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Partie I : Difficulté financière et gestion de résultat

Les entreprises en difficulté financière sont souvent incitées à "maquiller" leurs


états financiers en jouant avec les comptes différés (nommé "gestion de résultat" dans
la littérature). Les motivations sont nombreuses à une telle pratique : une entreprise
en difficulté financière doit faire face aux créanciers qui demandent un remboursement
anticipé, aux fournisseurs exigeant un paiement au comptant, aux salariés découragés
qui anticipent leur perte d’emploi...

[Campa, 2020] a étudié la relation entre la difficulté financière d’une entreprise et


la gestion de résultat.

L’auteur estime la difficulté financière de 6190 entreprises françaises non cotées


durant la période de 2009 à 2016, notée "F IN DIF Fit ". Où it désigne la difficulté
financière de l’entreprise "i" à l’année "t".

Il utilise la valeur nette des comptes différés, noté "DAit " ("differed accounts"), pour
mesurer la gestion de résultat : plus la valeur de "DAit " est élevée, plus l’entreprise
"embellit" son résultat avec les comptes différés.

Voici-dessous le modèle proposé par l’auteur.

DAit = α + β1 F IN DIF Fit + β2 SIZEit + β3 GROW T Hit + β4 LEVit +

+ β5 EISSU Eit + β6 DISSU Eit + β7 ROAit + β8 BIG4it + it

Où :
— "SIZEit " désigne la taille de l’entreprise "i" à la période "t".
— "GROW T Hit " désigne le taux de croissance de l’entreprise "i" à l’année "t".
— "LEVit " désigne le levier financier de l’entreprise "i" à la période "t".
— "EISSU Eit ", une variable binaire qui prend la valeur "1", s’il y a une emission
des nouvelles actions pour l’entreprise "i" à la période "t".

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— "DISSU Eit ", une variable binaire qui prend la valeur "1", s’il y a une emission
des nouvelles dettes pour l’entreprise "i" à la période "t".
— "ROAit ", la rentabilité économique de l’entreprise "i" à la période "t".
— "BIG4it ", une variable binaire qui prend la valeur "1" si l’auditeur de l’entre-
prise "i" à la période "t" est un "big 4".
Voici-dessous les résultats de la régression :

DA
Coefficient (erreur type)

Intercept -0,171 (0,267)


F IN DIF F -0,009 (0,000)
SIZE -0,008 (0,000)
GROW T H -0,005 (0,362)
LEV -0,006 (0,060)
EISSU E 0,031 (0,000)
DISSU E 0,025 (0,000)
ROA 0,196 (0,000)
BIG4 0,000 (0,836)
Observations (n) 47660
R2 0,043
F-stat 26,79

1. Quelles sont les variables indépendantes significatives de ce modèle ? (Pour ré-


pondre à cette question, vous utiliserez un niveau de signification de 5%.)
Réponse :
Selon la méthode par l’intervalle de confiance, un coefficient est significatif à 5%
si son intervalle de confiance (m ± 1, 96 × s) ne contient pas la valeur "0".
Quand l’erreur-type s est égale à 0 (en réalité, c’est un arrondi réalisé par le
logiciel), l’intervalle de confiance ne contient pas "0", le coefficient est ainsi

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significatif.
Dans notre cas, les coefficients significatifs sont : F IN DIF Fit , SIZEit , EISSU Eit ,
DISSU Eit , ROAit .

2. La difficulté financière poussera-elle les entreprises françaises à augmenter leur


résultat par les comptes différés ?
Réponse :
Non, le coefficient devant F IN DIF Fit étant négatif et significatif, les entreprises
ne cherchent pas à augmenter les résultats en manipulant les comptes différés.
Au contraire, toutes choses égales par ailleurs, elles ont tendance à faire baisser
leur résultat par les comptes différés en cas de difficulté.

3. Les entreprises ont-elles tendance à manipuler leurs comptes différés quand elles
vont émettre les nouveaux titres ?
Réponse :
Oui, car les coefficients devant EISSU Eit et DISSU Eit sont tous deux positifs
et significatifs. Ce qui indique que, toutes choses égales par ailleurs, les entre-
prises ont tendance à faire augmenter leur résultat en manipulant les comptes
différés, quand elles émettent les nouveaux titres (actions ou obligations).

4. L’audit réalisé par un Big 4 changera-il la valeur des comptes différés des entre-
prises françaises ?
Réponse :
Non, le coefficient devant BIG4it étant non significatif, l’audit réalisé par big4
n’a pas d’influence significatif sur la valeur des comptes différés.

5. Tester H0 : β1 = β2 = β3 = β4 = β5 = β6 = β7 = β8 = 0 avec un niveau de


signification de 5%.
Réponse :
C’est le F-test qui nous permet de vérifier l’hypothèse.
La valeur de F-statistique est donnée dans la table : 26,79.
Avec les degrés de liberté de (k, n − k − 1), dans notre cas (8, 47651), la table

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de Fisher donne un seuil de signification de 1, 94. La F-stat de notre cas étant


largement supérieur au seuil de signification, le modèle est significatif dans son
ensemble.
Astuce : d’une manière générale, quand F-stat est supérieur à 3, on peut consi-
dérer le modèle significatif sans prendre trop de risque. Je vous rappelle aussi
qu’il y existe une relation mathématique entre R2 et F-stat. Le F-teste peut
aussi être considéré comme un test de R2.

Partie II : Education et revenues

[Ashenfelter and Rouse, 1998] utilise des données collectées sur des jumeaux mono-
zygotes afin d’estimer la rentabilité des études (le lien entre niveau d’étude et salaire).
Leur idée est qu’en comparant le niveau d’éducation et de revenus entre vrais jumeaux,
l’on est en mesure de contrôler l’impact du premier sur le second, de ceux du contexte
familial et de l’héritage génétique. L’échantillon est constitué de 340 paires de jumeaux
(680 individus).

La table 1, reprend la sortie stata de la régression du logarithme du salaire de


l’individu (lwage) sur son nombre d’année d’étude (educ), son age (age), son age au
carré (age2), et deux variables dummies identifiant le sexe et l’ethnie de l’individu
(female et white).

1. Interprétez les coefficients attribués aux variables mesurant le niveau d’étude et


l’âge de l’individu.
Réponse :
- educ : toutes choses égales par ailleurs, une année d’études supplémentaire fait
augmenter le salaire de 10, 99% en moyenne. - âge : toutes choses égales par
ailleurs, les individus gagnent, en moyenne, 10, 39% de salaire en plus par an.

2. Sont-ils statistiquement significatifs ?

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Figure 1 – Table de résultat 1

Oui, ils sont tous deux significatifs. Car leur P-value est inférieur à 5%.

Considérons le modèle de régression suivant :

lnYif = α0 Xif + βSif + γAf + if

Où l’indice f identifie la famille (i.e. dont est issu le couple de jumeaux) et i = 1, 2


chacun des jumeaux de cette famille. Le vecteur Xif reprend les variables de contrôle
utilisées précédemment (age, age2, female and white), Af représente les capacités (abi-
lity) inobservables de l’individu i et qui sont considérés comme spécifique (constante)
à chacune des familles f .

1. Quelle est la justification de ce modèle dans le cadre de l’étude qui est celui du
papier d’Ashenfelter et Rouse ?
Réponse :

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Les facteurs génétiques et familliaux influencent les revenus. Les capacités per-
sonnelles des individus modifient aussi la rentabilité de l’éducation.
Pour mesurer la rentabilité scolaire, il faut "neutraliser" l’effet des facteurs gé-
nétiques et familiaux.
Comparer les revenus des jumeaux permet d’observer la rentabilité scolaire en
tenant compte de l’effet de la capacité personnelle sur le revenu.

2. Un bias connu dans ce type d’étude de comparaison est dû à la différence de


capacité spécifique à la famille. Comment les auteurs éliminent ce bias ? Quelle
est l’hypothèse clef dernière leur méthode ?
Réponse :
En comparant les revenus des jumeaux monozygotes, les facteurs comme "genre",
"couleur de peau", "classe social-économique des parents" et "l’engagement des
parents dans le suivi des études" sont identiques pour les deux sujets en com-
paraison. L’éducation et la capacité personnelle deviennent les seuls facteurs
explicatifs de la différence de revenu.
En revanche, nous admettons ici une hypothèse implicite : l’investissement aux
études des individus des mêmes conditions génétiques reste similaire, sauf dé-
viation aléatoire.

La table 2 suivante reprend le résultat de cette régression où delta− lwage est la


différence du logarithme de revenu entre les deux jumeaux issus d’une même famille,
et delta− educ celle entre leurs niveaux d’étude.

1. Que suggère le résultat sur le sens du biais de capacité évoqué précédemment ?


(indice : comparer le coefficient devant educ et celui devant delta− educ.)
Réponse :
Le coefficient devant educ est de 0, 11 dans la première régression, celui devant
delta− educ est de 0,062 à la deuxième régression. Cela suggère que l’effet de
l’éducation sur les revenus est surestimé dans la première régression. Il y a

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Figure 2 – Table de résultat 2

certainement les variables manquantes dans le premier modèle explicatif des


revenues.

2. Que représente la constante du modèle en différence ? Est-elle significative ?


Réponse :
La constante représente la différence de revenu due à la capacité personnelle
entre les jumeaux monozygotes. Cette différence n’est pas significative, ce qui
est un résultat attendu de l’étude : Les capacités individuelles ne semblent pas
créer une différence significative entre les revenus des jumeaux monozygotes.

Références

[Ashenfelter and Rouse, 1998] Ashenfelter, O. and Rouse, C. (1998). Income schooling
and ability : Evidence from a new sample of identical twins. Quarterly Journal of
Economics, 113(1) :253–84.

[Campa, 2020] Campa, D. (2020). Earnings management tools during financial dif-
ficulties : evidence from french unlisted companies. Comptabilité Contrôle Audit,

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RÉFÉRENCES 2021/2022 TQG

26(3) :111–147.

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