va nous servir d'exemple est composé de 4 tâches
A, B, C et D. La durée prévue est de 9 semaines. Le diagramme de
Gantt du projet est représenté ci-dessous. Le prévisionnel corres-
pond aux barres inférieures. Par souci de simplification, ni les liens
d'antériorité ni le chemin critique ne sont représentés.
Les courbes en S sont la traduction directe du diagramme de
Gantt.
Pour bien comprendre ce qui suit il faut faire la différence entre
la trésorerie du projet, pour laquelle les dépenses sont prises en
compte au moment du décaissement - couramment plusieurs se-
maines après la fin de la tâche - et le calcul de l'avancement dont
il est question ici, pour lequel les dépenses sont comptabilisées au
prorata des travaux engagés.

© innovaxion 2010 - 101 - www.innovaxion.net


A = 10 K€ 100 %
A = 10 K€

B = 30 K€ 100 %
B = 15 K€

C 10 K€ 50 %
C = 20 K€

0%
D = 15 K€

1 2 3 4 5 6 7 8 9

Dépenses en K€ Ligne d'état

70

60

50 CRTE

40

30

CBTE
20

CBTP
10

0
Temps (échelle en semaines)

© innovaxion 2010 - 102 - www.innovaxion.net


Le coût budget de chaque tâche est indiqué sur la barre du
Gantt. Le budget du projet est de 10+15+20+15=60 k€
La courbe CBTP (coût budget du travail prévu) correspond au
cumul des dépenses prévues. La dépense correspondant à une tâ-
che est considérée comme proportionnelle au pourcentage d'avan-
cement : de 0% au début prévu à 100 % à la date de fin prévue. En
toute logique, la valeur finale du CBTP est le budget du projet.
Le projet a été mis à jour fin semaine 6 (date d'état). Une ligne
verticale marque cette date. C'est la ligne d'état. Cette ligne se dé-
place vers la droite à chaque mise à jour du planning,
Les barres supérieures figurent la position réelle des tâches, le
pourcentage d'avancement figure à droite de la barre. Les tâches A
et B ont commencé et fini à la date prévue. Seule la tâche C a con-
nu un décalage de sa date de début : 1 semaine de retard. Les coûts
réels sont indiqués sur la barre. Seule la tâche B a connu un écart
de coût : 30 K€ au lieu de 15.
Les courbes CRTE (coût réel du travail effectué) et CBTE
(coût budget du travail effectué) sont tracées jusqu'à la date d'état.
Les courbes CRTE et CBTE sont prolongées en pointillé en
fonction des pronostics du planning de façon à obtenir l'estimation
à achèvement du coût et de la durée du projet.

6.6- La lecture des courbes en S

Les années ont passé, nous sommes début août 2015. Julien est
responsable du bureau des projets dans un grand groupe
industriel. Sophie est responsable informatique chez le leader
français de la téléphonie. Joséphine les a réuni pour un week-end

© innovaxion 2010 - 103 - www.innovaxion.net


en famille dans la maison de Florac.
— Dis-moi, Sophie, te souviens-tu des courbes en S ?
— On les utilise couramment dans ma boite, mais pourquoi cette
question ?
— Nous avons en ce moment un gros projet en cours : neuf mois de
travaux, deux-mille tâches, 6 millions d'euro de budget...
— Et alors ?
— Alors, Frédéric, le chef de projet, m'a envoyé ce matin par mail
le tableau de bord du projet. Regarde les belles courbes ! Que dis-
tu du pilotage de mon chef de projet ?

Dépenses en M€ 31/07/2015

5
CRTE
4

3 CBTP

2
CBTE
1

0
Fevr Mar Avr Mai Juin Juil Août Sept Oct Nov

— Je dis qu'il a plutôt mal commencé, ton projet. Fin février, au

© innovaxion 2010 - 104 - www.innovaxion.net


bout du premier mois de déroulement, le chantier avance
correctement mais les travaux ont coûté deux fois plus que prévu :
une dépense de 500 000 euro pour une valeur de travaux estimée à
250 000. A la fin du deuxième mois, c'est pire : on a deux semaines
de retard et on a perdu 750 000 euro. Fin avril la situation est
carrément catastrophique : un mois de retard et 2 millions d'euro
perdus. Ensuite, les choses cessent de se dégrader. Dis-moi, je t'ai
connu plus réactif !
— C'est que je ne suis pas seul à décider. J'ai très vite détecté la
dérive et j'ai voulu prendre les choses en main, voyant que Bruno,
le chef de projet, perdait complètement pied.
— Il s'appelle Bruno ou Frédéric, le chef de projet ?
— Justement. Fin avril j'ai fini par obtenir que l'on remplace
Bruno, qui avait de gros problèmes personnels, par Frédéric, un
type très fiable.
— Et dès lors la situation se stabilise puis s'améliore
progressivement jusqu'à aujourd'hui. A fin juillet nous avons
toujours un mois de travaux en retard mais le passif a été ramené
de 2 millions d'euro à 1,25.
— Pour la suite tu me semble très optimiste : en seulement trois
mois tu espère rattraper un mois de retard, et tu pense pouvoir
ramener le surcoût à seulement 500 000 euro.
— Oui. Frédéric est un type très fort et je pense que ses prévisions
sont bonnes. Mais je reconnais que c'était bien mal parti !

Vous avez compris que les courbes en S donnent une bonne vi-
sion du déroulement du projet, sans qu'il soit besoin de consulter ni
le planning ni le tableau de suivi des dépenses. C'est bien ce que
l'on en attend.
Au cas où la lecture qu'en fait Sophie resterait pour vous mysté-
rieuse, voici quelques explications complémentaires.

© innovaxion 2010 - 105 - www.innovaxion.net


Fin du premier mois :
Surcoût 250 000 €
- Il n'y a pas d'écart entre CBTP et CBTE.
Le chantier progresse donc au rythme
1 prévu.

- Les travaux réalisés auraient ont une


0
valeur budget (CBTE) de 250 000 € et ils
Fevr ont coûté (CRTE) 500 000. Le surcoût
est bien de la différence soit 250 000 €

Retard 2 semaines Fin du mois 2 :

- La valeur acquise (CBTE)


Surcoût 750 000 € aurait dû être à ce montant
(750 000 €) il y a presque
deux semaines
1
- Le surcoût (CRTE-CBTE)
est désormais de 750 000 €
0
Fevr Mar Avr

© innovaxion 2010 - 106 - www.innovaxion.net


Retard 1 mois Fin du mois 3 :

- La valeur acquise
(CBTE) aurait dû être
3 à ce montant (1 M €) il
y a un mois
2 Surcoût 2 M€
- Le surcoût (CRTE-
CBTE) est de 2 mil-
1 lions d'euro

0
Fevr Mar Avr

Je pense que la suite des commentaires de Sophie est désormais


parfaitement claire pour vous. Comme elle vous disposez mainte-
nant des connaissances qui vont faire de vous le meilleur des plani-
ficateurs.

© innovaxion 2010 - 107 - www.innovaxion.net


Conclusion

Vous avez eu la patience de nous suivre jusqu'ici, la famille Gi-


raud et moi-même, je vous en remercie et je vous en félicite !
Vous voici désormais armé pour maîtriser le logiciel de planifica-
tion de votre choix, et surtout pour modéliser et piloter les projets
qui vous seront confiés.
En rédigeant ce livre j'ai eu sans cesse la préoccupation d'être
aussi clair que possible, même et surtout lorsque nous abordions
les thèmes les plus ardus. C'est à vous de dire si j'ai réussi. N'hési-
tez pas à me faire part de vos commentaires, ils seront lus avec in-
térêt et je ne doute pas qu'ils me seront utiles pour la suite.

Bonne chance dans vos projets !

Michel Estève

© innovaxion 2010 - 108 - www.innovaxion.net


Annexes

Quelques logiciels de planification :


- De nombreux logiciels spécialisés permettent l'établissement
du diagramme de Gantt. Il en existe à tous les prix, y compris de
nombreux gratuits.
Outre le confort que leur utilisation procure - ou devrait procu-
rer car certains souffrent d'une ergonomie déficiente - les logiciels
évolués permettent de réaliser un modèle prenant en compte toutes
les spécificités du projet (liens de dépendance, contraintes tempo-
relles, etc...) rendant ainsi le planning très réaliste. Ils prennent en
charge la gestion des ressources. Ils intègrent plusieurs outils de
pilotage.
Voici, en toute impartialité, une liste non exhaustive des logi-
ciels de planification existant en version française.
- Microsoft Project : Probablement le plus répandu en France
et dans le monde. La version 2010 apporte de vraies nouveautés,
dont la ligne de temps (chronologie) et le planificateur d'équipe.
Existe en trois version : Microsoft Project standard, Microsoft Pro-
ject Professional et Microsoft Project server.
- PSNext est une application de gestion de portefeuilles de pro-
jets, qui a succédé et qui intègre l'excellent logiciel de planification
PSN8.
- Primavera est une solution professionnelle, très présente dans
les grands comptes, notamment l'industrie pétrolière.
- Asta Powerproject est un logiciel très complet dédié aux mé-
tiers de la construction.

© innovaxion 2010 - 109 - www.innovaxion.net


- Visual Project est le seul produit français de cette liste. Il est
très adapté à la gestion des ressources en multi-projets. Particuliè-
rement apprécié dans les entreprises de service de taille moyenne.
- Gantt Project est un logiciel très simple, en open source.
Idéal pour débuter sans budget, avant de passer à plus sérieux.
- Openproj est gratuit. Son ergonomie est la parfaite copie de
Microsoft Project, au point qu'il en reproduit même les erreurs ! Il
y a néanmoins de très bonnes idées dans Openproj comme les
courbes disponibles à l'écran en regard du Gantt.
- Open Workbench, logiciel open source, est très apprécié de
ceux qui ne se sont pas laissés rebuter par son interface un peu aus-
tère.
- Omniplan et Merlin sont des logiciels du monde Macintosh.
- Pour ceux qui gèrent des projets linéaires, Tilos est l'une des
rares applications à utiliser la méthode dite du chemin de fer.
- Project Manager Assistant est une solution de gestion de
projets en ligne. Très souple et très riche de possibilités, PMA intè-
gre notamment un diagramme temps-temps.

© innovaxion 2010 - 110 - www.innovaxion.net


Abréviations
AOA Activity On Arcs
AON Activity On Noddles
AP Arborescence Produit
CBTE Coût Budget du Travail Effectué
CBTP Coût Budget du Travail Prévu
CPM Critical Path Method
CRTE Coût Réel du Travail Effectué
MPM Méthode des Potentiels Métra
OT Organigramme des Tâches
OTP Organigramme Technique Produit
PBS Procuct Breakdown Structure
PDM Precedence Diagram Method
PERT Program Evaluation and Review Technique
WBS Work Breakdown Structure

© innovaxion 2010 - 111 - www.innovaxion.net


Comprendre la planification de projet

La famille Giraud se lance dans un projet ambitieux : remettre en état une ferme aban-
donnée des Cévennes. Ce cas pratique simple et compréhensible par tous sert de fil con-
ducteur à une découverte progressive de la planification de projet.
Les notions les plus simples comme les plus complexes sont expliquées et abondamment
illustrées.
La planification de projets concerne tous les milieux professionnels : la construction, l'in-
dustrie, l'informatique, les métiers du spectacle et bien d'autres encore.

L'auteur : Michel Estève est consultant et formateur en manage-


ment de projets.
Il a exercé pendant quinze ans la fonction de responsable technique
dans de grands groupes industriels.
Il a créé en 1992 un bureau d'études spécialisé dans le process indus-
triel et la conception de produits innovants.
Il intervient comme chargé de cours auprès de plusieurs écoles d'ingé-
nieurs et universités.
Partenaire des principaux acteurs de la formation professionnelle, il a
effectué de très nombreuses interventions en France, au Maroc, en Algérie et en Afrique
francophone.
Spécialiste reconnu de la démarche de projet d'innovation, il anime des conférences et
des séminaires auprès de responsables d'entreprises.

ISBN 978-2-9539251-0-4

© innovaxion 2010 - 112 - www.innovaxion.net

Vous aimerez peut-être aussi