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ACTES DU SÉMINAIRE

Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés


TRẦN VĂN CÔNG - PHẠM ĐỨC SỬ
(Đồng Chủ biên)

ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français:
regards croisés

ÉDITION DE L’UNIVERSITÉ NATIONALE DU VIETNAM À HANOÏ


COMITÉ SCIENTIFIQUE
M. PHAM Duc Su, Service de l’Éducation et de la Formation de la province de
Khanh Hoa, Vietnam
M. DINH Hong Van, Université de Langues et d’Études internationales - Université
Nationale du Vietnam à Hanoï
M. MAO Bunneang, Université Royale de Phnom Penh, Cambodge
M. NGUYEN Huu Binh, Université de Langues Étrangères - Université de Da
Nang, Vietnam
M. NGUYEN Minh Thang, Université de Pédagogie d’Ho Chi Minh - Ville, Vietnam
M. PHAM Anh Tu, Université de Langues Étrangères - Université de Hué,
Vietnam
M. SAM OR Angkearoat, Ministère de l’Éducation, de la Jeunesse et des Sports
du Royaume du Cambodge
M. TRAN Van Cong, Université de Hanoï, Vietnam
M. VO Van Chuong, Université de Can Tho, Vietnam
Mme VONGSAY Souvannapha, Université Nationale du Laos

COMITÉ DE LECTURE
M. PHAM Duc Su, Service de l’Éducation et de la Formation de la province de
Khanh Hoa, Vietnam
M. DINH Hong Van, Université de Langues et d’Études internationales -
Université Nationale du Vietnam à Hanoï
M. DO Kim Thanh, Université de Langues Étrangères - Université de Da Nang,
Vietnam
M. PHAM Duy Thien, Université de Pédagogie d’Ho Chi Minh - Ville, Vietnam
M. TRAN Van Cong, Université de Hanoï, Vietnam
M. VU Van Dai, Université de Hanoï, Vietnam

COMITÉ D’ORGANISATION
Le Ministère de l’Education, de la Jeunesse et des Sports du Cambodge
Le Centre régional francophone d’Asie-Pacifique de l’Organisation internationale
de la Francophonie
Avec la contribution financière de la Direction régionale Asie - Pacifique de
l’Agence universitaire de la Francophonie
TABLE DES MATIÈRES

COMMUNICATIONS DE CADRAGE
♦♦ RECHERCHE-ACTION, RECHERCHE-INNOVATION, RECHERCHE-
INTERVENTION, RECHERCHE-FORMATION: COMMENT Y VOIR CLAIR?
COMMENT FAIRE? QUELQUES DÉFINITIONS ET EXEMPLES EN CONTEXTE ASIATIQUE
MARIELLE RISPAIL, LE Ngo Thu Thao,Université de Jean-Monnet, Saint-Etienne, France.....25

♦♦EPISTÉMOLOGIE, MÉTHODES, CONTEXTES.POUR UNE ÉCRITURE


DE LA RECHERCHE DIDACTIQUE EN ASIE DE L’EST
PIERRE Martinez, Université Paris 8 Saint-Denis........................................58

COMMUNICATIONS DE DIMENSION

♦♦ RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
LA RECHERCHE EN FRANÇAIS AU VIETNAM ET EN ASIE DU SUD-EST
DE QUELQUES PHÉNOMÈNES RÉCURRENTS
PHAM Duc Su, Nha Trang, Vietnam.................................................................87

♦♦L’ÉCRIT DE RECHERCHE ET L’ANALYSE DE SA MICROSTRUCTURE


LUU Dinh Phuc, Université Nong Lam de Hochiminh-Ville, Vietnam...........99

♦♦ DES RECHERCHES COGNITIVES À L’ENSEIGNEMENT DES LANGUES


DANG Kim Hoa - DINH Hong Van, Département de français,
Université de Langues et d’Etudes Internationales - Université Nationale
du Vietnam à Hanoï...................................................................................116

♦♦ADOPTION DES TIC DANS L’APPRENTISSAGE DU FRANÇAIS


LANGUE ÉTRANGÈRE PAR LES APPRENANTS: LA VALIDATION DU MODÈLE
D’ACCEPTATION DE LA TECHNOLOGIE - «TECHNOLOGY ACCEPTANCE
MODEL» - (TAM) DANS UN CONTEXTE VIETNAMIEN
NGUYEN Huu Binh, École de langues étrangères
- Université de Da Nang.............................................................................126
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

♦♦RECHERCHE INTERUNIVERSITAIRE RÉGIONALE 2019-2020


QUELLES DIDACTIQUES A L’UNIVERSITE ACTUELLEMENT?
QUELQUES ETUDES DE CAS (1) - PARTIE VIETNAMMIENNE
PHAM Duc Su, Nha Trang (Partie 1),
DAO Anh Huong et TRAN Xuan Lam (Partie 2), Ecole supérieure de Génie civil, Hanoi,
TRAN Dinh Binh (Partie 3), Université de Langues et d’Etudes Internationales
- Université Nationale du Vietnam à Hanoi (ULEI-UNH)....................................143

♦♦RECHERCHE INTERUNIVERSITAIRE RÉGIONALE 2019-2020


QUELLES DIDACTIQUES A L’UNIVERSITE ACTUELLEMENT?
QUELQUES ETUDES DE CAS (2) - PARTIE THAÏLANDAISE
THIPKONG Penphan, Université de Phayao, Thaïlande
DEJAMONCHAI Sirajit, Université Thammasat, Thaïlande
CHARPENTIER Jaruwan, Université de Mahasarakham, Thaïlande................176

♦♦PLURILINGUISME ET CONTEXTUALISATION
- RÉFLEXIONS SUR LE CONTEXTE D’ASIE
PHAM Anh Tu, École Supérieure de Langues Étrangères
- Université de Hué - Vietnam................................................................................207

COMMUNICATIONS DE DIMESION SPÉCIFIQUE

♦♦APPORTS DES TICE ET DE LA RÉVISION COLLABORATIVE


À L’AMÉLIORATION DE LA COMPÉTENCE DE PRODUCTION ÉCRITE:
EXEMPLE D’UN JUMELAGE ENTRE LE CANADA ET LE VIETNAM
DO Thi Bich Thuy, Université de langues et d’études internationales
- Université Nationale du Vietnam à Hanoi
BARON Agnès, Université du Québec à Montréal.........................................219

♦♦L’ENSEIGNEMENT DE LA COMPÉTENCE DE COMPRÉHENSION ÉCRITE:


QUELS SONT LES APPORTS DES OUTILS DE TRAITEMENT AUTOMATIQUE
DES TEXTES?
HOANG Thi Bich, Université de Langues et d’Études internationales
- Université Nationale du Vietnam à Hanoi...................................................230

♦♦UN SCÉNARIO DE FORMATION HYBRIDE


POUR LA PROFESSIONNALISATION DES ÉTUDIANTS
DE FRANÇAIS EN CHARGÉ DE COMMUNICATION
HOANG Thi Thu Hanh, ESLE - Université de Hue - Vietnam...........................250

♦♦USAGES DE GOOGLE CLASSROOM EN ENVIRONNEMENT HYBRIDE


DE RESSOURCES MÉDIATIQUES
BRUNO Marchal, Université Thammasat, Thaïlande..............................................262

-8-
Table des matières

♦♦L’APPROCHE DES SCIENCES COGNITIVES APPLIQUÉES


À L’APPRENTISSAGE ET LIMITES DES OUTILS NUMÉRIQUES AU VIETNAM
Emilie NGUYEN HUU, Université de Can Tho................................................273

♦♦L’INTÉGRATION DES TIC PAR LES ENSEIGNANTS DE FRANÇAIS


DANS LES UNIVERSITÉS AU VIETNAM
NGUYEN Quang Thuan, Université des Langues étrangères
- Université nationale de Hanoï, Vietnam
PHAM Thi Hong Ha, Académie des Sciences militaires..............................281

♦♦À PROPOS DE L’APPROCHE PÉDAGOGIQUE À CARACTÈRE ACTIONNEL


INTÉGRANT DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION
ET DE LA COMMUNICATION (TIC) DANS L’ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS
DE POLICE À L’ACADÉMIE DE LA POLICE POPULAIRE
NGUYEN Thi Hue, Faculté des Langues Étrangères Académie
de la Police populaire du Vietnam................................................................292

♦♦INTÉGRATION DE KAHOOT, UN OUTIL DE TIC,


DANS L’ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS COMMERCIAL
À L’UNIVERSITÉ DE COMMERCE DU VIETNAM
NGUYEN Thi Thu Hong, Université de Commerce du Vietnam..................318

♦♦PROJET DE RECHERCHE EN COURSRESSOURCES WEBMATIQUES


SUR LE TOURISME:ANALYSES ET EXPLOITATION PÉDAGOGIQUE POUR
LES CLASSES DE FLE DE LA FILIÈRE DE TOURISME
VIEN The Khanh Toan, Filière de tourisme, Département de français
- Université de Pédagogie de Ho Chi Minh - ville.......................................331

♦♦COMMENT AMÉLIORER L’APPRENTISSAGE DES ÉTUDIANTS


AVEC LA PÉDAGOGIE DE PROJET DANS LES COURS FOS-TOURISME
NGUYEN Canh Linh, Département de Français, Université de Langues
et d’Études Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoi.......341

♦♦GRILLE D’ANALYSE DE LA COHÉRENCE TEXTUELLE DES TEXTES


ARGUMENTATIFS DES APPRENANTS VIETNAMIENS DE FRANÇAIS
NGUYEN Hong Hai, Université de Langue et d’Etudes Internationales
- Université Nationale du Vietnam à Hanoï................................................353

♦♦ ÉTUDE LINGUISTIQUE DE LA FONCTION ÉMOTIVE DES TEXTES


INFORMATIFS À PROPOS DE LA VILLE DE HUÉ SUR LES SITES TOURISTIQUES
TRUONG Hoang Le, École supérieure de langues étrangères
- Université de Hué........................................................................................369

-9-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

♦♦LE STAGE DANS LES PROGRAMMES D’ENSEIGNEMENT


DES DÉPARTEMENTS DE FRANÇAIS: ASSURE-T-IL SON RÔLE?
ĐANG Thi ThanhThuý, Université des Langues et d’Études Internationales
- Université Nationale du Vietnam à Hanoï................................................388

♦♦ POUR UNE CONTEXTUALISATION DU FOS:


LE FRANÇAIS À ORIENTATION TOURISME (FT)
À L’UNIVERSITÉ DE LANGUES ET D’ETUDES INTERNATIONALES, HANOÏ
ĐINH Hong Van, Université de Langues et d’Etudes Internationales (ULEI)
- Université Nationale du Vietnam à Hanoï (UNVH)...................................401

♦♦ ÉLABORATION DE LA GRILLE D’ÉVALUATION SOMMATIVE


DANS LA DIDACTIQUE DE LA TRADUCTION ET DE L’INTERPRÉTATION
AU DÉPARTEMENT DE FRANÇAIS - ULIS - VNU
DO Lan Anh, Université de Langues et d’Études Internationales
- Université nationale du Vietnam à Hanoï.................................................411

♦♦ ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS DU MARKETING VIA LE PROJET


ENTREPRENEURIAL-UNE STRATÉGIE FACILITANT L’INTÉGRATION
DES ÉTUDIANTS DANS LE MONDE PROFESSIONNEL
NGUYEN Thi Mi Dung, Université Thuongmai du Vietnam........................421

♦♦ ENQUÊTES D’ÉVALUATION DE LA FORMATION


- SYNERGIE ENTRE LES FILIÈRES DE TOURISME?
NGUYEN THUC Thanh Tin, PHAM Song Hoang Phuc, Département de Français,
Université de Pédagogie d’Ho Chi Minh-ville.............................................436

♦♦ MANUELS DE FRANÇAIS DU TOURISME - UN BESOIN POUR LES FILIÈRES


DE TOURISME FRANCOPHONE AU VIETNAM
NGUYEN THUC Thanh Tin, PHAM Song Hoang Phuc, Département de Français,
Université de Pédagogie d’Ho Chi Minh-ville.............................................447

♦♦ LES DIFFÉRENTES POSSIBILITÉS D’ANALYSER LE DISCOURS PÉDAGOGIQUE


NGUYEN Viet Quang, Université nationale du Vietnam à Hanoi.................459

♦♦LABORATION D’UN GUIDE D’AUTOFORMATION


POUR LES ENSEIGNANTS DE FRANÇAIS DE LA RÉGION D’ASIE DU SUD-EST
LASÉMILLANTE Priscille, Institut français du Laos - Luang Prabang
NGUYEN Van Toan, Université de Hanoï
VO Van Chuong, Université de Can Tho.....................................................474

♦♦ LA CLASSE INVERSÉE DANS L’ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS DEUXIÈME


LANGUE ÉTRANGÈRE AU SECONDAIRE

-10-
Table des matières

NGUYEN Huu Tam Thu, École de langues étrangères


- Université de Danang..............................................................................509

♦♦LA CLASSE INVERSÉE DANS L’ENSEIGNEMENT


DU FLE AUX DÉBUTANTS
TRINH Bich Thuy, Université de Langues et d’Études Internationales
- Université Nationale à Hanoï...................................................................525

♦♦ACCOMPAGNER VERS L’AUTONOMIE EN APPRENTISSAGE DE LANGUE:


LE CAS D’UN COURS DE LINGUISTIQUE FRANÇAISE
DO Thanh Thuy, Département de français,
Université de Langues et d’Études internationales
- Université nationale du Vietnam à Hanoï (ULIS)......................................540

♦♦AUTO-APPRENTISSAGE DU FRANCAIS COMME LANGUE ÉTRANGÈRE


CHEZ LES ÉTUDIANTS DE LA FACULTÉ DES LANGUES ÉTRANGÈRES
DE L’UNIVERSITÉ TAY NGUYEN
NGUYEN Thi My Liên, Faculté des langues étrangères
- Université Tay Nguyen.............................................................................548

INDEX DES AUTEURS....................................................................................568

-11-
ARGUMENTAIRE

ENJEUX CONTEXTUELS
Parler de l’enseignement/apprentissage des LE, notamment
du français, dans le contexte multilingue des pays d’Asie, c’est:
- Ouvrir un espace de réflexion en lien avec la formation des
enseignants. Il s’agit de mieux encore articuler la recherche, l’action
et la formation, pour de meilleurs résultats de cette formation.
- Inciter à des recherches en didactique du français, pour mieux
profiter des développements technologiques à l’ère numérique et
favoriser l’autonomisation des apprentissages, du français comme
celui des autres LE.
- Entrer dans le domaine des politiques linguistiques. Ainsi, les
rénovations entreprises actuellement par les systèmes éducatifs de la
région entraînent forcément des changements de taille, et réclament
de nouvelles exigences en compétences professionnelles, non
seulement celles du métier d’enseignant de français, mais encore
celles qui participent à la formation des différentes professions:
l’interprétariat, tourisme, médias et communications, pour n’en citer
que quelques-unes...

OBJECTIFS
Devant de tels enjeux, le Séminaire régional 2019 propose
aux chercheurs, aux praticiens et à tous ceux qui s’intéressent à
l’enseignement/apprentissage du français et/ou des autres LE,
de croiser leurs regards et réflexions en vue des éléments de
réponse autour de ces deux questions majeures: Quels chantiers
à continuer? Quels espaces à inventer?
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

DOMAINES DE RECHERCHE ET PISTES DE REFLEXION PROPOSÉS


Pour centrer la dynamique de la recherche dans la région
sur les enjeux et les questions sus-cités, cette fois, le Séminaire
Régional de 2019 se donne comme tâche de:
• Revoir, mais plus en profondeur, la mise en pratique
des approches et des outils didactiques visant à promouvoir
l’autonomisation des apprentissages et favoriser la rénovation
des systèmes éducatifs;
• Analyser les nouveaux enjeux, les effets, impacts mais aussi les
obstacles des recherches menées en vue de la professionnalisation
de l’enseignant de LE;
• Dégager des stratégies de rénovation et des dispositifs
mis en œuvre/préconisés par les systèmes éducatifs en matière
d’enseignement des LE pour mettre au clair les nouvelles exigences
en compétences professionnelles des enseignants de LE.
Ces 3 thématiques peuvent se décliner en des questionnements
concrets comme suit:
1- D’abord la problématique de la didactique elle-même.
Conçue comme «étude des phénomènes de transmission
et d’appropriation complexes dans leurs origines et dans leurs
effets», P. Martinez, dans «Un regard sur l’enseignement des
langues. Des sciences du langage aux NBIC» (2018) a affirmé
qu’il y a «loin entre la didactique qui procède d’une réflexion
scientifique; celle qui entre au fil des réformes officielles dans les
institutions; celle que les éditeurs proposent aux professionnels;
et, au bout de la chaîne, la didactique de la classe, celle qui se fait
au quotidien et ne se montre que peu au public». Qu’en est-il dans
notre région d’Asie-Pacifique? Cette problématique didactique
pourrait s’étudier à travers différents volets comme suit:
- Entre didactique(s) prescrite(s) officiellement et didactiques
réelles de classe, quels sont les écarts et leurs raisons (politiques,

-14-
Argumentaire

socioéconomiques, technologiques, culturelles, personnelles...)?


Avec quels résultats ou impact sur les apprentissages/formations?
Quelles postures et actions adopter face à cet état des choses?
Comment? Pour quels buts ou objectifs dans le court terme?
dans le long terme?
- Quels résultats ont été obtenus en introduisant les technologies
et/ou outils numériques (vidéo, websites, e-learning, classes
inversées, MOOC...) dans les classes ou les formations? Qu’est-ce
qui peut être retenu de ces tentatives pour améliorer l’enseignement/
formation du et en français?
2- En matière de recherche, il y a à se poser la question de
l’articulation entre recherche, action et formation, notamment:
- Quelles sont les tendances ou préférences de la recherche
dans la région et leurs raisons ou moteurs? Quel impact la recherche
a-t-elle créé sur l’enseignement et la formation du et en français
dans la région? Qu’est-ce qui pourrait être entrepris pour créer une
plus grande synergie entre recherche, action et formation?
- Que faire pour orienter les chercheurs et enseignants réflexifs
- surtout les jeunes - vers des recherches plus substantielles, à la
fois sur le plan contenu et méthodologie?
- Quelles pourraient être les recherches à mener face à
la rénovation des systèmes éducatifs (par exemple l’actuelle
prescription de didactique intégrée et inter/intra-disciplinaire au
Vietnam)?
3- Concernant les entreprises de rénovation éducative et/ou
didactique dans les systèmes éducatifs de la région:
- Que signifient exactement les prescriptions de rénovation
éducative et/ou didactique des pays de la région - par exemple
l’exigence de rénovation didactique intégrée et inter/intra-disciplinaire
au Vietnam?

-15-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Quelles réponses (sur les plans contenus, dispositifs,


objectifs, savoirs, savoir-faire...) l’enseignement et la formation du
et en français peuvent-ils y contribuer?
- Quelles nouvelles compétences professionnelles à former
aux enseignants/formateurs de LE pour répondre à cette exigence
de rénovation éducative et/ou didactique?

-16-
PROGRAMME
Mercredi 04 décembre
08h00- Cérémonie d’ouverture
09h30 Présentation générale : objectifs, contenus, modalités de travail et
résultats attendus

10h00- CONFERENCE 1
11h15 La recherche scientifique en contexte Asie-Pacifique
Recherche-action, recherche-innovation, recherche-intervention,
recherche-formation : comment y voir clair ? comment faire ?
quelques définitions et exemples en contexte asiatique
Marielle RISPAIL et LE Ngo Thu Thao
11h15- SYMPOSIUM 1
12h00 Etat des lieux de la recherche en Asie-Pacifique
1- La recherche en français au Vietnam et en Asie du Sud-est. De
quelques phénomènes récurrents - PHAM Duc Su
2- Microstructure de l’écrit de recherche : une nouvelle notion
théorique et ses normes de mise en écriture - LUU Dinh Phuc

13h30- SYMPOSIUM 2
15h00 Les recherches en enseignement/apprentissage du français.
1- Des recherches cognitives à l’enseignement des langues.
Analyses des prépositions spatiales en français - DANG Kim Hoa
et DINH Hong Van
2- Enseigner-apprendre à lire et à écrire le/en français en contexte
plurilingue - Recherche-action, enquêtes et expérimentations sur
Canala - Nouvelle-Calédonie - UKEIWE Marie-Laure
3- Intégration des MITIC et vidéos dans l’enseignement du FLE au
niveau débutant. Le cas du Département de français, ULEI - UNVH
- LE Thi Phuong Lan
4- Adoption des TIC dans l’apprentissage du FLE par les ap-
prenants : la validation du modèle TAM dans un contexte viet-
namien - NGUYEN Huu Binh
5- A la recherche d’une formation universitaire en lien avec le
marché du travail - VU Van Dai

15h15- TABLE RONDE 1


16h45 Les TIC pour enseigner/apprendre le français (trois tables
rondes en parallèle)
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

G1- Les TIC au service de l’enseignement/apprentissage du


français
- Quelques réflexions sur le rôle des enseignants de langues à
l’ère de l’industrie 4.0 - NGUYEN Thuy Linh
- L’intégration des TIC par les enseignants de français dans les
universités au Vietnam - NGUYEN Quang Thuan
- Élaboration d’une approche pédagogique intégrant des TIC dans
l’enseignement du français de police à l’académie de la police
populaire - NGUYEN Thi Hue
- L’approche des sciences cognitives appliquées à l’apprentissage
et limites des outils numériques au Vietnam - Emilie NGUYEN
HUU
- Usages de Google Classroom en environnement hybride de
ressources médiatiques - Bruno MARCHAL
- Un scénario de Formation hybride pour la professionnalisation
des étudiants de français en chargé de communication - HOANG
Thi Thu Hanh

G2- Les TICS et la formation aux compétences


- L’enseignement de la compétence de compréhension écrite :
Quels sont les apports des outils de traitement automatique des
textes ? - DO Thi Bich Thuy et Agnès BARON
- Les résultats obtenus en classe de français en appliquant les
logiciels kahoot et socrative - DO Thi Mai Quyen et NGUYEN Thi
Thuy Duong
- Apports des TICE et de la révision collaborative à l’amélioration
de la compétence de production écrite : exemple d’un jumelage
entre le Canada et le Vietnam - HOANG Thi Bich
- Application du logiciel « Flipgrid » dans la pratique des com-
pétences orales des étudiants en première année, au Département
de français, Université de Langues et d’Études Internationales,
Université Nationale du Vietnam à Hanoï - LE Thi Bao Nhung

G3- Les TICS et leurs différentes utilisations


- Etude pilote sur l’usage de Classdojo au Vietnam - Yves ROMA-
NI et LUU Thanh Hang
- Sites de présentation touristique : analyses et exploitation pour
les classes de FLE - VIEN The Khanh Toan

-18-
Programme

Jeudi 05 décembre
08h00- CONFERENCE 2
09h30 Pour promouvoir la recherche didactique en Asie-Pacifique
Epistémologie, méthodes, contextes. Pour une écriture de la
recherche didactique en Asie-Pacifique - Pierre MARTINEZ

10h00- TABLE RONDE 2


12h00 Pour des enseignements/apprentissages du/en français plus
efficaces en Asie-Pacifique (trois tables rondes en parallèle)

G1- Les approches didactiques


- Amélioration des compétences transversales des étudiants de
tourisme à travers la pédagogie de projet - NGUYEN Canh Linh
- L’approche par situation-problème dans les cours de français
pour les futurs professionnels du tourisme - DO Quynh Huong
- Mise en œuvre efficace de la pédagogie centrée sur l’apprenant
dans l’enseignement de langue étrangère - TRUONG Thi Thuy,
TRINH Thi Nguyet Anh, NGUYEN Thuy Linh

G2- Les techniques et matériels de classe


- Jeux de rôle en classe de FLE : problèmes poses aux collégiens
des classes bilingues au Vietnam - TRAN Ngoc Diem Huynh
- Réussir un exposé oral : une technique à acquérir dans un
cursus universitaire francophone (Cas de l’Institut Polytechnique
de Hanoï, Vietnam) - NGUYEN Thi Thanh Huong
- Nouveaux enjeux de l’enseignement de la production écrite du
francais LV2 à l’université nationale de Hanoï - DUONG Thu Minh
- Grille d’analyse de la cohérence textuelle des textes
argumentatifs des apprenants vietnamiens de français - NGUYEN
Hong Hai
- Quel usage pour le guide pédagogique ? - NGUYEN Minh Ngoc
et PHAM Duy Thien

G3- Les enseignements/apprentissages connexes


- Stratégies de l’écrit à l’ère numérique - DANG Thi Viet Hoa
- Étude linguistique de la fonction émotive des textes informatifs
à propos de la ville de Hué sur les sites d’internet touristiques -
TRUONG Hoang Le
- Vers une grammaire contrastive pour les apprenants
vietnamiens du français langue étrangère (FLE) - VU Triet Minh

-19-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

13h30- Rencontre avec la Secrétaire Générale de la Francophonie


14h30
14h30- SYMPOSIUM 3
15h30 Quelques didactiques de classe actuelles en Asie du Sud-Est
Quelles didactiques de classe à l’université actuellement ? Etude
des cas au Vietnam et en Thaïlande.
- Partie théorique de la recherche - PHAM Duc Su
- Enseignement du FLE à l’ESCG-Hanoi, Viêtnam - DAO Anh
Huong et TRAN Xuan Lam
- Enseignement du FLE à l’ULEI-UNH, Viêtnam - TRAN Dinh Binh
- Enseignement du FOS à l’Université de Phayao, Thaïlande -
THIPKONG Penphan
- Enseignement du FOS à l’Université Thammasat, Thaïlande -
DEMONCHAI Sirajit
- Enseignement du FOS à l’Université Mahasarakham, Thaïlande -
CHARPENTIER Jaruwan
15h45- DEBAT THEMATIQUE (2 débats en parallèle)
17h15
G1- La classe et la pédagogique inversées
- La classe inversée dans l’enseignement du FLE: potentiels et
défis - BUI Thi Ngoc Lan
- Classe inversée dans l’enseignement du français LV2 au
secondaire : expérimentation et attitude des apprenants -
NGUYEN Huu Tam Thu
- La classe inversée dans l’enseignement du FLE aux débutants -
TRINH Bich Thuy
- Pour une pédagogie inversée appropriée dans l’enseignement
supérieur - NGUYEN Bach Quynh Chi

G2- Pour plus d’autonomie dans l’apprentissage du/en français


- Apports de l’analyse du discours au développement de
l’autonomie des élèves dans l’apprentissage - NGUYEN Thi Tu Anh
- Auto-apprentissage du français comme langue étrangère chez
les étudiants de la faculté des langues étrangères de l’université
Tay Nguyen - NGUYEN Thi My Lien
- Accompagner vers l’autonomie en apprentissage de langue: le
cas d’un cours de linguistique française - DO Thanh Thuy
- Comment favoriser la réussite de l’autonomie dans l’apprentissage
des compétences de production écrite et orale chez les étudiants du
PFIEV - TRINH Thi Nguyet Anh et NGUYEN Thi Kim Dung

-20-
Programme

Vendredi 06 décembre
08h00- PANEL: Plurilinguisme et Francophonie
09h30 - Le Français à l’épreuve du multilinguisme et du plurilinguisme
au Vanuatu : d’une glottophobie supposée à une glottophagie en
cours - Louis ARSAC
- Plurilinguisme et contextualisation. Réflexions sur le contexte
d’Asie - PHAM Anh Tu
- Du projet de création de l’Université nationale bilingue au
Vanuatu : réalités et enjeux - PEATO Marie-Chanelle
10h00- TABLE RONDE 2
12h00 Pour une meilleure éducation/formation professionnelle (trois
tables rondes en parallèle)
G1- Formation et emploi
- Vers un projet de recherche des cours des sciences du langage
pour une participation plus directe à la professionnalisation -
TRINH Duc Thai
- Vers une intégration des enseignements - NGUYEN Ha Minh
Thanh
- La relation formation-emploi dans la conception du programme
de licence de français - POOMCHOM Srisuda
- Enseignement du français de marketing via le projet
entrepreneurial- une stratégie facilitant l’intégration des étudiants
dans le monde professionnel - NGUYEN Thi Mi Dung
- Élaboration de la grille d’évaluation sommative dans la
didactique de la traduction et de l’interprétation au Département
de français - ULEI-UNH - DO Lan Anh

G2- Formation des enseignants de français


- Élaboration d’un guide d’autoformation pour les enseignants
de français de la région d’Asie du Sud-Est - VO Van Chuong,
NGUYEN Van Toan, Priscille LASEMILLANTE
- Les différentes possibilités d’analyser le discours pédagogique -
NGUYEN Viet Quang
- La formation des futurs enseignants de FLE à l’école normale
supérieure de Hanoï: de l’enseignant savant a l’enseignant
compétent - TRINH Thuy Duong
- Université d’été des étudiants francophones. Un modèle
d’apprendre autrement le/en français - DAM Minh Thuy et HOANG
Minh Thuy
- Le stage dans les programmes d’enseignement des
départements de français : assure-t-il son rôle ? - DANG Thi
Thanh Thuy

-21-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

G3- Formation en tourisme


- Le FOS et le français du tourisme au département de français -
DINH Hong Van
- Manuels de français du tourisme. Un besoin pour les filières de
tourisme francophone au Vietnam - PHAM Song Hoang Phuc
- Innovation d’un programme professionnel “Programme :
langues étrangères appliquées au tourisme” - Latdany LATMANY
- Enquêtes d’évaluation de la formation. Synergie entre les filières
de tourisme ? - NGUYEN Thuc Thanh Tin
13h30- COMPTE RENDU DES TRAVAUX DE GROUPES
15h00 PHAM Duc Su
15h15- SYMPOSIUM-BILAN
16h15 Pierre MARTINEZ, Marielle RISPAIL, PHAM Duc Su
16h15- Cérémonie de clôture
16h30

-22-
COMMUNICATIONS DE CADRAGE
RECHERCHE-ACTION, RECHERCHE-INNOVATION,
RECHERCHE-INTERVENTION, RECHERCHE-FORMATION:
COMMENT Y VOIR CLAIR? COMMENT FAIRE?
QUELQUES DÉFINITIONS ET EXEMPLES EN CONTEXTE ASIATIQUE

Marielle RISPAIL
LE Ngo Thu Thao
Université de Jean-Monnet, Saint-Etienne, France

Résumé:
On se dit souvent qu’en étant enseignant(e) de langues, on se trouve à la
bonne place pour faire des recherches sur l’enseignement ou dans tout autre
domaine lié à une activité professionnelle. Est-ce si vrai? Comment passer d’une
posture professionnelle à une posture scientifique? Quels sont les obstacles à cette
alchimie? Quels en sont les richesses, les garde-fous et les passages obligés?
C’est à partir du contexte du sud-est asiatique et de ses problématiques (socio)
linguistiques spécifiques que cette conférence à deux voix essaiera d’ouvrir
quelques portes pour la nécessaire collaboration entre recherche et monde
professionnel (entre autre dans l’enseignement) sans laquelle il n’y a pas de
véritable avancée vers les rencontres à venir - et l’avenir lui-même.

LE Ngo Thu Thao est enseignante de français, au Vietnam puis à


St-Etienne en France, Marielle RISPAIL est enseignante-chercheuse
à St-Etienne. Elles se sont posé la question suivante: peut-on faire
de la recherche en tant qu’enseignant(e) au Cambodge, au Laos
au Vietnam ou dans les pays de la région? et si oui comment? Leur
première partie s’attachera à situer le contexte de leur réflexion,
la deuxième présentera différents types de recherches avant de
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

déboucher, dans la troisième, sur quelques propositions de recherches


contextualisées, possibles pour des enseignant-e-s.

1. CONTEXTE
De notre point de vue sociodidactique, tout texte scientifique
se doit de mettre l’accent sur les éléments contextuels qui
servent d’environnement à une recherche, et donc la déterminent
et l’expliquent en partie. Particulièrement, quand il s’agit
d’enseignement des langues, il convient, pour nous, de présenter
l’environnement sociolinguistique et didactique de celles et ceux
à qui s’adresse cet enseignement. Quatre éléments ont été
choisis pour présenter cet environnement, dans le cas de l’Asie
du Sud-Est.
1.1. Le contexte de l’Asie du Sud-Est: un contexte riche et complexe
On sait que l’Asie du Sud-Est se compose principalement
de 11 pays: le Cambodge, le Vietnam, le Laos, la Thaïlande, la
Malaisie, le Brunei, la Birmanie, le Timor oriental, Singapour,
les Philippines et l’Indonésie. Parmi ces pays, on peut parler
géographiquement de pays continentaux et de pays insulaires;d’un
point de vue linguistique, on peut y distinguer des pays relevant
de la francophonie et d’autres relevant de l’anglophonie. Nous
choisissons de faire un gros plan sur la francophonie dans le
Sud-Est Asiatique et sur l’un de ses pays francophones, le
Vietnam, comme représentatif des autres pays (Asie du Sud-Est
et Océanie) présents dans le séminaire de Siem Reap. Comme
dans chaque pays de cette zone, la langue officielle y côtoie
des langues étrangères (qui ont varié, ces dernières décennies,
suivant les situations et choix politiques) et des langues d’origine
de populations locales plus ou moins isolées et reconnues par
les pouvoirs en place (des espaces comme le Vanuatu ou la
Nouvelle-Calédonie, présents dans ce séminaire, complexifient
encore la zone géographique en question).

-26-
Communications de cadrage

1.2. La situation sociolinguistique au Vietnam


Le Vietnam a la forme d’un S, allongé du Nord au Sud. Il
se situe au Sud de la Chine, à l’Est du Cambodge et du Laos.
C’est un pays où se développe la francophonie, comme chez ses
voisins, le Cambodge et le Laos. La population se compose de
54 ethnies, qui ont chacune leur langue et leur culture; l’ethnie
Kinh est majoritaire, elle représente 80% de la population, sa
langue est le vietnamien - devenue langue nationale et officielle.
Cette diversification est l’une des richesses linguistiques du
Vietnam. La population des ethnies est parfois monolingue dans
sa langue, parfois bilingue pour ceux qui sont allés à l’école,
parfois plurilingue grâce au tourisme (cf. Annexes 1 et 2).
Regardons maintenant ce qu’il en est de ce multilinguisme
dans le contexte scolaire.
Dans les écoles publiques, les matières sont enseignées
en vietnamien, sauf pour les cours de langues étrangères
comme l’anglais, le français, le russe, le chinois, le japonais où
la langue enseignée peut prendre place, dans certaines filières,
comme langue de scolarisation. Ces langues étrangères peuvent
être choisies comme Langue Vivante 1 et leur étude est alors
obligatoire pendant 12 années scolaires. Une autre langue
étrangère parmi elles peut être enseignée comme Langue Vivante
2, de manière facultative, en fonction de la situation de chaque
école ou région, du collège au lycée. S’ajoutent à cela les classes
bilingues en français ou en anglais dans les grandes villes et
provinces du pays - ou dans d’autres langues asiatiques pour
ce qui concerne des établissements privés. Quant aux langues
dites ethniques1, elles sont enseignées localement, là où leurs
locuteurs sont en assez grand nombre et le demandent. Le texte

1
Merci à nos amies Nguyen Tu Huyen et Tuoi Nguyen Thi pour leur précieuse collaboration à ce
chapitre et tous les documents qu’elles ont cherchées pour nous: on les trouvera en notes et en
Annexes.

-27-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

gouvernemental qui régit cet enseignement stipule que la langue


doit être enseignée pour les membres de l’ethnie et conseille
qu’on y ajoute des émissions radiophoniques. Ajoutons qu’une
chaine VTV5 fait entendre les langues ethniques1.
Ensuite, il existe aussi au Vietnam beaucoup d’écoles privées
qui proposent une éducation en immersion, purement en langue
étrangère (anglais, français, allemand, mais la plupart des écoles
utilisent l’anglais) ou bilingue, à des enfants vietnamiens issus de
familles (souvent aisées) qui veulent que leurs enfants partent à
l’étranger plus tard pour leurs études supérieures.
En dehors de la situation scolaire, on peut entendre, voir,
apercevoir de nombreuses autres langues étrangères dans la
société vietnamienne. Avec l’ouverture du pays, les étrangers
arrivent au Vietnam et apportent aussi leur langue, pour le tourisme
ou pour travailler dans des entreprises (cf. Annexe 3). On peut citer:
le français, l’anglais, le japonais, le coréen, le russe, l’espagnol,
l’italien, les langues africaines, l’arabe des personnes venant
d’Indonésie, etc.; sans oublier les langues étrangères des pays
voisins comme le khmer, le lao, le chinois. Ajoutons des langues de
migrants qui quittent leur pays pour des raisons souvent politiques,
religieuses ou économiques: par exemple, se retrouvent à Ho Chi
Minh - Ville des musulmans du Sud-Est Asiatique (Indonésiens,
Malaisiens, Singapouriens), des Africains nigériens, Thaïlandais
ou des Chinois2. Sans oublier les Européens, venus au départ

1
On trouvera en Annexe 1 un lien et un texte traduit qui permettent d’en savoir davantage sur ce sujet.
2 https://thanhnien.vn/thoi-su. D’après un rapport du Ministère de la Sécurité publique, du
01/01/2015 au 31/12/2018 [...] les entrées au Viet Nam étaient diversifiées tant au point de vue
nationalité qu’objectif, profession. Les pays où il y avait le plus de ressortissants entrant au Viet
Nam étaient: Chine, Corée, Japon, Etats-Unis, Taiwan, Russie. Les ressortissants chinois étaient les
plus nombreux – 14,8 millions de 2015 à 2018, soit plus de 30% des étrangers au Viet Nam. Les
objectifs des entrées étaient: le tourisme (13 millions), le travail (plus de 1 million), les visites à la
famille (300.000), d’après les données de 2018.

-28-
Communications de cadrage

pour travailler ou enseigner, et qui s’installent, séduits par le pays,


son mode de vie, sa culture ou ses habitants!1
Malgré son monolinguisme officiel, le paysage sociolinguistique
est donc riche et varié, et l’école est loin de refléter, du point de
vue plurilingue, le portrait de la société: on pourrait presque dire
que deux plurilinguismes distincts se superposent sans coïncider.
1.3. Le cas de Hochiminh Ville
Après le paysage sociolinguistique du Vietnam, pays
d’origine de LE Ngo Thu Thao, nous avons fait le choix de faire un
gros plan sur le contexte de Ho Chi Minh - Ville où vit sa famille,
où elle a fait ses études, et où nous avons fait nos enquêtes. On
trouvera en Annexe 3 des informations concernant la ville et qui
justifient les enquêtes de Thao qui veulent mettre en lumière, par
des documents sociaux écrits entre autres, le plurilinguisme et
le pluriculturalisme de Ho Chi Minh - Ville. On y verra que les
langues et les cultures sont liées à la géographie urbaine.
Ho Chi Minh - Ville est une grande ville ayant plus de 10
millions d’habitants. Elle est divisée en différents arrondissements
et quartiers où de nombreuses langues (le vietnamien, l’anglais,
le chinois, le français, le khmer, etc.) composent le paysage
sociolinguistique. Le touriste à l’oreille attentive qui se promène
dans Ho Chi Minh - Ville peut être surpris par la variété des
langues qui se mélangent dans les échanges de rue ou sur les
affiches murales. Voici quelques exemples de cette diversité (à
compléter par la lecture de l’Annexe 3). A Chợ Lớn (quartier chinois)
on parle chinois; il y a un quartier coréen dans l’arrondissement
de Tân Bình, où l’on parle coréen (4e quartier, arrondissement de

1 http://www.molisa.gov.vn. MOLISA: Ministère du Travail, des Invalides de guerre et des Affaires


sociales. D’après le Département des Emplois (Ministère du Travail, des Invalides de guerre et
des Affaires sociales), fin juillet 2019 il existait 91.200 travailleurs étrangers au Viet Nam, dont
81.900 devant avoir un permis de travail. Ces travailleurs étrangers venaient de plus de 100 pays et
territoires du monde.

-29-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Tân Bình); un marché cambodgien (adresse: 374 Lê Hồng Phong,


10e arrondissement); un quartier où sont regroupés les Africains,
pour la plupart des Nigériens (14e quartier, arrondissement de Gò
Vấp); le quartier des Chăm, et surtout la rue Phan Van Hân et les
arrondissement de Bình Thạnh, regroupent des Chăm (musulmans
vietnamiens), mais les Chăm vivent aussi disséminés dans toute
la ville.
Et nous, en tant que professeurs de français dans ce riche
paysage sociolinguistique qui mérite recherches et adaptation de
nos enseignements, qui sommes-nous? Où en sommes-nous?
Que faisons-nous?
1.4. La situation des professeurs de français au Vietnam
Pour aborder ce thème de façon documentée, nous avons
envoyé quelques questions écrites à nos collègues de Ho Chi Minh -
Ville pour connaitre leurs représentations, préoccupations et besoins.
Voici quelques résultats issus de leurs réponses, qui ne
nous étonnent pas. Nous pensons qu’ils reflètent en grande
partie la situation des professeurs du pays et des pays voisins.
On constate en premier lieu dans leurs déclarations un manque
de temps pour la recherche, car la tâche d’enseignement occupe
beaucoup de temps dans leur emploi du temps. En effet, en plus
des cours donnés à l’école ou l’université, ils se chargent souvent
de cours particuliers pour assumer le côté financier du foyer. De
plus, il y a peu de vacances au Vietnam: uniquement quelques
jours consacrés aux fêtes de famille, alors que des enseignants
d’autres pays qui font des recherches consacrent souvent leurs
vacances ou jours de congés à mener leurs investigations, faire
des lectures ou écrire leurs analyses.
En deuxième lieu, la tradition et la culture vietnamiennes, et
asiatiques en général, font que les professeurs sont très attachés
à leur famille et cela occupe aussi un temps important pour eux,
après le travail. Surtout pour les femmes qui sont majoritaires

-30-
Communications de cadrage

dans l’enseignement. Elles ne peuvent pas se soustraire à ces


tâches sans risquer une incompréhension grave de leurs proches.
En troisième lieu, le temps de la recherche n’est pas reconnu
officiellement dans le temps de travail, cela entraîne des blocages
psychologiques ou sociaux pour certains. Une valorisation, soit
en termes de salaire soit en termes de diminution du temps
d’enseignement, aiderait les enseignants qui le désirent à se
lancer dans la recherche.
En quatrième lieu, les personnes qui font de la recherche
sont souvent des professeurs à l’université ou qui préparent
un Doctorat ou un Master. Après l’obtention de leur diplôme, la
recherche est terminée pour eux. Et le primaire et le secondaire
en sont la plupart du temps exclus. Comment faire évoluer
l’enseignement si on ne plonge pas soi-même les mains dans
la complexité des classes, de leur variété, dans la connaissance
de ce qui se passe ailleurs, etc.? Toutes ces préoccupations
ressortent des réponses reçues à notre questionnaire.
C’est donc la conception de la recherche qui pose problème
dans nos systèmes institutionnels et universitaires puisqu’elle
n’est socialement et scientifiquement pas reconnue: il s’ensuit
qu’une recherche est diplômante (on obtient son doctorat),
personnelle, finie dans le temps. Elle n’a pas de suite et n’est pas
liée à l’activité d’enseignement. Beaucoup le regrettent car ces
jeunes doctorants ou docteur-e-s, qui font ou ont fait leur thèse
au Vietnam ou dans d’autres pays, ont conçu celle-ci comme
une entrée dans la recherche, une façon de mieux connaître
la situation des langues dans leur pays, de perfectionner leur
pratique par la réflexivité et l’échange avec d’autres enseignants-
chercheurs.
Ce qui est vrai pour des enseignants à l’université est encore
plus vrai pour des enseignants du primaire ou du secondaire.

-31-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Pour conclure cette partie, nous (re)connaissons pour les


avoir vécues les difficultés rencontrées par les professeurs pour
faire de la recherche mais ce ne sont pas des raisons pour ne
rien tenter. En effet, l’enseignement ne peut pas se progresser
sans la recherche. Le monde avance, on peut toujours chercher
à avancer aussi, à faire mieux. La recherche est l’art de se poser
des questions. Or un pays ou un système qui ne se pose pas
de questions n’avance pas. Partout les langues se rencontrent
et se mêlent, et le Sud-Est Asiatique ne fait pas exception à la
règle. Entre difficultés matérielles et formation professionnelle à
actualiser sans cesse, comment garder contact avec le monde
de la recherche et ses avancées pour les enseignants? quelle
formation d’accompagnement mettre en place?
Mais alors quels seraient les types de recherche possibles
dans le contexte du Sud-Est Asiatique, eu égard aux éléments
contextuels que nous venons de lister? Ces questions ont déjà
été abordées par Marielle Rispail, au cours de précédents
séminaires du CREFAP, sous les titres de conférences: «Passer
de la posture d’enseignant à la posture de chercheur», et «Les
recherches-actions: définitions et exemples» (2006 et 2008).
Nous allons essayer ci-dessous d’en affiner les propos car nous
pensons que faire de la recherche quand on enseigne est non
seulement possible, mais indispensable: c’est ce que nous
voudrions démontrer ici.

2. Differents types de recherche possibles


On peut sans doute, de nombreuses expériences
personnelles et collectives le prouvent, harmoniser recherche et
enseignement, par la médiation de la formation PAR la recherche,
et en choisissant un type de recherche qui, loin de s’éloigner
du terrain, en fasse le lieu par excellence de la recherche. Nous
allons étayer cette affirmation par quatre piliers centraux.

-32-
Communications de cadrage

2.1. Quelques principes généraux

Tentons de donner une définition de la recherche qui pourrait


répondre aux exigences ci-dessus. Elle prendrait la forme
suivante:

= se poser une question collective;

= essayer d’y répondre ensemble;

= s’appuyer sur du concret et de l’observation et non sur


des convictions, des croyances, des savoirs répétés ou des
représentations;

= partir du métier pour revenir au métier et à ses acteurs.

Prise dans ce sens, la recherche quitte l’objectif diplômant


mais présente plusieurs avantages directement professionnels:

- elle donne l’occasion de réfléchir à plusieurs: cette démarche


allège les poids quotidiens, rassemble et libère de la sensation
de solitude que donne souvent l’enseignement;

- elle permet de progresser par l’expérience et non par le


discours magistral de la formation universitaire ou théorique;

- elle permet de faire des choix personnels dans sa classe,


car motivés et sélectionnés parmi d’autres possibles;

- elle démontre qu’on peut s’engager dans la recherche pour


d’autres raisons que le gain financier ou l’ambition personnelle,
mais plutôt parce qu’on est tourné-e vers l’autre, l’apprenant qui
va en bénéficier; elle fait ainsi accéder à une éthique altéritaire,
individuelle et citoyenne.

Elle valorise l’enseignant comme acteur social. Pour cela,


les divers types de recherches proposées plus bas ont des points
communs que nous rassemblons ci-dessous.

-33-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2.2. Un socle de points communs


Il faut rappeler pour commencer que la recherche en
didactique ne se donne pas pour but de résoudre les problèmes
de l’enseignement qui lui servent de point d’appui (ou d’envol)
mais de les éclairer par des connaissances ou des points de
vue nouveaux. C’est la raison pour laquelle, elle se donne pour
mission de partir des questions ou constatations de la classe
(pourquoi certains élèves apprennent-ils facilement et d’autres
non? comment évaluer de façon unique des élèves aux profils
différents? comment harmoniser écrit et oral dans ma classe?
quelles lectures à proposer pour donner l’envie de lire? faut-il
faire des cours de grammaire ou aborder la grammaire au fil
des autres activités? que faire quand des élèves sont fatigués et
non motivés en classe? etc.) pour les examiner avec distance, à
plusieurs, et de revenir à ces questions sur la base de nouvelles
propositions à tenter avec les élèves. Certains chercheurs disent
qu’il s’agit pour eux d’un principe fondamental de formation: (trans)
former les pratiques, les enseignants et leurs représentations,
PAR la recherche et non «former À» la recherche, ce qui est bien
différent.
Pour cela, il faut évidemment s’ôter de la tête l’idée qu’une
recherche doit à tout prix être quantitative, se présenter sous
forme chiffrée, énoncer des vérités générales, expérimentées
et prouvées. Elle va au contraire affronter la complexité du réel
humain qu’est la classe, préférer les incertitudes aux certitudes,
retracer des diversités, des mobilités, des pluralités, chercher des
explications: tout cela ne peut se faire à coups de pourcentages.
La réalité de nos classes est mouvante car elle est humaine avant
tout, il faut entrer dans des recherches qui épousent cette fluidité.
Cela suppose de reconceptualiser l’expérience par de nouvelles
notions, qui travaillent parfois les marges, les exceptions, le non
visible. La didactique demande de travailler sur les intersections,

-34-
Communications de cadrage

les interactions, les frontières, les entre-deux, les hésitations,


voire les impasses: on arrivera parfois à des réponses sous forme
de «peut-être», «parfois», «à condition que», «ici et maintenant
seulement». La recherche en didactique enseigne l’humilité et la
remise en question, elle renonce à la généralisation. Ce qu’on y
apprend n’a de valeur que parce qu’on l’a découvert soi-même.
Mais ce faisant, elle enseigne la subtilité et les nuances, elle
éduque notre regard sur le monde et sur les autres, elle nous fait
grandir.
Si on s’inscrit dans l’optique proposée ci-dessus, enseigner
en faisant de la recherche ne consiste pas à se donner du travail
en plus, mais à travailler autrement.
Différents types de recherche possibles
Cette section veut être un rapide récapitulatif, sans doute
non exhaustif, de divers types de recherches qui mettent le
travail sur le terrain au cœur de l’investigation. Dans leur variété,
due la plupart du temps à leur ancrage épistémologique ou à
l’accent mis sur un paramètre de la recherche plus que sur les
autres (qui coordonne, quelle implication des acteurs de terrain,
quelle diffusion sera faite des résultats, s’agit-il d’un mono-
champ scientifique ou d’une intersection entre divers champs
disciplinaires? etc.), on peut reconnaître un principe moteur de
la réflexion:
- On s’entend collectivement sur un phénomène à étudier,
souvent problématique mais pas toujours (par exemple: De quoi
est faite la réussite de certains élèves? Comment travaillent-ils?);
- On joint les diverses expériences, et au besoin des
expériences de terrain construites pour la circonstance, de
façon à connaitre et décrire le plus minutieusement possible le
phénomène en question (par exemple: on interroge les élèves
«qui réussissent» sur leur façon d’apprendre par cœur un poème
en L.E., on leur demande comment ils retiennent une règle de

-35-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

grammaire, on va les observer, voire les filmer, chez eux pendant


leur temps de travail personnel, etc.);
- On en isole les composantes, comme on le ferait si on
démonte un moteur pour en trouver la pièce défaillante, et on les
classe, on en restitue l’enchainement (par exemple: l’attitude en
classe qui peut être filmée, la façon de ranger son cartable, la
pièce où travaille l’enfant chez lui, le rythme entre travail à l’école
et travail à la maison, interludes compris, le matériel utilisé:
cahier, ordinateur, livre, fiches, etc., le temps consacré à chaque
exercice, le retour ou pas aux consignes de l’enseignante et sa
forme, etc.);
- On les examine en groupe et on décide sur lesquelles on peut
agir, pour les diffuser ou les modifier (par exemple: on demande à
tous les élèves d’adopter des «attitudes de réussite»pendant une
semaine, comme relire lentement et à voix haute tout le dernier
cours avant de se lancer dans l’apprentissage d’une leçon ou la
rédaction d’un exercice, se ménager un temps de vraie détente
corporelle, comme courir, chanter, etc. avant de se mettre à son
travail, avoir toujours sur sa table de travail un dictionnaire de
langue, etc.);
- Au besoin, mais ce n’est pas obligatoire, on met en place un
2 temps de la recherche pour mettre à l’épreuve dans sa classe
è

ou dans des classes choisies, les modifications ou pratiques


mises en lumière, et on observe le résultat.
L’avancée et les résultats sont régulièrement soumis
à information et appréciation de l’ensemble des collègues
participants. Quelques points forts donnent leur identité aux
types de recherche que nous allons vous présenter: elles partent
de savoirs existants dans le groupe, qu’ils soient expérientiels ou
théoriques, elles offrent l’occasion de réfléchir sur ce qu’on sait
ou croit savoir, on met donc en place un puzzle des savoirs qui
trouve peu à peu sa cohérence, on n’attend pas de réponse de

-36-
Communications de cadrage

l’extérieur: les germes des réponses sont toujours en soi ou dans


le groupe.
La forme la plus connue de recherche-enseignement relève
de la Recherche-Action: contrairement à ce qu’on pourrait
croire, elle vient des Etats-Unis (années 50) et des habitudes
de l’entreprise et n’a donc pas été conçue pour l’école, dans
un premier temps1. En France et dans les pays francophones
en général, elle a été diffusée et transférée dans les domaines
didactique et pédagogique (à distinguer soigneusement) par
l’équipe de Hélène Romian de l’INRP. Son idée de base est
la suivante: tout acteur de terrain peut être un chercheur, tout
chercheur doit participer au travail de terrain, car les deux
sont complémentaires. Cette conception est ancrée dans la
conviction très partagée en Sciences Sociales que, sans prise
sur le terrain, il n’y a pas de recherche dans les sciences dites
humaines, doublée de l’idée que sans réflexivité ni distance
prises par rapport au vécu professionnel quotidien, il n’y a pas
de progression didactique possible. En d’autres termes: seul,
le chercheur peut se perdre dans ses méandres théoriques s’il
a «la tête dans les nuages»; seul, l’enseignant peut se perdre
dans les détails de sa classe s’il a «le nez dans le guidon». Leurs
deux postures sont donc complémentaires, sans hiérarchie,
chacun peut apprendre de l’autre. C’est la raison pour laquelle
tous deux doivent participer à toutes les étapes de la recherche:
les divers moyens électroniques permettent de nos jours de bien
faciles réunions virtuelles qui évitent déplacements et rendez-
vous coûteux en temps et en énergie. C’est aussi la raison pour

1 De nos jours aussi, des R.A. ont lieu ailleurs que dans l’enseignement. Notre amie et grande
chercheuse Claude Comiti, didacticienne des mathématiques et qui arpente le sud-est asiatique
depuis presque 30 ans, maintenant à la retraite, coordonne en ce moment, une grande R.A. au
Secours Populaire (SP) en France, où elle est responsable régionale, pour détecter les différences
d’accueil et d’organisation dans les différents bureaux régionaux. Dans cette R.A. elle est la seule
chercheuse et les autre participant-e-s sont tous des bénévoles du SP. Le rapport écrit de ce groupe
est accessible en ligne.

-37-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

laquelle on peut difficilement faire une recherche-action tout seul,


contrairement à ce qu’on lit dans de nombreuses thèses!
Nous détaillons ci-dessous la démarche préconisée, car
elle se retrouve, à quelques nuances près, dans les autres types
de recherche qu’on va (plus rapidement) passer en revue par
la suite. Imaginons qu’une équipe de recherche-action (par
exemple: 2 enseignants + 2 chercheurs, même si la parité n’a
rien d’obligatoire) décide de travailler sur la question suivante,
soulevée par une des enseignantes interrogées dans une de nos
enquêtes au Vietnam: «Mes élèves sont accros de leur téléphone
mobile, ils ne m’écoutent pas. Que faire?». A priori, c’est une
question qui demande une réponse-recette, ce qu’une recherche-
action va bien sûr refuser. On va transformer la question de
terrain en une suite d’autres questions sous-jacentes qui vont
permettre de faire passer le phénomène incriminé de «pratique
à supprimer» en «objet d’observation». Par exemple: tout élève
de la classe possède-t-il un téléphone portable? où l’a-il utilisé
pendant le cours? qui s’en sert ou ne s’en sert pas (filmer une
séance paraît indispensable pour y répondre)? observe-t-on la
même utilisation du début à la fin du cours, ou seulement à des
moments précis? peut-on savoir si les écrans consultés ont un
lien avec le cours (il faut pour cela faire un gros plan rapproché
sur 2 ou 3 élèves pendant un temps donné)? etc.
Nous avons par exemple eu à St-Etienne en M1 un élève
directement débarqué de Chine qui ne vivait, pendant les cours,
que le nez sur son portable. On s’est rendu compte plus tard qu’il
y avait intégré un dictionnaire français / mandarin qui, seul, lui
permettait de comprendre quelques bribes de cours pendant les
premières semaines de son séjour. La fréquence de son rapport
au portable a baissé au fil des mois.
Un autre étudiant, remarquablement assidu et français
celui-là, qui a fait carrière dans le FLE et occupe un poste de

-38-
Communications de cadrage

responsabilité actuellement à Phnom Penh après être passé par


l’Inde et la Corée, passait lui aussi son temps sur son portable.
Mais, après discussion avec lui, on s’est rendu compte que c’était
toujours pour approfondir ce qui se disait en cours: il cherchait les
références d’une citation donnée par l’enseignant, les dates d’un
auteur ou d’une œuvre, la définition d’un concept sur laquelle
on venait de passer trop vite, etc. Une fois cette identification
utilitaire faite, elle nous a permis d’inventer des moyens d’intégrer
les portables dans la dynamique du cours, au lieu de chercher à
les éliminer.
Une fois les éléments d’observation identifiés (on ne peut
pas tout observer, il faut choisir), on va essayer de concrétiser
les conditions matérielles de l’observation: entretiens? filmage?
enregistrement? relevé de documents écrits ou dessinés? etc.
Les données seront classées par objectif poursuivi, numérotées
par commodité, comparées et commentées en séances de
groupe, en présentiel ou virtuelles.
Faite ensemble, pas obligatoirement sous la direction mais
avec la participation du ou des chercheur(s), l’analyse du corpus
est le moment fort de la recherche. Chacun doit dire ce qu’il ou
elle y voit, de son propre point de vue. Un de ses intérêts est
de faire surgir des besoins conceptuels et donc des envies de
lectures scientifiques, dont les acteurs ne sentaient peut-être pas
la nécessité en début de travail: tout fait sens quand on identifie
un manque et qu’on a envie de le combler. J’ai entendu dire ainsi,
dans une réunion de R.A.: «mais au fait, que veut dire exactement
interculturel? tu aurais un article, ou un auteur, pas trop compliqué
à lire, pour me l’expliquer?»; et aussi: «tu as dit que Gombert
différencie plusieurs niveaux de conscience métalinguistique, où
puis-je les trouver?».
Les éléments d’observation rassemblés, classés, analysés,
vont alors devenir des éléments de réponses aux questions de

-39-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

départ reformulées: dans notre exemple, on va ainsi apprendre


qu’il y a plusieurs façons d’utiliser son portable en classe, qu’il
peut servir à aller plus loin que le cours, que les élèves l’utilisent
pour distraction plutôt en début et fin de cours quand le «hors la
classe»ou la fatigue reprend le dessus dans leur cerveau, que
les garçons et les filles l’utilisent différemment, etc. Ces résultats
d’étape vont peut-être faire évoluer les représentations que les
enseignants de langues ont du portable, comme un «concurrent
déloyal», comme l’avait dit l’un d’eux, vers la représentation
d’un «partenaire» à orienter et utiliser avec habileté pour: se
documenter, créer ensemble, communiquer entre étudiants de
classes différentes, etc. Les apprenants aussi vont peut-être
découvrir dans l’objet une aide cognitive qui leur avait peut-être
échappé au milieu du seul usage social et communicatif quotidien.
Et on pourra déboucher sur un «pacte» ou un «contrat» didactique
partagé où enseignants et apprenants se mettent d’accord sur un
«moment expérientiel», limité dans le temps (de la minute 15 à
la minute 30 du cours, par exemple, pendant 2 semaines), où le
portable sera au centre de la séance d’enseignement et dont on
fera le bilan en fin de période d’essai. Les élèves y gagnent à
être enrôlés dans la recherche-action comme acteurs véritables
et pas comme exécutants passifs.
Les Recherche-interventions sont un sous-groupe des
recherches-actions. Elles visent clairement une transformation
du réel, alors que les premières cherchent d’abord à décrire
et comprendre. On cherche à créer consciemment, et donc
pouvoir reproduire, un véritable changement de l’objet ou de la
situation observée, par une intervention mesurée et fixée sur un
terrain donné. Le travail peut être comparatif, porter sur un ou
deux sujets, ce qui facilite parfois l’émergence des paramètres
d’intervention et de leur efficacité. En voici 3 exemples.
T., enseignante au département de français et chercheuse
de Ho Chi Minh - Ville bien connue dans ce séminaire, a voulu

-40-
Communications de cadrage

introduire dans le cursus de la formation des futurs enseignants


de français l’activité appelée «analyse des pratiques». Elle se
demandait, dans sa recherche, comment mener ses étudiants,
dont elle déplorait le manque d’autonomie, vers un apprentissage
réflexif de leurs compétences professionnelles. C’est ainsi
qu’elle a mis en place des séances régulières d’analyse des
pratiques dans un groupe, dont elle a comparé les résultats
en terme d’autonomie et de réflexivité dans leur apprentissage
professionnel en fin d’année avec un autre groupe ayant suivi
le cursus traditionnel sans analyse des pratiques. Sa démarche
de recherche présente donc une intervention directe dans la
formation des enseignants pour en mesurer l’efficacité.
Dans un autre domaine, HCS, qui se plaignait de la stagnation
de ses élèves de primaire en lecture longue (sur une œuvre
complète enfantine, par exemple), a mis en place ce qu’elle a
appelé des «itinéraires de lecture» personnels, à effectuer chez
soi avant la séance de lecture dans la classe. Elle a ainsi mis à
jour comment des élèves, même jeunes, pouvaient s’approprier
le sens d’un texte et s’y investir, même avec des lacunes lexicales
en L.E., par la simple responsabilisation d’une lecture personnelle
guidée par des consignes claires, que la séance en classe se
chargeait de mettre en synergie.
Un dernier exemple concerne P. qui s’inquiétait, dans sa
classe de jeunes débutants, de l’écart qui se creusait entre les
élèves qui prenaient le risque de la langue étrangère, quitte à faire
des erreurs ou se trouver dans des impasses, alors que d’autres
s’enfermaient dans des attitudes de «non parleurs». Une suite de
mini-situations didactiques, intégrant les langues familiales des
élèves et les activités créatives pas obligatoirement parlées, ont
permis de réduire cet écart et de faire accéder les «non parleurs»
à un début de prise de parole.
Dans ces trois cas, il ne s’agit pas seulement d’innovation
pédagogique, mais d’interventions profondes, qui viennent s’immiscer

-41-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

dans le vécu (inter-), modifiant le regard de l’enseignant sur ses élèves,


le rapport des élèves entre eux et leur rapport au savoir ou à la langue
étrangère. En ce sens, il s’agit d’ «interventions» qui perdurent dans le
tissu de la classe et, on l’espère, dans le tissu social à venir.
Enfin les recherches collaboratives et/ou participatives
(que, pour simplifier notre propos nous prendrons ici comme
synonymes) ont la particularité d’avoir une structure plurielle
et pas seulement binaire acteurs/chercheurs. Elles peuvent
rassembler divers corps sociaux ou de métiers dans un même
projet (éducateurs, parents, inspecteurs, auteurs de manuels,
personnel d’entretien, commerçants, professions libérales, etc.)
comme des chercheurs issus de diverses disciplines (Sciences
de l’Education, Sciences de la vie et de la terre, Langues,
mathématiques, ethnologues, musicologues, anthropologues,
histoire, etc.), unis un moment autour d’un même projet. Par
exemple: réfléchir à l’impact et aux influences, positives et
négatives, de l’évaluation omniprésente, à l’école et hors de
l’école, dans les sociétés asiatiques. Ce thème pris comme
exemple de l’évaluation a permis à chaque partie de la recherche
d’en chercher les enjeux et les formes dans son propre domaine
d’activité, de les comparer, d’en voir les points communs ou
les divergences, et ainsi de décider, en ce qui concernait les
enseignants, des formes qui seraient le plus adéquates pour
un maximum d’élèves dans le domaine scolaire. On a ainsi
vu se développer une recherche davantage en forme d’étoile
(structure stellaire), où chacun représentait son domaine de
travail ou d’étude, que linéaire (en forme de ligne).
Dans tous les cas, il s’agit de «déplier» la classe, de lui éviter
le repli sur elle-même, de créer des ponts, des passages, de
tisser son réel avec d’autres réels sociaux, de lui «donner de
l’air», tout en lui reconnaissant sa spécificité (= transmettre des
savoirs). Cet entraînement à la décentration/recentration, s’il est
d’un apport didactique certain, offre aux maîtres d’accéder à

-42-
Communications de cadrage

la quintessence de leur mission, celle qui donne un avant-goût


d’un avenir meilleur. Tous ces types de recherche, qu’on peut à
moindres frais intégrer dans un emploi du temps d’enseignant,
demandent surtout la mise en place (par affinités, rencontres,
hasards, recherches) d’une équipe de départ solide et qui partage,
au-delà de préoccupations professionnelles, des préoccupations
éthiques.
Un dernier exemple, issu d’un groupe de recherches
pluridisciplinaires travaillant avec des élèves de lycée. Leur
équipe de professeurs s’inquiétait de la place prise par internet
et le numérique en général dans leur vie, susceptible de détrôner
la lecture/écriture sur laquelle s’appuient encore nombre de
nos enseignements, toutes disciplines confondues. Là encore,
après quelques réunions de débat, l’équipe a décidé non pas de
combattre l’invasion d’internet, mais de s’en faire un allié, d’abord
en faisant prendre conscience aux élèves de son omniprésence,
dont ils ne se rendaient peut-être pas tous compte, et ensuite
d’inventer avec leur aide, comment «détourner» les usages
ludiques d’internet vers un profit de connaissances. S’en sont
suivis une enquête dans les familles, une quantification du nombre
d’ «heures numériques» dans une journée, le classement de leurs
fonctions, puis une expérience inédite: passer une journée sans
ordinateur ni téléphone, écrire son vécu à chaud (en L.E. bien
sûr), comparer les écrits. Ce faisant, les jeunes sont devenus
chercheurs eux-mêmes, à la conquête de résultats qui les ont
étonnés. Ils ont vécu une situation où on ne cherchait pas «sur
eux» mais «avec eux», qui faisait d’eux des partenaires à parts
égales avec les adultes.
Faut-il décrire les bienfaits linguistiques de telles situations?
La langue, le français en l’occurrence, devenant le medium
pour chercher et va s’améliorant au fur et à mesure, non par
apprentissages passifs mais par nécessité de coller à une pensée
complexe à partager.

-43-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Il nous reste à définir ce qu’est une RAF ou Recherche-Action-


Formation. Pour simplifier, on dira que c’est une recherche-action
qui n’a pas pour seul but de mieux connaître les fonctionnements
de la classe ou de l’école, mais qui vise aussi et surtout la
formation des enseignants. On essaie donc de la faire déboucher
sur des outils ou pratiques d’enseignement qui vont dépasser le
contexte particulier de déroulement de la R.A. (certains appellent
cette phase la «descénarisation» ) pour aller vers des principes
nouveaux d’enseignement ou des gestes professionnels innovants
à faire découvrir, en séances de formation initiale ou continue.
C’était le cas du travail de T. sur l’analyse des pratiques. Une
RAF peut donc être menée par des chercheurs et des formateurs
d’enseignants, ou de façon tripartite par des enseignants dans
leur classe / des chercheurs / des formateurs. Elle propose des
savoir-faire à découvrir, à ajuster, à hiérarchiser, à faire varier
suivant des paramètres à définir, pour en faire un «bagage» pour
enseignants, débutants ou déjà expérimentés.
Voici un exemple de recherche-action-formation menée
par nos soins en Asie-Océanie, mais que nous ne pourrons
pas détailler pour ne pas alourdir ce texte. Des formateurs
d’enseignants se posaient la question suivante, à l’allure naïve
et au fond très complexe: «Quels conseils fondamentaux donner
à un enseignant de langue débutant? à partir de quels critères
aider, conseiller, soutenir, évaluer un néo-enseignant?». Une
RAF, à base d’entretiens et d’observations de séances de
formation, liées à des séances d’essai devant une classe par
de futurs enseignants en formation, a permis de jeter les bases
d’une «trousse de secours» pour enseignants débutants, qui a
rassuré plus d’un jeune collègue!
Enfin, signalons une variante des précédentes (mais on
pourrait varier à l’infini les dénominations…), la Recherche-
intervention-formation, qui base ses résultats de formation
sur des interventions explicites et mesurées sur le terrain. Elle

-44-
Communications de cadrage

dépasse les lieux d’enseignement puisque nos collègues de St


- Etienne développent une RIF auprès des enfants plurilingues
de St-Etienne, d’âge pré-scolaire (2 à 5 ans), à la demande
d’équipes municipales et avec des éducateurs et éducatrices
non enseignants et non chercheurs1.
Partout et dans tous les exemples cités, les obstacles à
surmonter restent les mêmes: temps, déplacement, structure
institutionnelle inadéquats. Des cadrages spatio-temporels et
humains inventifs peuvent faire obstacle aux obstacles.
Un laboratoire de recherche? possibilités et difficultés
Le fait que, dans une RA, une RAF, une RIF ou autre, on
ne travaille par pour obtenir un diplôme universitaire ne doit
pas faire croire que tout est permis et qu’on peut improviser -
au contraire! Le calendrier des étapes sera précisément fixé et
suivi, la répartition des tâches ne doit rien laisser à l’improviste,
chacun étant responsable de détails précis, tout le monde est
impliqué à toutes les étapes et on ne peut se reposer sur l’autre à
aucun moment. Pour s’organiser efficacement, on peut dessiner
sur un grand tableau plusieurs cercles concentriques d’intérêt et
de disponibilité (très disponible tout le temps / disponible une fois
par semaine / une fois par mois / veut être tenu-e au courant mais
sans pouvoir participer concrètement, etc.): cela aide chacun à
se situer, et on peut toujours passer d’un cercle dans l’autre.
Pour faciliter ces passages, les questions de communication
sont primordiales: prévoir des comptes-rendus écrits distribués à
tous, réguliers et très brefs, de chaque étape, réagir en tant que
responsable de secteur très rapidement en cas de problème, ne
pas hésiter à prévoir quelques réunions festives dans l’année,

1 Tomc S., Villa-Perez V., 2019, «Les émotions et l’apprentissage du français langue seconde de
très jeunes enfants au sein d’Ateliers Langage Créatifs. Une enquête exploratoire», Masuy F. (dir.),
Emo-langages: Vers une approche transversale des langages dans leurs dynamiques émotionnelles
et créatives, Revue TIPA, Travaux Interdisciplinaires sur la parole et le langage, pp. 1-15.

-45-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

même en distanciel, qui rassemblent tout le monde et où on parle


d’autre chose que de la recherche en cours, savoir mettre le mot
«FIN» quand on est arrivé au bout… Ces précautions ne sont
pas du bavardage mais un vrai garant de réussite et de durée
des équipes, basées sur la différence et la complémentarité.

On nous demande souvent: peut-on faire de la recherche


sans être dans un laboratoire? Il y a peu, voire pas, de laboratoires
dans nos pays du SEA. Nous dirons plutôt: pas de laboratoire
institutionnalisé au sens où on l’entend en Occident, avec des
groupes, des réunions, un budget, des horaires de recherche, etc.
Mais un laboratoire est d’abord (d’après son étymologie: labor, le
travail) un lieu où on travaille, où on se rencontre, où on discute.
Même s’il aide, l’ancrage institutionnel n’est pas indispensable.
Un laboratoire peut résulter de la décision d’un groupe, petit ou
grand, de travailler ensemble sur une tâche donnée, pendant un
temps donné. Il peut fonctionner sous deux formes:

- Rassembler des recherches individuelles qui sont soumises


régulièrement au regard des autres;

- Mener un projet commun dans un temps déterminé avec


des étapes et rôles déterminés.

En général, les deux se combinent. Il peut y avoir un


responsable ou pas, une direction collégiale, ou tournante, ou pas
de direction. La condition sine qua non est un objet scientifique
commun - un thème qui rassemble. Le labo peut être pérenne ou
occasionnel, le temps d’une recherche précise et se dissoudre
ensuite: ne pourrait-on pas inventer des «labos nomades»,
structures légères et adaptées, comme une tente de nomade,
qu’on replie pour aller plus loin, une fois le travail terminé? Qu’ils
soient officiels ou pas, peu importe, pourvu qu’ils soient efficaces

-46-
Communications de cadrage

et basés sur la motivation de chacun1. Attendre les institutions


est une mauvaise stratégie: l’institution suivra quand elle verra
le travail accompli. Faites vos preuves, montez vos recherches,
travaillez selon vos possibilités et disponibilités, obtenez quelques
résultats, publiez-les, montrez-les.

3. Quelques pister pour se lancer


Nous arrivons au dernier pan de cette réflexion, qui a
l’ambition de proposer quelques éléments de travail concrets
pour les enseignants qui voudraient se lancer dans une
recherche, en zone d’Asie-Océanie, pour devenir ce que certains
appellent un «praticien réflexif», c’est-à-dire pétri, par modestie
professionnelle, des convictions suivantes: un enseignant est
aussi un apprenant; apprendre c’est construire ses savoirs en
interaction avec autrui (Vygotski); la recherche est aussi une
pratique; on n’apprend pas tout seul; l’enfant et l’apprenant ont
des choses à nous dire. Pour les comprendre, il faut rassembler
et confronter discours et pratiques de terrain, développer une
recherche de la proximité. Ce qui suit va exemplifier quelques
tendances des recherches-actions, faciles à mettre en œuvre.
3.1. Une conception sociale de la recherche
On peut partir de l’idée qu’il faut faire, dans la vie, ce qui
nous épanouit personnellement et que ce qui épanouit l’un peut
épanouir les autres. En cela, la recherche peut être sociale si
elle épouse un double mouvement nécessaire: réflexivité (pour
savoir ce qu’on fait) ⇔ mise à distance (pour mieux le voir), qui
lie collectivité et individu.

1 Marielle Rispail a mené dans ce sens 6 ans pour 3 recherches-actions, dans le cadre d’un
laboratoire non labellisé à Draguignan-Nice, dans le Sud de la France: les réunions avaient lieu
une fois par mois, le samedi matin, 15 enseignants du primaire venaient pendant leur seul jour de
congé. Seule la motivation et la joie de travailler ensemble peuvent expliquer présence et travail.
Cela s’expérimente et ne s’explique pas.

-47-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Dans les recherches-actions, nous conseillons donc d’ouvrir


l’éventail des acteurs et des facteurs observés qui jouent sur
l’enseignement: il n’y a pas que les enseignants et les élèves
dans un lieu scolaire! C’est la même chose quand on étudie des
phénomènes sociaux: pourquoi regarder seulement les langues
dominantes, les grandes villes, les milieux aisés, etc.? On a plus
à apprendre dans les recoins, les campagnes, les minorités, les
marges, les échecs, les exclus, les très bons, les très mauvais,
les passages, les incertitudes, etc. Trop de recherches vont par
facilité dans le majoritaire, par le quantitatif, et dans le quantitatif
vers les grands nombres: et si les exceptions, les «presque pas
visibles» ou quantifiables avaient à nous apprendre?
Notre deuxième conseil est de regarder à la loupe des détails
plutôt que d’embrasser des grands groupes: dans une classe,
dans une école, dans un groupe d’élèves, dans une œuvre, dans
les compétences écrites, etc. Par exemple, on peut se donner
pour sujet d’observation: un seul élève par classe, une seule
séance dans une séquence, une famille parmi toutes celles de
la classe, un chapitre d’un manuel, une seule conversation dans
une suite de débats, les 5 premières minutes seulement d’une
leçon1, etc.
3.2. La recherche comme échange
Les types de recherches evoques ci-dessus sont aussi des
pretextes pour creer des moments d’echange dont ont besoin les
enseignants. On a besoin de mettre ensemble nos pensees, doutes,
expériences, entre enseignants de la meme ville, de quartiers differents,
du meme pays ou des pays de la région, entre des continents, entre
divers niveaux d’études, entre université et enseignant, entre diverses
institutions et cadres d’enseignement. Pour cela, la communication

1 Pour détecter les stratégies argumentatives orales en Asie et en Europe, mon amie et collègue
Kim Khanh de HCM Ville, a étudié, sous la direction de V. de Nuchèze, 3 discussions de 20’ chacune:
une entre Vietnamiens, une entre Français, une entre VN et Français. Sa thèse est magnifique.

-48-
Communications de cadrage

a distance offre des possibilites nouvelles. On peut ainsi construire


une methodologie de l’echange: par des entretiens, individuels ou
de groupe, des «tchats», des forums interactifs, ecrits reflexifs, auto-
confrontations, recueil de recits et auto-biographies, observations
participantes, analyses des pratiques collectives, etc. La dynamique
interactive qui se developpe au sein de ces divers groupes, meme
ephemeres, est faite d’observations mutuelles, d’annonces, d’invites,
de commentaires, de questionnements, d’explications, de reprises
d’idees, de coordination d’idees et d’action. On avance tous ensemble.
Ces pratiques se basent sur une théorie forte qui reconnait le
rôle des interactions sociales dans les constructions cognitives.
Les entretiens d’explicitation en sont un exemple intéressant: ils
veulent répondre à la question «comment un «bon» élève fait-il
pour réussir?», mettant ainsi en valeur des stratégies gagnantes
au lieu de souligner les manques d’un apprentissage. Les TICE,
pas seulement outil de travail dans les classes, peuvent nous
inciter à travailler autrement, ensemble mais pas dans le même
lieu ni le même temps, renversant ainsi nombre de difficultés de
la recherche-action en inventant de nouvelles formes de littéracie
scientifique.
3.3. Préoccupations du terrain asiatique
Si on examine le programme du Séminaire 2019 du CREFAP
à Siem Reap, on peut dresser un «tableau des préoccupations
de la zone» à partir des observations suivantes:
- Les jeunes enseignants-chercheurs ont besoin de recherches
«utiles»: les mots «usage», «application», «réussir», «évaluer»,
«apports» l’emportent sur les concepts de réflexion ou réflexivité;
- On se questionne sur des pratiques didactiques courantes
mais dont on ignore au fond l’efficacité et qu’il faut décrire en
prenant de la distance: on trouve ainsi «jeux de rôles», «TICE»,
«grilles d’analyses», etc.

-49-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- le lien avec des professionnalisations possibles est souligné


dans de nombreuses communications, qui interfèrent dans la
question: y a-t-il un ou des français à enseigner? comment les
distinguer?
Par ailleurs notre enquête auprès des enseignants de l’UP
de Ho Chi Minh - Ville fait état de 24 réponses et questions de
recherches possibles, issues de l’expérience des enquêtés. En voici
4 à propos desquelles nous nous sommes demandé: Comment
transformer une préoccupation d’enseignant en problématique de
recherche?
1 - «Motiver les étudiants vrais débutants pour apprendre le
français?»
2 - «L’enseignement et l’apprentissage du français, langue
étrangère pour les élèves anglophones, dans des établissements
scolaires internationaux à Ho Chi Minh - Ville»
3 - «Accompagnement des jeunes enseignants à l’entrée
dans le métier»
4 - «Mes élèves ne m’écoutent pas».
Cette transformation peut se faire dans un double mouvement
de balancier, où la collaboration enseignants/chercheurs sera
indispensable:
- D’une part «objectiver», rendre visible le phénomène à
étudier (par exemple: 1 - à quoi voit-on qu’un apprenant est
motivé ou pas? 2 - à quel moment l’anglais peut-il surgir dans
une activité de français? 3 - quels moments exacts sont difficiles
pour un enseignant débutant? 4 - que fait ou ne fait pas un
écoute qui écoute? qui n’écoute pas?) pour fixer un protocole
d’observation;
- D’autre part, chercher au moins 2 concepts ou notions
dont le croisement marquera le lieu de la problématisation (par

-50-
Communications de cadrage

exemple: 1 - motivation/apprentissage, 2 - langues voisines/posture


plurilingue, 3 - gestes professionnels/transmission, 4 - interaction/
attention), pour construire un début de questionnement, de culture
commune et un programme de lectures pour le groupe.
Après ces prémisses, on s’attardera sur 2 autres initiatives en
route, suite à notre collecte, dont nous pouvions refuser la forme
première en «comment» car cette question fermée supposait
une réponse existante que la recherche aurait eu pour seul but
de dévoiler:
1 - Comment motiver les élèves pour qu’ils travaillent en
groupe?
2 - Comment développer les compétences de lecture des
élèves vietnamiens au collège?
Il s’agit alors de se détourner de l’objectif «donner une recette»
pour aller vers une autre exigence «produire du savoir». Pour
cela, des questions ouvertes qui «font respirer» la réflexion sont
nécessaires. Après quelques heures d’observation exploratoire
dans les classes, les questions ont pu être reformulées
efficacement de la façon suivante:
1 - Quels paramètres influent sur les apprenants pour qu’ils
s’engagent ou refusent de s’engager dans un travail de groupe?
Quels profils différents apparaissent?
2 - Quelle place ont les interactions orales dans les séances
de lecture au Vietnam?
Voici, pour vous exercer, 2 autres questions posées par
vos collègues que nous trouvons stimulantes, la première
parce qu’elle interroge l’évaluation et ses formes: «comment
transformer l’angoisse de mal faire en tremplin pour réussir?»; la
deuxième parce qu’elle poursuit cette interrogation en suggérant
de chercher du côté de la «bienveillance», concept nouveau et
prometteur en didactique et en Sciences de l’éducation: «Que

-51-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

faire avec et pour les élèves en difficulté?».


On voit que, pour l’instant, les origines sociolinguistiques des
élèves sont peu sollicitées, mais plusieurs des questions citées
peuvent amener une équipe de recherche-action à s’y intéresser.

Conclusion
Tout ce qui précède invite les enseignants à entrer ou rester
dans la recherche, par posture éthique finalement. Parce la
recherche-action (et ses dérivés), en engageant tous les acteurs
de l’école (parents, communautés locales, décideurs, etc.) peut
dynamiser des changements scolaires et donc sociaux; parce
que, grâce à des méthodes expérientielles et incarnées, elle pose
l’expérience comme connaissance et comme ressource, parce
qu’elle pousse à une décentration toujours féconde (par exemple:
"Mes élèves sont ainsi à l’université, mais qu’ont-ils vécu avant?
qu’en pensent-ils? qu’auraient-ils préféré faire?") menant à être
un praticien réflexif comme le nomme notre collègue Claude
Cortier, sachant se dégager de son cadre habituel de référence
pour faire appel à d’autres grilles de lecture que les siennes. On y
découvre l’intérêt de chaque avis et de chaque vécu et comment
la présence symbolique de l’autre participe de la construction de
soi. La recherche apparait alors comme une posture éthique et
citoyenne à partager.

Annexe 1
http://cantho.gov.vn/wps/wcm/connect/bandantoc/menu_chinh/sitemenu/
anpham/bantindantoc/ngon+ngu+cua+cac+dan+toc+thieu+so+gio+ra+sao
Một số ngôn ngữ đang được sử dụng trên Đài Tiếng nói Việt
Nam, Đài Truyền hình Việt Nam, các đài phát thanh và truyền hình địa
phương như Khmer, Ê Đê, Gia Rai, Ba Na, Chăm, Mông, Thái, Xơ Đăng,
Tày, Hà Nhì, H’rê,... Một số ngôn ngữ dân tộc thiểu số đã được sử dụng
để in các tác phẩm văn nghệ truyền thống, các sáng tác mới, để biên

-52-
Communications de cadrage

soạn các từ điển đối chiếu song ngữ, các sách miêu tả ngữ pháp, các
sách giáo khoa...
Bà Lý Thị Vi, người dân tộc Cao Lan vui mừng chia sẻ: “Tôi thấy
rất vui vì thấy họ nói tiếng dân tộc mình trên truyền hình VTV5. Trước
đây tôi rất lo lắng rằng người trẻ bây giờ sẽ không biết nói tiếng của
dân tộc mình nữa. Nhưng có những chương trình, hy vọng nhiều
người biết và giữ được tiếng nói dân tộc”.
Bên cạnh đó, việc tổ chức thực hiện chính sách dạy và học ngôn
ngữ dân tộc thiểu số cũng đã được triển khai nghiêm túc tại các
trường phổ thông và bổ túc văn hoá vùng đồng bào dân tộc thiểu số
trong cả nước. Hiện nay, Bộ Giáo dục và Đào tạo đã xây dựng chương
trình dạy song ngữ bằng 8 thứ tiếng dân tộc (gồm: Thái, Mông, Ba Na,
Gia Rai, Xơ Đăng, Chăm, Khmer, Hoa, Ê Đê) cho các trường tiểu học,
phổ thông dân tộc nội trú vùng đồng bào dân tộc thiểu số.
Có khoảng 30 tỉnh, thành đang tổ chức dạy học ngôn ngữ dân
tộc thiểu số trong nhà trường. Đó là các chính sách bảo tồn và phát
triển ngôn ngữ dân tộc. Tuy nhiên, để bảo tồn ngôn ngữ của các tộc
người thiểu số thì trước hết chính người dân phải truyền dạy ngôn
ngữ cho con em mình.
Certaines langues sont utilisées à la Radio et Télévision du
Viet Nam, les radios et télévisions locales: langue khmère, Ê Đê,
Gia Rai, Ba Na, Chăm, Mông, Thái, Xơ Đăng, Tày, Hà Nhì,
H’rê... On publie aussi des oeuvres littéraires traditionnelles, de
nouvelles créations littéraires, élabore des dictionnaires bilingues,
des grammaires, des manuels scolaires.
Mme Lý Thị Vi, de la minorité des Calo Lan, dit: “Je suis très
contente d’entendre parler ma langue à la télévision TV5. Avant
j’avais peur que les jeunes ne sachent plus parler leur langue
ethnique. Mais grâce à ces émissions, j’espère que beaucoup de
gens connaitront et parleront la langue de leur ethnie”.
En outre, l’enseignement-apprentissage des langues ethniques
se fait dans des établissements scolaires et de formation continue

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

dans les zones où habitent ces ethnies. A l’heure actuelle, le Ministre


de l’Education et de la Formation a élaboré des programmes
bilingues pour les 8 langues ethniques (Thái, Mông, Ba Na, Gia
Rai, Xơ Đăng, Chăm, Khmer, Chinois, Ê Đê) destinés aux écoles
primaires et secondaires (en internat) des régions où se trouvent
ces ethnies.
L’enseignement-apprentissage des langues ethniques se
fait actuellement dans une trentaine de provinces. Cela relève
de la politique de préservation et de développement des langues
ethniques. Cependant cela dépend aussi de la volonté des gens
de transmettre leur langue ethnique aux jeunes.

Annexe 2
Documents sur la politique du Viet Nam à l’égard des langues
ethniques:
1980: Arrêté no 53/CT du 22/02/1980 du Conseil des Ministres
portant politique relatives à l’écriture des langues ethniques
2010:Arrêté gouvernemental no 82/2010/NĐ-CP du 15/07/2010
portant réglementation de l’enseignement-apprentissage des
langues ethniques
2011: Circulaire interministérielle des Ministère de l’Education
et de la Formation, Ministère de l’Intérieur, Ministère des Finances
du 03/11/2011 relative à la formation des enseignants des langues
ethniques et à la promulgation des programmes d’enseignement
des langues ethniques.
Sur 53 ethnies (sauf ethnie Kinh), seules 27 ethnies possèdent
une écriture pour transcrire leur langue.
https://www.gso.gov.vn
Résultats du recensement national en 2019 du Département
national des Statistiques (14:43 19/12/2019)

-54-
Communications de cadrage

Les Kinh sont de 82.085.826 personnes, soit 85,3% du total.


Parmi les autres 53 ethnies, 6 ont plus d’un million d’habitants:
Tày, Thái, Mường, Mông, Khmer, Nùng (dont 1,85 millions pour
les Tày); 11 ethnies ont moins de 5000 habitants et les Ơ Đu ne
sont que de 428 habitants. Ces ethnies vivent essentiellement
dans les plateaux et les montagnes du Nord et du Centre.

Annexe 3
https://vntravellive.com - Les quartiers où vivent les étrangers
à Ho Chi Minh - Ville
5e arrondissement - Les traditions chinoises
La communauté chinoise du 5e arrondissement, l’une des
communautés les plus nombreuses et les plus anciennes à Ho
Chi Minh - Ville, possède un mode de vie spécifique à travers ses
activités commerciales (rue de la Médecine orientale) ainsi que
ses spécificités culturelles (pagodes chinoises) [...]
Un petit Séoul au 7e arrondissement
La communauté coréenne a créé un petit Séoul dans le 7e
arrondissement
Quartier des étrangers dans le 1er arrondissement
L’animation du quartier a attiré beaucoup de gens venant
des Amériques, de l’Europe, créant ainsi un phố Tây (quartier
des Européens). Le spectacle des Européens bavardant aux
terrasses des rues Bùi Viện, Đề Thám et Huỳnh Thúc Kháng
est devenu habituel aux habitants de Saigon.
Quartier résidentiel des étrangers à l’est du 2e arrondissement
http://bandantoc.hochiminhcity.gov.vn/
Auteurs: Phú Văn Hẳn, HJ Ysa U Mơ

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

La vie socio-culturelle des Chăm à Hochiminhville


Les Chăm commencèrent à arriver à Ho Chi Minh - Ville
depuis les années 40 du XXe siècle. A l’heure actuelle il s’est
formé 15 agglomérations de Chăm à Hochiminhville, chacune
regroupée autour d’un édifice religieux musulman (masjid, surau).
Par exemple, au 1er quartier du 8e arrondissement, on compte 126
ménages Chăm vivant en groupe derrière des maisons donnant
sur la rue principale. L’accès se fait par une ruelle bétonnée.
https://vnexpress.net/pho-chau-phi-o-sai-gon-3335579.html, 2015
Le quartier des Africains à Saigon
Les Africains mangent et boivent, écoutent de la musique (très
fort) tard dans la nuit, puis les querelles éclatent. Plusieurs d’entre
eux se sont mis en ménage avec des Vietnamiennes d’âge mûr.
[Ils se trouvent] tout autour de la Résidence Khang Gia, rue
Phan Huy Ích, 14e quartier, arrondissement de Gò Vấp. [...] Ayant
épousé une Vietnamienne, King (de nationalité nigérienne), patron
d’un café-restaurant dans la région. Parlant de la communauté
africaine, il nous fait savoir que ces Africains viennent de plusieurs
pays d’Afrique: Ghana, Algérie, Nigeria, Cameroun...
https://vnexpress.net/sai-gon-dau-chi-co-pho-tay-con-ca-
pho-ma-lai-3719397.html, 2018
A Saigon, il n’y a pas seulement des quartiers européens, il
existe aussi un quartier réservé aux gens de Malaisie, d’Indonésie
Le quartier des Malaisiens a vu le jour en 2011, quand Mme
Basiroh, ex-chargée des études de marketing pour l’Angleterre
- a créé un site pour les touristes et les travailleurs malaisiens
arrivant à Ho Chi Minh - Ville. Auparavant, les touristes venant
des pays parlant le Bahasa avaient beaucoup de difficultés pour
trouver des aliments Halal et des vêtements spécifiques.

-56-
Communications de cadrage

Saigon Halal Street se trouve rue Nguyễn An Ninh, à la


porte ouest du Marché de Bbến Thành, en plein centre du 1er
arrondissement. [...] Là se trouvent des commerces destinés aux
communautés musulmanes

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EPISTÉMOLOGIE, MÉTHODES, CONTEXTES.
POUR UNE ÉCRITURE DE LA RECHERCHE DIDACTIQUE
EN ASIE DE L’EST

Pierre Martinez
Université Paris 8 Saint-Denis

Résumé
«Epistémologie, méthodes, contextes» entend dessiner les contours d’un
narratif de la recherche en sciences humaines et sociales,et plus spécifiquement en
didactique des langues et des cultures. Il conduit d’abord à réfléchir à une genèse
de l’activité heuristique, en ce qu’elle va de l’élaboration à la formulation, dans
un parcours tributaire d’une histoire, d’instances contraignantes et de partages
disciplinaires. Il dessine ensuite les chemins du savoir, faits d›une clarification
conceptuelle dans des contextes forcément différents et de la circulation entre
réseaux, mais aussi de retardateurs à l’innovation et d’éléments-clefs. Il envisage
enfin le passage du dire au faire, pour souligner des questions vives et conclure
de manière large sur la notion de crise positive de la pensée didactique, en quête
d’un nouveau récit.
Mots-clefs: Ecriture de la recherche. Epistémologie. Méthodes. Contextes. Crise.

PRÉAMBULE
L’intervention que j’ai faite au Séminaire du CREFAP-OIF en
décembre 2019 m’a permis - et j’en remercie les organisateurs
et les participants - de tester un certain nombre d’interrogations
et d’hypothèses que j’ai avancées depuis plusieurs années, au
fil de mes activités. Elle s’inscrivait pour moi dans la ligne de
Communications de cadrage

travaux théoriques de longue durée qui portent sur les conditions


d’exercice d’une recherche didactique profitable aux dispositifs et
aux pratiques, une attention particulière étant portée à ceux de
l’Asie de l’Est (Martinez, 2013, 2017a, 2017b, 2018a et 2018b).1
Le texte suivant doit donc être vu comme des prolégomènes,
des considérations préliminaires à un ouvrage en cours
d’élaboration et l’on retrouvera sans surprise dans celui-ci, après
l’approfondissement nécessaire, des idées et des formulations
présentes ici.
Ma conférence se proposait simplement d’aider à réfléchir
à quelques questions brûlantes en matière de recherche sur
l’enseignement/apprentissage des langues. J’ai traité ces
questions dans ce qui me semble le cadre étendu où il faut les
situer, celui d’un monde technoscientifique émergent. Ce monde
conduit à intégrer dans la sphère de la recherche en éducation les
algorithmes, l’intelligence artificielle ou les réseaux numériques
comme des éléments à terme essentiels du système, et quel
que soit le scepticisme qui peut accompagner cette hypothèse,
longuement développée dans mon dernier ouvrage (Martinez,
2018a, passim).
Cela ne revient nullement à dire que ma réflexion puisse
se substituer à une expertise endogène, qui appartient aux
lecteurs chercheurs et praticiens d’une grande aire culturelle telle
que l’Asie. La connaissance que je puis avoir de leurs terrains,
même si elle a commencé il y a plusieurs décennies, manque
bien trop d’ampleur et même de profondeur. Je ne suis pas, et
ne veux pas être, comme écrit Bourdieu, citant Blaise Pascal,
un «demi-habile» ou un de ces experts importés dont Valéry se
moquait en disant qu’ils se trompent selon les règles.

1 A ce titre, le nombre des références bibliographiques a été allégé pour mieux respecter le format
éditorial requis. Par ailleurs, on observera qu’en parlant, dans ce texte, de didactique des langues,
on n’entend pas dissocier langues et cultures.

-59-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Mes objectifs doivent apparaître ici clairement et ils sont


fortement cadrés: je retiens un seul angle d’attaque, celui de
l’écriture de la recherche comme un narratif, comme un récit
qu’on se raconte et qu’on raconte. Je ferai apparaître que cette
thématique de l’écriture du récit n’est pas accessoire, mais bien
centrale pour la recherche et, pour cela, je développerai ma
réflexion en trois temps: j’irai de l’élaboration à la formulation, puis
à l’exploration de chemins du savoir, et je passerai enfin du dire au
faire. J’insisterai peu sur la démarche, sur ce comment procède le
chercheur, parce que c’est un processus qui a suscité nombre de
descriptions et qui est familier à la plupart des spécialistes. Cette
connaissance que nous avons du comment se fait la recherche
est le résultat d’une volonté de comprendre qui s’étend des ficelles
du métier, comme le dit modestement l’ouvrage de Becker, 2004,
à une investigation archéologique du savoir humain (Foucault,
1966). 1 L’urgence, pour expliquer ce que j’ai appelé, au point de
départ de ce texte, «Écriture de la recherche», me semble résider
ailleurs. Elle conduit à porter finalement l’éclairage sur le quoi et
le pour quoi de l’activité heuristique, autrement dit sur son objet
et sur sa finalité narrative. Mais il convient d’abord de dire ce que
j’entends par récit.

1. L’exercice de la recherche au XXIe siècle.


Quelques préalables
Je poserai directement un élément de réponse en rappelant
qu’une recherche en sciences humaines et sociales vise à une
épistémè, l’élaboration d’un surcroît (sens même du préfixe épi)
de savoir. Elle peut être vue comme une construction faite à partir
de la trame narrative d’un projet. Ce projet intègre un registre

1 Foucault montre que «l’histoire (des connaissances) n’est pas celle de leur perfection croissante,
mais plutôt celle de leurs conditions de possibilité; en ce récit, ce qui doit apparaître, ce sont, dans
l’espace du savoir, les configurations qui ont donné lieu aux formes diverses de la connaissance
empirique» (p.13)

-60-
Communications de cadrage

affectif, un désir qui, par un biais cognitif dit de confirmation,


peut occulter la réalité aux yeux du chercheur, quand elle ne
répond pas à ses attentes (il se raconte alors des histoires).
Le projet - par exemple l’évaluation d’une réforme éducative,
l’étude d’un dispositif bilingue - inclut encore explicitement des
conditionnalités, des règles à respecter, une durée, des résultats,
des implications. Telle peut être énoncée de la manière la plus
concise la problématique de la recherche en didactique des
langues, celle qui nous occupe aujourd’hui.
Ce qui est appelé ici «écriture de la recherche» correspond
donc à une mise en récit du projet scientifique, ou encore,
pour pousser l’image, un roman, comme on parle d’un «roman
national», où est donnée forme à une histoire sous l’éclairage de
raisons jugées supérieures. On sait comme ces raisons peuvent
recouvrir, pour un Etat-nation ou une idéologie, l’atteinte d’un
objectif commun, la cohésion d’un ensemble de populations, ou
l’harmonie sociale. Hannah Arendt (1972: 58-120), excellente
observatrice de ce qui fit la trame des grands événements
collectifs de son époque, relève que toute histoire est une fiction,
et elle souligne, aussitôt après, que cette fiction n’est pas une
contre-vérité mais une interprétation de la réalité ancrée dans
une culture.
Il faut, pour la période actuelle, situer cette vision de la
recherche comme interprétation de la réalité dans son contexte
propre, ce qui implique l’élucidation des conditions où s’exerce
dialectiquement l’activité humaine (Martinez, in Blanchet et
Chardenet, 2011, Aguilar et al., 2004). En cette première moitié
du XXIe siècle déjà avancée, ce contexte civilisationnel doit être
lu comme celui d’une postmodernité dont les contours remontent
à l’évolution des sociétés industrielles, à partir de leur acmé et
du début de leur progressive mutation autour de 1975. Lyotard,
Habermas, Jameson ont largement décrit ce grand tournant, dont
Perry Anderson, 1998, fait la remarquable synthèse (Martinez,

-61-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2018a:68) et il est patent que cette postmodernité se déploie sous


l’emprise de valeurs affichées par un système économique néo-
libéral dominant à des degrés divers et sous différents avatars.
Je ne peux, bien sûr, en donner dans ce texte une
caractérisation plus fouillée, mais, à grands traits, le changement,
le marché, le paraître peuvent en être désignés comme trois
indicateurs essentiels et ceux-ci peuvent se décliner sous diverses
formes: l’affaiblissement de l’historicité, l’innovation technologique
constante, la résilience et le culte de la mobilité, la déconstruction
des règles et la coexistence des contraires, l’utilitarisme et la
marchandisation, enfin et surtout la visibilité, qui rend l’ensemble
susceptible d’être décrit et raconté. Désormais, la recherche,
comme l’art, la politique, la technologie, doit être mise en scène,
spectaculaire, ainsi que le pressentait Guy Debord, dès 1967. Et
il n’est pas inutile de préciser que, dans ce monde ouvert, non
pas dérégulé, mais soumis à de nouvelles règles, la maîtrise des
systèmes d’exploitation informatiques sera un atout décisif. Elle
autorise la récolte des données massives (les big data), puis
leur mise à profit, elle régit l’information scientifique, sa diffusion
et aussi son contrôle par les moyens numériques. Je reviendrai
naturellement sur ce point. Constat fait incidemment: pour le
moment, avec les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon,
Microsoft) et les BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi), à eux
seuls les Etats-Unis et la Chine ont cette capacité de manoeuvre.
Le propos n’est pas de minimiser le travail du chercheur
ou de l’enseignant-chercheur médiateur, mais de le positionner
objectivement dans ce contexte, en réfléchissant avec lui aux
facteurs qui orientent, voire déterminent sa problématique,
ses analyses, ses productions. La dynamique du marché de
l’éducation, tout comme la politique linguistique éducative
doivent être mentionnées comme des acteurs essentiels à cet
égard. Ainsi, en didactique des langues étrangères, une doxa
communicative dominante où la langue, au détriment de sa

-62-
Communications de cadrage

fonction de transmission culturelle, serait prioritairement outil de


communication, est-elle confortée par les éditeurs et diffuseurs
de matériel de tous genres, disposés, comme on peut le
comprendre, à multiplier des supports, vite rendus obsolescents,
l’ancestral manuel sur papier comme le dispositif collaboratif. La
recherche apparaît alors à la fois comme un nourrisseur de cette
marchandisation (elle y collabore) et, paradoxalement (allant
parfois contre la doxa) comme un facteur d’émancipation, de
diversion, la possibilité d’aller voir ailleurs.
Ainsi, encore, la recherche se trouve face à des décisions
qui peuvent émaner d’une politique linguistique éducative sous
influence: si la culture a pu trouver une place limitée dans le
curriculum, voire superflue, et du moins accessoire (Martinez,
2017b), c’est qu’une langue de stricte communication (illusoirement,
d’ailleurs, débarrassée de traits culturels, culture-free) sert mieux
des intérêts économiques, pratiques ou professionnels, que ne
le fait la poésie de Baudelaire. Il peut aussi y avoir des logiques
qui ne vont pas dans le sens d’un équilibre entre pragmatisme
et culture, la recherche proposant des solutions qui ne sont pas
exploitables dans les systèmes éducatifs, par exemple en raison
de leur coût dans une mise en œuvre à grande échelle.1 Il arrive
aussi qu’harmonisation se confonde avec uniformisation, en
dépit des contextes hétérogènes et des volontés divergentes.
On dira ainsi combien le Cadre Européen de référence pour les
langues (le CECRL) a été salué, ces dernières années, pour
l’intérêt qu’on pouvait lui trouver: la promotion du plurilinguisme,
la médiation ou les échelles de compétences... Il n’en reste pas
moins un exemple de ce barrage idéologique mis par une doxa
monocorde à la diversité des approches et des méthodologies
d’enseignement. Jean-Claude Beacco, dont on connaît la

1 Un exemple: la mobilité dans les cursus d’enseignement, si l’on considère la proportion des
apprenants qui, au fond, peuvent en bénéficier, soit 2,4% en 2017 (source: site Campus France,
19/3/2020). Pour une évaluation des politiques éducatives, voir Pons, 2011.

-63-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

contribution théorique à sa gestation, parle justement à son sujet


de complexité ignorée (Beacco, 2014:322). Cette complexité est
aussi un voile jeté sur une partie des sources historiques de la
politique linguistique européenne: sa vocation à développer la
mobilité dans une économie globalisée, avec des travailleurs
à bas coût et, assurait-on, propre à stimuler, dans un espace
sans frontières, une construction culturelle vantée comme mise
au service d’une paix durable. Il y a tout lieu de penser que ni
les résultats en compétences linguistiques des locuteurs (les
données sont accablantes de médiocrité), ni la connaissance
des cultures des autres pays du continent, ni le partage des
valeurs d’une citoyenneté commune ne se sont, en deux ou trois
décennies, accrues autant qu’espéré.1
Plus pratiquement et à travers le monde, la forme rituelle
donnée dans nombre de cultures à l’enseignement des langues,
par exemple le formatage imposé à la médiation (souvent: une
heure, une classe, un enseignant), relève d’un modèle de pensée
qui n’a rien de «naturel» . Il est évident qu’il est profondément
ancré dans une histoire, c’est-à-dire pour être précis: une culture
éducative. Les apports des sciences contemporaines à la
transmission du savoir en général appellent de nous la même
attention. Si elles nous transforment dans nos émotions, notre
cognition, nos interactions, nos habitus et notre éthique, ce qui
advient a toujours une longueur d’avance sur la conceptualisation,
sur la prise de recul que nous pouvons en faire.
Les effets de ce paradigme contemporain sont déjà sensibles.
Les outils didactiques, jeux sérieux (escape game, etc.),
e-tandems ou plateformes interactives, sont aujourd’hui les avatars
d’innovations empruntées aux nouvelles pratiques sociales. Ils
relèvent de la ludification tendancielle d’un enseignement qui

1 Sur les compétences, voir par exemple, First European Survey of Language Competences,
2011. Le débat critique sur la politique linguistique de l’Europe et le Cadre Européen de référence
ne date pas d’aujourd’hui, y compris hors de l’espace francophone.

-64-
Communications de cadrage

vise massivement à l’optimisation de l’effort et à l’apprentissage


collaboratif. A l’individualisme né de la modernité, la postmodernité
substitue le collectif. Dans un autre domaine, c’est cet esprit du
temps qui incite à se déplacer en covoiturage et à prêter son jardin
quand on est trop vieux ou trop occupé pour le cultiver soi-même.
Ces quelques lumières sembleront jetées, peut-être, sur des
sociétés contemporaines particulières. Elles valent d’abord, c’est
vrai, pour les deux rives du Pacifique et l’Europe, mais chacun
est à même de constater les effets d’une globalisation accentuée,
faisant contre-poids à toute diversité culturelle. Pei-Tseng Jenny
Hsieh, dans un ouvrage collectif sur l’éducation en Asie, a bien
su montrer cette ambivalence. Tout en faisant de la pensée
confucéenne la toile de fond des systèmes de transmission du
savoir communs à une telle et si vaste aire culturelle et géopolitique,
elle insiste d’emblée sur la nécessaire prise en compte, et
à des degrés divers, de facteurs opératoires différentiels:
l’éducation dite de masse, la place de la recherche, les capacités
technologiques (Pei-Tseng, 2013, Introduction, XVI, et passim).
Là se posera inéluctablement la question de la langue, ou plutôt
des langues dans lesquelles va s’écrire la recherche, langues
qui ne sauraient se limiter à une lingua franca, bien en peine de
répondre aux besoins, et il ne suffira pas de regretter que nombre
de nos collègues et de nos institutions semblent accepter sans
autre forme de procès l’anglomanie actuelle de la transmission
scientifique: il faudra proposer des alternatives multilingues en
matière de revues, de publications, de traduction.
On conviendra alors sans surprise que la recherche est un
processus glocal, entre global et local. Il ne s’agira plus de penser
globalement et d’agir localement, comme disait le philosophe
Jacques Elllul, mais selon la formule d’un économiste, Drew
Martin, de fondre le global dans le local par un processus
d’assimilation et d’indigénation (Meld global inside local, Martin,
2008). Ce processus doit être examiné dans sa complexité et sa

-65-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

liquidité, et s’il entraîne par conséquent la difficulté à l’analyse,


il invite à une méta-analyse qui porterait sur un champ de
recherches étendu à divers domaines de la connaissance.
Pour conclure sur ce point et souligner que les idées livrées
ici ne sont pas «hors-sol», venues d’un ailleurs ethnocentré, je
réaffirme la nécessité d’une vision intégrative ou compréhensive.
Celle-ci est rendue possible par la connexion généralisée de
l’information, et elle s’impose à ceux qu’animent la curiosité
et la lucidité nécessaires au chercheur. Peut-on, pour y aider,
énumérer les noms de sites comme Google Scholar, Crid du
CIEP de Sèvres, Filfrancophonie, IFProfs, Sudoc, Hal, Framonde,
etc..),1 des agrégateurs: Twitter, Netvibes, Feedly..., des réseaux
sociaux thématisés, des groupes sur Facebook, des blogs et
l’«intelligence collaborative» des Wikis? Il faut trouver dans le
système même les armes pour décrypter le système.
Cet état des lieux ne signifie pourtant pas que les chercheurs
aient à suivre aveuglément les préceptes de ce monde d’une
information de moins en moins présentielle (où la bibliothèque,
l’enseignant le cèdent au virtuel). Ils ont à faire constamment oeuvre
critique face à une réalité contextuelle complexe, à des cultures
éducatives spécifiques, à une histoire trop vite écrite, et sont tenus
à refuser (il faut toujours le répéter) les stéréotypes circulant. Je
me permettrai une illustration personnelle en suggérant ainsi, à
propos de l’apprenant dit hâtivement «asiatique», que soit jeté
un coup d’oeil à ma conférence, enregistrée naguère à Tamkang,
Taïwan. Qu’est-ce donc, pourrait-on à bon droit se demander,
qu’un apprenant «asiatique»? (Martinez, 2017a).
Dans tous les cas, et tout en restant attentif à ce qui se fait,
s’écrit ailleurs et se diffuse à travers réseaux, équipes, laboratoires,
revues internationales et bases de données numériques, le
chercheur doit savoir affiner une méthodologie hétérodoxe, écrire

1 Voir exemples dans la sitographie en fin de ce texte.

-66-
Communications de cadrage

sa recherche avec ses sources et ses ressources propres, ce


qui devrait apparaître sans équivoque dans ses bibliographies et
sitographies. Chercher, c’est douter, et encore mieux: se méfier.
C’est le conseil qu’on donnera à des étudiants, des doctorants,
hommes ou femmes, surtout si on les sent prêts à aduler un seul
livre, un seul maître ou une seule école.
Si je résume mon propos, je soulignerai donc que la
recherche se donne à voir comme la trame narrative d’un
projet, un énoncé a priori pourtant difficile à analyser, allant du
chercheur jusqu’au civilisationnel. Le chercheur ouvre les yeux
sur un contexte, avec sa problématique, les analyses qu’il impose,
des productions possibles. La complexité de ce paysage rend
d’autant plus nécessaire une approche intégrative appuyée sur
le numérique et fortement attentive à une identité de chercheur,
situé de multiples manières. Venons-en à parcourir ensemble les
trois étapes du chemin annoncé.

2. Trois temps d’un questionnement


2.1. De l’élaboration à la formulation.
Je partirai de la genèse de la recherche pour montrer
comment elle s’inscrit dans un courant théorique, un paradigme
dominant à tel moment de l’histoire des sciences. La question
initiale en dépendra largement. Ainsi les recherches sur les
contacts de langues, sur le plurilinguisme, sur les apprentissages
en situation d’intercompréhension des langues sont-ils à situer
dans un modèle civilisationnel qui a fait, ces dernières décennies,
une large place au multiculturalisme et à l’ouverture sur la
mondialisation. Les besoins sont réels: nous vivons à un moment
où, d’une part, les technosciences ne nous ont pas encore
donné les outils de traduction et de transmission du savoir de la
qualité espérée, et où, d’autre part, les questions de mobilités,
de migrations volontaires ou contraintes, d’études ou d’échanges
lointains se posent avec une acuité croissante.

-67-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Qu’en a t-il été pour la recherche en didactique des langues


à laquelle je me limite? On ne s’y attardera pas, mais d’évidence,
ce fut, au XXe siècle, d’abord sous le regard de la linguistique
située, dite appliquée (Carton et al., dirs., 2015) qu’elle se
développa. Discipline de référence, celle-ci a longtemps orienté
notre activité heuristique (Chiss, 2014:306 ssq.), avant que
le bourgeonnement des sciences du langage, fécondées par
la psychologie, la sociologie, etc., impose une histoire élargie,
plus apte à analyser le réel de la communication humaine, et
aboutisse en somme à un autre récit, pour reprendre le terme qui
est au centre de mon propos.
Cet éclatement théorique nous interroge aujourd’hui, au point
que nous ne voyons plus clairement quel est notre champ, quelles
en sont les limites: métaphoriquement, faut-il à la didactique des
langues un remembrement (comme celui des terres réunies pour
une agriculture extensive, suggéré par Robert Galisson, jadis) ou
à l’inverse une sorte de permaculture? Je m’explique. Dans un
cas, on regroupe aveuglément des thématiques ou des objets
d’étude pour créer des unités rentables; dans l’autre, on organise
à partir d’éléments distincts mais connectables des écosystèmes
efficaces, évolutifs et éthiquement défendables, dans l’esprit d’une
démarche inspirée par le Japonais Fukuoka Masanobu (Mollison,
2013). A mon sens, doit être examiné comme un ensemble ce qui
fonctionne ensemble. Et c’est bien vers cette seconde hypothèse
que nous penchons, avec un paramétrage toujours plus fin
des approches. Ainsi, en didactique du français, où l’on parlait
de français langue étrangère, a-t-on progressivement observé
la fragmentation de ce FLE, sous de nouveaux acronymes, en
français langue étrangère, seconde, de scolarisation, de spécialité,
universitaire, etc., entités qui appellent des objets et des méthodes
spécifiques tout en manifestant leur interconnexion.
Dans ces conditions, la position du chercheur, dans la durée
de ses projets comme au quotidien, n’est pas sans questionner

-68-
Communications de cadrage

son rapport au pouvoir (au singulier et au pluriel) qui impulse,


commandite et régule la place donnée à la recherche et son
organisation. Ainsi peut-on se demander quelle marge d’autonomie
le chercheur garde face au monde universitaire, et aux institutions
en général. Est-il encore concevable, à notre époque, de chercher
seul, sans échanger, se confronter, négocier? Si légitimables
soient-ils, comment l’encadrement des laboratoires, la quête de
budgets, la production obligatoire («publier ou périr» ), la lecture
par les pairs, et toutes formes de censure ou d’auto-censure
difficiles à occulter, contraignent-ils l’esprit et l’initiative, pèsent-ils
sur les résultats d’une recherche originale et créative?
Plus largement, comment les connexions entre disciplines
vont-elles jouer? On se permettra d’avancer qu’en France,
par exemple, les collaborations entre sciences de l’éducation
et sciences du langage ne se présentent pas partout comme
une évidence. Pour ce qui est des institutions ou équipes,
faut-il aller, le plus souvent, vers une recomposition des unités
d’enseignement et de recherche du type Liberal Arts? Et si une
intégration est possible, quelles contaminations, positives ou
non, la transdisciplinarité, la possibilité de produire une synthèse
à partir de différentes sources et savoirs (Blanchet et Chardenet,
2011:72), apporte-t-elle au chercheur, tantôt déstabilisé, tantôt
stimulé par des contacts et des savoirs élargis à d’autres
horizons? Les réponses à ces questions sont à l’évidence
déterminantes dans la définition de l’objet de recherche, dans la
question initiale et dans le programme de travail, et pour ceux et
celles qui se sentiront concernés, jusque dans un projet de thèse
ou de master.
On pourrait conclure de ces remarques que, de l’élaboration
à la formulation, le changement de paradigme, la toile de fond
du questionnement, engagent le chercheur à de nouveaux
positionnements, à de nouvelles relations intradisciplinaires
(remembrement ou permaculture), à de nouveaux rapports

-69-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

au(x) pouvoir(s), à des connexions interdisciplinaires parfois


imprévisibles, parfois hasardeuses, (ce qui caractérise beaucoup
d’innovations et qu’on appelle doctement sérendipité), voire à une
ouverture vers une relative in-discipline. C’est ce qui m’est apparu
comme le mouvement profond à l’oeuvre dans notre domaine,
l’enseignement des langues, et que j’ai souligné à plusieurs
reprises en développant l’idée d’un glissement théorique et
méthodologique fondamental, un glissement des sciences du
langage à l’ensemble des technosciences.

2.2. Les chemins du savoir.

Une fois cet objet déterminé, une formulation sera possible,


et toujours induite par le contexte scientifique, culturel et social:
on aura à s’entendre dans un environnement donné sur des
définitions partagées. Il existe des faux-amis et même des
intraduisibles, comme on l’a bien montré, en philosophie même
de la langue (Cassin, 2004). Il faut donc trouver des mots pour
penser, puis dire sa recherche et on sait que les langues n’aiment
pas les concepts nomades: comment réduire la polysémie de
termes tels que «médiation», «profil d’apprenant», «autonomie»
ou même «pédagogie», en passant d’une langue, d’un pays,
d’un système éducatif à un ou une autre? Sur le flottement ou
l’inadéquation des mots, les interrogations des traductologues
n’ont pas manqué, et dans l’aire Asie-Pacifique, il est heureux de
voir les réseaux qui nous rassemblent travailler aujourd’hui à des
convergences conceptuelles.

C’est aussi pourquoi les modes de gestation du nouveau exigent


des dispositifs propices, des incubateurs, écoles, séminaires, groupes
de ressources ou de discussions en ligne. Or, ces facilitateurs sont
inégalement répartis et peuvent, à l’évidence, souffrir des distances, que
celles-ci soient spatiales, idéologiques, technologiques ou culturelles.

-70-
Communications de cadrage

Enfin, l’écriture du scénario d’une recherche en didactique


est vouée à être bousculée. Parmi les retardateurs, ou les
«distracteurs de projet», a-t-on dit aussi, comment oublier la
possible résistance du terrain au changement, la lenteur des
appareils, les difficultés souvent à publier et à diffuser, le prix
de la documentation scientifique, vendue par chapitre ou article
sur les sites en ligne? Des phases de stases et de circulation
vont alternativement survenir et le succès d’une recherche me
semble tenir en particulier à trois éléments-clefs que je définirai
succinctement: i) le moment propice, qui est le momentum des
économistes et chez les Grecs, le kairos (ils en faisaient aussi
un petit dieu); ii) l’effet de groupe ou de réseau, qui se traduit
par l’émulation et par ce que le monde de l’entreprise appelle
coopétition (compétition et coopération en même temps); iii) et
enfin la référence à une expertise, celle au moins d’un regard
extérieur, qui peut éviter bien des erreurs (Gaglio, 2011).
J’ai essayé de faire voir, en clair, que les chemins du savoir
requièrent des définitions partagées et des lieux propices, mais
aussi de la lucidité, voire de la subtilité, face aux retardateurs et
aux obstacles (on peut garder à l’esprit les ruses qu’un Galilée
inventait pour tromper l’Inquisition, dans la pièce éponyme de
Brecht), sachant que des éléments-clefs de la réussite vont être
ou peuvent être l’opportunité, la coopération stimulante et le
regard importé.
J’en viens, pour clore ce moment de ma réflexion, à l’idée que,
sur son trajet, le chercheur rencontre un double défi. D’une part,
la difficulté qui s’impose à lui d’une didactique archipélagique,
disparate, où se multiplient les objets de recherche (pour ne
donner que l’exemple de l’interaction: l’inhibition, l’implicite, la
convergence émotionnelle, le silence...). Elle englobe sans fin de
nouveaux facteurs et des variables hétérogènes, avec le risque
pour le chercheur de se perdre dans la complexité et la perplexité
(Martinez, 2018b:27). Et, d’autre part, comme en toute science

-71-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

humaine, la difficulté à hiérarchiser ce que Dominique Foray, en


matière d’économie de la connaissance, appelle fondements de
la performance (Foray, 2009:71): déterminer, par exemple, quelle
est exactement l’origine de l’échec d’un apprentissage, ou celle
du succès d’une pédagogie. Jean-Louis Chiss (2014:308) évoque
ainsi un «présentisme» qui mettrait trop facilement en corrélation
une contextualisation et un résultat de l’action historiquement
observable.
2.3. Du dire au faire
C’est de parler de mise en œuvre, techniques et procédés,
qu’il est question à présent. Les méthodologies de recherche,
transdisciplinaires, tributaires de sciences contributives et de
contextes mouvants, sont par là-même mouvantes. Elles sont à
la fois constituantes et constituées et - je me retranche derrière
le mot de Louis Porcher (1997:24) - il n’existe «aucun modèle
théoricoïde (sic) applicable à toute situation». Tout au plus,
trouve-t-on chez Foucault (1966:367) trois modèles, liés à des
régions épistémologiques, biologie, économie, philologie, qui
permettent, d’approcher «une positivité spécifique dans le champ
des sciences humaines», soit par le fonctionnement humain, soit
par le mode d’échange social, soit par le jeu des représentations
inscrites dans la langue.
Ni secte, ni chapelle: la formation à la recherche doit donc
envisager des praticiens qui soient réflexifs et aptes à la remise
en cause (Macaire, 2019). Le séminaire qui nous réunissait à
Siem Reap, en donnait un bon exemple: celui d’une nécessaire
formation à l’innovation par la comparaison des points de vue,
des méthodes et des expériences apportées. Le croisement des
faits et des idées directrices de politique éducative, l’échange
sur les initiatives nationales et transnationales de réforme et
d’amélioration en cours ou en projet, faisaient vivre nos table-
rondes. Ils illustraient aussi la dualité que relève Foucault (ibidem)

-72-
Communications de cadrage

à un niveau historique entre fonction et norme, conflit et règle,


signification et système et qui se résout pour nos contemporains
à la primauté du second terme de chaque paire dans l’action en
tant qu’intervenants sociaux: la recherche de normes et de règles
dans le fonctionnement d’un système.
Quant aux questions vives, qui induisent des approches
méthodologiques spécifiques (de l’observation participante aux
corpus informatisés, de la recherche-action aux études historiques,
etc.), ce ne sont que des pistes qui peuvent être suggérées. A mon
sens, elles devraient aller, certes au regard des projets propres du
chercheur, mais aussi après une analyse rigoureuse des attentes
sociales, vers l’opérationnalité et l’élargissement du point de vue.
L’opérationnalité, d’abord, c’est-à-dire la capacité à répondre
à des besoins réels, l’élargissement, ensuite, en ce que ces
thématiques impliquent le recours à des connexions disciplinaires
éclairantes: pour le moins, sans vouloir chercher à se limiter, de
grands pans thématiques émergent: le rôle et le changement
actuel des représentations chez les acteurs; l’évolution du
curriculum académique d’inspiration humboldtienne, ne séparant
pas recherche et enseignement; les dispositifs autonomisants,
pour une pédagogie évolutive et différenciée (on parle d’ubiquité
et de mobiquité); l’entrée en jeu des technosciences dans la
perspective d’une convergence didactique des moyens; la
professionnalisation; ou encore l’exploration et l’optimisation des
moyens de diffusion de l’innovation.
Je résumerai en quelques mots: la complexité du champ
méthodologique requiert une formation collaborative à la
recherche. Et aujourd’hui plus que jamais, elle exige une
confrontation et une actualisation permanente, une détection de
questions et d’approches nouvelles et pertinentes aux besoins
d’un enseignement/apprentissage des langues, inéluctablement
voué à de profondes transformations et à l’éternel problème de la
généralisation du progrès.

-73-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

3. Crise et critique de la recherche vues comme nécessaires


Je reviens pour finir à ce qui a été mon préambule et peut ouvrir
à des échanges ultérieurs: l’inscription de la recherche actuelle
dans un monde technoscientifique dont nous commençons
à pressentir les contours et les effets. Le dernier point de mon
intervention posera que la crise de la recherche didactique,
manifestée par sa diffusion restreinte et par son éparpillement,
mais aussi la critique même de la recherche (à savoir sa remise
en cause ou sa minoration, le chercheur devant justifier sa raison
d›être), peuvent, au fond, se révéler toutes deux utiles, sinon
nécessaires. Mon propos ne tend ni à démystifier la recherche,
ni à mystifier de jeunes ou moins jeunes chercheurs en leur
promettant la facilité. Loin de prétendre à un fonctionnement
de haut en bas, on voudrait envisager une formalisation de
l’activité heuristique comme située, praxéologique, c’est-à-dire
faite d’allers-retours, d’interactions constantes avec le terrain,
qui doit pouvoir évaluer objectivement, et même subjectivement
(par un ressenti, des impressions sur l’efficacité) les hypothèses
et les propositions, dont, en sciences humaines, la réfutabilité
est toujours problématique. Cette démarche, qui doit sans doute
mieux intégrer différents types d’analyse, ne nuira aucunement
à la scientificité. Elle s’inscrit dans la réflexion d’Abraham Moles,
sur ce que représente le flou, l’imprécis dans la compréhension,
puis la représentation que nous pouvons donner de l’observable
en sciences humaines et sociales (Moles, 1998), avec le souci
de ce que l’anthropologue Olivier de Sardan appelle, quant à lui,
la plausibilité des énoncés, où une approche qualitative a toute
sa place (Olivier de Sardan, 2004).
Pour l’aire Asie-Pacifique1 comme ailleurs, l’écriture de
nouveaux savoirs se présente comme un entrelacement entre

1 J’ai volontairement parlé d’aire Asie-Pacifique, une discussion sur le concept géopolitique
«flottant» d’Indo-Pacifique ne trouvant pas ici sa place.

-74-
Communications de cadrage

l’historique et l’imaginaire, tissé des conditions locales et des


intrants nationaux et extra-nationaux spécifiques (Carton et al.,
2015 et par exemple, pour la Chine, Bel, 2019). Ainsi en est-il
de la formation académique donnée sur place, des modes de
transmission et des curricula que nourrissent aussi les influences
et les échanges, avec les Etats-Unis, l’Europe ou le Canada, et
d’abord, ici-même, au sein d’une vaste région. Cette rencontre,
à travers les visioconférences, les formations délocalisées, les
publications dominantes au plan international, ne sauraient
rester sans impact sur la gestation des théories scientifiques et
leur diffusion. Il y a à mesurer cet impact dans les faits.1
Le roman de la recherche en sciences humaines, qui ferait
mieux apparaître son objet et sa raison d’être, est loin d’être
aujourd’hui aisément analysable, et il est - c’est tant mieux - loin
d’être définitivement tracé. Dans notre domaine, il serait naïf
de croire que tout se serait arrêté aux dernières méthodologies
d’enseignement qui ont, semble-t-il peut-être, plus ou moins
pris le dessus et auxquelles le numérique ajouterait une touche
cosmétique. Bon gré, mal gré, il va falloir faire un pas de côté,
regarder plus loin. Le roman continue. Et face à l’éparpillement
heuristique qu’on observe actuellement dans les travaux, il faut
donner un sens à l’histoire.
Mon intervention, où la didactique des langues a été le point
de focalisation et l’illustration d’une réflexion plus générale, doit
donc être perçue comme un moment de cette méta-analyse,
que différents travaux empiriques ont ébauchée, comme ceux,
voici quelques années, de la FIPF et de l’AUF, avec le projet
CECA (Cultures d’enseignement et cultures d’apprentissage).2
Elle doit être vue non comme une fin en soi, mais comme un

1 Les conditions et les effets de cette rencontre dans un laboratoire japonais ont été clairement
mis en lumière par l’ouvrage d’une ethnologue et sociologue, Sophie Houdart, 2008.
2 Voir sitographie.

-75-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

déclencheur de réflexion, pouvant ouvrir à des actions conjointes


ultérieures, ateliers ou conception de projets. Au questionnement
général que j’ai voulu dessiner correspondent des problèmes
particuliers, auxquels les chercheurs qui m’ont écouté ou me
liront sont confrontés au quotidien. C’est de leur passion de la
recherche, de leurs prises de position dans la réflexivité et non de
l’acceptation des routines, c’est de la confrontation, mais aussi
des rapprochements, de nos rapprochements, que peut naître
une épistémologie critique. La recherche didactique ne peut être
un canard sans tête, qui court sans savoir où.
Jacques Ellul, déjà cité ici, représentait, dès le milieu du
siècle dernier, la technique comme ayant gagné son autonomie,
et - pourtant destinée à libérer l’homme - elle l’avait finalement,
considérait-il, asservi (Ellul, 1954). Les sciences humaines et
sociales, spécialement la didactique des langues, ne doivent
en aucun cas oublier leur finalité humaniste. Il a fallu, lors d’un
colloque récemment tenu à l’Institut de France et intitulé Pour
des sciences en français et en d’autres langues, que ce soit un
jeune mathématicien, médaillé Fields, qui le rappelle. Succédant
à la transmission traditionnelle du savoir, telle que la faisait vivre
une relation pédagogique dont le caractère spirituel, voire sacré,
n’échappait ni au maître, ni au disciple, voici que l’organisation
technique, la recherche de l’efficacité maximale, les dispositifs
extrêmes de la mise en réseaux vont se généraliser. Les
neurosciences, pour se limiter à elles, font, avec par exemple les
travaux de Kahnemann aux Etats-Unis ou Dehaene en France,
jeter un regard nouveau sur le fonctionnement cérébral, la
décision, la mémoire, les profils, l’apprentissage, les productions
de l’apprenant, les réduisant peu à peu à des processus
biophysiques quantifiables.
On sait comment les technosciences étendent leur champ et
peuvent désormais être désignées plus largement comme NBIC,
nanotechnologies, biotechnologies, technologies de l’information

-76-
Communications de cadrage

et cognition (Roco & Bainbridge, Converging Technologies, 2002).


A terme, le suivi des apprenants par les données massives,
les moyens pharmacodynamiques disponibles, une pédagogie
différenciée évolutive et considérablement appuyée sur le
numérique s’imposeront dans des apprentissages augmentés.
Dans les quelques mois qui ont suivi le séminaire, et sous la
pression d’événements indépendants de la volonté des politiques
ou des chercheurs, l’école, l’université, se sont mises, un peu
partout dans le monde, à ne plus jurer que par l’enseignement à
distance, les bases de données, les plateformes interactives. On
a dû parer au plus pressé, remettant à demain toute réflexion sur
le sens sociétal et humain des transformations en cours. Et l’on
pourra aussi regretter que la réflexion à venir soit le résultat d’une
pandémie et non d’un parcours scientifique réflexif.
Les technosciences vont, à terme, instaurer une nouvelle
administration des choses, qu’on le veuille ou non, et même si
certains en doutent encore. Mais on nous vend aujourd’hui la
machine, l’outil, le matériel et le savoir pour ce qui devrait donner
sa finalité à l’action. Il faut y insister fortement: ce n’est pas à la
technologie ou à l’économie de prendre le pilotage. L’appareillage
ne dit en rien la destination du navire. Or nous avons une lourde
responsabilité quand nous voyons subsister - et peut-être
s’accroître - un écart considérable entre le fruit de nos recherches
et les effets qu’elles produisent sur les systèmes éducatifs, au
plus près des classes, des enseignants, des élèves. J’ai laissé
entendre plus haut combien la vogue actuelle d’un enseignement
distanciel appuyé, notamment, sur la visioconférence n’est
que bien peu due au poids de notre influence sur les politiques
éducatives.
Par chance, si la recherche est en crise, il faut garder à l’esprit
que toute crise est aussi un moment positivement critique. C’est
un moment de jugement, de prise de distance, où l’on se critique
soi-même. C’est un moment décisif et possiblement favorable, et,

-77-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

en l’occurrence ici, un moment crucial, pour un enseignement/


apprentissage des langues à venir. Si les interrogations appellent,
comme on a pu le dire, un aggiornamento (Coste, 2014:377),
souvenons-nous qu’au XIXe siècle déjà, le grand pédagogue qu’était
Wilhelm Vietör réclamait, pour l’enseignement des langues, un
vrai renversement (Umkehrung). La révolution scientifique de notre
temps n’est pas moins exigeante que celle de la société industrielle
du passé, quand les méthodes de Berlitz accompagnaient les
voyages en chemin de fer de nos aïeux. Si une recherche est
une construction faite à partir de la trame narrative d’un projet,
cette trame narrative, qui lui donnerait son sens, manque encore,
me semble-t-il, à une didactique des langues et des cultures que
j’ai montrée comme largement éparpillée et dénuée de valeur
symbolique, dans son objet et ses finalités.
Pour conclure
Comment faire pour ne pas en rester à cette impasse où
se trouverait engagée une transmission/appropriation du savoir,
incapable de se raconter ? En répondant que nous sommes,
d’ores et déjà, aux portes d’un monde nouveau. Ce texte aurait
atteint son but s’il pouvait avoir démontré la nécessité de donner,
à travers l’écriture du récit, corps à la recherche, de faire voir le filé
d’une volonté de théorisation, d’une cohérence épistémologique.
Il faut d’abord admettre le récit comme une nécessité, parce que
le statut de science dominante ne peut se suffire à lui-même:
il appelle une justification, une légitimation. Celle-ci a toujours
été propre aux formes d’éducation linguistique tout au long
de l’histoire, depuis l’Antiquité occidentale jusqu’aux modèles
traditionnels nés en Asie ou en terres d’Islam, et d’un paradigme
communicatif «centré sur l’apprenant» jusqu’à cette forme
d’égalitarisme instauré par la nouvelle régulation post-moderne
(pratiques collaboratives, classe inversée, forums, hybridation
des apprentissages, etc.).

-78-
Communications de cadrage

Mais il faut ensuite ne pas céder à un anarchisme épistémologique


à la Feyerabend, où, face aux excès du scientisme, tout serait
bon (Feyerabend, 1975). Il faut enfin, à mon sens, refuser le récit
commun fondé sur une unicité idéologique qui n’aurait été ni
scientifiquement démontrée, ni soumise au jugement citoyen, comme
l’a malheureusement illustré la politique de l’Union européenne
des langues (Maurer et Puren, 2019). L’écriture de la science ne
peut plus appartenir à des experts, ingénieurs pédagogiques,
théoriciens ou universitaires, quelles que soient leur compétence et
leur contribution à la réflexion et à la mise en oeuvre. Ils ne peuvent
en être que les modestes scribes.
Les conditions d’une ratio didactica, c’est-à-dire d’une logique
opératoire entre pensée didactologique et action d’enseignement,
devraient être satisfaites. On pourrait considérer trois d’entre elles,
pour l’essentiel: i) Le repérage, d’abord, des idéologies à l’oeuvre
dans les politiques éducatives (étant entendu qu’elles ne sont
pas elles-mêmes les premières à mettre au jour leurs finalités
profondes, et il serait naïf d’imaginer qu’il en soit autrement).
Concernant, par exemple, un concept tel que celui de médiation,
à l’histoire compliquée, car liée à des approches disciplinaires
différentes et à des philosophies de la relation presque opposées
(résolution du conflit ou violence du métissage), tout un travail
d’herméneutique est nécessaire (Huver, 2017). ii) L’adoption,
ensuite, de procédures rigoureuses dans la mise en application,
avec une vue d’ensemble du processus séquentiel d’innovation
(Gaglio, 2011:24) et non l’expérimentation aléatoire à laquelle
nous assistons sous l’effet de l’innovation et de modes dont
on peut discuter l’origine, la pertinence et l’impact (la vogue
des MOOC/CLOM en fut une, récemment). iii) Le recensement
et la mise à contribution, enfin, des outils épistémologiques,
sociologiques et politiques qui permettent une contextualisation
optimale, et relèvent non seulement d’instances extérieures mais
des intéressés eux-mêmes, car il s’agit encore et toujours de

-79-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

rapprocher recherche et pratiques de terrain (Rispail et Blanchet,


2011, Martinez, 2011).
A partir de là, une trame narrative de la recherche didactique,
conforme à l’état civilisationnel qui est le nôtre, est imaginable.
Elle pourrait aujourd’hui, dans le respect des conditions que j’ai
exposées ci-dessus, s’appuyer sur les données et les ressources
des technosciences déjà mentionnées. C’est évidemment un
paysage d’ensemble que j’ai essayé de développer ailleurs,
sous le terme de didactique réticulaire. Je visais alors à tracer
les contours d’un enseignement contextualisé, adaptatif, à la fois
propre à chaque dispositif éducatif dans son environnement et, en
toute interaction avec celui-ci, propre aussi à chaque apprenant,
au plus près de son idiosyncrasie. J’en ai imaginé les possibles
limites et les dangers: un monde à certains égards orwellien,
où tout est en apparence libre, autonome, et en réalité soumis
au contrôle permis par les technosciences (Martinez, 2018a, et
notamment: apologue de Darwinia)
Le nouveau récit pourrait être d’abord le résultat de ces
avancées qui dépassent de loin le cadre de la didactique, quand,
avec notre ingénierie pédagogique, nous serons en mesure
de déléguer à des algorithmes la construction réticulaire de la
formation en langues, comme nous allons peu à peu le faire
dans notre vie privée - puis-je encore me tromper? - avec nos
assistants personnels vocaux, pour définir ou recenser nos
ambitions, nos besoins, notre mémoire, nos acquisitions, nos
pratiques, nos projets.
Et pourtant, in fine, comme pour ce qui est de la domotique,
de la communication sociale ou de la santé, c’est à nous qu’il
devrait appartenir de déterminer notre degré de maîtrise sur cet
arrangement du monde et d’en écrire, chemin faisant, le récit.
Faudra-t-il trouver du côté de la recherche du bien commun,
du côté d’une volonté collaborative partagée, du côté de forces

-80-
Communications de cadrage

humanistes tendant vers toujours plus de culture, les moyens


d’aller en ce sens? À ce stade, il m’est difficile de faire plus que
de poser les termes du problème et que d’espérer en avoir mis
au jour quelques points importants.

Confiné à Strasbourg, mai 2020

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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Prairies ordinaires, 2010).
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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

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Communications de cadrage

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libre accès sur: http://eac.ac/books/9782813002839
25. Martinez, P., «Quel sens donner aux études sur le plurilinguisme
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de Langue et Littérature Françaises, 11/2017. 2017(a).
28. https://www.youtube.com/watch?v=x_qqn8DG5AA&feature=youtu.be
29. Martinez, P., «La politique des langues étrangères: mode d’emploi
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kyoiku kenkyu, vol. 15, 12/2017, Politique de l’éducation en
langues et cultures. 2017(b). http://alce.jp/journal/dat/15_68.pdf
30. Martinez, P., La didactique des langues étrangères, Paris,
PUF, Que Sais-je? (8ème édition actualisée), 2017(c).
31. Martinez, P. (dir.), Dynamique des langues, Plurilinguisme
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-83-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

32. Martinez, P., Postface: «Contextualiser, comparer, relativiser.


Jusqu›où aller?», in Blanchet, Ph. & Chardenet, P., 2011, rééd.
2017: 435-445. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01436588/
document
33. Maurer, B. & Puren, Ch., CECR: par ici la sortie, Paris,
Editions des Archives Contemporaines, 2019. Chez l’éditeur
et disponible sur: https://eac.ac/books/9782813003522
34. Moles, A., Les sciences de l’imprécis, Paris, Seuil, 1998.
35. Mollison, B., Introduction à la permaculture, s.l., Passerelle
Eco, 2013.
36. Olivier de Sardan, J.-P., «La rigueur du qualitatif. L’anthropologie
comme science empirique», Espaces Temps 84-86, L’opération
épistémologique. Réfléchir les sciences sociales, 2004:38-50.
37. Pei-Tseng, J. H. (ed.), Education in East Asia, Bloomsbury
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38. Pons, X., L’évaluation des politiques éducatives, PUF, Que
Sais-je?, 2011.
39. Porcher, L., «Lever de rideau» in Zarate, G. & Candelier, M.
(dirs.), Les représentations en didactique des langues et des
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40. Rispail, M. & Blanchet, Ph., «Principes transversaux pour
une sociolinguistique dite de terrain», in Blanchet, Ph. &
Chardenet, P., 2011, rééd. 2017: 65-69.
41. Roco, M. & Bainbridge, W.S., Rapport à la National
Science Foundation, 2002, 2006. http://www.wtec.org/
ConvergingTechnologies/
Sitographie complémentaire
1. ESLC (European Survey of Language Competences):
2. https://crell.jrc.ec.europa.eu/?q=article/eslc-database

-84-
Communications de cadrage

3. Hal: https://hal.archives-ouvertes.fr/
4. FIPF/CECA: http://fipf.org/recherche-didactique/ceca
5. Framonde: http://framonde.auf.org
6. IFProfs: https://www.ifprofs.org/

-85-
COMMUNICATIONS DE DIMENSION GLOBALE

1. État des lieux de la recherche en Asie-Pacifique


LA RECHERCHE EN FRANÇAIS AU VIETNAM ET EN ASIE DU
SUD-EST DE QUELQUES PHÉNOMÈNES RÉCURRENTS

PHAM Duc Su
Nha Trang, Vietnam

Résumé:

Nous proposons dans cet écrit une petite revue des phénomènes de non-
conformité scientifique récurrents en recherche en français au Viêtnam et dans
la région d’Asie du Sud-est. Nous tenterons d’abord d’en identifier quelques-
uns et leur nature. Ensuite, nous verrons quelles pourraient être leurs origines,
et terminerons sur quelques réflexions pour rehausser la recevabilité de nos
publications.

Mots-clés: Ecriture scientifique - Cultures de recherche - Cultures


rédactionnelles - Laboratoire de recherche

Introduction

Ayant souvent à faire du peer-reviewing pour les différents


colloques et séminaires en français, aussi bien au Viêtnam
qu’à l’étranger, nous remarquons que certains phénomènes
de non-conformité scientifique reviennent souvent malgré les
rappels et notices de rédaction. Il semble ainsi qu’une (re)prise
de conscience de ces faits est nécessaire pour rehausser la
recevabilité de nos publications et notre intégration dans les
communautés scientifiques francophones et internationales.
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

1. De quoi s’agit-il?
1.1. Concernant la méthodologie de recherche et la réflexivité scientifique
Il y a d’abord des phénomènes de non-conformité qui
touchent à la nature même de la recherche. Considérons par
exemple ces questions dans une proposition d’article sur la
pédagogie de projet, lesquelles restent un questionnement sur le
thème plutôt qu’une problématisation pour la recherche:
[...] La pédagogie de projet s’adapte bien au contexte actuel.
Quelles sont ses caractéristiques principales, ses apports et ses
limites?1
Ces questions dans un projet de thèse en est un autre
exemple:
- Quelles sont les difficultés des étudiants dans la traduction
des moyens d’expression de l’opposition et de la concession?
Quelles sont les causes?
- Quelles sont les implications pédagogiques dans l’enseignement
de la traduction?
Car ce sont des questions que se pose un enseignant plutôt
que celles qui construisent l’objet pour une recherche. Dans ces
deux cas de figure, la problématisation est encore confondue
avec la notion «problème».
Il est à souligner également que les faits de ce genre
reviennent souvent, parfois même dans les textes des scripteurs
considérés chez nous comme chercheurs expérimentés. Cela

1 Les exemples cités dans cette Partie 1 proviennent des propositions de communications
et/ou projets de recherche que nous avons eu l’occasion de lire ces dernières années.
Nous en remercions les auteurs.
Nos remerciements également à Mme le Professeur Marielle RISPAIL, une amie de
langue date, de sa lecture attentive et de ses commentaires perpicaces sur le texte de
premier jet de cet article.

-88-
Communications de dimension globale

montre bien que la métaréflexion sur la recherche: Qu’est-ce que


la recherche? Comment construire un objet de recherche? et les
problèmes de méthodologie restent encore pour nous des défis
à relever.
1.2. Concernant l’écriture de la recherche
Le 2e phénomène concerne l’écriture de la recherche.
Il s’agit de ce que Reuter (2004) avait signalé comme des
«dysfonctionnements récurrents» dans les écrits de recherche.
D’abord, il y a le discours prescriptif qui revient fréquemment.
Comme nous sommes enseignants en même temps que
chercheurs, nous avons tendance à oublier le caractère expositif-
argumentatif de l’écrit de recherche et adopter dans nos écrits
un discours prescriptif avec le ton d’autorité d’enseignant. Cette
posture normative est courante en enseignement, mais inadaptée
en recherche, comme dans la phrase entre les parenthèses dans
cet exemple:
Définissons donc l’autonomie [...] (Cela tient en une toute
petite phrase, mais derrière l’arbre se cache la forêt!)1
Parfois, ce sont des «propos décousus» (Rinck, 2011),
comme le cas de ce paragraphe où le passage abrupt de la
notion «indépendance» à celle de «centration sur l’apprenant»
obligerait le lecteur à des suppositions plutôt que lui donnerait
des certitudes:
Dans le langage commun, l’autonomie est synonyme
d’indépendance, de liberté, voire de souveraineté. Le Petit
Robert (1993) nous dit que c’est le droit de se gouverner par ses
propres lois.
Cette notion, ce concept, s’oppose à celle de dépendance. Dans
le domaine de l’enseignement et des méthodes pédagogiques, la

1 C’est nous qui soulignons, ici et dans les exemples et citations qui suivent. Tout le reste est
repris tel quel des textes originaux.

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

notion est centrale dans toutes les formes de méthodes actives


centrées sur l’apprenant. La centration sur l’apprenant est issue du
mouvement constructiviste...
Puis ce sont des affirmations qui ne sont pas accompagnées
(ou pas assez) d’explicitations, de preuves ou d’illustrations.
Dans le paragraphe suivant sur la conception d’un curriculum
professionnalisant, les endroits soulignés semblent demander
des renseignements complémentaires pour que la dernière
phrase soit tout à fait convaincante:
En ce qui concerne la conception curriculaire, on a constaté
ces derniers temps changements importants dans le monde ainsi
que dans le pays: de nombreux systèmes éducatifs ont éprouvé
le besoin de remplacer la pédagogie par objectifs par celle des
compétences, jugée plus efficace et plus équitable.
Ensuite, nous produisons encore assez souvent:
- Des textes qui restent comme des listes ou inventaires,
sans les articulations d’idées indispensables:
Limites [de la pédagogie de projet]:
Il faut tenir compte du programme d’études et des règles
institutionnelles. Il est nécessaire d’avoir un environnement à
s’appuyer pour réaliser ce projet. Et puis la pression sociale du
programme à finir coûte que coûte ainsi que les tests nationaux ou
régionaux à faire passer aux élèves rendent difficile l’application.
Il faut également tenir compte des tensions entre l’apprentissage
par projet, les programmes officiels et l’évaluation nationale.
- Ou ceux avec des citations trop longues, sans la/les synthèse(s)
nécessaire(s) et/ou non accompagnées de prises de position,
comme pour «se cacher derrière une autorité», phénomènes qu’on
peut voir dans ce paragraphe:

-90-
Communications de dimension globale

Les Travaux dirigés se font dans un groupe d›effectif réduit,


pour que le professeur puisse aider plus facilement les élèves
ou étudiants et adapter ses interventions à leurs difficultés
(Wikipédia). La pratique des Travaux Dirigés est incontournable
dans l’enseignement supérieur, le total des heures consacrées
aux TD en atteste. D’autre part, les étudiants considèrent les TD
comme le moment le plus important dans leurs apprentissages.
D’où l’intérêt de réfléchir à cette pratique (Bernard Bourret
Christophe Romano).
Il s’agit là de ce que Rinck (2011) considère comme la
difficulté de se positionner comme «auteur-chercheur».
Enfin, il y a des faits concernant l’insertion du «discours
d’autrui», dont les occurrences de non-conformité les plus
fréquentes sont:
- oubli des guillemets en cas de citations intégrales:
La pratique des Travaux Dirigés est incontournable dans
l’enseignement supérieur, le total des heures consacrées aux TD
en atteste. D’autre part, les étudiants considèrent les TD comme le
moment le plus important dans leurs apprentissages. D’où l’intérêt
de réfléchir à cette pratique. (Bernard Bourret Christophe Romano)
- oubli d’indications de sources après la mention d’un auteur:
Pour Blin, l’autonomie se définit «comme une approche
éducative qui [...]
- mention d’un auteur sans son/ses ouvrage(s) dans la
bibliographie. Dans l’exemple qui suit, il y a mention de Portine,
sans qu’il n’y ait des ouvrages de cet auteur dans la bibliographie:
[...] apprendre à apprendre, c’est se préparer à être autonome,
pour Portine.
- exposition de photos, vrais noms et coordonnées des
informateurs dans le texte ou dans les annexes, n’assurant pas
ainsi l’anonymat de ces sources.

-91-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2. Quelles en seraient les origines?


L’on sait que si les compétences de chercheur commencent
avec des connaissances apprises dans les cours théoriques de
méthodologie, ce sera à travers la pratique et l’exercice du métier
d’enseignant-chercheur qu’elles se consolident et s’affinent. C’est
ce qui est à la base de la conception de «formation à la recherche
par la recherche» bien en vogue de nos jours. En fait, si l’on ne met
pas souvent «la main à la pâte», il n’est pas sûr qu’on fasse et
écrive la recherche conformément aux normes en usage.
Par ailleurs, il faudrait aussi se méfier des tendances peu
favorables à la recherche mais encore populaires chez nous
au Viêtnam et dans la région, lesquelles pourraient influencer
négativement sur notre conception et notre façon de mener des
recherches. D’abord, c’est le fait d’accorder plus d’importance au
contenu ou aux possibilités d’application d’une recherche qu’à sa
validité et fiabilité de sa méthodologie, ce que NGUYEN Hoàng
Anh (2014: 1) a mis en clair dans cette observation:
Une des parties très importantes d’un texte de recherche
est la méthodologie [...] Dans toutes les recherches de norme
internationale, c’est la partie très importante qui décide de
la valeur de la recherche. Mais au Viêtnam, personne n’y fait
attention, beaucoup de directeurs de recherche permettent même
à leurs étudiants de laisser passer cette partie, de la considérer
comme une simple formalité...
Ensuite, ce sont des modalités de recherche ou des
évaluations basées sur des critères qui ne sont communément
reconnues comme scientifiques, par exemple celles que
Nguyễn Thị Cảnh de l’Université de l’Economie-Droit, Université
Nationale du Vietnam à HCM-Ville a signalées et reprises par
Đăng Nguyên, Hà Ánh dans leur article de 2010:
L’approche principale [dans la recherche au Viêtnam] est
de se baser sur les documents passéistes, de compiler les

-92-
Communications de dimension globale

idées existantes, manquant ainsi de recherche du nouveau ou


de l’inédit. L’organisation et l’évaluation des recherches se font
dans beaucoup de cas sur bases de complaisance, cherchent à
exalter plutôt qu’apporter une critique constructive.
Enfin, il y a l’insuffisance dans la formation à l’écriture
suivant des normes spécifiques des sciences que laisse voir
cette observation de Nguyễn Hoàng Anh (2014: 1)
Tout le monde sait qu’en apprentissage des langues, l’écriture
est la compétence la plus difficile. Mais écrire la recherche est
encore plus ardu. Si on n’y est pas formé par avance, si on attend
le moment des publications pour se former, pour «apprendre en
faisant», les résultats ne peuvent pas être les bons [...]!
Dans notre cas, l’écriture de recherche requerra encore
davantage d’efforts, car en tant que chercheurs francophones,
nous écrivons dans une langue qui n’est pas notre langue
maternelle. Par ailleurs, le français de l’écrit scientifique n’est pas
tout à fait celui que nous utilisons dans nos communications de
tous les jours, en classe ou dans les épreuves d’examen, car pour
DOTAN Is. (2017: 1) cette langue de communication quotidienne
est encore de l’«à-peu-près»:
Depuis la mise en place du Cadre Européen Commun de
Références pour les langues (CECRL) en 2001, l’instauration
des diplômes d’études de langue française en 2005 ainsi que
des épreuves DELF et TCF [...], on se rend compte que [...] les
critères de passage de ces épreuves ne sont pas la qualité du
français mais la capacité de l’étudiant à se faire comprendre et à
comprendre globalement ce qui est dit ou écrit et peu importe la
façon; c’est une communication de l’«à-peu-près»...
Un autre point sur lequel nous aurons à porter attention au
Viêtnam et dans la région, c’est comment habituer et familiariser
nos enseignants à des activités de recherche, car suite à diverses
raisons: manque de personnel dans les universités pour assurer les

-93-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

cours, structure institutionnelle avec peu de budget de recherche


ou avec du budget mal géré, salaire et temps insuffisants, rareté
des documents de référence et de leur mise à jour, le principal
travail des universitaires reste l’enseignement (Ngô Thị Thu Hồng,
Phạm Thị Lan Anh: 2019). Ce qui mène certains à penser que
la recherche est une simple affaire administrative, qu’elle peut être
séparée du travail universitaire et «expédiée rapidement», pas une
mission fondamentale de l’université!
Enfin, il ne serait pas inutile de rappeler que l’écriture ne
peut se dissocier des lectures scientifiques, ces dernières sont
non seulement pour nous mettre au courant des évolutions
d’idées et de tendances de recherches dans nos domaines,
mais encore pour nous les non-natifs, des occasions de nous
perfectionner dans la langue de notre spécialité. Dans la réalité,
le peu de lectures, des lectures à la hâte et seulement lorsqu’il y
a une recherche à réaliser, pourraient aggraver nos difficultés en
compréhension et en écriture scientifiques.

3. Que faire?
Pour rehausser la recevabilité de nos communications
scientifiques et nous intégrer pleinement dans les communautés
de recherches francophones et internationales, il serait nécessaire
de porter notre attention sur certains points comme suit.
3.1. Plus d’attention et de soins à l’organisation de la recherche
au sein des départements
D’abord, les mises à jour en méthodologies de recherche
sont nécessaires, pas seulement aux chercheurs, mais aussi
aux responsables de projets et directeurs de recherche. Ce
pour lutter contre la tendance encore forte de laisser faire les
recherches chacun à sa guise, sans tenir compte des normes
internationales. De même, il est à mettre en place des recherches
collectives: en équipe, interuniversitaires et/ou interdisciplinaires.

-94-
Communications de dimension globale

Parallèlement, des revues avec comité de lecture composé à la


fois de spécialistes natifs et de chercheurs chevronnés du pays
ou de la région sont nécessaires, afin que les chercheurs aient
un endroit pour publier leurs travaux mais encore l’occasion pour
des regards extérieurs sur leurs écrits. Tout cela (re)donnera
l’habitude de la recherche, la rigueur en travail scientifique et
installera chez nous une culture rédactionnelle internationale.
Dans ce sens, la création des laboratoires au sein d’un/
des Département(s) de français pour fédérer et former des
chercheurs, expertiser les projets, organiser et gérer des
activités de recherche individuelles et collectives nous semble
indispensable. Evidemment, il y a des Bureaux ou Services de
la Recherche dans les universités, et comme l’affirme Nguyễn
Hoàng Anh (2014: 3) «[...] l’institution accorde toujours plus de
pouvoir aux administrateurs qu’aux scientifiques», mais ceux-ci,
de par leurs statut et rôle, accordent en général plus d’importance
aux formalités administratives et budgétaires qu’aux exigences
scientifiques. Sans compter que la plupart de ces gestionnaires
ne sont pas francophones et que de nos jours, avec la dominance
anglophone dans la région, les gens ne font plus tellement
attention aux recherches en français et du monde francophone!
3.2. Formation en écriture scientifique
Actuellement, avec les quelques rencontres annuelles et
des revues d’auto-reconnaissance comme au Viêtnam, il serait
difficile de former nos chercheurs au sérieux et à la rigueur du
travail scientifique. Et l’expérience et l’habitude pourront se perdre
même chez les chercheurs confirmés s’il n’y a pas d’activités ou
de formations au sein des centres de recherche! De là, il nous
semble indispensable que des Départements organisent de
fréquentes formations et activités d’entraînement, par exemple
des ateliers d’écriture suite à des lectures théoriques, analyses
en détail et commentaires des productions scientifiques à

-95-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

l’intérieur du pays et à l’étranger d’abord, puis activités d’écriture


après! Pour faire face à l’exigence de clarté, précision, qualité de
la langue, l’exigence de rigueur de l’argumentation du discours
scientifique1, le plaidoyer de DOTAN Is. (2017: 6) pour un
enseignement du français de qualité et une formation continue
visant «une connaissance approfondie du français: maîtriser
un bon français» au sein des départements et universités nous
paraît rester bien à propos.
3.3. Formation aux cultures scientifiques francophones
et internationales
A la demande actuelle de la société et des gouvernements du
Viêtnam et de la région, il est d’abord du devoir des universitaires
de donner eux-mêmes des exemples d’organisation et/ou de
participation active à des recherches scientifiquement rigoureuses,
et d’envergure si possible, aux niveaux de la francophonie et
international. Ensuite, tout en menant des recherches communes,
il n’est pas inutile que les universitaires discutent, se mettent
d’accord sur des mises à jour en méthodologies, établissent
ensemble des modalités et techniques propres à la recherche au
pays mais qui ne soient pas isolées des normes francophones
et internationales. Enfin, les recherches et formations sur les
différentes cultures scientifiques dans le monde pourraient
être aussi un bon moyen pour faire évoluer la mentalité de nos
universitaires, étudiants et apprentis-chercheurs.
Pour ne pas conclure
De nos jours, les Départements de français sont sans doute
les «derniers bastions» de la Francophonie, aussi bien au
Viêtnam que dans les pays de la région. Si nos Départements
ne font pas de recherches pour se changer positivement et

1 Cf. Leclerc J., 1999: 4 dans HADDAD sur http://ecritscisentifiquetoutatelier.


over-blog.com/2015/12/travaux-d-atelier.html

-96-
Communications de dimension globale

participer activement à l’amélioration de la qualité de l’œuvre


éducative et formatrice du pays - en enseignement/apprentissage
et éducation, mais aussi en formation professionnalisante des
métiers dont la société a besoin -, la disparition du français, voire
celle des Départements de français eux-mêmes1 ne sera plus
qu’une question de temps!
Aussi, sans visée d’évaluation ni critique aucune, cet écrit
se permet de sonner l’alarme, car «scientificité oblige!», avant
qu’il ne soit trop tard pour redonner au français et à la recherche
en français la place qu’ils méritent au Viêtnam et dans la région!

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. DOTAN Is. Français en contexte universitaire: une apologie
du bon français pour se permettre «l’à peu près». In: Revue
internationale MÉTHODAL No1 - Mai 2017. https://methodal.
net/. Consulté le 10 août 2019.
2. Ngô THỊ Thu Hồng & Phạm Thị Lan Anh. Tháo gỡ khó
khăn trong nghiên cứu khoa học tại các trường đại học Việt
Nam (Pour surmonter les problèmes dans la recherche dans
les universités au Viêtnam), 10/02/2019. http://tapchitaichinh.
vn. Consulté le 30 juillet 2019.
3. Nguyễn Hoàng Anh. Vì sao nghiên cứu khoa học ở Việt
nam yếu kém? (Le pourquoi des faiblesses de la recherche
scientifique au Viêtnam), 30/7/2014. https://vi-vn.facebook.
com/notes/nguyen-hoang-anh. Consulté le 30 juillet 2019.
4. REUTER Y. Analyser les problèmes de l’écriture de recherche
en formation. In: Pratiques: linguistique, littérature, didactique,
n°121-122, 2004. Normes et pratiques de l’écrit dans le supérieur.

1
Ce qui est déjà arrivé dans certaines universités de ma connaissance.

-97-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

pp. 9-27. https://www.persee.fr/doc/prati_0338-2389_2004_


num_121_1_2029. Consulté le 12 août 2019
5. RINCK F. Former à (et par) l’écrit de recherche. Quels enjeux,
quelles exigences? In: Le français aujourd’hui. Armand Colin.
https://www.cairn.info/revue-le-francais-aujourd-hui-2011-3-
page-79.htm. Consulté le 10 août 2019.

-98-
L’ÉCRIT DE RECHERCHE ET L’ANALYSE
DE SA MICROSTRUCTURE

LUU Dinh Phuc


Université Nong Lam de Ho Chi Minh-Ville, Vietnam

Résumé
La structure d’un écrit peut paraître une notion familière, en ce sens que tout
texte est composé de 3 parties - introduction, corps du sujet et conclusion -, et que
l’écriture est une activité déjà pratiquée depuis l’école. Pourtant, un écrit dit «de
recherche» n’est pas tout à fait comme ceux qu’on lit tous les jours. Sa production,
surtout sa structure interne ou microstructure, est soumise à de nombreuses
contraintes, spécifiques au discours scientifique. La non-conscience de ce fait
est à l’origine de graves problèmes pour jeunes scripteurs-chercheurs, allant du
désarroi dans la rédaction jusqu’aux refus de publication de leurs productions.
Cet article propose de cerner les notions de l’écrit de recherche et de sa
microstructure, d’en identifier quelques traits de base, puis de réfléchir sur des
critères d’analyse d’un texte qui se veut être «écrit de recherche». Ce travail,
quoiqu’encore sommaire, permettrait peut-être aux jeunes scripteurs-chercheurs
de se sentir moins angoissés face à ce genre d’écrit qui fait partie de leur travail
d’enseignant-chercheur.
Mots clés: écrit de recherche, microstructure, discours scientifique, scientificité,
critères d’analyse

1. Introduction
La notion d’écrit de recherche a été abordée pour la 1re
fois en 1998 en France par Yves Reuter et son équipe, et est
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

devenue ensuite le sujet privilégié d’un groupe de recherche au


laboratoire LIDILEM, à l’Université Grenoble Alpes. La raison est
que c’est le genre d’écrit privilégié de l’enseignement supérieur,
mais qui cause souvent des problèmes aux scripteurs apprentis-
chercheurs.
Au Viêtnam, l’écriture de recherche en langue française se
pratique depuis plus de vingt ans, et de nombreux mémoires de
master, thèses et communications aux séminaires et colloques
ont été produits. Pourtant, il y a encore beaucoup de zones
d’ombre. Les caractéristiques spécifiques à ce genre et qui
décident de sa recevabilité par la communauté scientifique ne
sont pas encore complètement explicitées de façon claire et
univoque - ce travail étant laissé aux responsables des cours de
méthodologie. Dès lors, les exigences varient avec les directeurs
de recherche ou comités de lecture des colloques et séminaires.
Ainsi, les chercheurs vietnamiens, surtout les jeunes étudiants
en master SDL se sentent souvent perdus dans la rédaction de
leur écrit de recherche: que dire et comment le dire pour que
son texte soit considéré comme scientifique et de là, recevable?
Aussi, nous pensons utile de nous atteler à cette tâche, d’abord
pour être clair nous-même sur cette problématique, et peut-être
ensuite profiter à nos jeunes collègues chercheurs.
Dans cet article nous nous limiterons à une recherche
théorique sur ce genre universitaire à partir de quelques
questions suivantes: Qu’est-ce que l’écrit de recherche? Quelles
sont ses caractéristiques et comment est sa structure interne ou
microstructure? Pourrait-on les identifier de manière assez claire
pour arriver à des critères qui permettraient une (auto-)analyse
objective des productions de recherche?

2. Qu’est-ce que l’écrit de recherche?


L’on sait que toute recherche scientifique se manifeste par un
écrit, appelé communément «écrit de recherche». Selon F. Rinck

-100-
Communications de dimension globale

(2005: 6), c’est «un écrit normé et fortement conventionnel», idée


que Dinh & Luu (2018: 760) développent comme suit: «L’écrit de
recherche a pour but de produire un savoir et se compose d’une
forme et d’une écriture spécifiques adaptées à la fois aux objectifs
et à la culture de la communauté scientifique». Ce qui veut dire
que la rédaction de ce type d’écrit est soumise à des exigences
et contraintes sur plusieurs plans: contenu, structuration du
discours, mots et style. Même dans la présentation formelle, ce
sont des conventions spécifiques, comme Rinck a laissé entendre
ci-dessus.
Par ailleurs, notre étude personnelle (Luu, 2018: 190) nous
a permis de déceler dans ce genre d’écrit deux volets différents
que nous appelons «macrostructure» et «microstructure».
La macrostructure est «l’ensemble de la structure formelle
et conceptuelle de l’écrit de recherche» ou normes générales
concernant la structuration et la présentation d’un mémoire
ou d’une thèse. Ce thème a été traité depuis longtemps dans
les ouvrages comme La rédaction scientifique. Mémoires et
thèses: formes régulière et par articles (J-M. Dubois, 2005); La
rédaction scientifique (M. Lenoble-Pinson, 1996) et Comment
écrire sa thèse (U. Eco, 2016). Le second, la microstructure, nous
concerne plus directement, car à la base même de l’écriture de
nos recherches, et faisant l’objet de notre propos dans cet article.

3. Microstructure de l’écrit de recherche


Notre appellation «microstructure de l’écrit de recherche»
se fonde sur le terme «microstructure du texte» de T.A. Van Dijk
(1980) et les études sur le texte de J.-M. Adam. Pour ce dernier,
tout texte est un ensemble de contenus organisés selon une
«structure séquentielle» (Adam, 1992: 28). C’est «un réseau
relationnel hiérarchique» de séquences de grandeurs différentes,
mais reliées entre elles et reliées au tout - le texte - qu’elles
constituent. Chaque séquence est «une entité relativement

-101-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

autonome […] constituée de paquets de propositions (les macro-


propositions), elles-mêmes constituées de n propositions»
(Adam, 1992: 29).
De fait, ce principe structural hiérarchique a été déjà avancé
par Ricoeur dès 1986: «En même temps qu’elles s’enchaînent,
les unités élémentaires s’emboîtent dans des unités plus
vastes» (Ricoeur 1986:150). De là, les phrases ou propositions-
énoncés sont les composantes d’une unité supérieure, la macro-
proposition, elle-même unité constituante de la séquence, elle-
même unité constituante du texte. Ainsi, chaque unité comme
constituante d’une unité de rang supérieur et constituée d’unités
de rang inférieur est la condition première de cette séquentialité
textuelle.
Cependant, la 1re spécificité de la microstructure d’un écrit de
recherche, c’est que les différentes macro-propositions, en état
de constante interaction l’une avec l’autre et avec le tout comme
dans tous les autres textes, doivent être fortement, et même
exclusivement, orientées vers une fin spécifique, celle de produire
des connaissances. Autrement dit, si ces macropropositions ne
se succèdent, s’emboîtent, s’enchaînent, font appel les unes
aux autres... ce n’est que pour montrer la cohérence des propos,
construire leur validité, leur fiabilité, c’est-à-dire la scientificité du
produit final que propose l’écrit de recherche !
Ensuite, comme dans tout autre écrit, il y aura dans un
texte de recherche des séquences de types variés. Mais celles-
ci devront être utilisées à des fins précises: narratif et descriptif
quand il s’agit de relater la recherche ou les expériences
entreprises; informatif quand il est question de faire le tour de la
littérature du domaine; explicatif et surtout argumentatif quand il
faut se positionner, «se présenter comme auteur dans son texte
et se représenter dans une position d’auteur» (Rinck, 2011: 84).
Cette variété de séquences est une autre spécificité de l’écrit

-102-
Communications de dimension globale

scientifique, dans le sens qu’elle doit servir à refléter fidèlement


la démarche d’investigation, le sérieux et la rigueur de celle-ci et
assurer ainsi la crédibilité d’une recherche.
Enfin, en se servant de façon appropriée, c’est-à-dire en
respectant les règles d’usage de la langue, le français dans
notre cas, des outils linguistiques (lexique, grammaire), para-
linguistiques (ponctuations, illustrations, tableaux statistiques,
figures...), surtout des différentes opérations langagières à des
niveaux différents et selon des règles de combinaison propres
à chaque niveau - plus bas sont les mots, phrases et leurs
agencements; plus élevé sera la structuration des paragraphes,
parties et du texte entier - le scripteur exprime son ancrage
disciplinaire, la conduite de sa recherche, et les nouvelles
connaissances obtenues. Toutefois, si en surface, l’écriture de
recherche peut paraître ressembler à celle des textes de tous
les jours, elle ne l’est pas réellement. Cet acte langagier a ses
particularités que nous allons discuter dans la partie qui suit.

4. Les caractéristiques de l’écriture scientifique


Ainsi, si l’écrit de recherche est un ensemble de macro-
propositions fortement enchaînées entre elles et toutes orientées
vers la plus grande finalité, celle de produire un savoir, il est
encore soumis aux différentes contraintes spécifiques concernant
des éléments qui ne se détectent pas toujours facilement à la
surface du texte: organisation du contenu, figure du scripteur, son
positionnement vis-à-vis des éléments présentés, termes utilisés,
référence à autrui… Pour cela, il faut une manière particulière de
rédiger, communément appelée écriture scientifique ou écriture
de recherche. Qu’en est-il de cette écriture?
Pour Reuter (1998:12-13), cette écriture de recherche ou
scientifique est tout à fait différente des autres pratiques d’écriture.
Elle est caractérisée par trois exigences de base suivantes:

-103-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

1/ La fonction heuristique est centrale dans cette activité et


nécessite un minimum de conscience
pour l’optimisation de son exercice;
2/ L’enjeu est ici, principalement, de produire des savoirs non
disponibles antérieurement;
3/ Cette production des savoirs doit s’effectuer au travers des
normes de recevabilité d’une
communauté scientifique donnée. (C’est nous qui soulignons)
Ces trois critères primordiaux peuvent être considérés
comme des «normes» de base, fruit à la fois des exigences
institutionnelles (université), et celles de la recevabilité par la
communauté scientifique. Elles n’existent pas dans d’autres
types d’écriture des niveaux inférieurs (collège et lycée).
Selon la norme no1, une écriture dit de recherche doit
assumer franchement une fonction heuristique. «Heuristique»
étant comprise comme la découverte, en général progressive
(Le Nouveau Petit Robert, 2010: 1335), avec une méthodologie
fiable, et en prenant appui sur les auteurs du domaine et
savoirs existants. Par ailleurs, «la dimension potentiellement
heuristique-cognitive de l’écriture» (Goody 1977, Olson 1994) est
explicitée par Y. Reuter lui-même comme celle qui «participe de
l’activité même de recherche, incontournable pour objectiver la
production des savoirs et enfin indispensable pour organiser la
recevabilité institutionnelle de la recherche» (Reuter 2004:10).
Cela suppose que l’écriture d’une recherche doit mettre en
exergue un questionnement et/ou des hypothèses pertinents.
Cette problématisation devant partir d’un point de vue et/ou
d’une inscription à une école, discipline, domaine de spécialité,
voire à une culture de recherche (francophone, nord-américaine,
européenne, asiatique... - étant donné que chaque langue,
peuple ou groupe de personnes, possèdent et/ou partagent une

-104-
Communications de dimension globale

façon de voir le monde et des valeurs spécifiques). Par ailleurs,


le fait de faire la révision des savoirs existants à travers l’optique
particulière et spécialisée d’une école, discipline ou domaine
constituera le degré de conscience du scripteur-chercheur, et
c’est cela qui lui permet d’optimiser son travail de recherche à
travers une écriture consciente.
La norme no2 stipule que l’écrit de recherche doit
obligatoirement couvrir un enjeu, celui d’apporter des nouvelles
connaissances, c’est-à-dire «non disponibles antérieurement». Il
est à vrai dire qu’il est à peu près impossible, non seulement pour
nous jeunes ou chercheurs novices mais aussi pour bien des
chevronnés, de produire quelque chose de vraiment nouveau
à la manière d’Albert Einstein (avec ses célèbres théories de
la relativité), Ferdinand de Saussure (sa théorie qui ouvre les
nombreuses voies à la linguistique actuelle) ou Louis Pasteur,
père de la médecine scientifique et de tant d’autres. Cependant,
le nouveau pour nous sera une autre manière de voir, classer,
manipuler; de développer; de faire utiliser/appliquer... les savoirs
qui existent déjà dans un domaine. Pollet et Piette (2002: 166)
indiquent clairement que ces nouvelles connaissances «ne
sont pas faites à partir du néant, mais bien à partir des savoirs
existants dans un domaine ou discipline... [et que] grâce à
certaines modalités, comme les citations, les références aux
sources, la présence des savoirs antérieurs est impliquée dans
le travail». De ces considérations, il est possible de dire que
l’écriture de recherche construit un/des nouveaux savoirs et selon
une méthodologie bien définie et/ou attestée et que tout écrit de
recherche doit réaliser cette finalité à des degrés différents s’il veut
être accepté par la communauté scientifique. Et cela explique la
raison d’être des différents types de recherche: fondamentale,
appliquée, recherche-action, recherche-intervention... (V. dans
RISPAIL M. et LE Ng.Th. Th., dans ces Actes).

-105-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

La 3e règle par Y. Reuter ci-dessus, quant à elle, prescrit que


l’écriture doit «s’effectuer au travers des normes de recevabilité
d’une communauté scientifique donnée». Ces normes de
recevabilité de la communauté scientifique, dans le cas des
rédactions en langue française, seraient les suivantes:
- L’écriture de recherche doit être transparente, c’est-à-dire
claire à tous les niveaux: logique de pensée et d’expression;
usage terminologique approprié, mises en phrases et en texte
correctes selon les règles syntaxiques et textuelles du français...
pour être directement lisible, facilement compréhensible, même
aux profanes à un certain niveau. Ainsi, la pratique de l’écriture
de recherche requiert fortement écritures et ré-écritures. La
mise en mots et en phrases devra en interaction permanente
avec la pensée, elle en est à la fois l’expression et la mise à
l’épreuve. Cette caractéristique de l’écriture de recherche est
souvent moins attestée chez les chercheurs non-experts ou
les apprentis-chercheurs. Reuter (1998: 14) constate que dans
leurs écrits sont fréquents les «contradictions, rapprochement
inattendus, «sauts» dans le raisonnement, ébauches d’idées,
pistes embryonnaires immédiatement abandonnées, passages
particulièrement complexes»;
- Le plus important est que l’écriture de recherche doit
impliquer un recul nécessaire par rapport à des idées, résultats,
positions, voire aux personnes... pour éviter toute partialité et
tendre vers la plus grande objectivité possible ! Les écrits et
écritures de recherche doivent être selon Reuter (1998: 12-13)
«transparents à des idées, à une élaboration cognitive, à des
résultats, forgés antérieurement»;
- Enfin, d’autres facteurs qui contribuent à la transparence du
texte de recherche sont:
+ La posture et le positionnement du scripteur. Deux choses
sont à distinguer: la posture qui signale que les savoirs convoqués

-106-
Communications de dimension globale

par le scripteur sont perçus à partir de quelle place, selon quelle


optique; et le positionnement qui montre l’attitude du scrpiteur
envers ces savoirs, à travers une prise en charge énonciative très
accentuée - la sur-énonciation, tout en respectant la modestie et
l’humilité inhérentes à toute recherche de la vérité.
+ Les phénomènes de polyphonie et de dialogisme...A
travers des opérations linguistiques et discursives, en gérant
avec suffisamment de logique les interactions entre les
différentes instances, le scripteur montre clairement sa position;
et sur cette base, discute franchement et sincèrement avec les
auteurs convoqués, et même avec les lecteurs pour convaincre
de la nouveauté des savoirs qu’il apporte, de l’originalité de sa
contribution, en vue de faire progresser la discipline ou le domaine
étudié. L’écriture de recherche manifeste donc un dialogue
continuel entre le scripteur avec lui-même d’abord (sa réflexion
avance !), avec les savoirs antérieurs (mise en perspective des
connaissances dans sa discipline/son domaine avec d’autres
connaissances connexes ou en contradiction avec elles), puis
avec les autres (auteurs et lecteurs), le tout est à envelopper dans
une énonciation susceptible d’être acceptée par sa communauté
scientifique.
+ ...Et de références aux sources selon des manières
spécifiques. Cela signifie intégrer les discours d’autrui sous trois
formes différentes: synthèse, citations intégrales, reformulation,
conformément aux normes concernant les citations. Ainsi,
préciser les références bibliographiques des travaux est «une
caractéristique très forte du champ scientifique, vécue comme
une absolue nécessité» (Rinck, 2005: 40) et ce, dans deux buts
différents, soit pour confirmer ce qui a été su, dit... et ainsi faire
continuité avec le développement des savoirs; soit pour infirmer,
réfuter ce avec quoi on n’est pas d’accord, le tout en vue de clarifier
les savoirs déjà obtenus dans sa discipline ou son domaine,
s’approcher de la réalité ou de la vérité scientifique. En effet,

-107-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

dans l’écrit de recherche, l’auteur montre sa position à travers


«l’assurance avec laquelle il présente ses propos, l’utilisation
qu’il fait de ceux d’autrui, la conclusion qu’il vise, [des] indications
qu’il donne au lecteur pour qu’il le suive, etc.» (Defays, 2003: 24).
Tout ce travail de clarification de la posture et du positionnement
du scripteur, en continuelle référence avec les autres auteurs et
leur propos, surtout avec ceux du même domaine, est un travail
indispensable de transparence, qui assure la validité d’un écrit
de recherche;
+ Sur le plan concret de la rédaction, la tâche difficile
et complexe sera, à degrés différents, la manifestation de
cet itinéraire décrit par Todorov et cité par Guibert (2001: 42):
«D’abord, je cherche à confronter entre elles les différentes
idées;ensuite, je reconstruis des dialogues entre les auteurs (…)
A d’autres moments (….), je m’avance - téméraire - dans le rôle
d’interlocuteur (…)» pour réaliser trois opérations différentes:
«celle de tri, celle de schématisation et celle de mise en relation
des savoirs différents disciplinaires» (Rinck, 2005: 38). Cette
écriture qui crée de la distance par rapport à la pratique, l’analyse
et articule les différents discours, permet la réflexion, la discussion
et la (re-)construction de la vérité scientifique:
Des fragments ou matériaux linguistiques sont traités (usinés,
pourrait-on dire) dans cet espace selon des méthodes explicitables
et de manière à produire un ordre. Une suite d’opérations articulées
(gestuelles et mentales - littéralement c’est cela, écrire - trace
sur la page les trajectoires qui dessinent des mots, des phrases,
finalement un système. Autrement dit sur la page blanche une
pratique itinérante, progressive et régulée - une marche - compose
l’artefact d’un autre «monde» non plus reçu mais fabriqué.
(Certeau, 1980: 236, cité par R. Guibert, 2004: 36).
Ainsi, l’écriture scientifique est complexe car requérant du
scripteur-chercheur des stratégies et techniques de mise en

-108-
Communications de dimension globale

texte spécifiques. Comment écrire pour refléter fidèlement sa


démarche de recherche, les connaissances convoquées ou
réfutées, leur articulation avec ses propres idées, et surtout
comment assurer la légitimité des savoirs nouvellement
construits, voilà les spécificités de cette écriture qui participe
même de la recherche, comme affirme Reuter (1998: 22): «Cette
composante de la recherche est unifiée sans séparation et non
étanchéité». De là, une formulation langagière grammaticalement
correcte; l’univocité des termes et notions utilisés; la présence
des séquences textuelles bien construites à la fois sur le plan
contenu et forme; l’usage raisonné des marques énonciatives,
linguistiques et des termes de spécialité; le style précis, pertinent
et, de préférence, sobre... seraient les grandes normes de
recevabilité de la communauté scientifique francophone.
Comme aide-mémoire, les caractéristiques d’un écrit
de recherche en français discutées au-dessus peuvent être
résumées et ventilées dans un tableau comme suit:
Tableau 1: Caractéristiques essentielles de l’écrit de recherche

N° L’écriture Ses caractéristiques


scientifique
1 Réalise la fonction de - procède suivant une
découverte au travers problématisation appropriée,
d’une méthodologie pertinente
pertinente en vue de - méthodologie fiable et solide
produire de nouveaux
- produit des savoirs «non
savoirs
disponibles antérieurement»
- suit une logique claire, en
pensée et en expression
- assure une grande lisibilité sur
les plans contenu et forme
- montre du recul nécessaire
et manifeste la plus grande
objectivité possible

-109-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2 Assure la transparence - la rédaction adopte une optique/


du discours posture appropriée et spécifique à
une école, discipline, domaine de
spécialité, voire à une culture de
recherche
- le scripteur se positionne
clairement, de façon non-ambiguë,
sans mélanges injustifiés avec
d’autres domaines ou disciplines
dans la convocation du discours
d’autrui
- correctes synthèses, citations,
reformulations et gestion des
références
- prise en charge énonciative bien
gérée: (sur-)énonciation raisonnée
et raisonnable; polyphonie
du texte; dialogue continu sur
plusieurs plans
3 Respecte les règles Présence appropriée de différents
linguistiques, textuelles, types de séquences textuelles en
du français et des normes vue de la mise en texte fortement
de présentation formelle et exclusivement orientée vers les
de la communauté buts visés
francophone Terminologie disciplinaire
appropriée
Respect des règles linguistiques
et textuelles de la langue; fortes
cohérence (sémantique) et
cohésion (grammaticale) entre les
énoncés et types de discours
Style précis, pertinent et sobre,
montrant l’avancée continuelle de
la réflexion

5. Critères d’analyse de la microstructure de l’écrit de recherche

Sur les 3 grandes normes de l’écrit de recherche avancées


par Y. Reuter et explicitées ci-dessus, nous pensons pouvoir
établir un tableau des critères pour l’(auto-)analyse d’un écrit de
recherche au niveau de sa microstructure. Le tableau comportera

-110-
Communications de dimension globale

des rubriques suivantes: valeur scientifique (4 critères); posture du


scripteur-chercheur (4 critères); modalités de références (3 critères)
et finalement action langagière (9 critères pour les trois niveaux: le
texte/l’inter-paragraphe, le paragraphe et la phrase).
Tableau 2: Tableau des critères d’analyse de la microstructure de l’écrit de recherche

N° Critères d’analyse Code


A Analyse de la valeur scientifique

Problématisation: présence et pertinence, nombre suffisant de


1 A1
questions de recherche. Éventuelles hypothèses, si nécessaire

2 Cohérence «Sujet de la recherche - Questions de recherche” A2


3 Formulation claire du contexte et objectifs de la recherche A3
Méthodologie de la recherche: présence; pertinence; adaptée
4 A4
à la problématique
B Analyse de la posture du scripteur-chercheur
Ancrage disciplinaire non équivoque; clairement défini,
1 B1
sans mélanges injustifiés des domaines et/ou des postures
Données théoriques et expérimentales selon une position
2 B2
disciplinaire: fiables, suffisantes, bien documentées
Gestion de la polyphonie: énonciation (nous/je, on/il/elle)
3 B3
appropriée; non-confusion ni ambiguïté des voix
Dialogisme: continuel, progressif, montrant clairement l’avancée
4 B4
de la pensée du scripteur
Analyse de la gestion de l’hétérogénéité des discours
C
et renvois aux sources
Citations appropriées, explicitées et correctement intégrées,
1 C1
avec recul et prises de position nécessaires
Modalités des citations avec synthèses, citations intégrales,
2 insertions dans le texte du scripteur: appropriées, correctes, C2
suivant une norme reconnue (norme APA ou autre)
Bibliographie correctement établie, correspondance bibliographie-
3 C3
citations, mention correcte des sources
D Analyse de l’action langagière
Niveau du texte
Contenu: idées non-contradictoires, logiquement structurées,
1 D1
clairement exprimées

-111-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2 Ton, rhéorique, style: convenables, pertinents, sobres D2


Présentation formelle avec parties, paragraphes en nombre
3 suffisant, non-contradictoires, correctement enchaînées, D3
assurant grande lisibilité
Niveau des paragraphes
Propositions-énoncés: en nombre suffisant, de types
4 D4
appropriés et variés, avec des rôles précis
5 L’ordre des propositions-énoncés: logique, place appropriée D5
Nature et composition des énoncés: appropriés, non-
6 contradictoires, correctement enchaînés les uns aux autres, D6
directement compréhensibles
Niveau phrastique
Lexique et terminologie: suffisant, précis, approprié,
7 D7
compréhensible
8 Connecteurs: suffisants, appropriés, bien placés D8
Morphosyntaxe, phrases grammaticalement correctes, modes
9 D9
et temps convenables

Conclusion
Dans cet article, nous avons essayé de définir ce qu’est
l’écrit de recherche et les grands traits de sa microstructure. De
là, nous sommes arrivés à identifier quelques grands critères qui
aideraient à (auto-)analyser un écrit de recherche et évaluer son
degré de recevabilité effective dans la communauté scientifique
francophone. Nous avons mis ces critères dans une grille, mais
celle-ci pour être vraiment valide et fiable, devra passer par des
tests d’usage, ce que nous ferons dans la suite.
Nous espérons que cette étude aidera, nous-même et nos
collègues apprentis chercheurs-scripteurs, à avoir moins de mal
dans la rédaction de nos mémoires et communications scientifiques,
travail faisant partie entière du métier enseignant universitaire.

-112-
Communications de dimension globale

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1. ADAM, J-M. (1992). Les textes: types et prototypes: récrit,


description, argumentation, explication et dialogue. Nathan.
2. DEFAYS, J-M. (2003). Le français langue étrangère et
seconde: Enseignement et apprentissage, Editions Mardaga.
3. DINH HONG, V. et LUU DINH, P. (2018). Macrostructure de
l’écrit de recherche: une nouvelle notion théorique et ses
normes de mise en structure, in 2018 International Graduate
Research Symposium Proceedings «Linguistics-Foreign
Language Education- Interdisciplinary Fields», Hanoi, Viet
Nam National University press.
4. DUBOIS, J.-M. (2005). La rédaction scientifique. Mémoires
et thèses: formes régulière et par articles. Québec, ESTEM.
5. ECO, U. (2016). Comment écrire sa thèse. Flammarion.
6. GUIBERT. R. (2001). Citer et se situer: l’apprentissage de
l’écriture avec les discours d’autrui», in: Francis Grossmann,
Françoise Boch, Lidil n°24: Apprendre à citer: le discours
d’autrui, Grenoble.
7. GUIBERT. R. (2004). Formation aux dialogismes. In:
Pratiques: linguistique, littérature, didactique, n°121-122,
Normes et pratiques de l’écrit dans le supérieur.
8. LENOBLE-PINSON, M. (1996). La rédaction scientifique.
Bruxelles, Université De Boeck.
9. LUU DINH, P. (2018). Structuration des écrits de recherche
des étudiants vietnamiens en France. Enseignement et
formation du/en français en contexte plurilingue. Edition de
l’Université Nationale du Vietnam à Hanoi.
10. POLET, M-C. & PIETTE, V. (2002). Citations, reformulations
du discours d’autrui: une clé pour enseigner l’écriture de

-113-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

recherche? in Spirale N°29: Lire et écrire dans le supérieur,


ESPÉ Lille Nord de France et Université Lille 3.
11. REUTER, Y. (1998). De quelques obstacles à l’écriture de
recherche. Linguistique et didactique des langues, 17, 11-23.
12. REUTER, Y. (2004). Analyser les problèmes de l’écriture de
recherche en formation. Pratiques, 121-122, 9-27.
13. RICŒUR P. (1986). Du texte à l’action. Paris, Esprit/Le Seuil.
14. RINCK, F. (2005). Ecrit de recherche, Cours de Master.
15. RINCK, F. (2006). L’article de recherche en Sciences
du langage et en Lettres. Figure de l’auteur et identité
disciplinaire du genre. Thèse des Sciences du Langage.
Université Stendhal, Grenoble 3.
16. RINCK, F. (2011). Former à (et par) l’écrit de recherche. Quels
enjeux? Quelles exigences? in Le français d’aujourd’hui,
N°174. Armand Colin.
17. VAN DIJK.T.A (1980). Macrostructures: An Interdisciplinary
Study of Global Structures in Discourse, Interaction, and
Cognition, Hillsdale, New Jersey, Lawrence Erlbaum
Associates, Inc.

-114-
2. Les recherches en enseignement/
apprentissage du français
DES RECHERCHES COGNITIVES
À L’ENSEIGNEMENT DES LANGUES

DANG Kim Hoa - DINH Hong Van


Département de français
Université de Langues et d’Etudes Internationales -
Université Nationale du Vietnam à Hanoï

Résumé:
Les recherches cognitives des années 1980 ont mis en avant le lien étroit
entre la langue et la cognition, et la pédagogie des langues a pris un tournant
en promouvant la centration sur l’apprenant lui-même. Les nouvelles approches
dites communicatives se sont souciées des compétences, et interactions. Mais le
processus cognitif de l’apprenant et le rôle de l’enseignant-pédagogue ne semblent
pas encore suffisamment abordés.
Une recherche sur les prépositions spatiales en français nous a menés à
réfléchir sur cette facette cognitive de l’enseignement/ apprentissage: comment
une langue peut être acquise et quel rôle joue l’enseignant dans ce processus.
Notre recherche a un double objectif: linguistique et pédagogique.
Mots clés: approche cognitive - prépositions spatiales - processus cognitif
- rôle de l’enseignant - représentation constructive de la langue

1. La représentation langagière selon la linguistique cognitive


La linguistique générative partant de l’hypothèse que la
langue constitue au sein de la psychologie humaine un module
autonome, postule que le sens d’un énoncé est une combinaison
Communications de dimension globale

des formes par des règles d’une grammaire universelle innée.


Et selon cette théorie, la transformation d’une phrase active en
phrase passive, par exemple: Cicéron a écrit cette lettre en 52
avant J.-C. / Cette lettre a été écrite par Cicéron en 52 avant J.-C.,
ne pose aucune modification au niveau de l’idée transmise (Fuchs
2004: 43), ce qui a donné lieu à des méthodologies centrées sur
l’objet-langue elle-même et sur la transformation des structures
formelles pour acquérir une langue.
Le courant cognitif (Langaker, Talmy, Levison - cités par
Fuchs 2008), par contre, a tenté de jeter un pont entre la langue
et le cerveau humain en effectuant un regard croisé entre langue,
culture et cognition. Dans cette optique, la combinaison forme-
sens pour traiter une information est un processus mental
complexe, et l’emploi d’une forme est porteur de sens: «Le point
clé, qui fait tout l’intérêt de cette approche, c’est de considérer
que les aspects grammaticaux sont aussi porteurs de sens en
eux-mêmes, indépendamment des aspects lexicaux.» (Fuchs,
2004: 43). Ainsi, il semble bien que le choix de la forme active
ou passive d’une proposition peut véhiculer une stratégie de
communication de la part du locuteur; que le traitement cognitif
des éléments linguistiques est de caractère constructiviste; et
que c’est l’utilisateur d’une langue lui-même qui (re)construit les
savoirs et savoir-faire dans cette langue.
Les approches communicative, fonctionnelle ou actionnelle
insistent beaucoup, elles aussi, sur l’autonomie du sujet apprenant
et sur le côté socioculturel dans la pédagogie des langues.
L’apprenant doit être mis au cœur des activités pédagogiques pour
devenir l’acteur de son apprentissage. Cependant, la dimension
cognitive de l’apprenant n’est pas encore suffisamment prise en
compte, comme le constate Bange P. (2005) et repris par (Ying,
2016:191): «Il est certain, en effet, que l’apprenant a été placé au
centre du processus pédagogique mais il l’a été en tant que sujet
de la communication, non pas été en tant que sujet du processus

-117-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

de communication». En effet, pour les cognitivistes, le langage


n›est pas seulement un moyen de communication mais aussi
le support d›acquisition de connaissances: «Le langage n’a pas
seulement une fonction de communication entre individus, mais
aussi de support de leur connaissance» (Fuchs, 2004:105).
Forts de ce postulat, nous voudrions répondre à cette
question: comment enseigner une langue comme moyen avec
lequel l’apprenant construit ses savoir et savoir-faire?

2. Une représentation constructiviste du langage


L’on sait que l’emploi d’une langue ne correspond pas toujours
à ses descriptions généralisées dans les ouvrages de grammaire,
les études cognitives cherchent à étudier le langage à travers
ses diversités, c’est-à-dire à travers des langues différentes ou à
travers les différents emplois d’un signe linguistique au sein d’une
langue, et ce pour dégager les variations sémantiques possibles
d’une unité, de là, faire ressortir les facteurs cognitifs impliqués
dans une représentation langagière.
Pour comprendre cet aspect cognitif dans la représentation
du langage, nous avons mené nous-même une étude des
prépositions spatiales en français. À travers un corpus littéraire
de 1616 occurrences en français, nous avons constaté une
flexibilité incroyable du langage et nous sommes arrivés à des
constatations suivantes:
Première constatation: le langage n’est pas une représentation
statique de la réalité mais une image construite avec l’appui des
expériences linguistiques et socioculturelles du locuteur. De là,
la combinaison forme-sens dans sa langue à lui, c’est-à-dire
dans sa «performance langagière» (lexème, mot, locution ou
même construction syntaxique) véhicule forcément ses propres
connaissances du monde. Considérons par exemple ces phrases:
«Le tableau est sur le mur» et «Le coq est sur le mur». Ces deux
phrases ont exactement le même schéma structurel (S + est +

-118-
Communications de dimension globale

sur + N), mais ne produisent pas du tout la même signification


locative, et la compréhension de leur sens ne passe que
grâce à l’expérience des interlocuteurs qui permet d’interpréter
correctement les items linguistiques (grammaticaux et lexicaux).
De même: de l’eau dans le vase; des fleurs dans le vase; des
bateaux sur la mer et des hirondelles sur la mer donnent à voir
des scènes tout à fait différentes.
Deuxième constatation: la représentation locative par
le langage se montre tellement riche et dynamique que la
description théorique de type traditionnelle n’arrive pas toujours
à nous satisfaire. Examinons le cas de la préposition «dans» en
français à travers ces exemples tirés de notre corpus:
a. Jonathan retrouvait Anna dans leur maison.
b. Des roches à pic couronnées de sapins plongent dans la mer.
c. Il mit ses mains dans son dos.
d. Le premier tableau de l’œuvre de Vladimir Radskin […] fut
projeté dans son dos sur un immense écran.
e. La tête rentrée dans les épaules, il chercha un couteau
dans sa poche.
Si l’on fait une illustration géométrique de la place des personnes
ou objets dans ces exemples, on aura 5 configurations différentes:
a° Inclusion totale, b° Inclusion partielle, c° Exclusion avec contact,
d° Exclusion totale et e° Relation partie/tout (Figure 2).

Figure 2. Les configurations géométriques de «dans»

-119-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Cela montre que la description sémantique de «dans»


dans les dictionnaires, livres théoriques ou méthodes de FLE,
en termes d’intériorité, d’inclusion, voire de contenance, n’arrive
pas à englober toutes les configurations exprimées par «dans»,
puisque, dans une langue naturelle, une forme linguistique est
en général assez dynamique pour satisfaire un grand nombre de
besoins de communication. Or très souvent, le savoir linguistique
ou langagier présenté dans les méthodes de FLE ne reste que
prototypique ou général («dans» par exemple est souvent limité
au schéma de type d’inclusion), ce qui pourrait rendre l’apprenant
passif et impose des limites à son acquisition des connaissances.
Troisième constatation: les descriptions réelles d’une
préposition peuvent s’expliquer, dans plusieurs contextes, au-
delà de son sens locatif. Pourquoi la préposition «dans» est-elle
utilisée dans: Anna s’installa dans un fauteuil en velours brun;
mais pas dans cette phrase: Je puis m’asseoir sur un fauteuil?
L’emploi de «dans» et de «sur» dans ces deux phrases n’est
sûrement pas sans raison: «dans un fauteuil» implique en plus
l’idée de jouissance d’un confort, tandis que «sur un fauteuil»
n’est qu’une localisation spatiale pure et simple. Par ailleurs,
deux prépositions de sens tout à fait opposés peuvent parfois
décrire le même rapport. Ainsi: Quelqu’un devant le volant ou
Quelqu’un derrière le volant; Quelqu’un devant l’ordinateur ou
Quelqu’un derrière l’ordinateur traduisent la même distribution
locative. Ou encore, il arrive que deux prépositions différentes
ne se distinguent pas sémantiquement dans leur description
locative: Les informations dans l’ordinateur et Les informations
sur l’ordinateur. Tous ces emplois ne s’expliquent certainement
pas complètement par les règles de grammaire ou par le sens
lexical des mots, mais dépendent encore des facteurs cognitifs
du sujet parlant, lesquels peuvent être tout à fait individuels mais
ne sont pas du tout du hasard. Il semble ainsi clair que chaque
combinaison de formes est porteuse de sens, et que le choix

-120-
Communications de dimension globale

d’une construction ou au lieu d’une autre fait évidemment l’objet


d’un traitement cognitif différent par le sujet parlant ou sujet
récepteur.
Enfin, notre recherche comparée entre la localisation en français
et en vietnamien révèle des modes d’expression spécifiques à ces
deux langues. Les enseignants vietnamiens comprennent bien
l’origine de cette erreur de leurs apprenants: «monter sur le bus»
au lieu de «monter dans le bus». Les différentes représentations
de la réalité par des langues différentes montrent que la cognition
joue un rôle important dans la combinaison forme-sens et pour
construire le sens de l’énoncé, chaque langue fournit en même
temps des outils et stratégies de traitement dans les processus de
(re)construction et de compréhension du langage.
En bref, nous avons vu que plusieurs éléments sont convoqués
à une production/ réception langagière: la flexibilité de la langue,
l’intention du locuteur, la présence/absence de l’interlocuteur,
la stratégie cognitive de traitement de l’information, le mode de
conceptualisation et d’expression d’une culture, etc. La prise
en compte de cette relation langue-cognition dans le processus
langagier exige que l’apprentissage des langues ne soit pas
une simple assimilation des formes, et que l’apprenant ne doive
pas recevoir passivement les connaissances données par le
professeur. La transmission des connaissances de l’enseignant
doit donc changer, et avec elle, la conception des contenus est
aussi à modifier.

3. Vers l’approche cognitive dans l’enseignement/


apprentissage des langues
Nos réflexions pédagogiques partent de deux notions «le
savoir déclaratif» et «le savoir procédural» dans le processus
d›apprentissage des langues, selon les analyses de Peter
Griggs (2002). Brièvement, le savoir déclaratif est issu de l’input
langagier qui vient des supports divers et qui cherche à donner à

-121-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

l’apprenant l’expérience directe de la langue. Par contre, le savoir


procédural est le savoir (re-)construit par l’apprenant lui-même à
travers une pratique graduelle et qui lui permet d’exécuter une
action correspondant à son but de communication.
Le premier résultat que nous voudrions signaler dans le cadre
de ce travail porte sur l’input langagier (textuel et grammatical) à
transmettre comme les sources initiales de l’apprentissage. Si
l’enseignement traditionnel considère que l’input grammatical
constitue une partie importante, voire fondamentale, du savoir
déclaratif de l’apprenant, et que la transmission passe souvent de
façon directe et normalisée, les méthodes récentes ont tendance
à fournir davantage d’informations de natures diverses (lexicale,
métalinguistique et aussi interculturelle). Cependant, la proportion
de l’input grammatical présenté dans les méthodes de FLE reste
encore élevée car, en général, l’enseignant doit dépenser environ
un quart de son temps en classe pour transmettre ce contenu.
Par ailleurs, l’approche cognitive justifie la flexibilité du langage
qui active le message verbal plutôt par des items grammaticaux et
lexicaux. Ces derniers donnent sens aux structures syntaxiques,
donc le lexique doit être considéré comme le médiateur essentiel
de la production langagière. Il faut rendre à cet input lexical sa
juste place dans l’enseignement des langues et lui accorde un
entraînement nécessaire et satisfaisant pour la construction du
savoir procédural. Au fait, on observe souvent dans les méthodes
des tableaux de mots grammaticaux ou lexicaux isolés du
contexte, et sans entraînement suffisant à une vraie utilisation.
Présenter un grand nombre de mots ne signifie pas qu’on accorde
assez d’importance à l’enseignement du lexique. Il faudrait plutôt
effectuer correctement «l’input» pour que les apprenants puissent
se servir de ce lexique. Ensuite, au lieu de commencer directement
par les contenus généralisés sur la langue par les grammairiens,
il nous faudrait partir de l’usage, partir des emplois concrets d’une
forme linguistique en contexte pour amener l’apprenant par la

-122-
Communications de dimension globale

suite à généraliser les règles et à distinguer les variations, de telle


sorte que son savoir déclaratif se rapproche de la norme d’usage
de la langue cible. L’apprentissage n’est plus alors une simple
acquisition, mais surtout une (re)construction du sens.
Par ailleurs, une transmission directe risque d’amener l’apprenant
à un savoir déclaratif rigide de la langue. Chaque individu a son
propre projet de percevoir, de comprendre, de traiter et de mémoriser
les contenus présentés. C’est pourquoi, le rôle de l’enseignant est de
diriger, guider, avant de contrôler. Dans le cas de «sur» par exemple,
il faudrait d’abord faire observer ses différents emplois: un verre sur la
table, un tableau sur le mur, un message sur le répondeur, mettre un
pardessus sur son pyjama. L’apprenant avec ses expériences, même
celles acquises dans sa langue maternelle, arrivera à comprendre
tout seul la signification de certaines expressions ou non, mais ce
qui est fondamental en fin de compte, c’est qu’il réussit à remarquer
des différences non seulement de formes et surtout d’usage entre sa
langue et la langue cible, et une telle acquisition permettra plus tard
l’utilisation plus souple et plus consciente de ce qui a été appris.
Cependant, nous savons que ce que l’on apprend ne se
passera pas forcément telle quelle dans la réalité. L’important
est donc de savoir comment le savoir déclaratif sera utilisé. Si la
classe traditionnelle cherche à automatiser ce qu’on apprend par
la répétition pour construire le savoir procédural, les méthodes
récentes visent une pratique basée sur la réalisation des tâches
ou, mieux encore, selon l’approche cognitive, à un traitement
conscient basé sur la résolution intentionnelle des problèmes en
vue des buts communicatifs concrets.
Nous voudrions encore souligner que les méthodes sont
en général faites pour un large public international. Cependant,
nos apprenants vietnamiens sont influencés par leur culture,
leur langue maternelle et leur propre expérience. Etant de la
même langue et culture, les enseignants sont censés mieux

-123-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

connaître leur public, et chaque enseignant sera le mieux placé


pour développer réellement les savoir-faire chez ses apprenants,
s’il se souvient qu’une pratique efficace suscite le besoin de
communication, dans une situation naturelle. Pour cela, la
création d’un environnement qui exige des interactions et des
activités pourra mieux motiver les apprenants. À titre d’exemple,
au lieu de faire parler de la pratique informationnelle des jeunes
en général, nous avons demandé à nos étudiants de mener eux-
mêmes une enquête sur leur compte Facebook, puis de faire un
rapport des résultats. Le projet était un succès, aussi bien à l’oral
qu’à l’écrit, parce que les étudiants étaient très motivés par le fait
de pouvoir montrer leur propre produit.
Enfin, la prise en compte du processus cognitif de
l’apprenant concerne aussi la conception et la gestion des
activités pédagogiques. Conscient des interférences de la
langue maternelle et des erreurs récurrentes d’un type de public,
l’enseignant pensera à introduire des contenus et des situations
qui permettront aux apprenants de prendre conscience de leurs
propres erreurs, et de pouvoir les corriger petit à petit.

5. En guise de conclusion
L’approche cognitive n’est pas un refus des méthodologies
communicatives. Elle vient juste se greffer sur celles-ci mais
tient compte de plus près le processus cognitif de l’apprenant
en tant que constructeur du savoir et du savoir-faire dans une
langue. Cette perspective met l’accent sur le rôle central de
l’apprenant dans l’apprentissage. Toutefois, l’approche cognitive
met en avant le rôle des pédagogues et des enseignants, depuis
la conceptualisation de l’input langagier dans les méthodes ou
manuels jusqu’à l’organisation des activités pédagogiques en
classe. Grâce à cela, l’enseignement et l’apprentissage des
langues étrangères pourra se réaliser de manière plus efficace.

-124-
Communications de dimension globale

BIBLIOGRAPHIE
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-125-
ADOPTION DES TIC DANS L’APPRENTISSAGE DU
FRANÇAIS LANGUE ÉTRANGÈRE PAR LES APPRENANTS:
LA VALIDATION DU MODÈLE D’ACCEPTATION DE LA
TECHNOLOGIE - «TECHNOLOGY ACCEPTANCE MODEL» -
(TAM) DANS UN CONTEXTE VIETNAMIEN

NGUYEN Huu Binh


École de langues étrangères - Université de Da Nang

Résumé:
De nos jours, les technologies de l’information et de la communication
(TIC) sont largement utilisées dans l’enseignement/apprentissage, surtout dans
celui des langues étrangères. Beaucoup d’études ont été menées afin de rendre
ces outils plus efficaces dans différents contextes pédagogiques. Pourtant, nos
connaissances à propos des attitudes des apprenants envers les technologies
restent assez limitées. Le présent article a pour but de valider dans un contexte
vietnamien le modèle d’acceptation de la technologie (TAM) proposé par Davis
(1989). Obtenus par l’approche quantitative avec études statistiques appliquées
aux données recueillies auprès de 136 étudiants de l’École de langues étrangères
- Université de Da Nang (Vietnam), les résultats affirment la fiabilité et la validité
du TAM (χ2/df = 1.54, GFI = 0.91, TLI = 0.92, CFI = 0.94, RMSEA = 0.06). Quant
aux relations de causalité entre les facteurs du modèle, l’étude a trouvé l’effet direct
de la «Perception de la facilité d’utilisation» sur la «Perception de l’utilité», de la
«Perception de l’utilité» sur les «Attitudes» et des «Attitudes» sur l’«Intention
d’utilisation». Pourtant, les deux autres liens causaux (entre la «Perception de
la facilité d’utilisation» et les «Attitudes» et entre la «Perception de l’utilité» et
l’«Intention d’utilisation» ) n’ont pas été prouvés dans cette étude.
Mots-clés: TIC, langues étrangères, FLE, validation, TAM
Communications de dimension globale

Introduction
Durant ces dernières années, l’insertion des TIC est
devenue une tendance dans l’éducation, surtout dans
l’enseignement/apprentissage des langues. Nombreux sont les
établissements de formation qui ont profité du développement
rapide des technologies et les ont adoptées dans leurs cours
dits traditionnels. Selon Mangenot (2000), l’apprentissage des
langues vivantes est l’un des domaines auquel on a le plus - et
le plus tôt - cherché à appliquer l’outil informatique. Dans leurs
pratiques professionnelles, les enseignants utilisent de plus en
plus des outils conçus et mis à leur disposition, car ils ont pris
conscience des apports remarquables des TIC. À ce propos,
Coen (2011) a cité, parmi d’autres, six bénéfices selon lesquelles
les technologies éducatives permettent de:
- Médiatiser les savoirs ;
- Entraîner les élèves à apprendre ;
- Accéder au processus d’apprentissage ;
- Communiquer entre apprenants ;
- Motiver les élèves ;
- Moduler les environnements d’apprentissage.
Beaucoup de recherches ont été menées afin de rendre plus
efficace l’utilisation des TIC dans l’enseignement/apprentissage
des langues. Pourtant, nous sommes d’avis que ces études
restent focalisées, dans une certaine mesure, sur les questions
comme: quelles relations entre l’utilisation des TIC et la réussite
des élèves; comment mieux exploiter une technologie pour des
buts pédagogiques; comment évaluer le scénario d’une activité
pédagogique insérant les TIC, etc. En d’autres termes, les
chercheurs ne s’intéressent pas suffisamment aux attitudes des
élèves. De ce fait, nous nous demandons si les élèves apprécient

-127-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

le recours aux technologies dans des cours de langues et, plus


précisément, dans des classes de français langue étrangère
(FLE). Selon nous, chercher à comprendre les représentations
des apprenants au sujet des TIC et les facteurs susceptibles
d’exercer des impacts sur ces représentations est particulièrement
significatif car «les attitudes organisent des conduites et des
comportements plus ou moins stables […] sont généralement
associées et évaluées par rapport aux comportements qu’elles
génèrent» (Castellotti & Moore, 2002).
Dans le cadre de cet article, nous envisageons principalement
évaluer la fiabilité et la validité du modèle d’acceptation des
technologies (en anglais Technology acceptance model - TAM)
dans un contexte vietnamien.

1. Revue de la littérature spécialisée


1.1. Modèle d’acceptation des technologies
L’un des modèles les plus populaires qui portent sur l’intention
de recourir à une technologie est le modèle d’acceptation de la
technologie développé par Davis (1989). Cet auteur s’est inspiré
de la «Théorie de l’action raisonnée» proposée par Fishbein &
Ajzen (1975) pour élaborer le TAM qui permet de considérer le
fait qu’une personne accepte ou pas d’utiliser un système.
Dans ce modèle, il y a deux facteurs importants qui sont
la «Perception de l’utilité» (PU) et la «Perception de la facilité
d’utilisation» (PFU). Selon Davis (1989), la PU est le degré
avec lequel un individu croit que l’utilisation d’un système
particulier améliorera sa performance au travail. La PFU est
le degré avec lequel un individu croit que l’utilisation d’un
système particulier ne nécessite pas d’efforts. Ces deux
facteurs influent sur les attitudes d’un individu envers une
technologie et son intention de l’utiliser. Les facteurs du TAM
sont présentés dans la Figure 1.

-128-
Communications de dimension globale

Figure 1: Modèle d’acceptation de la technologie (Davis, 1989)

Bien qu’il ait été initialement développé pour s’appliquer aux


comportements vis-à-vis l’utilisation de l’ordinateur (Davis et al.,
1989), le TAM est considéré comme un outil efficace pour des
recherches empiriques (Chang, Chou, & Yang, 2010). En effet,
Lee, Kozar, & Larsen (2003) estiment que: «Parmi toutes les
théories, le modèle d’acceptation de la technologie (TAM) est
considéré comme la théorie la plus influente et communément
utilisée pour décrire l’acceptation des systèmes d’information
chez un individu.»
De plus, ce modèle a été choisi et étendu dans beaucoup
de recherches concernant plusieurs types de technologies et a
prouvé sa validité (Cakir & Solak, 2014).
1.2. Certains travaux utilisant le TAM
Plusieurs chercheurs du domaine de l’enseignement/
apprentissage des langues étrangères ont utilisé le TAM pour
chercher à comprendre les attitudes des apprenants envers
les technologies. En général, les résultats montrent la validité
du modèle. En fait, dans une étude menée au Japon, relative
à l’utilisation des tests en ligne, Dizon (2016) voulait étudier
les corrélations entre les composants du TAM. Les analyses
statistiques lui permettent de conclure que les corrélations entre la
«Perception de l’utilité», la «Perception de la facilité d’utilisation»
et l’»Intention d’utilisation» sont justifiées et que les hypothèses
statistiques sont validées.

-129-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

De même, Mah & Er (2009) affirment que les apprenants


acceptent l’utilisation du blog pour développer les compétences
en production écrite une fois qu’ils ont conscience de son utilité
plutôt de sa facilité d’utilisation. De plus, ils concluent que le TAM
peut être utilisé pour comprendre et expliquer les attitudes envers
les technologies, et que les facteurs du TAM s’articulent entre eux
conformément à la théorie proposée par Davis (1989).
Pourtant, les résultats de Selevišienë & Burkšaitienë (2015)
qui ont choisi le TAM et recouru à l’approche quantitative dans
le but d’évaluer l’acceptation du Web 2.0 dans l’apprentissage
de l’anglais sur objectif spécifique chez des étudiants lituaniens
montrent que les compétences en utilisation du Web 2.0 est le seul
facteur qui ait une corrélation positive directe avec les attitudes,
l’intention d’utilisation et l’utilisation réelle des outils Web 2.0. Les
auteurs suggèrent de considérer cette relation avant tout recours
aux outils Web 2.0 dans l’enseignement/apprentissage.
Ainsi, de manière générale, les études effectuées ont
démontré la fiabilité et la validité du TAM dans le domaine de
l’enseignement/apprentissage des langues étrangères. Elles
ont justifié également les corrélations entre les composants du
modèle. Néanmoins, il ne faut pas oublier l’influence du contexte
sur ces relations causales.

2. Méthodologie de la recherche
2.1. Objectifs de la recherche
Le présent travail de recherche vise deux objectifs principaux:
- Évaluer la fiabilité et la validité du TAM pour expliquer
l’acceptation des TIC dans l’apprentissage du FLE;
- Étudier les corrélations entre les composants du TAM dans
un contexte vietnamien.

-130-
Communications de dimension globale

2.2. Hypothèses statistiques


Pour atteindre les objectifs mentionnés, nous vérifierons dans
le cadre de cet article les hypothèses statistiques (H) suivantes:
- H1: «PFU» exerce des impacts sur «PU».
- H2: «PFU» exerce des impacts sur «ATT» (Attitudes envers
l’utilisation des TIC).
- H3: «PU» exerce des impacts sur «ATT».
- H4: «PU» exerce des impacts sur «INT» (Intention d’utiliser
des TIC).
- H5: «ATT» exerce des impacts sur «INT».
2.3. Échantillon
L’échantillon comprend 136 étudiants apprenant le FLE à
l’École de langues étrangères, près de l’Université de Da Nang
(Vietnam). Comme les étudiants se regroupent en classes, nous
avons opté pour l’échantillonnage par grappe. Les renseignements
sur l’échantillon sont présentés dans le Tableau I.
Tableau I: Caractéristiques démographiques de l’échantillon

Caractéristiques Effectifs Pourcentages (%)


1 année
re
42 30.9
Année 2 année
e
39 28.7
d’études 3 année
e
31 22.8
4 année
e
24 17.6
Masculin 8 5.9
Sexe
Féminin 128 94.1
Total: 136 100

2.4. Instrument de mesure


Pour mener à bien cette recherche, nous nous sommes
inspirés des questionnaires proposés par Tselios, Daskalakis &
Papadopoulou (2011) et Wong & Teo (2009). Le questionnaire
utilisé est composé de 16 items. Il s’agit d’une échelle de type

-131-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Likert à 5 points. En d’autres termes, les 16 items sont des énoncés


avec 5 propositions de réponses qui varient de «complètement
pas d’accord» à «complètement d’accord».
Les énoncés du questionnaire s’articulent autour de 4 axes
tels que présentés dans le Tableau II.
Tableau II: Le questionnaire

Facteurs Sigles Items


PU1 L’utilisation des TIC m’aide à mieux apprendre le FLE.
L’utilisation des TIC améliorera mon efficacité dans
Perception PU2
l’apprentissage du FLE.
de l’utilité
(PU) L’utilisation des TIC m’aide à accomplir des tâches
PU3
d’apprentissage plus rapidement.
PU4 Les TIC sont utiles dans mon apprentissage du FLE.
PFU1 Apprendre à utiliser des TIC sera facile pour moi.
Mon interaction avec des outils TIC est claire et
PFU2
Perception compréhensible.
de la facilité
PFU3 Il est facile d’utiliser des TIC pour faire ce que je veux.
d’utilisation
(PFU) L’utilisation des TIC ne demande pas de savoir-faire
PFU4
particuliers.
PFU5 Les TIC sont faciles à utiliser.
L’utilisation des TIC dans l’apprentissage du FLE
ATT1
Attitudes est une bonne idée.
envers L’utilisation des TIC rend l’apprentissage du FLE
l’utilisation ATT2
plus intéressant.
des TIC
ATT3 L’apprentissage du FLE avec des TIC est agréable.
(ATT)
ATT4 J’aime utiliser des TIC dans l’apprentissage du FLE.
INT1 J’aimerais avoir des modules recourant à des TIC.
Intention Dans l’avenir, j’utiliserai des TIC dans mon
INT2
d’utiliser des apprentissage du FLE.
TIC (INT) J’ai l’intention d’utiliser fréquemment des TIC dans
INT3
l’apprentissage du FLE.

Source: inspiré de Tselios, Daskalakis & Papadopoulou (2011) và Wong & Teo (2009)

-132-
Communications de dimension globale

3. Résultats et discussion
Le présent travail comprend deux parties principales. Dans
un premier temps, nous procédons à étudier la dimensionnalité,
la fiabilité et la validité des construits de l’outil de mesure. Cette
partie se compose de trois étapes qui sont: (1) l’évaluation de la
fiabilité des dimensions; (2) l’analyse de factorielle exploratoire;
et (3) l’analyse factorielle confirmatoire. Dans un deuxième
temps, nous testerons les relations causales entre les facteurs
du modèle, ce qui constitue la quatrième étape de notre étude.
Les résultats obtenus seront présentés étape par étape.
3.1. Fiabilité de l’échelle
Tout d’abord, nous avons évalué la fiabilité des échelles avec
l’alpha de Cronbach (α). Les résultats des analyses montrent que
les valeurs obtenues du coefficient α qui varient entre 0,69 et
0,82 sont satisfaisantes. Pourtant, ils révèlent également que la
suppression des PU3 et PFU4 permet d’améliorer la valeur de
l’alpha des dimensions respectives. De ce fait, nous avons décidé
d’enlever les PU3 et PFU4 du modèle. Les résultats finaux sont
présentés dans le Tableau III.
Tableau III: Fidélité des dimensions

Dimension Nombre d’items Alpha de Cronbach


PU 3 0.75
PEU 4 0.70
ATT 4 0.82
INT 3 0.69

3.2. Analyse factorielle exploratoire


Dans cette étape, une analyse factorielle a été appliquée
sur les résultats retenus lors de l’étape précédente. Nous avons
opté pour la factorisation en axes principaux comme méthode
d’extraction et la rotation promax. De plus, ayant la théorie de Davis
(1989) et les résultats des recherches ultérieurement entreprises
comme fondements conceptuels, nous avons fixé le nombre de

-133-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

dimensions à extraire à 4 selon les recommandations de Yong


& Pearce (2013). Par ailleurs, un indice de saturation (loading)
supérieur à 0,32 serait nécessaire selon Worthington & Whittaker
(2006) «container-title»: «The Counseling Psychologist», «page»:
«806-838», «volume»: «34», «abstract»: «The authors conducted
a content analysis on new scale development articles appearing
in the Journal of Counseling Psychology during 10 years (1995 to
2004) pour qu’un item soit retenu dans le modèle.
Les résultats de la première analyse factorielle ont fait
remarquer que le INT3 possédait un indice de saturation inférieur
à 0,32. Cet item a été donc enlevé. L’analyse a été réalisée une
deuxième fois et a donné des résultats satisfaisants (voir Tableau
IV). En fait, tous les items se sont correctement associés et le
modèle final explique 51,5% de la variante totale.
Tableau IV: Résultats de l’analyse factorielle exploratoire

Facteurs
1 2 3 4
ATT1 .768
ATT2 .763
ATT3 .710
ATT4 .425
PFU5 .668
PFU1 .625
PFU2 .589
PFU3 .537
PU4 .758
PU1 .667
PU2 .612
INT2 .596
INT1 .373
Méthode d’extraction: Factorisation en axes principaux.
Méthode de rotation: Promax avec normalisation Kaiser.
a. Convergence de la rotation dans 7 itérations.

-134-
Communications de dimension globale

3.3. Analyse factorielle confirmatoire


Les résultats des deux premières étapes ont été utilisés dans
cette analyse factorielle confirmatoire qui a pour but de confirmer
le modèle à l’étude. Nous avons recouru à des indices les plus
courants tels que le rapport χ2/ddl, le GFI (Goodness of Fit Index),
le TLI (Tuckler-Lewis Index), le CFI (Compartive Fit Index) et le
RMSEA (Root Mean Square Error of Appromaxiation).
La qualité d’ajustement du modèle aux données s’avère tout
à fait satisfaisante, vu les résultats présentés dans le Tableau V.
Tableau V: Ajustement du modèle

Indices Recommandations Résultats


χ /df
2
≤3 1.54
GFI ≥ 0.9 0.91
TLI ≥ 0.9 0.92
CFI ≥ 0.9 0.94
RMSEA ≤ 0.08 0.06

3.4. Test des hypothèses de recherche


Dans cette dernière étape, nous avons procédé à une analyse
par équations structurales afin d’estimer les liens de causalité
préconisés entre les dimensions du modèle de recherche.
Considérant la significativité des coefficients de régression
standardisés (β), nous constatons que trois hypothèses formulées
sur cinq ont été validées (voir Tableau VI et Figure 2). En effet, la
PFU exerce, conformément à l’hypothèse H1, un impact positif sur
la PU avec β = 0,59, p < 0,01. La constatation similaire est trouvée
dans les travaux de rechercher de Mah & Er (2009), de Zanjani &
Ramazani (2012) et de Dizon (2016). Nos conclusions permettent
de réaffirmer ce que disent Davis, Bagozzi, & Warshaw (1989)
pour qui la PFU est un déterminant direct de la PU.
D’ailleurs, nous avons justifié le lien causal entre la PU et les
ATT. En fait, un β = 0,59, p < 0,01 montre que la perception de l’utilisé

-135-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

influe directement sur les attitudes que les apprenants adoptent


envers l’utilisation des TIC dans l’apprentissage du FLE. En d’autres
termes, les apprenants ayant des opinions favorables perçoivent
que les TIC sont un outil utile dans apprentissage du FLE. La même
vision a été constatée chez les participants aux études menées par
Itayem (2014) et par Yuen Chee Keong et al. (2016).
De plus, il est démontré dans le présent travail que les ATT
exercent un effet direct sur l’INT. Il est à rappeler que la relation
entre les attitudes et le comportement a été abordée depuis
longtemps. Nous pouvons le constater à travers la définition des
attitudes proposée par Allport (1935, cité par Karemere 2015) pour
qui «une attitude est un état mental de préparation à l’action qui
exerce une influence dynamique sur nos comportements». Elle a
été également préconisée dans la «Théorie de l’action raisonnée»
(Fishbein & Ajzen, 1975) et dans la «Théorie du comportement
planifié» (Ajzen, 1987). En ce qui concerne le domaine de la
didactique des langues, Castellotti & Moore (2002) postulent que
les attitudes organisent des conduites et des comportements
plus ou moins stables, et qu’elles sont généralement associées
et évaluées par rapport aux comportements qu’elles génèrent.
Tableau VI: Validité des hypothèses de recherche

Validation
Liens testés β S.E. C.R. P des hy-
pothèses
PU ⇔ PFU .588 .166 3.537 *** H1: Validé
ATT ⇔ PFU .104 .132 .786 .432 H2: Rejeté
ATT ⇔ PU .594 .138 4.288 *** H3: Validé
INT ⇔ ATT .583 .201 2.898 .004 H5: Validé
INT ⇔ PU .282 .187 1.506 .132 H4: Rejeté

Note: *** indique que la corrélation est significative au seuil de 1%

Pourtant, dans cette étude, l’effet direct de la PFU sur les ATT
n’a pas été prouvé (β=0,10, p>0,05). Il est à remarquer que plusieurs

-136-
Communications de dimension globale

recherches ont mis en évidence cette relation (Dizon, 2016; Yuen


Chee Keong et al., 2016; Itayem, 2014; Mah & Er, 2009). Par contre,
d’autres chercheurs sont arrivés à la même conclusion que nous,
tels que Sriwidharmanely & Syafrudin (2012), Karjaluoto, Töllinen,
Pirttiniemi, & Jayawardhena (2014) ou bien Tarhini, Hassouna,
Abbasi, & Orozco (2015)
Une autre hypothèse statistique n’a pas été validée dans
le présent travail concerne la relation entre la PU et l’INT
(β=0,28, p>0,05). Ce résultat nous amène à deux interprétations.
En premier lieu, les apprenants vietnamiens n’auraient pas
pleinement conscience des apports des TIC dans l’apprentissage
du FLE. Cela serait dû au caractère obligatoire de l’utilisation des
TIC dans les classes de FLE de notre établissement. En dernier
lieu, le manque de corrélation directe démontré dans la présente
étude confirme les remarques de Davis (1989). En fait, cet auteur
prétend que l’attitude est au mieux un médiateur partiel de l’effet
que la perception de l’utilité exerce sur l’intention d’utiliser un
système particulier.

Figure 2: Modèle structural final

4. En guise de conclusion
Les avantages des TIC dans l’enseignement/apprentissage
et particulièrement dans celui des langues étrangères ont été déjà

-137-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

largement reconnus par chercheurs, praticiens, enseignants et


apprenants. De ce fait, la considération des facteurs susceptibles
d’exercer des impacts sur l’acceptation de ces outils s’avère
indispensable afin de mieux les exploiter dans de différents
contextes pédagogiques. Les résultats de notre étude empirique
révèlent que le TAM (Davis, 1989) est un outil de mesure fiable
et valide pour des recherches scientifiques. Cependant, il est
nécessaire de tenir compte des influences du contexte sur ce
modèle théorique.
Le présent travail a encore quelques limites, mais celles-
ci seraient à même d’ouvrir des pistes pour des recherches
ultérieures. Premièrement, les participants à notre étude sont d’un
nombre plutôt limité et sont tous dans une localité déterminée
(Da Nang, Vietnam), ce qui compromet la généralisation des
résultats obtenus. Deuxièmement, dans cette recherche, nous
n’avons pas considéré, pour des raisons à la fois objectives et
subjectives, les variables externes, un constituant du TAM. De
ce fait, les impacts des facteurs tels que sexe, année d’étude,
expériences en TIC, etc. doivent être pris en compte pour avoir un
modèle plus complet qui pourrait s’adapter à tous les contextes
d’enseignement/apprentissage du FLE au Vietnam, que ce soit
universitaire ou scolaire.

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-141-
3. Quelques didactiques de classe actuelles
en Asie du Sud-Est
RECHERCHE INTERUNIVERSITAIRE RÉGIONALE 2019-2020
QUELLES DIDACTIQUES A L’UNIVERSITE ACTUELLEMENT?
QUELQUES ETUDES DE CAS (1) - PARTIE VIETNAMMIENNE

PHAM Duc Su, Nha Trang (Partie 1)


DAO Anh Huong et TRAN Xuan Lam (Partie 2)
Ecole supérieure de Génie civil, Hanoi
TRAN Dinh Binh (Partie 3)
Université de Langues et d’Etudes Internationales
- Université Nationale du Vietnam à Hanoi (ULEI-UNH)

Résumé:
Comment le français est-il enseigné actuellement dans les universités de la
région? Quelles didactiques sont mises en place? Est-il possible d’identifier une
«didactique de classe» particulière à un enseignant? En voilà des questions de
la 1re phase d’une recherche interuniversitaire pour une meilleure connaissance
et compréhension des enseignements/ apprentissages du français au sein des
universités en Thaïlande et au Vietnam actuellement.
Cette connaissance permettra de voir ce qui pourrait être fait pour ré-/in-
nover aussi bien l’enseignement/apprentissage du français général/français langue
étrangère (FLE) que la formation en français au biais du français sur objectifs
spécifiques (FOS) dans notre région d’Asie du Sud-Est.
Mots-clés: didactique de classe - méthodes de français - méthodologies -
stratégies et techniques de classe

Partie 1
Introduction
Suite à l’affirmation par P. MARTINEZ (2018: 7) qu’ il y a loin
entre la didactique qui procède d’une réflexion scientifique; celle
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

qui entre au fil des réformes officielles dans les institutions; celle
que les éditeurs proposent aux professionnels; et, au bout de la
chaîne, la didactique de la classe, celle qui se fait au quotidien
et ne se montre que peu au public un groupe de chercheurs
thaïlandais et vietnamiens a essayé d’identifier ces didactiques
de classe dans les deux pays.
Objectifs de la recherche
L’on sait que la grande mission de l’université est de
former des spécialistes - dont les enseignants de langues - et
des travailleurs de haut niveau. Aussi, connaître les pratiques
didactiques en milieu universitaire pourra mener à une meilleure
compréhension de l’enseignement/apprentissage du français
dans d’autres milieux (établissements scolaires, centres de
langues...) et de là, réfléchir à comment rendre celui-ci plus
attractif et plus efficace, en vue de contribuer à la rénovation de
l’éducation nationale, mouvement en marche actuellement en
Thaïlande et au Viêtnam.
La recherche relatée ci-dessous est de nature exploratoire.
Il s’agit d’identifier et de décrire des pratiques didactiques mises
en place effectivement «au quotidien» par des enseignants
universitaires dans leurs classes de français. Habituellement,
les universités en Asie du Sud-Est donnent un enseignement
ou une consolidation du français pendant les deux 1res années
avant de passer à la formation aux spécialités en français
(linguistiques, traduction-interprétariat...) ou aux différents
métiers (enseignement, génie civil, tourisme, hôtellerie-
restauration, services aériens...) dans les années suivantes.
Les questions de recherche
Pour une recherche complète, nous nous sommes posé les
questions suivantes:
1- Quelles pratiques didactiques sont mises en place
effectivement par les enseignants universitaires thaïlandais

-144-
Communications de dimension globale

et vietnamiens dans leurs classes de FLE ou de FOS? Y a-t-


il des constantes qui permettraient de penser que ce sont des
«didactiques de classe», c’est-à-dire des didactiques propres
à un enseignant et/ou à un groupe d’enseignants - lorsqu’une
mise en parallèle des pratiques est effectuée entre différents
enseignants?
2- Quelles pourraient être les origines et/ou raisons de ces
didactiques de classe?
3- Quels impacts ou répercussions ces didactiques de
classe laisseraient-elles sur l’enseignement/apprentissage? sur
les apprenants?
4- Qu’est-ce qui serait à garder ou à changer si l’on veut
réformer/innover l’enseignement/ apprentissage du français ou
repenser la formation des enseignants dans les pays concernés
et/ou dans la région d’Asie du Sud-Est?
Dans cette étude, pour vérifier la faisabilité d’un projet qui
pourrait être de plus grande envergure - nous espérons qu’il en
aura une dans l’avenir - nous nous limiterons à la 1re question. Au fil
des descriptions, quand c’est nécessaire pour la compréhension,
nous signalerons quelques répercussions de ces didactiques de
classe sur l’apprentissage et sur les apprenants.
Méthodologie de recherche
A- Fondements théoriques
Pour étudier les didactiques de classe, nous nous appuyons:
1- Sur la description des grandes méthodologies d’enseignement,
approches et perspectives didactiques par Cuq J.-P. et Gruca I. (2003:
234-250) et sur Un cadre européen commun de référence pour
les langues: apprendre, enseigner, évaluer, (CECR) du Conseil de
l’Europe (2001: 11-15) que nous résumons dans ce tableau:

-145-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Méthodologies,
Principaux
leurs fondements Grandes procédés ou
no théoriques et/ caractéristiques techniques de
ou manuels classe
représentatifs
1 traditionnelle - enseignement de la - écrit: support
ou Grammaire - langue écrite normative, principal de
traduction la littérature comme l’enseignement/
cible de l’apprentissage apprentissage
Lecture-traduction
- grammaire explicite - utilisation fréquente
≈enseignement des
avec utilisation du de la langue
langues mortes:
métalangage maternelle (LM)
latin, grec
- recours à l’explication - exercices de
ex-cathedra et à la traduction (thème,
traduction en LM version)
2 Directe ≈ - priorité à l’acquisition - explications avec
enseignement des de l’oral gestes, mimiques,
langues vivantes - apprentissage du dessins et/ou
à partir de 1901 vocabulaire courant exemples en LE,
et de la grammaire de interdiction de la LM
base, de façon implicite, et de la traduction en
inductive classe
- l’écrit est l’auxiliaire de - jeux de questions-
l’oral réponses; saynètes
et dramatisation
- approche globale
du sens des textes;
prévalence de la
compréhension globale
3 Audio-orale - langue orale avec - utilisation du
The Army dialogues fabriqués, magnétophone,
Specialized progression rigoureuse laboratoire de
Training Program - grammaire inductive langues
(ASTP, 1942-1943) basée sur l’analyse - exercices de
- avec comme contrastive, acquisition répétition et
support le des structures pas à pas exercices structuraux
behaviorisme: (les pattern drills) - évitement au
Stimulus-Réaction- - création des plus possible des
Renforcement automatismes à interférences
travers l’imitation et la
mémorisation
- écrit: peu abordé

-146-
Communications de dimension globale

4 structuro-global - langue orale - leçon à 5 moments:


audio-visuelle en situation de présentation,
(SGAV, 1960-1980) communication explication;
- 1954: Le français quotidienne; dialogues répétition; réemploi-
fondamental 1er fabriqués, progression exploitation;
degré (1475 mots) rigoureuse transposition
et 2nd degré (1609 - grammaire inductive - utilisation du
mots); et implicite de la parole; magnétophone et du
- 1960: Voix et vocabulaire de base film fixe; utilisation de
images de France - le sens avant la forme la paraphrase pour
la présentation et
-1972: De vive voix - apprentissage de l’écrit
l’explication
différé (après 60 heures
de cours) - exercices
structuraux pour
fixer et consolider
les structures des
dialogues
- jeux de rôle
et activités de
dramatisation pour le
réemploi

5 Communicative - la langue dans sa - utilisation des


Un niveau-seuil dimension sociale et documents
(1976) culturelle authentiques
- appropriation des et du matériel
4 compétences complémentaire pour
communicatives, selon mieux cibler une
des besoins langagiers compétence et élargir
prédéfinis l’acquisition de la
culture
- grammaire notionnelle-
fonctionnelle enseignée/ - simulations,
acquise à travers des jeux de rôle pour
actes de parole l’acquisition d’une
compétence de
- écrit réhabilité dès le
communication
début de l’apprentissage
- pratiques et
- centration sur
démarches
l’apprenant, considéré
diversifiées,
comme sujet et acteur
hétérogènes
de l’apprentissage
(d’où l’appellation
Approche
communicative)

-147-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

6 perspective - l’apprenant est en - pédagogie par


actionnelle même temps l’utilisateur simulation et par
de la langue apprise et projets
un acteur social - utilisation des
CECR, 2000
- réalisation des TICES (multimédias,
tâches en mobilisant Internet, websites)
des compétences - travail de groupe,
générales et apprentissage
communicative collaboratif et
- développement de la solidaires
compétence plurilingue
et pluriculturelle
- centration sur le
groupe

2- Sur les deux postulats suivants:


a/ La didactique est définie comme l’étude des «phénomènes
de transmission et d’appropriation complexes dans leurs origines et
dans leurs effets» (MARTINEZ, 2018: iii) des savoirs. Dans notre cas, il
s’agira de voir comment le FLE ou le FOS est enseigné - et approprié
- dans les classes, à travers la transmission et l’appropriation;
- Des 4 compétences dites communicatives: compréhension
orale (CO) - compréhension écrite (CE) - expression/production
orale (EO/PO) - expression/production écrite (EE/PE);
- Des compétences linguistique et langagières, avec comme
composantes: le lexique - la prononciation/diction - l’orthographe
- les grammaires de phrase et de texte;
- Des composantes référentielles et socio-culturelles
(connaissances générales, connaissances en civilisation et en
cultures savantes, quotidiennes);
- Et enfin des compétences stratégiques: stratégies, techniques,
procédés d’enseignement et d’apprentissage.
b/ Nous définissons la «didactique de classe» comme façon
d’enseigner particulière à un enseignant, laquelle pourrait être
identifiée à travers:

-148-
Communications de dimension globale

- Des connaissances et la maîtrise par l’enseignant des


théories didactiques «officielles», c’est-à-dire méthodologies/
approches, stratégies, techniques, procédés... prescrits ou
proposés par l’institution, par la recherche ou par la méthode
utilisée (P. MARTINEZ, 2018: 7);
-Des choix et applications des approches et/ou procédés par
l’enseignant dans ses cours - que ce soit de manière consciente
ou non -, au biais de ses «bricolages» ou de son éclectisme;
- Ses savoirs et savoir-faire pédagogiques venant des
théories éducatives et courants pédagogiques (behaviorisme;
constructivisme; socioconstructivisme...);
- Ses compétences communicatives et professionnelles
manifestées à travers ses explications, stratégies et/ou techniques
pour communiquer, expliquer/étayer, organiser, gérer, guider,
motiver, encourager, corriger, évaluer... l’apprentissage;
- L’utilisation effective du matériel didactique: manuel, tableau,
illustrations iconographiques et/ou équipements technologiques.
B- Etude du terrain
N’ayant ni subventions ni moyens administratifs et autres
pour mettre sur pied une recherche à grande échelle dans un
milieu d’accès plutôt difficile que les universités de nos pays,
nous devions nous contenter pour le moment de réaliser une
étude exploratoire réduite. Ainsi, notre échantillon comprend:
- Des enseignants qui se sont portés volontaires pour notre
recherche. Nous étudions en toute discrétion leurs pratiques
didactiques et pédagogiques en classe réelle de FLE ou de FOS,
avec leurs propres étudiants;
- Des universités dans lesquelles les membres de l’équipe
travaillent ou ont des relations personnelles. Nous avons réalisé
notre étude dans 2 universités au Viêtnam: l’Ecole Supérieure

-149-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

du Génie Civil (ESCG) et l’Université des Langues et des


Etudes Internationales (ULEI-UNH), toutes les deux à Hanoi. En
Thaïlande, ce sont 3 universités, Thammasat dans la capitale
Bangkok, Phayao et Mahasarakham en province, qui ont participé
à cette recherche.
Les données comprennent 3 volets suivants:
- la leçon et la méthode de français utilisées dans le
cours observé et/ou filmé (le à-faire, support du cours et de
l’enseignement/apprentissage);
- une à deux séance(s) de classe filmées de chaque enseignant
(le fait ou travail effectif en classe);
- interview(s) de l’enseignant sur son/ses cours filmé(s), ses
représentations didactiques et pratiques de classe (le dit).
Ces données sont recueillies et analysées selon des protocoles
et grilles prédéfinis par le groupe de chercheurs (V. exemples en
Annexes).
La réalisation de la recherche
Le recueil des données a été réalisé dans les 2 pays entre
mars et mai 2019. Ensuite, entre mai et septembre, les données
ont été dépouillées et analysées pour identifier les didactiques
de classe de français. Les recueils de données, dépouillements
et analyses ont été effectués séparément par 3 groupes de
chercheurs, 1 du côté thaï et 2 du côté vietnamien suivant les
modalités préfixées. Les échanges, discussions et mises en
commun se sont faits par mail, ce qui n’était pas toujours aisé
à cause de l’éloignement géographique et des nombreuses
obligations professionnelles des chercheurs.
Nous présentons ci-dessous les premiers résultats de deux
cas étudiés par deux chercheurs vietnamiens à l’ESCG (partie 2)
et à l’ULEI-UNH (partie 3).

-150-
Communications de dimension globale

Partie 2: Etude du cas d’enseignement du FLE à l’Ecole Supérieure de


Génie civil (ESGC) à Hanoi

1. L’enseignement/apprentissage du français à l’ESGC


A l’ESGC, les cours de FLE préparent à l’apprentissage du
français de spécialité en construction et architecture à partir de
la 3e année. Il y a la filière normale de 4 ans et le Programme de
Formation d’Ingénieurs d’Excellence (PFIEV). Les étudiants de la
filière normale ont 15 heures et 30 minutes de français par semaine
pendant la 1re année et 7 heures et 30 minutes (3 séances) par
semaine pendant la 2e. Quant aux étudiants du PFIEV, ils n’ont que
7 heures et 30 minutes de français par semaine pour les 2 premières
années, mais ils ont un an de plus en français en 5e année.

2. Les classes de FLE


Le 1er cours filmé était une classe de 15 étudiants, et le 2e une
classe de 20. Ils sont âgés de 19 ans, en 2e année universitaire.
Ce sont deux groupes assez homogènes sur le plan physique,
psychologique et sociologique. Sur le plan d’appropriation,
les groupes sont hétérogènes au niveau d’acquisition et de
pratique du français: la motivation et le degré d’autonomie dans
l’apprentissage ne sont pas les mêmes, beaucoup d’étudiants ne
possédant pas encore de méthodes d’apprentissage efficaces.
Concrètement,
- Le Cours 1 (désormais C-1) de 3 heures et 05 minutes a
été effectué le 11 avril 2019 dans l’après-midi, avec une quinzaine
d’étudiants, tous hommes, de la filière de construction. Les
contenus du Module 3, Leçon 10, pp. 72-73 sont: Le subjonctif
(1) des verbes réguliers des 3 groupes et le subjonctif (2) de 7
verbes irréguliers (avoir, être, faire, aller, savoir, vouloir, pouvoir)
avec le texte déclencheur «D’accord, pas d’accord!»;
- le Cours 2 (C-2) a été réalisé le 18 avril 2019, de 3 heures et
05 minutes aussi, avec une vingtaine d’étudiants, dont quelques

-151-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

jeunes filles, de la filière de construction du PFIEV. C’était le


Module 5, Leçon 17, pp. 121-123 avec l’emploi de Si + Imparfait -
Conditionnel présent et le texte «Dur, dur, les castings!».
Les deux cours ont été donnés par un même professeur,
avec la méthode Scénario 2 qui couvre le niveau DELF-A2 et
aborde le niveau DELF-B1 du CECR.

3. La pratique didactique de l’enseignant de l’ESGC


En observant les classes et les deux vidéos de cours, nous
identifions les 4 grands traits suivants qui semblent dominer la
pratique didactique de classe de notre enseignant (désormais H-1).
3.1. La grammaire comme support de l’enseignement/apprentissage
Dans les deux classes de FLE, H-1 a suivi la même
démarche: il a travaillé la grammaire avant de passer à la lecture-
compréhension de textes. Dans les deux cours, après la mise
en train avec des échanges sur des thèmes familiers ou les
actualités (matchs de foot, examens, incendie de Notre-Dame
de Paris...), H-1 est passé tout de suite aux points de grammaire:
C-1: Avant de faire la compréhension du texte, on se rappelle
l’emploi du subjonctif.
ou les a utilisés pour faire une leçon de grammaire:
C-2: Notre-Dame de Paris a été incendiée. Manchester City
a été battu. Est-ce qu’on peut faire une hypothèse pour que cet
événement ne se passe pas?
[..]
«Si l’incendie ne se passait pas, la cathédrale ne serait pas
détruite» [...] C’est le contenu principal de la leçon aujourd’hui.
L’hypothèse: Imparfait-Conditionnel présent.
C’étaient de vraies leçons de grammaire. Concrètement,
pour le C-1, si H-1 avait annoncé un rappel, il a fait en réalité un

-152-
Communications de dimension globale

travail grammatical complet, avec vérification de la conjugaison,


à l’oral:
Comment fait-on pour conjuguer les verbes au subjonctif?
[à] Quel temps? Présent? Passé?)
puis demandant des étudiants au tableau pour un exercice:
On a appris ce mode, on n’a pas le temps de refaire, je vous
appelle... (3 étudiants au tableau). Et les autres, vous faites vous-
mêmes et observez...
suivi du rappel de l’emploi du mode subjonctif:
On emploie les verbes au subjonctif pour exprimer un
souhait, une inquiétude et une nécessité
pour finir avec quelques exercices au brouillon et corrigés
collectivement:
Maintenant je vous demande de réfléchir et conjuguer les
verbes au subjonctif, avec votre choix. Je vous donne une à deux
minutes!
De même, dans le Cours 2, le travail sur Si + Imparfait-
Conditionnel présent (expression de l’hypothèse dans le présent)
a été effectué au complet avec présentation du point grammatical,
explications et exercices, avant la lecture-compréhension du
texte déclencheur «Dur, dur les castings!». Ce travail a duré toute
la 1re partie du cours (1h environ), avec renvoi à la maison des
exercices (Ex. 10,11) qui n’ont pas pu être faits en classe.
Cette façon de faire est partie à la fois de la méthode: «A ce
stade de l’apprentissage - Document B, voir la rubrique ‘Pause
langue’, p.75 du livre de l’élève: les exercices 5, 6, et 7 sur le
superlatif», et de l’initiative de H-1. Ce dernier a enseigné le
subjonctif au lieu du superlatif proposé par le Guide pédagogique
à la p.85. Il n’a pas suivi l’habitude commune de commencer une
leçon par un dialogue/texte puis d’utiliser ces dialogues ou textes

-153-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

pour les productions orales ou écrites. Par ailleurs, dans la suite,


les explications grammaticales ont été reprises par H-1 pour
expliquer le texte déclencheur «Dur, dur les castings!»:
Si je devais donner un conseil, je dirais qu’il faut accepter le
regard des autres»...
Si l’on observe, il y a l’imparfait et le conditionnel présent. Ça
veut dire une hypothèse, en réalité ce n’est pas ça, elle ne peut
pas donner de conseil.
3.2. La compréhension écrite est une lecture aidée et non autonome
Le 2e grand trait concerne l’enseignement de la CE. Deux
caractéristiques peuvent être identifiées dans la pratique
didactique de H-1. D’abord, celui-ci semble préférer une lecture-
compréhension collective et aidée au lieu de laisser les étudiants
lire individuellement ou en groupe, avec les guidage et corrections
nécessaires. Comme exemple, la démarche de lecture du
document proposé dans le C-1 a été comme suit:
+ Entrée dans le document avec des questions sur la
thématique et le contenu global du type:
- On a compris les mots nouveaux? Quel est le problème
principal de ce texte?
- Qu’est-ce que le téléchargement illégal?
- Dans le texte, il y a...? L’auteur parle...?
- Qu’est-ce que les gens téléchargent...? Combien de personnes
qui disent...?
- Le garçon, il est pour ou contre? Et la fille? [...]
pour terminer avec: «Je fais un petit résumé du texte!»,
résumé réalisé par H-1 lui-même!
+ Ensuite, c’était la lecture à haute voix. H-1 a demandé à
plusieurs étudiants de lire le texte, chacun une partie, avec cette
consigne:

-154-
Communications de dimension globale

Quelques étudiants lisent à haute voix le texte avant qu’on


ne réponde aux questions!
+ Enfin, H-1 est passé aux exercices 8 à 12, lesquels sont des
activités que le manuel propose pour guider la compréhension du
texte. Là aussi, c’était du travail collectif. H-1 a lu les consignes
et les questions, les a expliquées et a demandé les réponses au
lieu de laisser les étudiants travailler seuls ou en groupes et d’en
vérifier les résultats...
Le même schéma se retrouve dans le C-2:
+ Entrée dans le texte avec des questions sur le mot-thème:
casting
Le casting, c’est un terme anglais. Ça veut dire quoi? En
vietnamien c’est quoi?
[...]
Est-ce que vous pouvez expliquer le mot casting en français?
Comme le document est plus long et plus difficile, H-1 est
passé tout de suite au guidage avec des questions sur Qui? quoi?
Vous observez le document. Y a combien de personnes qui
parlent? Deux filles?
[...]
Et si vous lisez un peu, on parle de quelle émission dans ce
document?
Puis, il a lu lui-même les deux textes, a posé des questions
pour aider à faire une hypothèse de sens:
Et oui, en faisant la lecture, est-ce que vous pensez que les
deux ont réussi ou échoué?
Peut-être vous n’avez pas compris tout le texte, mais avec
la vraie lecture, vous pensez que les deux ont réussi le casting?
Oui ou non? (2 fois) Non?

-155-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

avant de demander une lecture personnelle pour «l’idée


générale du texte» :
Et maintenant je vous laisse, pas beaucoup, 5 minutes, pour
faire la lecture personnelle sur place. Essayez de comprendre
l’idée générale du texte.
Il est à souligner dans cette consigne que cette lecture
individuelle pour «l’idée générale» serait à considérer comme
le renforcement de ce qui a été compris globalement avant,
car H-1 avait déjà fait comprendre au travers des questions et
explications ce qui était arrivé aux principaux personnages: le
garçon et la fille ont tous les deux échoué à la sélection des
acteurs... Cette consigne montre que H-1 était conscient que 5
minutes de lecture ne suffisaient pas et qu’une compréhension
du texte en entier serait faite après, collectivement:
[...] Essayez de comprendre l’idée générale du texte. Et pour
les mots, les expressions difficiles, on ne les explique pas. [...]
Ensuite, dans la phase de la lecture-compréhension détaillée,
la démarche était à peu près similaire à celle dans C-1. H-1 a lu
les textes phrase par phrase, demandant ou faisant expliquer le
sens et emplois des mots et expressions. Regardons cet exemple
du 1er texte lu pendant le C-2:
«J’ai tenté ma chance sur le casting de Star de demain»... Tenter
la chance, ça veut dire quoi?
[...]
«On nous a fait attendre des heures sous la pluie, puis, quand
mon tour est arrivé, j’étais avec une dizaine d’autres candidats
dans une salle fermée»... Ça va? c’est-à-dire? Comment est la
condition de ce concours? [...]
Pourquoi? Parce qu’il y avait de la pluie, qu’il faisait chaud,
quoi d’autre?

-156-
Communications de dimension globale

Et «des heures sous la pluie». Je pense que vous avez


compris la phrase. C’est bon?
etc.
Enfin, à la fin de l’heure, les questions du manuel sur les
textes ont été renvoyées à la maison, H-1 les considérant comme
un approfondissement:
Essayez de répondre aux questions de l’activité… parce que
c’est l’approfondissement.
Ainsi, en ce qui concerne les textes dans le manuel, les
étudiants n’ont pas à les lire de manière autonome, mais à
répondre aux questions sur le thème, sur le vocabulaire et le sens
des phrases. Et si un guidage de la CE se fait dans la phase de
compréhension globale, celui-ci devient une aide pas à pas dans
la lecture-compréhension détaillée, toujours avec un seul outil:
questions-réponses. Cette technique de lecture semble montrer que
H-1 ne fait pas tout à fait confiance aux différentes activités que le
manuel propose pour permettre la compréhension des documents
écrits. Il lui paraîtrait plus rassurant de tout expliquer de manière
très détaillée. Même les activités d’aide à la compréhension des
textes du manuel (Activités 8 à 12 dans le C-1) ont été conduites
sous forme d’explications phrase par phrase.
3.3. La principale technique de classe: les explications
de l’enseignant plutôt que la mise en place des activités
La technique d’enseignement principale de notre H-1, c’étaient
les explications, lesquelles ont été utilisées tout au long des cours
et étaient très variées, allant des moyens habituels comme:
- la définition accompagnée éventuellement de la traduction
en LM (vietnamien):
Avec psychologue, la psychologie c’est la science qui cherche
à comprendre la pensée des gens - Tâm lý học

-157-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- la paraphrase:
le casting, c’est-à-dire on fait un film, on fait, on organise un
programme d’émission, on organise une séance pour choisir les
acteurs ici
- des mots équivalents ou synonymes:
Epreuve, c’est le synonyme de l’examen, épreuve c’est un
examen.
- des traductions, des paraphrases et synonymes en LM
Star de demain = Sao mai, Sao của ngày mai. Critiquer =
Chỉ trích, phê bình...
- la famille de mots:
Tendu/Tension; Impression/impressionné
- la réalité de la classe ou des étudiants:
Une salle fermée, un cauchemar
ou l’actualité:
Il y a une version vietnamienne qui vient de se terminer la
semaine dernière à la télévision. Le concours de Star de demain
[...]. En vietnamien c’est Sao mai, Sao của ngày mai.
- des connaissances référentielles des étudiants, par exemple
pour «île» :
Ile Cát Bà, île Phú Quốc...
- des gestes...:
à l’utilisation de ce qui a été appris en grammaire, y compris
la métalangue:
Etre sélectionné: Voilà le verbe. Sélectionner est à la forme passive.
«Il faut accepter le regard des autres pour avoir une chance de
réussir»... Je pense que grammaticalement et sémantiquement,
ce n’est pas difficile.

-158-
Communications de dimension globale

Ces moyens, H-1 les a utilisés seuls mais plus souvent il les
a combinés entre eux, comme dans cet exemple où la traduction
en LM est combinée avec des connaissances grammaticales:

[...] Donc, critiquer c’est ‘chỉ trích, phê bình’. Alors, être
critiqué c’est la voix passive.

3.4. Interactions de préférence entre enseignant et étudiants,


peu d’interactions entre étudiants

D’abord, en regardant de plus près les vidéos, il s’avère


que c’est l’enseignant qui a eu le plus de parole. Dans le C-2,
il y a eu environ 66 répliques des étudiants sur 135 phrases de
l’enseignant pour 3 heures et 05 minutes de cours.

La plupart du temps, les interactions allaient dans le sens


enseignant-étudiants. Elles se passaient entre l’enseignant et le
collectif de la classe et/ou apprenant individuel plutôt qu’entre
l’enseignant et des/plusieurs étudiants à la fois. Cette forme
d’interaction enseignant-étudiants a été privilégiée dans toutes
les étapes du cours. La PO de la 3e partie du C-1, Activité 13, p.
73 par exemple, n’a pas été réalisée sous forme de discussions
ou de jeux de rôle comme la méthode le suggère: «Et vous,
quelle est votre opinion sur le problème du téléchargement?
Echangez par deux.», mais à travers des questions-réponses
entre l’enseignant et les étudiants:

On va passer tout de suite aux questions. Qu’est-ce que


vous pensez du téléchargement illégal? [...]

Et toi, tu es pour ou contre? [...]

T.., qu’est-ce que tu penses du téléchargement illégal?

etc.

-159-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

4. Quelques premières remarques sur les cours


L’analyse de ces 2 cours nous amène à penser que:
- la connaissance de la grammaire et du sens des mots
semble rassurer l’enseignant plus que les autres moyens pour
faire comprendre la leçon. La plus grande partie des cours a
été consacrée à la vérification et/ou explication des savoirs
linguistiques. Il n’y a pas eu d’activités communicatives comme
les simulations, jeux de rôles, discussions en groupes... Quand
le manuel propose des outils moins linguistiques pour la CE
(tableaux, exercices d’appariements, de classements...), pour
des PO ou PE, ceux-ci ont été aussi exploités sous la guidance
de l’enseignant, et le travail effectué a pris des formes plutôt
linguistiques: questions-réponses sur le sens du vocabulaire ou
des tournures grammaticales. Surtout, il y a eu peu de réutilisation
effective de ces connaissances par les étudiants pour s’exprimer...
- la communication spontanée existait dans les cours, mais
elle servait plutôt comme mise en train au début des cours, à travers
des échanges sur les matchs de foot, examens, événements
d’actualités... Après, une fois entré dans la leçon, c’était la
communication didactique autour des points grammaticaux et
lexicaux de la leçon, et celle-ci se faisait essentiellement sous
forme de questions-réponses entre enseignant et individuels/
groupe-classe. Les activités de pratique langagière ou d’échanges
entre étudiants n’ont pas été organisées.
Cette façon de faire amène à penser que la pratique
didactique personnelle de H-1 se rangerait difficilement dans la
perspective actionnelle que préconise la méthode Scénario 2.

-160-
Communications de dimension globale

Partie 3: Etude du cas d’enseignement du FLE à l’Université de Langues


et d’Etudes Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoi
(ULEI-UNH)

1. L’enseignement du français au Département de français


de l’ULEI-UNH
Le cours de FLE filmé a eu lieu le 4 avril 2019 et a duré 2
heures, avec 25 étudiants (23 jeunes filles et 2 jeunes gens) de
niveau DELF-A2 en 1re année de français. C’était un cours de
compréhension du texte «Le tourisme en couleurs», 3e séance du
Dossier 11 «Vie culturelle» du Cours de français général.
La démarche en classe de l’enseignante a été comme suit:
+ Mise en train avec la correction du devoir fait à la maison:
«Racontez un film préféré». L’enseignante a appelé deux étudiantes
à venir présenter oralement leur travail. Après leur exposé, les
étudiants les ont interrogées sur le contenu, les personnages du
film, leurs relations, les prix obtenus. Les échanges se sont passés
de façon naturelle et conviviale sous la supervision de l’enseignante,
qui posait elle aussi des questions en tant qu’auditrice. Cette
activité orale a duré 27 minutes avec 83 tours de parole. Enfin,
l’enseignante a ramassé les copies pour la correction à domicile
avant de passer au texte Le tourisme en couleurs.
+ Compréhension et exploitation du texte: L’enseignante a
écrit le titre du texte au tableau et à partir des questions, elle
a incité les étudiants à s’exprimer librement sur les cinq types
de tourisme avec leurs propres mots et expressions. Après cet
échange verbal d’une demi-heure, l’enseignante a demandé
d’observer la photo, a fait lire le texte à haute voix et a expliqué
en français les mots nouveaux. Puis elle a demandé de repérer
le type de tourisme correspondant à chacune des 5 personnes
du texte. Enfin, elle est passée à l’exercice lexical 2 - trouver
l’adjectif dérivé d’un nom - et a terminé la séance par une PO:
les étudiants argumentent leur choix du type de tourisme.

-161-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2. La didactique de classe de l’enseignante (désormais H-2)


Il s’agit maintenant d’identifier la/les approche(s)
méthodologique(s) et des techniques mises en place par
l’enseignante pour transmettre les connaissances et compétences
proposées dans le cours. Pour faciliter le travail d’analyse, nous
avons transcrit et numéroté les paroles et actes réalisés pendant
le cours (codage P pour enseignante et E pour étudiants, précédé
du numéro indiquant l’ordre d’apparition dans la vidéo), et nous
les avons étudiés individuellement et/ou en les croisant entre
eux. L’étude approfondie de la vidéo laisse apparaître les grands
traits suivants de la didactique de H-2.
2.1. Priorité aux interactions verbales, à la communication spontanée,
la libre expression et à l’imagination des étudiants
Dans ce cours, l’accent a été mis sur l’expression et les
interactions verbales entre H-2 et ses étudiants, et entre les étudiants
eux-mêmes, à travers des consignes qui «obligent» à réagir:
3P: Les autres, quand elle [Lan] présente son film préféré, vous
devez écouter et noter les informations et poser des questions.
Ça va? Oui? Après, je peux vous demander de présenter encore
une fois le film qu’elle a présenté.
et des questions qui s’adressaient à la fois aux étudiants
particuliers: «C’est quoi?» (8P en réplique à 8E); «Au Japon
seulement?» (13P suite à 18E); à toute la classe: «Vous avez des
questions sur son travail?» (4P); ou «Ça va, les autres? D’autres
questions?» (6P)... pour inciter les apprenants à parler.
H-2 a réussi ainsi à installer des échanges spontanés entre
les apprenants, comme dans ces suites d’échanges verbaux
ininterrompues entre les étudiants eux-mêmes: 3E à 6E; 12E
à 16E; 102E à 103E; 104E à 105E. Même ses explications du
vocabulaire et du texte ont été faites à travers des interactions,
souvent brèves, avec la classe et/ou avec des étudiants
particuliers, comme dans cet exemple:

-162-
Communications de dimension globale

83P: [...] Regardez la photo, qu’est-ce que vous voyez?


Qu’est-ce que vous voyez?
Hanh, tu observes la photo et qu’est-ce que tu vois dans la
photo?
92E: Le désert.
84P: Le désert et quoi encore?
93E: Une personne...
85P: C’est une femme, une personne, un homme? D’après
toi, qu’est-ce qu’il fait?
Qu’est-ce qu’il est en train de faire?
94E: Il est assis et il voit...
2.2. L’enseignante exploite les activités proposées
dans le cours à sa manière
L’activité de CE du texte «Le tourisme en couleurs» a été
traité de la manière suivante:
+ H-2 a demandé aux étudiants de deviner livre fermé, le
contenu (Le tourisme en couleurs, d’après vous, on parle de
quoi?) et le sens des mots (des couleurs) du texte à lire:
38P: [..] Alors ne lisez pas! ne lisez pas! Fermez votre livre! Le tourisme en
couleurs, d’après vous, on parle de quoi? Dans le texte, la couleur, c’est
quoi? Vous devinez par exemple, si je dis, si on parle du vert, le vert
ça va?

Ce travail peut être pris comme l’étape préliminaire à


une lecture-émission d’hypothèses de sens - et a duré assez
longuement (15 minutes) avec:
- Des explications, vérifications et élargissements de la
compréhension des mots et des contenus proposés par les
étudiants eux-mêmes:
54P: Thủy cung, c’est quoi? On ne parle pas vietnamien mais en français!

-163-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

64E: Aquarium, il y a beaucoup de poissons, de tortues


55P: On ne dit pas au aquarium mais à l’aquarium, il y a beaucoup de
poissons, de tortues, quoi encore? C’est comme à la mer? C’est
naturel? L’aquarium c’est naturel?

- Des apports et/ou vérifications des connaissances culturelles


par l’enseignante:
. pour le tourisme jaune:
74P: [on pense] à la pagode de Ba Vàng au Vietnam, à la pagode d’or en
Thailande

. pour le tourisme gris:


81P: [tu penses] à Londres en Angleterre? Pourquoi?

+ Ensuite, c’était l’observation des photos dans le manuel:


83P: [...] Alors maintenant ouvrez votre livre à la page 251, maintenant vous
observez la photo! [...] Qu’est-ce que vous voyez? Hanh? Tu observes
la photo et qu’est-ce que tu observes dans la photo?

et la lecture à haute voix:


86P: [...] Lisez le texte, Hà!

H-2 a demandé à plusieurs étudiants de lire à haute voix le


texte, chacun une partie. Et la même démarche de questions-
réponses pour expliquer, vérifier le sens des mots et le contenu
du document a continué.
+ Enfin, H-2 est passée à la compréhension du texte
proprement dite. Elle a fait d’abord lire la consigne, en vérifier la
compréhension, puis a laissé aux étudiants 5 minutes de lecture
personnelle. Après, elle est passée à la correction collective,
toujours avec les questions-réponses:
116P: Choisissez le type de tourisme! Il faut en choisir un. Je vous donne 5
minutes. Ça va?

Ça va? Ça y est? Vous avez fini? La première personne,


Trinh, tu peux lire la description de la première personne? ...
129E: Elle aime se reposer...

-164-
Communications de dimension globale

117P: Tu choisis quel type de tourisme pour Jules?

Ainsi, les étudiants n’ont pas eu à lire-comprendre de


manière autonome, mais à répondre aux questions sur la
thématique, le vocabulaire et le sens des phrases. Le guidage de
la CE se fait dès le début et est devenu une aide régulière pour
la lecture-compréhension détaillée, toujours avec un seul outil:
les questions-réponses. La CE en classe est en fait une lecture
aidée, orale, plutôt que des lectures silencieuses individuelles
des étudiants avec le guidage de l’enseignante.
Quant à l’exercice 2 de l’activité de CE: repérer dans le texte
les adjectifs correspondant à 4 mots campagne, ville, fleuve, eau,
H-2 l’a résolu aussi collectivement et très rapidement, avec des
questions-réponses:
135P: Il nous reste l’activité 2, on peut faire vite, vous allez trouver les adjectifs
correspondant aux noms donnés. Campagne c’est…?
148E: Campagnard.
136P: Campagnard. La ville?

Avant de terminer la leçon, H-2 a entamé l’expression orale


sur le type de tourisme préféré par un jeu de questions-réponses
entre elle et quelques étudiants pour les sensibiliser à la PE sur les
raisons de leur choix du type de tourisme préféré. Cette PE faisant
suite à la CE durera une demi-heure en classe après la pause.
139P: Et vous, vous choisissez quel type de tourisme, c’est-à-dire quelle
couleur? Lan?
152E: Je choisis le tourisme bleu.
140P: Le tourisme bleu?

Cette modalité de travail montre que notre H-2 privilégie


particulièrement l’oral, surtout la PO. Tout passe par là. La correction
des devoirs écrits au début de la séance, les exercices lexicaux -
les adjectifs dérivés -, la conduite de la compréhension de texte...
tous ont été menés à l’oral à travers des échanges verbaux entre
l’enseignante et les étudiants.

-165-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2.3. La principale technique de classe: le jeu de questions-réponses


Comme H-2 s’est appuyée fortement sur l’oral, le jeu de
question-réponse a été massivement utilisé comme principal
outil de classe et dans toutes les étapes de la leçon, En fait,
celui-ci sert à:
- Sensibiliser la classe au thème du texte, à provoquer,
développer l’imagination potentielle, à gérer l’expression orale et
les échanges verbaux des étudiants:
83P: Le soir, la nuit, c’est l’hiver et pourquoi pas le tourisme à Dalat? Alors
maintenant ouvrez votre livre à la page 251, maintenant vous observez
la photo! Regardez la photo, qu’est-ce que vous voyez? Qu’est-ce que
vous voyez? Hạnh? Tu observes la photo et qu’est-ce que tu observes
dans la photo? Qu’est-ce que tu vois dans la photo?

- Vérifier le sens des mots et des contenus, à corriger et


expliquer:
88P: Arc-en-ciel c’est quoi?
97E: Rural.
89P: Rural? Dans le texte, le tourisme vert comme nous avons dit au tableau,
c’est le tourisme à la mer, à la montagne, etc…
98E: À la campagne.
90P: À la campagne, pourquoi pas, pourquoi vous ne pensez pas à la
campagne?

- Apporter des connaissances:


95P: Oui, le tourisme gris.
106E: À la ville
96P: En ville, pourquoi?
107E: Beaucoup de pollution
97P: À cause de la pollution? D’après moi, le gris ici, c’est la couleur du
béton, à mon avis, c’est le béton.

- Exploiter les autres activités, que ce soit la CE ou la PE (cf.


3.2 ci-dessus)...

-166-
Communications de dimension globale

Il est à remarquer que souvent, H-2 reprenait la réponse


des étudiants pour enchaîner sur une autre question (V. 84P,
85P) et créait ainsi des interactions successives. Une autre
technique était de faire travailler l’imagination des étudiants pour
provoquer et maintenir les interactions en classe. Par exemple,
lors de l’activité de CE, au lieu de faire lire le texte tout de suite,
H-2 a demandé aux étudiants d’imaginer, deviner les types de
tourisme:
38P: [...] Avec le titre Le tourisme en couleurs, vous pensez à quoi? […]
Dans le texte, la couleur, c’est quoi? Vous devinez, par exemple, si je
dis, si on parle du vert [...]
39P: Le vert, vous pensez à quoi?

2.4. Bonnes compétences orales des étudiants


Comme il a été dit, il y a le grand souci de H-2 de faire travailler
l’oral, surtout la production des étudiants, que ce soit sous forme
d’exposés individuels ou d’écoute-réponse aux questions de
l’enseignante ou à celles des pairs. De là, les échanges verbaux
sont nombreux. Nous comptons environ 160 tours de parole du
côté de l’enseignante, mais jusqu’à 170 du côté des étudiants,
ce qui est rare, car généralement, c’est l’enseignant qui parle
le plus. H-2 a donc réussi à faire parler ses étudiants en classe!
Et si les échanges partaient de l’enseignant vers les étudiants
et vice-versa, ils allaient aussi dans le sens horizontal entre
les étudiants. Ceux-ci ont ainsi fait preuve de leur capacité à
s’exprimer de façon compréhensible en français, pour raconter
leur film préféré (cas des 2 exposés) et pour participer à tous les
échanges verbaux en classe, du début à la fin du cours.

3. Quelques premières remarques sur le cours


+ L’analyse ci-dessus a soulevé des traits qui pourraient
spécifier la «didactique de la classe» particulière à l’enseignante
H-2. Celle-ci se caractériserait par une centration sur la PO plus
que sur d’autres compétences, privilégierait l’expression et la

-167-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

compréhensibilité plus que les aspects linguistiques... Comme


moyen d’évaluation, les devoirs écrits à la maison seraient préférés.
En classe, les corrections se font plus au niveau du contenu et
des idées; et sur le plan linguistique, au niveau du lexique lié au
contenu plus qu’aux phrases ou textes, d’où certaines phrases
avec des erreurs grammaticales ou autres n’ont pas été reprises,
corrigées ou reformulées, même quand l’étudiant a fini de parler:
2E: Bonjour à tous... je vous parle du film ‘5cm par seconde’,
c’est un film d’animation japonais. Il a projeté* en 2007 au Japon.
J’ai vu ce film il y a longtemps, il est très spécial, c’est le film de
la roman amoureuse, de la psychologique, on raconte de deux
personnes Tasaki et Akali qui sont grandi ensemble. Après, ils ont
déménagé, chaque personne vit dans différentes régions.
(*En italique sont les erreurs non reprises et corrigées)
Quant à la technique didactique, H-2 donnerait de l’importance
plus aux questions-réponses entre enseignant et étudiants qu’au
travail de découverte seul ou en groupe par les apprenants eux-
mêmes. Souvent, elle les a aidés plus qu’elle ne les a guidés pour
la solution autonome des exercices, et n’a pas beaucoup favorisé
les techniques spécifiques de CE ou le travail linguistique.
+ Cette didactique particulière amène vers une question
qui nous paraît fondamentale pour la formation équilibrée des
compétences. Dans ce cours, l’enseignante a opéré des écarts
importants par rapport au manuel, ce qui orientait son cours vers
des objectifs autres que ceux prévus par le Cours, et qui laissait
voir un enseignement centré presque exclusivement sur l’oral, aux
dépens des compétences dites littéraciques (CE-PE). Cependant,
lire et écrire en français sont des compétences de base pour des
apprentissages en spécialités - la linguistique ou la pédagogie - dans
les 2 dernières années du cursus au sein de notre Département. S’est-
elle appuyée sur un raisonnement didactique pour faire ce choix?

-168-
Communications de dimension globale

A-t-elle prévu dans son programme des moments spécifiques pour


travailler les compétences écrites? Ou est-elle simplement partie de
ses préférences personnelles ou de ses propres compétences en
langue française? Nous ne saurons le dire pour le moment, car
dans le cours, l’enseignante n’a pas annoncé ses objectifs pour la
leçon et la question n’a pas été abordée dans l’interview.
+ Avec sa bonne maîtrise du français, et beaucoup de soins
pour préparer la leçon et manipuler le matériel didactique en
classe, l’approche didactique dominante de notre enseignante
serait une approche communicative centrée sur l’oral. La technique
dominante était le jeu de Questions-Réponses caractéristique de
la méthodologie active, sans que la LM soit complètement bannie
comme le préconise cette dernière!
+ La participation des étudiants est active et leur acquisition
semble bonne, surtout dans les réactions langagières en classe.
C’est sans aucun doute une réussite de notre enseignante.
Synthèse de la partie vietnamienne
Pour finir, l’étude de ces trois cours dans les deux universités
vietnamiennes nous permet deux observations suivantes:
- Un enseignant a tendance à répéter dans ses cours
certaines démarches et techniques qui lui sont propres, même
avec des publics différents, ce qui a été repéré chez H-1. Ainsi, il
est plus que probable qu’il existe des constantes qui participent
de la pratique didactique d’un enseignant et qu’il est possible de
les identifier comme une/sa «didactique de classe» spécifique.
- Nos enseignants ne semblaient pas être affectés par la
présence de la caméra pendant le cours, même s’ils ne l’oubliaient
sans doute pas - H-1 a plusieurs fois a rassuré ses étudiants
(C-1) et a même utilisé le fait d’être filmé dans ses explications.
Notre choix de la vidéoscopie pour découvrir les didactiques de
classe nous semble donc raisonnable...

-169-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES (NON EXHAUSTIVES)

1. BEACCO J.-Cl., De l’innovation en didactique du français


langue étrangère, in Revue internationale MÉTHODAL No1 -
Mai 2017, Méthodologie de l’enseignement/apprentissage des
langues. Innover: pourquoi et comment?, https://methodal.
net/IMG/pdf/ revue_methodal_no1_189-198_nikolaou.pdf
2. BLANCHET Ph., CHARDENET P. (dirs.) et alii, Guide pour
la recherche en didactique des langues et des cultures.
Approches contextualisées, 2011, AUF, Éditions des archives
contemporaines (EAC)
3. COMPAORE Gr., 27 décembre 2008, Méthodes et
techniques pour l’enseignement des sciences physiques,
https://lewebpedagogique.com/
4. CONSEIL DE L’EUROPE, 2001, Un cadre européen commun
de référence pour les langues: apprendre, enseigner, évaluer,
https://rm.coe.int/16802fc3a8
5. CUQ J.-P., GRUCA Is., Cours de didactique du français
langue étrangère et seconde, 2003, PUG
6. DEFAYS J.-M.; DELTOUR S., Spécificités et paradoxes de
l’enseignement des langues étrangères dans le contexte
scolaire: observation et formation, In: FARACO M. (dir.), La
classe de langue: Théories, méthodes et pratiques, www.lpl-
aix.fr/~fulltext/2777.pdf
7. FARACO M., 2006, La classe de langue: Théories, méthodes
et pratiques, sur www.lpl-aix.fr/ ~fulltext/2777.pdf.
8. GAGNON R. et CANELAS-TREVISI S., L’analyse des
pratiques en classe de français: théories et méthodes, in
Lidil no49, 2014: L’analyse des données didactiques, https://
journals.open edition.org/lidil/3417

-170-
Communications de dimension globale

9. LESCURE R., Les approches actionnelles et par compétences


en didactique du FLE: intérêts et limites, in Le français
de demain: enjeux éducatifs et professionnels, Colloque
international 28-30 octobre 2010 Sofia, https://crefeco.org/
fr_version/pages/8@lescure.pdf
10. MARTINEZ P., La didactique des langues étrangères, 6e
édition, janvier 2012, Collection: Que sais-je?, PUF - Paris
11. MARTINEZ P., 2018, Un regard sur l’enseignement des langues.
Des sciences du langage aux NBIC, Editions des Archives
Contemporaines, Paris, http://eac.ac/books/9782813002839
12. ODDOU M., Théories de l’apprentissage et activités FLE ,
sur theories-apprentissages-fle.pdf
13. RODRÍGUEZ SEARA A., 2001, L’évolution des méthodologies
dans l’enseignement du français langue étrangère depuis la
méthodologie traditionnelle jusqu’à nos jours, https://qinnova.
uned.es/archivos _publicos/.../revista1articulo8.pdf
Annexes
1a- Grille d’analyse condensée du manuel (une fiche par cours)
Déclaré par les auteurs
Items Observations
de la méthode
Présentation générale
1
du cours
Public et identification de ses
2
besoins
Approche(s)
4
méthodologique(s) déclarées
Théories de référence
5
convoquées
Organisation générale de la
6
méthode
Composition de l’unité
7
pédagogique

-171-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Place donnée à
la compétence de
communication (actes
8
de parole; modèles de
conversation; activités
orales et écrites)
Prise en compte des
9 composantes et situations
de communication
Place donnée à
la compétence
10 linguistique (vocabulaire,
grammaire, phonétique,
orthographe...)
Place accordée à la
composante iconique; à
11
la civilisation/culture; à
l’évaluation
Place accordée à la
12
compétence textuelle
Progression linguistique,
13
en communication
14 Exercices en classe
+ Convenance au public
utilisateur:
15 + Facilité d’utilisation pour
enseignant; étudiants
+ Autres remarques

1b- Grille d’analyse condensée du cours à partir de la vidéo (une


fiche par cours)
Descriptions Techniques Réactions
Items observées et/ou de classe des
précisions utilisées apprenants
1- Contexte
Lieu (quelle université?)
Temps (date - durée du cours)
Aménagement (salle de cours,
décor / tables-chaises)
Effectif
Niveau

-172-
Communications de dimension globale

Manuel utilisé
Type de français
Intitulé du cours
Objectif(s) du cours
(annoncés) ou non
2- Enseignant
Fonctions effectivement
assurées en cours
Langues utilisées en classe
Mimique, gestes
Voix et débit
Explications
Traitement de l’erreur
Gestion du temps
Administration du cours
3-Apprenants
Profils
Langues en classe
Prises de parole
Activités faites réellement en
classe
Attitudes
4- La leçon et le déroulement
du cours
Durée du cours
Objectif(s) du cours
L’enseignant part de
Il rappelle la séance
précédente
Activités proposées par
l’enseignant
Supports pédagogiques
Consignes
Ambiance de la classe
5- Interactions
Enseignant-apprenants

-173-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Apprenants - apprenants
Contenus de prise de parole
des apprenants
6- Approche utilisée
1 seule /plusieurs (lesquelles,
à quels moments...?)
Résultats obtenus par rapport
aux objectifs fixés
7- Conclusions et remarque
sur le cours

2- Transcriptions du cours filmé et de l’interview d’enseignants.


Quelques exemples.
Transcription de la vidéo de classe, ULEI-UNH

Codage: P = Professeur; E = étudiant; Es = étudiants; Chiffre (1, 2) = ordre


d’apparition dans le cours: 1P; 162P = 1re; 162e réplique d’enseignant; 1E; 134E = 1re;
134e réplique d’étudiant
1- Leçon: Le tourisme en couleurs. 3e séance Dossier 11 «Vie culturelle»
Manuel: Cours de français général
Auteur: Département de Français, ULEI-UNH
2- Classe de FLE avec 25 étudiants (23 JF + 2 JH) de 1re année, niveau DELF-A1
3- Durée du cours: 2 heures, 4 avril 2019
DEROULEMENT
1P: Vous avez quoi comme exercice à la maison? J’ai donné un exercice à la
maison. C’est quel travail?
1E: Parlez de votre film préféré.
2P: Qui veut aller au tableau? Lam, c’est très bien...
3P: Les autres, quand elle présente son film préféré, vous devez écouter et noter
les informations et poser des questions. Ça va? Oui? Après, je peux vous demander
de présenter encore une fois le film qu’elle a présenté.
2E: Bonjour à tous, pendant mon temps libre, je vais aller souvent au cinéma,
parmi les films populaires, je vous parle du film 5cm par seconde, c’est un film
d’animation japonais, le réalisateur est Siva Koto. Il a projeté en 2007 au Japon. J’ai
vu ce film il y a longtemps, il est très spécial, c’est le film de la [du] roman amoureux,
de la psychologique, on raconte de deux personnes Tasaki et Anaki qui sont grandi
ensemble. Après, ils ont déménagé, chaque personne vit dans différentes régions.
[...]
169E: Oui, j’aime le froid, l’hiver

-174-
Communications de dimension globale

157P: Alors, le tourisme blanc en hiver, tu vas souvent à la montagne? Tu es


allée à Sapa en hiver pour voir la neige?
170E: Oui.
158P: Bon c’est l’heure.

Transcription de l’interview à ULEI_UNH

Interviewer (I): Bonjour, merci d’avoir accepté de répondre à notre interview sur
ta séance de travail de CE en classe. Tu peux te présenter s’il te plaît!
Enseignante (E): Bonjour, je m’appelle Y..., enseignante de français au
Département de français depuis 7 ans. Avant mon inscription au Département de
français, j’ai fait 12 ans de français dans la classe bilingue. Je suis titulaire du diplôme
de licence de filière pédagogique et de master en linguistique française, j’ai fait un
stage de perfectionnement linguistique de 2 mois et demi en France il y a 4 ans. Je
suis enseignante de français chargée de la pratique française en première année.
[...]

-175-
RECHERCHE INTERUNIVERSITAIRE RÉGIONALE 2019-2020
QUELLES DIDACTIQUES A L’UNIVERSITE ACTUELLEMENT?
QUELQUES ETUDES DE CAS (2) - PARTIE THAÏLANDAISE

THIPKONG Penphan
Université de Phayao, Thaïlande
DEJAMONCHAI Sirajit
Université Thammasat, Thaïlande
CHARPENTIER Jaruwan
Université de Mahasarakham, Thaïlande

Introduction
Cet écrit fait suite à l’article «Quelles didactiques à l’université
actuellement?» par l’équipe vietnamienne et présente des cas
d’enseignement du français sur objectifs spécifiques (FOS)
dans 3 universités de la Thaïlande. Nous suivons les mêmes
problématiques et protocoles que nos collègues vietnamiens
pour identifier la didactique de classe des enseignants observés.
Partie 1: Enseignement du FOS à l’université de Phayao (Phayao, Thaïlande)

1. L’enseignement/apprentissage du FOS à l’Université de Phayao


La section de français de la Faculté des Arts Libéraux
propose des cours de FOS au niveau de la licence avec 3 cours
obligatoires: introduction à la traduction français-thaï, le français
du tourisme et de l’hôtellerie, l’enseignement du FLE; et 3 cours
facultatifs: français des affaires, français de guide touristique et
français pour les services aériens. Les manuels sont choisis par
les enseignants de la section.
Communications de dimension globale

Le cours de français de l’hôtellerie, sujet de cette étude,


compte pour 3 crédits et s’enseigne en 64 séances pendant
16 semaines du 2e semestre aux étudiants de 3e année.
L’enseignement vise les connaissances, les compétences
langagières, ainsi que les savoir-faire et savoir-être spécifiques
du travail en hôtellerie-restauration. La pratique effective de ce
métier se réalise avec des visites des hôtels sur place, surtout à
travers le stage professionnel du 2e semestre de la 4e année.

2. La classe de FOS
La classe de FOS filmée le 25 mars 2019 était un cours de
2 heures pour 8 étudiants - 4 jeunes filles et 4 jeunes hommes -
de niveau DELF-A2 de la 3e année en 2019. La leçon travaillée en
classe était l’Unité 5, Réclamations, de la méthode «Le Français de
l’hôtellerie et de la restauration 2e édition, CLE International. Dans le
Manuel/Livre de l’élève (ML), cette Unité 5 de la 1re leçon «Garçon,
s’il vous plaît!» se présente avec: 1 activité d’écoute pour compléter
5 courts dialogues; 2 activités sur le pronom «en» avec un encadré
sur l’emploi de ce pronom; 2 activités de compréhension écrite
(CE)-vocabulaire, puis compréhension orale (CO)-production orale
(PO) avec des illustrations; enfin, une activité de PO sur les cultures
françaises et locales de dressage de la table.
Le Guide pédagogique (GP) propose l’exploitation de ces
contenus comme suit:
- L’enseignant introduit la photo en haut de la page sur les
réclamations et demande aux étudiants d’imaginer pourquoi
la photo est caricaturale. Il leur demande ensuite d’énumérer
des réclamations fréquentes par les clients dans les hôtels et
restaurants et annonce la structure de la leçon.
- L’activité 1 est un exercice de CO. L’enseignant fait écouter
et compléter les dialogues. Pendant la 1re écoute, les étudiants
font l’exercice individuellement puis s’entendent à deux sur des

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

réponses communes. La 2e écoute est une correction collective.


Ensuite, l’enseignant demande aux étudiants d’indiquer les
situations où c’est une erreur du personnel (2 et 4) ou c’est une
demande d’un client. Il attire l’attention des étudiants sur les
expressions utilisées par le personnel.
- Les activités 2 et 3 sont centrées sur les compétences
linguistiques. L’enseignant introduit l’encadré sur le pronom
personnel «en» et le complète avec des explications, si nécessaire.
Il vérifie la compréhension et insiste sur «en» en tant que
complément circonstanciel et sur la place de «en» : toujours avant
le verbe et sans accord en genre et en nombre. Les exercices 2 et
3 peuvent être faits individuellement ou collectivement à l’oral.
- L’activité 4 avec deux compétences, CE (partie a) et PO
(partie b), se fait oralement: (a) collectivement et (b) en binôme
avant la correction collective. L’activité 5 est une CO. Les étudiants
regardent l’image à droite, nomment ce que désigne chaque
numéro et rédigent la liste des objets. Après une 1re écoute, ils
discutent avec leurs voisins sur des réponses communes et la 2e
écoute est la correction collective. L’activité 6 est une activité de
PO. Les étudiants discutent collectivement la façon de dresser la
table à la thaïlandaise, après, ils signaleront les similitudes et les
différences entre les façons française et thaïlandaise.
En classe, la démarche suivante a été adoptée par
l’enseignant:
+ Mise en train avec salutations; contrôle des absences;
questions-réponses sur les élections du 24 mars 2019 en
Thaïlande; et enfin sur ce qui a été appris la semaine précédente;
+ Enseignement effectif de l’Unité 5 «Réclamations» à
travers 4 activités:
-L' activité 1 est un exercice à trous à l’oral. L’enseignant a
posé des questions sur l’image, a vérifié et expliqué les mots,

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Communications de dimension globale

puis fait écouter les 5 échanges 2 fois. Les étudiants ont écouté
en lisant et complétant les dialogues. Après la 1re écoute,
l’enseignant s’est arrêté pour faire la correction collective du 1er
échange. Il a corrigé le reste de l’exercice après la 2e écoute;
- Les 2 activités suivantes sont des exercices de grammaire
sur le pronom personnel «en». L’exercice 2 consiste à compléter les
réponses proposées avec «en», puis avec un (e), deux (autres)...
et un groupe adverbial (tout de suite). D’abord, l’enseignant a
fait lire l’encadré à droite sur l’emploi de «en», a expliqué les
exemples puis est passé au travail collectif de réponse. Tout
au long de l’activité, il a expliqué et vérifié la connaissance des
mots nouveaux. Pour l’exercice 3, les étudiants devaient fournir
des réponses en utilisant «en» avec des quantificateurs donnés
(1 tranche, 2 morceaux, 1 cuillère...). L’enseignant a fait lire la
consigne, fait faire ensemble la 1re question, puis a laissé «5
minutes» pour le travail individuel. Il a circulé pour surveiller ou
aider. Pour corriger, il a fait écrire les réponses sur le rétroprojecteur
et a corrigé phrase par phrase.
- L’activité 4 est un exercice dont la 1re partie (a) porte sur la
CE et sur le vocabulaire. Il s’agit de lire-comprendre les phrases
et d’en déduire les objets réclamés (nappe, verre, couteau...) en
s’aidant du dessin à gauche. L’enseignant a fait lire la consigne
et a laissé aussi «5 minutes» pour le travail. Il a corrigé les
réponses des étudiants en projetant les dessins sur l’écran pour
expliquer le sens des mots (linge de table, molleton, nappe...)
ou l’utilisation des objets (5 assiettes). Cependant, la partie (b)
de PO - éventuellement de production écrite (PE) -: imaginer
des réclamations de 3 objets de la table (1 petite cuillère, 1
carafe d’eau, des couverts) n’a pas été abordée. La séance s’est
terminée avec la prise de congé et le devoir à la maison: «Le
devoir, vous écoutez la compréhension orale de l’exercice 5...»

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

3. La didactique de classe de l’enseignant de Phayao (désormais PY)


Il nous revient maintenant d’identifier la didactique de classe
de notre enseignant. Il s’agit de signaler la/les approche(s)
méthodologique(s) et des techniques de travail que PY a mises
en place pour transmettre les connaissances et compétences
proposées dans le ML. Pour faciliter le travail d’analyse, l’équipe
thaïlandaise a transcrit et numéroté les paroles et actes réalisés
pendant le cours (codage P pour enseignant et E pour étudiants,
précédé du numéro qui indique l’ordre d’apparition dans la vidéo),
puis les a étudiés individuellement et en les croisant entre eux.
Signalons d’abord que le déroulement de cette classe FOS
a suivi l’ordre des activités proposées dans ML, et un peu les
indications de travail du GP, pour travailler l’activité 1 par exemple.
Mais à part de cela, les procédés didactiques et pédagogiques
de PY s’en sont largement séparés. L’étude de la vidéo laisse
apparaître les grands traits de l’enseignement de ce cours,
détaillés ci-dessous.
3.1. La connaissance du vocabulaire au dépens de la pratique orale/
écrite ou de la communication
En effet, dans cette classe de FOS, PY a travaillé principalement:
- La vérification du sens des mots, de plusieurs manières, à
travers des questions directes: «Vous connaissez le sens du verbe
‘remplacer’?» (32P); des demandes de définitions: «Garçon, c’est
qui? (19P); Réclamer, c’est quoi? (12P); Le feu..., c’est quoi?»
(25P); ou de la famille de mots: «‘Réclamation’, ça vient du [de]
quel verbe?» (11P);
- L’explication du vocabulaire. Celle-ci se faisait par le biais de
la définition: «Un napperon, c’est pour la décoration» (50P); de
l’utilisation/utilité de l’objet: «Serviette pour essuyer la bouche...»
(50P); des synonymes: «Certainement = absolument = bien sûr»
(33P); de la morphologie grammaticale: «Haut est un adjectif.»

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Communications de dimension globale

(29P); des gestes pour expliquer: «haut/bas»; et des traductions


en langue maternelle (LM) thaïe: «petite cuillère ช้อนชา; cuillère
à soupe ช้อนซุป» (52P).
Parfois, PY posait des questions très difficiles à répondre
en français, pas seulement pour les étudiants, mais sans doute
aussi pour lui-même. Par exemple, pour répondre à la question
«Le feu / [le] sel, c’est quoi?» (25P, 26P), devant le silence des
étudiants, PY a dû traduire au lieu de définir le mot: «ไฟเช็ค = un
briquet, une allumette». Cette réponse nous semble pas tout à fait
exacte car un briquet, une allumette, c’est pour faire du feu, mais
n’est pas le feu! Les autres fois, l’enseignant est passé par la
morphologie grammaticale, sans qu’on ne sache quelle en était
la vraie utilité: «Voici une chaise, ‘haut’ est un adjectif» (29P). Par
contre, aucune activité visant la communication orale ou écrite
n’a été mise en place. L’enseignant n’a pas organisé de jeux
de rôles ou de simulations à partir des dialogues/phrases des
exercices après leur correction. Il ne les a même pas fait relire/
répéter ou profiter de ces activités pour faire faire du réemploi
du vocabulaire ou des tournures de réclamations. Les exercices
du ML visant ces compétences communicatives à l’oral (activité
1 d’écoute) ou à l’écrit (activités 2, 3, 4b) sont devenus ainsi de
simples exercices linguistiques. Ainsi, l’activité 1 qui présente des
«réclamations-types dans un restaurant» a été traitée comme un
simple exercice à trous, et tout de suite oubliée après la correction.
Quant à la Partie b de l’activité 4 de PO des réclamations, elle n’a
pas été abordée.
3.2. La technique de travail utilisée massivement en classe:
les questions-réponses
C’étaient d’abord des questions dans le but d’induire des
réponses, mais souvent, en cas de silence des étudiants, au
lieu de trouver d’autres moyens (reformulations, guidage...) pour
amener aux réponses attendues, l’enseignant répondait lui-même

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

à ses questions et passait tout de suite à autre chose. Par exemple,


pour la question: «Le pronom ‘en’ remplace quoi?» (31P), devant
l’absence de réponse des étudiants, l’enseignant interrogeait à
nouveau: Vous connaissez le sens du verbe ‘remplacer’?... Le
pronom ‘en’ remplace quoi?» (32P) et avec encore du silence, il y
a répondu lui-même, puis est retourné au dialogue: «Il remplace
‘du/de la/des + un nom’. Revenons le [au] dialogue n°5». Il n’a pas
cherché non plus à faire retenir ou réemployer le mot nouveau
pour renforcer l’acquisition: «‘manquer’, c’est quoi?... ‘Manquer
[il manque] quelque chose’... ‘Petite cuillère’, c’est quoi?» (34P).
Parfois, l’enseignant donnait l’impression qu’il posait des
questions juste par habitude ou par instinct car il n’en attendait
pas les réponses: «‘Voter’, c’est quoi? C’est pour quelque chose,
n’est-ce pas? Aujourd’hui, on va étudier l’unité 5...» (7P); ni n’en
profitait pour enchaîner son explication. Observons:
12P: Réclamer, c’est quoi?
11E: C’est une requête.
13P: Imaginez, quand on réclame quelque chose, on est content ou n’est pas
content?

Dans cet exemple, la réponse de l’étudiant: «C’est une


requête.» (11E) sur le sens de réclamer n’a pas été ajustée (la
bonne réponse serait «C’est ‘faire une requête’»); et l’expression
‘(faire) une requête’ proposée par l’étudiant n’a pas été réutilisée.
PY est simplement retourné au verbe de départ.
PY avait recours à d’autres techniques de classe, et sa façon
de faire était aussi très particulière. Par exemple, pour faire entrer
dans une nouvelle activité, PY a fait lire la consigne à haute
voix par des étudiants. Cependant, ce n’était pas pour vérifier la
compréhension de la consigne comme on aurait pu l’attendre car
PY est entré tout de suite dans l’exercice:
20P: Lisez la consigne de l’activité 1! (E. lit la consigne)
21P: Je vous fais écouter 2 fois des dialogues et vous complétez 5 dialogues.

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Communications de dimension globale

De même, PY a parfois répété lui-même la consigne puis est passé


directement à l’explication des mots:
36P: Voilà, on continue à [avec] l’exercice 2. Lisez la consigne. (E. lit la
consigne)
37P: (P. répète la consigne puis:) une requête = une fiche pour écrire quelque
chose...
ou aux questions:
66P: Faites l’exercice 4. Lisez la consigne! (E. lit la consigne)
67P: (P. relit la consigne, puis:) ‘Garçon’, c’est qui?

3.3. Interactions «enseignant-étudiants», peu d’interactions


entre étudiants.
Nous comptons au total 118 répliques pour 2 heures de
cours, 73 de l’enseignant et 45 des étudiants. En les regardant
de plus près, nous voyons que:
- L’enseignant avait la parole la plupart du temps: 73 phrases
et/ou questions, souvent successives contre 45 répliques des 8
étudiants, dont beaucoup (13/45) sont de type monosyllabique
(réponses Oui/non, par un seul mot) ou des répétitions à voix
haute des consignes du ML;
- Les échanges ont eu lieu la plupart du temps entre l’enseignant
et le collectif de la classe plutôt qu’avec des apprenants individuels
ou entre les étudiants;
- Les contenus des questions et la façon de les poser ont fait
de l’enseignant le seul détenteur de la connaissance en classe,
et comme tel, il pouvait se permettre parfois des «pressions»:
30P: Regardez ‘en’, c’est quoi?... Est-ce que vous avez étudié le pronom
personnel ‘en’? ...
Oui ou Non?

3.4. L’appropriation des connaissances et des compétences


par les étudiants paraît plutôt incertaine
Notre analyse des paroles et actes de classe révèle que
s’il y avait de la participation de la part des étudiants, de la

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

compréhension des termes en hôtellerie-restauration - surtout


par le biais de la LM (le thaï) pour la plupart des étudiants - il
n’était pas sûr que ce cours ait permis aux étudiants d’atteindre
les 2 principaux objectifs de la leçon: a) capacité de formuler en
français des réclamations en utilisant les tournures et les mots
de la table; et b) utilisation du pronom personnel «en» et des
quantificateurs qui l’accompagnent. C’est parce que pendant le
cours, les étudiants n’ont pas eu l’occasion de pratiquer oralement
ou par écrit des réclamations en français. En classe, il n’ y a pas
eu de communications sur/autour les thèmes de la leçon: sur
45 répliques des étudiants, à part les 6 concernant le contrôle
des absences ou informations pendant la mise en train, 13 sont
des réponses aux questions de l’enseignant, souvent de nature
monosyllabique ou répétant les consignes ou phrases du ML,
avec à côté 7 réponses par la traduction en thaï des mots français.
Et ces interactions étaient toutes orientées vers l’enseignant.
Un autre phénomène nous paraît mériter une remarque.
Une dizaine des réponses des étudiants ont montré à la fois leur
compréhension de la question et la capacité de certains à répondre
en français correct, par exemple la réplique 11E: «C’est une
requête!» en réponse à 12P: «Réclamer, c’est quoi?». Cependant,
ces répliques n’ont pas été retenues par l’enseignant pour
enchaîner ses explications ou pour consolider l’appropriation des
étudiants.

4. Quelques premières remarques sur le cours de PY


L’analyse de cette classe montre que dans la réalité
quotidienne des classes, les didactiques fortement conseillées
ou considérées comme évidentes de notre époque: approche
communicative; perspective actionnelle... ne sont pas toujours
mises en place. Dans le cas de ce cours, la transmission de
l’enseignant nous semble inciter à un travail intellectuel sur la
langue plutôt qu’à sa pratique; la connaissance du vocabulaire

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Communications de dimension globale

et de la grammaire l’emporte sur l’acquisition des compétences


communicatives; les visées pragmatiques du FOS - apprendre
pour faire - ne se voient pas très clairement. Les explications,
l’organisation des activités de classe ne paraissent pas encore
favoriser l’appropriation des paroles, actes, tournures et gestes
spécifiques de la leçon - des réclamations. Ainsi, cet enseignement
du FOS ressemblerait à un cours théorique en spécialité, au lieu
d’être suffisamment pratique pour former des futurs travailleurs
en hôtellerie-restauration en français.

Partie 2: Enseignement du FOS à l’Université Thammasat (Bangkok,


Thaïlande)

1. L’enseignement/apprentissage du FOS à l’université Thammasat


La section de français de la faculté des Arts Libéraux de
l’université Thammasat accorde beaucoup d’importance à la
préparation des étudiants et futurs diplômés au monde du travail.
Divers cours en français des différentes professions sont offerts:
français juridique, des affaires, du secrétariat, pour les services
aériens, du tourisme, de l’hôtellerie, de la gastronomie.
Le cours de français de l’hôtellerie de notre présente étude
fait partie des enseignements du FOS à Thammasat, et est très
choisi par les étudiants du cursus de licence en français. Ce cours
compte pour 3 crédits et a pour but d’amener les apprenants
à maîtriser les savoirs (vocabulaire, expressions, fonctions,
tâches), les savoir-faire (comment faire le travail dans différents
secteurs du domaine) et le savoir-être (comment agir/réagir dans
diverses situations) des métiers d’hôtellerie-restauration.

2. La classe de FOS
La classe de français de l’hôtellerie filmée le 2 avril 2019
était un cours de 3 heures avec 29 étudiants, 26 en 3e année et
3 en 4e année, au 2e semestre de l’année académique 2019. Les

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

étudiants ont entre le DELF-B1 et B2; le niveau de la classe est


donc assez élevé, quoique pas tout à fait homogène. L’enseignante
a eu une formation très solide: toutes ses études supérieures de
la licence au doctorat ont été faites en France. Elle enseigne la
linguistique et la phonétique françaises, le français des affaires et
de l’hôtellerie, et donne aussi des cours de langues aux étudiants
des différentes sections et facultés de l’université.
Dans le cours que nous analysons ici, l’enseignante travaille
3 leçons de suite, de 4 à 6, aux pages 54 à 59 de la méthode
Le français de l’hôtellerie et de la restauration, 2e édition, CLE
International. Le tableau suivant donnera une idée de ce qui est
suggéré dans le manuel (ML) et ce qui a été effectivement réalisé
en classe:

Activités proposées par le manuel Activités réalisées en classe


Leçon 4: «Assurer le service à l’étage» pp.54-55

1- Activité de CE; lecture de la 1- Activité de contrôle (CO) de


présentation d’une gouvernante avec 20mn en classe: Ecoute de
2 parties: 2 vidéos et choix des tâches
(gouvernante/ femme de chambre)
- écrire la question correspondant à la
puis rédaction des questions pour
réponse donnée (CE-PE);
interviewer la gouvernante
- choix des tâches [gouvernante/
2- Activité de CO: écoute puis
femme de chambre] (CE)
questions-réponses (Q-R) sur la
2- Activité de PE: raconter la journée journée d’une femme de chambre
d’une femme de chambre à partir des
3- Activité de grammaire: omise
informations de l’activité 1 et l’emploi
du temps donné 4- Activité de CO: écoute puis Q-R
pour faire correspondre clients-
3- Activité de grammaire: questions
illustrations
et réponses à compléter avec des
noms et des nominalisations, avec un 5- Q-R sur le sens des mots et
encadré sur la nominalisation à droite résolution collective de l’exercice
(Exercice à trous)
4- Activité de CO: Ecoute et
appariement clients- illustrations
5- Activité de lexique: répartition
des mots de vêtements dans les 2
colonnes (Homme - Femme)

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Communications de dimension globale

Activités proposées par le manuel Activités réalisées en classe


Leçon 5: «Décrire un plat» pp.56-57
1- Activité de lexique en 3 parties: 1a- Q-R pour aider à compléter
- reconnaître les termes génériques; le tableau et explication des mots
en trouver un (des céréales) à partir pour décrire les plats
des termes spécifiques; 1b- omis
- retrouver les mots des aliments du 1c- Explications en détail des mots
pays des apprenants pour compléter puis renvoi comme devoir de PE
le tableau en a-; à la maison: écrire une recette
- des adjectifs pour décrire les plats. traditionnelle ou thaïe pour l’Office
du Tourisme. Devoir qui sera noté.
2- Activité de lexique et de CE: choix
des bons mots pour les descriptions 2- Exercice projeté à l’écran et
Q-R pour la résolution collective.
3- Activité de grammaire: prépositions
L’enseignante donne ou confirme
à, de dans les noms des plats avec
les bonnes réponses.
un encadré à droite.
3- Exercice projeté à l’écran avec
4- Activité de CE: remise en ordre
des brèves explications sur
d’un menu
l’utilisation: à (on ajoute... on
5- Activité de PO / PE: décrire les cuit à la manière...) de (matière
plats dans 3 menus traditionnels, constitutive du plat);
dont un pour végétariens
4- Exercice projeté à l’écran,
Q-R pour résolution collective et
l’explication des plats
5- Activité de PO/PE: omise
Leçon 6: Prendre une commande au
restaurant, pp.58-59
1- Activité de CE: appariement 1- Q-R et résolution collective de
définitions-illustrations l’exercice
2- Activité de CO ou CE: cocher la 2- Activité de CO
bonne réponse; deux encadrés à Classe arrêtée après l’activité 2
droite: Pronoms personnels COI;
Comment dire pour prendre une
commande?
3- Activité de CE: lecture et réponses
aux questions; et activité de PE:
rédiger un bon de commande
4- Activité de grammaire: exercice à
trous avec pronoms personnels COI
5- Activité de jeu de rôles en groupes
de 3: Donner des conseils aux clients
(PO)

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

3. La didactique de classe de l’enseignante


de l’université Thammasat (désormais T.)

Nous essayerons maintenant d’identifier la pratique didactique de


notre enseignante en relevant la/les démarche(s) méthodologique(s)
et les techniques de travail qu’elle a utilisées en classe.

3.1. L’enseignante remplace les activités du manuel


par d’autres documents/exercices et/ou les exploite
d’une autre manière que celle proposée par la méthode

Cette classe FOS a suivi l’ordre des activités proposés dans


ML. Cependant T. a effectué des modifications importantes. D’abord,
elle a changé la nature de certaines activités. Par exemple, la 1re
activité de la leçon 4 «Assurer le service à l’étage» est devenue un
test de contrôle de CO au lieu d’une activité de CE en classe, avec
distribution des feuilles de test au début du cours.

4P: Alors, vous regardez d’abord les consignes. [...] Il y en a 2, vous voyez?
[...] Vous allez voir dans la vidéo, d’accord? [...]

16P: Voilà! Ça y est, oui? Alors, je vais ramasser dans 2 minutes, allez-y! [...]

De même, le tableau des mots de l’activité 1 de la leçon 5


a été expliqué en détail puis renvoyé comme devoir à la maison.
Les étudiants ont à fabriquer une recette thaïe, et ce travail
sera noté. Ensuite, T. a supprimé certaines activités: exercice
5 (Nominalisations) de la leçon 4; la Question c de l’activité
1 (Aliments utilisés dans la cuisine traditionnelle...) et l’activité
5 (Composer 3 menus traditionnels...) de la leçon 5. Quant à la
leçon 6, l’enseignante s’est arrêtée après l’exercice 2. Cependant,
ces modifications faites sans avertissement ou explications de
l’enseignante n’ont pas provoqué de questions ou réactions de la
part des étudiants, ce qui permet de penser que c’est la façon de
faire fréquente de T. et que la classe y est bien habituée.

-188-
Communications de dimension globale

3.2. Les explications en détail comme principale technique de classe


L’autre trait caractéristique, c’est que l’exploitation des
activités en classe a suivi un même modèle: les explications très
en détail servaient de base à la fois pour la compréhension, la
résolution et la correction des exercices. Les quelques remarques
suivantes peuvent être faites sur cette pratique:
+ Les explications de l’enseignante étaient souvent très
détaillées: 21P, 24P, 30P, 61P, 91P, 116P, 126P, 132P, 146P, 155P;
+ Elles sont accompagnées de mimiques et gestes variés,
surtout de beaucoup d’illustrations. L’écran était continuellement
utilisé en classe, du début jusqu’à la fin du cours, pour projeter
feuilles des devoirs, vidéos, pages du ML. Les étudiants n’avaient
ainsi quasi pas besoin de regarder leur ML en classe.
+ Souvent, T. a expliqué à la fois en français et en thaï, et
quelquefois, elle a repris des mots en anglais de ses étudiants,
comme dans ce qui suit - les paroles en thaï sont traduites en
français entre les crochets:
90P: ใช่ ส่วน glacé นี่ก็คือน้ำ�แข็ง เอ้อ น้ำ�แข็งค่ะน้ำ�แข็ง givré เนี่ยแช่แข็งแบบ
[Oui, pour le mot glace, c’est de la glace]
68E: freeze, freeze
91P: เป็นก้อนเลย [en glaçons] แบบ freeze เลยอะค่ะ นะคะ Maintenant, on va
voir la présentation dans l’assiette [...]

+ Il est à remarquer que le thaï a été souvent utilisé à des


fins différentes:
- Expliquer un contenu:
68P: Œuf Bénédict เนี่ยค่ะ คุณจะตอกไข่ใส่ลงไปในตะแกรงใช่ไหมคะ แล้วก็จุ่ม
ลงไปในน้ำ�ส้มค่ะ อันนั้นน่ะที่ต้มน่ะคือน้ำ�ส้มค่ะไม่ใช่น้ำ� เพราะถ้าน้ำ�ปุ๊บ ไข่
ขาวกับไข่แดงจะแยกออกจากกันทันที ใช่ค่ะ นะคะ [Vous cassez l’œuf
dans la grille, n’est-ce pas? Vous trempez l’œuf dans le jus de vinaigre.
C’est le jus de vinaigre, ce n’est pas de l’eau. Parce que l’œuf blanc et
l’œuf jaune ne sont pas dispersés.]

- Répéter ou résumer ce qui a été dit en français:

-189-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

61P: [...] Alors, pour en décrire, pour décrire un plat, il faut commencer par la
cuisson: comment on fait cuire? [...] นะคะ อันแรกค่ะ เราจะพูดถึงเรื่อง
อะไรคะ การทำ�สุก สุกยังไง วิธีการทำ�สุกเห็นไหมคะ มีทั้งหมดกี่อัน cru
[Oui, le premier, de quoi parle-t-on? Pour la cuisson, comment on cuit?
Combien de façons y a-t-il à faire cuire?]

- Gérer les affaires de classe, ou faire des remarques sur les


étudiants:
107P: คุณหนู... ไม่ได้หรอ [La petite, vous ne l’avez pas encore obtenu (P. était
en train de distribuer les feuilles pour le devoir à la maison)?] เอ้าคุณ ...
นั่งข้างหนูไม่ใช่หรอ [Et toi, tu es assis à côté d’elle, non?]

Cependant, il semble que les étudiants ne s’ennuyaient pas


avec ces longues explications en doublons. C’est sans doute
parce que T. était souvent souriante et parlait avec une voix
audible et un débit raisonnable. Surtout, elle a des connaissances
approfondies en gastronomie, un français riche, et se servait
de manière très fluide des alternances de codes, passant sans
problème entre le français et le thaï:
116P: Bœuf? C’est un mélange de viandes et de saucisses. เพราะเขาใส่ [car
on met] charcuterie และถ้าเขาใส่เนื้อแดงไปมันน่าจะไม่เข้ากันนะ เพราะ
ฉะนั้นทำ�ไมคะ [On met de la viande rouge; cela ne semble pas complétif,
donc c’est pour quoi?] C’est un ragout de viandes, ça doit être viandes
blanches นะคะ น่าจะเป็นเนื้อขาวมากกว่า... แล้วก็ทำ�ไมคะ [Il vaudrait
mieux de la viande blanche; puis pour mettre quoi?] [...]

3.3. Beaucoup d’activités d’écoute, peu d’activités grammaticales


et de productions en classe
Les exercices de caractère grammatical ont été passés sous
silence (Exercice 3, Leçon 4 sur les nominalisations). Presque la
totalité des activités a été transformée en travail d’écoute guidée,
avec des explications et questions. T. a dirigé tout le travail sur les
exercices au lieu de laisser les étudiants travailler individuellement/
en groupes avant la correction collective. Si elle a expliqué de
manière approfondie le vocabulaire des leçons, elle n’a par contre
proposé aucune activité de réemploi du lexique ou des actes de
paroles présentés dans les tableaux, ni n’a mis en pratique les
activités communicatives que le ML propose. L’enseignante

-190-
Communications de dimension globale

semble ainsi focaliser plus sur les savoirs de la spécialité que sur
la communication langagière en hôtellerie-restauration.
3.4. Les interactions de sens «enseignante-étudiants»
plutôt qu’entre étudiants
Il est possible de remarquer une participation active de la part
des étudiants. Ils négociaient avec l’enseignante sur comment
faire le devoir à la maison, voire le temps pour le test:
8P: Ça va? Donc il vous reste la 2e question [..]. Alors, je vous donne 5
minutes, ça va?
3E: Oh, 10 minutes.
9P: Comment?
4E: 10 minutes.

Mais les interventions se passaient souvent entre l’enseignante


et le collectif de la classe plutôt qu’entre étudiants. Il n’y avait
pas non plus de travail de groupe pour préparer les exercices, ni
d’activités d’échanges (jeux de rôles, simulations...).

4. Quelques remarques sur le cours


L’analyse du cours a relevé quelques traits qui pourraient
spécifier la «didactique de classe» de l’enseignante T. Celle-ci se
caractériserait par une centration sur la CO plus que sur d’autres
compétences, privilégierait plus la connaissance approfondie
du vocabulaire de la spécialité plus qu’à leur réemploi. Comme
moyens de pratique et d’évaluation, les devoirs écrits et/ou à la
maison seraient préférés aux activités de production et le travail
de groupe en classe-même. Quant à la technique didactique, T.
donnerait de l’importance aux explications en détail plus qu’au
travail de découverte par les apprenants, les aiderait plus que
les guiderait dans la solution des exercices, et n’organisait pas
d’activités qui permettraient la construction des compétences
communicatives et professionnelles.

-191-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- L’enseignante possède une très bonne maîtrise du français


et de la spécialité, a aussi prodigué beaucoup de soins pour
préparer et manipuler le matériel électronique en classe. Son
approche didactique serait plutôt un mélange de plusieurs
méthodologies: jeu de questions-réponses typique de la
méthode directe, nombreuses traductions en LM de la manière
traditionnelle, utilisation des équipements multimédias moderne
parallèlement aux documents papier, chose très fréquente dans
l’approche communicative... Pourtant, il y a eu peu d’activités
d’échanges et de communication entre étudiants en classe. De
là, l’acquisition des étudiants est restée plutôt au niveau des
savoirs et de la compréhension; la pratique de communication
professionnelle est encore restreinte.
- Cette manière de faire mène vers une question didactique
qui nous paraît vitale pour l’enseignement/apprentissage du
FOS. L’enseignante a opéré des changements didactiques qui
ont laissé voir un enseignement/apprentissage plus centré sur les
savoirs que les savoir-faire et savoir-être professionnels. Même si
les étudiants paraissent contents - dans la vidéo, ils se montrent
attentifs et participants en classe -, cette didactique permet-elle
d’atteindre des objectifs de formation linguistique, langagière
et professionnelle telle que soulevée dans 1 (Enseignement du
FOS...) supra? Y a-t-il un raisonnement didactique conscient
de la part de l’enseignante pour adopter ces choix, ou est-elle
simplement partie de ses préférences et compétences? Nous ne
saurons le dire pour le moment, car dans le cours, l’enseignante
n’a pas annoncé ses objectifs pour la leçon et la question n’a pas
été abordée dans l’interview.
Partie 3: Enseignement du FOS à l’Université de Mahasarakham (Thaïlande)

1. L’enseignement/apprentissage du FOS à l’université de Mahasarakham


La section de français de la faculté des Sciences Humaines
et Sociales de l’université de Mahasarakham propose les

-192-
Communications de dimension globale

cours de FOS au niveau de licence avec un cours obligatoire -


traduction de base-, et 8 cours facultatifs: traduction, français des
affaires, français du tourisme, de l’hôtellerie, des médias, pour le
journalisme, pour les services aériens et FLE. Les enseignants
choisissent et/ou adaptent des manuels pour leur cours.
Le cursus de français du tourisme compte pour 2 crédits et
s’enseigne en 30 heures pendant 15 semaines du 2e semestre
aux étudiants de 3e année. L’enseignement en classe vise les
connaissances et compétences langagières, des savoir-faire
et savoir-être spécifiques du travail de guide touristique, de
personnel de l’agence de voyages ou de l’office du tourisme. La
pratique effective de ce métier se réalise avec la visite de 2-3
sites touristiques importants, parfois visites d’agences de voyage
à la fin du semestre et surtout à travers le stage professionnel de
4 mois en 4e année.

2. La classe de FOS
La classe de FOS filmée le 2 mai 2019 était pour un public
de 8 étudiants (7 jeunes filles et 1 jeune homme) de la 3e année,
avec le français comme matière principale au 2e semestre de
l’année académique 2019. C’est un des cours optionnels en
licence de français. La séance filmée a duré 2 heures.
L’enseignante a été formée à la faculté de Pédagogie et a
travaillé deux ans dans un lycée avec des débutants en français.
Elle a suivi également une formation de guide, a la carte
professionnelle du métier et travaille comme accompagnatrice
et guide locale parallèlement au travail à l’université. Pour ses
cours, l’enseignante utilise le manuel adapté de la méthode
Bienvenue en thaïlande 2, publié par le Conseil Scientifique et
Pédagogique de la thaïlande. Il n’y a pas de Livre du maître et le
professeur doit se servir de ses propres savoirs et compétences
méthodologiques pour préparer et faire ses cours. Le cours filmé
est une leçon de lexique à la page 110 du manuel adapté sur une

-193-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

croyance thaïlandaise. Il s’agit de faire comprendre une dizaine


de mots et expressions puis de répondre aux questions sur la
«Maison des esprits», et enfin faire une production orale ou écrite
pour présenter cette maison.
La démarche en classe de l’enseignante a été la suivante:
- Après les salutations, l’enseignante a projeté les images
sur l’écran et a posé des questions pour présenter la Maison des
esprits;
- La phase suivante était pour expliquer le lexique.
L’enseignante a fait comprendre d’abord ce qu’est une maison
des esprits en Thaïlande puis les mots et expressions qui y sont
lié. Elle a aussi fourni des éléments culturels jugés nécessaires
pour acquérir ce thème ‘croyances et religions’;
- La dernière partie était un exercice de questions-réponses,
et le cours s’est terminé avec une PO en petits groupes, corrigée
tout de suite collectivement à l’oral.

3. La didactique de classe de l’enseignante


de Mahasarakham (désormais M.)
À travers ce qui a été observé, les grands traits du profil
didactique de M. peut se décrire comme suit:
3.1. Des efforts pour relier enseignement et apprentissage;
appropriation de la forme et de l’emploi; savoirs linguistiques
et savoir-faire langagiers
Le 1er trait qui se dégage de cette classe, c’est que
l’enseignante a suivi l’ordre proposé dans le manuel: travail sur
les mots et les expressions, ensuite l’exercice de questions-
réponses (activité I) pour vérifier et consolider les acquis, enfin
la PE (activité II). Cependant, M. a montré des efforts visibles
pour relier l’enseignement et l’apprentissage: au lieu des
explications longues et théoriques, elle est partie de la réalité,

-194-
Communications de dimension globale

des connaissances linguistiques et des tentatives de réponse


des étudiants pour faire acquérir la leçon. Comme exemple,
elle a profité de ce qui se voit dans les 2 images projetées sur
l’écran, des savoirs quotidiens et linguistiques des étudiants pour
caractériser (8P), localiser «la maison des esprits» (8P, 29P), en
expliquer l’origine (23P, 29P) et les rituels (30P).
8P: Vous connaissez, un petit temple, petite maison. Mais chez nous, en
Thaïlande, si c’est dans un jardin c’est pour qui? Est-ce qu’on peut
habiter... là-dedans? On peut habiter?
6E: Non.
9P: On ne peut pas habiter. C’est pour qui?
7E: Un [la fantôme]
10P: Fantôme, fantôme, c’est Hou! Ça fait peur. C’est il y a un autre mot,
«des esprits»...
[...]
23P: [...] Cette maison, c’est une croyance, c’est une croyance. Vous
connaissez le verbe croire? Croire, oui. C’est une croyance bouddhique
ou une autre croyance? [...]
[...]
29P: [...]C’est une croyance mélangée entre le bouddhisme et le brahmanisme.
Mais qu’est-ce qu’on fait devant, qu’est-ce que vous faites devant la
maison des esprits, auprès de l’esprit maléfique, euh, bénéfique?
27E: On peut prier.
30P: Oui, on peut prier. On prie, bien sûr. Mais il y a aussi une expression: on
fait des vœux...

A remarquer le grand souci de l’enseignante de relier quasi


immédiatement l’appropriation à la compréhension de ce qui est
présenté. En fait, après l’explication, chaque mot/expression est
répété, individuellement ou collectivement (cf. 40P à 38E) pour
être acquis dans sa forme et dans son emploi:
40P: Regardez, il y a offrir de la nourriture/ offrir des offrandes aux esprits.
On offre de la nourriture aux esprits, aux bonzes. Alors, vous répétez:
j’offre de la nourriture aux esprits.
36E: J’offre de la nourriture aux esprits.

-195-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

41P: Je donne des offrandes aux esprits.


37E: Je donne des offrandes aux esprits.
42P: ... aux esprits. J’offre de la nourriture aux bonzes.
38E: J’offre de la nourriture aux bonzes.

Par ailleurs, quand l’enseignante repérait une erreur au


niveau de la forme (39E), de la prononciation, y compris la
liaison entre les mots (55P), ou de l’emploi (45P), en général,
elle les reprenait et corrigeait immédiatement puis faisait répéter
la bonne réponse:
43P: Je donne des offrandes aux bonzes.
39E: Je donne des offres... ondes aux bonzes
44P: des offrandes
40E (au même E): des offrandes aux bonzes.
45P: On ne dit pas offrir des offrandes parce que offre, répé… c’est répétition
/ tif ... Vous voyez, on dit donner des offrandes. Offrir et offrande, c’est
la même famille, et c’est une répétition. On ne le fait pas...
ou:
55E: C’est une petite maison ou une maison des esprits sans liaison.
64P: [deszespri]

A remarquer que ces corrections ont été faites comme «en


passant», mais systématiquement en fait, ce qui ne provoquait
pas d’émotions négatives, anxiété ou crainte chez les étudiants.
Le dernier point à signaler, c’est qu’en suivant le manuel,
l’enseignante a relié la linguistique au langagier et le savoir au savoir-
faire. En effet, l’activité II permet de réinvestir les mots et expressions
appris dans une PE, et M. l’a fait faire à l’écrit puis présenter sous
forme de brefs exposés. La présentation orale après le travail de
groupe a fait voir que les étudiants étaient capables de cette PE, et
certains se sont montrés créatifs dans cette activité, mobilisant les
mots et structures appris auparavant dans les autres leçons, au lieu
de réutiliser seulement ceux de ce cours:

-196-
Communications de dimension globale

65E: On l’appelle les maisons aux esprits. C’est une petite construction
perchée au sommet d’une colonne à hauteur. Elle peut être construite
en bois ou en béton. On donne des offrandes aux esprits si ses vœux
sont exaucés. Les esprits bénéfiques protègent du danger et des ca...
tastrophes
73P: catastrophes...

3.2. Explications brèves et place importante accordée


à l’acquisition au travers des répétitions et du réemploi
La technique adoptée en classe par M. est celle communément
utilisée: explications et questions-réponses. Cependant, on peut
signaler que
- Comparées aux explications des autres enseignants, celles
de M. étaient plutôt brèves, répétées ou reformulées de plusieurs
manières. Par exemple, les explications suivantes de pilier et
colonne:
18P: […]Cette petite maison... est sur quoi? Ce petit temple, cette petite
maison... est sur quoi, cette partie... là (curseur sur l’image) comment
ça s’appelle? Qu’est-ce que c’est? Qu’est-ce que c’est, ça? Vous
connaissez le mot? Ça comment ça s’appelle? ...
On l’appelle un pilier ou une ... si c’est grand, une colonne. Répétez, un pilier.
22P: […]un pilier, c’est petit. Une colonne, c’est grand comme en Grèce, une
grande colonne.

- Les explications se faisaient souvent comme «mélangées»


avec des questions qui, elles, étaient répétées, reformulées (34P),
parfois volontairement peu claires et/ou arrêtées à mi-chemin
pour que les apprenants les complètent (35P, 36P), requérant
obligatoirement la participation des étudiants, que M. appelait ou
désignait (31E à 35E):
34P: On dit comme ça, ce sont des expressions. Des vœux sont exaucés. On
fait des vœux auprès des esprits bénéfiques. Une fois des vœux sont
exaucés, qu’est-ce que vous apportez devant la maison, qu’est-ce que
vous apportez? On offre quoi à l’esprit bénéfique? Qu’est-ce qu’on
offre, qu’est-ce qu’on apporte? Qu’est-ce qu’on offre aux esprits?
35P: Ça (montrant sur le paquet l’image de la nourriture) c’est de la nour…

-197-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

31E: la nourriture
36P: la nourriture, des boissons et…
32E: des fruits
37P: des fruits. On appelle ça ... une offrande. Ah, verbe offrir, une offrande.
de la nourriture, de l’eau, c’est une offrande. Alors, vous répétez: une offrande
33E: une offrande
34E: une offrande
39P: des offrandes
35E: des offrandes

Il est à souligner que M. était prête à s’arrêter au milieu de


son explication pour réagir aux réponses des apprenants, même
si ces dernières arrivaient un peu tard. Dans la réplique 29P
suivante, M. est retournée à la localisation de la maison des
esprits faite par un étudiant (en 26E), même si dans 28P, elle
était déjà passée à la question sur le rituel fait devant la maison
28P: Qui a la maison des esprits dans la ... euh ... devant la maison? Et
qu’est-ce qu’on fait devant la maison des esprits? Souvent les gens,
qu’est-ce qu’ils font?
26E: ... Ah ... devant les grands magasins…
29P: Oui devant les grands magasins, il y a les maisons des esprits ... les
grandes sociétés, les maisons des gens… C’est une croyance mélangée
entre le bouddhisme et le brahmanisme... Mais qu’est-ce qu’on fait
devant, qu’est-ce que vous faites devant la maison des esprits, auprès
de l’esprit maléfique, euh, bénéfique?

3.3. Les interactions dans les deux sens:


enseignante-étudiants et étudiants-étudiants
Les interactions entre enseignante et étudiants en classe
ont été effectuées de manière assez équilibrée. Face à 78
répliques de M., il y en a eu 71 des étudiants, ce qui montre
que M. n’a pas gardé le monopole de la parole en classe. Elle a
également organisé les étudiants en binômes ou trinômes, les
laissant travailler ensemble pour rédiger un texte et en préparer

-198-
Communications de dimension globale

la présentation orale, circulant entre les groupes pour vérifier le


travail et apporter de l’aide quand nécessaire:
62P: Voilà très bien. Maintenant, vous faites à deux, c’est à deux, chacun sa
feuille.
63P (passant voir travailler un binôme): Un pilier unique. Où on peut la
trouver?

Par ailleurs, si dans la 1re partie du cours, la direction des


échanges était de l’enseignante vers les étudiants, à partir de
la réplique 55E, c’était l’inverse. Vers la fin du cours, c’est les
étudiants qui parlaient, l’enseignante écoutait, apportait des
corrections (64P, 65P, 66P), ou des confirmations (67P):
55E: C’est une petite maison ou une maison des esprits (sans liaison)
64P: /dezespri/ (P. reprenant la prononciation de «des esprits» )
56E: pour un ... pour un esprit bénéfique, elle est située avant la maison ou
dans les jardins.
65P: Encore une fois: elle est située
57E: Ah! Elle est située avant...
66P: devant...
58E: devant les maisons ou dans les jardins.
67P: dans le jardin, oui.

3.4. Relations faciles entre enseignante et étudiants,


et réponse immédiate aux besoins des étudiants en classe
Les relations entre M. et ses étudiants en classe paraissaient
faciles. D’abord, souvent l’enseignante appelait les étudiants par
leur prénom (27P, 71P) pour les faire participer:
27P: [...]Est-ce qu’il y a une maison des esprits chez vous? Oui? Non?
Katekanok, chez toi, est-ce qu’il y a une maison des esprits? ...
25E: (Katekanok) Non.
ou:
71P: [...] Alors quel groupe, quel groupe veuille... le groupe de Siriladda, allez!

-199-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Elle pouvait suivre un(e) étudiant(e) à travers quelques répliques,


jusqu’à la bonne réponse, comme avec l’étudiante Sunisa:
55P: C’est pas pour le talisman. On ne peut pas mettre le talisman dedans.
Sunisa, c’est pour…
48E: [Sunisa] Pour un esprit…
56P: Un esprit comment? Maléfique ou bénéfique?
49E: [Sunisa] Un esprit bénéfique.

Ensuite, ce qui est frappant, c’est que les étudiants ne


semblent pas hésiter à poser des questions lorsqu’ils y sont
invités et l’enseignante d’y répondre. Cela révèle les relations de
confiance bien établies entre M. et ses étudiants, ce qui profite à
leur apprentissage et acquisition.
73P: [...] Avez-vous des questions? Ou pas bien compris?
Le verbe ‘exaucer’? Oui...
[...]
66E: Qu’est-ce que le mot ‘aux bonzes’?
74P: Oui le bonze, [...]

4. Quelques premières remarques sur le cours


L’analyse du cours filmé nous amène à penser que;
- Le cours était plus centré sur les objectifs d’appropriation
et sur les apprenants que sur le contenu ou les savoirs.
L’enseignante est restée très près du document du manuel
même si celui-ci est très peu étoffé, mais elle a réussi à établir un
certain équilibre entre savoirs et pratique. En effet, une grande
partie du cours a été consacrée à l’appropriation des savoirs
linguistiques, mais ce dernier s’est terminé sur des activités plus
communicatives dans lesquelles les étudiants ont joué un plus
grand rôle: réponses orales aux questions du manuel (activité I),
discussions en binômes/trinômes pour réaliser ensemble une PE
puis la présenter (activité II) devant la classe.

-200-
Communications de dimension globale

- La classe a été menée de façon simple, sans beaucoup de


recours au matériel technologique. Pourtant, M. a réussi à installer
et à maintenir pendant 2 heures de suite une ambiance de classe
participante. Avec des techniques de travail héritées sans doute
de ses expériences de professeur de lycée aux apprenants
débutants: brèves explications, questions concrètes avec des
reformulations ou guidages quand nécessaire, apprentissage
immédiat en classe des mots et phrases à travers les répétitions,
les activités de pratique et le travail de groupe, surtout l’attitude
calme et le rythme de travail raisonnable, M. a aidé ses étudiants
à réaliser les objectifs de compréhension et de production
préconisés dans le document de travail.
Synthèse de la Partie thaïlandaise
L’analyse de ces 3 classes nous montre que:
- Les didactiques de PY et de T. se ressemblent assez,
du fait que, l’un(e) et l’autre de ces deux enseignants incitent
à un travail intellectuel sur la langue plutôt qu’à sa pratique. La
connaissance «théorique» du vocabulaire et de la grammaire
semble l’emporter sur les compétences communicatives et les
objectifs pragmatiques de l’enseignement/apprentissage du
FOS - apprendre pour faire, se comporter en professionnels -
ne se manifestent pas très clairement pendant ces cours. Les
explications longues, parfois trop détaillées ou de caractère trop
linguistique à cause du métalangage utilisé, surtout l’absence
d’activités de mémorisation, de réemploi et de communications
simulées au moyen des jeux de rôles, dramatisation, simulation...
à partir de ce qui a été appris en classe, ne favorisent pas
l’appropriation des paroles, actes, tournures et gestes spécifiques
de la profession visée. De là, les cours du FOS ressemblent à
des cours universitaires de spécialités au lieu d’être suffisamment
pratique pour la formation à la fois langagière et professionnelle
en français.

-201-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Par ailleurs, ces didactiques de classe ont tendance à


centrer sur une compétence au lieu d’associer les différentes
compétences. Par exemple pour PY, c’est la compétence
linguistique et pour T., c’est la compréhension orale. Comme
moyen de pratique et d’évaluation, ils semblent préférer les
exercices écrits et devoirs à domicile - de là des renvois de
devoirs à la maison dans les deux cours - aux activités en classe
qui font appel au travail autonome individuel ou en groupe des
étudiants. Quant aux procédés d’enseignement, l’importance
est accordée aux explications de l’enseignant plus qu’au travail
de découverte par les apprenants (e.g. recherche individuelle
et/ou collective des étudiants sur le web du sens des mots/
expressions, de leur emploi dans les différentes structures...
avec le smartphone que ces derniers possèdent); l’aide directe
du professeur est plus usitée que le guidage pour résoudre
les exercices ou pour comprendre les documents. Surtout, peu
d’activités communicatives sont organisées en classe en vue de
construire les compétences communicatives et professionnelles.
- Enfin, en ce qui concerne l’utilisation du manuel, les deux
enseignants, surtout T., ont opéré des changements et/ou omissions
importants aussi bien dans les contenus que relatifs aux techniques
didactiques et pédagogiques. De là, leurs cours semblent apporter
des résultats différents de ceux prévus par la méthode et laissent voir
la tendance des enseignements centrés sur les savoirs linguistiques
plus que sur les savoir-faire langagiers et savoir-être professionnels,
qui sont les objectifs prioritaires du FOS.
La didactique de l’enseignant(e) M. par contre était différente.
Même si la 1re partie d’étude linguistique (lexique, expressions et
prononciation) s’est faite de manière assez similaire aux autres
cours observés avec le jeu de questions-réponses, M. s’est
détachée clairement de l’habitude universitaire d’explications en
détail ou approfondies. Au contraire, elle a demandé beaucoup
de répétitions, de mémorisations et de réutilisation des mots

-202-
Communications de dimension globale

et structures appris. Vers la fin du cours, elle est passée au


réinvestissement des acquis, ce qui a permis de réaliser l’objectif
principal de l’enseignement/apprentissage: aider les apprenants
à aller des connaissances linguistiques et socioculturelles à
la PE-PO, compétences importantes pour le travail de guide
touristique.

BIBLIOGRAPHIE (V. DANS LA PARTIE VIETNAMIENNE )


Annexes
1a- Grille d’analyse [condensée] du manuel (une fiche par
cours)
1b- Grille d’analyse [condensée] du cours à partir de la vidéo
(une fiche par cours)
(V. dans la PARTIE VIETNAMIENNE )

2- Exemples de leçons, de transcriptions des cours filmés et


interviews en Thaïlande
2a- Manuels et leçons de FOS:
en Hôtellerie-restauration pour Guide touristique
(Phayao, Thammasat) (Mahasarakham)
CORBEAU S., DUBOIS C., PENFORNIS J.- CONSEIL SCIENTIFIQUE ET PEDAGOGIQUE
L., & SEMICHON L. (2018). Hôtellerie- DE THAÏLANDE. (1990). Bienvenue en Thaïlande
restauration.com (2e éd.). Paris, CLE II, Imprimerie KURUSPA, Bangkok.
International.

Maison des esprits (nf.)

-203-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Un esprit bénéfique ≠ un esprit maléfique


Un pillier unique = une colonne
Le brahmanisme
Le bouddhisme
v. offrir de la nourriture à quelqu’un = v.
donner des offrandes à quelqu’un
J’offre de la nourriture aux esprits. Je
donne des offrandes aux esprits.
v. protéger quelqu’un de quelque chose
Les esprits bénéfiques nous protègent
du danger et des catastrophes. (nf.)
Le talisman nous protège des esprits
maléfiques.
Une amulette nous protège de l’accident.
des esprits
v. faire des vœux bénéfiques
auprès de la statue de
Bouddha

Expression:
- Les vœux sont exaucés.
- Les esprits exaucent les vœux.
I. Répondez aux questions
1. Qu’est-ce que c’est?
2. Pour qui est cette petite maison?
3. Qui les esprits protègent-ils et de
quoi?
4. Que font les gens auprès des esprtits ?
5. Quand les vœux sont exaucés, que
font les gens?
II. Vous êtes guide, faites un texte pour
expliquer cette image.

2b- Transcription de la vidéo de classe, Université de Phayao

Codage: P = Professeur; E = étudiant; Es = étudiants; Chiffre (1, 2) = ordre


d’apparition dans le cours
1- Leçon: Unité 5, «Réclamations» Leçon 1, Garçon, s’il vous plaît!, pp.64-65
Méthode: Hôtellerie-restauration.com (2ème édition)
avec: - Guide pédagogique
- Livre de l’élève
- CD audio

-204-
Communications de dimension globale

Auteurs: Sophie Corbeau, Chantal Dubois, Jean-Luc Penfornis, Laurent Semichon


Edition: CLE International
2- Classe de FLE Effectif de la classe: 8 étudiants (E) de 3e année: 4-F et 4-H
3- Durée du cours: 2 heures, 25 mars 2019 à PHAYAO
DEROULEMENT
1P: Bonjour, comment ça va?
1E: Ça va bien.
2P: Aujourd’hui, il y a quelques personnes absentes?
2E: Oui. Il y a deux personnes absentes.
3P: C’est qui? Pourquoi ils sont absents?
3E: Ils ont voté.
[...]
8P: Aujourd’hui, on va étudier l’unité 5, «Réclamations».
Qu’est-ce que vous avez étudié la dernière fois?
7E: La service de l’étage.
9P: À l’étage, qu’est-ce que c’est dans le service? C’est quoi?
8E: La chambre, on fait la chambre.
10P: Il y a deux types de vocabulaire pour faire la chambre?
[...]
14P: Regardez l’image en haut de la page 64. Il y a combien de personnes?
13E: Il y a quatre personnes: un client et 3 personnels.
15P: Ils font quoi, ces personnels? Regardez ces uniformes.
14E: Ils sont serveurs.
16P: Deux hommes sont serveurs et une femme est serveuse. Ils regardent un
morceau sur la fourchette d’un client. Le client est content?
15E: Il n’est pas content.
17P: Il veut réclamer.
18P: Lisez le thème de l’exercice 1.
16E: Garçon, s’il vous plaît!
19P: Garçon, c’est qui?

-205-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

17E: C’est un serveur.


[...]
73P: Voilà, on finit pour aujourd’hui. Le devoir, vous écoutez la compréhension
orale de l’exercice 5.
Vous comprenez bien la consigne? Merci pour aujourd’hui et demain à 8
heures. Au revoir.

2c- Transcription d’une interview (Université Thammasat)

Interviewer (I) : Comment vous vous appelez? [...]


Interviewer (I) : Depuis quand enseignez-vous dans cette université?
Enseignante (E): Depuis 22 ans [...]
Interviewer (I): Vous travaillez avec des étudiants de quelles années? Ils sont à
quel niveau en français et en formation de spécialité?
[...]
Interviewer (I): Les termes comme «méthodologie traditionnelle, SGAV, approche
communicative, actionnelle ou par compétences» vous disent quelque chose? Comment
peut-on les reconnaître?
Enseignante (E): J’ai entendu parler de la méthodologie traditionnelle, SGAV dans
le cours de linguistique appliquée à l’université Paris III et les autres termes dans le
séminaire sur l’apprentissage du français quand je suis devenue enseignante.
[...]

Plurilinguisme et Francophonie

-206-
PLURILINGUISME ET CONTEXTUALISATION
- RÉFLEXIONS SUR LE CONTEXTE D’ASIE

PHAM Anh Tu
École Supérieure de Langues Étrangères -
Université de Hué - Vietnam

Résumé:
Comment adapter le plurilinguisme et le CECRL au contexte de l’Asie sans
nuisance à la politique linguistique que poursuivent les pays de ce continent?
Réflexions sur une contextualisation permettant une pluralité socio-linguistique et
culturelle, où la place du français trouvera, nous l’espérons, une (re)valorisation
pour un but plus éducatif et humaniste et pourra se renforcer en tant moyen de
communication et d’expression francophones.
Mots-clés: plurilinguisme - pluriculturalisme - CECRL - contextualisation

Cet article ne se veut pas ambitieux. Il ne vise point à changer,


d’une manière radicale, nombreuses politiques linguistiques qui
existent en Asie, nuancées par les conditions géo-politiques des
pays du continent, mais plutôt fournit une vision panoramique
sur le multilinguisme et le plurilinguisme, d’où l’essai d’une
contextualisation au profit de la langue française. En bref, la
question que nous nous sommes posée semble simple, pourtant
la réponse pourra conduire aux débats thématiques: Alors que tout
changement sera dans l’impasse, que pourrons-nous envisager
la place du français dans cette coexistence des langues?
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Multilinguisme - Plurinlinguisme et Plurilinguisme contextualisé


Le Conseil de l’Europe, dans le Cadre Européen Commun de
Référence des Langues (CECRL - 2008), a défini les deux termes
«multilinguisme» et «plurilinguisme». Si le premier concerne
la coxistence de plusieurs langues sur un seul territoire (pays,
région,…) ou dans une seule société (entreprise, communauté
ethnique,…), il s’agit, dans le deuxième, de l’expérience langagière
des individus dans leur situation culturelle en dehors du contexte
familial et dans le groupe social auquel ils appartiennent. La
différence entre les deux préfixes «multi-» et «pluri-» est, sous
l’angle morphologique, bien claire: alors que «multi-», qui, venant
du latin, signifie «nombreux», entre dans la composition de
«multilinguisme» pour désigner cette cohabitation, on voit par
«pluri-» ce qui réfère à «plusieurs» et qui concerne un acte plus
personnel que communautaire.
On peut ainsi comprendre que cette communauté revient
plutôt à une description des faits, cas qui se voient au Canada, en
Suisse, en Belgique, dans les pays africains,… où se pratiquent
plusieurs langues, que ce soient, si on parle de l’Europe, langues
sur la même échelle européenne (français, allemand, italien,…)
ou, de l’Afrique, langue première/langue seconde. Le problème est
de savoir si ces nombreuses langues, vivant en une coexistence
pacifique nous l’espérons, se situent dans leur vraie autonomie
linguistique ou, au contraire, s’attachent, par les besoins
propres de ceux qui les utilisent, à une interdépendance socio-
culturelle permanente. Cette question nous semble rhétorique
car, selon V. Orioles (2004: 17), «tout individu est plurilingue à
la naissance, dans la mesure où il est capable d’alterner des
formes expressives provenant de dialectes géographiques
et sociaux, de registres formels ou familiers, en traversant
l’une ou l’autre des régions qui forment l’espace communicatif
ou répertoire d’une communauté linguistique déterminée.» Ainsi,
pour le plurilinguisme, on trouve plutôt l’ensemble des actes qui,

-208-
Communications de dimension globale

passant d’une langue à une autre, transforment des besoins


en autres afin de poursuivre les communications. Les individus,
lorsque les conditions ont été satisfaisantes, sont capables de
communiquer en plusieurs langues et deviennent plurilingues,
même dès leur jeune âge. Il ne s’agit pas, pour eux, de la
maîtrise parfaite des règles morpho-syntaxiques et lexicales de
chaque langue pratiquée, il leur faudrait tout simplement savoir
les utiliser, dans de très simples situations, pour comprendre et
se faire comprendre. L’erreur, assez fréquente chez plusieurs,
surtout chez les enseignants, réside dans le fait de juger les
communicants «selon le niveau du CECRL» et de ne fouiller
dans leur exposé que les lacunes concernant la connaissance
de la langue (morpho-syntaxe, lexique, phonologie,…), et de
se passer des valeurs paralinguistique et socio-culturelles que
relève cette communication. Pour cela, il semble nécessaire de
revoir la tâche des communicants, dont les apprenants, dans
l’acte de communication, dans le sens qu’»elle (la perspective
privilégiée) considère avant tout l’usager et l’apprenant d’une
langue comme des acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches
(qui ne sont pas seulement langagières) dans des circonstances
et un environnement donné, à l’intérieur d’un domaine d’action
particulier. Si les actes de parole se réalisent dans les activités
langagières, celles-ci s’inscrivent elles-mêmes à l’intérieur
d’actions en contexte social qui seules leur donnent leur pleine
signification» (CECRL: 15).
Ainsi la description des faits qu’est le multilinguisme ne peut-
elle pas exister seule, elle vit aux dépens du plurilinguisme, qui
s’en sert comme contexte de base lui permettant de se concrétiser
et après de s’effectuer. Si nous prenons le contexte de l’Europe,
avec son CECRL, le schéma que propose C. Puren (2012: 10)
donne une vision claire du multilinguisme et du multiculturalisme,
à partir de laquelle sont nées la compétence plurilingue et
pluriculturelle et la perspective actionnelle.

-209-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

C. Puren (2012: 10)

Des termes nominalisés «vivre - faire - faire société - travailler


ensemble» sollicitent les apprenants, ainsi que les enseignants,
de contextualiser la situation - classe, où les apprenants sont,
pour la plupart des cas, pluriculturels, parfois de contextualiser
même le contexte, afin d’habituer les premiers aux situations
partiellement ou totalement réelles. Nous rejoignons ainsi C.
Puren (2012: 10), qui constate qu’ «on y (le passage du CECRL)
voit la société-classe considérée comme une véritable société, et
les élèves considérés comme de véritables acteurs sociaux dans
leur apprentissage collectif. On retrouve là l’homologie entre la
situation d’apprentissage et la situation d’usage qui est à la base
de la dite «pédagogie de projet».
La contextualisation concerne, dans ce sens, les interactions
enseignées et apprises, celles effectuées en classe et hors-classe,
les modalités culturelles dans les contextes sociolinguistiques
cibles et, par cela, les modalités d’interactions interculturelles
par les contacts avec les personnes de communautés différentes
en mobilisant une/des langue/s partagée/s à des degrés divers.
Tout cela est accompagné des dispositifs d’enseignement-
apprentissage afin de répondre aux insuffisances des dispositifs
(politiques linguistiques éducatives, programmes, méthodes,

-210-
Communications de dimension globale

objectifs,…). «Toute pratique didactique, a souligné P. Blanchet


(2009: 01), (et toute pratique linguistique) est ou devrait être
pensée selon le contexte social qui la constitue et qu’elle contribue
à façonner. C’est cette prise en compte active des contextes dans
le tissage concret des pratiques didactiques et didactologiques
qu’on appelle contextualisation, en insistant davantage sur le
processus que sur un «donné», qui ne serait qu’un simple décor.»
Voilà ce que nous pouvons voir sur le plurilinguisme dans
une vision théorique et surtout européenne.
Un plurilinguisme au contexte d’Asie serait-il faisable?
Il semble nécessaire de nous rendre compte de l’application
du plurilinguisme «européen» à notre terrain, pourtant cette
faisablilité devrait s’envisager en prenant toute précaution
possible, et ce pour plusieurs raisons.
Le CECRL a été proposé afin de répondre au conditions
de l’Europe, où les apprentissages se sont organisés autour
de la standarlisation et de la rationalisation des modèles
d’enseignement des langues au niveau européen. Fruit de création
et d’organisation d’un mouvement didactique continental, ce
Cadre a été conçu pour un système d’interlangues, en moyennant
un vocablulaire didactique commun et partagé, et dont le but
est de créer une éducation transnationale pour la citoyenneté
européenne.
La situation asiatique, et plus précisément, vietnamienne,
n’est clairement pas dans ce sens. Les conditions, surtout géo-
politiques, se diffèrent nettement, ce qui ne permet pas un Cadre
pareil au service d’une future (mais incertaine) citoyenneté
asiatique et une «Union asiatique» tel qu’on peut la voir depuis des
décennies en Europe. La croissance économique du Japon, celle
des nouveaux pays industrialisés (NPI) et de la Chine récemment,
tout a été et sera dans le sens de mondialisation économique
dont l’envergure semble dépasser la taille continentale. Nous

-211-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

nous rendons compte que, dans ce contexte, un lien des pays


de l’Asie, économiquement grands et/ou petits, reste encore dans
des rapports plus commerciaux que culturels, et l’anglais, qui
présente son aspect international, se prend donc comme moyen
d’échanges principal. «Il est probable, a souligné L. Parmenter
(2003: 143) en parlant de cette langue, que ceux qui préféreraient
que l’anglais soit, dans la mesure du possible, un «pur» outil
de communication, s’opposent à l’idée de devoir faire figurer la
compétence interculturelle dans l’enseignement de la langue
étrangère/deuxième langue.» Autrement dit, est fréquente l’idée
de l’enseigner sans tenir compte, ou peu, des aspects et contextes
culturels, et les langues enseignées ne seraient qu’un outil de
réussite économique en se passant des éléments culturels qui
résident méthodiquement à l’intérieur de la langue.
Parlant du Vietnam et de l’Indochine, on penserait à la
francophonie, liée historiquement à l’empire colonial français, il
s’ensuit que les origines puissent se voir de la même manière
(Inde et Birmanie - pays anglophones, Indonésie - pays
néerlandophone ou Philippines - pays hispanophone,…) et les
acquisitions linguistiques et culturelles se font plus sur l’axe
temporel (passé - présent) que sur les rapports géographiques
et contemporains, se basant sur les besoins transnationaux pour
lesquels l’anglais reste presque le seul moyen d’échanges. Il
est donc rare qu’un étudiant japonais fasse une recherche sur
Marcel Proust, ou qu’un chercheur philippin rédige sa thèse sur
l’architecture romaine, alors que le Japon et les Philippines, et
bien d’autres nations, s’investissent volontairement pour la mise
en place de l’industrie 4.0. Ce choix s’explique, dans une vision
pragmatique, par la recherche de ce qui sert, d’une manière
directe, aux besoins directs du terrain et aux objectifs plus
fonctionnels que culturels.
Côté géolinguistique, alors que le CECRL, démarche
initialement européenne, a pour objectif d’identifier et d’établir

-212-
Communications de dimension globale

les facettes théoriques de l’enseignement d’une langue pour


optimiser l’étude des langues qui véhiculent en Europe, il n’en est
pas de même à propos du contexte de l’Asie, et celles-ci ne sont
pas ses langues «voisines», détail très important à l’intention des
didacticiens du continent pour la tentative d’application du Cadre.
L’objectif visé devrait donc se voir dans une modification radicale,
puisque la fin ne justifie pas, en ce cas, les moyens.
Alors que feraient les responsables ministériels asiatiques
pour l’adaptation du CECRL, en faveur non seulement de l’anglais,
mais encore d’autres langues européennes? Il est illusoire d’y
mettre un état d’équilibre linguistique car l’anglo-américain
symbolise toujours l’hyperpuissance aux niveaux international et
continental, l’important est de trouver des arguments permettant
à celles-ci de pouvoir s’enseigner et de se pratiquer.
Le français - Essai de contextualisation
On constate facilement que cette langue n’est pas, au niveau
mondial, d’une priorité élevée au service des lois du marché. Sa
position au sein des établissements scolaires et universitaires
devrait être envisagée en ce sens. Le fait de la positionner serait
donc très subtil, sans nuisance au politique plurilingue que
poursuivent les pays.
La contribution importante de la part du français consiste à
jouer le «rôle de médiateur» - terme utilisé par J. N. Nishiyama
(2010: 16), entre les professeurs de langue dans les pays
concernés. L’enseignement/apprentissage du français a donné,
et continue de le faire, tant de ressources didactiques et
pédagogiques enrichissants qu’elles pourraient se partager
avec la didactique d’autres langues. La coordination nationale,
et transnationale après, ouvrira une perspective du CECRL
contextualisé dans la mesure où, dans l’ensemble des langues
étrangères concernées, les techniques d’enseigner une langue
(pratique linguistique, pratique interactionnelle, savoirs, savoir-

-213-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

faire, …) peuvent se reprendre dans une autre pour une meilleure


acquisition. Un dialogue des langues, plus précisément celui des
gens qui les enseignent, servira à l’enrichissement des approches
méthodologiques et prendra forme, d’une manière initiale mais
efficace, du plurilinguisme encadré au milieu scolaire. Une telle
tentative pourra, loin de le quitter, renforcera davantage le CECRL,
institué pour promouvoir le plurilinguisme et le pluriculturalisme.
«Il ne s’agit en aucun cas, ont souligné S. Alby et M. Launey
(2007: 16), d’axer la formation sur des savoir-faire ponctuels ou
des «recettes» qui ne résolvent que des problèmes ciblés. Elle se
construit autour de véritables connaissances, à partir desquelles
chaque enseignant pourra mettre en pratique ses compétences
professionnelles pour trouver de manière souple et diversifiée les
moyens de sortir de telle ou telle difficulté.»
Toujours en sens de contextualisation, il pourrait y avoir la
place du français reconnu comme langue (étrangère) seconde, si
l’on acceptait que l’apprenant soit formé en plusieurs langues. Il
est à constater que, depuis des décennies, l’enseignement des
langues connaît de grandes transformations, concernant le public
apprenants, les besoins et surtout le contexte d’apprentissage, avec
l’intervention presque permanente des technologies performantes.
L’atout du choix de «langue seconde» consiste à développer les
passerelles des langues proches (français, anglais, espagnol,…)
et à permettre, de cela, des voies d’accès rapides à une langue
donnée sur la base de la connaissance préalable d’une langue de
la même famille. D’autres avantages seraient à prévoir, à propos
des approches interculturelles, facilitant d’abord la comparaison
linguistique et ensuite les outils de prise de conscience d’autres
cultures, en passant par les ouvrages bilingues ou trilingues et les
contacts avec les natifs médiateurs. Il s’agit donc de ne pas mettre
les langues en concurrence, mais plutôt de promouvoir la richesse
linguistique et culturelle. Et le français peut, nous le pensons,
subsister en s’adaptant à ces nouveaux contextes.

-214-
Communications de dimension globale

J. N. Nishiyama (2010: 17) a cité H. Uzawa, économiste


japonais, qui avait présenté la notion de «capital collectif social».
Selon le dernier, ce capital doit ne pas être géré en fonction
des principes du marché, mais selon des critères sociétaux,
et est constitué de trois catégories: l’environnement naturel,
l’infrastructure sociale et le capital institutionnel. C’est l’éducation
qui fait partie intégrante de ce capital institutionnel dont la
résistance aux lois du marché demande une compensation
sociale, puisque l’éducation a une vocation, non pas mercantile,
mais plus humaniste. Concernant les objectifs de l’enseignement
du français, il est nécessaire qu’ils soient, d’après J. N. Nishiyama
(2010), non seulement d’ordre opérationnel mais aussi d’ordre
plus éducatif et plus humaniste et peuvent constituer, avec
d’autres langues, une base de ce «capital collectif social» en
ne se réduisant pas au plan purement utilitaire et fonctionnel.
«Si l’enseignement, du primaire au supérieur, a signalé J.
N. Nishiyama (2010: 18,19), était uniquement orienté vers l’
enseignement opérationnel de l’anglais et d’autres langues dans
un intérêt fonctionnel, nos élèves seraient privés de connaître
d’autres manières de voir le monde, et cela risquerait d’aboutir à
un monde dénué de diversité culturelle et linguistique.»
Pour conclure
Par ce qui a été traité, l’ambition n’est pas de tout changer
et de remettre en ordre une politique linguistique déjà ancrée,
qui connaît déjà un processus reconnu pour ses réussites et
l’approbation majeure des pays concernés du continent. L’idée
de contextualisation se fait donc dans la tentative d’analyser
davantage un plurilinguisme plus contextualisé et de modifier,
d’une manière légère, les objectifs de l’enseignement des
langues permettant la perspective de pluralité socio-linguistique
et culturelle en faveur des apprenants asiatiques. Deux détails
à noter en particulier: cette modification dépend du cadre des
projets éducationnels de chaque nation, une solution passe-

-215-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

partout étant illusoire, et l’effort des enseignants, à eux seuls, est


aussi dans cette illusion, puisque le changement se veut moins
horizontal que vertical.
Hué, août 2019

BIBLIOGRAPHIE
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contexte plurilingue et pluriculturel in HAL archives-ouvertes.
fr,https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00290126/
document. Consulté le 25 juin 2019.
2. BLANCHET P., 2009, «Contextualisation didactique: de quoi
parle- t-on?» in LE FRANÇAIS À L’UNIVERSITÉ No 2, 2009,
http://www.bulletin.auf.org/index.php?id=833. Consulté le 25
juin 2019.
3. CONSEIL DE L’EUROPE, 2006, L’éducation plurilingue en
Europe - 50 ans de coopération internationale, Division des
Politiques linguistiques, Strasbourg.
4. CONSEIL DE L’EUROPE, 2004, Cadre européen commun
de référence pour les langues: apprendre, enseigner, évaluer
(CECR), Division des Politiques Linguistiques, Strasbourg.
5. COSTE D., 2007, Le Cadre européen commun de référence pour
les langues. Contextualisation et/ou standardisation? Texte
issu de l’intervention de Daniel Coste lors du colloque de la
FIPF de juin 2007.
6. CUQ J.-P., 1989, «Français langue seconde: essai
de conceptualisation» in PERSÉE - L’INFORMATION
GRAMMATICALE, no 43, 1989, pp. 36-40.
7. NISHIYAMA J. N., 2010, Contextualiser le CECR en Asie du Nord-
Est, un rêve ou une source d’inspiration? in http://www.flae.h.kyoto-u.
ac.jp/2010_Dayeh_Taiwain.pdf. Consulté le 22 juin 2019.

-216-
Communications de dimension globale

8. PHAM D. S., THIPKONG P., 2016, «Formation à la


compétence plurilinge-pluriculturelle en Asie du Sud-Est;
quelques réflexions à partir des données sociolinguistiques
recueillies» in SYNERGIES PAYS RIVERAINS DU MÉKONG,
no 8-2016, pp. 145 - 156.
9. PUREN C., 2012, «Perspectives actionnelles sur la littérature
dans l’enseignement scolaire et universitaire des langues-
cultures: des tâches scolaires sur les textes aux actions
sociales par les textes» in Publication exclusive pour le site
www.christianpuren.com PUREN_2012d_PA_littérature.pdf.
Consulté le 28 juin 2019.
10. ORIOLES V., 2004, «Plurilinguisme: modèles interprétatifs,
terminologie et retombées institutionnelles» in REVUE
FRANÇAISE DE LINGUISTIQUE APPLIQUÉE, no 2004/4
(Vol. IX), pp. 11-30.
11. PARMENTER L., 2003, «Description et définition de la
compétence communicative interculturelle: perspectives
internationales» in LA COMPÉTENCE INTERCULTURELLE,
Strasbourg: Éditions du Conseil de l’Europe, pp. 125-156.
12. SAGAZ Michel, DUCATEL Nicolas, 2011, «Pourquoi adopter
le CECR au Japon?» in SYNERGIES no 6, pp. 153-163.

-217-
COMMUNICATIONS DE DIMENSION SPECIFIQUE

1. Les TIC pour enseigner/apprendre le français


APPORTS DES TICE ET DE LA RÉVISION COLLABORATIVE
À L’AMÉLIORATION DE LA COMPÉTENCE DE PRODUCTION
ÉCRITE: EXEMPLE D’UN JUMELAGE ENTRE LE CANADA
ET LE VIETNAM

DO Thi Bich Thuy, Université de langues et d’études internationales -


Université Nationale du Vietnam à Hanoi
BARON Agnès, Université du Québec à Montréal

Résumé:
Des outils numériques ont été introduits dans le cours de production écrite
par deux enseignantes de français dans deux universités au Canada et au Vietnam.
L’objectif est d’aider les étudiants à améliorer leur compétence de production écrite
et de donner une dimension utilitaire aux écrits en classe de langues. Pendant 12
semaines, les deux classes de français à Québec et à Hanoi ont utilisé Facebook,
Messenger, email et Word pour se faire connaissance, former des groupes de pairs,
corriger à distance quatre rédactions de leurs pairs et faire une deuxième version
de leur rédaction suite aux remarques des pairs. L’analyse des textes produits par
les étudiants au début et à la fin du jumelage et des bilans du jumelage a montré
les gains pédagogiques et psychologiques de l’intégration des outils numériques
et de la révision collaborative dans la classe de langues.
Mots-clés: Outils numériques;révision collaborative;compétence de production
écrite;jumelage;motivation

1. Introduction
A l’ère numérique, l’introduction des outils numériques dans
l’enseignement et l’apprentissage des langues a connu une croissance
considérable. Des nouvelles technologies comme le tableau blanc
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

interactif (TBI), les logiciels de traitement de texte, Framapad, Padlet...


sont de plus en plus présentes dans les cours de production écrite.
De nombreuses recherches ont montré des impacts positifs de ces
moyens technologiques sur le développement de la compétence
de production écrite, surtout dans l’écriture collaborative (Afifi, 2017;
Bonnassies, 2006; Hocine, 2011) et dans la révision collaborative
(Hafiz-Khodja, 2015; Kim, Bowles, Yan & Chung, 2018). Cependant,
peu d’études ont recours à des analyses statistiques ou combinent
les données quantitatives et qualitatives ou proposent un jumelage
entre deux pays.
Notre recherche vise à compléter ces lacunes de recherche.
Elle a pour objectif de mesurer les impacts de l’introduction des
outils numériques et de la révision collaborative sur la compétence
de production écrite. Nos étudiants ont utilisé l’email, un groupe
privé sur Facebook, la fonction Messenger, le traitement de texte
et la fonction Commentaire sur Word pour produire leur texte et
réviser le texte de leur pair étranger.
Notre communication s’inscrit dans la première thématique
du séminaire - la problématique de la didactique, l’introduction
des technologies dans les classes ou formations.
1.1. Revue de littérature
1.1.1. L’introduction des technologies dans les cours de production écrite
Plusieurs recherches ont rapporté l’usage des outils numériques
dans les cours de production écrite (Afifi, 2017; Bonnassies, 2006;
Hafiz-Khodja, 2015; Hocine, 2011; Kim et al., 2018). Les participants
à ces travaux apprenaient le français langue maternelle (Hafiz-
Khodja, 2015) ou le français langue étrangère (Afifi, 2017; Hocine,
2011) ou l’anglais langue étrangère (Bonnassies, 2006; Kim et al.,
2018). Storybird, un logiciel d’édition de livre en ligne a été utilisé par
Afifi (2017) et Hafiz-Khodja (2015) pour faire produire un album de
contes avec illustrations ou des bandes dessinées. Le traitement de
texte Word, le courrier électronique, les ressources en ligne et des

-220-
Communications de dimension spécifique

logiciels spécifiques ont été introduits dans la classe de Bonnassies


(2006) pour faire rédiger des comptes-rendus collaboratifs. La
création d’un blog a permis aux élèves de Hocine (2011) de produire
un journal de bord de la classe.
Les avantages de l’utilisation de ces outils sont nombreux.
Tout d’abord, certains logiciels spécifiques comme Storybird
favorisent l’imagination et la créativité des élèves (Afifi, 2017).
Ensuite, le traitement de texte avec des correcteurs d’orthographe,
de grammaire, des dictionnaires de synonymes débloque le
rapport à l’écriture, change le statut de l’erreur et permet un gain
important de temps pour la réécriture (Bonnassies, 2006). De
plus, la communication enseignant-élèves et élèves-élèves ne se
limitant plus aux heures de cours, la classe devient plus solidaire
grâce aux outils numériques (Bonnassies, 2006). Par ailleurs,
la possibilité de publier en ligne des produits comme des livres,
des albums, des affiches, des journaux... renforce la motivation
et l’engagement des apprenants dans les travaux de rédaction
(Hocine, 2011). Enfin, certaines recherches montrent des effets
positifs de l’utilisation d’un logiciel d’édition de livre en ligne sur la
compétence de production écrite des élèves. Ceux-ci ont obtenu
un pourcentage plus élevé de notes maximales en termes de
respect de la consigne, de structure de la phrase, de lexique,
d’orthographe et de cohérence dans le livre électronique illustré
que dans le livre papier (Afifi, 2017).
1.1.2. La révision collaborative
En didactique de la production écrite, la révision collaborative
ou la correction par les pairs (en anglais «peer review» ou «peer
feedback») consiste à mettre les étudiants en groupes de deux,
trois ou quatre et à leur demander de réviser le texte d’un pair afin
de l’améliorer (Hansen & Liu, 2005).
Dans cette étude, la révision collaborative est étayée par
deux enseignantes-chercheuses canadienne et vietnamienne.
D’une part, les enseignantes-chercheuses ont fourni au fur et à

-221-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

mesure aux étudiants des outils méthodologiques pour réussir


la révision collaborative. Cet étayage est passé par les conseils
sur le choix des pairs, par des consignes recommandant des
comportements à adopter quand on fait des rétroactions au pair,
des séances de démonstration de stratégies de révision sur
des textes d’étudiants, des questionnaires guidant la révision
collaborative élaborés pour chaque texte....
1.2. Question de recherche
Nous nous sommes posé la question suivante: Quels sont
les apports des outils numériques et de la révision collaborative
au développement de la compétence de production écrite des
pairs canadiens-vietnamiens?

2. Méthodologie de recherche
2.1. Dispositif de jumelage
Le dispositif de révision collaborative a été construit selon
le socio-constructivisme de Vygotsky (1978) et le modèle de
révision de Butterfield, Hacker, & Albertson (1996).
Seize étudiants de français langue seconde de l’Ecole de
langues de l’Université du Québec à Montréal (Canada) ont
été jumelés à seize étudiants de français langue étrangère du
Département de français de l’Université de langues et d’études
internationales de l’Université nationale du Vietnam à Hanoi.
Dix filles et six garçons de Hanoi sont Vietnamiens et ont 18
ans alors que quinze femmes et un homme de Montréal sont
de différentes origines (chinoise, japonaise, russe, anglaise,
iranienne, australienne, colombienne, marocaine) et ont entre 18
et 45 ans.
Le jumelage a commencé le 7 janvier et pris fin le 14 avril
2019. Pendant la première semaine, les étudiants ont créé une
page Facebook commune et ont posté une vidéo et un texte dans
lesquels ils se sont présentés et ont décrit le jumeau ou la jumelle

-222-
Communications de dimension spécifique

qu’ils cherchaient. Je leur ai conseillé de choisir comme pair les


personnes pour qui ils avaient de la sympathie et qui avaient à
peu près la même compétence d’écriture qu’eux.
La deuxième semaine a été réservée à la formation des
groupes de pairs. Les étudiants se sont envoyé par Messenger
des propositions de jumelage et nous ont tenus au courant de
leur décision. Durant cette semaine, au Québec, l’enseignante a
démontré les stratégies de révision collaborative aux étudiants.
Au Vietnam, les étudiants avaient déjà appris par vidéoprojecteur
et pratiqué ces techniques au premier semestre de 2018.
A partir de la troisième semaine, les étudiants ont pratiqué
la correction par les pairs à l’aide des questionnaires pour la
révision collaborative. Les étudiants ont rédigé par Word la
première version de leur texte qui a été ensuite envoyée par mail
au pair pour la correction. Les réviseurs ont utilisé la fonction
Commentaire sur Word pour donner des feedbacks à l’écrit mais
ils ont également eu recours au chat sur Skype ou Messenger
pour discuter. Puis, les auteurs ont écrit la deuxième version de
leur texte en fonction des remarques de leur jumeau. Enfin, ils
ont remis les deux versions de leur texte à leur enseignant qui a
corrigé et noté la deuxième version.
Tous les sujets choisis se sont bien intégrés aux programmes
d’enseignement de la production écrite niveau B1+ dans les
deux écoles tout en cherchant à développer la compétence
interculturelle chez les étudiants.
2.2. Plan de cours commun
Sujets de
Dates Contenu Thèmes
rédaction
Les étudiants postent une petite vidéo
Du 7 au 13 janv. pour se présenter.
2019 Prise de connaissance Ils postent une lettre dans laquelle ils
décrivent leur ami par correspondance
préféré.

-223-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Faire des essais de corrections par les


Du 14 au 20 Formation des groupes
pairs et de discussions à distance pour
janv. de pairs
déterminer l’outil numérique adapté.
Le 4 fév. au
Canada et le 25 Rédaction 1
janv. au Vietnam

Les 7 et 8 fév. Correction par les pairs Rédigez un


de la rédaction 1 + texte d’environ
réécriture 200 mots pour
Biographie
Remise des versions présenter une
Le 9 fév. 1 + 2 de la rédaction 1 personnalité de
aux enseignants votre pays.

Le 11 fév. au
Correction collective de
Canada et le 13
la rédaction 1
fév. au Vietnam
Le 25 fév. au
Canada et le 27 Rédaction 2 Ecrivez une
fév. au Vietnam lettre d’environ
Les 28 fév. et 1er Correction par les pairs 220 mots à un
mars de la rédaction 2 + ami étranger
réécriture Santé pour lui décrire
vos habitudes
Remise des versions alimentaires et
Le 2 mars 1 + 2 de la rédaction 2 vos pratiques
aux enseignants sportives pour
Le 4 mars au avoir une bonne
Correction collective de
Canada et 6 santé.
la rédaction 2
mars au Vietnam
Le 11 mars. au
Canada et le 13 Rédaction 3
mars au Vietnam
Ecrivez une lettre
Correction par les pairs d’environ 250
Les 14 et 15
de la rédaction 3 + mots à un ami
mars
réécriture étranger pour lui
Remise des versions Etudes raconter votre
Le 16 mars 1 + 2 de la rédaction 3 parcours scolaire
aux enseignants et les démarches
d’inscription à
Le 18 mars au votre université.
Correction collective de
Canada et le 20
la rédaction 3
mars au Vietnam

-224-
Communications de dimension spécifique

Le 25 mars au Quels sont les


Canada et le 27 Rédaction 4 stéréotypes sur
mars au Vietnam les habitants
Correction par les pairs de votre pays?
Les 28 et 29
de la rédaction 4 + Ecrivez un texte
mars
réécriture d’environ 250
Stéréotypes
Remise des versions mots dans
Le 30 mars 1 + 2 de la rédaction 4 lequel vous citez
aux enseignants trois ou quatre
Le 1er avril au stéréotypes avec
Correction collective de des exemples à
Canada et le 3
la rédaction 4 l’appui.
avril au Vietnam
Remise des bilans
Les 8 et 10 avril Bilan de 250
sur le jumelage aux Bilan
2019 mots minimum
enseignants

2.3. Collecte et analyse des données

2.3.1. Données quantitatives

Pour mesurer les impacts de l’intégration des technologies et


de la révision collaborative dans les cours de production écrite,
les deux versions du texte 1 et du texte 4 ont été collectées et
notées selon les critères suivants.

Critères Points
Idées 4 points
Cohérence 1 point
Grammaire 2,5 points
Vocabulaire 2 points
Orthographe 0.5 point
Note totale 10 points

Les résultats ont été comparés par un test de Wilcoxon dans


SPSS version 20. Le test de Wilcoxon a été choisi pour notre
analyse des données car nos échantillons sont petits et appariés
(la compétence de production écrite d’un étudiant a été mesurée
deux fois, au début et à la fin du jumelage).

-225-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2.3.2. Données qualitatives


Un bilan de jumelage (écrit en français) a été proposé
aux étudiants à la dernière semaine du jumelage. Nous avons
demandé à nos étudiants de nous faire part des impacts du
jumelage sur leur compétence de production écrite. Tous les
étudiants nous ont remis leur bilan rédigé en français.

3. Résultats et discussion
3.1. Résultats quantitatifs
Texte 1 Texte 4
Z P
N Median N Median
- .001**
Note totale 16 7.8 16 8.2
3.329
- .006**
Idées 16 3.35 16 3.4
2.753
- .002**
Cohérence 16 .70 16 .77
3.066
- .026*
Grammaire 16 2.0 16 2.0
2.232
- .180
Vocabulaire 16 1.5 16 1.5
1.342
- .102
Orthographe 16 0.3 16 0.3
1.633

Le test de Wilcoxon montre que l’introduction des technologies


dans le cours de production a des effets bénéfiques sur la note
totale des étudiants vietnamiens. Ils ont significativement progressé
entre le texte 1 et le texte 4: Mdn (texte 1) = 7.8, Mdn (texte 4) =
8.2, Z = -3.329, p = .001**. Des différences significatives ont été
trouvées en termes d’idées: Mdn (texte 1) = 3.35, Mdn (texte 4)
= 3.4, Z = -2.753, p = .006**;en termes de cohérence: Mdn (texte
1) = .70, Mdn (texte 4) = .77, Z = -3.066, p = .002**;en termes de
grammaire: Mdn (texte 1) = 2.0, Mdn (texte 4) = 2.0, Z = -2.232,
p = .026*. Cependant, les étudiants vietnamiens n’ont pas obtenu
de meilleurs résultats en termes de vocabulaire ni d’orthographe.

-226-
Communications de dimension spécifique

3.2. Résultats qualitatifs


Tous les étudiants ont bien apprécié le jumelage. Ils ont fait
de nouveaux amis et souhaitent un jour se voir au Vietnam ou
au Canada. Les interactions se sont bien passées entre eux
car ils ont communiqué à la fois à l’écrit et à l’oral via email,
Skype ou Messenger. Ils ont découvert un grand nombre de
nouveautés culturelles dans les textes de leur pair. Tous les
étudiants ont confirmé que leur pair les a aidés à corriger des
erreurs de grammaire (surtout les fautes d’accord et de genre) et
d’orthographe. Cependant, un étudiant a dit que les feedbacks
du pair n’étaient pas tous utiles. Par exemple, il a écrit «Vietnam»
alors que son pair a proposé «Viêtnam». 9 sur 16 étudiants ont
rapporté qu’ils avaient commis moins de fautes de cohérence
et d’expression grâce aux remarques des jumeaux. Ils avaient
tous l’impression d’avoir mieux écrit après un semestre de
jumelage. Ils étaient aussi plus motivés pour écrire car ils avaient
un vrai lecteur qui les attendait de l’autre côté de la planète.
Deux étudiants m’ont confié qu’ils avaient moins peur de faire
des erreurs car leur pair allait corriger leur texte. Cependant, la
plupart des étudiants ont dit que leur pair ne pouvait pas les aider
à utiliser des mots appropriés.
3.3. Discussion
Nos résultats de recherche confirment ceux d’Afifi (2017) selon
lesquels après l’introduction de Storybird, les apprenants ont
obtenu un pourcentage plus élevé de note maximale en termes de
cohérence, de respect de la consigne, de structure des phrases.
Cependant, les élèves d’Afifi n’ont pas progressé en termes de
points grammaticaux. Cette différence peut être liée à la révision
collaborative et à l’utilisation du correcteur de grammaire sur Word
dans notre recherche. Notre travail ne va pas dans le même sens
que celui de Kim et al. (2018) qui n’ont pas trouvé de différence
significative entre la version en ligne et la version papier. Une

-227-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

explication possible de cet écart pourrait être le dispositif de révision


collaborative très étayé dans notre recherche. Nos étudiants bien
équipés d’outils méthodologiques et d’assistance technologique
ont mieux réussi que ceux de Kim et al. (2018).
Néanmoins, aucune différence significative n’a été rapportée
en termes de vocabulaire ou d’orthographe. Dans le bilan, tous
les étudiants ont confié qu’ils avaient du mal à corriger les
fautes d’expression et de vocabulaire de leurs pairs respectifs.
J’ai constaté que les étudiants avaient commis des fautes
d’orthographe dans le texte 4, malgré le correcteur d’orthographe,
parce que pour parler des stéréotypes sur les habitants de leurs
pays, beaucoup ont utilisé la majuscule à la place de la minuscule
et vice versa pour les noms et adjectifs de nationalité. Cette
erreur n’est malheureusement pas identifiée par le correcteur
orthographique dans Word.

4. Conclusion
Des différences significatives ont été trouvées en termes de
note totale, d’idées, de cohérence et de grammaire. L’introduction
des outils numériques et de la révision collaborative a donc permis
à nos étudiants d’améliorer leur compétence de production écrite
en français. Le rapport à l’erreur a été débloqué, les motivations
ont été renforcées, la classe est devenue plus solidaire, les
étudiants ont eu de nouveaux amis à l’étranger..., tels sont les
apports des TICE et du jumelage à notre enseignement de
production écrite.
Remerciements
Cette recherche est financée par l’Université Nationale du
Vietnam, Hanoi (VNU) dans le cadre du projet de recherche
QG.16.58.
This research is funded by Vietnam National University,
Hanoi (VNU) under project number QG.16.58.

-228-
Communications de dimension spécifique

BIBLIOGRAPHIE
1. Afifi, D. (2018). TICE pour l’apprentissage de l’écrit en
classe de Fle. Annals of the University of Craiova, Series
Psychology, Pedagogy, Teacher Training Department,
University of Craiova, vol. 37(1), 125-137, June.
2. Bonnassies, I. (2006). L’apport des TICE et de l’écriture
collaborative au développement des compétences écrites
dans l’acquisition/apprentissage d’une L2». Cahiers de
l’APLIUT [En ligne], Vol. XXV N° 3 | 2006, mis en ligne le 24
mars 2012, consulté le 26 août 2019. URL: http://journals.
openedition.org/apliut/2381;DOI: 10.4000/apliut.2381
3. Butterfield, E., Hacker, D. & Albertson, L. (1996).
Environmental, cognitive and metacognitive influences on
text revision: Assessing the evidence. Educ. Psychol. Rev.,
8(3), 239-260.
4. Hafiz-Khodja, N. (2015). Favoriser l’entrée dans la production
d’écrit avec les TICE au cycle 2: écrire un recueil collectif de
contes comme projet de classe (CE1). École supérieure du
professorat et de l’éducation de l’académie de Paris, Paris.
5. Hansen, J., & Liu, J. (2005). Guiding principles for effective
peer response. ELT Journal n° 59. 31-38.
6. Hocine, N. (2011). Intérêts pédagogiques de l’intégration des
TICE dans l’enseignement du F.L.E: l’utilisation du web-blog
dans des activités de production écrite. Synergies Algérie,
12, 219-226.
7. Kim, H, R., Bowles, M., Yan, X., & Chung, S. J. (2018).
Examining the comparability between paper- and computer-
based versions of an integrated writing placement test.
Assessing Writing, 36, 49-62.
8. Vygotsky, L. (1978). Interaction between Learning and
Development (Master’s thesis). In Mind in Society. (Trans. M.
Cole) (pp. 79-91). Cambridge: Harvard University Press.

-229-
L’ENSEIGNEMENT DE LA COMPÉTENCE DE
COMPRÉHENSION ÉCRITE:
QUELS SONT LES APPORTS DES OUTILS DE TRAITEMENT
AUTOMATIQUE DES TEXTES?

HOANG Thi Bich


Université de Langues et d’Études internationales -
Université Nationale du Vietnam à Hanoi

Résumé:
Les technologies de l’information et de la communication (TIC) - dont certains
sont fréquemment utilisés en nos classes aujourd’hui: ordinateurs, projecteurs,
Internet, smartphones, etc. - peuvent être de grande utilité pour l’enseignement/
apprentissage et pour l’évaluation en classe de français langue étrangère (FLE).
Nous apprécions particulièrement les outils de traitement automatique de textes
qui permettent de déterminer rapidement le niveau de difficulté d’un texte. Ces
logiciels analysent la longueur, la diversité lexicale, la fréquence des mots... qui
sont des indicateurs du niveau/degré de difficulté d’un texte. Les enseignants
auront donc intérêt de s’en servir lorsqu’ils choisissent les textes pour fabriquer
des exercices de compréhension écrite (CE).
Mots clés: compréhension écrite, texte, logiciels, indices, niveau de difficulté.

Introduction
En tant qu’enseignante du FLE, nous avons remarqué les
difficultés de nos étudiants lors de la lecture d’un texte, surtout
quand ils faisaient un exercice de compréhension écrite (CE).
La plupart d’entre eux ont avoué que beaucoup d’exercices
de CE étaient trop difficiles pour eux. Pourtant, nous avons fait
Communications de dimension spécifique

beaucoup d’efforts pour bien choisir des textes pour l’élaboration


de ces exercices. Nous nous demandons ce qui détermine le
niveau de difficulté d’un texte par rapport à d’autres. C’est dans
cette perspective que nous avons décidé de mener ce travail de
recherche.
Définition de la notion «texte»
Il nous semble nécessaire, tout d’abord, d’identifier ce
qu’est un texte et de déterminer son rôle dans l’enseignement/
l’apprentissage des langues. Nous adoptons la définition
du Cadre européen commun de référence pour les langues
(désormais CECR) selon laquelle est désignée comme «texte»
«toute séquence discursive orale ou écrite que les usagers/
apprenants reçoivent, produisent ou échangent1». Les textes ont
des fonctions différentes avec de nombreux types et genres.
Selon le Dictionnaire pratique de Didactique du FLE
(2002:148), le texte désigne soit un ensemble fini d’énoncés
qui constitue un écrit significatif (le texte d’un roman), soit un
ensemble de documents relatifs à une discipline ou à une culture
donnée (les textes juridiques, les textes grecs), soit l’extrait d’une
œuvre (un recueil de textes choisis)».
On y trouve également les types de textes que les
concepteurs du Dictionnaire appellent «modes du discours»:
énonciatif, descriptif, narratif, argumentatif. Bref, un texte est
«le produit d’une situation de communication où un locuteur/
scripteur exprime une intention à travers un discours aux modes
différenciés réalisé par des actes de parole choisis en fonction
de la situation» (Ibid). La notion de «texte» prend ses limitations
dans le domaine de l’évaluation du langage. Il est défini comme
«discours suivi, écrit ou oral, utilisé pour élaborer un ensemble
d’items dans un test2».

1 Conseil de l’Europe, 2001, le CECR, p.75


2 Michael Milanovic, 1998, Studies in Language Testing: “Multilingual glossary of language
testing terns”, Cambridge University Press, p.243.

-231-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Dans le cadre de cet article, nous adoptons le concept du


CECR qui semble correspondre le plus à notre objet de recherche:
les textes (à l’écrit) utilisés dans des exercices et des tests de CE.
Définition de la compréhension écrite
Robert (2002: 32), dans le Dictionnaire pratique de Didactique
du FLE, mentionne une explication de la CE en partant de l’origine
de ce mot. D’après lui, compréhension vient de comprehensio,
mot issu de comprehendere qui signifie en latin, au sens propre,
«saisir, enfermer» et, au sens figuré, «saisir par l’intelligence,
embrasser par la pensée».
En didactique des langues, la compréhension est définie
comme l’opération mentale de décodage d’un message oral par
un auditeur (en compréhension orale) ou d’un message écrit par
un lecteur (en CE). Cette opération nécessite la connaissance du
code oral ou écrit d’une langue (et celle des registres de discours
des interlocuteurs ou des textes écrits). C’est la raison pour
laquelle pour développer la compétence de compréhension (écrite
ou orale) chez des apprenants, des exercices d’entraînement
au décodage des messages jouent un rôle très important. En
tant qu’enseignant du FLE, on devrait prendre en compte des
exercices de ce type.
Veeravagu et al., (2010) ont défini la CE comme un processus
de pensée par lequel un lecteur sélectionne des faits, des
informations ou des idées à partir des documents pour déterminer
les significations que l’auteur veut transmettre et pour choisir des
connaissances antérieures appropriées afin de répondre à ses
besoins ou ses objectifs.
La compréhension écrite est alors un processus de pensée
par lequel un lecteur sélectionne des faits, des informations
ou des idées à partir de documents imprimés; détermine les
significations que l’auteur a l’intention de transmettre; décide de
la façon dont ils se rapportent aux connaissances antérieures et

-232-
Communications de dimension spécifique

juge leur pertinence et leur valeur pour répondre aux besoins et


aux objectifs de l’apprenant1.
Barthélémy et al. (2011:51) proposent deux processus par
lesquels le lecteur a accès au texte: sémasiologique (de bas en
haut) - pour discriminer des formes, les segmenter et interpréter
le sens à partir de ces segments-; et onomasiologique (de haut
en bas) - pour faire des prévisions hypothétiques de contenus et
de formes et chercher des indices dans le texte pour les vérifier -.
Ils considèrent que la CE dépend de différents paramètres, en
particulier du type de texte lu et de la réceptivité du lecteur. Il est
indéniable que ces deux éléments interviennent énormément sur
le résultat de la compréhension. Cependant, d’après nous, le type
de texte n’est qu’un parmi beaucoup d’autres facteurs comme le
lexique, la syntaxe, le contexte, etc., et tous ces derniers peuvent
grandement influencer sur la compréhension du texte par le
lecteur.
Comme nous l’avons précisé ci-dessus, le texte joue le
rôle fondamental dans le processus de CE. Et comme Alderson
(2000:60) le précise, «beaucoup d’aspects du texte pourraient
faciliter ou rendre difficile le processus de la lecture2». On
peut en citer plusieurs: le type, le genre, le thème, le contenu,
l’organisation, la lisibilité, etc. D’ailleurs, il est nécessaire de
noter que les auteurs du Cadre (2001:78) prennent également en
considération ce rôle central du texte en affirmant que «le texte
est au centre de toute communication langagière». D’après Page
(1996)3, le degré de difficulté des textes varient selon différents

1 “Reading comprehension then, is a thinking process by which a reader selects facts, information
or ideas from printed materials; determines the meanings the author intended to transmit; decides
how they relate to previous knowledge and judges their appropriateness and worth for meeting the
learner’s own needs and objectives”. Jeyamahla Veeravagu et al. (2010), Utiliser la taxonomie de
Bloom pour évaluer les performances de compréhension écrite des apprenants, Canadian Social
Science Vol.6 No.3, p. 205-212.
2 «Many aspects of text might facilite or make difficult the reading process», Alderson (2000:60)
3 Brian Page, 1996, Conseil de l’Europe: Guide à l’usage des enseignants, p.13-14.

-233-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

éléments: soit par la densité des informations qu’ils véhiculent et


par leur complexité linguistique/discursive, soit par les intentions
de leurs auteurs mais aussi en fonction de leur support.
De là, le CECR précise également que «lors du choix d’un
texte à utiliser avec un apprenant ou un groupe d’apprenants
donnés, il faut considérer des facteurs tels que la complexité
linguistique, le type de texte, la structure discursive, la présentation
matérielle, la longueur du texte et son intérêt pour l’apprenant.»
(CECR, p.126).
En choisissant des textes pour concevoir des exercices
de CE, nous nous sommes également basée sur ces critères
linguistiques et textuels mais surtout de manière intuitive et plutôt
en fonction de nos expériences, ce qui influence plus ou moins
le niveau de difficulté des exercices proposés aux étudiants. En
cherchant les travaux sur ce sujet, nous avons trouvé des logiciels
de traitement automatique des textes qui aident à analyser des
textes et à en repérer la complexité lexicale et syntaxique. Nous
essayerons, dans le cadre de cette communication, de déterminer
les apports de ces outils dans le choix des textes à la fois pour
l’enseignement du FLE et pour l’évaluation de la CE.
Outils de traitement automatique des textes
Tout d’abord, il y a plusieurs logiciels d’analyseur automatique
pour obtenir différents indices auxquels nous nous référerons
pour cette étude. Cependant, beaucoup de logiciels et de
systèmes sont pour les évaluations des textes en anglais et il est
difficile d’en trouver pour le français, surtout pour les analyses
morphosyntaxiques. Les chercheurs en FLE (Laufer, B. & Nation,
P., 1995;Meara, P., Lightbown, P. & Halter, R., 1997) ont fait des
essais en développant des logiciels de traitement automatique
des textes. Par exemple, pour calculer des catégories de mots
dans la perspective d’analyse des caractéristiques syntaxiques,
il y a TreeTagger, dont nous nous sommes servie nous-même.

-234-
Communications de dimension spécifique

De fait, l’étiqueteur TreeTagger est un outil


d’annotations de texte développé par Hel- Mot Nature Lemme
mut Schmid dans le projet TIC à l’Institut français ADJ français
de Linguistique computationnelle de l’Uni- petite ADJ petit
versité de Stuttgart, Allemagne. Le TreeTag-
plus ADV plus
ger a été utilisé avec succès pour «taguer»
les langues suivantes: allemand, anglais, beaucoup ADV beaucoup
français, italien, danois, néerlandais, les DET:ART le
espagnol, etc. Cet outil, outre de spécifier cette DET:DEM cette
pour chaque mot sa catégorie syntaxique,
sa DET:POS son
indique son lemme. Il existe une interface
web facilitant son utilisation. Il suffit de son DET:POS son
charger le texte à étiqueter pour obtenir le pour KON pour
résultat des analyses, avec toutes les infor- et KON et
mations sur les mots, leur fonction et leur
Arthur NAM Arthur
lemme. Cependant, pour étiqueter un texte
dans Treetagger, on est obligé de le conver- musées NOM musée
tir au format.txt, et les résultats obtenus deux NUM deux
seront présentés comme dans le tableau à il PRO:PER il
droite. On peut les copier et les coller dans
Excel pour les analyser plus facilement. Source: http://cental.fltr.ucl.ac.be/treetagger/

Ce logiciel permet d’identifier le nombre de mots de contenu


d’un texte puis leur appartenance à des catégories différentes:
adjectif, adverbe, article, possessifs, nom, chiffre, connecteur,
etc.). C’est la proportion de ces mots de contenu qui détermine
la richesse lexicale d’un texte, et celle-ci peut être un indice de
difficulté pour la CE. Les résultats se lisent sur l’interface du
logiciel sur http://cental.fltr.ucl.ac.be/treetagger/index.html du
Centre de traitement automatique de langage de l’Université
catholique de Louvain en Belgique.
Un autre outil, pour analyser le lexique cette fois, est
Vocabprofil. Ce logiciel décompose les textes en des fréquences
de mots dans la langue. Les Vocabprofilers anglais, basés sur
Lexical Frequency Profiler Laufer et Nation, divisent les mots d’un
texte en 2 niveaux: les mots académiques ou 1er niveau; et est
classé dans le 2e niveau tout le reste ou «offlist». La complexité
lexicale est définie alors en fonction des pourcentages de mots
appartenant à des barres de fréquences fournies par le logiciel.

-235-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Vocabprofil est utilisé à de nombreuses fins de recherche


et d’enseignement (comme la correspondance du texte à
l’apprenant via le test des niveaux). Les indices fournis par ce
logiciel nous semblent appropriés car il est élaboré sur la base
de listes de mots fréquents dans tous les domaines, surtout dans
les journaux (dont nous reprenons souvent des articles pour
concevoir des exercices en CE.)
Vocabprofil French V.5 (1-25K) a été construit avec les
25.000 lemmes français les plus fréquents, élaborés selon le
dictionnaire intitulé «A frequency dictionary of French» de Deryle
Lonsdale, Yvon Le Bras (2009), l’Université Brigham Young
(Provo, Utah). Ce dictionnaire fournit une liste des 5.000 mots les
plus fréquemment utilisés dans la langue française, et est un outil
précieux pour les apprenants de français. Basé sur un corpus de
français de 23 millions de mots, incluant des documents écrits
et parlés en France et dans les DOM-TOM, ce logiciel fournit à
l’utilisateur des informations détaillées pour chacune des 5.000
entrées, dont des équivalents anglais, un exemple de phrase, sa
traduction en anglais, des statistiques de son utilisation et une
indication de la variation. Les utilisateurs peuvent accéder aux
5.000 mots les plus fréquents par l’intermédiaire de la liste des
mots classés par ordre alphabétique.
Avec ce logiciel, on obtient des informations telles que le
nombre total de mots - tokens -; le nombre total de mots différents
- types -; et le TTR - types-tokens ratio - dans un texte. Cette
proportion type-token est un indice de la diversité lexicale. Par
ailleurs, l’outil donne aussi des renseignements sur le nombre
total des phrases; la longueur moyenne des phrases; la fréquence
des mots; les mots répétés, toutes des informations qui facilitent
l’analyse du niveau de difficulté des textes. Ce logiciel est gratuit
et facile à utiliser et est disponible sur le site: https://www.lextutor.
ca/vp/comp/

-236-
Communications de dimension spécifique

Analyses pilotes des textes extraits des épreuves du DELF


Pour trouver les indices les plus appropriés, nous avons
effectué des analyses pilotes avec quatre extraits des épreuves
du DELF du CIEP. Nous avons décidé de prendre ces exercices
pour plusieurs raisons. Premièrement, ce sont des épreuves
officielles du Ministère de l’éducation nationale de la République
française. Deuxièmement, ces exercices du DELF permettent
d’évaluer la maîtrise des quatre compétences langagières en
français, et sont harmonisées sur l’échelle à six niveaux du CECR.
Finalement, ces épreuves sont validées par «une équipe de
psychométriciens experts en évaluation, [...] sont présentes dans
plus de 1.200 centres d’examen répartis dans 175 pays1». Ces
analyses nous permettront de nous assurer de la validité et de la
fiabilité des indices auxquels nous nous référerons pour fabriquer
nos exercices de CE.
Analyses de la forme (longueur, type de texte)
D’abord, la longueur du texte, selon les auteurs du CECR
(2001:125), influence sur la capacité à traiter les informations
des apprenants car elle provoque la fatigue et le manque de
concentration.
Un texte court est moins difficile qu’un texte long sur un même sujet
car ce dernier exige plus d’opérations de traitement, la mémoire est plus
sollicitée, le risque de fatigue ou de distraction augmente (notamment avec de
jeunes apprenants). Cependant, un texte long pas trop dense et relativement
redondant peut s’avérer plus simple qu’un texte court et dense qui apporte la
même information.

Néanmoins, la longueur n’est qu’un indice qui devrait être


complété par d’autres pour estimer le niveau de difficulté des
textes. En effet, on peut avoir des textes longs mais faciles
à comprendre par leur sujet, leurs champs lexicaux ou leur
familiarité, etc. tandis que certains textes plus courts peuvent être

1
http://www.ciep.fr/delf-dalf

-237-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

plus difficiles de par leur registre, ou tout simplement par le sujet


abordé. Par exemple, un texte argumentatif serait compliqué s’il
présentait des tournures, figures de style, références historiques
ou culturelles spécifiquement françaises, alors qu’un texte
informatif avec chiffres, données explicitement présentées serait
plus facile d’accès pour des apprenants de FLE.
En comparant les textes utilisés dans des épreuves du DELF
entre eux, on constate un grand décalage du point de vue nombre
de mots. Cette différence peut s’expliquer par la nature des
documents ainsi que les objectifs visés à chaque niveau. En effet,
il s’agit plutôt des annonces, des lettres amicales, des publicités
au niveau A1 tandis qu’au B2, on utilise des textes informatifs et
argumentatifs publiés dans des journaux/magazines français. On
peut voir cette différence à travers la figure ci-dessous.

Figure 3.1- Nombre total des mots et des mots différents en fonction des niveaux

En observant ce graphique, on peut remarquer que plus


le niveau est élevé, plus le nombre de mots dans le texte est
important. Comme nous l’avons dit précédemment, le type de
texte pourrait conditionner le niveau de difficulté des textes. Il
est évident que «la nature plus ou moins abstraite ou concrète
du texte jouera également un rôle» et que «la description, des
instructions ou un récit concret seront sans doute moins difficiles
qu’une argumentation ou une explication abstraite» (CECR,

-238-
Communications de dimension spécifique

2001). En effet, les textes du niveau A1 et A2 sont des courriers


électroniques tandis que ceux du niveau B1 peuvent être des
articles de journaux à caractère informatif - extraits du journal
«L’Express» par exemple - ou des textes argumentatifs dans les
épreuves B2.
Pour vérifier ces résultats, nous avons étudié quarante textes
extraits des exercices de CE proposés pour l’entraînement aux
épreuves du DELF du A1 au B2. Ces textes ont été choisis par
hasard dans différents livres/épreuves du DELF en éliminant tous
les documents qui ne se composent pas de phrases complètes.
Après avoir effectué des analyses, nous constatons que la
longueur des textes au niveau A1 varie entre 28 et 111 mots (en
moyenne 73 mots) et le nombre de mots différents (types) est
entre 24 et 76 mots (en moyenne 53.3 mots). Le TTR moyen de
ces textes est de 0.763. En revanche, au niveau A2, on trouve
plus souvent les textes avec une longueur de 106 à 241 mots
(en moyenne: 168 mots). Le nombre de mots différents est de
73 à 156 (en moyenne: 103 mots) et le TTR est de 0.617. En ce
qui concerne des textes du niveau B1, les données statistiques
montrent qu’ils se composent de 253 mots à 535 mots (en
moyenne: 368 mots), de 140 à 269 mots différents (en moyenne:
199 mots) et le TTR est de 0.50 à 0.58 avec la moyenne de 0.54.
Les textes conçus pour l’entraînement aux épreuves du DELF
B2 sont beaucoup plus longs par rapport à ceux des niveaux
précédents. Ils sont de 471 à 893 mots (en moyenne: 694 mots)
avec 238 à 393 mots différents (en moyenne: 335 mots) et le TTR
est de 0.44 à 0.56 (en moyenne: 0.49).
En observant ces données, nous remarquons qu’une
continuité de longueur des textes est assurée en fonction des
niveaux exigés. La différence de longueur des documents est due
à la complexité des tâches à chaque niveau (lire une instruction,
lire pour s’orienter, lire une correspondance, lire pour repérer des
informations ou lire pour s’informer et discuter, etc.)

-239-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

D’autres aspects de lisibilité tels que la typographie, la mise


en page, la cohésion et la cohérence textuelles doivent aussi être
prises en compte lors du choix des textes. Dans le cadre de notre
recherche, ces éléments sont considérés comme évidents pour
les exercices de CE.
Analyses de contenu
Commençons tout d’abord par les informations concernant
des textes que nous avons choisis. Pour chaque niveau, nous
avons choisi un exercice de CE, extrait des épreuves collectives
du DELF, publiées sur le site officiel du CIEP. Après avoir analysé
les textes choisis, nous avons obtenu les résultats avec beaucoup
d’indices qui nous permettent de voir à quel degré les textes se
différencient l’un de l’autre. En effet, le TTR diminue en fonction
du niveau des textes. En effet, plus le texte est difficile, plus
la proportion type-token est faible, ce qui signifie que le texte
possède un lexique complexe et riche.

Figure 3.2 - Proportion du type/tokens (indice de la diversité lexicale)

De plus, on pourrait remarquer que le nombre de phrases


et la longueur moyenne des phrases ne sont pas des indices
fiables car un texte difficile peut avoir des phrases courtes mais
complexes.

-240-
Communications de dimension spécifique

Figure 3.3 - Nombre des mots et des phrases

Nous avons aussi obtenu les résultats concernant le nombre


des mots de contenu, à savoir des adjectifs, adverbes de
manière, noms, verbes pour chaque texte, ce qui nous a aidée
à mieux identifier la complexité lexicale d’un texte, car les mots
de contenu contribuent au niveau de difficulté d’un texte. En effet,
en analysant des textes collectés, nous avons remarqué que le
nombre des mots de contenu du niveau B2 est le plus élevé, vice
versa pour le niveau A1.

Figure 3.4 - Mots de contenu/Nombre total des mots (en %)

À travers cette figure, on peut affirmer que le nombre des


mots de contenu peut être utilisé comme un indicateur de la
difficulté des textes. On observe un grand pourcentage de mots
de contenu (autrement dit «mots lexicaux» ) selon le niveau. Sauf
le cas du texte au niveau A2, les mots de contenu représentent
46% du nombre total des mots dans le texte.

-241-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

La fréquence des mots


Le critère «fréquence des mots», adapté des recherches
américaines, prétend également mesurer la difficulté des textes.
Dans cette perspective, plus les mots utilisés appartiennent à
des barres de fréquence élevées, plus le texte sera réputé
difficile. Parfois, un seul mot peut perturber la compréhension
d’un texte chez les apprenants. En analysant des épreuves du
DELF, nous avons constaté que les mots des textes du niveau B2
apparaissent dans des rangs de fréquence les plus divers, ce qui
explique un lexique plus étendu et plus complexe.

Figure 3.5 - Fréquence de mots

K1 est les 1000 premiers mots les plus fréquents;


K2, K3, K4, K5... des mots appartenant au 2è, 3è, 4è et 5è
millième des mots fréquents.
La présence des mots dans une barre de fréquence élevée
conditionne la rareté, voire la complexité de ces mots. Le texte du
B2 dans le tableau ci-dessus possède le plus de pourcentages
des familles des mots appartenant au 2è, 3è, 4è et 5è millième des
mots fréquents.
Même si le recours seul à la fréquence des mots n’est pas
suffisant pour mesurer la complexité lexicale, puis la difficulté
des textes, cet indicateur joue un rôle indéniable qui constitue un
ensemble d’indices de complexité lexicale du texte.

-242-
Communications de dimension spécifique

Analyses des textes extraits des tests de compréhension écrite du


Département de français
Nous avons effectué des analyses pilotes sur les
caractéristiques lexicales des textes utilisés dans des tests de CE
du Département de français, Université Nationale du Vietnam à
Hanoi pour justifier la fiabilité de ces outils. Les données obtenues
ont montré que ces outils peuvent nous aider dans le choix des
textes qui correspondent le mieux à nos objectifs d’évaluation.
Pourtant, nous sommes persuadée qu’ils devraient être
mieux étudiés, expérimentés avec un échantillon plus grand,
puis évalués par les enseignants, experts et didacticiens pour
nous assurer de leur fiabilité. Dans le cadre de cette recherche,
nous souhaitons poser la première pierre pour d’autres travaux
de recherche dans le même domaine. Les résultats de cette
première expérience sont présentés ci-dessous.
Le texte pour le niveau 1 (A1 selon le CECR):
«Arthur est étudiant à l’Institut International de Rambouillet. Il vient de
San Francisco où il travaille comme informaticien pour une entreprise
française. Arthur a 30 ans et voudrait apprendre le français pour avoir plus de
responsabilités dans son entreprise. Il va rester à Rambouillet deux mois. Il
aime beaucoup cette petite ville avec son château, sa forêt et son marché du
samedi matin. Le week-end, il va à Paris pour visiter les musées et découvrir
la capitale.»
Analyse du texte à l’aide de Vocabprofil
Nombre total de mots (tokens): 79 Fréquence de mots (en %)
Nombre de mots différents (types): 60 K-1 (82.28) 82.28
Type-token ratio: 0.76
K-2 (1.27) 83.55
Tokens par type: 1.32
K-3 (3.80) 87.35
Nombre de phrase dans le texte: 6
K-4 (1.27) 88.62
Longueur moyenne des phrases (en mot): 12.67
K-12 (1.27) 89.89
OFF (10.13) ≈100%

Le texte pour le niveau 2 (A2 selon le CECR):


“Depuis 2001, les ambassadeurs de l’accueil se mettent, chaque été, au
service des visiteurs français et étrangers. Cette année, du 18 juin au 31 août,
ils seront là pour vous aider et vous conseiller ! Où retrouver les Ambassadeurs

-243-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

de l’accueil? Vous les trouverez sur les sites les plus fréquentés de la ville:
Bastille, Champs Élysées, Notre-Dame, Hôtel de Ville, Aéroport Roissy Charles
de Gaulle, Paris Plage, Place Colette et Pigalle. Comment les reconnaître
Facilement reconnaissables grâce à leurs tee-shirts vert anis et les coupe-vent
orange, les 55 saisonniers ambassadeurs parlent 15 langues à eux tous - et
connaissent parfaitement la capitale. Quand les rencontrer Ils seront présents
chaque jour de 10h à 19h pour distribuer guides et plans de la ville, suggérer
des balades insolites ou traditionnelles. Ils vont offriront la brochure J’aime
l’été à Paris, éditée à 1.000.000 d’exemplaires et pourront faire découvrir à
tous les visiteurs la richesse de la programmation culturelle estivale.»
Analyse du texte à l’aide de Vocabprofil

Nombre total de mots (tokens): Fréquence de mots


(en %)
Nombre de mots différents (types):
K-1 (69.88) 69.88
Type-token ratio:
K-2 (8.43) 78.31
Tokens par type:
K-3 (5.42) 83.73
Nombre de phrases dans le texte: K-4 (4.22) 87.95
Longueur moyenne des phrases K-5 (0.60) 88.55
(en mots): K-6 (0.60) 89.15
K-7 (0.60) 89.75
K-8 (1.81) 91.56
K-11 (0.60) 92.16
K-17 (0.60) 92.76
K-18 (0.60) 93.36
K-22 (0.60) 93.96
OFF (6.02) ≈100%

Le texte pour le niveau 3 (B1 selon le CECR):


«Suite à l’augmentation inquiétante du nombre de délits constatée au cours
des derniers mois, l’Hôtel de police de Montpellier renouvelle l’opération
«Tranquillité vacances» à l’occasion des deux semaines de vacances scolaires
de Pâques. Ce plan de prévention permet de lutter contre les cambriolages
dans les maisons et appartements laissés vacants par leurs locataires ou
propriétaires. Pour profiter de rondes régulières de la police nationale et de
surveillance aux abords de leur domicile, les personnes intéressées devront
se présenter dans l’un des commissariats de police de Montpellier ou de
l’agglomération pour signaler leur absence au moins deux jours avant leur
départ. Il faudra présenter une pièce d’identité et un justificatif de domicile. Les
dates d’absence et un contact en cas d’incident seront également demandés. À
cette occasion, il sera rappelé quelques conseils de prévention et de vigilance

-244-
Communications de dimension spécifique

comme ne pas laisser les clés du domicile dans une cachette habituelle (pot
de fleur, paillassons...) ou faire relever régulièrement le courrier de la boîte
aux lettres afin de ne pas se faire remarquer. Si le projet a obtenu l’aval des
comités de citoyens qui s’inquiétaient des nombreux cambriolages touchant
quasiment tous les quartiers de la ville, il est toutefois jugé insuffisant par les
élus de l’opposition qui souhaiteraient une mise en place du projet afin de
décourager autant que possible les malfaiteurs. Le maire a promis que des
fonds supplémentaires seront débloqués à partir de la rentrée prochaine.»
Analyse du texte à l’aide de Vocabprofil

Nombre total de mots (tokens): 247 Fréquence de mots (en %)


Nombre de mots différents (types): 147 K-1   (75.71) 75.71

Type-token ratio: 0.60 K-2   (7.69) 83.40

Tokens par type: 1.68 K-3   (6.48) 89.88


K-4   (2.83) 92.71
Nombre de phrases dans le texte: 8
K-5   (2.02) 94.73
Longueur moyenne des phrases
29.25 K-6   (0.40) 95.13
(en mots):
K-7   (0.81) 95.94
K-8   (0.40) 96.34
K-9   (0.81) 97.15
K-11   (0.81) 97.96
K-13   (0.40) 98.36
K-15   (0.40) 98.76
OFF   (1.21) ≈100%

Le texte pour le niveau 4 (B2 selon le CECR):


La Guyane est un haut lieu de technologie spatiale. Elle pourrait aussi devenir
un haut lieu de l’écologie et de la nature et des populations autochtones. La
Ligue ROC a souligné l’importance de la biodiversité, parente pauvre aussi
bien dans la prise de conscience que des politiques menées jusqu’ici. La
France possède en Guyane une forêt de ce type ou une ethno diversité est
en danger. Presque toujours, les forêts tropicales sont situées dans des
pays confrontés à de graves difficultés économiques. La forêt guyanaise est
l’exception puisqu›elle se situe dans un pays riche qui pourrait refuser de
sacrifier les arbres aux chercheurs d’or. L’exploitation minière est une gangrène
dont il résulte des paysages dévastés et des sites pollués bien au- delà des
régions minières. L’exploitation forestière dégrade aussi les zones qui lui sont
octroyées sans être créatrice d›emplois nombreux. Aucun développement
durable n’est possible si on continue à détruire une forêt fragile dont on ignore
les capacités de régénération. Le tourisme et la recherche scientifique seraient
les deux pôles d›activités créatrices d›emploi à développer. Le lamantin, les

-245-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

tortues de mer, le renard crabier, des mangroves, le caïman sont autant de


trésors vivants menacés d’élimination. Les pistes ouvertes à grands frais
pour l’exploitation forestière profitent aux chasseurs que l’on peut même pas
qualifier de braconniers puisque la chasse n’est pas réglementée. La Guyane est
le seul département sans permis de chasse et sans restriction à son exercice. Il
serait temps de mettre un terme à ce laxisme. Au sud de la Guyane, la volonté
actuelle de protéger la biodiversité restera insuffisante aussi longtemps que la
recherche d’or ne sera pas interdite. Les populations autochtones réclamaient
pourtant cette prohibition pour protéger l’or vert et durable de la forêt. Les
autochtones ne doivent pas être exposés au voyeurisme des touristes. La
constitution du Parc national devrait contenir un texte respectueux de la vie
des populations locales. Le Canada a créé en 1999 le Nuvanut pour les Inuits.
Dans la même mouvance, la France pourrait aider les Amérindiens à renforcer
leur autarcie économique traditionnelle en les confortant dans leur mode vie
durable sur un territoire qu’ils ont su préserver.»
Analyse du texte à l’aide de Vocabprofil

Nombre total de mots (tokens): 375


Nombre de mots différents (types): 208 Fréquence de mots (en %)
K-1 (72.00) 72.00
Type-token ratio: 0.55
K-2 (8.27) 80.27
Tokens per type: 1.80
K-3 (5.87) 86.14
Nombre de phrases dans le texte: 20
K-4 (2.13) 88.27
Longueur moyenne des phrases
(en mots): 17.80 K-5 (2.13) 90.40
K-6 (0.27) 90.67
K-7 (0.80) 91.47
K-9 (0.80) 92.27
K-10 (0.27) 92.54
K-11 (0.27) 92.81
K-12 (0.80) 93.61
K-13 (0.27) 93.88
K-15 (0.27) 94.15
K-17 (0.27) 94.42
K-18 (0.53) 94.95
K-21 (0.27) 95.22
K-22 (0.27) 95.49
K-23 (0.27) 95.76
OFF (4.27) ≈100%

-246-
Communications de dimension spécifique

En analysant ces textes utilisés au Département de français,


nous avons remarqué que les mots du texte au niveau 4
apparaissent dans des rangs de fréquence les plus diverses, ce
qui explique un lexique plus étendu et plus complexe. D’ailleurs,
la proportion entre le type et le token (TTR) chez le niveau 4 est
le plus faible, ce qui signifie que ce texte possède un lexique
complexe et riche.
Les analyses via ces logiciels nous permettent de trouver les
indices qui facilitent le choix des textes dans la conception des
exercices de CE. À travers ces indices, on pourrait sélectionner
les textes qui répondent aux exigences de niveaux de difficultés
pour chaque groupe d’étudiants. Ces critères de choix des textes
pourraient même être utilisés dans la conception des tests de CE.
En guise de conclusion
Le rôle et l’importance des nouvelles technologies sont de
plus en plus démontrés et confirmés de nos jours. Il semble
bien ainsi avec les logiciels de traitement automatique de textes
pour améliorer la qualité de l’enseignement/apprentissage. Ce
sont des [Les progrès des technologies de l’information et de
la communication contribuent à l’amélioration non seulement de
la vie humaine mais également de la qualité de l’enseignement
et de l’apprentissage.] Les logiciels de traitement automatique
de textes sont vraiment des outils efficaces dans l’enseignement
et l’évaluation de la CE. Ils facilitent le choix des documents
didactiques et améliorent la qualité des activités pédagogiques
des enseignants du FLE. Pourtant, il faudrait développer d’autres
capacités de ces logiciels en les combinant avec d’autres pour
une meilleure utilisation dans les années qui viennent.

-247-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

BIBLIOGRAPHIE

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Communications de dimension spécifique

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16. Sánchez Abchi, V. (2016). Évaluer en français: comment
prendre en compte la difficulté des items et des textes.
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How Measures of Lexical Diversity Can Help Discriminate
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18. Weir, C. J. (2005). Language testing and validation: an
evidence-based approach. Basingstoke; New York: Palgrave
Macmillan.

Sitographie
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2. Treetagger: http://cental.fltr.ucl.ac.be/treetagger/index.html
3. http://www.ciep.fr/

-249-
UN SCÉNARIO DE FORMATION HYBRIDE
POUR LA PROFESSIONNALISATION DES ÉTUDIANTS
DE FRANÇAIS EN CHARGÉ DE COMMUNICATION

HOANG Thi Thu Hanh


ESLE - Université de Hue- Vietnam

Résumé:
Dans le but de mieux répondre à la demande du marché du travail, les
formations professionnalisantes constituent une tendance inévitable dans notre
établissement et exigent de nouveaux dispositifs de formation. Dans ce contexte,
nous présentons un scénario de formation hybride pour former des étudiants au
métier de chargé de communication dans le cadre du Département de français. Dans
cette communication, nous tenons à présenter dans la première partie les besoins
d’une formation hybride chez nous, ensuite, des expériences qui la concernent
dans la deuxième partie avant de proposer un scénario de formation hybride
de chargé de communication - un projet de recherche interuniversitaire dans la
dernière partie. Avec ce contenu, nous tenons à suivre une piste de recherche
susceptible de mieux exploiter les TICE au service de la formation et d’améliorer
l’employabilité des étudiants francophones.
Mots clé: Formation hybride, Département de français, chargé de communication,
scénario de formation.

Introduction
Vu l’évolution des formations dans les Département de français,
à côté de celle de la licence de la linguistique française, on propose
ou envisage également des formations professionnalisantes. C’est
Communications de dimension spécifique

une tendance inévitable qui exige de nouveaux dispositifs de


l’enseignement et de nouvelles connaissances et compétences
disciplinaires de l’enseignant. Ainsi, ces dernières années, nous
avons mené et continuons toujours des recherches sur cette piste.
En nous basant sur les résultats de ces travaux, nous présentons
ici nos expériences et un dispositif qui sert à former les étudiants
à un métier au Département de français. Il s’agit d’un dispositif de
la formation hybride qui se développe de plus en plus grâce à la
popularisation des TICE actuelle. Plus concrètement, nous tenons
à présenter dans la première partie les besoins d’une formation
hybride chez nous, ensuite, des expériences de la formation
hybride dans la deuxième partie avant de proposer un scénario de
la formation hybride des chargés de communication - un projet de
recherche interuniversitaire dans la dernière partie.

1. Pourquoi une formation hybride au Département


de français au Centre du Vietnam?
Tout d’abord, nous rappelons rapidement la définition du
dispositif hybride dans une formation: il consiste en la combinaison
des cours en présentiel et des cours à distance et recourt des
supports, notamment numériques et des pédagogies appropriées
pour l’appliquer efficacement, tel que le définit Devauchelle:
«Dispositif hybride: tout dispositif de formation (cours, formation continue)
qui s’appuie sur un environnement numérique (plate-forme d’apprentissage
en ligne). Ce dispositif propose aux étudiant-e-s des ressources à utiliser
ou des activités à réaliser à distance (en dehors des salles de cours) et en
présence (dans les salles de cours). La proportion des activités à distance et
en présence peut varier selon les dispositifs.»1.

Ce dispositif peut répondre au contexte de notre établissement.


En effet, actuellement, on constate une baisse des débouchés
pour les diplômés en didactique du FLE et en langue française,

1 Devauchelle, B., Hybridation, métissage et numérique, http://prac-hysup.univ-


lyon1.fr/ consulté le 30/8/2019

-251-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

les établissements universitaires ont fait des efforts pour modifier


leurs formations en fonction des besoins du marché du travail et à
ceux de la société. Les formations actuelles qui suivent le système
de crédits capitalisables réduisent le temps en classe et accordent
une importance au travail personnel. Selon le programme cadre
de nos cours actuels, le temps du travail personnel minimal (hors
classe) est le double du temps en classe. Par conséquent, il serait
impossible de réaliser les objectifs du cours si on se contentait
seulement des heures d’enseignement en présentiel.
Cela montre que la formation accorde de plus en plus
d’importance à l’auto-apprentissage. Pourtant, nos enquêtes
montrent que nombreux sont les étudiants qui ne savent pas
le gérer ainsi que de la réalisation des tâches proposées. Plus
concrètement, ils ne savent pas établir un planning ni préciser
les démarches. Ils ne savent pas où trouver des documents
nécessaires ni comment sélectionner les ressources fiables.
D’où la nécessité d’un guide à distance ou de l’immigration d’une
partie du cours en ligne.
La deuxième raison pour laquelle la formation hybride est
nécessaire est la coopération professionnelle. En ce moment,
si l’on souhaite mettre en place une nouvelle formation ou
professionnaliser une formation existante, il faut organiser
des formations continues destinées aux enseignants pour
acquérir des compétences nécessaires et répondre ainsi aux
nouvelles exigences professionnelles. De plus, il est nécessaire
d’inviter des enseignants d’autres établissements qui sont déjà
suffisamment qualifiés et peuvent intervenir aux cours à distance.
Comme il est coûteux de faire venir les enseignants d’autres
pays ou d’autres villes, nous pensons concevoir des cours en
ligne auxquels les enseignants invités peuvent intervenir de
loin. Il s’agit de l’idée d’établir un réseau des professeurs sans
frontières pour une formation réussie.

-252-
Communications de dimension spécifique

Enfin, devant le développement constant des technologies


de l’information et de la communication pour l’enseignement,
les formations de français et en français ne peuvent pas s’en
passer pour s’améliorer pour augmenter leur efficacité et leur
attraction. Ces outils facilitent bien le dispositif hybride. L’internet
est accessible presque partout, les enseignants et la plupart des
étudiants sont bien équipés technologiquement, l’ordinateur, le
smartphone sont les deux outils populaires maintenant. Donc, la
communication et les échanges via Internet sont faciles et rapides
et c’est aussi le cas de l’accès aux documents authentiques
et les ressources en ligne au service de nos cours ainsi que
de l’intervention des professeurs de loin. Dans ce contexte, la
formation hybride est vraiment souhaitée.

2. Formations hybrides au Département de français de Hué


Depuis 2017, nous avons adopté ce dispositif hybride pour
2 cours au Département de français, ESLE de Hué: cours de
l’Enseignement de la compréhension orale & la production orale
et le cours de la pratique de la production orale.
En effet, suite à la recherche régionale sur la pédagogie
inversée, soutenue par le CREFAP1, nous avons conçu une partie
du cours magistral pour le travail à distance avec les vidéos, les
documents audio-visuels et le tutorat à distance et une partie
importante de la pratique et du travail en groupe en présentiel.
Pour les cours, les enseignants trouvent que le temps en
classe n’est pas suffisant pour la réalisation des objectifs fixés,
par exemple, 25 heures pour la maitrise de la théorie et la
pratique de l’enseignement des 2 compétences, production orale
et compréhension orale. Cette mission est d’autant plus difficile
quand nous avons des groupes nombreux. D’où la nécessité la
formation hydride.

1
Projet Flipped classroom, http://crefap.org/site/index.php/2016/01/05/projet-de-recherche-
flipped-classroom/, consulté le 30/8/2019.

-253-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

À titre d’exemple, nous citons le plan du chapitre 2:


Enseignement de la compréhension orale (10 heures en
présentiel et 20 à distance - travail personnel et tutorat)
À la phase découverte du cours, nous avons conçu des
vidéos et des cours numériques à l’aide de différents outils
comme Power Point, Hot Potatoes, Powtoon, movie maker et
Learningapps.org.
Voici un test aux QCM1 qui vérifie la compréhension et facilite
la mémorisation des points théoriques du cours les étudiants
avaient étudiés eux-mêmes avant le cours en présentiel.

Quizz Technique de classe

Grâce à ce dispositif, les étudiants ont plus de temps pour les


échanges. Il est à remarquer que grâce à la découverte du cours
effectuée à la maison, ces échanges en classe ne se limitent
pas à sa terminologie comme avant, ils sont plus profonds et
efficaces. Ce qui est le plus important est l’augmentation du
temps consacré à l’entraînement pédagogique: la préparation
d’une leçon et son enseignement en classe.

1 Hoang, TTH., Exercices du cours de l’enseignement de CO et de PO, https://learningapps.org/


watch?v=piujpuz6c19, consulté le 30/8/2019

-254-
Communications de dimension spécifique

Pour le cours de production orale, dans l’exemple ci-dessous,


les étudiants sont invités à voir la vidéo concernant les activités
quotidiennes et les horaires avec les images qui facilitent
la compréhension, et à répondre ensuite aux questions de
compréhension orale. Ainsi, en classe, la prise des connaissance
des points grammaticaux et des actes de paroles de la leçon est
plus rapide et les étudiants disposent ainsi plus de temps pour
leur pratique et pour les discussions.

Activités quotidiennes et horaires1

Selon les entretiens à la fin des cours expérimentaux, nous


constatons que les étudiants ont eu du mal à se familiariser au
nouveau mode de travail au début, et qu’il y avait une inégalité
numérique (les uns suréquipés, les autres sous-équipés
numériquement) mais au fur à mesure, les problèmes ont été
réglés et les étudiants ont trouvé enfin plus d’autonomie dans leur
apprentissage et plus de plaisir en classe car ils ont pu échanger
davantage avec les enseignants ou entre eux-mêmes et surtout,
ils ont pratiqué davantage le français au lieu de suivre pour la

1
Hoang, TTH., Exercices du cours de PO 1, https://learningapps.org/display?v=pvdt43rzk16,
consulté le 30/8/2019

-255-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

plupart du temps un cours magistral. Cela a été confirmé par


les remarques données par les professeurs qui avaient observé
nos cours expérimentaux: le temps consacré à la pratique était
plus important, les étudiants étaient plus motivés. Pour ces
expériences réussies, nous maintenons ce mode de travail pour
les années universitaires suivantes et poursuivons cette piste
dans des projets de recherche.

3. Vers un scénario de formation hybride pour la professionnalisation


des étudiants de français en chargé de communication
Au Centre du Vietnam, on constate encore une pénurie de
formation efficace des professionnels de communication, or les
entreprises privées ainsi que les entreprises publiques en ont
besoin de plus en plus. Devant un tel besoin du marché et celui
de professionnalisation des étudiants, nous souhaitons concevoir
une formation des chargés de communication, à savoir que «le
chargé de communication a pour objectif de diffuser une image
positive de l’entreprise pour laquelle il travaille, de ses activités,
de ses projets ou de ses hommes. Il est le chef d’orchestre qui
applique et coordonne la politique de communication.» 1.
Pourtant, afin de mettre en place cette formation, il faut des
professeurs spécialisés dans la communication, or, il nous en
manque encore. Il faut donc une formation hydrique pour profiter
des professeurs d’autres universités qui puissent assumer une
partie du cours à distance. De plus, cette solution s’adapte à
l’organisation de la formation actuelle de notre université, plus
précisément à la répartition du temps de travail en classe et hors
classe actuelle que nous avons présentée ci-dessus.
Pour ces raisons, nous avons décidé de mener une recherche
collective interuniversitaire ayant pour objectif de proposer un

1 Fiche de métier des chargés de communication, https://www.elaee.com/fiches-metiers/fiche-


metier-charge-de-communication, consulté le 30/8/2019.

-256-
Communications de dimension spécifique

dispositif hybride à la formation des chargés de communication.


Nous avons utilisé Google class pour héberger notre cours
et l’élaboration du cours théorique est le travail collectif des
professeurs de différentes universités. La partie en présentiel est
assurée par le professeur sur place, la partie à distance par les
professeurs français des universités de Rouen (France) et de
Thammasat (Thaïlande).

Chaque bloc comprend des documents variés sous format


PDF, vidéo, en fichier audio et en français, anglais et vietnamien
conçus et sélectionnés par les professeurs. Il s’agit des ressources
multilingues à exploiter par les étudiants pour acquérir des
connaissances nécessaires et réaliser les tâches concrètes:
répondre au quizz, réaliser un flyer de publicité, rédiger un CV
numérique, etc.

Nous prenons comme exemple une partie du cours: la


construction de l’image pour illustrer le mode de travail hybride.

-257-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Ressources
Mode de en français,
Étapes Activités Outils
travail en anglais, en
vietnamien
ACTIVITÉ 1 +Individuel Présentation CV Ordinateur/
Rédaction d’un CV à distance en anglais portable
numérique Présentation CV connecté à
Consignes: + Tutorat à en français Internet
1. Trouvez distance pour Présentation CV
une entreprise donner des en vietnamien Documents
internationale explications en français
pour laquelle vous (prof invités) en anglais
voulez travailler Présentation en
comme chargé de CV en anglais vietnamien:
communication. Présentation
2. Choisissez parmi les CV en
ressources proposées français
le ou les types de CV Présentation
dont vous pensez CV en
avoir besoin. Rédigez vietnamien
ensuite le vôtre et
déposez-le.
Travail noté sur 20
Délai: 3h (5 jours)
Construction
d’une image
de soi
(8h) ACTIVITÉ 2 Individuel les documents Documents
Rédaction d’une lettre à distance portant sur en français,
de motivation la rédaction en anglais,
1. cherchez la fiche d’une lettre de en
de métier et/ou motivation vietnamien
description du poste
correspondant
2. Lisez les lettres de
motivation proposées
et rédigez la vôtre (160
mots)
Travail noté sur 20
Délai: 3h (5 jours)

Correction-type des 2 collectif


activités - 4h en classe
(présentiel
avec les prof
sur place)

-258-
Communications de dimension spécifique

ACTIVITÉ 3 Individuel Fiche du


Présentation de Quiz vocabulaire
soi à un entretien d’évaluation vêtements;
- A - Vêtements Site internet
professionnels document
décontractés textuel;
Travail noté sur 10 audiovisuel mis
Délai: 30 mn à disposition, etc

ACTIVITÉ 4 A distance Fiche “Comment Documents


Présentation de soi à puis en classe réussir un (rédaction
un entretien pour la mise entretien”, collabora-
Analyse d’une vidéo, en commun “do’s and don’ts” tive)
au choix. => astuces Film français document
Consignes: de réussir - “Une époque textuel,
1. Lisez la fiche un entretien formidable” audiovisuel
“réussir” d’embauche Simulation mis à
2. Regardez les 3 d’un entretien disposition,
vidéos ressources d’embauche en etc
proposées et français, anglais,
choisissez la vidéo vietnamien
avec laquelle vous
allez analyser
l’environnement et le
comportement de la
personne qui passe
l’entretien
Travail noté sur 10
Délai: 1h30 (5 jours)

Réflexion par lecture 1. Cours Site internet


commentaires sur le individuelle à Communication document
sujet proposé la maison/ globale textuel,
Synthèse des Échanges en 2. Cours (Image, audio-
propositions classe communication visuel mis à
externe, disposition,
publicité) etc
Construction 3. Comment
d’une image promouvoir
de l’entreprise l’entreprise?
(12h)
Rédaction d’un
document collectif
de type “dépliant”
publicitaire:
• Préparer le projet de
communication

-259-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

• Les médias et la
communication
opérationnelle
• La mise en Travail en 1. Conseils Diapo ou
oeuvre du projet de groupe pour rédiger Produit final:
communication une brochure dépliant
• La production, le publicitaire
transfert et le suivi des 2. Techniques de
relations techniques faire un dépliant

Ce scénario présente un modèle à expérimenter: les


ressources d’apprentissage plurilingues; le travail à distance versus
travail en présentiel; l’intervention de professeurs en situation de
distanciation géographique. En nous basant sur la didactique et
sur nos expériences, nous réaliserons l’expérimentation afin de
mettre au point une formation hybride de cette discipline.
En guise de conclusion
Le dispositif hybride constitue une bonne piste pour notre
Département de français avec de nombreux avantages sur le plan
technique ainsi que sur le plan du corps professoral. Il permet de
mieux préparer les étudiants à l’intégration au marché du travail
et de récompenser le manque des professeurs spécialisés dans
la communication.
Pourtant, afin de mener à bien ce type de formation, il faut
une synergie des professeurs sur place et extérieurs, autrement
dit, une coopération adéquate du réseau des professeurs sans
frontières, et une exploitation efficace de nouvelles technologies,
en occurrence la plateforme Google classe.
De plus, les professeurs de français devraient suivre des
formations continues, des ateliers professionnels afin de se
remettre à niveau sur le plan technologique ainsi que sur le plan
professionnel. Quant aux responsables de l’établissement, il
est nécessaire qu’ils revoient le programme actuel et concevoir
un programme approprié en coopération des experts et des
professeurs concernés.

-260-
Communications de dimension spécifique

En résumé, en présentant nos expériences et notre projet


à finaliser nous tenons à contribuer au développement des
formations dans un Département de français, plus concrètement,
à proposer un scénario susceptible de mieux exploiter les
technologies de l’information et de la communication au service
de la formation professionnalisante et d’améliorer l’employabilité
des étudiants francophones.

BIBLIOGRAPHIE
1. Breton P., (1994), La naissance des sciences de la
communication (à la recherche d’un programme de
séparation). In: Quaderni, n°23, Printemps 1994, Science(s)
de la communication, pp. 67-75.
2. Charlier, B., Henri, F., (2010) Apprendre avec les technologies,
Presses Universitaires de France.
3. Carrillo, C., (2019) Développer un cours en formation hybride,
https://www.enseigner.ulaval.ca/ressources-pedagogiques/
developper-un-cours-en-formation-hybride
4. Devauchelle, B., Hybridation, métissage et numérique, http://
prac-hysup.univ-lyon1.fr/ consulté le 30/8/2019
5. Loisier, J. (2011). Les nouveaux outils d’apprentissage
encouragent-ils réellement la performance et la réussite
des étudiants en FAD? Document préparé pour le Réseau
d’enseignement francophone à
6. distance du Canada [http://www.refad.ca/recherche/TIC/
TIC_et_reussite_des_etudiants.pdf]

-261-
USAGES DE GOOGLE CLASSROOM EN ENVIRONNEMENT
HYBRIDE DE RESSOURCES MÉDIATIQUES

Bruno Marchal
Université Thammasat, Thaïlande

Résumé:
Les géants du numérique ont développé aujourd’hui des écosystèmes complets
dont la force de frappe permet d’offrir des services éducatifs économiquement
viables. Tout à la fois incontournables et craints en Europe parce qu’ils brassent
des données personnelles sensibles, ils constituent des alternatives efficaces
par l’appropriation aisée de leur plateforme, pour construire des dispositifs
d’apprentissage hybrides dans cette région du monde. A partir de ce modèle, nous
proposons une recherche action s’appuyant sur une expérimentation à mener au
sein d’une université vietnamienne, pour ensuite la transférer dans d’autres pays
de l’ASEAN francophone, ceci dans un environnement multilingue et multiculturel.
Nous analyserons le pouvoir d’attraction des différentes ressources plurilingues
mises à disposition des apprenants dans le dispositif d’apprentissage, au travers
d’un ensemble d’activités élaborées dans trois modules, dont les deux premiers
blocs constitueront un fonds commun et un troisième, spécifique, qui pourra être
adapté selon les besoins des pays et des institutions.
Mots-clés: écosystème, hybridation, ressources, littératie, plurilinguisme

Texte
Introduction, développement d’une problématique
Dans un contexte économique fortement concurrentiel, les
universités en Asie du Sud-Est se tournent de plus en plus vers
Communications de dimension spécifique

des plateformes éducatives en ligne susceptibles de les faire


entrer dans le monde de l’innovation numérique et du partage
des savoirs. C’est d’autant plus vrai à l’heure où nous écrivons
compte tenu des récents événements liés à la contagion du virus
Covid-19, ce qui a obligé de nombreuses institutions à trouver des
moyens de continuer des cours pour contourner les interdictions
de rassemblement, les fermetures et les confinements à la maison.
Jusqu’à maintenant elles cherchent des solutions à travers des
écosystèmes complets, avec une prise en main simple qui soient
à la fois facile à intégrer tant au niveau macro administratif et
organisationnel qu’aux niveaux méso de l’ingénierie pédagogique
et micro de l’apprentissage (Carré, 2015). À cette constatation,
plusieurs raisons. D’abord, lorsqu’une plateforme de formation à
distance1 s’insère dans une institution, elle nécessite une équipe
de techniciens informatiques pour sa mise en place modulaire
et le suivi informatique en général assez lourd. Lorsqu’on
observe ensuite attentivement le type de ressources et d’activités
proposées par les instructeurs qui disposent de cours en ligne,
on s’aperçoit que la plateforme est plutôt considérée comme un
espace de dépôt qu’un véritable espace de classe, sauf pour
de la formation à distance. Dans ce cas, il aura nécessité une
concertation des enseignants avec des ingénieurs pédagogiques
pour construire des scénarios qui utilisent les outils en fonction
de modèles pédagogiques, à moins que l’ingénieur pédagogique
soit en même temps l’enseignant, ce qui est très rarement le
cas. Enfin, et c’est ce qui motive la rédaction de cet article, le
concept d’hybridation entre dans les esprits, lié à des impératifs
de formation ponctuelle et à celui d’une formation «tout au long
de la vie», à l’image du concept d’apprenance développé par
Philippe Carré (Carré & Caspar, 2011) et de celui de «Thaïlande

1 Voir l’article Komis, V., Depover, C., Karsenti, T., Tselios, N. et Filippidi, A. (2013). Comprendre
l’usage des plateformes d’enseignement et les outils Web 2.0 dans des contextes universitaires de
formation hybride: aspects méthodologiques. Formation et profession, 21(2), 48-64. http://
dx.doi.org/10.18162/fp.2013.34

-263-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

4.0», imaginé par les politiques thaïlandaises pour (re)motiver le


pays vers une marche vers le futur. Or, la lourdeur technique et
l’accès à Moodle restent rédhibitoires à côté de ce qu’offrent les
grands de l’Internet, les GAFAM1, notamment en termes de facilité
d’appropriation, gratuité, et possibilité de faire harmonieusement
coexister dispositif traditionnel et dispositif numérique.
Nous voudrions ainsi présenter ce lent mais inéluctable
processus d’immixtion et d’intégration passant par l’offre
d’écosystèmes technologiques et pédagogiques complets,
des formations attenantes et une redéfinition des activités
d’apprentissage en ligne vers une autonomisation voire une auto-
direction car «c’est la qualité des ressources méthodologiques
et linguistiques mises à la disposition des apprenants, et non la
langue en elle-même, qui influe sur la facilité avec laquelle ceux-
ci apprennent.» (Gremmo et Riley, 1995, p.88). Notre propos est
donc ici une tentative d’identification des ressources ainsi que de
leur reconnaissance et usage au sein d’un dispositif mixte d’une
classe physique et fermée en hybridation avec une classe en
ligne c’est-à-dire virtuelle, qu’elle soit inversée ou plus classique.
Cadre théorique, revue de la littérature: définition(s) du concept
d’hybridation
Une double perspective, anglo-saxonne et francophone;historique
et économique
Le concept d’hybridation est un concept évolutif née d’une
vision économique, qui varie selon les termes employés dans
la littérature anglo-saxonne ou de ceux du monde francophone
(Charlier, Deschyver et Peraya, 2006, p.473) mais qui s’accorde
sur un point, celui de la nécessité du monde de l’entreprise dans
la décennie 90 de trouver des outils correspondant mieux aux
évolutions du nouveau millénaire et de proposer des solutions

1 Acronyme désignant «Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft»

-264-
Communications de dimension spécifique

plus économiques pour la formation continue que les séminaires,


les manuels d’autoformation ou la vidéo.
Ainsi, dès 1995 dans la littérature francophone, Didier Valdès
(1995, p.51) fait ce constat du monde de l’entreprise qui veut
qu’on forme plus, mieux, moins cher et de manière adaptée au
rythme tant à celui de l’individu qu’à celui de l’entreprise, et qu’il
est donc nécessaire de trouver de nouvelles formules permettant
une formation plus souple et qui convienne à tous les acteurs.
Dans le milieu universitaire, ce qu’en dit la Higher Education
Academy (HEA)1 va dans le même sens et propose de voir que
cette évolution commencée dans les années 90 avec le monde de
l’enseignement à distance et en ligne, s’est ensuite élargie au fil
des combinaisons de différents types de modèles pédagogiques
et technologiques. Ce qui était au départ une solution intermédiaire
entre le «tout-en-classe» et le «tout-en-ligne», s’est mué en des
dérivés tels que les Cours en ligne ouverts et massif (CLOM)
- Massive Open Online Courses (MOOC) - ou la pédagogie
inversée (Flipped Classroom), qui offrent des alternatives vers
des espaces et donc des apprentissages plus informels.
Une hybridation à (re)définir à l’aulne de la marchandisation des
savoirs
Aujourd’hui, Pete Sharma (2010) considère que l’hybridation
a atteint un certain degré de stabilisation autour de trois approches
dans le monde de l’éducation scolaire ou universitaire: 1. une
combinaison de présentiel et d’environnement virtuel (dont
les plateformes Blackboard et Moodle);2. un environnement

1 La HEA est une institution professionnelle destinée à promouvoir l’excellence dans le monde
de l’Éducation britannique. Elle a été fondée par les universités et les grandes écoles de Grande-
Bretagne et sa gouvernance est assurée par un collège des représentants institutionnels au plus
niveau, parmi lesquels les recteurs directeurs d’universités.
Repéré à https://www.heacademy.ac.uk/enhancement/starter-tools/blended-learning.
Page consultée le 26/6/2019

-265-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

d’apprentissage à distance médié par des outils technologiques


combinés sans aucune obligation de présence physique;3. un
modèle qui combine diverses approches pédagogiques sans tenir
compte de l’utilisation des technologies, de type transmissif ou
constructiviste. Ces trois approches permettent alors d’envisager
un apprentissage hybride sous l’angle d’un apprentissage de
type formalisé et institutionnel accompagné de pratiques de type
informelles et dans lesquelles on peut envisager des formes
nouvelles qui restent à découvrir et à imaginer. À ceci, force est
de s’appuyer sur un fort maillage internet, qui puisse à la fois
assurer une qualité de débit rapide et sans failles et des lieux
d’accès au télétravail.
Cela semble donc correspondre à une double logique qui
veut d’un côté l’accès à une formation pour tout individu où qu’il
soit et quel qu’il soit et d’un autre côté une offre de formation
standardisée et économiquement intéressante1. Pour les tenants
des industries culturelles et informationnelles (Mœglin, 2012)
comme pour les industries éducatives, nous sommes bien dans
la perspective d’une offre qui suscite la demande accompagnant
les nouveaux développements liés à l’accessibilité à distance.
Cela, les géants de l’Internet et de l’informatique - tant du côté
du matériel que des logiciels - l’ont bien compris et tentent de
concevoir et de mettre sur le marché des produits adaptés à
l’éducation et à ses spécificités.
Dès lors, dans le rapport qu’il entretient avec les étudiants,
l’enseignant pourrait y puiser toute sa force, en accompagnant
l’autonomisation dans l’utilisation de l’information - documentation au
travers d’un monde médiatisé voire surmédiatisé par l’information.
Pour cela, il doit proposer des stratégies de soutien pour distribuer
la bonne information, donner les outils à leur accès, démontrer les

1 Voir l’excellente étude de Thomas Lamarche qui analyse le pouvoir de l’éducation dans les cadres
du commerce international des services, notamment à l’OMC. En référence dans la bibliographie.

-266-
Communications de dimension spécifique

moyens de reconnaissance et de validité, faciliter le passage de


l’information vers la connaissance et ainsi construire des savoirs
par lequel l’apprenant va au fur et à mesure se transformer (Liquète
& Maury, 2007, p.28).
Dans cette approche, nous considérons que les ressources
deviennent ainsi un enjeu majeur sur lequel nous positionnons
notre travail de recherches élaboré à partir d’une expérimentation
dans le contexte du Vietnam, puis transfert dans des pays de
l’ASEAN dont la Thaïlande, que nous allons expliciter dans la
partie suivante.
Méthodologie
Nous présentons ici une méthodologie en devenir puisque
cette recherche aspire à se développer par confrontation/
discussion avec des points de vue de chercheurs lors de la
présentation et des rencontres envisagées au séminaire mais
d’ores et déjà, elle se construit avec l’appui de deux chercheurs
de l’université de Rouen et de deux chercheuses de l’Université
de Hué et de Hanoï. Nous prévoyons une recherche complète
avec rapport final sur une durée d’un an et demi.
Elle s’inscrit dans le paradigme d’une recherche-action
à partir du développement d’un module de formation en lien
avec un projet «Chargé de communication» engageant une
expérimentation avec des personnes qui suivront ce module
sous forme ouverte proposant des ressources trilingues (Anglais/
Français/Vietnamien) destinées à s’intégrer dans des dispositifs
hybrides. Le module devrait donc d’abord être expérimenté au
Vietnam puis transféré (après retour d’expérience) en Thaïlande
(et en Asie du Sud Est).
La recherche analysera quantitativement et qualitativement
l’usage des ressources numériques plurilingues du côté des

-267-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

étudiant.e.s et des enseignant.e.s1. Elle sera particulièrement


attentive à la confiance attribuée à ces ressources (Serres, 2012)
par connaissance orientée et dispositifs de jugement. Pour cela
nous recueillerons des données sur les attentes et les exigences
de contenu et de format dans une dimension pluriculturelle.
Nous disposons ainsi d’un éventail d’outils de traçage
d’activité dont: un carnet de bord Tuteur pour l’enseignant chargé
de suivre l’expérimentation; un logiciel d’automatisation des
captures d’écran ®Auto Screen Capture2 destiné à être installé
par les apprenants expérimentateurs;des quiz d’évaluation et des
formulaires indicateurs des usages à chaque étape du parcours
de formation. L’ensemble des données est destiné à être intégré
dans le logiciel d’analyse qualitative ®NVivo 123.
Support numérique
Le choix d’une pédagogie inversée par distribution de ressources
sur le dispositif numérique Google Classroom s’est imposé, d’une part
parce que la plateforme pédagogique Moodle n’est quasi plus utilisée
pour des activités en perspective actionnelle de français langue
étrangère sauf comme réservoir de ressources, et d’autre part, pour
valoriser l’outil éducatif proposé aux institutions universitaires mais
qui reste encore peu utilisé et pour lequel des formations pour les
enseignants se révèlent nécessaires voire indispensables. Le volet
formatif fera aussi partie prenante du projet puisque des retours
permettront d’affiner et de spécifier les modules sur d’autres formations
menées en Thaïlande et ailleurs, sur ce support.

1 Nous prenons ici le parti d’une écriture non discriminante, notamment par la forme inclusive en
usage désormais danse milieu de la recherche universitaire en France.
2 Auto Screen Capture est un outil de capture d’écran open source disponible gratuitement sur le
site https://sourceforge.net/projects/autoscreen/. Consulté le 12/03/2020
3 NVivo version 12 est un logiciel avancé pour l’analyse de données qualitatives dont l’édition
NVivo Pro plus permet un grand choix analytique et graphique des données à partir de nœuds
formés sur des assemblages de proximité et de cohérence.

-268-
Communications de dimension spécifique

Expérimentation
Elle cible une communication plurilingue (avec des exemples
ciblés pays: publicité, relationnel, chargé de communication,
aviation …) par bloc sur plusieurs niveaux (pays et spécialisations).
Trois blocs sont prévus.
Bloc 1: théorie de la communication (communication
interpersonnelle et de représentation de soi vers une communication
communautaire, numérique) - fonds commun générique bilingue
anglais - français
Bloc 2: société du numérique (société de l’information) -
fonds commun générique bilingue anglais-français
Bloc 3: cours de communication, de tourisme, d’aviation etc.
dépendant du pays projeté et du cursus - bloc spécifique ciblé;
trilingue anglais-français-vietnamien
Le nombre d’étudiants se répartit en deux groupes: le premier
provenant de l’Université de Hué (18 étudiants) a commencé
le parcours. Il n’est pas professionnellement ancré dans la
communication mais dans les langues étrangères. Le niveau
de français est supérieur à celui de l’anglais. Un second groupe
à l’Université de Hanoï débutera en août 2020 (une vingtaine
d’apprenants) et bénéficiera ainsi des ajustements faits lors du
premier groupe. En effet celui-ci servira pour la phase test mais
nous prévoyons d’en utiliser certaines données pour l’analyse. Ce
second groupe est lui, ancré dans des cours professionnalisant
en communication et suivra ainsi un cours totalement hybride
inscrit dans le suivi de l’enseignante en charge. Nous prévoyons
un environnement institutionnel avec Google Edu ce qui permet
d’offrir toutes les applications gratuites intégrées ainsi que
d’un espace de stockage suffisant. Cela implique que tous les
étudiants soient inscrits dans cette même institution avec un
compte Google Edu en partenariat avec l’institution universitaire
de référence choisie. Pour notre recherche collective, nous avons

-269-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

utilisé un compte personnel mais avec un important espace de


stockage infonuagique1.
Discussion, résultats attendus, conclusion
Les résultats que nous attendons ont d’abord trait à une
observation des usages quant à l’utilisation des ressources
proposées sur ce type de plateforme. Or, contrairement à une
plateforme de type LMS (Learning Management System),
Google Classroom ne dispose pas d’outils de tracking permettant
d’avoir une vision complète du parcours de l’utilisateur d’où
l’importance de l’élaboration des différents outils permettant une
telle observation. Notre projet prévoit d’amener l’expérimentation
sur le terrain du plurilinguisme des ressources ainsi que de
la crédibilité attachée à ce plurilinguisme ou au contraire à un
monolinguisme attaché à la langue mère, ou par préférence à
une langue d’apprentissage dite «distante» (Robert, 2004).
La question de la rencontre des deux espaces physique
et virtuel se posera également et nécessairement dans des
termes d’articulation et de proportion entre les deux, car, «loin
de s’opposer, ces deux espaces se complètent en effet, et leur
imbrication est à inventer» (Payeur et Zacklad, 2007, p.2). Il
existe ainsi des espaces «hybrides», «qui sont une articulation
des deux espaces précédents, et qui émergent au cœur même
des espaces physiques» (Ibidem) pour lesquels on trouve d’un
côté, le document transformé et manipulé numériquement par
plusieurs acteurs et d’un autre côté, la distribution de ce document
est réalisée «sur plusieurs supports et par l’intermédiaire de
plusieurs canaux» (Payeur et Zacklad, 2007, p.3).

1 Le terme est de 2017, et est destiné à offrir une alternative francophone à Cloud Computing
(Office québécois de la langue française). On pourra lire à ce sujet pour plus de précisions, l’article
de la gestion des technologies de l’information sur le site du Barreau du Québec, http://guideti.
barreau.qc.ca/donnees/infonuagique/. Consulté le 12/03/2020

-270-
Communications de dimension spécifique

Enfin, ce type de dispositif développe des concepts qui ne


sont pas totalement intégrés dans les modèles d’apprentissage
en Asie du Sud-Est. Ils conviennent mal en effet à un système
de valeurs encore majoritairement fondé sur des traditions
pédagogiques fortes de maîtrise des savoirs par la communauté
enseignante et d’enseignement transmissif. On retrouve de
fait des dispositifs d’enseignement à distance qui ne font que
reproduire les dispositifs physiques de la salle de classe et
des amphithéâtres bondés. D’autre part, les départements de
langue ont souvent tendance à négliger le plurilinguisme et le
multiculturalisme au sein des programmes. Nous espérons donc
trouver une forme d’autonomisation caractéristique des nouvelles
formes de distribution des informations et connaissances au
travers de dispositifs numériques transférables, en démontrant
le bien-fondé d’innovations dans l’enseignement des langues
et des cultures à vue professionnalisante, ce qui semble en
bonne voie puisque ce projet a reçu un soutien de coopération
scientifique par le service de coopération et d’action culturelle
de l’Ambassade de France au Vietnam sous l’intitulé Littératie
Numérique Plurilingue et Pluriculturelle (LNP2).

BIBLIOGRAPHIE
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techniques de la formation. Paris: Dunod. Repéré à https://
www.cairn.info/traite-des-sciences-et-des-techniques-de-la-
format--9782100566891.htm
2. Carré, P. (2015). De l’apprentissage à la formation. Pour une
nouvelle psychopédagogie des adultes. Revue française de
pédagogie, 190 (1), 29-40. Repéré à https://www.cairn.info/
revue-francaise-de-pedagogie-2015-1-page-29.htm

-271-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

3. Charlier, B. et al. (2006). Apprendre en présence et à distance.


Une définition des dispositifs hybrides. Distances et savoirs 4
(4), 469-496. Repéré à http://www.cairn.info/revue-distances-
et-savoirs-2006-4-page-469.htm
4. Gremmo, M.-J. & Riley P. (1995). Autonomie et apprentissage
autodirigé: histoire d’une idée. Mélanges CRAPEL n° 23.
Récupéré de http://atilf.fr/IMG/pdf/07_gremmo_riley.pdf
5. Lamarche, T. (2003). L’OMC et l’éducation: normalisation
de l’éducation pour en faire une marchandise échangeable
internationalement? Politiques et management public,
21 (1), 109-130. Repéré à http://www.persee.fr/doc/
pomap_0758-1726_2003_num_21_1_2783
6. Liquète, V. & Maury, Y. (2007). Le travail autonome - Comment
aider les élèves à l’acquisition de l’autonomie? Paris: Armand
Colin
7. Mœglin, P. (2012). Une théorie pour penser les industries
culturelles et informationnelles? Revue française des
sciences de l’information et de la communication [En ligne],
1. Repéré à http://journals.openedition.org/rfsic/130. Consulté
le 12 mars 2020
8. Robert, J. (2004). Proximité linguistique et pédagogie
des langues non maternelles. Ela. Études de linguistique
appliquée, no 136(4), 499-511. Repéré à https://www.cairn.
info/revue-ela-2004-4-page-499.htm.
9. Serres, A. (2012). Dans le labyrinthe, Évaluer l’information
sur internet. Caen: C&F éditions
10. Staker, H. & B Horn, M. (2012). Classifying K-12 Blended
learning. Innosight Institute. Récupéré de http://www.
christenseninstitute.org/wp-content/uploads/2013/04/
Classifying-K-12-blended-learning.pdf

-272-
L’APPROCHE DES SCIENCES COGNITIVES APPLIQUÉES
À L’APPRENTISSAGE ET LIMITES DES OUTILS NUMÉRIQUES
AU VIETNAM

Emilie NGUYEN HUU


Université de Can Tho

Résumé:
Depuis une trentaine d’années, les sciences cognitives, dont les neurosciences
et la psychologie cognitive, ont connu un essor rapide grâce à l’imagerie cérébrale
qui a permis de mieux appréhender le fonctionnement du cerveau et entre autres
les fonctions mnésiques. Un intérêt grandissant pour son application dans le
champ de l’éducation a permis de concevoir de nouveaux modes d’apprentissage
pour élaborer des formations plus performantes où l’apprenant s’autonomise et
s’évalue. Aujourd’hui des outils numériques, comme Kahoot, Plickers, flashcards
permettent à l’apprenant d’encoder, de consolider et de restituer l’information à
retenir par de nouvelles voies, tout en gagnant en autonomie via l’auto-évaluation.
Toutefois de nombreux obstacles s’opposent encore à leur utilisation dans la
région Asie-Pacifique, notamment au Vietnam.
Mots-clés: sciences cognitives, outils numériques, évaluation, mémorisation,
autonomisation.

Les sciences cognitives sont relativement récentes, que


peuvent-elles apporter à l’éducation aujourd’hui? Avec quels
outils numériques? Quelles sont leurs limites au Vietnam? Nous
tenterons de répondre à ces questions en vous présentant
tout d’abord rapidement ce que sont les sciences cognitives
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

et leur présence au Vietnam, leur apport en apprentissage/


enseignement et les limites des outils numériques disponibles.
Nous conclurons sur les obstacles rencontrés au Vietnam.

1. Court historique des sciences cognitives


et états des lieux au Vietnam
Les sciences cognitives ont pour objet l’étude et la
modélisation des mécanismes de pensée qu’elle soit humaine,
animale ou artificielle. Pour cela, elles s’appuient sur les données
issues de ses six sous-disciplines que sont les neurosciences,
la psychologie cognitive, l’anthropologie cognitive, la philosophie
de la cognition, la linguistique computationnelle et l’intelligence
artificielle. Elles s’intéressent ainsi à des fonctions indissociables
de l’apprentissage, que sont en autres la mémoire ou plutôt les
mémoires, le langage, le raisonnement, l’attention et les fonctions
exécutives.

Figure 1. Les champs d’action des sciences cognitives

Au Vietnam, si dans ce domaine quelques universités ont


développé des programmes en TIC (intelligence artificielle,
systèmes experts et cognitifs, linguistique computationnelle), les
recherches appliquées à l’éducation sont à leurs balbutiements.
En général, seule la psychologie cognitive, aussi nommée

-274-
Communications de dimension spécifique

cognitivisme, est abordée dans des modules tels que les grands
courants pédagogiques ou les modèles d’apprentissage et
d’enseignement. À Hanoi, l’ouverture d’un laboratoire privé de
recherches en EEG, Neuro Lab, a été annoncée en août 2017
avec la promesse d’appliquer cette technologie dans différents
domaines comme la santé et l’éducation. Dans le sud du pays,
l’Université de Pédagogie d’Ho Chi Minh - Ville fait figure de
pionnière en envoyant dès 2015 des professeurs au Centre de
recherche en sciences cognitives de l’Université nationale Trung
Chinh, à Taiwan, pour suivre leur programme de PhD. En 2017, de
nouveaux programmes de formation à destination des étudiants
de Master et post-universitaires ont été mis en place. L’Université
de Pédagogie d’Ho Chi Minh - Ville prévoit aussi d’ouvrir
prochainement un laboratoire de recherches dédié à l’application
des sciences cognitives en éducation. On peut donc en conclure
que peu de jeunes enseignants sont au fait des apports des
sciences cognitives. À ce jour, une unique promotion à Ho Chi Minh
- Ville a bénéficié de ces connaissances et quelques enseignants
vietnamiens expérimentés se formant seuls ont accès à cette
nouvelle méthode pédagogique.

2. L’apport en éducation des sciences cognitives


Grâce à leur modèle centré sur le traitement de l’information
qui consiste en quatre étapes (filtrage, encodage, stockage
et récupération), il est possible de circonscrire deux types
d’approches favorisant le processus d’apprentissage: l’une axée
sur l’apprenant, l’autre sur le matériel d’apprentissage.
Comment l’apprenant peut-il améliorer ses capacités de
mémorisation? Voici quelques orientations possibles:
- L’apprentissage distribué: les spécialistes recommandent
une 1ère période de mémorisation intense, puis de revoir ces
connaissances de manière expansée plusieurs fois. En effet selon
les travaux de Cull (2000), l’oubli est important et rapide si des

-275-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

reprises ne sont pas effectuées de façon espacée et progressive.


De même dans les programmes scolaires, l’apprentissage
spiralaire (Bruner, 1960) devrait être favorisé, afin qu’apprendre
devienne un processus continu supposant un rappel constant de
ce qui est acquis et une complexification progressive.
- La réactivation d’informations latentes grâce aux effets de
contexte et à la fabrication d’indices de remémoration efficaces.
Pour Brown, Roediger et McDaniel (2016), la simple mémorisation
d’un savoir n’est pas suffisante, il faut être capable de le
retrouver rapidement dans les méandres de la mémoire. Ainsi
l’apprenant peut d’une part tenter de recontextualiser le moment
de son apprentissage que ce soit physiquement (même lieu),
qu’émotionnellement (même humeur ou état psychologique), les
odeurs ont même leur importance pour Medina (2014).
- L’élaboration de cartes conceptuelles ou mentales. Suivant
d’Hainaut (1988), elles facilitent une conceptualisation soit
synthétique en faisant appel à un processus de généralisation, soit
analytique en mettant en œuvre un mécanisme de discrimination.
Pour Biggs et Collis (1982), elles permettent aussi de structurer
et de transférer les connaissances.
Côté enseignant, comment faciliter la mémorisation de
l’apprenant?
- Varier les types de médias (présentation, vidéo, animation,
etc) et de documents (tableaux, schémas, graphiques, etc) selon
le modèle multimédia décrit par Mayer (2014).
- Travailler de manière alternée et variée. Souvent une
séquence de cours s’articule autour d’un thème ou d’un concept,
puis on passe à autre chose. C’est une erreur dans le sens où
l’apprenant va apprendre par cœur du vocabulaire, des concepts,
mais les oubliera rapidement car il n’y aura pas de reprise plus
tard dans le cours. Or travailler de manière alternée et variée
favorise un haut niveau de compréhension et d’applications

-276-
Communications de dimension spécifique

conceptuelles, permettant un apprentissage plus complet et plus


durable.
- Offrir un degré de difficulté suffisante. Brown, Roediger
et McDaniel (2016) soulignent l’importance de bien doser la
difficulté des exercices. Trop faciles, ceux-ci engendrent l’ennui,
trop durs ils provoqueront un découragement. Bien dosés, ils
permettront à l’apprenant de mieux ancrer l’information et de
développer des stratégies d’apprentissage actives. Cela a aussi
un effet à long terme, quand on sait qu’apprendre demande des
efforts et des erreurs. On démontre alors une meilleure aptitude
à relever des défis.
- Proposer une fiche de mémorisation aux élèves. Pour bien
mémoriser, il faut d’abord bien comprendre. Apprendre par cœur
en lisant son texte de manière répétée est inefficace. Réviser par
remémoration, par interrogation sont des stratégies bien plus
performantes. Sur ladite fiche se trouvent des questions dans la
colonne de gauche tandis que dans celle de droite les élèves
notent les réponses.

3. Quelques limites aux outils numériques


- Pour travailler l’apprentissage distribué, les flashcards sont
un excellent outil. Ce sont des cartes où sur une face se trouve
une question, un dessin et de l’autre la réponse. Une boîte avec
compartiments permet de réguler le délai de révision. C’est une
bonne méthode pour mémoriser de nouvelles connaissances,
pour les consolider mais aussi pour autonomiser les apprenants.
La version en papier cartonnée a un coût temporel et financier
substantiel, puisqu’il faut un jeu par apprenant. Il existe des
versions numériques telles que Anki qui permettent de travailler
sur ordinateur. L’apprenant télécharge le paquet de cartes que crée
l’enseignant. Cela a plusieurs avantages face à la version papier:
la rétroaction est immédiate et Anki calcule des arborescences de
temps individualisées. Chaque apprenant dispose de son propre

-277-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

historique. D’autres logiciels proposent ce service: Memovoc,


supermemo,… Toutefois leur présentation assez austère peut
rebuter certains enfants habitués aux tablettes.
- Les cartes conceptuelles et les cartes mentales. Ce sont deux
sortes de cartes différentes, la première est souvent organisée de
manière hiérarchique, la structure est souvent descendante. Elle
permet en général de formaliser des connaissances et ses liens
sont qualifiés. La carte mentale ou heuristique est plus créative, le
plus général est au centre et elle se lit dans le sens des aiguilles
d’une montre. L’avantage de la carte numérique: elle est facile à
modifier et reste claire quel que soit le nombre de liens. Pour les
deux, les typologies des présentations sont multiples (en chaîne,
en étoile, en arbre, en réseau, …). Le point négatif est que pour
illustrer sa carte avec des dessins ou des photos, il faut souvent
télécharger la version payante. D’aucuns préfèreront une version
dessinée à la main qui permet plus de créativité.
- Les présentations animées, les vidéos. Comme le recommande
Mayer (2014), il est important de varier les supports sans toutefois
distraire l’apprenant de l’essentiel. De nombreux logiciels, comme
PowerPoint, Keynote proposent d’intégrer des vidéos, des schémas
aux présentations. Des logiciels comme Powtoon, Toonly offrent
de créer facilement des vidéos d’animation. Movavi, OpenShot
permettent de faire des montages vidéos. Pour les logiciels de
présentation, les limites sont souvent celles de l’utilisateur qui ne
maîtrise pas toutes les fonctionnalités des logiciels. Pour ceux de
création de vidéos d’animation, il faut souvent payer la version
éducative ou professionnelle, inabordable pour des enseignants
vietnamiens.
- Les exercices en ligne sont utiles pour faire réviser les élèves.
Ils sont souvent pléthores sur Internet, ainsi l’enseignant a le choix
dans sa sélection. La difficulté est de vérifier sa disponibilité au
fil des années et surtout sa qualité. Il est important qu’il y ait des

-278-
Communications de dimension spécifique

feedback précis lors de la correction. L’autonomie de l’apprenant


ne consiste pas à être capable de faire des exercices seul, il doit
être capable de comprendre et de remédier à ses erreurs.
- L’interrogation est une bonne méthode pour mémoriser,
elle est toutefois assimilée par les élèves à une évaluation. Des
applications en ligne peuvent rendre ce questionnaire ludique:
Kahoot, Socrative. Par ailleurs, Plickers est une alternative
intéressante, puisqu’elle propose d’imprimer des QR codes pour
les élèves. Ainsi uniquement l’enseignant a besoin d’un téléphone
multimédia et d’Internet.
Pour conclure, les limites de ces nouveaux outils sont
souvent les mêmes que dans les autres pays en développement
et que l’on peut résumer à la fracture numérique. On y retrouve
le problème financier qui d’une part demande aux professeurs
et/ou aux écoles du matériel et des abonnements aux différents
logiciels, et d’autre part pour les parents qui devront fournir une
tablette ou un téléphone avec une connexion Internet mobile. Par
ailleurs, l’utilisation des appareils et applications technologiques
demande aussi une certaine connaissance et même une
initiation. Alors même si les enfants s’y adaptent vite, les parents,
eux, ont souvent des difficultés à suivre. Enfin la formation des
enseignants en sciences cognitives méritent d’être développée
et déployée à tous.

BIBLIOGRAPHIE
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learning: The SOLO taxonomy (structure of the observed
learning outcome). New York: Academic Press.
2. Brown P. C., Roediger H. L., McDaniel M. A. (2016). Mets-toi
ça dans la tête ! Les stratégies d’apprentissage à la lumière
des sciences cognitives. Éditions Markus Haller.

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

3. Bruner, J. (1960). The process of education. Cambridge, MA:


Harvard University Press.-Cull, W. L. (2000). Untangling the
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Un cadre conceptuel et une méthode générale pour établi
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mieux vos capacités intellectuelles. Éditions Leducs.
8. Shih-Tseng Tina Huang, Trần Chí Vĩnh Long (2019), Triển
vọng ứng dụng khoa học thần kinh nhận thức trong nghiên
cứu giáo dục ở Việt Nam: bài học từ Đài Loan, Journal of
science - Ho Chi Minh city University of education, Volume
16 N°1, pp. 30-38.

-280-
L’INTÉGRATION DES TIC PAR LES ENSEIGNANTS
DE FRANÇAIS DANS LES UNIVERSITÉS AU VIETNAM

NGUYEN Quang Thuan


Université des Langues étrangères - Université nationale de Hanoï, Vietnam
PHAM Thi Hong Ha
Académie des Sciences militaires

Résumé:
La montée en puissance des sciences informatiques fait que les TIC sont
devenues des outils de base de l’enseignement/apprentissage, et que la classe de
langues devient de plus en plus, numérique, jusqu’à être parfois complètement
en ligne. Pourtant, si nos universités au Vietnam se voient très bien équipées de
nouveaux outils technologiques, ces derniers restent très peu utilisés. Certains
enseignants continuent toujours comme si ces technologies n’étaient pas là, juste
à côté d’eux, dans la classe ! Ce phénomène général de lente intégration des TIC
dans les pratiques pédagogiques peut avoir des effets négatifs non négligeables
sur l’enseignement-apprentissage du français, surtout quand nos étudiants sont en
situation très peu francophone. À partir de ce constat, nous avons procédé à une
enquête auprès des enseignants de français des universités afin d’identifier leur
niveau d’alphabétisation informatique, leurs attitudes face aux TIC et l’intégration
des TIC dans leur enseignement.
Mots-clés: alphabétisation informatique, pratique pédagogique, attitude,
intégration des TIC

1. Problématique
Nous vivons actuellement une époque de rapi des changements
technologiques. Les TIC font désormais partie intégrante de
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

notre société, tant dans les contextes professionnels que privés.


L’importance des TIC en éducation n’est plus à démontrer, au
contraire, le développement rapide de ces moyens informatiques
nous obligent à former aussi bien les enseignants que les étudiants
à de nouvelles compétences, celles de savoir se servir de ces
équipements efficacement et à des fins différentes. Or, il paraît que
l’adaptation aux TIC de nos enseignants universitaires est encore
si lente qu’on se demande pourquoi ces merveilleux outils de
notre époque moderne ne peuvent pas entrer dans leur pratiques
pédagogique. À cet égard, Bibeau (1999) a souligné: «Si le système
scolaire offre si peu de performance, c’est peut-être qu’il constitue
l’un des derniers bastions ou les technologies de l’information et de la
communication (TIC) n’ont pas été encore véritablement intégrées»
(p. 2). L’intégration des TIC offre de grandes richesses pédagogiques
à identifier pour les développer dans l’objectif d’améliorer des
situations d’apprentissage pour tous les apprenants. Cependant,
l’utilisation des TIC dans l’enseignement supérieur au Vietnam est
insatisfaisante. En effet, les résultats obtenus dans l’étude effectuée
par Nguyen (2017) révèlent que seuls 48,1% des enseignants
enquêtés déclarent utiliser souvent des TIC dans leur enseignement.
Toutes ces raisons nous ont conduit à étudier l’intégration des TIC
par les enseignants de français dans les universités au Vietnam.

2. Cadre théorique
La présente recherche a recours aux concepts comme
l'alphabétisation informatique, les pratiques pédagogiques,
l'attitude et l'intégration des TIC en enseignement supérieur. Ces
concepts seront présentés de façon brève en fonction de notre
objet d’étude.
L’alphabétisation informatique
L’alphabétisation informatique, d’après Hagbe-Kobila &Michel
(2004: 2), est l’ensemble des compétences informatiques de
base et avancées telles que:

-282-
Communications de dimension spécifique

«des opérations de mise en route de l’ordinateur, de l’utilisation


d’un logiciel de traitement de texte, d’un tableur, d’un système de
gestion de base de données, de la communication par le mail et
de la recherche de l’information sur Internet. A ces compétences
de base s’ajoutent d’autres plus avancées comme des éléments
de programmation ou de maintenance informatique.»
La pratique pédagogique
L’aspect pédagogique, selon Karsenti et al (2001), est
fondamentale dans l’intégration des TIC en pédagogie universitaire.
L’intégration pédagogique des TIC à l’université devrait avoir pour
but de faciliter, de favoriser l’apprentissage. Selon Clark et Dunn
(1991) et Orstein (1995) cités par Karsenti et al. (2001), la pratique
pédagogique est liée à la représentation de l’enseignement, à
la planification effectuée, à l’organisation de la classe, au type
d’apprenants préférés, et aux caractéristiques personnelles
intégrées dans l’acte d’enseigner et dans les méthodes utilisées.
L’attitude
Selon Legendre (1993: 112), l’attitude est un état d’esprit
(sensation, perception, idée, conviction, sentiment, etc.),
disposition intérieure acquise d’une personne à l’égard d’elle-
même ou de tout élément de son environement (personne,
chose, situation, événement, idéologie, mode d’expression, etc.)
qui incite à une manière d’être ou d’agir favorable ou défavorable.
Sur le plan de l’intégration pédagogique des TIC, Karsenti et al.
(2001: 96) a précisé que l’attitude peut être considérée «comme
un état d’esprit ou une disposition intérieure qui inciterait (ou non)
à utiliser et à intégrer les TIC dans la pratique pédagogique».
L’intégration des TIC
Mangenot (2000: 3 ) a défini l’intégration des TIC comme
suit: L’intégration des TIC, «c’est quand l’outil informatique est
mis avec efficacité au service des apprentissages.» À cet égard,

-283-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Bracewell et al. (1996) souligne que les TIC peuvent aider les
enseignants soit à faire mieux ce qu’ils font déjà, soit à faire des
choses différentes, les deux approches étant pertinentes au plan
pédagogique. Selon Larose, Grenon et Lafrance (2002: 29), il y
a deux courants majeurs en matière d’intégration des TIC dans
la pédagogie. Le premier, identifie l’intégration des TIC à la fois
en tant que condition de survie des institutions universitaires
et comme contexte favorisant la modification des pratiques
pédagogiques dans une perspective épistémologique socio-
constructiviste. Le second, plus pragmatique, considère que
l’intégration des TIC en pédagogie universitaire n’est pas et ne
sera pas particulièrement associée à la modification des pratiques
pédagogiques. D’autres auteurs insistent sur la nécessité de
profiter de la valeur ajoutée pédagogique rendue possible avec
l’usage des TIC pour permettre une amélioration de la pédagogie
et du rapport au savoir (Perrenoud, 1998;Peraya, 2002;Karsenti,
Peraya et Viens, 2002).
De nombreuses recherches ont été effectuées au cours
de ces dernières années dans le but d’explorer les avantages
ainsi que les inconvénients présentés par l’intégration des
TIC en éducation. Les résultats de ces recherches montrent
que l’intégration des TIC a eu des impacts très positifs sur
l’enseignement et l’apprentissage des langues (Mangenot,
1998, Atlan, 2000; Borges, 2001; Brondin, 2002; Pluies, 2004;
Depover, Karsenti et Komis, 2007; Barbaran, 2011; Nguyen,
2012). L’utilisation de ces nouvelles technologies favorise les
approches pédagogiques. Elle permet aux étudiants d’être plus
motivés, plus actifs et plus créatifs, et aux enseignants d’évoluer
dans leurs pratiques pédagogiques. Cependant, l’enjeu des TIC
en éducation, comme l’ont souligné Collin et Karsenti (2012)
et Nguyen (2012, 2018), n’est plus de les enseigner et de les
apprendre, mais il s’agit plutôt de les intégrer efficacement dans
une situation d’enseignement-apprentissage spécifique. Dans

-284-
Communications de dimension spécifique

cette perspective, les TIC peuvent être considérées comme


pédagogiquement pertinentes lorsqu’elles apportent une valeur
ajoutée à la situation d’enseignement-apprentissage.

3. Méthodologie de recherche
Pour atteindre les objectifs de la recherche, nous avons
adopté un devis de recherche descriptif. Une enquête par
questionnaire a été menée auprès des enseignants de français
des universités. Nous nous sommes inspirés, quant au choix de
la méthdologie de recherche, différents travaux de recherche et
plus particulièrement des travaux réalisés par Larose, Grenon et
Lafrance (2002).
L’échantillon de notre enquête est constitué de l’ensemble des
enseignants de français des quinze universités qui sont choisies
de façon aléatoire. Il s’agit de l’échantillonnage par grappes,
composé de 150 enseignants de français, majoritairement
féminin (72% de femmes et 28% d’hommes).
L’instrument de mesure utilisé est un questionnaire à structure de
réponses fermées, divisé en trois rubriques principales sans compter
celle portant sur les caractéristiques personnelles des participants.
La première composée de 12 questions porte sur des équipements
et leurs types, détenus par les répondants ainsi que sur leur profil
de compétence au regard de divers environnements informatiques.
La deuxième comprend 15 questions centrées sur les pratiques
d’utilisation de ces outils, tant sur le plan privé que sur dans la pratique
pédagogique. La dernière comporte 15 items à choix dichotomique
formant une échelle d’attitude au regard de l’informatique. Toutes les
questions sont bilingues, c’est-à-dire à la fois en vietnamien et en
français, afin de faciliter le travail des enquêtés.
Durant les mois de mars et d’avril, 150 questionnaires ont été
envoyés par courriel ou distribué directement aux répondants. Le
taux de réponses aux questionnaires est de 74,6%.

-285-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

4. Résultats
Équipement
L’analyse des résultats obtenus montre que la quasi-totalité
des enseignants disposent d’un ordinateur tant au bureau qu’au
domicile. En effet, 98,6% d’entre eux possèdent au moins un
ordinateur à la maison. Particulièrement, ils jouissent en majorité
d’une connexion très rapide à l’université ainsi qu’à la maison. Les
enseignants sont pour la plupart des utilisateurs de logiciels de
bureautique et surtout de traitement de texte. Ainsi, les logiciels
de traitement de texte sont beaucoup plus utilisés que d’autres
logiciels comme Excel ou PowerPoint (logiciel de présentation).
Dans certaines universités, une grande majorité de salles de cours
est équipée uniquement d’un ordinateur et cet outil sert surtout
aux usages du vidéoprojecteur. Enfin, l’utilisation du manuel
numérique est encore rare dans les universités vietnamiennes.
Recours aux TIC en pédagogie universitaire
D’abord, jusqu’à 36% des enseignants disent qu’ils utilisent
les TIC souvent en dehors de la classe. Ensuite, il n’y a que 37%
des enquêtés qui s’en servent en classe, mais se limitent le
plus souvent à une ou deux fois par semaine, seulement 8% les
utilisent plus de trois fois la semaine. Enfin, 32% d’entre eux n’en
font aucune utilisation dans leur enseignement. Par ailleurs, un
certain nombre n’est pas encore familiarisé avec les TIC en classe
et l’effectif de ceux qui n’ont pas utilisé le courrier électronique
ou qui l’ont rarement utilisé reste très élevé (22,6%) par rapport
à l’objectif d’intégration des TIC dans l’enseignement fixé par
des universités. De même, il reste encore 15,3% d’enseignants
qui n’ont pas utilisé ou ont rarement utilisé Internet. Et quand ils
l’utilisent, souvent ce n’est pas à des fins pédagogiques.
Concernant les compétences en TIC, seuls 22,6% se disent
assez compétents pour intégrer des TIC dans leurs classes.
Par contre, 41/55 des jeunes enseignants soit 74,5% affirment

-286-
Communications de dimension spécifique

être très à l’aise avec la technologie et plutôt à l’aise avec son


utilisation dans leur pratique pédagogique.
En ce qui a trait à des obstacles rencontrés dans l’intégration
pédagogique des TIC, les deux tiers des enseignants enquêtés
déclarent que l’intégration des TIC leur demande plus de temps
pour la préparation des cours, mais surtout que c’est à cause du
manque de formation et de maîtrise des outils informatiques. Ainsi,
pour certains, au lieu de faciliter l’enseignement, les TIC le rend
plus difficile, et leur implantation présente plus d’inconvénients
que d’avantages pour l’enseignement.
Formation à l’utilisation des TIC
Les formations initiale et continue jouent le rôle important
pour motiver les enseignants à l’utilisation des TIC et TICE (TIC
pour l’enseignement). Or, très peu d’enquêtés (9,3%) déclarent y
avoir été formés au cours de leur formation initiale. Jusqu’à 63%
des répondants affirment que cette formation technologique est
inexistante, insuffisante ou médiocre.
Attitude envers l’intégration des TIC
La grande majorité des enseignants (74,6%) pensent qu’il y
a un lien très fort/étroit entre les attitudes positives et l’utilisation
intensive des TIC, et vice versa, ce qui montre que les attitudes
influent fortement sur l’intégration des TIC dans les pratiques
pédagogiques. En effet, une attitude positive sur le rôle des
TIC dans l’enseignement est d’une importance cruciale dans
la décision d’un enseignant d’utiliser ou non des TIC (Williams
et al. (2000); Sime et Priestley (2005)). Par ailleurs, une attitude
négative influence plus fortement sur l’utilisation des TIC qu’une
attitude positive (Russell et al., 2003) et nous sommes surpris de
voir jusqu’à 25,4% des enquêtés ayant des attitudes négatives
envers les TIC, surtout ce qui concerne l’intégration de ces outils
dans leur enseignement.

-287-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

5. Discussion et conclusion
Les résultats de notre recherche suggèrent que la
grande majorité des enseignants universitaires ont le niveau
d’alphabétisation informatique qui leur permet d’utiliser de façon
autonome des TIC. Cependant, nos données tendent à mettre en
lumière une situation préoccupante de non ou peu d’utilisation des
TIC dans l’enseignement à l’université.
Trois aspects sont cruciaux pour une intégration des TIC dans
l’enseignement: les compétences informatiques, les attitudes et
enfin les conditions de l’intégration.
L’intégration pédagogique des TIC étant tributaire des
compétences informatiques enseignants - une attention particulière
doit être portée à la formation aux TIC, et les objectifs d’utilisation
de ces matériels technologiques à des fins d’enseignement et
d’apprentissage doivent être pris en compte dès la formation
initiale et renforcés régulièrement en fonction continue.
Pour conclure, afin d’introduire les TIC dans l’enseignement, il
faut commencer par former les enseignants à leur utilisation. Il faut
ensuite leur donner les moyens de mettre à profit cette formation.
En effet, former les formateurs permettrait «d’aller au-delà d’une
technicisation des pratiques antérieures» (Demaizière, 2000, p. 322)
et doterait l’enseignant «de toutes les compétences nécessaires à
l’intégration des outils technologiques dans la pratique pédagogique»
(Pouts-Lajus et Riché-Magnier, 1998, p. 175).

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Teacher Education, 54 (4), 297-310.
20. Sime, D., & Priestley, M. (2005). Student teachers’ first
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classroom learning: implications for initial teacher education.
Journal of Computer Assisted Learning, 21, 130-142.
21. Williams, D., Coles, L., Wilson, K., Richardson, A., & Tuson,
J. (2000). Teachers and ICT: current use and future needs.
British Journal of Educational Technology, 31 (4), 307-320.

-291-
À PROPOS DE L’APPROCHE PÉDAGOGIQUE À CARACTÈRE
ACTIONNEL INTÉGRANT DES TECHNOLOGIES DE
L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION (TIC) DANS
L’ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS DE POLICE À L’ACADÉMIE
DE LA POLICE POPULAIRE

NGUYEN Thi Hue


Faculté des Langues Étrangères
Académie de la Police populaire du Vietnam

Résumé:
Notre article présente une tentative d’intégration des TIC à l’enseignement/
apprentissage du français à l’Académie de la police populaire du Viêtnam (APP). A
travers une recherche-action, nous montrerons comment les TIC nous ont permis
de mener presque parallèlement et avec efficacité l’enseignement/apprentissage
à la fois du français général et du français de police, ce qui est une spécificité de
notre contexte de formation.
Mots-clés: démarche actionnelle, français de police, enseignement/ apprentissage
de la compréhension écrite, TIC.

1. Problématique
L’enseignement/apprentissage de la compréhension des
textes du français de police (désormais FP) à l’APP pose souvent
problèmes. D’abord, la méthodologie reste encore traditionnelle
du fait que la priorité est accordée aux connaissances
linguistiques plutôt qu’au développement d’une vraie compétence
de compréhension écrite (CE). Ensuite, l’innovation pédagogique
Communications de dimension spécifique

est souvent négligée. Plus particulièrement, si l’APP met à


notre disposition tous les matériels informatiques nécessaires
(ordinateur, rétroprojecteur, logiciels éducatifs...), et que les
enseignants aient suffisamment de compétences dans le
domaine des TIC, que 95% des étudiants aient en leur possession
ordinateur, un ipad ou un smartphone et qu’ils aillent souvent
sur les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Instagram, Zalo) non
seulement pour les tchats mais aussi pour leur études en général
et surtout pour le travail du groupe, l’utilisation des TIC dans
l’enseignement/apprentissage du français dans les cours reste
très rare. Une des raisons principales est que les enseignants
eux-mêmes ne partagent pas le même avis sur le rôle des TIC
dans l’enseignement/apprentissage. Certains pensent même que
l’utilisation des TIC dans les cours ne permet ni de dynamiser des
échanges verbaux en classe ni de développer la compétence de
CE, surtout des textes en FP.
Pourtant, depuis leur apparition, les TIC semblent apporter
de multiples bénéfices à l’enseignement/apprentissage, surtout
à celui des langues étrangères (LE), ce qui a été signalé dans
les conclusions de nombreuses recherches (Balanskat, Blamire
et Kefala, 2006;Kulik, 1944;Machin, McNally et Silva, 2006).
De là, nous nous sommes demandés si oui ou non, une
approche pédagogique de caractère actionnel et intégrant les
TIC pourrait améliorer la compétence de CE chez nos étudiants
à l’APP. Pour y répondre, nous avons effectué une recherche-
action dont l’hypothèse centrale est celle-ci: avec l’application
d’une démarche pédagogique de caractère actionnel et intégrant,
les TIC telle que sera décrite dans la partie Méthodologie ci-
dessous, nos étudiants de l’APP feraient des progrès visibles en
CE à travers les notes au test final. Ils pourraient même acquérir
d’autres bénéfices dans leur apprentissage du français en
général.

-293-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2. Cadre théorique de l’expérimentation


À la suite de PHAM D.S. (2001: 65), nous pensons que
la compréhension d’un texte écrit peut se définir de manière
générale comme la capacité à reformuler à partir des éléments
du texte et des connaissances inhérentes du lecteur:
a/ une représentation mentale de la situation évoquée par le
texte, et
b/ la saisie de l’intention de communication de l’auteur du texte.
Cette définition de la compréhension de texte nous semble
valable pour tout texte, que ce soit en langue générale ou en langue
de spécialité. Cependant, comme l’a remarqué Guéorguiéva-
Steenhoute (2007: 36), «le texte de spécialité possède des traits
particuliers» c’est-à-dire que pour le comprendre, le lecteur doit
faire appel non seulement aux facteurs linguistiques dans le texte,
mais peut-être et surtout aux connaissances liées à la spécialité
traitée. Ces connaissances peuvent être souvent implicites, non
évoquées par le texte, mais appartenant au modèle de situation
présentée grâce auquel le lecteur peut élaborer une représentale
mentale cohérente du contenu. La distinction entre les deux
niveaux de représentation (base de texte et modèle de situation)
permet de distinguer plusieurs degrés de compréhension,
plusieurs niveaux de difficultés et donc plusieurs types d’aides.
Ainsi, Marin B. et al. (2007:121) ont souligné:
La difficulté pour les élèves d’accéder aux informations constitutives du
«modèle de situation» des textes scientifiques explique les difficultés à traiter
les inférences. Ainsi, la compréhension des textes informatifs et explicatifs est
étroitement liée aux connaissances acquises par l’élève.

De là, la compréhension d’un texte de spécialité, souvent


de caractère informatif-explicatif, dépend en grande partie de la
connaissance du domaine, à travers le lexique de spécialité en
particulier. Et si les deux types de compétences, linguistique d’une
part et spécialisée d’autre part, sont toujours indissociables, pour

-294-
Communications de dimension spécifique

ces textes, les connaissances du domaine semblent jouer un rôle


prépondérant.
Mais à l’APP, l’enseignement/apprentissage du français ne
suit pas l’ordre courant: le français général d’abord pendant
les 2 premières années, ensuite le français de spécialité (FS)
dans les 2 ou 3 années qui restent, car nous devons enseigner
les deux en même temps dès la 2e année. Ce qui amène des
difficultés pas seulement sur le plan didactique - comment
transmettre des savoirs linguistiques et en même temps former
des compétences à des étudiants qui n’ont qu’un niveau
débutant en français - mais sur le plan temporel également. C’est
pour cela que nous devons trouver des moyens pour rendre
l’enseignement/apprentissage linguistique plus autonome et
personnel, laissant ainsi plus de temps et d’énergie pour celui
du FP, l’objectif central à l’APP.
Pour ce faire, nous avons pensé à une approche pédagogique
de caractère actionnel et intégrant des TIC, axée sur des notions
suivantes:
- Premièrement, l’approche se situe dans une perspective
actionnelle, selon laquelle l’apprenant non seulement apprend la
langue mais il est en même temps l’usager et surtout acteur social
(CECR 2000: 11). Ce qui signie que l’enseignement/apprentissage
doit être une activité dans laquelle la langue et la culture apprises
sont non seulement des objets d’étude mais en même temps
des instruments d’action et de communication. Ce qui revient à
mettre en place dans l’enseignement/apprentissage des tâches
pour réaliser ce qu’a dit Puren (2006: 5): «l’apprenant apprend
en remplissant une ou plusieurs tâches». La démarche n›est pas
facile mais son 1er intérêt est que l’apprenant sera placé au cœur
de l’enseignement/apprentissage, rendant possible la centration
sur l’apprenant, pédagogie en vogue actuellement. Ensuite, la
réalisation des tâches «obligerait» l’apprenant, sous la houlette

-295-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

de l’enseignant, à collaborer avec ses pairs pour mettre en œuvre


des compétences nécessaires et développer des stratégies
de résolutions de problèmes. Grâce à cela, il apprend à mieux
mobiliser ses ressources langagières, construit son autonomie
en langue et en action, progresse plus rapidement, et devient
vraiment un usager de la langue apprise et un acteur social.
- Deuxièmement, il faudra intégrer des TIC dans ce processus
d’enseignement/apprentissage, et ce, pour deux raisons. D’abord,
celles-ci mettent à la disposition des enseignants et apprenants
tous les supports, aussi bien du passé - film fixe, dessin animé,
laboratoire de langue - que ceux de l’époque moderne - vidéo,
radio, télévision, son et texte en même temps... (Puren, 2006:
4 ), ce qui constitue une aide importante à l’enseignement/
apprentissage. Ensuite, les TIC permettent de ne plus être limité
dans l’espace de la classe ou à la durée des cours, mais mettent
les apprenants en situation quasi constante d’imprégnation de la
langue apprise, car hors de la classe, elles peuvent être utilisées
par les apprenants, soit seuls, soit avec leurs pairs, voire avec le
professeur!
- Dernièrement, l’approche est menée suivant un «scénario
pédagogique» que Bourguignon (2009: 9) définit ainsi:
Un scénario d’apprentissage-action […] engage les apprenants à étudier un
problème de manière analytique et à prendre conscience des besoins qu’ils
ont pour y arriver. En amenant les apprenants à comprendre pourquoi ils ont
besoin de la langue, on donne du sens à l’apprentissage.

Ce scénario sera le moyen pour introduire dans l’enseignement/


apprentissage des tâches, c’est-à-dire des activités telles que
CECR (2000: 122) les définit:
il y a ‘tâche’ dans la mesure où l’action est le fait d’un (ou de plusieurs)
sujet(s) qui mobilise(nt) stratégiquement des compétences dont il(s)
dispose(nt) en vue de parvenir à un résultat déterminé,

pour inciter l’apprenant à réellement apprendre et de là,


développer ses compétences de communication et d’action.

-296-
Communications de dimension spécifique

Par ailleurs, c’est grâce à cette planification que l’enseignant


réalise avec plus d’efficacité son travail de formateur car il s’agit
d’un travail didactique et pédagogique dans lequel un programme-
projet (de cours, de séquences, de modules) est envisagé, décrit/
raconté, découpé, structuré..., bref préparé dans tous ses détails,
avant d’être réalisé en classe. Le scénario pédagogique permet
ainsi au formateur de formaliser les différents éléments et étapes
nécessaires de son action didactique et éducative.

3. Méthodologie de recherche
a/ Démarche
Sur la base des considérations didactiques et pédagogiques
ci-dessus, pour répondre à notre problématique, nous avons
décidé de mener une recherche-action. Cette dernière se définit
comme «un type de recherche collective associant acteurs et
chercheurs dans une double visée d’action et de recherche»
(G. Adamczewski: 2005:3); et qui vise «la solution de problèmes
auxquels sont confrontés les intéressés, tout en contribuant à
l’élaboration de modèles théoriques...» (Grell et Wéry (1981:
126). Cette démarche est de plus en plus utilisée en recherche
en didactique des langues pour transformer ou améliorer une
situation (Nguyen: 2014). À cet égard, Verpieren (2002: 106) a
souligné:
«La véritable recherche-action est celle qui poursuit
conjointement deux objectifs: production de connaissances et
changement de la réalité par l’action. Cet enjeu qui est double
conduit à diminuer autant que faire se peut la place laissée au
hasard, et vise à ce que chaque acteur-chercheur ou praticien
acquière une réelle capacité à anticiper l’avenir.»
À partir de ces principes, nous avons construit notre
recherche-action avec les grandes étapes suivantes:
ÉTAPE 1: Définition du problème de recherche

-297-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Notre intervention cherche à voir si l’approche pédagogique


sous forme de projet, tâches... suivant des scénarios pédagogiques
centrés sur le développement de la CE du FP, avec les TIC
comme moyens et supports, pourra apporter des changements
réels à la fois dans les résultats des étudiants - amélioration de la
compétence de CE, meilleures notes aux exercices et tests - et
dans les attitudes face à l’activité de lecture: postures positives,
participatives des apprenants dans l’apprentissage, par exemple.
ÉTAPE 2: Élaboration des scénarios pédagogiques intégrant
les TIC
Cette étape consiste à élaborer des scénarios intégrant les
TIC avec des éléments principaux suivants:
1) Analyse des documents à travailler pendant l’expérimentation.
Les critères de choix des documents de FP à lire-comprendre en
classe sont les suivants:
- Textes répondant aux objectifs de la formation de l’APP, c’est-
à-dire développant la compétence de CE des textes de police;
- Textes authentiques et aussi diversifiés que possible sur
des thèmes relatifs au métier de policier: missions, fonctions de
la Police Nationale, situations de délinquance contemporaines…;
- Textes adaptés à l’âge du public (jeunes entre 18 ans et
26 ans); à leur niveau de français (A1 à A2 du CECR); à leurs
centres d’intérêt professionnels (connaissances et compétences
professionnelles, qualités d’un bon agent de sécurité: curiosité,
attention, esprit logique, capacités d’analyse, de synthèse et
de déduction, esprit d’équipe); à leur héritage socioculturel (vie
individuelle et collective, habitus...);
- Textes menant progressivement à un haut niveau de
communication verbale mais aussi non-verbale (compréhension
des indices, traces peu visibles aux non-spécialistes...).

-298-
Communications de dimension spécifique

2) Choix des outils de TIC comme supports d’enseignement/


apprentissage de ces documents. D’abord, tous les cours sont à
réaliser dans les salles équipés d’outils informatiques: ordinateur,
projecteur, connexion Internet, logiciels sur les thèmes concernés...
Ensuite, ces supports seront utilisés dans toutes les phases de
la lecture: sensibilisation, lecture-compréhension, retours sur les
difficultés de compréhension ou sur les erreurs d’interprétation,
etc. Pour l’utilisation en dehors de la classe, d’autres outils TIC
(smartphone, Google doc, Moodle...) sont indiqués aux étudiants
pour qu’ils préparent ou approfondissent le travail en classe, et
fassent de l’autoformation. L’enseignant se sert aussi des TIC
pour faire le suivi du travail des étudiants, évaluer ce qui a été
acquis et proposer des corrections ou exercices de renforcement
quand nécessaire.
3) Choix de l’intervention méthodologique appropriée: l’approche
méthodologique privilégiée est le scénario d’apprentissage-action,
tel que préconise Bourguignon (2009: 9):
visant l’acquisition de connaissances à travers la résolution de problèmes
concrets» […];engageant les apprenants à étudier un problème de manière
analytique et à prendre conscience des besoins qu’ils ont pour y arriver;amenant
les apprenants à comprendre pourquoi ils ont besoin de la langue, on donne
du sens à l’apprentissage.

Pour atteindre ces objectifs, deux principes seront appliqués:


- l’enseignement/apprentissage de la compréhension des
textes FP sera fait selon un programme comprenant 2 unités avec
4 leçons de 4 séances de 50 minutes chacune sur les 2 grands
thèmes: missions puis fonctions de la Police Nationale, avec des
séries d’histoires d’enquête et les situations de délinquance en
France et dans le monde actuel;
- toutes les séances de cours suivront la même démarche:
préparation de l’enseignant et des étudiants à la maison; travail
de lecture-compréhension en classe en plusieurs étapes: entrée
dans le texte; lecture compréhension globale puis dans les

-299-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

détails; retour sur les caractéristiques du texte ou les difficultés


des étudiants; et enfin la production orale-écrite, surtout à la
maison, comme activités de ré-emploi...
Avant l’expérimentation, la méthodologie et démarche de
travail, attentes de l’enseignant, ce que les étudiants devront
faire... seront présentés et discutés avec les étudiants. Tout au long
de l’expérimentation, il y aura un suivi pas à pas pour rassurer,
corriger, ajuster et créer une vraie dynamique d’apprentissage.
ÉTAPE 3: Créer des échantillons d›étude
Deux groupes d’étudiants de mêmes caractéristiques
(année, niveau de français...) seront formés, l’un est le groupe
expérimental, l’autre sert de groupe témoin. Tous les enseignants
de français de l’APP seront invités à suivre l’expérimentation
et à émettre leurs remarques et observations à travers un
questionnaire à la fin de l’opération.
ÉTAPE 4: Analyse et évaluation de l›expérimentation par des
questionnaires et un test
Pour évaluer l’expérimentation, nous prévoyons 2 moyens: les
enquêtes par questionnaires et des tests de contrôle. Il y aura deux
questionnaires: l’un pour enseignants avec 20 questions à la fois
fermées et ouvertes, mais la grande majorité seraient fermées pour
faciliter le travail des répondants. Le contenu porte sur l’efficacité
de l’approche, des scénarios pédagogiques et l’utilisation des TIC.
Il sera aussi question des progrès, degrés d’autonomie que les
étudiants auront acquis ou pas. L’autre, pour étudiants, portera sur
l’efficacité de la mise en œuvre de l’approche pédagogique par
l’enseignant; utilisation des TIC dans les cours et chez eux; les
progrès qu’ils auront faits ou non, lesquels et pourquoi... Il y aura
aussi 20 questions, dont la plupart étaient fermées pour faciliter
les réponses. Tous les deux questionnaires sont en vietnamien,
langue maternelle des enseignants et étudiants, pour éviter le plus
de mécompréhension possible.

-300-
Communications de dimension spécifique

Le 2e instrument pour évaluer concrètement les progrès des


étudiants et l’efficience de l’expérimentation. Pendant l’opération,
il y aura des tests-exercices pour le suivi des acquis au sein
du groupe expérimental. Mais ce qui sera décisif sera le test
d’évaluation finale de CE de 50 minutes, inspiré des épreuves dans
Réussir le DELF, niveau A1, A2 du Cadre européen commun de
référence et Le nouvel Entrainez-vous DELF A1, A2: 150 activités.
Le test comportera 4 exercices, chacun de 5 à 10 questions à
choix multiples, textes à trous et questions à réponses ouvertes
courtes. La longueur de chaque texte à lire ne dépassera pas
170 mots et les contenus porteront sur les missions, fonctions
de la police et sur les situations de délinquance. Les étudiants
des deux groupes, «expérimental» et «de témoin» passeront ce
même test final.

4. Réalisation de l’expérimentation
4.1. Les participants
Une fois tous les préparatifs terminés, nous sommes passés à
l’expérimentation. À part de nous-même, les 3 autres enseignants
de français de l’APP ont été invités en tant qu’observateurs. Ils
sont âgés de 29 à 41 ans, deux ont 16 ans d’enseignement et
un autre 4.
Du côté des participants, deux classes différentes, la 4NN01
et la 4NN02, ont été choisies, avec au total 61 garçons et 7 filles,
âgés de 19 à 26 ans. L’équilibre des sexes n’a pas été possible car
la grande majorité des étudiants de l’APP sont de sexe masculin.
Ces 68 étudiants ont été répartis en 2 groupes: Le G1 ou la classe
4NN01, de 34 personnes, était le «groupe expérimental», l’autre
était G2, ou le «groupe témoin», de 34 étudiants.
Avant l’expérimentation, une étude a été menée pour dresser
le profil de ces étudiants. Ils ont tous appris l’anglais au secondaire
et ont commencé le français seulement à l’université. Ils ont

-301-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

fait 150 heures de français en 1re année, et sur le plan «niveau


de langue», il n’y avait pas de différences significatives entre
les sujets des deux groupes, selon le test statistique t-Student
effectué.
4.2. Les conditions matérielles
L’expérimentation s’est réalisée dans une salle équipée de
tous les matériels infomatiques indispensables, comme prévu.
Elle s’est déroulée au 1er semestre de l’année universitaire 2019-
2020, entre début août et fin septembre 2019 (8 semaines). Les
deux groupes suivaient les cours de CE du FP similaires en terme
de textes, contenus et volumes horaires. Cependant, le G1 avait
les cours conçus selon une démarche actionnelle, supportés par
les TIC. L’autre groupe de comparaison G2 continuait avec des
cours très peu ou pas du tout supportés technologiquement et
l’approche pédagogique n’était pas actionnelle. Les documents
existants à l’APP qui répondent bien aux critères fixes ont été
retenus pour l’expérimentation.
4.3. La démarche pédagogique
La démarche pédagogique de caractère actionnel et intégrant
les TIC de la compréhension des textes FP avec le G1 a été
menée comme suit:
+ Avant la classe: les étudiants ont été demandés de lire
le document, d’en faire des hypothèses de sens, surtout d’en
préparer chez eux, individuellement/en groupe, un petit glossaire
du lexique policier du texte. Une fois fini, ils devaient envoyer ce
glossaire à la boîte électronique commune francaisdelapolice@
gmail.com. pour que l’enseignant puisse corriger q nécessaire.
+ En classe, il y a eu:
- Des activités de mise en situation du document FP avec
photos, postcards, vidéos, films policiers... pour stimuler la curiosité,
sensibiliser à l’objectif global de l’unité didactique, aider à mobiliser

-302-
Communications de dimension spécifique

les connaissances antérieures et même susciter de nouvelles


idées. La compréhension globale et le contexte du document ont
été travaillés à travers des repérages du type: Quoi? Qui (parle)? À
qui? De quoi? Où? Quand? Comment? Pourquoi? Dans quel but?
- Des activités de compréhension en détail avec recherche
des informations plus précises et réalisation d’autres tâches plus
pointues: analyse de réseaux d’indices linguistiques ou autres qui
permettaient de construire précisement le sens du document; étude
du lexique spécialisé, leurs sens, connotations, fonctionnement,
conceptualisation des notions légales et policières; grammaire,
règles d’usage du français général et du FP...
- Des activités de vérification et d’évaluation de la compréhension:
exercices et/ou tests rapides de CE sur les documents lus et
correction.
+ Après la classe étaient des activités de ré-emploi: production
orale ou écrite pour développer la compétence de communication
avec: élargissement ou transposition des situations d’échanges
ou contextes (français, mondial et vietnamien); réemploi des
éléments linguistiques et notions spécialisées du métier de
policier dans des monologues suivis ou dialogues entre pairs
sur le(s) thème(s) venant d’être appris, l’enseignant étant là pour
aider, encourager... La visée de ces productions étaient de vérifier
la saisie du sens des textes lus; les réactions des étudiants face à
ce qui avait été lu et leur ré-emploi effectif à l’oral et à l’écrit. Ces
activités pouvaient être renvoyées comme devoirs individuels ou
de groupe à la maison.
4.4. Évaluation de l’expérimentation:
Pendant l’expérimentation, des tests périodiques ont été
effectués avec le G1 pour évaluer l’efficacité de l’intervention
pédagogique, détecter des ajustements ou changements à faire,
et le progrès des étudiants. Puis à la fin, un test d’évaluation
finale a été effectué. Les étudiants des deux groupes G1 et G2

-303-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

ont passé le même test de CE de 50 minutes sur un texte de


FP de 170 mots, avec le même barême de notation. Quant à
l’enquête par questionnaires, celui pour apprenants a été distribué
directement aux 34 étudiants participants et le taux de réponses
était de 100%. De même, le questionnaire pour enseignants a
été proposé aux 3 formateurs de français à l’APP, observateurs
de l’expérimentation. Le taux de réponses était aussi de 100%.

5. Résultats et discussion
Après les enquêtes, les réponses ont été dépouillées, le test
corrigé et les résultats ont été analysés de manière minutieuse.
Nous rapportons ci-dessous dans les tableaux les résultats
obtenus.
5.1. Enquête pour enseignants
L’enquête réalisée auprès des enseignants avait pour
objectif d’évaluer l’efficacité de l’approche actionnelle intégrant
des TIC dans l’enseignement du FP. La Figure 1 ci-dessous est
une évaluation générale des enseignants de la démarche que
nous proposons: selon eux, c’est une approche pédagogique
innovante ayant une efficacité réelle, car elle convient à l’EA du
FP à APP.

La Figure 2 ci-dessous donne les pourcentages concrets


des éléments qui ont mené à l’évaluation générale dans la Figure
1: 67% des enseignants estiment que l’utilisation du scénario

-304-
Communications de dimension spécifique

pédagogique est très efficace et 33 efficaces car les tâches se


sont concrétisées dans ce scénario (67% très efficaces et 33%
efficaces). Ils affirment aussi que les tâches sont très efficaces et
33% efficaces. Tous (100%) sont d’accord que les activités sous
forme de tâches ont réussi à «obliger» les étudiants à mobiliser
leurs connaissances et compétences pour accomplir les tâches.
Ce qui a permis des progrès et une meilleure autonomie
progressifs des étudiants pendant l’expérimentation.

5.2. Enquête auprès des étudiants


La Figure 3 montre les résultats vus du côté des apprenants.
29% entre eux sont tout à fait d’accord et 71 % sont d’accord
que l’approche actionnelle avec les TIC de l’expérimentation était
innovante. Ils affirment également que cette approche convient
bien à leur apprentissage du FP (21% tout à fait d’accord et 79%
d’accord).

-305-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

La Figure 4 indique que, pour les étudiants, les TIC sont


utiles et indispensables pour leur apprentissage du FP. Cette
affirmation se traduit d’abord par des termes comme intérêt,
motivation, actif, créativité, rythme personnel, amélioration de
l’interaction, échanges. Il est aussi bien clair ainsi que l’utilisation
des TIC les a rendus plus motivés, plus attentifs à la leçon (76%).
Entre 63% et 65% estiment que les TIC les a aidés à devenir plus
actifs, plus créatifs et qu’elles leur ont permis de réaliser chez
eux des tâches, chacun à son rythme. D’autre part, entre 59%
et 79% estiment que les TIC sont rendus faciles leur recherche
de documents, leur ont permis de suivre plus efficacement
l’enseignant (59%), que ce soit avant, pendant ou après les
cours. Enfin, la plupart (82%) trouvent que les TIC ont amélioré
considérablement les interactions avec leurs pairs, en particulier
les échanges concernant les études.

5.3. Résultats au test de compréhension écrite final


Le logiciel T-Student, utilisé pour comparer les notes
moyennes, a fait ressortir des différences significatives dans
les résultats du test final entre les étudiants du G1 et du G2.
Le Tableau 1 ci-dessous montre que les scores obtenus par les

-306-
Communications de dimension spécifique

sujets de G1 (7.25) sont meilleurs que ceux du G2 (5.71). Même


résultats à travers les médianes (7.0 vs 5.2) ! L’écart-type entre
2 groupes est très faible, presque le même (.937 vs .769), ce qui
indique que les données sont tous homogènes et la distribution
des scores est peu dispersée autour de la moyenne. La fiabilité
des résultats de recherche est donc bien assurée.
Tableau 1: Moyennes (M), médianes (Md) et écarts-types (E-T) des résultats de G1 et G2

Groupe M Md E-T
Groupe 1 expérimental 7.25 7.0 .937
Groupe 2 témoin 5.71 5,2 .769

L’analyse statistique inférentielle (Tableau 2 ci-dessous) a


donné les résultats suivants: Test t = 2665; dl = 79; p = .000. C’est
la valeur (p) qui indique s’il y a une différence significative entre
les groupes d’expérimentation ou non, et qui permet de confirmer
ou de rejeter l’hypothèse de la recherche. Le seuil de signification
dans notre recherche avait été fixé à 0,05 par avance et l’indice
(p) obtenu de notre test est inférieur à cette valeur (p=.000), ce
qui montre une différence très significative entre G1 et G2, que
les sujets du G1 avaient de meilleures performances dans le test
final de CE que ceux du G2. L’hypothèse de notre recherche, selon
laquelle les étudiants qui suivaient une démarche pédagogique
de caractère actionnel intégrant les TIC feraient plus de progrès
en CE que ceux qui suivaient des cours ordinaires est ainsi
confirmée. La question de notre recherche a obtenu ainsi une
réponse valide et tout à fait positive.
Tableau 2: Comparaison des scores obtenus par G1 et G2

Source de variation Test T dl p


G1.Exp vs G2.Tém .4170 66 .000✱✱✱

P<0,05. ✱✱ P<0,01. ✱✱ ✱ P<0,001.

-307-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

5.4. Discussions
À travers les réponses aux questionnaires, et suite aux
évaluations pré-test et post-test, notre expérimentation montre
qu’une approche actionnelle assistée par les TIC a amélioré
manifestement les résultats obtenus par les étudiants dans une
évaluation sommative (test final noté sur 10). Celle-ci a également
augmenté l’intérêt, la motivation, la créativité, l’attention, les
interactions dans l’apprentissage en classe et à la maison de nos
étudiants. Par ailleurs, l’utilisation fréquente des outils comme
Facebook, Twitter, Moodle a encouragé l’approfondissement
personnel du français, créé une attitude plus favorable envers cette
langue et développé fortement l’autonomie dans l’apprentissage.
Surtout, pendant la période d’expérimentation, nos enseignants
n’ont pas que joué leur rôle d’observateurs ! Car sollicités par les
étudiants, certains leur ont apporté de l’aide, soit pour manipuler
les outils informatiques, soit pour préparer les leçons. Cela signifie
que notre expérimentation a exercé une influence positive sur
les enseignants de l’APP, et a changé quelque peu leur attitude
envers les TIC et envers l’innovation pédagogique. Ce fait permet
d’espérer qu’ils changeront la méthode de travail dans leurs
propres classes pour améliorer la qualité de l’enseignement/
apprentissage du français dans notre APP!
Pourtant, les point forts de notre approche pédagogique,
qui sont la démarche actionnelle et les TIC, peuvent être
discutés, par exemple dans des situations de graves lacunes en
connaissances didactiques et de pratiques pédagogiques de la
part des enseignants, puis dans les cas de manque de matériels
nécessaires (ordinateur, projecteur, logiciel de traitement…),
de transmission peu performante d’Internet, du wi-fi; même de
l’instabilité du courant électrique, de connaissances informatiques
des enseignants et étudiants… Ce qui veut dire que:

-308-
Communications de dimension spécifique

- Sur le plan didactique et pédagogie, la connaissance approfondie


de la perspective actionnelle et surtout la capacité de l’adapter à des
contextes spécifiques d’enseignement/apprentissage du français
est indispensable;
- Sur le plan technique, une certaine accoutumance des
enseignants et apprenants aux différentes possibilités des TIC
est fondamentale;
- Dans tous les cas, les enseignants et apprenants devront
prévoir des solutions de secours: ajustements des scénarios
pédagogiques en cas d’incident, utilisation des matériels en
cas de panne des équipements, interruption du wifi, coupure du
courant...
En bref, au vu des résultats encourageants de l’expérimentation:
les notes des étudiants ont augmenté; les difficultés rencontrées
par nos étudiants au cours de l’apprentissage du français ont
quelque peu diminué; les échanges sont devenus plus faciles
et plus fréquents avec les enseignants et entre les étudiants;
la motivation, la responsablité, l'autonomie, la créativité,
individualisation et l'harmonisation du rythme de travail ont
également augmenté... Notre recherche-action nous a donné
confiance en ce qui concerne les nouvelles méthodologies et
pratiques pédagogiques, la mise à profit des outils technologiques
pour mieux servir l’enseignement/apprentissage du français et
améliorer notre exercice du métier d’enseignant de français.

3. Conclusion
L’objectif principal de la présente recherche était de nous
interroger sur la validité d’une pédagogie basée sur la perspective
actionnelle et intégrant les TIC. Une expérimentation auprès des
étudiants de 2e année de l’APP a montré que globalement, cette
pédagogie a répondu aux attentes des étudiants, et que les objectifs
de notre investigation ont été atteints. L’approche a réellement

-309-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

aidé les étudiants qui participaient à l’expérimentation à faire


des progrès notables en CE des textes de FP. Elle leur a apporté
en plus la motivation, la créativité, les meilleures interactions et
collaborations avec leurs pairs. Il est donc possible de conclure
que l’approche pédagogique basée sur la perspective actionnelle
et intégrant des TIC est la solution confirmée pour notre contexte
d’enseignement/apprentissage du français de police, parallèlement
à celui du français en général dans notre APP.
Cependant, la présente étude, loin d’être finie, ouvre à de
nouvelles réflexions et investigations. Notre recherche-action était
de faible envergure, ne portant que sur un établissement universitaire
et 2 classes de faibles effectifs (34 étudiants chacune). Si l’on
veut réussir sur le plus grand cible, de plusieurs classes en même
temps et/ou avec des conditions matérielles moins favorables
que chez nous, d’autres considérations et enquêtes préliminaires
devront être mises en cause pour peaufiner le projet dans tous
ses aspects didactique, pédagogique, et surtout matériel... Les
compétences en informatique des enseignants joueront alors
un rôle important pour adapter ou même inverter des outils, un/
des logiciel(s) pour leur FS spécifique par exemple. Surtout, il
sera à réfléchir sur comment alléger le travail de l’enseignant et
équilibrer sa vie quotidienne quand ce type d’approche est mis
en place dans une certaine durée, étant donné qu’avec les TIC,
les formateurs risquent d’être sollicités par leurs étudiants ou
collègues partout et à tous les moments, ce qui peut interférer de
façon négative dans leur vie personnelle et familiale.

BIBLIOGRAPHIE
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Communications de dimension spécifique

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ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

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avec distanciation: le cas de la recherche-action de type
stratégique». in Etudes de communication (en ligne) n° 25.
pp. 105-123. Mis en ligne le 27 mars 2009, URL: http://edc.
revues.org/index658.html.

ANNEXES
Annexe 1 - Questionnaires pour enseignants et étudiants
en vietnamien, à s’adresser à l’auteure en cas de besoin
d’informations supplémentaires.
Annexe 2 - Test d’évaluation à la fin de l’expérimentation.
Test final de compréhension écrite
(50 minutes; 10 points)
1/ Regardez ces images et indiquez dans le tableau au-
dessous la lettre correspondante. (2,5 pts).

La Police
La Police technique La Police de La Police aux
Judiciaire scientifique Sécurité Publique Frontières

A B C D

-312-
Communications de dimension spécifique

La Compagnie
Répubicaine de
Sécurité Le RAID

E F G H

1. La PST a pour mission de la lutte contre la petite et moyenne


délinquance: vol simple, escroquerie, abus de confiance
2. La PJ lutte contre la criminalité organisée: le trafic des êtres
humains, le trafic de stupéfiants, le terrorisme, la lutte contre le
blanchiment d’argent, la cyber-criminalité …
3. Elle a pour but de la lutte contre l’immigration irrégulière et
démantèlement de filières; Contrôle de la circulation transfron-
tière…
4. Le CRS a pour mission du maintien de l’ordre, du soutien des
autres forces de sécurité en matière d’escorte, de la surveillance
des frontières…
5. C’est-à-dire Recherche, Assistance, Intervention, Dissuasion
lors d’événements graves nécessitant des moyens techniques
spécifiques dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et le
grand banditisme.

2/ Lisez chaque titre et inscrivez le chiffre qui lui correspond


dans la colonne appropriée .

(1,5 pts: 0,25pt/réponse correcte):

1. Menaces de violences dans les familles française


2. Une tonne de cannabis a été dérobée au Brazil (drogue)
3. Attention à l’usurpation de mot de passe
4. Une femme morte sur la plage
5. Pollution de l’air causée par l’entreprise de fabrication des plastiques
6. Un vol a passé dans la maison du Président de Samsung

crime
contravention délit crime drogue cybercriminalité
environnemental

-313-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

3- a/ Lisez le texte. (3 pts)


Scénarios contre la drogue
Différentes études réalisées au cours des deux dernières
années ont révélé que la consommation de drogues par les
jeunes Français était en augmentation.
Ce problème inquiète et fait réagir.
C’est pour cette raison que l’an dernier, le gouvernement
français a lancé divers projets pour lutter contre la drogue... ou
plutôt les drogues, car toutes les drogues étaient visées: celles
qui ne sont pas interdites par la loi (tabac et alcool) et celles qui
le sont (cannabis, ectasy, ...).
Il y a eu une campagne d’information télévisée sur les différents
types de drogues et sur les dangers qu’elles comportent. Cette
campagne était constituée de quatre courts métrages construits
comme des publicités et accompagnés d’un livre d’information.
De même, il y a eu un concours de scénarios contre la drogue.
Des scénarios écrits par des jeunes ont été adaptés et les vingt-
quatre meilleurs ont été mis en scène. Ils ont été diffusés à la
télévision et au cinéma.
http://platea.pntic.mec.es/cvera/hotpot/lisons/contre_la_drogue.htm

b/ Cochez la bonne réponse. (0,5pt/ réponse correcte)


1. Ce texte vient………
A □ d’une brochure médicale
B □ d’un livre C □ d’une adresse électronique
2. Scénarios contre la drogue………
A □ sont une campagne contre la drogue
B □ sont des conseils contre la drogue
C □ sont des informations contre la drogue

-314-
Communications de dimension spécifique

c/Cochez. Vrai, Faux ou On ne sait pas? (0,25pt/ réponse


correcte )
Vrai Faux On ne sait pas
1. Il y a eu au moins 100 études sur la drogue au
cours des deux dernières années.
2. On consomme de moins en moins de drogues
en France.
3. C’est un problème qui a provoqué une réaction de
la part du gouvernement.
4. Le gouvernement a lancé une vingtaine de projets
là-dessus.
5. Il s’agissait de toutes les drogues - celles qui sont
légales et celles qui sont interdites.
6. On a aussi lancé une compétition de scénarios
contre la drogue.
7. Il a fallu adapter les scénarios avant de les faire
diffuser.
8. Ceux qui ont été diffusés au cinéma ont eu le plus
grand succès.

4- a/ Lisez. (3 pts)
Kidnapping
Manon Chalence, la fille d’un riche industriel, a été enlevée.
Le kidnappeur a fait parvenir une demande de rançon écrite de
la main même de son otage.

Chers parents,
Lisez bien le message qui suit. Mon ravisseur veut
que l’on porte les 5 millions dans une valise. Il viendra
à 6 heures demain.
En aucun cas, il ne veut de tri dans les billets usagés.
Ceux qui voudront se mettre sur son chemin seront
éliminés. La transaction se fera de main à main.

L’inspecteur Lafouine prend connaissance de la lettre et


comprend tout de suite que Marion a utilisé un code.

-315-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Le jour de la remise de la rançon, Lafouine fait arrêter toutes


les personnes suspectes rôdant près de la maison de Manon et
possédant une particularité physique.
- Louis Verron promenait son chien. Assez nerveux, il n’arrête
pas de masser la cicatrice qu’il possède à la main gauche.
- Charly Gaul est un militaire d’une trentaine d’années. Une
vilaine balafre lui barre la joue.
- Pascal Hénin vit dans le quartier. Amputé de la jambe droite,
il se déplace grâce à une prothèse.
Lafouine sait que le kidnappeur est parmi ces hommes.
Christian Souchard
b/ Cochez la bonne réponse. (0,75pt pour la Question 2 et 4;
0,25pt pour le reste)
1. Quel est le délit?
A □ un enlèvement B □ une prise d’otages C □ une
transaction frauduleuse
2. La victime dans cette histoire est………………………
3. Combien de suspects y a-t-il? ………………………...
A□3 B□4 C□5
4. Le code utilisé par la victime dans sa lettre est………
A □ Il Il faut lire un mot sur quatre en ne commençant qu’au
quatrième mot.
B □ Il faut lire un mot sur cinq en ne commençant qu’au
cinquième mot.
C □ Il faut lire un mot sur six en ne commençant qu’au
sixième mot.

-316-
Communications de dimension spécifique

5. Et est-ce qu’on ne tient pas du tout compte des phrases?


A □ vrai B □ faux C □ On ne sait pas
6. Quel est le message obtenu? Ecrivez la version originale et
corrigez-la.
……………………………………………………………………
7. Qui est le coupable?
A □ Charly Gaul B □ Pascal Hénin C □ Louis Verron
8. C’est une enquête par ……….
A □ élimination B □ code C □ expérimentation
Annexe 3 - Tableau des résultats au test final
La
L’écart-
Note obtenue, sur 10 (note)
type
médiane
Effectif
Participants 7,9 - 6,0
10 - 8.0
(Bien- 5,9 - 5,0 4,9 - 0
(Très
Assez (Moyennes) (Faibles)
bien)
Bien)
G1 expérimental 34 7 27 0 0 7.05 .937
G2 de témoin 34 0 12 22 0 5.53 .769

-317-
INTÉGRATION DE KAHOOT, UN OUTIL DE TIC,
DANS L’ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS COMMERCIAL
À L’UNIVERSITÉ DE COMMERCE DU VIETNAM

NGUYEN Thi Thu Hong


Université de Commerce du Vietnam

Résumé:
Cette communication présente une démarche pédagogique intégrant la
plateforme Kahoot, un des moyens des technologies de l’information et de la
communication (TIC) dans l’enseignement des langues notamment des langues
de spécialité selon l’approche actionnelle dans le but de faciliter et vérifier la
«compréhension du français commercial» des étudiants apprenant le français de
spécialité à l’Université de Commerce du Vietnam. Les résultats de l’expérimentation
se révèlent encourageants. En effet, cette dernière a des impacts positifs aussi
bien sur le travail des enseignants que sur l’apprentissage des étudiants, et
par conséquent, sur leur réussite universitaire. Elle témoigne de l’efficacité de
l’utilisation de cette nouvelle technologie dans les approches pédagogiques.
Mots-clés: Langue de spécialité, TIC, intégration des TIC, Kahoot, approche
actionnelle.

1. Problématique
Nous sommes à l’ère technologique où de nombreux sites Web
ont été créés pour l’enseignement et l’apprentissage des langues
étrangères. Ainsi, Collin et Karsenti (2012: 70-71) ont-ils souligné:
«Depuis plusieurs décennies, les TIC exercent une certaine
Communications de dimension spécifique

fascination et suscitent de grandes espérances en éducation,


tout particulièrement pour l’enseignement et l’apprentissage des
langues». En effet, à l’heure actuelle la pédagogie utilise, de plus
en plus des potentialités offertes par les TIC. La raison en est
que l’usage de ces moyens permet aux apprenants d’explorer
et d’exploiter l’information de manière dynamique et variée, de
développer en eux-mêmes la conscience sociale et la confiance
en soi, ce qui facilite également la communication avec des sujets
divers. Assistés par ces outils, les apprenants peuvent utiliser la
technologie de manière régulière et appropriée afin de devenir
autonomes et capables de prendre des initiatives, de bien travailler
en contexte de collaboration, de développer une attitude positive
à l’égard de l’avenir. C’est pour ces raisons que de nombreuses
recherches effectuées au cours de ces dernières années ont pour
but d’explorer les avantages que les TIC apportent à l’enseignement
et l’apprentissage des langues.
De plus, l’utilisation de ces nouvelles technologies rend les
approches pédagogiques plus actives. Elle permet aux étudiants
d’être plus motivés, plus actifs, plus créatifs et aux enseignants
d’évoluer dans leurs pratiques pédagogiques. Cependant, il faut
préciser que l’enjeu des TIC en éducation, comme l’ont souligné
Collin et Karsenti (2012) et Nguyen (2012), n’est plus de les
enseigner, ni de les apprendre, mais il s’agit plutôt de les intégrer
efficacement dans une situation d’enseignement-apprentissage
spécifique, celui du français commercial par exemple.
Dans cette perspective, les TIC peuvent être jugées
pertinentes lorsqu’elles apportent une valeur ajoutée à la situation
d’enseignement-apprentissage.
À côté des outils comme Edmodo, Powerpoint, projecteur,
rétroprojecteur, nous avons également recouru à un site Web
appelé «Kahoot» qui présente des points positifs suivants:

-319-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- C’est une plateforme qui permet une application gratuite


en ligne, une conception très facile des questionnaires interactifs
pour tout type d’apprenant dont les étudiants de l’UCV.
- Les questions à choix multiples (QCM) interactives,
utilisées en classe sur tablette, smartphone ou portable donnent
aux étudiants la possibilité de s’auto-évaluer, tout en situant leur
degré de réussite ainsi que celui de leurs camarades.
- L’accès à un quiz sur Kahoot ne demande pas de création
de compte par les apprenants. Il leur suffira de se rendre sur
l’application et d’entrer un code PIN qui leur sera fourni, à chacun,
par le site au moment de la création du quiz. Il leur suffira de fournir
leur prénom ou le nom de leur équipe pour l’affichage des résultats.
- Cette plateforme permet également d’utiliser des questionnaires
déjà conçus, de créer facilement des questionnaires à choix
multiples, des discussions ou des sondages. Ces QCM sont
créés à l’avance par l’enseignant et mettent les apprenants en
recherche de réponses à un moment donné. Par la suite, des
points sont attribués à chaque élève en fonction de leur réponse
choisie. Par ailleurs, grâce à cette forme de questionnaire, il est
possible d’observer le nombre de bonnes réponses obtenues par
l’ensemble des étudiants de la classe.
Cet outil profite donc à la fois à l’enseignant et aux apprenants.
En effet, l’enseignant peut mettre en place le jeu à partir de
son compte sur getkahoot.com. Il n’y a pas de points qui y sont
accordés. Seul l’enseignant pourra voir les choix de ses étudiants.
L’enseignant a également la possibilité d’accéder à des milliers
de quiz créés par les autres utilisateurs de Kahoot. Il pourra les
utiliser tels quels ou les modifier comme bon lui semble.
Concernant l’apprenant, Kahoot peut lui permettre de créer
des quiz sur ses présentations d’inventions afin de donner une
motivation et un enjeu supplémentaires aux partenaires qui
devaient les lire. Il entre un numéro de classe et son prénom qui

-320-
Communications de dimension spécifique

apparaît sur l’interface-professeur. Il répond au fur et à mesure


à des questions et les résultats sont immédiatement affichés,
ce qui permet une interactivité réelle et d’expliquer au mieux les
erreurs.
Pour les avantages incontournables précités, il est intéressant
d’utiliser ce genre d’application Web, car les enseignants
peuvent à la fois travailler avec des tablettes, des portables, etc.
Il suffit d’établir la connection. On peut aussi former des équipes
s’il manque de matériel. Cela peut même ajouter un intérêt
supplémentaire en faisant réfléchir les étudiants en équipe. De
plus, cela motive les apprenants lorsqu’ils doivent confronter
leurs idées. L’interface des réponses est très épurée et permet
donc une concentration efficace sur le choix des réponses.
D’autre part, Kahoot génère une motivation visible chez les
apprenants, grâce à sa dimension ludique et compétitive (mode
quiz). Pour la compréhension écrite: lors d’une activité menée
avec Kahoot, tous les étudiants sont actifs. Ils doivent être en
mesure de lire et de comprendre les questions et de proposer
des réponses appropriées.
Cette plateforme présente un seul inconvénient: il ne permet
pas à l’audience de voter à la fois pour plusieurs réponses à une
question.
L’usage des TIC dans l’enseignement/apprentissage en
général, celui des langues en particulier est de nos jours
incontournable. Ainsi, en 2008, l’UNESCO, elle-même, est
déterminée à promouvoir l’adoption des TICE1 parmi des solutions
éducatives destinées à faire circuler les connaissances, à rendre
l’apprentissage plus efficace et à développer des services
éducatifs plus performants, ainsi qu’à repenser les processus

1 Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement.

-321-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

d’enseignement et d’apprentissage1 en créant «les compétences


standards des TICE».
Au Vietnam, le ministère de l’Éducation et de la Formation
encourage l’application des technologies de l’information et
de la communication dans les activités pédagogiques à tous
les niveaux de l’enseignement dans le pays afin d’améliorer la
qualité de l’enseignement et de l’apprentissage. Pourtant, nous
constatons qu’il n’y a aucune référence officielle permettant
de guider les enseignants dans la construction d’un scénario
pédagogique aux moyens des TIC et surtout qu’il existe très peu
d’études sur les scénarios pédagogiques intégrant ces nouvelles
technologies. Par ailleurs, il existe encore un certain nombre
d’enseignants qui éprouvent des sentiments d’angoisse à l’idée
de devoir utiliser les TIC comme un outil de travail dans la classe.
Certains mêmes ne voient pas la nécessité de recourir à cet outil
en pensant qu’il ne permet pas une efficacité et une dynamique
d’échanges en situation de classe.
En ce qui nous concerne, nous croyons que l’intégration
des TIC, le cas échéant, l’usage de la plateforme Kahoot, dans
l’enseignement et l’apprentissage du français pour les étudiants
en français des affaires constitue vraiment une préoccupation du
projet de formation de la Faculté de Formation Internationale de
l’Université de Commerce.
En raison des avantages incontournables de ce moyen
numérique pour l’enseignement-apprentissage du français en
général et de celui du commerce en particulier, nous essayons
d’intégrer Kahoot dans l’enseignement et l’apprentissage du français
de commerce dans notre université. Cependant cette intégration
nécessite une expertise. Aussi, l’objectif de notre étude est-il de
voir si les étudiants font des progrès à la suite de l’application d’une
démarche pédagogique intégrant la plateforme Kahoot.

1 Stratégie de l’UNESCO: L’éducation 2014-2021. P. 47

-322-
Communications de dimension spécifique

2. Méthodologie
Notre travail concerne une activité pédagogique concrète qui
se passe en salle de classe. Pour réaliser ce travail, nous décidons
de recourir à la démarche méthodologique de la recherche-action.
Ce choix est guidé par au moins deux raisons. La première est
que les objectifs de la recherche-action sont de transformer la
réalité, d’améliorer une situation. Ainsi, Verpieren (1994:1) a-t-il
souligné: «La véritable recherche-action est celle qui poursuit
conjointement deux objectifs: production de connaissances et
changement de la réalité par l’action. Cet enjeu qui est double
conduit à diminuer autant que faire se peut la place laissée au
hasard, et vise à ce que chaque acteur-chercheur ou praticien
acquière une réelle capacité à anticiper l’avenir».
De plus, la recherche-action est de plus en plus utilisée en
recherche de la didactique des langues pour ses avantages
auprès des enseignants chercheurs. En effet, Catroux a raison
de remarquer que: «La recherche-action représente un champ
grandissant de la recherche éducative dont le but primordial
est la reconnaissance des demandes des enseignants pour
passer de l’étape de la réflexion organisée à la pratique de
classe. La recherche-action est un processus destiné à doter
tous les participants de la scène éducative, qu’il s’agisse des
étudiants, des enseignants ou d’autres intervenants, des moyens
d’améliorer leurs pratiques grâce à leurs expériences éclairées
et nourries des savoirs théoriques en cours. Tous les participants
deviennent acteurs consentants du processus de recherche».
Catroux (2002: 9)
Notre recherche s’est donc déroulée en 4 grandes étapes:
1) Définition de la situation actuelle du problème de recherche
par l’étude des objectifs et du programme de formation de
l’UCV, des méthodes appliquées; des caractéristiques du public
concerné, l’analyse des résultats de la préenquête comprenant

-323-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

deux questionnaires, l’un adressé aux enseignants, l’autre aux


étudiants et un prétest de compréhension, une observation de
classe, etc.
2) Élaboration des scénarios pédagogiques intégrant les TIC;
3) Mise en expérimentation des scénarios pédagogiques
élaborés auprès des étudiants de licence de l’Université de
Commerce ;
4) Évaluation des résultats de l’expérimentation par un
questionnaire auprès des étudiants ayant participé à cette étude.
Ces quatre principales étapes ont fonctionné à la fois linéairement
et en boucle.
Dans le but de montrer comment Kahoot est appliquée
dans l’enseignement du français commercial aux étudiants de
l’Université de Commerce du Vietnam, nous présentons, ci-
dessous, succinctement la troisième étape de notre étude: la
mise en expérimentation.
Cette expérimentation s’est déroulée du mois d’août au
mois de décembre 2018 à la Faculté de Formation Internationale
de l’Université de Commerce. L’échantillon est constitué de 32
étudiants en 3e année (classe 52Q) pour les modules de français
commercial 1 et 2. Ces cours comportent 4 crédits, soit 60 heures
de cours.
Déroulement
1) L’enseignant prépare des QCM liés au contenu de la
leçon précédente pour tester les connaissances et le degré de
compréhension acquis des étudiants.

-324-
Communications de dimension spécifique

2) Avec un smartphone, un ipad ou un portable connecté,


les étudiants se mettent en groupes pour préparer les réponses.

3) Les groupes proposent des réponses en se basant sur


les connaissances acquises grâce aux contenus du texte qu’ils
viennent d’apprendre.

-325-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

4) Les réponses des groupes sont notées suivant le degré


vrai/faux et le laps de temps avec lequel ils donnent la réponse.

5) Une fois que le quiz est terminé, l’enseignant regarde le


tableau récapitulatif vrai/faux des groupes pour mieux comprendre
le degré de compréhension du texte des étudiants. Grâce à ces
résultats, l’enseignant peut savoir quels contenus les étudiants
ont bien saisis et ceux qu’ils ont du mal à comprendre.

-326-
Communications de dimension spécifique

3. Résultats
Après l’expérimentation, nous avons réalisé une post-enquête
comprenant deux questionnaires, l’un adressé aux enseignants,
l’autre aux étudiants et un post-test de compréhension. L’analyse
des données recueillies dans l’enquête réalisée auprès des
étudiants travaillant avec Kahoot fait ressortir que l’application
de cette plateforme dans l’apprentissage du français commercial
présente des avantages certains:
- Le scénario élaboré intégrant Kahoot rend les approches
pédagogiques plus actives, plus efficaces, permettant aux
étudiants d’être plus motivés, plus actifs et plus créatifs. Ainsi,
plus de 90% d’entre eux déclarent avoir plus de plaisir à suivre
les cours avec cette nouvelle technologie. Il permet aussi à
l’enseignant d’évoluer dans ses pratiques pédagogiques.
- 60% des étudiants affirment que cette plateforme est très
efficace, 37% d’entre eux efficace, seul 3% peu efficace. En
outre, la grande majorité des étudiants enquêtés estiment que la
plateforme Kahoot est très facile à utiliser et elle est donc facile
à être intégrée dans leur apprentissage du français commercial.
- Les résultats de travail des groupes (concernant les
quizzes, les QCM), de ceux des tests réalisés par le groupe
expérimental et le groupe de contrôle ainsi que ceux obtenus
grâce aux questionnaires indiquent que les étudiants du groupe
expérimental mémorisent mieux les connaissances et qu’ils ont
obtenu de meilleures notes que ceux du groupe de contrôle.
Conclusion
Les cours de français commercial assistés par Kahoot
présentent des résultats indiscutables. En effet, avec cet outil
numérique, les contacts entre professeurs-étudiants augmentent, le
taux de participation des étudiants est plus élevé. En conséquence,
les avantages de ce moyen technologique nous ont conduits à

-327-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

l’utiliser pour l’élaboration d’une approche pédagogique dans le


but d’améliorer la compétence de la compréhension des textes
commerciaux chez les étudiants de l’UCV. Car, notre travail
pédagogique consiste à faire de telle sorte que les activités soient
similaires à des tâches et que les apprenants soient des acteurs
réalisant ces tâches dans la vie sociale comme le préconise la
perspective actionnelle.
Pourtant, dans ce domaine, d’autres recherches sont
nécessaires afin de valider le rôle de la plateforme Kahout
mais aussi de vérifier les résultats des cours dispensés selon
des modalités traditionnelles. Ceci nous permettra d’améliorer
les performances des étudiants et des méthodologies
d’enseignement utilisant le numérique.

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4. Catroux, M. (2002). Introduction à la recherche-action: Modalités
d’une démarche théorique centrée sur la pratique. Recherche

-328-
Communications de dimension spécifique

et pratiques pédagogiques en langues de spécialité - Cahiers


de l APLIUT, Vol. XXI N° 3, 2002, pp. 8-20.
5. Collin, S. et Karsenti, T. (2012). «Les TIC en éducation: ni
panacée, ni supercherie.» Québec Français, 166, 70-71.
6. Depover, C., Karsenti, T. et Komis, V. (2007). Enseigner avec
les technologies: favoriser les apprentissages, développer
des compétences. Québec: Presses de l’Université du
Québec.
7. Nguyen Quang Thuan. (2012).Apport des TIC à l’enseignement
et à l’apprentissage des langues à l’Ecole supérieure des
Langues étrangères - Université nationale de Hanoi. Actes
du Colloque international sur les TIC en éducation: bilan,
enjeux actuels et perspectives futures. Montréal, Canada.
8. Pluies, J.-L. (2004). Jeu, TIC et apprentissage. Mémoire de
DEA, Université de Paris 3 - Sorbonne nouvelle.
9. Verpieren (1994). Science, formation et recherche-action
de type stratégique. Actes de lecture n°45 (mars 1994),
Association française pour la lecture.

Documents consultés
1. Kahoot: Le questionnaire interactif
https://getkahoot.com/
Par Jeremy Van Ranst, le 30 janvier 2019
Partager Facebook Twitter Share
2. Utiliser Kahoot pour créer des jeux-questionnaires
interactifs
http://www.espe-lnf.fr/IMG/pdf/kahoot.pdf
Par Jeremy Van Ranst, le 11 janvier 2017

-329-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Référence électronique
1. Barbaran, M. (2011). «Intégrer les TICE à une approche
cognitive de la grammaire du discours». ALSIC, vol 14,
Consulté en janvier 2018. http://.www.alsic.org/
2. Hélène Knoerr, «TIC et motivation en apprentissage/enseignement
des langues. Une perspective canadienne», Cahiers de
l’APLIUT [En ligne], Vol. XXIV N° 2 | 2005, mis en ligne le
28 août 2012, consulté le 25 août 2019. URL: http://journals.
openedition.org/apliut/2889;DOI: 10.4000/apliut.2889
3. Mangenot, F. (1998). «Classification des apports d’Internet
et apprentissage des langues». ALSIC, vol. no 2. pp. 133-146.
Consulté en janvier 2018. http://www.alsic.org/

-330-
PROJET DE RECHERCHE EN COURS
RESSOURCES WEBMATIQUES SUR LE TOURISME:
ANALYSES ET EXPLOITATION PÉDAGOGIQUE
POUR LES CLASSES DE FLE DE LA FILIÈRE DE TOURISME

VIEN The Khanh Toan


Filière de tourisme , Département de français
Université de Pédagogie de Ho Chi Minh - ville

Résumé:
Aujourd’hui, grâce à la facilité d’accès à Internet, les documents touristiques
deviennent plus accessibles aux gens qui n’auront qu’à rester sur place et consulter
les sites web créés par les agences de voyages. Grâce à des moteurs de recherche
puissants tels que Google, Bing, …, l’accès aux ressources documentaires en
ligne devient de plus en plus facile. On peut facilement les trouver en vue de
les exploiter, grâce à un outil technologique connecté. Ces ressources sont très
intéressantes pour l’enseignement du tourisme. Néanmoins, le problème majeur
réside toujours dans l’analyse et l’utilisation des documents récoltés. Ces derniers,
bien qu’abondants, sont-ils exploités de manière adéquate? Comment les utiliser
en vue d’en tirer le plus d’avantages possible. Partant de cette interrogation sur
l’efficacité de l’exploitation des ressources webmatiques, nous tenons à réaliser
une recherche visant à mieux appréhender la situation et à trouver par la suite
des solutions pour apporter des améliorations à notre travail d’enseignement du
français dans une filière de formation professionnelle en tourisme. Il y a un grand
besoin d’analyser des sites touristiques pour ensuite déterminer les possibilités
d’exploitations pédagogiques possibles pour les compétences réceptives et
productives.
Mots-clés: sites, analyse, exploitation
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

1. Contexte et problématique
Les nouvelles technologies de l’information et de la communication
(nTIC) surtout, qui apparaissent au fur et à mesure, apportent au
tourisme un nouveau souffle et génèrent de nouvelles tendances
parmi lesquelles l’e-Tourisme a actuellement la cote. En effet,
de nos jours, voyager n’a jamais été aussi facile. Certaines
opérations telles que la recherche d’information, l’achat, la vente,
la réservation… qui étaient jadis effectuées auprès des agences
de voyages se font désormais en ligne. Le web est devenu un des
outils souvent utilisés pour présenter des sites et des destinations
touristiques, grâce à sa pratique et sa disponibilité en permanence.
Les avantages que présentent les nouvelles technologies et
Internet profitent aussi bien aux voyagistes qu’aux voyageurs. En
réalité, les compagnies touristiques, de leur côté, usent de tous
les moyens possibles pour faire parvenir leurs informations
aux touristes, d’où l’explosion des sites web liés à ce secteur.
Avant l’arrivée de l’e-Tourisme, la promotion touristique se faisait
sur différents canaux (chaînes télévisées, radio, téléphone,
journaux et magazines, etc.). Aujourd’hui, grâce à la facilité
d’accès à Internet, ces offres touristiques deviennent de plus en
plus accessibles aux gens.
Les internautes, quant à eux, prennent l’habitude de rester
sur place et consulter les sites créés par les agences de voyages.
Ils ont également tendance à créer leurs blogs personnels pour
raconter les expériences accumulées lors de leurs voyages
ou pour participer aux forums de voyages, afin d’obtenir des
informations et partager leurs opinions. Toutes ces pratiques
provoquent une forte augmentation du nombre de sites web de
présentation touristique, de blogs et forums de voyages, … offrant
d’importantes ressources documentaires.
Aujourd’hui, le marché touristique florissant suscite aussi un
grand besoin de ressources humaines qui devraient maîtriser à la

-332-
Communications de dimension spécifique

fois les compétences professionnelles et technologiques. Dans la


perspective du secteur émergent qu’est le tourisme, les formations
en tourisme sont mises en place dans différents établissements.
Elles sont dans l’obligation d’évoluer et d’améliorer leur qualité
afin de répondre à ces nouvelles exigences. Des ajustements et
des modifications sont alors effectués au niveau des contenus,
mais aussi au niveau du programme en général. Du côté des
enseignants des filières de tourisme, ils doivent régulièrement
réaliser des recherches en ligne pour trouver de nouvelles
sources d’information et compléter les manuels existants, afin de
mieux adapter leur enseignement au nouveau contexte. De ce
fait, grâce à des moteurs de recherche, l’accès aux ressources
documentaires (texte ou média) en ligne devient de plus en plus
facile. Ils peuvent les trouver et les utiliser en toute facilité, au
moyen d’un outil technologique connecté.
Disponibles en permanence, abondants et riches en
activités proposées, les contenus webmatiques peuvent en
effet constituer d’excellentes ressources pour l’enseignement-
apprentissage de langues. Ils peuvent s’utiliser comme des
matières brutes pour l’entraînement aux compétences de
communication. Cependant, leur usage doit s’appuyer sur les
pratiques sociales de références. Cette dernière notion a été
abordée en didactique par MARTINAND puis développée par
DEVELAY. Elle est définie comme « une activité sociale pouvant
servir de référence à des activités scolaires» 1. La difficulté
sera donc de mettre en œuvre les activités qui répondent
aux objectifs linguistiques et communicatifs visés et qui soient
en adéquation avec les pratiques sociales de référence. De
plus, les ressources sur Internet sont aussi des éléments
indispensables de nos jours pour la pratique de la perspective
actionnelle, courant didactique très en vogue dans le monde

1 REUTER Y (2013)

-333-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

de l’enseignement des langues. Avec la pédagogie de projet,


ces ressources trouvent encore leur utilité, car elles fournissent
des matières premières et des situations de communication
authentiques pour la pratique langagière de nos apprenants.
Néanmoins, le problème majeur réside toujours dans
l’analyse et l’utilisation des documents récoltés. Ces derniers,
bien qu’abondants, sont-ils exploités de manière adéquate?
Comment les utiliser en vue d’en tirer le plus d’avantages possible?
Car il est évident que plus le flux d’information est grand, plus
le tri est compliqué et difficile. Partant de cette interrogation sur
l’efficacité de l’exploitation des ressources webmatiques, nous
tenons à réaliser une recherche visant à mieux appréhender la
situation, et à trouver par la suite des solutions pour apporter
des améliorations à notre travail d’enseignement de français
dans une filière de formation professionnelle en tourisme. Il y
a donc un grand besoin d’analyser des sites de présentation
touristique, des blogs et forums de voyages (contenu, discours
de présentation) pour ensuite déterminer les exploitations
pédagogiques possibles pour les compétences réceptives et
productives. Multiples sont les interrogations concernant les sites
web de présentation touristique, les blogs et forums de voyages.
Comment ces pages d’Internet peuvent-elles constituer des
supports pour l’enseignement des langues, e t celui du français
en particulier? Qu’en ferons-nous? Comment les exploiter
pour répondre à nos objectifs d’enseignement? Comment les
transformer en supports pédagogiques utiles et efficaces?
À partir de ces questions de départ, avec les constats faits
auprès des différentes sources, de nos besoins et du contexte
dans lequel nous sommes actuellement, nous nous posons les
questions de recherche suivantes:
- Quelles sont les caractéristiques des contenus publiés sur les
sites web de présentation touristique, les blogs et forums de voyages?

-334-
Communications de dimension spécifique

- Quelles sont les exploitations didactiques envisageables


pour ces ressources webmatiques?

2. Hypothèses de recherche
Partant des questions de recherche, nous pouvons émettre
nos hypothèses.
- Les ressources webmatiques constituent d’indéniables
sources de supports pédagogiques pour notre enseignement.
Elles conviennent à des usages didactiques, mais nécessitent un
travail d’analyse pour une exploitation adéquate à des situations
d’enseignement-apprentissage.
- Par ailleurs, ces documents webmatiques (textes et médias)
revêtent des caractéristiques propres aux niveaux linguistique et
discursif, très intéressantes à analyser pour des exploitations au
service de l’enseignement des compétences linguistiques à la
fois réceptives et productives.
- Enfin, les sites ainsi que les applications sur le web peuvent
également inspirer les enseignants pour donner lieu à des
projets pédagogiques qui sont basés sur les pratiques sociales
de référence et qui sont liés à l’enseignement du français aux
étudiants de tourisme.

3. Méthodologie
Notre travail devra s’appuyer d’abord sur un cadre théorique
solide, construit de concepts clés, à la fois du domaine de la
linguistique, du domaine du numérique et du domaine de la
didactique.
- Sur le plan linguistique, nous nous intéresserons à la
connotation qui relève de la lexico-sémantique;aux types de
phrases et de propositions, aux temps verbaux, aux voix verbales,
etc. de la syntaxe;à l’emploi des pronoms, à l’énonciation, aux
modes de reprise, etc. de l’analyse de discours. Nous étudierons

-335-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

inévitablement le discours et les types de discours ainsi que les


particularités du discours de spécialité. Nous ne pourrons donc
nous passer des auteurs tels que ADAM, MAINGUENEAU…
- Sur le plan numérique, nous mettrons l’accent sur les
caractéristiques du discours numérique abordées notamment
dans les travaux de PAVEAU.
- Sur le plan didactique, nous nous pencherons sur les concepts
du FLE, du FOS, sur les techniques d’écriture, l’enseignement
des compétences écrites, ... à travers les didacticiens comme
CARRAS, MOURLHON-DALLIES, MANGIANTE & PARPETTE…
Ce détour sera aussi indispensable pour l’élaboration des activités
pédagogiques.
Nous allons par la suite analyser des documents supports qui
comprendront bien évidemment des présentations touristiques
élaborées par les agences, des articles de blogs de voyages et de
forums de voyages, des commentaires laissés par les internautes
sur les blogs et forums de voyages. Ce travail servira également
à élaborer notre base de données, celle-ci nous fournira des
pistes d’exploitation pédagogique à partir desquelles nous
pourrons proposer différents types d’activités profitant à notre
enseignement de la compréhension écrite et de la production
écrite. Car les contenus webmatiques dans le domaine du
tourisme peuvent répondre à des objectifs très divers, ce qui
nous ouvrira donc des perspectives d’adaptation en fonction
de notre enseignement. Et pour cela, nous effectuerons
aussi une étude de terrain pour laquelle nous organisons,
dans le cadre de la Filière de Tourisme du Département de
Français de l’Université de Pédagogie de Ho Chi Minh - Ville, des
séances d’expérimentation afin de nous assurer de l’applicabilité
ainsi que l’efficacité des actions pédagogiques proposées dans
l’enseignement des compétences de compréhension écrite et de
production écrite.

-336-
Communications de dimension spécifique

4. Propositions d’action
Nous pourrons, en nous basant sur les ressources en ligne,
élaborer des activités en classe et en dehors de la classe,
dans l’objectif d’enrichir les ressources didactiques/supports
afin d’améliorer l’efficacité de l’enseignement. De plus, nous
pourrons également, en nous appuyant sur les pratiques
sociales de références avec Internet, construire des activités ou
des projets auxquels nous inviterons les étudiants à participer.
Cela peut aider à créer la motivation dans l’enseignement/
apprentissage du FLE.
D’une manière générale, nous voudrions chercher à exploiter
les ressources documentaires destinées à la présentation
des sites et des destinations touristiques sur le web comme
support que nous pouvons utiliser à des fins pédagogiques.
Pour les objectifs plus spécifiques, nous voudrions, à travers
les analyses faites au cours de ce travail, déterminer les
caractéristiques structurales, lexico-syntaxiques, discursives du
contenu des présentations proposées sur les sites web afin de
les exploiter comme documents d’appui pour l’enseignement
des compétences linguistiques concernant la compréhension
écrite et la production écrite.

BIBLIOGRAPHIE (POUR LA RECHERCHE)


1. ADAM J.-M.,1990, Éléments de linguistique textuelle, Madraga,
Bruxelles, 265 pages.
2. ADAM J.-M., 1992, Le texte: types et prototypes - récit,
description, argumentation, explication et dialogue, Nathan-
Université, France, 223 pages.
3. BAKHTINE M., 1981, Le discours dans la vie et la discours
dans la poésie, La structure de l’énoncé, Todorov, p. 90.

-337-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

4. BENVENISTE E., 1966, Problèmes de linguistique générale,


Gallimard, Paris, 242 pages.
5. CARRAS C, TOLAS J. SZYLAGYI E. et KOHLER P., 2007, Le
français sur objectifs spécifiques et la classe de langue, CLE
International, Paris, 210 pages.
6. CUQ J.-P. (dir), 2003, Dictionnaire de didactique du français,
CLE International, Paris, 303 pages.
7. DUBOIS J. et al., 1994, éd. 2001, Dictionnaire de linguistique,
Larousse-Bordas, Paris, 514 pages.
8. MANGIANTE J.-M. et PARPETTE C., 2004, Le français sur
objectifs spécifiques: de l’analyse des besoins à l’élaboration
d’un cours, Hachette, Paris, 160 pages
9. KERBRAT-ORECCHIONI, 2004, La communication touristique,
l’Harmattan, Paris, p.p. 134-135
10. LOUVEAU E. & MANGENOT F., 2006, Internet et la classe
de langue, coll. Technique class, CLE International, Paris,
160 pages.
11. MAINGUENEAU D., 1998, Analyser les textes de
communication, Dunod, Paris, pp. 38- 68.
12. MANGENOT F., «Classification des apports d’Internet à
l’apprentissage des langues», Alsic, Vol. 1, n° 2 | 1998, URL:
http://alsic.revues.org/1515
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critères? Quels obstacles?», in Ela. Études de linguistique
appliquée 2010/4 (n°160), p. 433-443.
14. MOIRAND S., 1979, Situation d’écrit. Compréhension, production
en langue étrangère, CLE International, Paris, 175 pages.
15. MOIRAND S., 1990, Enseigner à communiquer en langue
étrangère, Hachette FLE, Paris, 188 pages.

-338-
Communications de dimension spécifique

16. MOURLHON-DALLIES F., 2008, Enseigner une langue à


des fins professionnelles. Collection dirigée par J-C. Beacco
et al., Édition Didier, Paris, 351 pages.
17. MOURLHON-DALLIES F. (dir.), 2004, «Les discours de
l’internet: quels enjeux pour la recherche?» in Les Carnets
du Cediscor, URL: http://cediscor.revues.org/226
18. NISSEN E., POYET F., SOUBRIÉ T. (dir.), 2008, Interagir et
apprendre en ligne, Ellug, Grenoble, 281 pages.
26. OLLIVIER C. & PUREN L., 2011, Le web 2.0 en classe de
langue: Une réflexion théorique et des activités pratiques
pour faire le point, Éditions Maisons des Langues, Paris, 220
pages.
27. PAVEAU M-A., 2017, L’analyse du discours numérique.
Dictionnaire des formes et des pratiques, Hermann, coll.
«Cultures numériques», Paris, 396 pages.
28. PEYTARD J. & MOIRAND S., 1992, Discours et enseignement
du français, Hachette FLE, Paris, 223 pages.
29. PUREN C., 2006, De l’approche communicative à la
perspective actionnelle in Le Français dans le monde n° 347,
sept.-oct., pp. 37-40.
30. REUTERY. et al., 2013, Dictionnaire des concepts fondamentaux
des didactiques, De Boeck Supérieur, Bruxelles.
31. SARFATI G.-E., 1997, Éléments d’analyse du discours, Nathan,
Paris, p. 79.
32. WEINRICH H., 1989, Grammaire textuelle du français, Didier/
Hatier, Paris, 672 pages.

-339-
2. Pour des enseignements/apprentissages
du/en français plus efficaces en Asie-Pacifique
COMMENT AMÉLIORER L’APPRENTISSAGE DES ÉTUDIANTS
AVEC LA PÉDAGOGIE DE PROJET DANS LES COURS
FOS-TOURISME

NGUYEN Canh Linh


Département de Français
Université de Langues et d’Études Internationales -
Université Nationale du Vietnam à Hanoi

Résumé:
Actuellement, l’enseignement/apprentissage du français au Vietnam doit
faire face aux grands obstacles: diminution du nombre des étudiants, baisse de
motivations, manque de débouchés et incapacité des formés de répondre aux
besoins du marché du travail. Tout cela oblige les formateurs à réagir et ce, pour la
survie même de leur carrière enseignante.
A cela s’ajoutent les nouvelles exigences du marché du travail. Les recruteurs
recherchent des candidats possédant suffisamment de savoirs linguistiques et
ceux de leur spécialité, des savoir-faire et savoir-être. Tout cela exige l’innovation
de l’enseignement au sein des universités. L’université de Langues et d’Études
Internationales (ULEI) dont fait partie le Département de Français préconise de
nouvelles pratiques et la pédagogie de projet nous semble un outil efficace car
permettant de relier ce qui est appris aux expériences vécues en dehors de la classe,
et de là procurer plus de motivations à l’enseignement/ apprentissage du français.
Dans cet article, nous relatons un projet qui a été réalisé dans les classes de
français du tourisme, et qui a rapporté des premiers résultats encourageants.
Mots-clés: compétences transversales, projet, tourisme, pédagogie de
projet.
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Introduction
Depuis quelques temps, au Vietnam, on assiste à des
bouleversements importants dans l’enseignement/apprentissage
du français: diminution des effectifs, baisse de motivations,
manque de débouchés après l’université... Par ailleurs, dans nos
filières de tourisme, il faut aussi réfléchir à comment faire pour
permettre à nos étudiants de mieux répondre aux exigences de
plus en plus grandes du marché du travail.
Or, nos étudiants de tourisme sont encore passifs, se montrant
souvent fatigués et peu collaboratifs en classe. Ils manquent de
compétences transversales: comment exploiter les informations,
résoudre des problèmes, mobiliser l’esprit critique, penser de
manière créative, utiliser des technologies de l’information et de
la communication, organiser, communiquer de façon appropriée
et à travers tout cela contribuer au progrès du collectif.
De plus, ils ont encore beaucoup de difficultés pour s’exprimer
et se faire clairement comprendre en français. Cela fait que les
enseignants n’ont plus beaucoup de temps pour travailler les
connaissances et compétences professionnelles nécessaires à
l’exercice du métier après la sortie.
Nous nous trouvons ainsi devant un double défi: comment
transmettre efficacement à nos étudiants de tourisme des
connaissances linguistiques et de spécialité, puis, plus important
encore, que faire pour les équiper des compétences transversales,
lesquelles leur donneront plus d’indépendance, de liberté
d’action et de responsabilité. Cette situation nous amène à des
questions d’ordre pédagogique suivantes: Dans quelle mesure
la pédagogie de projet pourrait-elle améliorer les compétences
transversales chez nos étudiants de tourisme? Comment la
mettre en place dans nos cours actuels?
Pour trouver des éléments de réponse, nous avons monté
dans notre classe de tourisme de 3e année au Département

-342-
Communications de dimension spécifique

de français une expérimentation de la pédagogie du projet.


Nous présenterons ci-dessous la démarche des travaux et les
quelques résultats obtenus et de là, discuterons l’efficacité de
cette pédagogie de projet dans nos cours de français «L’hôtellerie
et la restauration».
Le “projet” et la pédagogie de projet
De nos jours, la notion de «projet» est famillière en éducation
et recouvre des réalités bien distinctes: projets d’établissement,
projets d’action éducative, projets personnels des élèves, projets
de recherche des enseignants ou étudiants, etc. Dans la vie
quotidienne, nous sommes aussi envahis par les projets: projets
d’avenir, projets professionnels ou appels à projets pour quelque
travail, dans les laboratoires de recherche par exemple...
Les projets dans l’enseignement sont d’abord apparu aux
États-Unis au début du XXè siècle avec John Dewey et William
H. Kilpatrick. Ces auteurs les définissent comme «des activités
intentionnelles dans lesquelles l’apprenant s’implique sans
réserve». En France, la mise en place des projets en éducation
s’est généralisée petit à petit, dans les années 1970, avec des
projets d’action culturelle et éducative (PACTE) puis à partir
de 1981 avec des projets de zone (notamment d’éducation
prioritaire) et des projets d’action éducative au lycée et collège
d’abord, puis au primaire.
Ainsi, quel qu’en soit l’intitulé, les projets font presque
toujours penser à un certain engagement du sujet vis-à-vis d’un
objectif, la planification nécessaire des actions pour arriver à cet
objectif, et l’aspect matériel de la réalisation du projet.
Pour Boutinet dans son oeuvre «Anthropologie du projet»
(1992) en éducation, il y a quatre types de projets qui ne doivent
pas être confondus:
• Le projet éducatif, qui se réfère au mode d’intégration des
jeunes dans le monde des adultes et qui a pour rôle de

-343-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

les rendre autonomes. Ce type de projet dépasse le cadre


strict de l’école.
• Le projet d’établissement, qui vise à accompagner
l’autonomie grandissante des établissements scolaires
par une mise en cohérence de leurs activités.
• Le projet de formation, qui se situe davantage au niveau
de la formation des adultes.
• Le projet pédagogique, qui intervient dans la relation entre
les enseignants et les élèves, dans le cadre scolaire. C’est
celui auquel nous nous intéresserons ici.
Dans cette classification, ce qui nous intéresse c’est le
projet pédagogique, car il est considéré comme une source de
motivations pour les apprenants. L’aspect concret des projets est
la raison première, car il relie ce qui est appris en classe aux
expériences vécues au dehors et de là, l’étudiant apprendra plus
vite et plus sûrement, puisque la théorie cognitiviste précise que,
lorsque nous apprenons, nous retenons implicitement le contexte
d’apprentissage: certains éléments de notre environnement
peuvent alors servir de déclencheurs pour nous permettre de
retrouver nos connaissances, ce qui semble plus facile dans
le contexte d’un projet. Quant à la pédagogie de projet, elle est
définie comme
une forme de pédagogie dans laquelle l’enfant est associé de manière
contractuelle à l’élaboration de ses savoirs. Son moyen d’action est le
programme d’activités fondé sur les besoins et les intérêts des enfants,les
ressources de l’environnement et débouchant sur une réalisation concrète.

(Ministère de l’Éducation Nationale de France, Directions des Écoles, 1992, p.91)

De la sorte, la pédagogie de projet mettra l’apprenant


devant des situations-problèmes, ce qui l’obligera à agir, c’est-
à-dire résoudre, en collaboration avec les pairs et avec l’aide de
l’enseignant, les problèmes qui lui sont posés et ainsi, il pourra
construire son savoir et le sens de l’apprentissage à travers

-344-
Communications de dimension spécifique

l’action-même. Elle lui permettra également de développer des


compétences transversales, de les transférer dans une autre
discipline, de développer des savoir-être tels que coopération,
confiance en soi, responsabilité, l’autonomie, créativité.
Une fois qu’un projet est bien mis en place, on peut aussi
développer des savoirs communicatifs, accroître la motivation
grâce à la perspective du produit fini. Les apprenants deviennent
autonomes, et vrais acteurs et auteurs de leur projet. En
s’engageant dans un projet, les apprenants portent eux-mêmes
la responsabilité de la planification et de la réalisation de leur
projet; ils deviennent ainsi des acteurs réels au sein de leur projet.
Ils acquièrent des savoirs - concepts, notions, connaissances
théoriques - et les savoir-faire nécessaires à la réalisation du
projet, compétences qu’ils pourront ré-utiliser pour d’autres
situations à problème, qu’elles soient scolaires ou quotidiennes.
Lautonomie et l’esprit de responsabilité se formeront aussi au
niveau des échéances temporelles - d’achever tôt, à temps ou
tard le produit -, puisque les apprenants se sont engagés dans
cette tâche.
Equipée de ces brèves théories, nous avons monté un projet
pédagogique dans le cadre de notre enseignement du français
de l’hôtellerie et restaurations au Département de français, que
nous allons relater ci-dessous.
Le projet expérimenté au Département de Français
Le projet que nous avons mené au Département de français
de l’ULEI s’intitulait «Présentation d’un hôtel ou d’un restaurant à
Hanoï» et était destiné aux étudiants de 3e année, filière Tourisme.
Il a été réalisé pendant cinq semaines du premier semestre, de la
quatrième semaine à la neuvième semaine en 2019, dans le cadre
du cours de 45 séances de français de l’hôtellerie-restauration.
L’objectif principal est de permettre une ouverture sur le monde
de l’hôtellerie et de la restauration dans la ville de Hanoï.

-345-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Voici la planification du projet:


Semaine 1: Formation des groupes de 4 étudiants chacun.
- Présentation des objectifs du projet et les exigences de
produit final: un exposé devant la classe, un dépliant et une clip-
vidéo pour présentter l’établissement.
- Présentation des modalités de travail et des critères
d’évaluation des produits finaux.
Semaine 2:
Sortie dans un hôtel sur Hanoi pour toute la classe pour
découvrir comment est organisé un hôtel/restaurant, son
fonctionnement, ses exigences et ses problèmes, les différents
métiers qui se font dedans...
Semaine 3:
Travail au sein de chaque groupe: programmation générale
et répartition des tâches, contacts des hôtels ou restaurants pour
autorisation de filmage et interviews, résolution des problèmes
éventuels.
Semaine 4:
Réalisation de la visite d’un hôtel/restaurant pour faire la clip-
vidéo, interviews et des photos de l’établissement et préparation de
l’exposé oral sur Power Point avec les suggestions et corrections
de l’enseignant et accomplissement du dépliant.
Semaine 5:
Présentation des produits devant la classe et réactions aux
questions de l’enseignant et de leurs amis. L’enseignant a été le
dernier à évaluer les produits finaux des groupes, à savoir l’exposé
du groupe, la vidéo et le dépliant touristique, en se basant sur les
notes données par chaque étudiant. La grille d’évaluation mise
en Annexe a été distribuée à chaque membre de la classe. La

-346-
Communications de dimension spécifique

qualité des produits, le sérieux du travail de groupe, le respect


des contraintes, temporelles ou autres ont été également évalués
et par une note.
Résultats obtenus et discussions
Ce projet a obtenu des résultats encourageants. Au total, 5
exposés sur 5 hôtels et restaurants sur Hanoï ont été présentés.
Les exposés ont été évalués de 8 à 9.5 points en fonction des
critères d’évaluation. Il est impressionnant que le meilleur groupe
ait présenté leur exposé en se déguisant en employés de l’hôtel
avec son uniforme.
À la dernière séance, l’enseignant a demandé aux étudiants
d’écrire leurs impressions sur le projet et la majorité des étudiants
ont bien apprécié ce projet. Selon eux, la visite de l’hôtel leur
a permis de souvrir réellement sur le monde du travail, celui
de l’hôtellerie en particulier. Les étudiants ont pu observer de
leurs propres yeux l’organisation de l’hôtel de haute gramme
«Intercontinnental Hôtel», ses décorations, ses ressources
humaines, ses différents départements, ses différents types de
chambre... Tout cela les a rendus enthousiastes et motivés et
ils pourront envisager plus facilement le travail qu’ils aimeront
faire dans ce domaine. Cette visite les a aidés aussi à mieux
comprendre les différents postes de travail: réceptionniste,
concierge, gardien, voiturier, chasseur, groom, maître d’hôtel,
plongeur, chef de réception, serveur…, les exigences de ces
métiers et les qualifications nécessaires pour postuler à cet
emploi dans le futur.
Le fait que chaque groupe a dû accomplir toutes les tâches
exigées: filmer, monter un vidéo-clip, présenter un exposé sur
Power Point, concevoir un dépliant touristique, a permis aux
étudiants de développer des compétences transversales comme
exploiter des informations, contribuer au travail en équipe,
exprimer en langue française devant la classe, exploiter les

-347-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

outils d’information et de communication, développant ainsi le


sens de l’organisation, le sens de communication, le sens de
responsabilité.
Certes, la mise en place de ce projet a été bénéfique tant
pour les étudiants que pour l’enseignant mais il reste encore des
défis à relever.
Tout d’abord, le nombre des hôtels et restaurants où l’on parle
le français est très limité, donc l’enseignant et les étudiants sont
obligés de visiter des établissements où sont utilisés l’anglais, le
coréen, le japonais, le chinois… donc l’opportunité d’améliorer le
français est minime.
Ensuite, de septembre à novembre, c’est la haute saison du
tourisme, la plupart des hôtels et restaurants sont trop occupés
pour accueillir les étudiants et leur personnel n’est pas disponible
pour la formation professionnelle des étudiants. Il nous est arrivé
parfois d’annuler la visite des chambres dans le programme car
l’hôtel est plein.
De plus, dans le cadre des groupes de 4 et la contrainte
de temps de 15 minutes, les étudiants n’ont pas beaucoup
d’occasion de s’exprimer en français (4 minutes pour chacun).
Ainsi, la capacité de pratiquer le français reste encore limitée.
Enfin, l’organisation de la visite collective de l’hôtel est une
tâche difficile pour l’enseignant, faute d’aides financières et
administratives pour assurer la sécurité des étudiants.
Face à ces obstacles, c’est à l’enseignant d’organiser le
programme, d’arranger le temps et de discuter avec les étudiants
pour la bonne mise du projet, car la visite du terrain va aider les
étudiants à évaluer partiellement les potentiels et les défis du secteur
de l’hôtellerie. Ainsi, ils pourront mieux comprendre les difficultés
auxquelles les hôtels sont confrontés et trouveront le chemin à
suivre pour mieux s’autoformer et pour se préparer à ces métiers.

-348-
Communications de dimension spécifique

Conclusion
La pédagogie de projet est de nos jours une méthodologie
pertinente pour stimuler l’apprentissage des étudiants, les rendre
autonomes et construire une bonne ambiance de travail en
classe. Elle s’avère un moyen capable de créer une meilleure
motivation et plus de confiance en soi dans l’appropriation du
français chez les étudiants du Département. L’expérimentation
menée a été bien saluée par les étudiants et a rapporté de bons
résultats dans notre cours de FOS-tourisme.
Certes, il nous reste encore à peaufiner nos méthodes de
travail en matière de pédagogie de projet mais cette expériences
nous a donné l’assurance que l’enseignement/apprentissage du
français dans notre Département gagnera en qualité si nous ne
reculons pas devant les difficultés pour innover nos pratiques.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Bordallo, I et Ginestet, J-P. (1993). Pour une pédagogie du
projet, Paris, ESF éditeur.
2. G.Malglaive, (1975). La formation des formateurs, in Revue
Française Pédagogie n°30. INRP.
3. J.-P.Boutinet (1992). Anthropologie du projet, PUF, Paris.
4. Michel, Huber. (1999). .Apprendre en projets: la pédagogie
du projet-élèves. Chronique sociale.
5. Michel, Hubert. (2005) Conduire un projet-élèves, Hachette
Éducation, Profession enseignant.
6. Philippe Perrenoud. (2002). Apprendre à l’école à travers
des projets: pourquoi? comment?», Université de Genève.

-349-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

ANNEXE
a. Grille d’évaluation pour l’exposé du groupe

Critères d’évaluation Échelle (20 points)


1. Contenu: présenter l’hôtel sous 5 points:
plusieurs aspects: 1 2 3 4 5
+ le fonctionnement 5: impressionnant
+ les équipements 4: satisfaisant
+ le personnel 3: acceptable
+ les évaluations personnelles 2: acceptable mais des passages peu clairs.
1: incompréhensible

2. Forme: 10 points
- La grammaire: 5 points
1 2 3 4 5
5: impressionnant
4: satisfaisant
3: acceptable
2: acceptable mais des passages peu clairs.
1: incompréhensible
5 points
- Le lexique:
1 2 3 4 5
5: impressionnant
4: satisfaisant
3: acceptable
2: acceptable mais des passages peu clairs.
1: incompréhensible

3. Présentation: 5 points
- La qualité des images 1 2 3 4 5
- La prononciation
5: impressionnant
- Le débit
4: satisfaisant
- L’intonation
3: acceptable
- Le ton
2: acceptable mais des passages peu clairs.
- L’aisance
1: incompréhensible

-350-
Communications de dimension spécifique

b. Grille d’évaluation de la vidéo


Critères d’évaluation Échelle (10 points)
- Contenu 5 points
- la présentation des idées 1 2 3 4 5
- la structure de la langue
5: impressionnant
4: satisfaisant
3: acceptable
2: acceptable mais des passages peu
clairs.
1: incompréhensible

- Forme 5 points

1 2 3 4 5
- la qualité des images
5: impressionnant
- le montage de la vidéo
4: satisfaisant
3: acceptable
2: acceptable mais des passages peu
clairs.
1: incompréhensible

c. Grille d’évaluation du dépliant


Critères d’évaluation Échelle (10 points)
- Contenu 5 points
- la présentation des idées 1 2 3 4 5
- la structure
5: impressionnant
4: satisfaisant
3: acceptable
2: acceptable mais des passages peu clairs.
1: incompréhensible

-351-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Forme 5 points
- la qualité des images 1 2 3 4 5
5: impressionnant
4: satisfaisant
3: acceptable
2: acceptable mais des passages peu clairs.
1: incompréhensible

-352-
GRILLE D’ANALYSE DE LA COHÉRENCE TEXTUELLE
DES TEXTES ARGUMENTATIFS DES APPRENANTS
VIETNAMIENS DE FRANÇAIS

NGUYEN Hong Hai


Université de Langue et d’Etudes Internationales-
Université Nationale du Vietnam à Hanoï

Résumé:
Nous visons, dans cet article, à présenter les bases théoriques sur la cohérence
textuelle, ses relations avec la cohésion, ses caractéristiques exprimées dans les
textes argumentatifs permettant d’établir une grille d’analyse de la cohérence du
texte argumentatif et son guide d’utilisation susceptibles d’aider les enseignants et
les étudiants à évaluer la bonne formation d’un texte argumentatif.
Mots-clés: Cohérence, textes argumentatifs, cohésion, relation, méta-règles,
grille d’analyse

Problématique
La pratique quotidienne de l’enseignement du FLE nous
amène à remarquer que beaucoup de nos étudiants ont du
mal à exprimer, d’une façon claire, une pensée, à établir des
relations entre les éléments du discours et à écrire des textes
structurés et cohérents. Ainsi, dans leur correction des copies,
les enseignants se sont-ils souvent retrouvés confrontés à des
textes dont les défauts textuels les mettent en désarroi. D’où,
améliorer la qualité de l’expression écrite des étudiants est
toujours une priorité pour laquelle nous ressentons vivement la
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

responsabilité de trouver des solutions adaptées. C’est ce qui


nous a amenée à proposer une approche pédagogique basée
sur les règles de cohérence textuelle grâce auxquelles l’étudiant
apprend à développer des idées, à relier les parties du texte. Ce
sont les raisons pour lesquelles, nous avons décidé d’étudier le
phénomène de la cohérence textuelle mais centrons sur celle
des textes argumentatifs, le type de texte qui cause le plus de
problèmes aux apprenants vietnamiens de niveau avancé.
En réalisant cette recherche, nous nous sommes posée les
questions suivantes:
1. Qu’est-ce la cohérence textuelle, quelles sont ses relations
avec la cohésion et quelles sont ses manifestations dans les
textes argumentatifs en français?
2. Quels sont les problèmes que rencontrent les étudiants
vietnamiens dans leur écriture des textes argumentatifs et quelles
en sont les raisons?
3. Comment peut-on proposer des pistes d’enseignement de
la cohérence des textes en français au Vietnam?
Pour répondre à ces questions, nous avons commencé par
présenter l’état de l’art, et sommairement les notions essentielles
comme: cohérence textuelle, ses relations avec la cohésion, ses
caractéristiques exprimées dans les textes argumentatifs, pour
arriver à une définition opératoire de celle-ci pour les apprenants…
Munie de ces données théoriques sur la cohérence textuelle
des textes argumentatifs. Nous avons réalisé des enquêtes auprès
des enseignants et des étudiants de 3ème année du Département
de Langue et de Civilisation françaises, Université de Langue
et d’Etudes Internationales - Université Nationale du Vietnam et
analysé des textes écrits par ces derniers afin de nous mettre au
courant les problèmes qu’ils rencontrent dans leur écriture des
textes argumentatifs et nous avons essayé d’en déduire les raisons.

-354-
Communications de dimension spécifique

Parallèlement à ce travail, nous avons fait l’analyse des


éditoriaux en français sur l’euthanasie et la PMA (procréation
médicalement assistée). Tous ces résultats nous ont permis
d’élaborer un modèle unifié et multidimensionnel de la cohérence
dans les textes argumentatifs. Ce modèle se présentant sous
forme de grille regroupe tous les facteurs que nous considérons
comme déterminants.
En nous équipant de la grille, nous réaliserons l’expérimentation
qui devra être évaluée pour l’ajustement si nécessaire et la
proposition d’un dispositif pour l’enseignement de l’écriture du
texte argumentatif.
Comme notre travail est en cours, dans le cadre strict de
cet article, notre but concerne seulement la présentation des
bases théoriques permettant d’élaborer une grille d’analyse de
la cohérence du texte argumentatif pour mieux la cerner dans sa
production et sa correction. Ainsi, allons-nous passer en revue
très brièvement ci-après sommairement des notions essentielles
comme: cohérence textuelle, ses relations avec la cohésion, ses
caractéristiques exprimées dans les textes argumentatifs.

1. Cohérence
La cohérence est d’abord un phénomène d’interprétation.
Elle implique un certain jugement de la part du lecteur qui
interprète un texte donné en fonction de sa vision du monde et
de ses connaissances de base. De plus, elle est un phénomène
graduel. Afin de la caractériser, des linguistes comme Reinhart
(1980) établissent une échelle de la cohérence en classant les
textes sous trois grands types: Textes «explicitement cohérents»,
textes «implicitement cohérents» et «texte incohérents». La
différence entre les deux premiers types repose sur les procédures
supplémentaires nécessaires de la part du récepteur pour établir
cette cohérence (Reinhart, 1980, p.161). Ensuite, la cohérence
se joue sur les plans local et global. Ainsi, au niveau local, elle

-355-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

s’établit entre les énoncés d’une même séquence ou paragraphe.


Au niveau global, elle s’établit entre les diverses séquences
du texte. Enfin, le phénomène de cohérence est influencé par
le contexte et le genre discursif. Tout récepteur aura certaines
attentes face au texte qui lui est proposé. Les considérations sur
le contexte et le genre du discours peuvent exercer une grande
influence sur l’interprétation d’un texte.

2. Cohésion
Pour Halliday et Hasan (1976 p.2), le mot «cohésion» est
utilisé pour désigner l’ensemble des moyens linguistiques qui
assurent les liens intra et interphrastiques permettant à un
énoncé oral ou écrit d’apparaître comme un texte. De cette idée,
nous pouvons dire que, la cohésion est la relation entre les mots
de la phrase et les liens entre les paragraphes du texte. Comme
le souligne Halliday M.A.K. et Hasan R. «la notion de cohésion
est basée sur la collocation, l’interaction entre mottés» (1976.
P: 66) À la suite de ces auteurs, aujourd’hui, presque tous les
chercheurs, tels que Charolles (1995), Maingueneau (1996),
quelles que soient leurs perspectives (linguistique textuelle,
pragmatique ou analyse du discours), s’accordent à considérer
la cohésion comme une notion essentiellement sémantique et
donc une propriété linguistique interne du texte.
On peut donc résumer, à propos de la cohérence et de
la cohésion que la cohérence se manifeste au niveau global
du texte (champ lexical, progression des idées, relation entre
passages …). Elle signifie que les idées doivent se suivre
logiquement l’une à l’autre pour que le message résulte clair.
La cohésion se manifeste au niveau local, phrase à phrase
(connecteurs temporels connecteurs spatiaux, connecteurs
argumentatifs …) Elle concerne plutôt la forme et suppose le
respect des normes morphologiques et syntaxiques.

-356-
Communications de dimension spécifique

Quant à nous, nous partageons l’idée que la cohésion renvoie


aux fonctionnements internes et aux organisations propres des
textes. La prise en compte des données extralinguistiques n’entre
pas dans la définition de la cohésion. Comme Adam indique
(cité par Charaudeau et Maingueneau, 2002, p.99), l’analyse
de la cohésion est plutôt attentive à la progression thématique
et aux marques d’organisation du texte tandis que la cohérence
engage des hypothèses pragmatiques sur la visée liée à sa
pertinence situationnelle. Les marques de cohésion sont donc
des indices linguistiques pour le jugement de la cohérence mais
ne garantissent pas que le texte en question soit cohérent.

3. Relation entre la cohérence et la cohésion


La relation entre ces deux notions est en rapport avec le couple
texte/discours. En effet, concernant les notions de cohérence/
cohésion et leur relation, pour les dictionnaires spécialisés, la
cohérence est liée à l’interprétabilité du texte ou du discours1 et
la cohésion aux moyens linguistiques (anaphores, répétitions,
ellipses, connecteurs, etc.) qui permettent d’assurer les liens et
la continuité.
Quant à lui, D. Slatka (1975, p.31), a proposé une définition
des notions de cohésion et cohérence, fondée sur une distinction
rigoureuse entre «texte» et «discours». Il distingue le texte «objet
formel abstrait» du discours «pratique sociale concrète». On
peut déduire de cette distinction que l’analyse de la cohésion est
une analyse purement linguistique. Il s’agit du fonctionnement
interne du texte qui ne fait pas intervenir les facteurs relevant de
la situation d’énonciation ou d’ordre pragmatique comme celle
de la cohérence.
Par ailleurs, les linguistes se posent des questions sur de
solidarité entre ces deux facteurs comme: La cohésion est-elle

1 Nous adoptons la distinction entre «texte» et «discours» proposée par J.M, Adam (cf: Adam
(2001, p.39)

-357-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

un facteur de cohérence? En est-elle une condition nécessaire


et suffisante ou seulement nécessaire mais non suffisante ou
même ni nécessaire ni suffisante?
À ces propos, on relève une divergence d’opinions chez
les linguistes textuels sur le caractère nécessaire ou non de
la cohésion. Beaucoup disent que si un texte est très court, il
peut se dispenser de marques cohésives. Or, on constate que
la présence ou l’absence de la cohésion n’est pas simplement
liée aux différences de dimension des textes considérés et
qu’il y a une confusion des deux niveaux: entre d’un côté une
cohérence locale - cohérence entre des segments contigus qui
s’établit sans peine en l’absence de marques cohésives et de
l’autre avec une cohérence globale du texte, difficile à envisager
s’il n’y a aucune marque de continuité topicale. Cette confusion
explique le fait que les mêmes auteurs, Moeschler et Reboul
(1994), peuvent, après avoir souligné le caractère non nécessaire
des relations de coréférence et d’anaphore pour la cohérence
des discours (p.460), considérer les chaînes de référence et
les chaînes anaphoriques comme facteurs importants sinon
indispensables de la cohérence des discours. On peut donc
considérer que si la cohésion n’est pas nécessaire à une
cohérence locale, elle l’est sans doute à un niveau plus général,
puisqu’elle constitue le principal moyen d’assurer la continuité
topicale. De plus, pour (Salles 2006, p.12-13) outre l’existence de
relations sémantiques ou pragmatiques entre les énoncés (règle
de relation chez Charolles ou de pertinence chez Reinhart),
la cohérence, en fait, la macro-cohérence, a aussi à voir, avec
l’établissement et le maintien de domaines topicaux. Les marques
cohésives ne suffisent évidemment pas à garantir une continuité
topicale;
Nous remarquons donc que la distinction entre la cohérence
et la cohésion d’un texte n’est pas toujours très nette parce que
non seulement ces deux notions entretiennent des liens étroits

-358-
Communications de dimension spécifique

(on peut s’appuyer sur l’une pour décrire l’autre et vice-versa),


mais elles sont aussi subordonnées l’une à l’autre. Par ailleurs,
en anglais, le terme de cohésion est quasiment le seul utilisé
comme en témoignent les travaux de Halliday & Hasan (1976),
Tandis que cohérence relève plutôt de la philosophie. Par contre,
en français, le choix de l’un ou l’autre de ces termes correspond à
des prises de position théoriques: Lundquist (1980) par exemple,
privilégie le concept de cohérence alors que Bronckart & al.
(1985) met en avant les phénomènes de cohésion. Cependant,
n peut s’entendre sur une définition large pour distinguer ces
deux termes comme l’explique Charolles (1988b: 53): «[…] tout
le monde est à peu près d’accord pour opposer d’un côté la
cohérence, qui a à voir avec l’interprétabilité des textes, et, de
l’autre les marques de relation entre énoncés ou constituants
d’énoncés. Concernant ces marques, depuis M.A.K Halliday et
R. Hasan (1976) on tend à les regrouper sous le nom générique
de cohésion». Ainsi, la cohérence est une construction du lecteur
qui relève de l’interprétation, de la réception, de l’accessibilité
de l’information, la cohésion concerne la construction interne du
discours et relève de l’ensemble des marques linguistiques qui
assurent les liens intra- et interphrastique.

4. Vers une définition opératoire de la cohérence pour les apprenants


Des travaux depuis les années 70 ont tenté de définir les
conditions de la cohérence. Charolles (1978) dégage quatre
méta-règles de cohérence: méta-règle de répétition, méta-règle
de progression, méta-règle de non-contradiction et méta-règle de
relation.
On retrouve trois de ces quatre règles chez T. Reinhart
(1980) sous les noms de 1. cohésion (comparable à la répétition
de Charolles 1978, p.14), 2. consistance (la non-contradiction,
p.22) et 3. pertinence (règle de relation de Charolles p.32), mais
l’extension de la condition de pertinence semble plus large: elle

-359-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

inclut, en effet, outre les relations entre les phrases, les relations
de celles-ci avec le thème du discours ou avec le contexte
d’énonciation (cf. Reinhart 1980, p. 164).
De Beaugrande et Dressler (1981 p.54) distinguent sept
standards de textualité: cohésion, cohérence, intentionnalité,
acceptabilité, informativité, situationalité, intertextualité. (en anglais
«cohesion, coherence, intentionality, acceptability, informativity,
situationality, intertextuality» ).
Enkvist (1990 p.18), quant à lui, parle de sept problèmes
dans l’étude de la cohérence: cohésion et cohérence, messages
et métamessages, inférence et interprétation, pertinence du
contexte situationnel, connaissance du récepteur et degré de
l’interprétabilité, stratégies du texte, structure et procès) (en anglais
«cohesion and coherence, messages et metamessages, inference
and interpretation, the relevance of situational contextes, receptor’s
knowledge and degree of interpretability, text strategies…, strategy,
structure and process» ).
Si le concept de cohérence textuelle est si difficilement
appréhendé, c’est parce que le texte lui-même s’avère une
activité langagière multidimensionnelle dans laquelle se côtoient
et interagissent un grand nombre d’éléments. Il semble donc
impossible de caractériser la cohérence textuelle de façon singulière
et de l’aborder sous un seul angle parce qu’elle relève, comme
le texte qu’elle qualifie, de l’action conjoint de plusieurs facteurs.
Pour cette raison, la notion de cohérence que nous essayons de
conceptualiser se base sur les théories de l’organisation textuelle
et les méta-règles de cohérence de Charolles (1978). Ainsi, un texte
cohérent doit «comporter dans son développement linéaire des
éléments à récurrence stricte» (Ibid., p.14), c’est-à-dire que des
procédés assurant la répétition des acteurs du texte doivent être
sciemment utilisés, par exemple la pronominalisation, la substitution
lexicale, les définitivations, etc. (Ibid., p.15). Parmi ces moyens,

-360-
Communications de dimension spécifique

l’anaphore représente un des moyens les plus simples d’effectuer


efficacement une répétition: Un texte cohérent doit aussi présenter
un «développement qui s’accompagne d’un apport sémantique
constamment renouvelé» (Ibid., p.20). La troisième méta-règle
en lien avec la cohérence textuelle est la non-contradiction. Un
texte sera reconnu cohérent si, dans son développement, aucun
élément ne vient contredire ce qui a été énoncé ou ce qui le sera
ultérieurement. La quatrième méta-règle précise que «pour qu’une
séquence ou qu’un texte soient cohérents, il faut que les faits qu’ils
dénotent dans le monde représenté soient directement reliés»
(Charolles, 1978, p. 32).
Nous pouvons exprimer d’une autre façon que la cohérence
textuelle peut être assurée quand les interrelations de la chaîne
de mots et des groupes et de propositions tissent bien un texte, au
point d’y pouvoir en dégager des réseaux de relations organiques;
ceux-ci donnent au texte de la cohésion par le biais de dispositifs
qui laissent des marques portées par les mots et les morphèmes.
Il est important également de prendre en compte la continuité du
texte qui est inscrite dans sa structure. Quand on écrit ou lit un
texte argumentatif, par exemple, il est habituellement facile d’en
reconnaître l’introduction, le développement et la conclusion. Les
relations sémantiques entre les parties du texte rattachées à ces
trois segments de l’argumentation ont pour objectif de développer
la cohérence.
Puisque notre travail portent sur les notions de cohérence
et de cohésion textuelles d’un point de vue didactique, il doit
reposer sur des recherches relevant de plusieurs paradigmes
dont les travaux en linguistique concernant la cohérence et la
cohésion textuelles de comme celui de Halliday & Hasan (1976)
qui a décrit, au niveau intra et inter-phrastique, les différentes
marques cohésives permettant de lier les énoncés entre eux
dans les textes: ellipse, substitution, conjonction, cohésion
lexicale et référence, mais surtout sur celui de Charolles (1978)

-361-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

qui tente de décrire des règles de bonne formation des textes,


avec quatre méta-règles de cohérence: répétition, progression,
non contradiction et relation. Nous appuyons aussi notre étude
sur les travaux en didactique comme celui de Charolles (1988)
portant sur l’enseignement des marques de cohésion. Après
avoir eu une idée sur la cohérence textuelle, il nous faut passer
à la problématique de notre recherche. Pour ce faire, nous
adoptons, comme base théorique, la théorie sur la cohérence
textuelle proposée par Charolles (1978, p.14, 20, 22 et 32) dans
la constitution d’une grille d’analyse textuelle.

5. Grille d’analyse de la cohérence du texte argumentatif1


À la lumière de la théorie sur la cohérence textuelle de
Charolles (cf. Charolles 1978 op.cit.) et de celle sur l’argumentation,
nous avons élaboré une grille d’analyse de la cohérence du texte
argumentatif qui est expliquée par un guide d’utilisation pour les
enseignants et les apprenants. En le faisant, nous pensons à sa
possibilité de les expliquer à nos étudiants, facilitant ainsi leur
travail d’écriture des textes argumentatifs. Toujours en visant à ce
but que dans la grille, nous décidons d’intégrer la méta-règle de
non-contradiction dans celle de relation et de progression car les
méta-règles sont en lien étroit les uns aux autres. Par exemple,
les contradictions énonciatives au niveau des indices énonciatifs
et des temps verbaux peuvent bien entraîner des violations de la
méta-règle de relation en rompant le rapport entre les éléments
de la situation de communication comme émetteur/récepteur,
concordance des temps, etc. Nous synthétisons, en conséquence,
l’analyse de la cohérence du texte argumentatif dans le tableau
ci-dessous, suivi du guide d’utilisation.

1 Cette grille est en phase d’évaluation

-362-
Communications de dimension spécifique

Tableau: Grille d’analyse de la cohérence du texte argumentatif

Méta-règles Critères
Relation 1. Le scripteur (S) développe le sujet demandé.
2. Les énoncés sont appropriés en contexte.
3. Le vocabulaire est approprié
4. Le choix des indices énonciatifs et des temps verbaux sont
adéquats
5. Les contraintes de la structure argumentative et du genre tex-
tuel sont respectées
Répétition 1. Les déterminants sont pertinemment employés.
2. Les pronoms sont utilisés d’une façon correcte.
3. Le texte présente des substitutions lexicales pertinentes
Progression 1. Le texte apporte des éléments nouveaux pertinents.
2. Le texte apporte des éléments nouveaux en nombre suffisant.
3. Les idées s’enchaînent.
4. S emploie des articulateurs appropriés.
5. Le texte ne présente pas de contradiction

Guide d’utilisation
1. Méta-règle de relation
1.1. L’étudiant développe le sujet demandé.
1.2. Les énoncés sont pertinents, en considérant le contexte
Un énoncé pertinent est celui adapté au contexte dans
lequel il est inscrit. Un énoncé n’est pas pertinent quand il n’a
pas de point d’ancrage dans la réalité. Il devient faux quand on
considère le contexte de l’énonciation.
1.3. Le vocabulaire est approprié
L’emploi des termes précis et bien adaptés au contexte.
L’emploi de l’anglicisme est considéré comme une erreur de
vocabulaire.
1.4. Le choix des indices énonciatifs et des temps verbaux
adéquats.
L’apprenant utilise des indices énonciatifs appropriés pour
assurer un comportement énonciatif constant.

-363-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

L’apprenant doit tenir compte des temps narratifs et des


temps commentatifs, du sens des temps verbaux employés et de
la cohérence de leur emploi. Plus précisément, seront évalués
les éléments suivants:
+ La concordance des temps, le choix approprié du temps
+ Les changements des temps conformant au développement
récit.
1.5. Le texte est bien articulé
C’est la structure du texte qui est évaluée, en tenant compte
de la structure des séquences argumentatives et la structure
globale d’un genre d’argumentation.
1.5.1. Le texte s’articule en paragraphe.
1.5.2. Chaque paragraphe développe une idée principale.
Le texte ne présente pas une multiplication injustifiée
de paragraphes
1.5.3. Le scripteur (S) expose la situation à l’intérieur d’un
cadre.
1.5.4. S identifie un problème et ceci de façon pertinente
dans le cadre.
1.5.5. S a une opinion explicite ou facilement repérable
en lien avec le problème.
1.5.6. S présente des arguments à l’appui de l’opinion.
1.5.7. Les arguments sont pertinents à propos de l’opinion.
1.5.8. Les liens entre les arguments sont explicites
ou facilement inférables.
1.5.9. Les arguments sont développés dans des
séquences argumentatives.
1.5.10. S présente des conclusions de son argumentation.
1.5.11. Les contraintes du genre discursifs sont respectées.

-364-
Communications de dimension spécifique

2. Méta-règle de répétition
Les trois critères suivants évaluent l’habileté de l’étudiant
à utiliser adéquatement les différents procédés de rappel pour
assurer la cohérence textuelle.
2.1. Les déterminants sont bien employés
- Le déterminant est bien choisi.
- Il est bien accordé.
2.2. Les pronoms sont utilisés correctement
- Le pronom est bien employé.
- Il rappelle clairement le mot qu’il remplace.
- Il est bien accordé.
2.3. Le texte présente des substitutions lexicales pertinentes
- Le texte évite la redondance injustifiée.
- Les substitutions utilisées sont adéquates.
Le même mot/ la même expression trop fréquemment utilisé
dans le texte (3 fois et plus dans le même passage) est une erreur.
3. Méta-règle de progression
Le texte progresse
3.1. Le texte apporte des éléments nouveaux pertinents
(Nous évaluons ici la qualité de l’information.)
Chaque phrase doit faire progresser le sujet et révéler:
- La connaissance du sujet,
- La capacité à donner une information pertinente.
Ne pas respecter ce critère si une phrase:
- Qui n’amène rien au développement du sujet: phrase
répétitive ou phrase hors sujet,

-365-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Qui ne dégage pas de sens, même si elle est


syntaxiquement correcte,
- Trop elliptique qui fait que l’idée du scripteur n’est pas
transmise,
- Ambigüe, qui peut porter à des interprétations différentes.
3.2. Le texte apporte des éléments nouveaux en nombre
suffisant.
Le texte doit présenter un développement suffisant.
Le texte peut progresser mais donne trop peu d’arguments
ou les arguments ne sont pas suffisamment développés.
3.3. Les idées s’enchaînent
Évaluer si les éléments nouveaux sont bien reliés aux
éléments déjà donnés, aux éléments connus.
Évaluer si le lien entre les idées est manifeste:
- Entre les énoncés,
- Entre les paragraphes.
3.4. Le scripteur emploie des connecteurs appropriés
3.5. Le texte ne présente pas de contradictions
Il s’agit ici de la contradiction simple: l’étudiant fait des
affirmations contradictoires dans son écrit.
Conclusion
Dans cet article, nous avons présenté les théories sur
la cohérence textuelle, sa distinction et ses relations avec la
notion de cohésion afin d’arriver à en adopter une, celle de
Charolles (1978) et à en jeter des bases sur lesquelles nous
avons proposé une grille d’analyse. Nous comptons sur cette
dernière pour éclaircir cette la notion aux apprenants qui pourront
dorénavant approprier ces théories à la pratique de l’écriture.

-366-
Communications de dimension spécifique

Cette grille guidera donc à la fois les enseignants du FLE et leurs


apprenants dans leur travail respectif. Pour le moment, comme
notre thèse est en cours, nous ne pouvons communiquer que
certains résultats de recherche que nous avons obtenus jusqu’à
maintenant, y compris la conceptualisation d’une grille d’analyse
de ce phénomène.

RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE
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-367-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

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14. SLATKA, D. 1975. «L’ordre du texte». Études de linguistique
appliquée 19.

-368-
ÉTUDE LINGUISTIQUE DE LA FONCTION ÉMOTIVE
DES TEXTES INFORMATIFS À PROPOS DE LA VILLE DE HUÉ
SUR LES SITES TOURISTIQUES

TRUONG Hoang Le
École supérieure de langues étrangères -
Université de Hué

Résumé:
Afin de promouvoir les voyages et les animations touristiques, il est
indispensable aux agences de voyage et aux offices du tourisme de construire le
site d’information électronique. On s’interroge alors quoi et comment rédiger pour
produire des textes informatifs à visée publicitaire sur ce moyen de communication.
A l’instar des théories de la communication, le scripteur/le destinateur laisse sur le
lecteur/ le destinataire des impressions, des effets. des impulsions qui constituent
la fonction émotive du discours. D’autre part, l’enseignement du français du
tourisme fait partie intégrante des programmes de formation professionnelle dans
les filières du tourisme. La communication a ainsi pour but de présenter un projet de
recherche qui consiste à relever des marqueurs linguistiques assumant la fonction
émotive utilisés au niveaux lexical, syntaxique et stylistique. L’analyse textuelle se
fait sur un corpus composé de dix textes informatifs à propos de certains centres
d’intérêt de la ville de Hué publiés sur dix sites touristiques différents en se basant
sur les théories de la communication et les résultats des recherches antérieures
focalisées sur les genres de discours touristiques. La recherche aboutira à
donner des propositions didactiques concernant la conception du programme
d’enseignement du français langue professionnelle à la filière du tourisme.
Mots-clés: analyse textuelle, discours/texte touristique, formation professionnelle,
fonction émotive, marqueurs linguistiques
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

1. Questionnement
1.1. Constats
Contexte scientifique
L’analyse du discours s’est développée avec les recherches
théoriques de Maingueneau (1998), Petitjean (1989), Bronckart
(1997), Adam (1990, 2003), lesquelles portaient sur les différentes
dimensions du discours et les différents critères de classifications
de familles de productions discursives à l’oral aussi bien qu’à l’écrit
en genres de discours différents comme discours de communication
quotidienne, discours de communication technique, discours de
communication professionnelle dont le discours touristique. En
ce qui concerne le discours touristique, on voit les recherches
de bon nombre de chercheurs comme Mourlhon-Dallies (2005),
Baider, Buger & Goutos (2004), Bhatia (2004), Kwasi (2010)
qui étudient les caractéristiques de certains genres de discours
touristiques que constituent les brochures touristiques, les
guides touristiques, les dépliants touristiques.
Jakobson (1963) définit les fonctions du langage dont
la fonction émotive qui consiste à dévoiler la subjectivité de
l’émetteur du message de par ses sentiments, ses appréciations,
ses opinions exprimés à travers les marques linguistiques du
message. Affiné par les théories des actes du langage (Austin,1962;
Searl, 1969), le cadre ainsi défini peut s’appliquer à l’ensemble de
la communication. Par la suite, il a apparu diverses perspectives
de recherches francophones sur les aspects linguistiques de la
fonction émotive comme la subjectivité dans le langage (Kerbrat-
Orecchioni,1980), la modalisation langagière (Vion, 2004), la
modalité en français (Le Querler, 1996 et 2004; Gosselin, 2010).
De plus, Pak et Paroubek (2010) a examiné l’élaboration du
lexique affectif français utilisé dans les énoncés diffusés sur le
réseau social Twitter. Quant aux genres de discours touristiques
en francais, Jarukan (2014) a pris en considération les adjectifs

-370-
Communications de dimension spécifique

valorisants utilisés dans les brochures, les guides de voyage sur


la Thaïlande. Il faut également noter la recherche de Carron (2015)
qui a fait l’étude comparative des substantifs valorisants dans les
brochures touristiques wallonnes et flamandes. Les résultats de ces
recherches montrent les caractéristiques formelles et pragmatiques
ainsi que les usages courants des marqueurs linguistiques de la
fonction émotive utilisés dans les genres de discours touristiques.
Or, les recherches des chercheurs vietnamiens dans ce domaine
en général et notamment dans la perspective de la fonction émotive
des écrits touristiques sur les sites touristiques restent encore peu
nombreuses. En fait, on voit seulement la recherche de Truong
(2019) centrée sur l’observation des modalités linguistiques ainsi
que des marqueurs modaux utilisés dans les textes de promotion
touristique diffusés sur le site routard.com et celle de Nguyen
et Pham (2019) portant sur les genres de discours touristiques et
donnant les propositions didactiques adressées à l’enseignement
des modules de français du tourisme.
Contexte académique
Le français du tourisme fait partie des curricula de formation
en langue française dispensés par les départements de français au
Vietnam comme le département de français à l’École supérieure
de langues étrangères (Université de Hué), le département de
français de l’Université de pédagogie de Ho Chi Minh-ville. Les
textes touristiques constituent un contenu d’enseignement non
négligeable dans les cours de français du tourisme. Il est donc
profitable à l’enseignement/apprentissage du français du tourisme
de mener des recherches portant sur les genres de textes
touristiques élaborés en vue de promouvoir les voyages aux
destinations du Vietnam dont la ville de Hué.
1.2. Problématique de la recherche
Partant du constat scientifique et académique, nous nous
proposons de formuler des questions de recherche comme suit:

-371-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

a. Quels types de marqueurs linguistiques de fonction


émotive sont utilisés dans les textes informatifs en vue de la
promotion des visites à Hué sur les sites touristiques?
b. Quels sont les marqueurs auxquels recourent le plus
fréquemment les écrits de ce type?
c. Quels sont les apports pédagogiques des résultats des
analyses dans différentes dimensions des discours touristiques à
l’élaboration des cours de français du tourisme?
d. Serait-il nécessaire d’ajouter un cours d’analyse de
discours touristique aux curricula de formation professionnelle
de la filière du tourisme?

2. Cadre conceptuel de la recherche:


2.1. Les fonctions de la communication langagière
Selon Jakobson (1963, pp.213-220), on peut définir six
fonctions de la communication langagière comme suit:
Fonction référentielle (ou dénotative): Le message est
centré sur le référent, le sujet même du message. Le langage
décrit le monde; il s’agit bien souvent de la fonction primordiale
du langage.
Fonction expressive (ou émotive): Le message est centré
sur le locuteur. Il traduit tout ce qui apparaît subjectif dans le
message: l’expression des opinions, des sentiments, des
émotions du locuteur.
Fonction conative: Le message est centré sur le destinataire.
Il peut s’agir d’un message performatif: le message peut faire
naître un certain comportement chez l’interlocuteur. Centrée sur
le destinataire, la fonction conative traduit l’effet que le locuteur
exerce sur son interlocuteur pour le forcer à participer activement
à l’acte communicatif.

-372-
Communications de dimension spécifique

Fonction métalinguistique: Le message est centré sur le


langage. Le langage sert à parler de lui-même. Les usagers
habituels de la fonction métalinguistique du langage sont, par
exemple, les linguistes. D’autres signes appartiennent à cette
fonction comme «je veux dire…», «c’est-à-dire», «en d’autres
termes…», etc.
Fonction phatique: Le message cherche à établir ou à maintenir
le contact. «Allô?», «n’est-ce pas?», etc. relèvent de la fonction
phatique du langage. Centrée sur le canal, la fonction phatique vise
à établir, prolonger ou interrompre la communication, à vérifier que
le circuit fonctionne bien, à attirer l’attention de son interlocuteur et à
s’assurer qu’elle ne se relâche pas.
Fonction poétique: Le message est centré sur lui-même, sur
sa forme esthétique. Le langage joue sur son propre code. On
parlera de fonction poétique chaque fois que l’accent est mis sur
l’usage de la langue pour mettre en valeur le message, chaque
fois que la forme et la structure du message sont particulièrement
prises en compte au cours de l’énonciation.
2.2. Marqueurs de fonction émotive
Selon Kerbrat-Orecchioni (2009), Le Querler (2004), Calvi
et Bonomi (2008), les marqueurs de fonction émotive se classent
aux trois niveaux que sont le niveau sémantique, le niveau
morpho-syntaxique et le niveau stylistique.
2.2.1. Classification de marqueurs de fonction émotive au niveau
sémantique
Selon Kerbrat-Orecchioni (2009), la fonction émotive au
sens large est dénotée par les marqueurs affectifs ou émotifs et
les marqueurs évaluatifs.
- Marqueurs affectifs: Kerbrat-Orecchioni (2009, p.95) définit
les marqueurs affectifs comme des termes ou expressions
susceptibles de dénoter le sentiment, l’émotion, l’attitude qu’a le
locuteur vis-à-vis du référent de l’énoncé.

-373-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Marqueurs évaluatifs: Kerbrat-Orecchioni (2009, p.102)


définit les marqueurs évaluatifs comme termes ou expressions
susceptibles de dénoter, le jugement de valeur, l’appréciation, la
position du locuteur vis-à vis du référent de l’énoncé. Les marqueurs
de ce type sont classés en deux catégories: marqueurs évaluatifs
axiologiques et marqueurs évaluatifs non axiologiques. Les
marqueurs évaluatifs axiologiques ont pour fonction de marquer
explicitement une évaluation positive ou négative, l’approbation ou
la désapprobation comme bon/ mauvais, beau/laid. En revanche,
les marqueurs évaluatifs non axiologiques ont pour fonction
de marquer une évaluation qui ne montre pas explicitement
une position favorable ou défavorable du locuteur grand/petit/,
nombreux/ rare, proche/lointain, homogène/ hétérogène, simple/
compliqué. Pourtant, en se basant sur le contexte du discours,
les marqueurs de cette catégorie peuvent montrer une évaluation
valorisant ou dévalorisant du locuteur sur le référent de l›énoncé.
2.2.2. Classification de marqueurs de fonction émotive au niveau
morpho-syntaxique
Au niveau morphologique (lexical): Les marqueurs de fonction
émotive peuvent être formellement des noms (substantifs), adjectifs,
verbes et adverbes .
- Noms: convivialité, diversité, authenticité, beauté, merveille,
paradis, bonheur, malheur
- Verbes: pouvoir, devoir, admirer, adorer, s’émerveiller, se
passionner, s’éloigner, éviter
- Adjectifs: beau. laid, calme, bruyant, délicieux, chaleureux,
froid, fantastique, incontournable, incroyable
- Adverbes: heureusement, malheureusement, sans doute,
certainement, exceptionnellement
- Marqueurs argumentatifs: cependant, mais, non seulement..
mais aussi, encore, presque

-374-
Communications de dimension spécifique

Au niveau syntaxique: Les marqueurs de fonction émotive


peuvent être représentés par les structures impersonnelles avec
un adjectif appréciatif ou épistémique, les phrases à l’impératif,
les phrases nominales, les phrases avec la mise en relief.
2.2.3. Classification de marqueurs de fonction émotive au niveau
stylistique
Les marqueurs de fonction émotive peuvent être représentés
par les termes stylistiques (termes employés à la manière stylistique
de la répétition, de l’hyperbole ou de la métaphore), les formes
verbales comme le mode conditionnel, le mode subjonctif.
- Métaphore:
L’ancienne capitale impériale de Hué, inscrite au patrimoine
mondial de l’UNESCO, est un lieu mythique auréolé de légendes
et nimbé d’une poésie qui en inspira plus d’un.
(Source: https://www.amica-travel.com/vietnam/hue)
On y trouve deux cas d’usage métaphorique de verbes
auréoler et nimber. Il s’agit de termes de la physique désignent
l’action d’orner quelque chose en l’entourant d’un cercle lumineux
ou d’un halo, qui renvoient, à quelque chose de brillant, de
prestigieux.
- Hyperbole:
Bon nombre de ces bâtiments à Hue sont encore très
endommagés, ce qui lui donne la sensation de la visite de
Pompéi, malgré le tourisme de masse.
(Source:https://www.voyagevietnam.co/top-5-choses-a-
faire-a-hue-au-vietnam/?fbclid=IwAR0yj3fSdVp6paXO0scrRV-
VMyZw-trLXej_w-xJZslBvppyR3LPAq4_D-8)
Hue est considéré comme la ville de Pompéi, une ville
romaine très célèbre pour ses vestiges à la suite de l’éruption du
Vésuve en 79 après J.-C.)

-375-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

3. Méthodologie de la recherche
En ce qui concerne le corpus à analyser, nous avons collecté
dix textes informatifs qui donnent des descriptions brèves sur la
ville de Hué et recommandent des visites en ce lieu, diffusés sur
dix des sites internet touristiques les plus visités et administrés
par des agences de voyages vietnamiennes et des offices
du tourisme locaux (cf. Références). Il s’agit de petits textes
rédigés en 100-120 mots environ, accompagnés de photos qui
fonctionnent comme paratextes.
A propos de la démarche d’analyse et de méthodes d’analyse
adoptées, nous avons d’abord effectué la recherche qualitative
en classant des marqueurs émotifs utilisés par les scripteurs
des textes du corpus à observer aux niveaux linguistiques
(lexical, syntaxique) et au niveau stylistique. Puis, nous avons
utilisé la méthode quantitative en faisant des calculs statistiques
d’occurences de types de marqueurs émotifs différents pour
savoir la fréquence d’usage de marqueurs émotifs différents. De
là, nous sommes arrivés à trouver les types de marqueurs les
plus importants dans les écrits touristiques de ce genre. Enfin, la
recherche comparative s’ajoute à notre démarche d’analyse en
faisant des confrontations de fréquences d’usages de marqueurs
émotifs dans les textes concernés afin de détecter des similitudes
et des différences entre ces textes.

4. Résultats de la recherche
4.1. Analyse détaillée modèle d’usage de marqueurs émotifs
Texte 1:
Voyage à Hue
Partez sur les traces des anciens empereurs du Vietnam
en organisant un voyage à Hue. La ville est située dans un
environnement rural tranquille et construite de part et d’autre de la
rivière des Parfums. Elle s’affirme comme un lieu incontournable
pour les amateurs de vestiges historiques remarquables,

-376-
Communications de dimension spécifique

d’atmosphères citadines reposantes et de gastronomie. La ville


est aussi connue pour ses poètes, ses peintres, ses sculpteurs
qui œuvraient pour le compte de la cour impériale.
Hue est le coup de cœur de nombreux voyageurs, la grande
majorité des sites culturels seront aisément accessibles depuis
votre hôtel. N’hésitez pas à consacrer du temps à la découverte
de la ville et imprégnez-vous de son charme si particulier.
(Source: https://espacemandarin.com/voyage-vietnam/hue)

Les détails du résultat de l’examen sont comme suit:


• Procédés lexicaux de marqueurs émotifs: 13 occurrences
- Noms: coup de coeur, charme (2 évaluations positives)
- Adjectifs: tranquille, incontournable, remarquables, nombreux,
reposante, particulier (7 évaluations positives)
- Verbes: s’affirmer, s’imprégner (2 évaluations positives)
- Adverbes: aisément, si (2 évaluations positives)
- Marqueurs discursifs argumentatifs: Aucun
• Procédés syntaxiques de marqueurs émotifs: 3 occurrences
- Phrase nominale: aucune
- Phrase exclamative: aucune
- Mode impératif: partez.., . n’hésitez pas…, imprégnez-
vous… (3 occurrences)
• Procédés stylistiques de marqueurs émotifs: 5 occurrences
- Métaphore: coup de coeur (qui renvoie à la fascination,
à l’attirance), s’imprégner (qui renvoie au sens de se laisser
impressionner) (2 occurrences)
- Hyperbole: coup de coeur, s’imprégner (ces deux termes
s’emploient en vue d’exagérer l’intensité de l’attirance et de
l’impression faites par la ville de Hue) (2 occurrences)

-377-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Répétition: Hue (1 occurrence)


- Mode conditionnel: Aucun
On compte 118 mots dans le texte dans lequel on utilise
21 occurrences de marqueurs émotifs qui montrent autant
d’évaluations positives, le pourcentage de marqueurs émotifs
par rapport au nombre des mots du texte est ainsi de 17.8%.
Parmi les occurrences de marqueurs émotifs on y trouve
13 marqueurs lexicaux, soit 62%; 3 occurrences d’usage de
marqueurs syntaxiques, soit 14% et 5 occurrences d’usage
de marqueurs stylistiques, soit 24%. A propos des catégories
de marqueurs lexicaux, plus de la moitié des cas (7/13) sont
des adjectifs évaluatifs ou affectifs. En outre, l’auteur emploie
deux noms, deux verbes et deux adverbes pour exprimer son
attitude, ses évaluations de l’attraction touristique de la ville de
Hué. Concernant l’usage de marqueurs syntaxiques, on y voit 3
occurrences d’usage de phrases à l’impératif visant à promouvoir
des déplacements touristiques à Hué. Quant aux procédés
stylistiques, les deux termes coup de coeur et s’imprégner
s’emploient ici comme des expressions évaluatives à la fois par
la métaphore et par l’hyperbole en vue d’accroître l’attractivité de
sites à visiter à Hué aux yeux des clients touristiques.
4.2. Résultats généraux d’examens d’usage de marqueurs émotifs
4.2.1. Analyse comparative d’usages de marqueurs émotifs

Figure 1. Fréquence d’usage de marqueurs émotifs par text

-378-
Communications de dimension spécifique

Selon les résultats obtenus, il se trouve 180 occurrences


d’usage de marqueurs émotifs dans les dix textes observés, soit
18 occurrences de marqueurs émotifs en moyenne dans un texte
et 15.3% marqueurs en moyenne par rapport au nombre total
en moyenne de 115 mots dans un texte. Les indicateurs dans la
figure 1 montrent que parmi les dix textes, on en voit trois (Textes
3,5, et 8) qui comportent plus de 20% de marqueurs émotifs
par rapport au nombre total des mots de chacun d’entre eux.
Ces chiffres démontrent que les marqueurs de fonction émotive
occupe une place importante dans les textes descriptifs à visée
de promotion touristique.
En ce qui concerne la répartition de différents types de
marqueurs (voir Figure 2 ci dessous), on constate que les
marqueurs d’ordre lexical représentent en moyenne près de
70% des marqueurs émotifs mobilisés dans les textes analysés.
On en y compte 120 occurrences au total. La fréquence de
marqueurs stylistiques se trouve en deuxième place avec 25.8%
des occurrences marquées. On emploie le moins souvent les
marqueurs d’ordre syntaxique avec 5.3 %.

Figure 2. Répartition moyenne de différents types de marqueurs émotifs

-379-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

4.2.1. Usage des catégories des marqueurs émotifs au niveau


lexical
Selon le tableau 1 indiquant la répartition de différentes
catégoríes de marqueurs lexicaux, les adjectifs évaluatifs sont
les plus utilisés avec 5.4 occurrences par texte en moyenne
dans les textes touristiques observés. Vient ensuite en deuxième
position la fréquence de marqueurs substantivaux avec 2.8
occurrences par texte. De plus, un certain nombre de verbes,
adverbes et marqueurs argumentatifs y sont aussi mobilisés
comme marqueurs émotifs respectivement avec 1.5, 1.1 et 0,9
occurrences par texte.
Tableau 1. Répartition de différentes catégories de marqueurs lexicaux par texte

Marqueurs lexicaux

Marqueurs
Noms Adjectifs Verbes Adverbe
argumentatifs

Moyenne 2.8 5.4 1.5 1.1 0.9

Total 28 54 15 11 9

En regardant les graphiques de la figure 3 ci-dessous, on


remarque que la plupart des dix textes contiennent des marqueurs
aussi variés que substantivaux, adjectivaux et verbaux. On trouve
des noms et adjectifs à titre de marqueurs émotifs dans tous les
textes du corpus. Il faut signaler qu’on voit les quatre catégories de
marqueurs lexicaux à observer s’emploient dans les textes 3,4 et
5. Parmi les marqueurs lexicaux, les marqueurs adjectivaux sont
nettement les plus fréquemment mobilisés. Viennent ensuite en
deuxième position et troisième position dans l’ordre de fréquence
d’usages respectivement les marqueurs substantivaux et les
marqueurs verbaux.

-380-
Communications de dimension spécifique

Figure 3. Examen comparatif d’usage par texte de catégories de marqueurs


lexicaux émotifs

5. Discussion
Les résultats de la recherche font preuve de l’importance des
marqueurs émotifs dans les écrits descriptifs à visée publicitaire
sur les sites touristiques. On recourt souvent à la fois de manière
complémentaire trois types de procédés de modalisation que
sont les procédés lexicaux, syntaxiques et stylistiques. Les
procédés les plus fréquemment utilisés sont sans aucun doute
les procédés lexicaux dont la plupart des marqueurs sont des
adjectifs et substantifs de modalité appréciative.
En outre, à travers les études, on voit également que les
marqueurs de fonction émotive permettent de réaliser d’autres
fonctions communicatives des écrits touristiques, notamment
la fonction conative qui consiste à agir sur les lecteurs et la
fonction poétique qui vise à impressionner les lecteurs à l’aide de
manières diverses d’usages de moyens linguistiques. En d’autres
termes, les marqueurs émotifs jouent un rôle remarquablement
important dans les textes de type de guide touristique sur les
sites touristiques.

6. Conclusion et proposition didactique


A l’issue de l’étude théorique et des analyses textuelles, il se
trouve certaines réponses à des questions de recherche posées

-381-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

au départ de la recherche. En fait, on aboutit, dans une certaine


mesure, à caractériser les particularités des textes touristiques en
termes d’usage de marqueurs émotifs, d’une part. Les résultats
de notre recherche permettent ainsi de souligner encore une fois
la place significative des marqueurs émotifs dont notamment les
marqueurs évaluatifs dans les écrits touristiques. D’autre part, les
données recuellies de la présente étude contribuent, on l’espère,
à renforcer l’appel à la prise en compte des intérêts pédagogiques
et professionalisants de l’enseignement/apprentissage de la
pragmatique discursive et de l’analyse de discours touristiques
en particulier pour faire aux étudiants de la filière de francais du
tourisme bien maitriser les genres de discours toursitiques comme
des guides de voyage à l’écrit et à l’oral, des brochures touristiques.
A propos de cette recherche, il est souhaitable que les
enseignants de FLE prennent mieux conscience des apports
des connaissances et des pratiques de l’analyse discursive à
l’enseignement/apprentissage du français général aussi bien
du français du tourisme. C’est pourquoi, à notre avis, il est
indispensable d’intégrer un module d’analyse de discours de
tourisme dans le curriculum de formation professionnelle au
français du tourisme dans les départements de français de la
région. En fait, si on étudie les particularités des genres de
discours touristiques comme des guides touristiques, brochures
et dépliants touristiques à travers des analyses discursives, on en
maîtrise mieux la compréhension ainsi que la production pendant
l’apprentissage et notamment dans la pratique professionnelle.

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Communications de dimension spécifique

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https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01084118.
11. Kerbrat-Orecchioni, C. (1980/2009). L’énonciation, de la
subjectivité dans le langage. Paris: Armand Colin.
12. Kwasi, B. E. (2010). Analyse du discours oral des guides
touristiques et du discours écrit des guides de voyage:
régularités discursives et perspectives. Thèse de doctorat.
Université de Strasbourg.
13. Le Querler, N. (2004). Les modalités en français. Revue
belge de philologie et d’histoire 82(3), 643-656.

-383-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

14. Maingueneau, D. (1998). L’analyse des textes de communication.


Paris: Dunod.
15. Mourlhon-Dallies, F. 2005. Analyse du discours et français
sur objectifs spécifiques: des apports réciproques. Points
communs 26, 8-11.
16. Nguyen, T.T.T & Pham, S.H.P. (2019). Du discours touristique
à la didactique du français de spécialité. Revue de pédagogie
16(4), 29-39.
17. Pak, A. & Paroubek. P. (2010). Construction d’un lexique affectif
pour le français à partir de Twitter, TALN 2010. Montréal.
18. Petitjean, A. (1989). Les typologies textuelles. Pratiques 62,
86-125.
19. Searle, J. (1969). Speech acts. An essay in the philosophy of
language. UK: Cambridge University Press.
20. Truong, H.L. (2019). Étude des modalités linguistiques
utilisées dans les textes touristiques en français. Actes du
colloque international “La professionnalisation des formations
dans les départements de français”. Hanoi.
21. Vion, R. (2004). Modalités, modalisations et discours représentés.
Langages 156, 96-110.

Les sources des textes constituant le corpus à analyser


Texte 1: https://espacemandarin.com/voyage-vietnam/hue
Texte 2: http://www.huetouristvietnam.com/fr/Centre-du-Vietnam/
TOUR-HUE-DEMIE-JOURNEE.html
Texte 3: https://www.routes-du-vietnam.com/voyage-vietnam/
sejour-vietnam/sejour-vietnam-hue/#itineraire
Texte 4: https://vietnamdecouverte.com/destinations/hue-vietnam-
cite-imperiale/

-384-
Communications de dimension spécifique

Texte 5: https://www.tonkinvoyage.com/vietnam-sites-a-decouvrir/
hue-ville-de-la-beaute-romantique.html
Texte 6: https://www.asiatica-travel.fr/voyage-vietnam/hue-25.html
Texte 7: https://horizon-vietnamvoyage.com/visiter-le-vietnam/
hue-ville/
Texte 8: https://www.amica-travel.com/vietnam/hue
Texte 9: https://www.voyagevietnam.co/top-5-choses-a-faire-a-hue-
au-vietnam/?fbclid=IwAR0yj3fSdVp6paXO0scrRV-VMyZw-trLXej_w-
xJZslBvppyR3LPAq4_D-8
Texte 10: https://vietnamoriginal.com/destinations/hue-vietnam-31.html
Annexe 1
Analyse comparative de résultats d’examen d’usages de
marqueurs émotifs

Lexicaux Syntaxiques Stylistiques


No No %
Marqueurs % % % total total marq/
émotifs lex/ syn./ styl./
No No No marq. mots mots
total total total
marq marq marq
Texte 1 13 62 3 14 5 24 21 118 17.8
Texte 2 5 62.5 0 0 3 37.5 8 87 9.2
Texte 3 12 63.1 3 15.8 4 21.1 19 91 20.8
Texte 4 15 93.7 0 0 1 6.3 16 98 16.3
Texte 5 21 70 0 0 9 30 30 136 20.1
Texte 6 11 68.7 1 6.3 4 25 16 145 11.0
Texte 7 11 47.8 0 0 12 52.2 23 148 15.5
Texte 8 15 71.4 0 0 6 28.6 21 101 20.8
Texte 9 6 50 2 16.7 4 33.3 12 140 8.6
Texte 10 11 100 0 0 0 0 11 89 12.4
Moyenne 12 68.9 1 5.3 5 25.8 18 115 15.3

-385-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Annexe 2
Usage des catégories des marqueurs émotifs au niveau
lexical

Marqueurs lexicaux

Marqueur argu-
Nom Adjectif Verbe Adverbe
mentatif

Texte 1 2 7 2 2 0
Texte 2 1 1 1 2 0
Texte 3 1 5 1 2 3
Texte 4 1 8 2 2 2
Texte 5 4 8 5 1 2
Texte 6 4 7 0 0 0
Texte 7 3 6 1 1 0
Texte 8 6 6 3 0 0
Texte 9 2 1 0 1 2
Texte 10 4 5 1 1 0
Moyenne 2.8 5.4 1.5 1.1 0.9

-386-
3. Pour une meilleure éducation/
formation professionnelle
LE STAGE DANS LES PROGRAMMES D’ENSEIGNEMENT
DES DÉPARTEMENTS DE FRANÇAIS: ASSURE-T-IL
SON RÔLE?

ĐANG Thi Thanh Thuy


Université des Langues et d’Études Internationales -
Université Nationale du Vietnam à Hanoï

Résumé:
Le stage fait partie intégrante du cursus universitaire. Il est considéré comme
la période de transition de l’école vers le marché du travail. Différents documents
administratifs et universitaires précisent que l’objectif du stage est de «permettre aux
stagiaires de mettre en pratique leurs connaissances théoriques», de «favoriser la
professionnalisation des études» et de «faciliter la future insertion professionnelle
des jeunes diplômés». Mais que doit-on comprendre par stage? Y a-t-il un seul
ou plusieurs types de stage? En cas de pluralité, ont-ils les mêmes objectifs? Peut-
on évaluer les apports des stages en termes de formation, de socialisation et de
professionnalisation? Dans le cadre de cet article, nous essaierons de clarifier les
enjeux du stage de fin de cursus universitaires en nous appuyant sur les analyses de
nos entretiens auprès des responsables du personnel des établissements d’accueil
de stagiaires et sur celles des rapports de stage de fin du cursus universitaire des
étudiants en dernière année du département de français de l’ULEI.
Mots-clés: stage, apports, enjeux, stagiaires, insertion professionnelle

Introduction
Ces dernières années, beaucoup d’universités vietnamiennes
ont effectué des réformes de leurs cursus universitaires afin de
Communications de dimension spécifique

développer l’esprit d’entreprendre des étudiants et de faciliter leur


insertion professionnelle. Elles ont ainsi procédé à des mises à
jour des contenus des matières à enseigner et à l’introduction
de méthodes d’enseignement dites innovantes. Pourtant, il
semble que pour plusieurs universités, le stage ne soit pas au
cœur de ces changements tandis qu’il constitue une période
incontournable dans toute formation universitaire pour son rôle
de lien entre l’école et le marché du travail.
Dans tous les cursus universitaires, le stage est décrit
comme un dispositif pédagogique permettant aux stagiaires
d’obtenir des expériences professionnelles correspondant à leur
formation. Cependant à la sortie de l’école, les jeunes diplômés
en général trouvent difficilement un premier emploi. Les recruteurs
les refusent souvent pour cause de manque d’expériences, de
compétences professionnelles et de connaissances des réalités
du marché du travail entre autres. Les jeunes diplômés des
départements de français n’échappent pas à cette situation.
Serait-il temps de porter plus d’attention aux stages des étudiants
des départements de français, de (ré)évaluer les apports positifs
du stage de fin du cursus universitaire et d’identifier ses limites
vis-à-vis de la question d’insertion professionnelle?
Qu’est-ce que le stage?
Le stage est défini dans différents dictionnaires et programmes
d’enseignement comme «une période d’études pratiques des
candidats nécessaires à l’exercice de certaines professions libérales
ou publiques», ou «une période pendant laquelle une personne
exerce une activité temporaire (dans une entreprise) en vue de sa
formation ou de son perfectionnement professionnel», ou encore
«une période de formation professionnelle».
Patrice Pelpel (1989) parle de cinq types de stage - stage
de visite, stage de sensibilisation, stage d’observation, stage en
situation et stage en responsabilité - dont la durée peut aller de

-389-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

quelques heures à plusieurs mois. Il précise aussi que chaque


type de stage a ses objectifs: de concrétiser l’enseignement à
prendre des initiatives et être évalué, en passant par prendre
contact avec un milieu nouveau, par recueillir des données et par
s’essayer en situation réelle.
La définition du stage proposée par le Conseil de l’Éducation
et de la Formation en Communauté française de Belgique (Le
CEF)1 est très précise et prend en compte des relations stagiaire-
opérateur-entreprise. L’avis 109 daté de juin 2010 de ce Conseil
définit quatre types de stage regroupés en deux familles:

Source: Avis N0 109, Conseil du 25 juin 2010, CEF.

Ce Conseil décrit également les critères et les caractéristiques


de chaque type de stage:

1 Le CEF est un conseil consultatif rassemblant 28 organisations membres http://www.cef.cfwb.be/.

-390-
Communications de dimension spécifique

Découverte Transition vers


Type Détermination Formation
métier l’emploi
Confirmation
du projet
Emergence Réalisation
professionnel, Réalisation d’un
Objectifs d’un projet du projet de
émergence projet de travail
professionnel formation
du projet de
formation
Définir des
Définir des activités Définir des
Définir des activités permettant activités
activités permettant la permettant
- la mise en
permettant la découverte du la mise en
Critères

application et/
découverte métier et tester application et/
Contrat ou l’acquisition
du métier se et développer ou l’acquisition
pédagogique de compétences
plaçant dans la capacité de compétences
professionnelles
un processus du stagiaire professionnelles
du métier
d’orientation à entrer en propres au
structuré formation - la découverte poste de travail
qualificative de la réalité du occupé
métier
Capacité
Compétences Compétences
Compétences de choix, Compétences
professionnelles professionnelles
visées connaissance transversales
transférables spécifiques
de soi
Avant une
En
formation Isolé ou suite à
préformation, En cours de
Moment qualifiante une formation
en début de formation
Caractéristiques fréquemment observées

ou la mise à qualifiante
formation
l’emploi

Certificative
(L’évaluation
peut ou non
intervenir dans Sommative
l’évaluation (visant à
finale de la enregistrer
formation, les acquis de
Evaluation Pronostique Formative mais les acquis l’apprenant pour
d’apprentissage qu’il puisse les
devraient figurer faire valoir lors
sur un document d’une recherche
pouvant figurer d’emploi)
le «passeport
formation» du
stagiaire.)

Source: Avis N0 109, Conseil du 25 juin 2010, CEF.

-391-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Dans les programmes d’enseignement des départements


de français au Vietnam, le stage est souvent associé au stage
de fin de cursus universitaire (dont la durée minimale est de 30
jours) et constitue en général un module de 3 à 6 crédits pour
les étudiants en dernière année. Aucun autre type de stage ne
figure dans ces programmes d’enseignement. C’est sans doute
la raison pour laquelle lorsque les étudiants parlent du stage, ils
pensent souvent au stage de leur fin de cursus universitaire et non
aux autres types de stage. De même, lors de nos entretiens avec
des responsables du personnel des entreprises qui accueillent
ou recrutent des stagiaires, nous constatons que lorsque ces
personnes parlent des stages des étudiants ils parlent aussi du
stage de fin de cursus universitaire de ces derniers.
Si nous adoptons la typologie de Patrice Pelpel et celle du
CEF, il nous est très difficile de classer le stage de fin du cursus
universitaire des étudiants des départements de français selon
les critères, les objectifs ou les caractéristiques proposés dans
leur typologie, car il semble que leur stage de fin de cursus
participe de tous ces types de stage.
En effet, en lisant la description du module «stage» dans
différents programmes des départements de français, nous
trouverons qu’elle est très succincte par rapport aux autres
matières. Nous n’y trouverons souvent que quelques lignes
présentant les objectifs de ce module (à savoir, permettre
aux stagiaires de «mettre en pratique leurs connaissances
théoriques», de «découvrir les entreprises du domaine en lien
avec la formation», de «favoriser la professionnalisation des
études», de «faciliter la future insertion professionnelle des
jeunes diplômés»). Mais aucunement les caractéristiques du
stage, ni les compétences visées ni les tâches à accomplir
par les stagiaires au cours de leur stage. En d’autres termes,
avant et pendant le stage, les étudiants ne sont pas clairement
informés des objectifs à atteindre, des tâches à accomplir, des

-392-
Communications de dimension spécifique

compétences à développer. Cela cause en réalité certaines


difficultés dans le déroulement du stage des étudiants et dans
le contrat entre l’école et l’établissement d’accueil. Par exemple,
la plupart de temps, les stagiaires doivent se débrouiller pour
réaliser les tâches «réelles» dont ils n’ont jamais entendu parler
pendant les cours à l’école.
Quels sont les apports et les limites du stage de fin du cursus
universitaire du Département de français de l’ULEI?
Quelle que soit sa définition, personne ne nie le rôle du stage:
relier l’école et le marché du travail. Pour le cas du Département
de français de l’ULEI, nos analyses des 113 rapports de stage
des étudiants de la promotion QH2014 et des échanges avec eux
nous permettent de relever plusieurs points positifs.
D’abord, le stage constitue un outil pédagogique qui sert
à compléter la formation universitaire. En effet, nos étudiants
insistent sur le fait que la maîtrise du français est très importante
pour la réussite de leur stage. Ils affirment que le stage leur
demande de mobiliser la compétence de communication à la fois
à l’écrit et à l’oral, mais celle à l’oral est plus souvent mobilisée.
- Nous avons différentes activités: présenter des services
aux clients, faire des exposés, traduire des textes, rédiger des
articles…
- Nous devons utiliser le français pendant notre stage pour
expliquer les services aux clients, pour écrire des emails…
Les étudiants qui ont fait des stages dans les agences de
tourisme et à l’Institut français ont affirmé qu’ils avaient beaucoup
d’occasion de parler aux francophones et anglophones, ce qui leur
permet d’être plus confiants en eux en communication. Ceux qui
ont travaillé à plein temps en français pendant leur stage pensent
que leur niveau de français est suffisant pour se lancer dans des
milieux où ils auront à utiliser le français. Pour eux, la période de

-393-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

stage a été une bonne occasion pour le perfectionnement non


seulement de leur français mais aussi de leur anglais.
- Les postes nécessitent que les personnels maîtrisent le
français. Donc, nous utilisons principalement le français pour
parler aux clients mais nous parlons aussi anglais dans certains cas.
Bref, les réponses des enquêtés font savoir que dans
plusieurs entreprises et établissements dont les clients sont pour
la plupart des étrangers et où il y a des employés de différentes
nationalités, la maîtrise des langues étrangères (surtout l’anglais
et le français) est indispensable. Par conséquent, les stagiaires
sont conscients qu’ils doivent savoir maîtriser ces langues pour
pouvoir réussir leur stage.
Nos étudiants affirment aussi que le stage est pour eux un
moyen d’apprendre d’autres connaissances, de mieux comprendre
ce qu’ils ont appris à l’école en les mettant en pratique, d’acquérir
des expériences professionnelles. Les statistiques montrent
que les lieux de stage de nos étudiants sont très variés. Ils ont
effectué leur stage dans plusieurs types d’entreprises et d’école:
petites et moyennes entreprises, société pluri/unipersonnelle
à responsabilité limitée, agence de voyages, tour opérateur,
institut français, journal en français, musées, hôtels, restaurants,
magasins, lycées, universités, centres de langues… Et ce, dans
différents domaines: presse, tourisme, hôtellerie, restauration,
administration, commerce, économie, éducation...
Lieu de stage
Tour opérateur Amica travel
Agence de voyage Asia soleil travel
Le musée d’Ethnographie du Viet Nam
Société unipersonnelle à responsabilité limitée Nguyên Vinh
Société pluripersonnelle à responsabilité limitée Découverte de l’Indochine
Société unipersonnelle à responsabilité limitée Minh Nhật
Agence de voyage Tầm nhìn Viễn Á

-394-
Communications de dimension spécifique

Société unipersonnelle à responsabilité limitée Vietnamtour


Agence de voyage Discovery indochina
Société unipersonnelle à responsabilité limitée Peal asia
Entreprise Ever land
Société unipersonnelle à responsabilité limitée Idea Care Vietnam
Agence de voyage Horizon Vietnam Travel
Hôtel Intercontinental Hanoi Westlake
Hôtel Hà Nội
Société unipersonnelle à responsabilité limitée Sơn mài Thu Hương
Vietnam Illustré
Hôtel Pan Pacific
Palais du gouvernement général
Resort
L’Institut français du Vietnam
Le journal Le courrier du vietnam
L’école annexe à Hanoï
Lycée Lương Văn Tụy - Ninh Binh
Département de Langue et de Culture françaises
Source: Nguyen Tra My, 2018, Mémoire de fin d’études universitaires.

En analysant les rapports de nos étudiants, nous trouvons


que les évaluations et les avis des établissements d’accueil sont
souvent très positifs vis-à-vis de leur capacité d’adaptation à la
fois sur le plan linguistique et professionnel. Cela signifie que
nos étudiants auront le choix entre différents postes d’emploi
ainsi que des opportunités de trouver un emploi dans différents
domaines.
Ensuite, les rapports de nos étudiants nous permettent de dire
que leur stage de fin d’études favorise l’insertion professionnelle.
Nos étudiants constatent que le stage est l’occasion de connaître
des responsables, des personnes qui les aident à mieux
comprendre le marché du travail, à vérifier leurs compétences
et à comprendre plus clairement ce qu’ils veulent faire après la
sortie de l’école.

-395-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Nous avons beaucoup appris pendant le stage. Nous


connaissons des gens, nous savons ce qui passe dans les
entreprises.
- Notre niveau de français est amélioré. La période de
stage a été une bonne occasion pour les étudiants dans leur
perfectionnement de connaissances et de leur français.
- Mes amis ont travaillé dans des milieux leur permettant de
pratiquer non seulement le français mais aussi d’autres langues:
anglais, espagnol.
Enfin, le stage est pour nos étudiants une occasion de se
découvrir. Les contacts avec différentes personnes leur donnent
des leçons de savoir-vivre. Ils apprennent à se maîtriser, à
négocier, à écouter… à gagner en maturité.
Il convient néanmoins de souligner que plus de la moitié
des stagiaires affirment qu’ils rencontrent des difficultés de tous
ordres (linguistique, professionnel, socioculturel).
- Il faut avouer que notre niveau de français est insuffisant.
- Plusieurs stagiaires manquent des connaissances socioculturelles
et des connaissances en spécialité. Ils ont aussi des difficultés d’ordre
linguistique mais elles ne constituent pas de grands obstacles pour leur
stage.
- Plusieurs étudiants de notre promotion ne sont pas prêts
dans l’intégration dans le monde de travail francophone.
- Beaucoup parmi mes amis n’ont pas le niveau de français
suffisant pour travailler dans les milieux francophones qui exigent
une bonne maîtrise de la langue française.
Plusieurs stagiaires souhaitent avoir des stages de «sensibilisation»
avant le stage officiel et plus de soutien de l’enseignant responsable.
Certains stagiaires disent que la durée du stage de six semaines ne
permet pas aux étudiants d’améliorer leurs compétences linguistiques

-396-
Communications de dimension spécifique

et professionnelles. Nous avons noté les mêmes remarques chez les


responsables du personnel des établissements d’accueil des stagiaires.
- La durée de six semaines est insuffisante pour que les
stagiaires apprennent à connaître le travail et améliorent des
aptitudes, des connaissances.
- Je souhaite prolonger la durée du stage actuel.
Enfin, le manque de connaissances concernant le milieu
professionnel constitue aussi une cause de leur manque de
confiance. Les difficultés mentionnées par nos stagiaires sont
en réalité majoritairement d’ordre socioculturel. De plus, la
«discordance» entre l’école et le marché du travail les met parfois
dans des situations très critiques (ne pas avoir de compétences
adéquates pour résoudre les problèmes rencontrés, ne pas avoir
d’expériences pour faire face à des situations imprévues, ne pas
bien connaître les codes de communication entre les locuteurs
de différentes cultures…).
Après la période de stage, près de deux tiers des étudiants
pensent que leur niveau de français est insuffisant pour pouvoir
se lancer tout de suite dans des milieux où ils auront à utiliser
leur français.

Auto-évaluation des enquêtés de leur niveau de français en vue de l’intégration


dans le monde du travail francophone

(Source: Nguyen Tra My, 2018, Mémoire de fin d’études universitaires)

-397-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Pour conclure
Nous pouvons dire que le stage de fin de cursus universitaire
de nos étudiants constitue un pas vers le marché du travail. Il est
un outil pédagogique facilitant l’insertion professionnelle. Il permet
aussi au stagiaire une découverte de soi et une autoévaluation.
Il est indéniable que le stage engendre des apports à la fois en
termes de formation, de socialisation et de professionnalisation.
Pourtant, dans le cadre de notre travail, nous n’avons pas pu
«mesurer» ni évaluer précisément le degré de ces apports. Les
résultats de notre recherche ont montré qu’un seul stage à la fin
du cursus universitaire n’était pas suffisant pour que les étudiants
soient confiants en compétences linguistiques, professionnelles
et socioculturelles afin de se lancer dans le marché du travail
après la sortie de l’université. Nos jeunes diplômés trouvent
difficilement un travail correspondant à leur formation et à leurs
compétences. Et en réalité, plusieurs jeunes diplômés en français
se trouvent au chômage après la sortie de l’école. Nos analyses
montrent aussi que les stagiaires ont besoin de types de stage
variés, organisés à différentes étapes du cursus universitaire et
visant des objectifs précis en fonction de chaque type de stage.
Il nous apparaît donc nécessaire de creuser la question afin de
(re)définir le rôle des stages en général, et de celui de fin du
cursus universitaire en particulier, en tenant compte du rôle et
des apports respectifs des universités et des entreprises.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Barbusse Béatrice et Glaymann Dominique, 2012, «Les
stages offrent-ils une réponse pertinente aux défis de la
professionnalisation des études supérieures?». In Quenson
Emmanuel & Coursaget Solène (dir.). La professionnalisation
de l’enseignement supérieur: De la volonté politique aux formes
concrètes. Toulouse: Octarès, 75-88.

-398-
Communications de dimension spécifique

2. Briant Vincent (de) et Glaymann Dominique, 2013, Le stage.


Formation ou exploitation? Presses universitaires de Rennes.
3. Escourro Nicole, 2008, Le stage: lien privilégié entre formation
et emploi: Article faisant suite à la présentation au Colloque
RESUP à Dijon, Juin 2008. Hal-00494995.
4. Escourro Nicole, 2009, L’importance du stage dans l’insertion
professionnelle des étudiants, Université de Paris X Nanterre,
CREF (EA 1589) Centre de recherche éducation-formation.
5. Laflamme Roch, 1999, La formation en entreprise, Presses
de l’Université Laval.
6. Nguyen Tra My, 2018, La place du français dans la période de
stage des étudiants sortants du Département de Langue et
de Culture françaises, Mémoire de fin d’études universitaires
sous la direction de Dang Thi Thanh Thuy.
7. Pelpel Patrice, 1989, Les stages de formation, Paris, Bordas.
Sitographie
1. http://hueuni.edu.vn/portal/vi/index.php/Program/Detail/
id/220.html
2. http://www.bassinefe-namur.be/sites/default/files/stages/
cef_avis_109.pdf
3. http://www.hanu.vn/vn/mnu-khoa-dao-tao/204-tuyen-sinh/
chuong-trinh-dao-tao/3397-chuong-trinh-dao-tao-nganh-
ngon-ngu-phap-he-cu-nhan-chinh-quy.html
4. https://drive.google.com/file/d/0B4yz2K6XqhcLcll2NE56S3ZkdFE/view
5. https://drive.google.com/file/d/0B4yz2K6XqhcLTEt1LVQ5T2xUMG8/view
6. https://edupass.hypotheses.org/334
7. https://journals.openedition.org/formationemploi/3514
8. https://www.cairn.info/revue-courrier-hebdomadaire-du-
crisp-2010-35-page-5.htm#

-399-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Dictionnaires
1. Dictionnaire du français contemporain, 1971. Paris: Larousse.
2. Dictionnaire Le Petit Larousse illustré, 2012. Paris: Larousse.
3. Dictionnaire Le Petit Robert, 1993. Paris: Le Robert.

-400-
POUR UNE CONTEXTUALISATION DU FOS:
LE FRANÇAIS À ORIENTATION TOURISME (FT)
À L’UNIVERSITÉ DE LANGUES ET D’ETUDES INTERNATIONALES, HANOÏ

ĐINH Hong Van


Université de Langues et d’Etudes Internationales (ULEI)-
Université Nationale du Vietnam à Hanoï (UNVH)

Résumé:
Pour renforcer la qualité et l’efficacité de l’enseignement/apprentissage
du français et rehausser l’employabilité de nos diplômés, nous procédons
actuellement au Département de français de l’ULEI-UNVH des réformes
importantes des programmes de formation. Les cours de français à orientation
tourisme (FT) bénéficient de notre attention particulière, car les diplômés de cette
filière ne répondent pas toujours aux attentes des employeurs. Récemment, au
lieu d’enseigner un français de spécialité (FS) de tourisme pur et simple comme
avant, nous avons décidé d’apporter des changements à la fois dans les contenus
et dans la méthodologie pour nos cours de FT. Cet article relate la démarche de
construction de ces cours de FT de notre Département de français en vue des
remarques et suggestions pour des ajustements et/ou corrections nécessaires.
Mots clés: FOS - français à orientation tourisme - compétence de communication
- besoins des apprenants - activités didactiques.

1. Introduction
Avec l’ouverture du Vietnam sur le monde, le tourisme
est devenu un des secteurs très développés et surtout un des
débouchés intéressant beaucoup d’étudiants en français. Les
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

besoins des travailleurs francophones dans ce secteur ne


cessent d’augmenter avec le nombre grandissant de touristes
francophones. Face à cette situation, le Département de français
de l’ULEI-UNVH a créé une filière de français à orientation
tourisme pour former des guides touristiques et répondre ainsi à
un besoin social.
Cependant, beaucoup de diplômés de cette formation
n’étaient pas à la hauteur de la demande des employeurs car
s’ils avaient des compétences en langue, leur français et leur
capacité professionnelle n’étaient pas exactement ce que le
métier de guide touristique exigeait. En effet, si la filière de FT
a été créée, les cours étaient dispensés par des professeurs
de français langue étrangère (FLE), avec le seul appui des
manuels du français de l’hôtellerie et de la restauration. De là,
les spécificités langagières, culturelles et professionnelles n’ont
pas été suffisamment prises en compte, menant à une maîtrise
insuffisante de savoirs et de savoir-faire du domaine touristique.
Nous étions donc dans l’obligation de repenser cette formation.
Nous avons d’abord pensé à introduire dans nos cours le FOS tel
que présenté par Mangiante J.-M. et Parpette C. dans leur ouvrage
«Le français sur objectif spécifique» de 2004. Mais en examinant
le FOS dans tous ses aspects, il nous paraissait ne pas convenir
tout à fait à nos formations, dû à la fois au niveau de langue de nos
étudiants et à nos objectifs de formation. Aussi, nous nous sommes
demandé quelle démarche adopter pour construire des cours qui
ne sont ni du FLE, ni tout à fait du FS ou FOS et répondraient
bien à notre double objectif de meilleures qualités langagière et
professionnelle de nos formés pour le métier de guide tourisque.

2. Particularités du FOS
Tout d’abord, le FOS s’est développé dans une optique
tout à fait professionnelle. C’est pour répondre par exemple aux
besoins immédiats d’une entreprise cherchant à former son

-402-
Communications de dimension spécifique

personnel. Souvent, l’initiative d’un cours de FOS est prise par un


employeur qui demande à un enseignant-formateur de concevoir,
puis de dispenser un cours de langue à des fins professionnelles,
en général pour des gens qui ont déjà des expériences dans le
métier concerné:
On parle de Français sur Objectifs Spécifiques lorsqu’on est face à
une demande de formation, qui émane du terrain (institution, université,
entreprise), qui est destinée à un public précis, clairement identifié, et qui a un
lien direct avec un objectif de sortie. Le lien étroit avec les besoins futurs des
apprenants, dans le cas du FOS, a bien sûr des incidences sur la construction
du programme d’enseignement, la contrainte exercée par le milieu cible étant
déterminante.» (Carras C. Tolas J, Kohler P. Szilagyi E.: 101).

Par ailleurs, le FOS


relève d’une démarche spécifique d’élaboration de cours à partir d’une
demande précise de formation qui nécessite une focalisation sur certaines
situations de communication ne relevant pas nécessairement du monde
professionnel et caractérisées par une situation d’urgence. (Mangiante, J.-M.,
Parpette C. 2004: 2).

Le public a des besoins urgents, mais il a aussi des objectifs


précis et clairement identifiés, qu’il doit atteindre dans un laps de
temps limité, dépassant rarement quelques mois. Ce qui implique
un enseignement intensif dont le contenu est strictement délimité
par les objectifs langagiers et professionnels visés. L’élaboration
d’un programme est adaptée à chaque demande et l’enseignant
devient alors concepteur d’un matériel pédagogique nouveau.
Celui-ci entre dans un domaine professionnel, y découvre les
acteurs, les situations, surtout les échanges langagiers qui y sont
produits, puis de là construit son cours en classe.
Cependant, ce n’est pas exactement notre situation au
Département. Nos enseignants ne sont que des professeurs de
FLE, et nos étudiants n’ont aucune expérience du métier de guide
ou du tourisme. Il faut donc tout fournir et aux enseignants et aux
étudiants: à la fois la langue du métier et les connaissances de
base indispensables pour son exercice. Par ailleurs, être guide
touristique au Vietnam n’est le même que l’être en France ou

-403-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

dans un milieu francophone, européen ou autre. C’est comme


cela que les manuels de FOS, venant en général de France, ne
conviennent pas tout à fait à notre contexte de formation.

3. Les points communs entre le FLE et le FOS


Cependant, il nous semble qu’il y a des similitudes notoires
entre l’enseignement/apprentissage du FLE et du FOS. Cela
réconforte l’idée que dans notre contexte, si nous parvenons à
établir des principes méthodologiques clairs, nos collègues et
nous, tous enseignants de FLE, serons capables de donner des
cours de FT efficaces et atteindre nos objectifs de formation.
Selon notre étude, les principales similarités entre le FLE et le
FOS seront comme suit:
3.1. Des enseignements fondés sur les besoins
de communication des apprenants
La première similitude est que les deux types de français
préparent à intégrer la vie: sociale en cas du FLE, et professionnelle
pour le FOS. L’enseignement du FLE met l’accent sur les situations
sociales dans lesquelles les apprenants seront amenés à utiliser le
français: contacts administratifs, amicaux, commerciaux; recherche
de logement, achats, loisirs; découverte de faits culturels, etc. C’est
le même principe qui détermine la démarche du FOS: intégration
à une profession, d’abord par la connaissance des besoins en
communication, aussi bien des employeurs que des travailleurs
dans un métier concret.
3.2. Le développement d’une compétence de communication
Actuellement, les cours de FLE ou FOS ne se limitent plus
à faire acquérir aux apprenants des connaissances linguistiques
mais cherchent surtout à développer la capacité à communiquer.
Le FLE vise une compétence de communication dans des
situations ordinaires de la vie sociale et le FOS construit son
matériel d’enseignement autour des situations de communication
professionnelle.

-404-
Communications de dimension spécifique

3.3. La prise en compte de la dimension culturelle


Le FLE et le FOS accordent une attention particulière à la
dimension culturelle, car c’est primordial pour une communication
efficace. Présente en FLE sur divers plans, à travers les profils
sociologiques variés des locuteurs, les problèmes de société...,
la préoccupation culturelle - et surtout interculturelle maintenant
- est aussi claire en FOS, dans la mesure où les programmes
de FOS visent à intégrer les apprenants étrangers dans un
environnement professionnel français ou francophone.
3.4. Le recours aux discours authentiques
La quatrième similitude entre le FLE et le FOS réside dans
l’importance accordée aux documents authentiques. En FLE, la
recherche d’une plus grande authenticité est le souci principal
de la méthodologie communicative: dialogues fabriqués mais à
partir des situations, mises en scène, échanges verbaux, faits
culturels réels... et surtout l’introduction tels quels des documents
sociaux: publicités, articles de presse, photos, BD, etc. toutes
les fois que c’est possible. En FOS, comme les cours traitent
des situations professionnelles peu connues ou non pratiquées
par lui-même, l’enseignant est obligé de partir des données
authentiques recueillies sur le terrain-même et s’appuyer dessus
pour constituer son matériel pédagogique.
3.5. Le développement des échanges entre les apprenants en classe.
Dans les cours de FLE conduits selon l’approche communicative,
le grand souci est de créer des situations de communication réelles
et naturelles en classe puis d’y impliquer le plus possible les
apprenants. De là, les échanges enseignant-apprenants, c’est-à-
dire la communication didactique de direction verticale, est à réduire
au profit des échanges entre étudiants. Ces interactions apprenants-
apprenants sont encore renforcées si la classe est menée dans
une perspective actionnelle: les concertations entre apprenants
devront être plus nombreuses et variées en vue de la réalisation

-405-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

d’un projet comportant des tâches différentes (discussions sur


comment réaliser le projet, qui fait quoi, quand; où chercher des
documents; puis quelles interviews; rédaction de lettres, messages,
tracts; présentations orales, écrites à réaliser...). Le FOS réinvestit
largement ce principe, sauf que les projets et tâches seront de
caractère résolument professionnel, ce qui rend la communication
encore plus proche des celle dans la réalité.

4. Une solution pour enseigner le FT:


la démarche de contextualisation préconisée
Des considérations et analyses des particularités et
similitudes entre le FLE et le FOS ci-dessus, nous avons trouvé
qu’il était possible d’élaborer un programme de cours de français
de tourisme selon la démarche de FOS pour le contexte de
notre Département et de l’appliquer dès le début de la 3e année,
au lieu de faire deux années de FS pures et simples avec peu
d’efficacité comme c’était déjà signalé. Ce seront des cours
de français à mi-chemin entre le FLE - pour que nos étudiants
continuent à approfondir la langue apprise, le français - mais
avec une démarche FOS pour permettre l’intégration immédiate
aux différents secteurs du tourisme dès la sortie de l’université.
Pour ce faire, l’élaboration de notre matériel pédagogique et
la conduite de nos cours FT s’appuieront sur deux référentiels
que nous avons à notre disposition: un référentiel-métier qui décrit
l’ensemble des activités, aptitudes, savoirs et savoir-faire propres
au métier de guide touristique, et un référentiel des compétences
nécessaires à l’exercice de ce métier. Ces référentiels servent
de repères dans chacune des étapes suivantes de l’élaboration
des programmes et cours: analyse de la demande; analyse des
besoins des apprenants; collecte et analyse des données; et
élaboration des activités didactiques.

-406-
Communications de dimension spécifique

4.1. 1re étape de l’élaboration du programme:


l’identification de la demande

Il existe des besoins et des attentes des employeurs auxquels


l’établissement de formation doit absolument répondre. Dans
notre cas, pour que nos étudiants puissent exercer le métier de
guide touristique après la sortie, il faut d’abord les former à une
compétence de communication de haut niveau en français. Il y a
d’abord à résoudre le problème de comment mener les débutants
- la majorité de nos étudiants étant plus ou moins débutants en
français à leur entrée à l’université - au niveau intermédiaire et
autonome en français à l’issue de la formation. Cependant, plus
important encore pour notre programme de FDT, c’est de voir
comment le français appris pourrait être utilisé par nos étudiants
dans des situations professionnelles et surtout quel type/variété
de ce français qu’ils auront à utiliser, et pour quoi faire.

Pour ce faire, nous avons fait un recensement et une collecte


des données langagières dans des sources variées: d’abord
dans les ouvrages de recherches (mémoire de master, thèses)
pour les principes théoriques sur ce français, ensuite dans les
manuels et méthodes de français du tourisme; et surtout à travers
des entretiens avec les professionnels francophones et français
de ce métier. L’analyse de ces données est fondamentale pour
l’élaboration d’un programme de FOS, puisqu’il ne saurait y
avoir de programme correspondant aux besoins des apprenants
sans une analyse des discours écrits et oraux en usage. Pour
Mangiante et Parpette (2004: 46), c’est effectivement le centre
de gravité de la démarche, [parce qu’elle] confirme, complète,
voire modifie largement l’analyse des besoins [mais aussi] parce
qu’elle fournit les informations et discours à partir desquels sera
constitué le programme de formation linguistique.

-407-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

4.2. L’analyse du niveau de langue réel des étudiants


et de leurs besoins langagiers
C’est cette analyse qui permet de savoir où en sont nos
étudiants en matière de langue et aussi en connaissances
professionnelles et de décider des savoirs, savoir-faire et savoir-
être à introduire dans le programme, pour que après deux ans
nos étudiants soient capables de faire face aux situations de leur
métier. En effet, comme le souligne Lehmann D. (1993: 115), à
partir de leur 3e année universitaire, nos étudiants «apprennent
DU français et non pas le français… POUR en faire un usage
déterminé dans des contextes déterminés». Ces contenus
linguistiques et langagiers ont été ensuite croisés avec les tâches
futures des diplômés, telles qu’identifiées dans les référentiels,
ce qui a permis un enseignement plus ciblé et répondant de plus
près aux besoins de nos étudiants.
4.3. Troisième étape: Collecte des données langagières du métier
Dans cette étape, nous avons coopéré avec les professionnels
pour identifier les types de discours récurrents du tourisme. C’est
en fonction de ces données langagières et culturelles que sera
constitué le programme de formation en langue. Pour cela, nous
sommes allés sur le terrain, nous informer des différentes tâches
du métier du tourisme, surtout des discours qui s’y pratiquent,
recueillir les écrits professionnels, enregistrer, filmer des séances
de travail, interviewer les employés, chefs de service, etc.
Après, les données collectées ont servi telles quelles dans
notre élaboration d’activités didactiques, mais souvent elles ont
été adaptées en fonction des spécificités, des objectifs et du niveau
de nos étudiants. Les nouvelles technologies de communication
et d’information, Internet, Facebook, Twitter... nous ont offert
également beaucoup d’autres possibilités: échanges avec des
professionnels pour leur demander des conseils quand nécessaire;
recueil de données et documents authentiques, variés et gratuits
pour compléter ou enrichir la batterie d’exercices.

-408-
Communications de dimension spécifique

4.4. Analyse des données recueillies et élaboration didactique


L’analyse des données collectées constitue une étape à
part entière dans ce travail, compte tenu de la nouveauté de
nombreux discours utilisés comme supports pédagogiques dans
les formations de FOS. Mais l’implication directe des résultats de
cette analyse dans l’élaboration des activités conduit à traiter ces
deux étapes de façon conjointe, selon le conseil de Mangiante
J.-M. et Parpette C. (2004: 78). Etant donné que la classe est
l’aboutissement de toutes ces démarches, toutes les étapes
précédemment décrites ont été traduites en contenus, donc en
programmes et cours, comme l’a préconisé Tagliante (2006:
18), «les stratégies et les contenus d’enseignement dépendront
étroitement de l’analyse préalable des contextes d’utilisation du
français». Dans notre contexte, à partir des données recueillies
et analysées, nos enseignants ont pu sélectionner les situations
de communication à traiter, les aspects culturels à étudier, les
savoirs langagiers à développer et de là, construire leurs activités
d’enseignement.

5. En guise de conclusion
Une formation en FLE est indispensable, mais elle ne suffit
pas à fournir à nos étudiants des compétences langagières
requises par un métier. Par ailleurs, un cours de FS ou de FOS
proprement dit en matière de tourisme ne convient pas réellement
aux niveaux de nos étudiants et aux objectifs de nos formations.
Aussi, nous avons essayé, à partir des principes d’enseignement/
apprentissage du FLE, du FS et du FOS, d’élaborer des cours
FDT destinés à nos étudiants désirant intégrer le secteur du
tourisme à l’issue de leur formation.
Les premiers essais de la démarche relatée supra et les
efforts que nous avons tentés commencent à donner des résultats
encourageants: les étudiants de ces nouveaux cours FDT chez
nous ont été bien appréciés par les agences de voyages qui les

-409-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

ont accueillis en stage. Il nous reste maintenant de peaufiner


notre travail et de vérifier si les résultats finals de la formation
répondront adéquatement aux objectifs fixés par notre université
et à nos attentes personnelles, avant d’élargir cette démarche à
des échelles plus grandes.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. CARRAS C., TOLAS J., KOHLER P., SZILAGYI E. (2007),
Le français sur Objectifs Spécifiques et la classe de langue,
CLE International, Paris.
2. COURTILLON J. (2008). Elaborer un cours de FLE, Hachette,
Paris.
3. COSTE D. (1977), Analyse des besoins et enseignements
des langues étrangères aux adultes: A propos de quelques
enquêtes et de quelques programmes didactiques», in
Etudes de Linguistique Appliquée, n°27, Didier, Paris, 51-77.
4. LEHMANN D. (1993), Objectifs spécifiques en langue
étrangère, Hachette, Paris.
5. MANGIANTE J.-M, PARPETTE C., (2004), Le Français sur
Objectif Spécifique: de l’analyse des besoins à l’élaboration
d’un cours, Hachette, Paris.
6. TAGLIANTE C. (2006), La classe de langue, CLE International,
Paris.

-410-
ÉLABORATION DE LA GRILLE D’ÉVALUATION
SOMMATIVE DANS LA DIDACTIQUE DE LA TRADUCTION ET DE
L’INTERPRÉTATION AU DÉPARTEMENT DE FRANÇAIS - ULIS - VNU

DO Lan Anh
Université de Langues et d’Études Internationales -
Université nationale du Vietnam à Hanoï

Résumé:
L’évaluation joue un rôle primordial dans l’enseignement/apprentissage des
langues étrangères en général et de la traduction et de l’interprétation en particulier
car elle est étroitement liée à la formation et la rendra plus efficace. Pourtant, au
Département de français à l’Université de Langues et d’Études Internationales
(ULIS) - Université nationale du Vietnam à Hanoi (VNU), l’évaluation sommative
de la traduction et de l’interprétation gêne beaucoup les enseignants car les critères
d’évaluation des productions de traduction proposées par les apprentis-traducteurs
restent d’une grande généralité. Face à cette situation, nous voudrions proposer,
dans le cadre de cette communication, une grille d’évaluation sommative avec des
critères plus détaillés à la base des erreurs commises par les apprentis-traducteurs,
ce qui permettra aux enseignants d’évaluer de façon plus facile et exacte.
Mots-clés: évaluation sommative, erreurs, traduction, interprétation

1. Rôle de l’évaluation dans la traduction professionnelle


et dans la didactique de la traduction
Dans le processus d’enseignement/apprentissage des langues
étrangères, l’évaluation est étroitement liée aux objectifs de la formation.
En effet, Porcher affirme qu’ «aucun processus d’évaluation n’a de sens
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

s’il n’est pas en rapport avec les objectifs.» (Porcher, 1987: 36). Avec
des objectifs fixés, l’évaluation représente des résultats scolaires, les
connaissances et les compétences que l’apprenant a acquises dans
son processus d’apprentissage. Ainsi, une évaluation mal conduite
pourra engendrer des injustices qui ont des répercussions très graves
dans la vie future d’un étudiant.
Dans le monde de la traduction, «l’évaluation des traductions
constitue l’une des chasse-trapes fondamentales en traduction.
Lorsque le traducteur produit un texte, un ensemble de critères
orientent sa traduction» (Larose, 1998: 164). Les critères pour
l’évaluation en traduction pour les théoriciens, sont très différents
d’un auteur à l’autre. En effet, on peut mentionner tout d’abord
trois critères de traduction formulés par Tytler dans Essay on
the Principles of Translation (1791): 1. La traduction devrait être
une transcription/reproduction complète des idées de l’œuvre
originale. 2. Le style de l’écriture de la traduction devrait être du
même caractère que celui de l’original. 3. La traduction devrait avoir
le caractère aussi naturel que l’œuvre/ la composition originale
(Tytler, 1791, cité par Rakova, 2014: 40). À cela s’ajoutent trois
critères fondamentaux très connus donnés par Yan Fu (1898, cité
par Xu et Liu, 2004: 792) pour réussir dans la traduction à savoir
«fidélité, clarté et élégance» ou quatre critères de traduction
proposés par Flamand (1984): rendre fidèlement le sens du texte,
conserver le style et le ton de l’original, ne comprendre aucune
construction grammaticale incorrecte et s’exprimer dans une
langue qui ne laisse jamais soupçonner en aucune manière le
fait que c’est une traduction.
Pour faciliter les activités d’évaluation, les critères, selon
Larose, devraient être élaborés pour ne pas être trop compliqués
et difficiles à évaluer. C’est pourquoi, pour lui, «l’évaluation des
traductions se base sur deux grands paramètres: le respect de
la langue d’arrivée et le transfert du sens du texte original.»
(Larose, 1998)

-412-
Communications de dimension spécifique

Tout en partageant avec Larose, le Bureau des traductions


du gouvernement fédéral au Canada a créé le système canadien
d’appréciation de la qualité linguistique reposant sur la théorie de
la stylistique comparée (Sical) proposant des critères d’évaluation
assez simples: le transfert et la restitution.
Dans la didactique de la traduction, quel est l’état des lieux
de l’évaluation de la traduction? Les enseignants peuvent-ils
appliquer ces critères ci-dessus pour évaluer les productions
traduites par les apprenants?
Pour mieux connaître cette situation, nous avons fait, au
Département de français - ULIS - VNU, un petit entretien auprès de
4 enseignants du groupe Traduction-Interprétation et 4 enseignants
de langue qui ont été jurys de l’examen de fin semestre de
l’interprétation pour mieux savoir l’état des lieux de l’évaluation
sommative et leur espoir d’améliorer la qualité de l’évaluation
sommative dans la traduction/interprétation pour s’orienter vers la
professionnalisation dans la formation du métier. Pour ce faire, nous
allons utiliser la méthode descriptive pour avoir une vue générale sur
l’enseignement/apprentissage de la traduction et l’évaluation des
traductions des enseignants de traduction. L’analyse des réponses
des professeurs via l’entretien nous permettra de proposer des
pistes d’évaluation des traductions convenables au Département de
français.

2. Évaluation sommative de la traduction et de l’interprétation


au Département de français - ULIS - VNU
Au département de français - ULIS - VNU, l’évaluation sommative
de la traduction et de l’interprétation se réalise au mi-semestre et à la
fin du semestre.
Pour les cours de traduction et d’interprétation, les étudiants
doivent passer deux examens (examen de mi-parcours et examen de
fin semestre) pendant un semestre. Dans les examens de traduction,

-413-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

ils doivent traduire deux textes de 150 à 170 mots maximum du


français en vietnamien et du vietnamien en français (tableau 1). Les
notes divisées correspondent aux idées dans le texte source que les
apprentis-traducteurs doivent transmettre en langue cible.
Tableau 1: Barème de notation pour la traduction

Barème
Lễ hội Ẩm thực Hà Nội 2018 (0.5 point)

Nhằm tôn vinh và giới thiệu tới người dân Hà Nội, du khách trong nước và quốc tế về di sản văn hóa ẩm
thực Hà Nội, lễ hội ẩm thực Hà Nội năm 2018 sẽ diễn ra từ ngày 5/10 đến ngày 7/10/2018 tại Công viên Thống
Nhất. (2.5 points)
Tại lễ hội sẽ có các không gian văn hóa các làng nghề gắn với di sản ẩm thực tiêu biểu của Hà Nội kết hợp
với các hoạt động trình diễn của các chuyên gia ẩm thực.(2 points)
Tại không gian triển lãm sẽ trưng bày các tác phẩm nghệ thuật với chủ đề Hà Nội xưa và nay, những ký
ức về lịch sử, văn hóa nói chung và văn hóa ẩm thực nói riêng của Hà Nội. (2 points)
Không gian bán hàng sẽ trưng bày và giới thiệu các sản phẩm. Du khách sẽ được thưởng thức ẩm thực Hà
Nội và xem trình diễn một số loại hình nghệ thuật, trò chơi truyền thống. (2 points)
Lễ bế mạc sẽ được tổ chức vào 19h00 ngày 7/10/2018. (1 point)
(170 mots)
www.baodautu.vn

Dans les examens d’interprétation, l’évaluation sommative


se base sur 2 compétences: la compréhension et la réexpression.
La compréhension représente 80% et la réexpression 20% de la
note finale (tableau 2). Il n’y a pas de critères d’évaluation détaillés
auxquels les enseignants peuvent faire référence pour donner la
note aux apprenants.
Tableau 2: Feuille de notation individuelle pour l’interprétation
Feuille de notation

Nom Note
Phrase Phrase Phrase Phrase Linguistique Fluidité
N0 et Classe finale/
1/2 2/ 2 3/2 4/2 /1 /1
prénom 10
F-V
V-F
F-V
V-F

-414-
Communications de dimension spécifique

F-V
V-F
F-V

V-F

La majorité des enseignants interrogés (6/8) avouent


qu’ils rencontrent toujours des difficultés dans l’évaluation de
la compétence d’interprétation des apprenants par manque de
critères d’évaluation. Celle-ci est d’autant plus difficile pour les
enseignants qui ne font pas partie du groupe d’enseignement de
la traduction et de l’interprétation.
Pour l’évaluation de la compétence de la traduction, les
enseignants du groupe de traduction et d’interprétation (4/4)
trouvent l’évaluation des textes traduits des apprentis-traducteurs
difficiles car il n’y a que des notes divisées pour les idées dans
le document à traduire, aucun critère n’est précisé dans le
barème de notation et qu’il est temps pour tous les enseignants
interrogés (8/8) d’élaborer une méthode d’évaluation avec les
critères détaillés qui correspond bien à l’approche théorique de
la traduction appliquée dans la formation à la traduction et qui
répond bien aux objectifs fixés dans la formation du métier au
Département de français - ULIS - VNU.
Actuellement, au Département de français - ULIS - VNU,
l’enseignement/apprentissage de la traduction et de l’interprétation
est basé sur la théorie interprétative ou la théorie du sens proposée
par Seleskovitch et Lederer selon laquelle l’acte traduisant consiste
«à comprendre le texte original, à déverbaliser sa forme linguistique
et à exprimer dans une autre langue les idées comprises et les
sentiments ressentis» (Lederer, 1994: 11). C’est-à-dire, l’objet de
la traduction n’est plus les mots. Il s’agit du sens que le traducteur
doit traiter. Face à un texte, le traducteur doit prendre conscience de
dégager le sens d’un texte ou d’un discours, ensuite faire reproduire
ce texte efficacement en matière de structure et de contexte culturel
de la langue d’arrivée. Alors, la traduction est considérée comme

-415-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

une identité de sens et de réexpression de celui-ci dans la langue


d’arrivée.
Pour ces deux auteures, le processus de traduction est fondé
sur trois phases principales:
- Compréhension: décodage des signes linguistiques et saisie
du sens.
- Déverbalisation: oubli des mots et conservation du sens.
- Réexpression: reformulation du vouloir-dire en langue
d’arrivée d’une manière claire et exacte en matière de nuances
de la langue et de style.
Étant donnée la réalité de l’enseignement/apprentissage
de la traduction et la place importante de l’évaluation qui «est
considérée comme processus de la formation et non plus comme
processus dans la formation» (Vial, 1997b: 38), l’élaboration des
pistes d’évaluation des documents traduits à l’oral et à l’écrit par
les apprentis-traducteurs à la base de cette théorie ou autrement
dit sur les phases du processus de traduction est nécessaire
pour que les professeurs puissent l’utiliser dans l’évaluation
sommative.

3. Élaboration d’une grille d’évaluation dans la didactique


de la traduction et d’interprétation au Département de français - ULIS - VNU
Dans l’évaluation didactique, l’erreur occupe une place très
importante car l’évaluation des documents traduits est étroitement
liée à l’erreur. En effet, pour Gouadec (1989a), l’erreur dans la
traduction pourrait nuire à la «réputation» du traducteur. C’est la
raison pour laquelle de nombreux théoriciens étudient l’évaluation
des traductions à la base des erreurs commises par les
traducteurs. En effet, Nord (1991) propose les catégories d’erreurs
correspondant aux catégories des problèmes de traduction à
savoir les erreurs pragmatiques, les erreurs culturelles, les erreurs

-416-
Communications de dimension spécifique

linguistiques et les erreurs spécifiques aux textes particuliers.


D’autres auteurs dont Lee-Jahnke (1998) se basent sur les critères
tels que l’exactitude, la créativité et le skopos. De nombreux autres
auteurs comme Albir (1990), Delisle (1993), Gile (2005) ont classé
les erreurs de traduction en se basant sur les compétences en
traduction dans le processus de traduction (la compréhension et
la restitution).
Dans le processus de traduction et d’interprétation, l’erreur
peut être due à un problème de compréhension du texte original
ou un problème dans la restitution. Ainsi, Delisle (1993) définit
l’erreur de traduction comme «l’erreur de forme ou de fond
commise par inadvertance ou ignorance des connaissances
linguistiques censées être acquises par tout usager d’une
langue» (Delisle, 1993: 30).
Les erreurs que l’auteur peut citer dans la phase de
compréhension sont le contre-sens, le non-sens, le faux-sens,
l’omission, l’ajout et celles dans la phase de réexpression sont
l’ambiguïté, le barbarisme, le charabia, le pléonasme, le solécisme
et le zeugma. Parmi les erreurs abordées dans la phase de
compréhension, le contre-sens est l’erreur la plus grave qui
«attribue à un mot ou un groupe de mots un sens erroné ou à
trahir la pensée de l’auteur du texte de départ» (1993: 25), suivis
par le non-sens qui «donne une formulation en langue d’arrivée
totalement dépourvue de sens ou absurde» (Ibid., 26) et le faux-
sens qui est moins grave car il ne dénature pas complètement le
sens du texte de départ. L’omission et l’ajout sont les erreurs dues
au transfert partiel ou surtransfert et ils sont les moins graves.
Cette classification est assez claire mais l’identification des erreurs
dans la phase de réexpression proposées par Delisle est difficile
à appliquer dans les traductions du français en vietnamien et du
vietnamien en français produites par des apprenants car l’auteur
se base sur la transmission entre deux langues français et anglais.
Dans l’enseignement de la traduction aux apprentis-traducteurs,

-417-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

nous constatons qu’ils commettent souvent des erreurs à cause de


l’interférence entre les deux langues (le français et le vietnamien).
Vu les points forts et les points faibles de ces deux
classifications des erreurs ci-dessus, nous proposons la grille
d’évaluation assez simple avec des bonifications qui sont
accordées pour les trouvailles. Pour les erreurs concernant le
transfert du sens, elles peuvent être pénalisées de la manière
suivante: contre-sens et non-sens (-2 à -3), faux-sens (-1 à
-2), omission et ajout (-0.25 à -1), manque de connaissances
extralinguistiques (-0.5 à -2) et les erreurs dues à l’interférence et
l’orthographe (-0.25 à -1). Ainsi, nous pouvons élaborer la grille
d’évaluation des textes traduits comme suit:
Tableau 3: La grille d’évaluation des traductions proposées par les apprenants

Grille d’évaluation
Nom et prénom:
Classe:
Erreurs liées à la compréhension
…/ 8 points
Contre-sens -2 -2.5 -3

Non-sens

Faux-sens -1 -1.5 -2
Omission -0.25 -0.5 -1

Ajout

Manque de connaissances -0.5 -1 -2


extralinguistiques
Erreurs liées à la réexpression
… / 2 points
Interférences - 0.25 - 0.5 -1
Orthographe - 0.25 - 0.5 -1
Note total ……………./10

-418-
Communications de dimension spécifique

En observant cette grille, nous trouvons que le total des


points assigné à la traduction et le nombre des points qui va être
soustrait par les erreurs commises par les étudiants.
Cette grille d’évaluation présente plusieurs avantages. En
effet, il existe seulement deux critères d’évaluation et les types
d’erreurs ne sont pas compliqués. Ce qui rend l’évaluation
sommative des enseignants plus facile et exacte.
En guise de conclusion, l’évaluation de la traduction joue
un rôle très important dans la formation à la traduction et à
l’interprétation. L’élaboration d’une grille d’évaluation pas très
compliquée et facile à utiliser dans l’enseignement/apprentissage
de la traduction est indispensable.
La grille d’évaluation que nous avons proposée dans le
cadre de cette communication sera discutée au sein du groupe
d’enseignants de traduction et d’interprétation avant de les
mettre en place au Département de français - ULIS - VNU.
Nous espérons que ces pistes d’évaluation une fois appliquées
contribueront à améliorer les compétences de traduction des
apprenants de spécialité de traduction et d’interprétation et que
ces derniers auront une meilleure conscience sur le métier qu’ils
ont choisi d’exercer à l’avenir.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Delisle, J. (1993). La traduction raisonnée, «Pédagogie de
la traduction». Les Presses de l’Université d’Ottawa, Ottawa.
2. Délizée, A. (2011). A global rating scale for the summative
assessment of pragmatic translation at Master’s level: an
attempt to combine academic and professional criteria. in I.
Depraetere (ed), Perspectives on Translation Quality, Berlin/
Boston, Walter de Gruyter, p.9-24.

-419-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

3. Flamand, J. (1984). Qu’est-ce qu’une bonne traduction?.


Meta 29 (3), p.330-334.
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traduction littéraire en Chine. Meta 49 (4), p.786-840.

-420-
ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS DU MARKETING VIA LE
PROJET ENTREPRENEURIAL-UNE STRATÉGIE FACILITANT
L’INTÉGRATION DES ÉTUDIANTS DANS LE MONDE
PROFESSIONNEL

NGUYEN Thi Mi Dung


Université de Commerce du Vietnam

Résumé:
Afin d’améliorer l’enseignement/apprentissage du français du marketing à
l’Université de Commerce, et qu’il s’adapte bien aux exigences du marché de travail,
nous avons expérimenté un projet entrepreneurial à ce module durant 3 mois auprès
d’une classe de 35 étudiants. Inspiré de l’émission de «le bus de l’entrepreneuriat»
(chaîne nationale du Vietnam VTV3) et sur le concours entrepreneurial organisé en
2016 par l’AUF, ce projet se compose de 4 étapes: présentation du projet, étude du
marché, proposition du plan de marketing et concours dont le jury invité sont un
enseignant d’entrepreneuriat et un spécialiste de marketing de l’agence de tourisme
Easia. Il vise à améliorer non seulement les savoirs linguistiques, les compétences
communicatives, mais aussi les savoir-être et la motivation de nos étudiants.
Mots-clés: pédagogie du projet, entrepreneuriat, savoir-faire, savoir-être,
motivation

1. Problématique
Selon les statistiques du Ministère du Travail, des Invalides
et des Affaires sociales, plus de 200.000 nouveaux diplômés
n’arrivent pas en 2016 à trouver un travail au Vietnam. Le chômage
devient de plus en plus préoccupant pour plusieurs raisons dont
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

la principale réside dans le fait que la formation professionnelle ne


répond pas bien aux besoins réels du marché du travail en termes
de qualification et de qualité. Afin de faciliter la recherche d’emploi
de nos étudiants et d’améliorer la qualité de l’enseignement/
apprentissage du français de marketing à l’Université de
Commerce du Vietnam, nous avons cherché à découvrir l’état
des lieux de ce métier au Vietnam en menant des interviews
auprès de deux cadres de marketing en mai 2017. En dehors
des savoirs professionnels et linguistiques, ces derniers mettent
en valeur non seulement les compétences communicatives en
français, mais encore les savoir-faire des travailleurs (savoir-
planifier, travailler en groupe, faire l’exposé oral...) et les savoir-
être (savoir-communiquer, savoir organiser du temps, l’esprit
créatif, l’adaptabilité au travail, la positivité face aux pressions du
travail...). Pourtant, les compétences des nouveaux diplômés sont
jugées peu positives par ces spécialistes: manque de dynamisme,
attitude de travail inadaptée, manque de savoir-faire. Au niveau du
français, la plupart de nouveaux diplômés sont forts en grammaire
mais faibles en compétences de communication, l’écrit est meilleur
que l’oral mais le style d’écriture est à la vietnamienne, donc peu
compréhensible pour les clients francophones. Leur point le plus
faible est la confiance lors de la communication.
Cette situation inquiétante de nouveaux diplômés pourrait être
expliquée en partie par les résultats peu positifs de notre enquête
par questionnaire auprès de 86 étudiants de la 50è promotion
de la Licence de Management et de Gestion des Organisations,
spécialité du français commercial, de l’Université de Commerce,
qui venaient de terminer le module du français du marketing.
Seulement 19% des enquêtés sont satisfaits du cours de français
de marketing tandis que le reste en sont partiellement (62%),
peu (16%) ou même pas du tout (3%) satisfaits. Ils le trouvent
difficile pour plusieurs raisons: manque de vocabulaire (85%),
incompréhension du contenu due au niveau de langue (63%),

-422-
Communications de dimension spécifique

manque d’exercices d’entraînement (59%), motivation faible


(43%)… En fait, l’enseignement/apprentissage du français de
marketing connaît certaines limites et ne répond pas encore aux
attentes des étudiants ainsi qu’aux exigences des employeurs.
À la recherche des solutions pour y remédier, une étude
documentaire nous a amenées à un thème vraiment actuel
dans l’économie en général et dans le domaine de marketing en
particulier: l’entrepreneuriat, une mesure de créer des emplois,
de mobiliser des ressources, de développer des innovations et
d’augmenter le taux de croissance économique. Au Vietnam, on
connaît, depuis 2016, une campagne nationale de sensibilisation
à l’esprit entrepreneurial, à la création d’entreprise: 126.859
entreprises ont été créées en 2017. Selon le Rapport des indices
entrepreneuriaux de la Chambre de Commerce et d’Industrie
du Vietnam (2018), le taux d’activité des entreprises en trois
premières années est élevé au Vietnam, classé en 6è sur 54
pays étudiés. La focalisation grandissante des médias sur la
création d’entreprises contribue à orienter l’opinion publique
et les acteurs concernés. Dans le contexte où la formation
professionnelle francophone reste de plus en plus modeste par
rapport à celle en anglais, où les étudiants sont de moins en
moins motivés par le français à cause des difficultés en recherche
d’emploi francophone, le choix d’un thème actuel, intéressant qui
correspond à la spécialité et à leurs attentes pourrait encourager
les étudiants à mieux s’investir dans l’apprentissage du français
et faciliter leur intégration professionnelle.
Fortes de ces constats pratiques et théoriques, nous avons
décidé d’expérimenter une nouvelle méthodologie visant à
améliorer la qualité de l’enseignement/apprentissage du français
de marketing et notamment à répondre bien aux exigences du
marché de travail: appliquer un projet entrepreneurial au module
de marketing à l’Université de Commerce du Vietnam. Nous nous
sommes posé les questions de recherche suivantes:

-423-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Quels sont les impacts du projet entrepreneurial sur


l’apprentissage du français du marketing?
- Quels sont les impacts du projet entrepreneurial sur la
motivation des étudiants à apprendre le français du marketing?
Pour répondre à ces questions, nous avons fait une étude
documentaire, expérimenté le projet entrepreneurial et évalué
ses résultats.

2. Fondement théorique
Notre recherche se focalise sur deux concepts clés: la
pédagogie du projet et l’entrepreneuriat.
La pédagogie du projet: Le ministère français de l’Éducation
nationale (1992: 91) définit la pédagogie du projet comme «une
forme de pédagogie dans laquelle l’enfant est associé de manière
contractuelle à l’élaboration de ses savoirs. Son moyen d’action
est le programme d’activités fondé sur les besoins et les intérêts
des enfants, les ressources de l’environnement et débouchant
sur la réalisation concrète.» Cette définition met l’élève au centre
du processus de l’apprentissage dans lequel sa motivation
approuvée et son engagement favorisé est un élément décisif
pour déboucher sur un produit concret du projet.
L’entrepreneuriat: Fayolle et Verstraete (2005: 45) définit
«Entrepreneuriat: Initiative portée par un individu (ou un plusieurs
individus s’associant pour l’occasion) construisant ou saisissant
une opportunité d’affaires (du moins ce qui est apprécié ou évalué
comme tel), dont le profit n’est pas forcément d’ordre pécuniaire,
par l’impulsion d’une organisation pouvant faire naître une ou
plusieurs entités, et créant de la valeur nouvelle (plus forte dans
le cas d’une innovation) pour des parties prenantes auxquelles
le projet d’adresse». Cette définition intègre les caractéristiques
essentielles des modèles principaux de l’entrepreneuriat,
un thème complexe: la création d’organisation, l’innovation,
l’opportunité d’affaires, la création de valeur.

-424-
Communications de dimension spécifique

Schieb-Bienfait (2000), Schmitt et Bayad (2008) considèrent


que la pédagogie du projet semble trouver une place privilégiée
parmi les méthodologies de l’entrepreneuriat. En se basant sur la
pratique, la mise en situation, la confrontation à des problèmes,
cette pédagogie permet à l’apprenant d’acquérir les savoirs, les
savoir-faire et les savoir-être d’un entrepreneur.

3. Méthodologie de recherche
Une recherche-action, composée de 4 étapes, est menée
comme notre méthodologie de recherche sur l’enseignement du
français du marketing via le projet entrepreneurial.
3.1. Étape 1: Diagnostic de la situation-problème
Dans le but de détecter des problèmes de la situation de
l’enseignement/apprentissage de l’enseignement du français du
marketing à l’Université de Commerce, nous avons tout d’abord
fait une étude documentaire sur la situation de l’enseignement
/apprentissage du français de spécialité afin de comprendre le
contexte. Ensuite, nous avons mené une enquête par questionnaire
auprès de 86 étudiants de la 50è promotion qui venaient de
terminer le module du français du marketing pour soulever des
problèmes de la situation de l’enseignement/apprentissage
du français du marketing de la promotion précédente. Enfin,
nous avons fait faire le pré-test oral et écrit, compléter une
fiche signalétique pour découvrir les points forts et faibles des
étudiants de la classe expérimentale, c’est-à-dire des étudiants
de la 51è promotion de la Licence de Management et de Gestion
des Organisations de notre université. Leurs problèmes sont
nombreux: la faible motivation, l’hétérogénéité, les problèmes de
langue (surtout la production écrite), l’insuffisance de volumes
horaires, les thèmes du module du français du marketing loin de
la réalité du Vietnam…

-425-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

3.2. Étape 2: Élaboration d’un plan d’action

L’hypothèse de départ est que le projet de l’entrepreneuriat


pourra avoir des impacts positifs sur l’apprentissage du français
de marketing des étudiants de l’Université de Commerce. Une
expérimentation a été élaborée pour atteindre non seulement les
objectifs fixés dans le programme officiel mais aussi pour renforcer
la motivation et l’entraînement de bonnes attitudes nécessaires
à la vie professionnelle des étudiants dans le futur. Les idées de
notre projet, organisé sous forme de concours entrepreneurial,
s’appuient sur le programme du français de marketing en
s’inspirant sur l’émission de «le bus de l’entrepreneuriat» (chaîne
nationale du Vietnam VTV3) et sur le concours entrepreneurial
organisé en 2016 par l’AUF (cf. annexes 1, 2). En dehors des
supports proposés dans le manuel du département de français
Affaires.com (J.L. Penfornis, 2004) nous avons élaboré plusieurs
autres supports, authentiques pour la plupart, propices au thème
du projet: vidéos, exemples de l’étude de marché, documents
non-textuels, fiches techniques, contrat de projet, questionnaires
ou exercices supplémentaires.

3.3. Étape 3: Mise en æuvre du plan d’action

Le projet de l’entrepreneuriat, organisé en 4 étapes, a été


mis en essai du 19 février au 14 mai 2018 avec 13 périodes de
110 minutes et une période de concours de 220 minutes, pour
une classe de 35 étudiants en troisième année de la Licence
de Management et de Gestion des Organisations, spécialité du
français commercial de l’Université de Commerce du Vietnam.

-426-
Communications de dimension spécifique

3.3.1. Présentation du projet entrepreneurial et organisation des


groupes
Il s’agit d’une phase de définition et de planification du projet
pour les étudiants. Tout d’abord, ils ont compris les objectifs du
programme officiel du français de marketing via la découverte
rapide du sommaire et des supports dans le manuel. Ensuite,
l’enseignante les a sensibilisés au projet entrepreneurial (la notion,
les valeurs, …). Après, elle leur a donné les consignes du projet
qui consistaient à faire comprendre les objectifs pédagogiques, la
démarche, l’organisation des groupes (7 groupes de 5 membres) et
l’évaluation de ce projet… Tout a été clarifié avant que les groupes
signent le contrat de projet. Enfin, chaque groupe a commencé à
trouver l’idée du projet en rédigeant un texte d’environ 120 mots,
une tâche de remue-méninges qui a mis les participants à la
piste du concours entrepreneurial. Cette première étape qui durait
2 périodes, soit 4 séances de 55 minutes, avait pour objectifs
linguistiques de faire comprendre oralement les vidéos, d’observer
rapidement le manuel, de lire le contrat et de rédiger un petit texte
qui expliquera le choix du projet.
3.3.2. Étude de marché
Selon Fayolle (2008), l’étude de marché commence par
l’étude d’opportunité, c’est-à-dire l’étude de la demande, de la
concurrence, de l’environnement. Il s’agit également des objectifs
de la première leçon du manuel dans laquelle les étudiants ont
appris les notions de «marketing», d’«étude du marché», à lire
et faire une enquête de marché. L’enseignante a essayé d’ajouter
un autre savoir-faire: savoir lire et commenter des documents
non-textuels dans le but d’amener les apprenants à rédiger un
rapport collectif d’environ 5 pages sur les analyses de marché,
un exercice d’entraȋnement à la production écrite qui faisait
appel aux connaissances transversales du Marketing et de la
Méthodologie de recherche, deux modules déjà acquis dans le

-427-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

programme d’enseignement général. Cette deuxième étape de


2 périodes, soit 4 séances de 55 minutes et une semaine de
travail à la maison, visait à faire observer et élaborer une enquête
de marché, à formuler les questions, à produire un rapport, un
type de production beaucoup plus long que ceux auxquels ils
s’habituaient. L’enseignante a corrigé ce premier rapport ainsi
que les autres rapports réalisés durant le projet.
3.3.3. Propositions du plan de marketing
Le sous-thème des quatre autres leçons du manuel est l’étude
de pertinence selon le modèle de Fayolle (2008): la définition de
l’offre (leçon 2), la distribution (leçon 3), les moyens de marketing
(leçon 4), et la force de vente (leçon 5). Les étudiants, après
avoir observé et repéré les éléments linguistiques, ont réalisé
des activités d’expression orale et écrite concernant ces sous-
thèmes. Ils ont été enfin amenés à rédiger le deuxième rapport
collectif sur les propositions du plan de marketing pour leur
projet entrepreneurial selon le modèle 4P (produit, prix, place et
promotion), un modèle bien assimilé dans le module Marketing
de base. Ce rapport sera aussi un exercice de production écrite
longue qui exigeait la logique et la pertinence en matière du
contenu par rapport au premier rapport sur l’étude de marché.
Cette troisième étape, la plus importante du module, s’est allongée
en 6 périodes, soit 12 séances de 55 minutes et 3 semaines à la
maison.
3.3.4. Bilan du projet: concours de l’entrepreneuriat
Au terme du projet entrepreneurial, la tâche de chaque
groupe était double: (1) rédiger un rapport final d’environ 10
pages qui résumait les mini-rapports déjà corrigés et (2) préparer
un exposé oral pour convaincre le jury et les camarades en
séances plénières. L’enseignante a expliqué les critères d’un bon
rapport final, des bonnes diapositives et d’un bon exposé oral.
Lors du concours, les groupes avaient 20 minutes pour présenter

-428-
Communications de dimension spécifique

leur idée entrepreneuriale et pour répondre aux questions du


jury et des autres groupes. Enfin, l’enseignante a fait le bilan du
projet et a informé du contenu de révision du post-test, élaboré
par le Département de français. La dernière étape s’est déroulé
en 4 périodes, soit 10 séances de 55 minutes, dont 3 périodes
de 2 séances et une de 4 séances destinée au concours
entrepreneurial et au bilan du module.
3.4. Étape 4: Évaluation des résultats de la recherche
Les résultats de cette recherche-action sont évalués selon
deux aspects: progression et satisfaction des apprenants. La
progression est mesurée par l’analyse des pré-tests et post-tests,
des rapports, des exposés oraux et des rétroactions des étudiants.
La satisfaction est mesurée par l’analyse des journaux de bords,
des questionnaires, des entretiens auprès des étudiants et des
enseignants.
3.4.1. Progrès en savoirs linguistiques
En comparant les résultats des tests lexicaux et grammaticaux,
nous n’avons pas constaté leurs progrès significatifs (cf. annexe
3) entre le pré-test (6.0/10) et le post-test (6.4/10). Cependant,
l’analyse du questionnaire auprès des étudiants montre que la
plupart trouvent leurs connaissances linguistiques beaucoup
améliorées (3.78 sur 5 selon l’échelle Likert;cf. annexe 5). La
phonétique qui n’est pas évaluée dans les tests sont mieux
appréciée (3,91/5), puis le lexique en marketing (3.8/5) et enfin la
morpho-syntaxe (3.63/5). Ces progrès sont implicitement exprimés
dans la production orale et écrite en dehors de tests linguistiques.
3.4.1. Progrès en production orale
Globalement, les données recueillies telles que le corpus, le
questionnaire et les entretiens, nous donnent le même constat:
les étudiants progressent bien en exposé oral (cf. annexe 4). La
recherche des idées sont mieux améliorée puisque les étudiants

-429-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

ont pu approfondir de façon réelle ce thème durant le projet. La


phonétique, le lexique, l’introduction et la conclusion, la cohérence
sont assez progressées, surtout pour des étudiants ayant des
difficultés en production orale avant le projet. Ce qui résulte de leur
travail de groupe efficace et de leur entraînement sérieux.
3.4.3. Progrès en production écrite
Les résultats d’analyse des tests, des rapports, des rétroactions
du questionnaire et des entretiens auprès des étudiants ainsi que
des enseignants confirment que la production écrite progresse le
mieux au long du projet parmi les compétences linguistiques. En
effet, la moyenne de la rédaction d’un texte court (d’environ 120
mots) est de 8.1/10 du post-test au lieu de 5.8/10 du pré-test
qui était la compétence la plus problématique au début du projet
(cf. annexe 3). Ces progrès sont expliqués par la programmation
du projet selon laquelle les étudiants se sont beaucoup investis
dans la rédaction des rapports du projet d’une longueur de 5-10
pages. Le bon travail de groupe, la correction de l’enseignante,
le sujet actuel et motivant ont beaucoup amélioré leur production
écrite: 6.1/10 du rapport No1, 8.0/10 du rapport No2, 8.4/10 du
rapport final (cf. annexe 6).
3.4.4. Progrès en savoir-être
Le projet entrepreneurial a bien inspiré les étudiants dans
l’amélioration des savoir-être. Ils ont affirmé qu’ils étaient très
satisfaits de la contribution du projet (cf. annexe 7), qui avait amélioré
leur travail de groupe (4.42/5), leur esprit d’initiative (4.40/5), leur
gestion de temps (4.31/5), leur recherche documentaire (4.23/5),
leur informatique (4.20/5) et leur auto-apprentissage (4.23/5).
3.4.5. Progrès en motivation pour l’apprentissage du français du
marketing
La motivation des étudiants a fortement rehaussée dès l’étape
de présentation du projet et soutenue jusqu’à la fin du projet: 65,7%

-430-
Communications de dimension spécifique

ayant une bonne et très bonne motivation à la fin du projet au lieu


de 26% avant le projet, 20% une moyenne motivation au lieu de
51,4%. Seulement 5,7 % des participant ont une faible motivation
et 8,6% n’a aucune motivation pour l’apprentissage du français
de spécialité au lieu de 20% et 2,8% (cf. annexe 8). Cette bonne
motivation provient du bon choix du thème et du bon modèle du
projet, adaptés aux intérêts des étudiants
En conclusion, notre projet entrepreneurial, appliqué au
module du français du marketing, s’est déroulé pendant trois mois
avec 4 étapes principales. Les 7 groupes, soit 35 étudiants, ont
participé au concours entrepreneurial dont le jury est composé
de l’enseignante du français de spécialité, de l’enseignant de
l’entrepreneuriat et du spécialiste de marketing de l’agence
de tourisme Easia. De nombreuses données recueillies nous
ont permis de valider les impacts vraiment positifs du projet
entrepreneurial sur l’apprentissage du français du marketing et
sur la motivation des étudiants. Cette stratégie d’enseignement
est donc un bon outil, vraiment efficace, facilitant l’intégration
des étudiants dans le monde professionnel. Nous espérons
mener d’autres recherches approfondies pour perfectionner
notre modèle d’enseignement du français du marketing via le
projet entrepreneurial ou pour élaborer un projet entrepreneurial
englobant certains modules du français de spécialité, qui
permettrait d’améliorer mieux les savoirs linguistiques, les savoirs
transversaux, les compétences communicatives et les savoir-être
chez les étudiants.

-431-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

BIBLIOGRAPHIE
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-432-
Communications de dimension spécifique

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Nationale du Vietnam, Hanoi.
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15. Tran Van Trang, 2010, L’effet de la sensibilisation à
l’entrepreneuriat sur l’intention des étudiants de créer une
entreprise: le cas du Vietnam, Thèse de doctorat, sous la
direction de Robert Paturel, Université de Brest

ANNEXE
Annexe 1. L’émission « Le bus de l’entrepreneuriat » No 48 -
chaîne nationale VTV3

Annexe 2. La finale du concours Start-up! l’esprit entrepreneurial

-433-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Annexe 3: Comparaison des résultats du pré-test et du post-


test écrits

Annexe 4: Comparaison des résultats du pré-test et du post-


test oraux

Annexe 5: Appréciation des étudiants en savoirs linguistiques


et en savoir-faire

-434-
Communications de dimension spécifique

Annexe 6: Comparaison des résultats des rapports

Annexe 7: Progrès en savoir-être

Annexe 8: Progrès en motivation

-435-
ENQUÊTES D’ÉVALUATION DE LA FORMATION -
SYNERGIE ENTRE LES FILIÈRES DE TOURISME?

NGUYEN THUC Thanh Tin


PHAM Song Hoang Phuc
Département de Français
Université de Pédagogie de Ho Chi Minh-Ville

Résumé:
Les établissements sont nombreux à avoir créé des Licences en Langue française
à visée «Tourisme». Ces formations, dans leur démarche de professionnalisation,
réalisent plusieurs enquêtes d’évaluation afin d’améliorer leur qualité. Partant
de ce constat, les auteurs de la communication proposent une mutualisation des
ressources et des actions entre les Filières de Tourisme pour en minimiser les coûts
et en maximiser les résultats.
Mots-clés: Évaluation de la formation - formation professionnalisation -
enquête

Contexte
Les Départements de Français au Vietnam constituent un réseau
important pour la promotion de la langue française. Ils forment une
ressource humaine francophone à destination du marché du travail,
capable d’assurer diverses fonctions et ce dans plusieurs secteurs.
Les profils de sortie sont divers: enseignant, secrétaire, traducteur-
interprète, guide touristique, conseiller, vendeur…
Ces dernières années, le tourisme vietnamien connaît un
développement fulgurant et s’inscrit parmi les secteurs de pointe
Communications de dimension spécifique

du pays, au vu des revenus générés pour l’économie nationale.


À côté des formations professionnelles, les métiers du tourisme
demandent aussi un niveau de langue étrangère. C’est dans
cette mesure que le besoin en personnel francophone de qualité
travaillant dans le tourisme se fait de plus en plus sentir.
Face à cette situation, de nombreux Départements de
Français au Vietnam ont monté des formations de Tourisme
qui se veulent de plus en plus professionnalisantes. Elles
accueillent des étudiants avec ou sans acquis préalable du
français pour les former au niveau de Licence en langue
française et en tourisme. Elle vise aussi, de la part de l’étudiant,
une bonne éthique professionnelle, une bonne santé, une
capacité de promouvoir l’identité culturelle, les connaissances
et compétences des métiers du tourisme pour pouvoir travailler
dans le domaine du tourisme national et international. Pour cela,
les Départements font appel, par la voie des coopérations, à des
partenaires socio-économiques qui participent à de nombreuses
étapes de la formation de tourisme en français: élaboration du
curriculum, accueil d’étudiants en stage, interventions dans
les cours, évaluation des connaissances et des compétences
des étudiants… Sur les plans de l’équipe pédagogique, les
Départements de Français déploient tous leurs moyens pour
convertir une partie des enseignants de langue de manière que
ceux-ci soient capables d’assumer des modules de tourisme.
Bref, c’est ainsi que se créent les Filières de Tourisme
dans les Départements de Français, lesquelles nourrissent les
mêmes ambitions, celles de développer et professionnaliser
leur formation et d’en améliorer la qualité. Elles peuvent aussi
rencontrer les mêmes difficultés et avoir les mêmes besoins en
termes d’évaluation de la formation. Dans le cadre d’un curriculum
de formation, il s’agit d’évaluer par exemple la motivation des
étudiants, leurs performances, leurs satisfactions vis-à-vis des
activités de formation, le besoin des enseignants…

-437-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Si, depuis toujours, chaque établissement y va de sa pratique


et de son rythme, pourquoi ne pas harmoniser et mutualiser
maintenant ces dispositifs d’évaluation pour en faire des
économies, pour partager les expériences et pour atteindre de
meilleurs résultats, puisque les Filières font presque les mêmes
choses?

1. Évaluation, qu’est-ce que c’est?


De nombreuses définitions de l’évaluation ont été révélées
de la littérature scientifique. Cependant, quand on aborde la
définition de l’évaluation, il faut prend en compte une distinction
conceptuelle de sens entre la notion de valuation et celle
d’évaluation. Selon FIGARI & REMAUD (2014: 41) alors que la
première désigne à la fois le fait de priser (retenir pour précieux)
et celui d’évaluer (attribuer une valeur à), le deuxième indique
plutôt l’activité de mesure qui concerne une comparaison et
introduire à une activité intellectuelle. Toujours selon ces auteurs,
l’évaluation répond à plusieurs finalités. Elle est:
- Un jugement de valeur: l’évaluation est considérée comme
l’acte par lequel on exprime un jugement de valeur. Cette action
porte sur un objet déterminé (individu, dispositif) par une mise en
relation entre deux types de données: l’un se rapporte directement
au sujet ou à la situation à évaluer et l’autre s’avère l’ordre de la
norme, de l’objectif et de l’idéal. D’ailleurs, le jugement de valeur
fait partie de l’enquête à laquelle il doit être évidemment attaché.
- Une aide à la décision: il s’agit d’un processus par lequel
on traite des informations permettant de justifier des décisions
possibles. Cependant, cette définition pose un problème lié au
sujet qu’on veut étudier. En ce sens, l’évaluation s’avère seulement
un outil de comparaison qui permet à l’évaluateur de prendre une
décision. Si l’on applique cette définition à un travail d’évaluation,
on risque de ne pas avoir une vue d’ensemble quant au sujet
recherché.

-438-
Communications de dimension spécifique

- Une recherche de sens et un changement de sens: elle


correspond au fait de poser des «problématiques du sens» et à
modifier le sens des informations produites au sujet d’un apprenant
ou d’un dispositif. Par exemple, on réalise une évaluation pour
relever les forces et faiblesses d’une activité à l’issue desquelles
on peut savoir sa signification.
- Une activité: de ce fait, elle désigne alors l’ensemble des
tâches à réaliser, et ce dans un but déterminé. L’activité d’évaluer
se scinde en deux catégories: activité en situation et expérience.

2. Évaluation d’une formation


L’évaluation de la formation prend le caractère indispensable
à l’égard d’une action de formation. Selon PERRENOUD (1998:
16), la qualité d’une formation professionnelle se mesure,
idéalement, à ses effets rapportés à ses objectifs ou aux attentes
des usagers ou des employeurs. En effet, l’évaluation est l’action
d’évaluer, à l’aide de critères définis, l’atteinte des objectifs
pédagogiques et d’action d’une formation. Par ailleurs, elle est
aussi une démarche méthodique visant à mesurer les résultats
d’une activité de la formation en vue d’augmenter son efficacité.
L’évaluation d’une formation se sert d’un ensemble d’outils
et des méthodes mis en place périodiquement et objectivement
pour évaluer l’efficacité des actions et apporter les mesures
correctives. Cette démarche peut se faire à des temps différents,
par des acteurs différents tels que formateur, apprenant, stagiaire,
etc. De cette façon, l’évaluation apparaît à la fois comme un outil
nécessaire et un moment clé d’un processus d’amélioration
continue de la qualité de la formation dans la mesure où elle doit
mettre en place les actions correctrices et les orientations futures.
Pourquoi évaluer une formation? Des chercheurs en
évaluation de la formation donnent des réponses divergentes à
cette question. KIRKPATRICK (1998) propose trois raisons pour
évaluer une formation:

-439-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Justifier l’existence du département de formation en démontrant


sa contribution au objectifs de l’entreprise;
- Décider si l’on doit poursuivre ou arrêter les programmes
de formation;
- Obtenir de l’information sur les procédés visant à améliorer
les futurs programmes de formation.
PHILIPS (1997) en propose 10 qu’il assimile à des fonctions
de l’évaluation:
- Déterminer l’atteinte des objectifs de formation;
- Identifier les forces et les faiblesses du processus de
développement des ressources humaines;
- Comparer les coûts et bénéfices d’un programme;
- Décider qui devrait participer aux prochains programmes;
- Tester la clarté et la validité de certains tests, études de cas
ou exercices;
- Identifier quels participants ont le mieux réussi le programme;
- Rappeler aux participants certains contenus du programme
jugés importants;
- Recueillir des données en vue de la mise en marché de
futurs programmes;
- Déterminer si le programme offrait une solution adéquate
au besoin identifié;
- Constituer une base de données en appui à la prise de
décision par les gestionnaires.
Pour former un ensemble d’idées cohérentes, KRAIGER
(2002) propose une brève synthèse qui se base sur les raisons
évoquées par les auteurs susmentionnés, laquelle indique trois
raisons principales pour évaluer une formation:

-440-
Communications de dimension spécifique

- La prise de décision: fournir des données pour manager la


formation.
- La rétroaction: positive ou négative, la rétroaction qui
se trouve au niveau des formateurs, des concepteurs et des
participants à la formation rend possibles des ajustements des
activités de formation ou la stratégie d’apprentissage.
- Le marketing de la formation: celui-ci peut être réalisé à
l’intérieur de l’établissement ou auprès de participants potentiels
afin de mettre en valeur la formation et motiver les futurs
participants.

3. Quelles enquêtes d’évaluation à mutualiser?


Une enquête est une étude d’un problème, d’une question au
cours de laquelle sont réunis les données de divers documents,
les résultats d’expériences. Elle est effectuée afin de découvrir
des faits, d’améliorer les connaissances ou de résoudre des
doutes ou des problèmes. Une enquête permettra également
d’obtenir les informations qu’on souhaite obtenir. Bref, l’enquête
est une des démarches centrales de l’évaluation afin de collecter
des données nécessaires à une problématique.
Il existe deux grands types de méthodes: la méthode qualitative
et la méthode quantitative. En fonction de la problématique et du
périmètre de la recherche, on peut choisir celle qui soit la plus
adaptée en termes de l’efficacité à l’objectif qu’on poursuit.
Comme les Filières de Tourisme partagent la même aspiration
à la qualité, il convient de mettre en commun plusieurs évaluations
dans le cadre de chacune des formations en Licence de langue
française - visée «Tourisme». Elles peuvent envisager trois grands
volets pour rendre compte des regards des trois acteurs principaux
de la formation.

-441-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

 Des enquêtes à destination des apprenants


Le regard des apprenants sur la formation est nécessaire et
constitue un sujet intéressant car il pourrait être utile pour:
- Déterminer le niveau de réalisation des objectifs fixés;
- Déterminer les forces et les faiblesses de la formation;
- Identifier les éléments de satisfaction et d’insatisfaction
des étudiants;
- Promouvoir la formation auprès des nouvelles recrues;
- La valoriser auprès des diplômés;
- Améliorer le programme d’enseignement en faveur des
bénéficiaires de la formation.
Il faudrait distinguer ici, deux catégories de formés: les
étudiants en cours de formation et les étudiants diplômés. Auprès
de la première, les Filières ont intérêt à mette en place:
- Les enquêtes d’évaluation de modules d’enseignement:
l’étudiant peut porter son jugement sur le contenu de
l’enseignement, sur les procédés qui sont mobilisés par les
chargés de cours pour introduire les connaissances et pour
lui faire acquérir les compétences professionnelles, sur les
modalités d’évaluation… Là aussi, il convient de distinguer deux
groupes d’enseignement - les enseignements de langue et
les enseignements de tourisme - afin de tenir compte de leurs
spécificités pour des fins évaluatives.
- L’enquête d’évaluation périodique (semestrielle/annuelle)
de la formation: elle a pour but de recueillir les avis de l’étudiant
sur l’ensemble de l’organisation des enseignements dans une
période de formation. Le contenu de l’enquête peut porter sur
l’état des infrastructures et équipements, sur l’emploi du temps,
le déroulement des enseignements…

-442-
Communications de dimension spécifique

- L’enquête d’évaluation d’intervention professionnelle: il


arrive que des professionnels issus des entreprises réalisent
des interventions ponctuelles dans le cadre des enseignements
professionnels. Il s’agit des apports précieux en matière
d’expériences et de réalités du terrain qui ne font qu’enrichir la
formation. Il est donc nécessaire d’en évaluer l’efficacité et les
impacts sur les étudiants bénéficiaires.
- L’enquête d’évaluation de voyages de terrain: une des
particularités de la formation de tourisme réside dans les voyages
de terrain pendant lesquels l’étudiant est exposé à la réalité du
métier et s’adonne à une sorte de simulation. Il est indispensable
de mesurer l’importance de ce dispositif, ses multiples effets sur
l’étudiant et la satisfaction de ce dernier pour l’activité.
- L’enquête d’évaluation de stage en entreprise: le stage est
une étape incontournable à la fin du parcours de l’étudiant qui
mettra en pratique les compétences et connaissances acquises
pendant les cours et confrontera théorie et réalité professionnelle.
C’est aussi un premier contact, un premier pas du formé vers
le marché du travail. On peut s’appuyer sur ces critères pour
élaborer les questionnaires de l’enquête.
Quant aux diplômés, auprès de ceux-ci, les Filières peuvent
mener l’enquête d’évaluation globale de la formation car ce
sont des formés qui, arrivés au terme de leur formation, sont
bien placés pour en faire une évaluation. L’enquête peut en effet
porter sur l’ensemble des aspects du curriculum: les objectifs,
les informations, le contenu, la réalisation, le corps enseignant,
les infrastructures et équipement, l’environnement et d’autres
forces et faiblesses de la formation. Ces données servent
surtout à la Filière pour améliorer la qualité de la formation. Par
ailleurs, dans une perspective professionnalisante, il appartient à
l’établissement de lancer des enquêtes de devenir des étudiants
sortants en vue d’évaluer le niveau d’insertion de ces derniers,

-443-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

leur employabilité, leur situation professionnelle… et ce dans le


but d’ajuster et de mettre à jour la formation.
 Des enquêtes à destination des enseignants
L’enseignant est un acteur important d’une formation. Il
éprouve aussi le besoin d’émettre des avis pour améliorer non
seulement le programme mais aussi son travail d’enseignement.
De l’autre côté, la direction du Département a besoin de l’écouter
afin de lui offrir des meilleures conditions de réalisation du
programme. En ce sens, l’enquête peut porter sur ces volets,
sans oublier de rendre compte de ses besoins de formation,
ses aspirations, ses projets d’évolution afin d’assurer la gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC).
 Des enquêtes à destination des entreprises
Il s’agit de celles où les étudiants effectuent leur stage
professionnel aussi bien que de celles qui les recrutent à la sortie.
Dans le secteur touristique, ce sont des agences de voyages,
des autocaristes, des croisiéristes, des hôtels et restaurants…
mais aussi des instituts de recherche et de promotion ou des
organisations liées au tourisme... qui emploient la ressource
humaine formée dans les Filières de Tourisme. Ces entreprises
leur fournissent des évaluations sur la qualité de formation
basées sur la performance des employés. Il est donc nécessaire
de mener des enquêtes auprès:
- du maître de stage: salarié de l’entreprise qui encadre au
quotidien le stagiaire, il définit les différentes missions relatives
au stage de l’étudiant, travaille aussi en étroite collaboration avec
l’établissement d’enseignement. C’est lui qui suit de plus près
légitimement le stagiaire et qui est habilité à l’évaluer.
- du chef d’entreprise: à la tête de son équipe, il maîtrise
parfaitement le secteur, son évolution et son marché du
travail, décide les recrutements. L’enquête des Filières doit

-444-
Communications de dimension spécifique

nécessairement puiser cette mine d’informations pour réajuster


leur curriculum.

4. En guise de conclusion
Par ce qui précède, on peut rendre compte de la multitude
des enquêtes dans le processus d’évaluation d’une formation. Vu
le temps et le travail que chaque Filière de Tourisme devrait fournir
afin d’assurer l’aspect «professionnalisant» de sa formation, le
besoin de mettre en commun les dispositifs d’évaluation n’est
plus à démontrer. La mutualisation des outils d’évaluation et du
personnel est plus que nécessaire.
Cependant, il serait prudent de tenir compte des différences
dans cette démarche. En effet, les établissements peuvent différer
sur l’objectif de formation, le niveau du corps enseignant, le
programme (importance accordée aux enseignements de langue
et de tourisme, nombre de crédits, nombre de modules…), les
ressources employées, le profil des étudiants…
Par quelles modalités mutualiser?
Les Filières de Tourisme relevant de différents Départements
de Français doivent se mettre ensemble dans ces démarches
évaluatives afin de maximiser les résultats et de minimiser les
coûts. Elles peuvent constituer une équipe de travail composée
de représentants de chacune des Filières, le tout étant de bien
coordonner les actions. Le cas échéant, un chef d’équipe sera
désigné pour orchestrer les tâches. Les membres, quant à eux,
peuvent travailler à distance, les technologies de communication
aidant. Dans un premier temps, ils peuvent partager des
expériences, expliciter les besoins et présenter les spécificités
de chaque formation pour mieux se comprendre.
La mutualisation peut consister dans la mise en commun
des ressources humaines et matérielles, dans l’élaboration des
questionnaires (enquête quantitative) ou des guides d’entretien

-445-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

(enquête qualitative), dans la réalisation des enquêtes, dans


le traitement des résultats… L’intérêt de la mutualisation peut
aussi aller plus loin: les Filières procèderont par la suite à la
comparaison et à la synthèse des données et mèneront des
recherches à partir de ces résultats. Ce faisant, les évaluations
ne doivent pas s’éloigner de leurs visées initiales, celles de
comprendre les forces et les faiblesses d’une formation pour
l’améliorer. Elles n’ont pas intérêt à susciter des concurrences ou
des classements entre les Filières.

BIBLIOGRAPHIE
1. Figari, G. & Remaud, D. (2014). Méthodologie d’évaluation en
éducation et en formation. coll. Pédagogies en développement.
Bruxelles: De Boeck.
2. Kirkpatrick, D. L. (1998). Evaluating training programs. Second
Edition. San Francisco: Berrett-Koehler Publishers Inc.
3. Lee, S. H. & Pershing, J. A. (1999). Effective reaction evaluation
in evaluating training programs. Performance Improvement,
38(8). Wiley Periodicals.
4. Lang,V.(1999). La professionnalisation des enseignants. Paris:
Presses universitaires de France.
5. Perrenoud, P.(1998).La qualité d’une formation professionnelle
se joue d’abord dans sa conception. Pédagogie collégiale,
no 3, vol. 1. Québec.
6. Pershing, J. A. & Pershing, J. L. (2001). Ineffective reaction
evaluation. Human Resource Development Quarterly, 12(1).
United States: Jossey-Bass Inc.

-446-
MANUELS DE FRANÇAIS DU TOURISME -
UN BESOIN POUR LES FILIÈRES DE TOURISME
FRANCOPHONE AU VIETNAM.

NGUYEN THUC Thanh Tin


PHAM Song Hoang Phuc
Département de Français
Université de Pédagogie de Ho Chi Minh-Ville

Résumé:
Les formations de français du tourisme sont mises en place dans plusieurs
Départements. L’enseignement s’appuie sur les manuels universels, conçus par
les éditeurs étrangers. En qualité d’enseignants-chercheurs et chargés des cours
de français du tourisme, les auteurs en communication prennent l’initiative d’un
projet de conception d’un manuel de Français du Tourisme qui soit adapté au
contexte vietnamien et qui tienne compte de l’évolution du secteur touristique et
de la didactique. Ce dernier réponse, pour la formation du personnel francophone,
réponse aux besoins de la société. Enfin, ils en évoquent aussi les défis ainsi que
la possibilité de collaboration avec des partenaires pour rendre possible ce projet.
Mots-clés: Manuel - français de spécialité - didactique

Contexte
Grâce à la mondialisation et aux technologies nouvelles,
le tourisme devient populaire et devient aujourd’hui un secteur
économique de pointe. Dans cette tendance générale, le Vietnam,
fort de ses nombreux avantages naturels et culturels, mise aussi sur
cette industrie verte et développe ainsi ses ressources humaines. En
effet, fleurissent ces dernières années les formations de tourisme
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

dont celles dans les Départements de Français des universités


où sont introduits les modules de Français du Tourisme. Graace
à ces derniers, les enseignants utilisent souvent des manuels
de «français du tourisme» conçus par des éditeurs français. De
niveau A2/B1, ces ouvrages souffrent cependant de l’universalité:
ils visent l’ensemble des métiers du tourisme, abordent le domaine
dans sa globalité et ne tiennent donc pas compte des spécificités
du tourisme vietnamien. Certains commencent à dater cruellement
et ne conviennent plus à la réalité professionnelle de nos jours.
Il est donc nécessaire de concevoir un nouveau manuel pour
répondre au besoin de l’enseignement du français du tourisme.
Ce manuel aura intérêt à tenir compte des particularités du
tourisme vietnamien et des nouveautés du secteur. Il devra
aussi s’appuyer sur les pratiques sociales de référence, dans
une perspective actionnelle, favorisant la pédagogie de projet et
mobilisant les TICES.

1. Le manuel dans l’enseignement des langues


L’adjectif «manuel», du latin manualis ou manus («main» en
français), signifie ce qui est fait avec la main. Son substantif, «le
manuel», désigne, selon TAGLIANTE (1994, p. 62), des recueils
de documents et d’activités de classe qui suivent une progression
et se réclament d’une méthodologie donnée. CUQ (2002, p. 233)
y voit comme un ensemble pédagogique complet puisque le
terme renvoie à un matériel d’enseignement qui peut se limiter
à un seul outil (manuel ou livre, cassette audio ou vidéo) ou
faire référence à une suite qui prend en charge l’ensemble des
niveaux.
Les fonctions du manuel sont de plus variées. GÉRARD et
ROEGIERS (2003) parlent de:
- La transmission de connaissances
- Le développement de capacités et de compétences

-448-
Communications de dimension spécifique

- La consolidation de l’acquis
- L´évaluation de l’acquis
- L´aide à l’intégration des acquis
- La référence
- L´éducation sociale et culturelle.
Alors que, selon PUREN (2011), un manuel vise à assurer
(a) le découpage du flux du processus d’enseignement-
apprentissage, (b) la progression collective de l’ensemble des
apprenants, les différentes unités indiquant à chaque moment à
chacun ce qui est supposé être acquis par tous, (c) la gradation
et (d) la cohésion interne à l’unité didactique. Par ailleurs, d’après
le didacticien, il possède aussi une fonction professionnelle
[…] qui est de proposer aux enseignants une sorte de «prêt
à enseigner-apprendre» qui lui économise un énorme travail
de programmation et de préparation personnelle […] avec les
garanties […] d’une certaine qualité. Du côté de l’apprenant, le
manuel le rassure pour l’acquisition aussi bien que pour réviser
les connaissances.
Dans le domaine de l’enseignement du FLE, le manuel de
FLE est au professeur de français langue étrangère ce que la
caisse à outils est au maçon (BARTHELEMY et al., 2011, p. 125).
Ce rapprochement démontre son rôle important mais non décisif
pour autant. En effet, son efficacité relative, comme pour tout outil,
dépend autant de la manière dont on l’utilise que de ses qualités
propres puisqu’un manuel ou un ensemble pédagogique n’est
qu’un outil mis à la disposition de l’enseignant et des enseignés
pour les aider, dans le contexte qui est le leur, à (faire) acquérir
la langue étrangère. D’évidence, ce n’est pas le manuel qui
enseigne et encore moins lui qui apprend» (BESSE, 1957: 15).
Par ailleurs, le choix du manuel doit être fondé sur les
critères de la situation d’enseignement et selon le profil du public

-449-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

apprenant. L’usage d’un manuel non adapté risque de porter


atteinte à la qualité de l’enseignement et donc au résultat de
l’apprentissage.

2. Français de spécialité vs Français sur Objectifs spécifiques


MANGIANTE & PARPETTE (2004) distinguent clairement
ces deux dénominations. Leur différence réside dans le type de
formation:
- Français sur Objectifs Spécifiques: quand la formation est
une réponse à la demande venant de l’extérieur. Il s’agit d’un
besoin formulé à l’adresse d’un établissement de formation (école,
centre d’enseignement…) par un organisme ou une entreprise
qui dispose des caractéristiques déterminées concernant son
public d’apprentissage, ses exigences, ses pré-acquis, etc.
- Français de spécialité: quand la formation est une
anticipation à la pratique professionnelle, autrement dit à des
offres. C’est le cas par exemple d’un établissement de formation
qui propose des cours de «Français du tourisme» ou «Français
médical» … dans le but de diversifier ses offres de formation, afin
de préparer linguistiquement ses publics potentiels à l’exercice
de leur domaine respectif.
Le choix de l’une ou l’autre appellation implique également
des conceptions différentes au niveau de l’organisation de la
formation. En effet, selon CARRAS et al. (2007, p. 18), la formation
du type «Français sur Objectifs spécifiques» ou «Français de
spécialité» passe par l’étape de l’élaboration du curriculum, mais:
- Dans le cas du «Français sur Objectifs spécifiques», le
programme provient de la demande elle-même. Il doit prendre en
considération les besoins précis du public et les contraintes de
l’entreprise émanant la demande de formation afin de répondre
au mieux aux exigences du commanditaire. C’est donc une
formation «sur mesure».

-450-
Communications de dimension spécifique

- Dans le cas du «Français de spécialité», le programme


n’est pas déterminé par une demande concrète mais par
l’établissement/l’enseignant en charge, tout en tenant compte
des spécificités du domaine d’activité. Par conséquent, le
concepteur du programme peut choisir de privilégier un certain
nombre d’aspects liés à plusieurs postes du secteur en question
pour organiser les actions pédagogiques, mais il ne vise pas un
métier précis, et ce afin de répondre aux besoins d’un plus large
public.
Dans de nombreux Départements de Français, le «Français
du Tourisme» est introduit dans le programme de formation
avec ou sans option «Tourisme». Dans tous les cas, il fait l’objet
d’un enseignement pratique dont l’objectif est de fournir aux
étudiants des connaissances linguistiques et socioculturelles et
de les rendre capables de communiquer en français dans des
situations professionnelles. Tout comme dans le cas du français
général, toutes les quatre compétences sont travaillées en vue
d’une communication professionnelle complète et efficace.
Par ce qui précède, nous pouvons conclure que les modules
de Français du Tourisme, tels qu’ils sont dispensés dans le cadre
des formations au sein des Départements de Français au Vietnam,
relèvent bel et bien du «Français de Spécialité». En effet, ils ne
satisfont pas à une demande précise mais apparaissent comme
une anticipation aux éventuels besoins des apprenants pour leur
futur exercice professionnel. Ils s’adressent au public étudiant
des Filières de Tourisme, qui a pour vocation de travailler dans
les métiers du domaine à la sortie de l’université.

3. Quelques manuels de «français du tourisme» existants


Sur le marché, les manuels de français du tourisme ne
manquent pas. On peut en citer quelques-uns, du plus ancien au
plus récent:

-451-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- Le français du Tourisme (CALMY (2004));


- Hôtellerie-restauration.com (CORBEAU (2006));
- Le français en contexte. Tourisme (LAYGUES et COLL (2014));
- En cuisine ! (CHOLVY (2014));
- Bon voyage ! (DUSSAC (2017)).
Certains commencent à dater et ne sont plus adaptés
à l’évolution du tourisme. D’autres ne sont pas complets par
rapport aux besoins variés du secteur. Soulignons que le secteur
touristique comprend plusieurs catégories de prestataires de
service, allant du transport à l’agence de voyages et à l’animation,
en passant par l’hôtellerie et la restauration. De l’autre, ces
méthodes sont universelles et ne sont en mesure de répondre
à des spécificités et des réalités touristiques d’aucun pays en
particulier. Par conséquent, se fait sentir plus que jamais le besoin
des manuels de «français du tourisme» qui tiennent compte du
contexte du Vietnam, qui soient adaptés à l’approche actionnelle,
en faveur de la pédagogie de projet et qui mobilisent les TICES.

4. Des manuels tenant compte du contexte du Vietnam


Le tourisme est actuellement un secteur économique porteur
auquel presque tous les pays du monde accordent de l’importance.
Le Vietnam n’échappe pas à cette tendance générale et a su
attirer de nombreux touristes internationaux, dont environ 200
mille touristes français en 2017 selon l’Administration du Tourisme
du Vietnam.
Le tourisme vietnamien revêt des particularités relatives aux
paysages naturels, aux monuments architecturaux, aux cultures
nationales et locales, aux différents modes d’accueil selon les
régions, aux modes de consommation touristique…, toutes les
caractéristiques dont les manuels de français du tourisme doivent
tenir compte. Ensuite, ils ont aussi intérêt à rendre compte des

-452-
Communications de dimension spécifique

réalités du terrain et à mettre à jour les tendances, les pratiques


touristiques pour ne pas rapidement tomber dans l’obsolescence.
Enfin, ces manuels doivent observer les réalités de l’enseignement
dans les Filières de Tourisme des établissements ou des centres
de langues, quant au public auquel ils sont destinés (étudiants
des Départements de Français), aux objectifs et aux besoins de
formation (personnel de l’accueil, guide touristique…), au moment
d’introduction (semestre), aux niveaux requis (A2, B1, B2), au
nombre de crédits et d’heures réservés pour les modules de
français du tourisme (de 1 à 3 modules, de 2 à 4 crédits chacun)...

5. Des manuels selon l’approche actionnelle


et basés sur des pratiques sociales de référence
Dans une perspective de rénover la pratique enseignant
- apprenant et l’évaluation des compétences en langues
étrangères, le Cadre Européen Commun de Référence pour les
Langues (CECRL) sépare les compétences langagières des
autres compétences communicatives et introduit les concepts
de «tâche», d’«acteur social». L’apprenant est alors amené à
réaliser des tâches non seulement langagières. Pour cela, il doit
mobiliser son savoir, son savoir-faire, son savoir-comporter et
son savoir-apprendre. Il s’agit là d’un changement radical dans
la conception de l’enseignement - apprentissage des langues
étrangères. L’approche donne sens à l’apprentissage des
langues qui n’est pas une fin en soi mais qui est au service d’un
travail, d’une action sociale. Elle augmente la chance d’associer
la théorie et la réalité du terrain, l’école et la société. La langue
étrangère ne se cantonne pas à l’exercice en classe mais doit
se pratiquer à la société. Cette langue étrangère est donc plus
vivante, plus authentique que celle limitée à l’école. Par ailleurs,
la perspective actionnelle apporte d’autres intérêts à l’apprenant,
en lui permettant de se frotter à la réalité de la vie, de se former à
d’autres compétences, de s’armer d’expériences pour le travail…

-453-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Cette approche actionnelle doit être présente dans les manuels


de français du tourisme à concevoir afin de «responsabiliser»
davantage son public et motiver son apprentissage de la langue
de spécialité. Pour ce faire, les tâches à réaliser par l’apprenant
dans le cadre d’une approche actionnelle doivent répondre à un
certain nombre de critères et relever des pratiques sociales de
référence.

Le concept de «pratique sociale de référence» a été étudié dès


1986 par MARTINAND (1986, p. 137) qui insistait sur trois aspects:
«pratique» (ce sont des activités objectives de transformation
d’un donné naturel ou humain), «sociale» (elles concernent
l’ensemble d’un secteur social, et non des rôles individuels) et
«de référence» (la relation avec les activités didactiques n’est
pas d’identité, il y a seulement terme de comparaison). Pour cet
auteur, la référence aux pratiques sociales est indispensable
parce que ces dernières seront reproduites dans les activités
scolaires.

Dans le domaine du tourisme, les pratiques sociales


de référence ne manquent pas. Il suffit de les puiser dans la
réalité professionnelle d’un guide touristique, d’un concepteur
de circuits, d’un chef cuisinier… Par ailleurs, les concepteurs
de manuels doivent s’inspirer aussi de nouvelles pratiques
touristiques (audioguide, free walking tours, économie de
plateforme…) pour concevoir des tâches à proposer dans
les leçons. La pratique sociale de référence joue ainsi un rôle
important dans la proposition, l’évaluation et l’analyse du contenu
enseigné. En effet, le contenu du manuel ne doit pas viser le seul
objectif de transmettre les connaissances académiques mais
doit nécessairement s’appuyer sur la réalité, s’associer à la vie
réelle et tendre à être l’image de cette dernière.

-454-
Communications de dimension spécifique

6. Un manuel en faveur de la pédagogie de projet


et mobilisant les TICES
La pédagogie du projet a fait son apparition au début XXe
siècle, à commencer par les modules à caractère pratique avant de
se faire connaître dans d’autres matières. Elle est une pédagogie
active dans laquelle l’apprenant acquiert les compétences à
travers l’accomplissement des tâches. Elle part du principe selon
lequel c’est l’apprenant lui-même qui élabore ses connaissances.
Plusieurs facteurs, en lien étroit entre eux, concourent au succès
du projet: apprenant, enseignant, contenu, moyen et moment
de réalisation, environnement… Comme elle est fondée sur la
motivation de l’apprenant, cette pédagogie doit tenir compte de
ses besoins, ses souhaits et se caractérise par son engagement
à l’action. Réelle, cette motivation conduit alors l’apprenant à
la réalisation d’un produit concret et utile, ce qui contribue au
réalisme du projet et donne un sens à l’apprentissage. Au centre
de son apprentissage, l’individu éprouve le besoin de s’informer
et de s’équiper de compétences diverses.
Pour toutes ces raisons, les manuels de français du tourisme
ont intérêt à proposer des projets à l’apprenant, non pas à travers
toutes les pages du livre, mais éventuellement à la fin de chaque
unité ou module. Les projets doivent se baser sur des situations
adéquates, permettre des tâches réalistes et réalisables, qui se
rapprochent des métiers du tourisme. La réalisation des projets
peut aussi faire appel à une collaboration avec les partenaires
académiques (autres établissements) et économiques
(entreprises).
Cependant, le concepteur des manuels doivent veiller, dans
tous ces projets pédagogiques, au rôle de l’enseignant. C’est
celui-ci qui en prévoie les étapes, de façon que l’apprenant, loin
d’être un simple exécuteur des actions définies, participe aussi
à la détermination, à la conception et à l’organisation du projet.

-455-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Par ailleurs, l’enseignant a intérêt à faire l’inventaire des actions


à mettre en place, à les relier entre elles ainsi qu’à déterminer
les compétences spécifiques et les «soft skills» nécessaires à
la réalisation du projet. Dès lors, il doit en envisager l’évaluation
pendant et jusqu' à la fin du projet.
Enfin, la pédagogie du projet est considérablement facilitée
de nos jours par le progrès des technologies. La mobilisation des
TICES est donc indispensable. On peut envisager des activités à
distance, l’utilisation des logiciels au service des images et des
sons, l’usage des smartphones… pour rendre l’acquisition plus
vivante.

7. En guise de conclusion
Telles sont quelques orientations pour la conception des
manuels de français du tourisme, en réponse aux besoins des
Filières de Tourisme francophone. Afin de couvrir tous les aspects
des activités touristiques, il vaudrait mieux construire plusieurs
volets de contenus, suivant les différents types de prestataires
touristiques:
- Hôtellerie
- Restauration
- Services de transport
- Tour-opérateur
- Animation / guidage touristique
- Etc.
Enfin, les concepteurs devraient nécessairement se mettre
dans la peau des professionnels du tourisme (par des échanges
avec ces derniers, des stages d’observation, des visites…) afin
de mieux représenter les tâches et les activités à exploiter dans
les futurs manuels de français du tourisme.

-456-
Communications de dimension spécifique

BIBLIOGRAPHIE
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-457-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

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rénovée? Le cas du manuel de langue de spécialité face aux
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du 16 juin 2011 à la IXe Rencontre internationale du GÉRES.
14. Tagliante, C. (1994). La classe de langue. Paris: CLE
International.

-458-
LES DIFFÉRENTES POSSIBILITÉS D’ANALYSER
LE DISCOURS PÉDAGOGIQUE

NGUYEN Viet Quang


Université nationale du Vietnam à Hanoi

Résumé:
Le discours pédagogique joue un rôle important dans l’enseignement/
apprentissage. Il matérialise la conduite de classe et véhicule la communication
didactique menée par le professeur. Par discours pédagogique, nous entendons
toute production orale ou écrite faite par l’enseignant pour réaliser un acte éducatif
et formatif. Il existe différentes possibilités d’analyser ce discours. Nous avons
essayé, dans cette recherche, de les regrouper en trois approches (linguistique,
pragmatique et pédagogique). Alors que l’approche linguistique consiste à évaluer
les productions langagières de l’enseignant en référence aux normes de la langue,
l’approche pragmatique les étudie dans une perspective de l’action et l’approche
pédagogique tient compte du caractère spécifique des échanges verbaux en classe.
Nous essayons d’en prendre en compte les points forts pour construire une piste
d’analyse à l’intention du public vietnamien dans le but d’aider les enseignants à
parfaire leur travail.
Mots-clés: discours pédagogique, analyse de discours, métadiscours, opération
métalinguistique, triangle pédagogique.

Introduction
Renouveler l’enseignement/apprentissage est une des
plus grandes préoccupations des professeurs et des instances
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

d’administration. Mais l’attention est portée en général au


contenu. Une fois déterminé, ce dernier constitue par son
caractère juridique le pivot autour duquel doivent tourner tous
les autres éléments de la situation de l’enseignement, et il est
«sur papier», donc facile à évaluer. La pratique de classe est
un cas bien différent: il s’agit d’une réalité mouvante, difficile à
cerner. D’autant plus qu’on se contente souvent de donner des
principes pédagogiques dans le cours de méthodologie sans
prévoir aucun suivi. Rien ne permet donc d’affirmer qu’ils sont
pleinement appliqués en classe.

La tâche du professeur exige une bonne pédagogie qui


se manifeste dans son comportement en classe, ce dernier à
son tour se traduit principalement par la parole et le geste. Le
geste pédagogique est un mouvement volontaire d’une partie
du corps, notamment des bras et des mains. La parole est
ce que l’enseignant met en œuvre verbalement pour se faire
comprendre, faire agir et réagir. En didactique, on l’appelle
discours pédagogique (DP). Par discours pédagogique, nous
entendons toute production orale ou écrite faite par l’enseignant
pour réaliser un acte éducatif et formatif. A l’oral, il est secondé
par le geste et les expressions du visage, l’écrit se fait au tableau
en classe et sur papier dans/sur les travaux des apprenants.

Il existe différentes possibilités d’analyser ce discours. Nous


essaierons de les regrouper en trois approches (linguistique,
pragmatique et pédagogique) avant de proposer la démarche
que nous avons appliquée au public vietnamien. La solution
d’éclectisme qui prendra en compte les points forts de ces
approches en est l’hypothèse de la recherche. Dans tout ce
parcours, nous insistons sur les cas où nos enseignants risquent
souvent de trébucher pour les aider à parfaire le travail.

-460-
Communications de dimension spécifique

1. Trois possibilités d’analyse le discours pédagogiques


1.1. Approche linguistique
Une particularité de l’enseignement des langues, c’est que
le «savoir à transmettre» est à la fois un outil de communication,
un objet de description et même un outil de description. Les
apprenants acquièrent des connaissances par / dans le parler de
l’enseignant. Le DP doit donc être exemplaire de tous les points
de vue: phonétique, grammatical, lexical. L’approche linguistique
consiste à évaluer la production de l’enseignant en référence à la
norme de la langue, mais d’un œil critique: on s’intéressera plutôt
à des productions déviantes dues à l’interférence de la langue
maternelle. Nous citons trois exemples en phonétique.
- Commençons par les sons nasaux. Nous savons que le
français compte quatre sons nasaux [œ̃] [ã] [ɔ̃ ] [ɛ̃ ], qui pourraient
poser des problèmes par ce caractère nasal. Ils se forment en
ouvrant la bouche pour laisser l’air passer par le nez, alors que
les sons «censés correspondants» en vietnamien se prononcent
en fermant la bouche. La confusion peut se produire chez certains
enseignants.
- Les consonnes finales méritent une analyse. Le système
vietnamien compte six consonnes finales [p t k m n ŋ], et elles
ne se produisent qu’en phase d’implosion. Conséquences: en
parlant français on a tendance à produire ces six consonnes à la
vietnamienne en abandonnant la phase d’explosion et à laisser
carrément tomber les autres qui n’existent pas dans sa langue.
Parmi ces «victimes» se trouve notamment le [r], qui disparaît
presque systématiquement dans les mots comme sœur, peur,
professeur… chez nombre de collègues.
- La confusion [g] et [ɤ] est assez fréquente chez les
Vietnamophones. Le [g] français dont l’orthographe est la même
qu’en vietnamien («g» et «gh» ). Mais il est bien différent du point
de vue articulatoire. S’ils sont tous vélaires, le [g] français est

-461-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

une consonne occlusive alors le [ɤ] vietnamien est une fricative.


Comme nous le savons, l’articulation d’une occlusive consiste
essentiellement en une occlusion du canal buccal qui est
suivie d’une ouverture brusque, alors qu’une fricative comporte
seulement un resserrement, l’air expiré détermine un bruit de
frottement ou de souffle. Quand [g] est à l’état isolé, il peut être
bien articulé. Mais une fois entré dans la phrase, il risque de
se «fricatiser» sous l’influence du vietnamien. Il est tout à fait
possible que le mot gare par exemple dans Je vais à la gare soit
prononcé avec le [ɤ] vietnamien sans être suivi du «r» final.
Bien entendu, les analystes doivent s’intéresser à tout: louer
les bonnes productions et critiquer les déviantes, mais ce sont
les dernières qui sont prioritaires pour aider les enseignants à
parfaire leur travail.
1.2. Approche pragmatique
Comme son nom l’indique, cette approche relève de la
pragmatique qui étudie les productions langagières dans une
perspective de l’action. Le langage est ainsi conçu comme un
ensemble intersubjectif de signes dont l’usage est déterminé par
des règles partagées. Il s’agit de l’ensemble des conditions de
possibilité du discours, c’est-à-dire des relations qui s’établissent
entre les signes et leurs usagers d’une part et d’autre part, entre
les phrases et les locuteurs. Le concept fondamental de cette
approche est l’acte de parole. Si l’approche linguistique a pour
base d’analyse la norme de la langue, l’approche pragmatique
s’intéresse à l’efficacité du parler de l’enseignant.
Le langage ne sert ni simplement, ni seulement à représenter
le réel, mais à accomplir des actes. Parler c’est agir sur autrui.
Cette conception met en avant les effets que les discours
exercent sur les locuteurs-auditeurs. A ce niveau l’attention est
focalisée sur la dimension interactive et interactionnelle que
toute production langagière présuppose. L’approche pragmatique

-462-
Communications de dimension spécifique

est tributaire de la théorie des actes de parole développée par


Austin et Searle. Cette théorie prend son point de départ dans
la conviction que l’unité minimale de la communication humaine,
c’est l’accomplissement de trois actes: locutoire, illocutoire et
perlocutoire. On peut analyser le discours pédagogique dans la
perspective des actes.
1.2.1. L’acte locutoire s’accomplit dès lors que l’on dit quelque
chose. Quand le professeur parle pour transmettre quelque
chose à ses apprenants il accomplit un acte locutoire. Réaliser
un acte locutoire, c’est construire des énoncés grosso modo
selon les règles phonétique, lexicale et grammaticale de la
langue. L’analyse se rapproche de l’approche linguistique que
nous avons présentée ci-dessus.
Ainsi, on peut découvrir non seulement les productions
déviantes de la norme mais aussi les tics de langage, qui n’ont
aucune utilité dans la communication. Chacun peut avoir le
goût de certains mots et les utiliser plus fréquemment que les
autres. Mais si l’emploi devient systématique, ce ne sera pas une
bonne chose. Nous constatons que ces tics peuvent apparaitre
d’un professeur à l’autre. Par exemple: les groupes «un tout petit
peu», «d’accord», «peut-être» et le verbe «continuer» sont très
fréquents dans le discours de certains de nos collègues. Pour
avoir un bel acte locutoire, il faut que l’enseignant diminue leur
fréquence pour donner la place aux autres mots sous peine
d’avoir des surnoms comme: Monsieur un tout petit peu, Madame
d’accord.
1.2.2. L’acte illocutoire c’est ce que l’on fait en parlant: parler
c’est agir. Le «agir» du professeur en classe consiste en un
certain nombre d’opérations suivant un certain itinéraire: saluer
les apprenants, commencer la leçon, expliquer le contenu et
finalement clore la séance. Ces opérations varient d’un moment
à l’autre et sont souvent imprévisibles. Pourtant, on observe

-463-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

des moments récurrents. D’après F. Cicurel (in Dabène, 1990:


44) «le déroulement d’un cours se fait selon un cadre formel où
un certain nombre d’opérations discursives apparaissent avec
régularité et paraissent tenir du «rituel». Le travail sur le contenu
de la nouvelle leçon peut par exemple s’effectuer comme suit:
- Annoncer ce qu’on fait ;
- Faire référence à un savoir partagé ;
- Expliquer
- Indiquer ce qu’il faut retenir ;
Ces opérations se réalisent par des actes de parole. Analyser
les observations de classe dans la perspective pragmatique
permet de mettre en relief l’aspect «utilitaire» le travail de
l’enseignant. Les paroles doivent servir à quelque chose. On
ne doit pas parler dans le vide donnant lieu à un discours de
remplissage, ce qui arrive souvent quand on a un espace de
temps de trop. Pour le combler, on se permet de parler des
choses qui sortent complètement du sujet, ou des choses qui
ne contiennent pas d’informations: on parle pour parler. Il arrive
qu’on pose des questions, qui sont en général faciles à poser,
mais la réponse est difficile.
Une enseignante qui travaille sur un texte (Au village, Sandrine
est «quelqu’un», Le monde de l’éducation, octobre 1999) termine
la séance comme suit: «Peut-être on va maintenant / il vous reste
encore quelques minutes / pour discuter peut-être / du rôle de
l’enseignement / de l’enseignant oui / …».
Ce n’est pas facile du tout d’exécuter cette consigne et on a
un grand silence dans la classe. C’est aussi le cas des séquences
qui terminent la séance:
P1: (…) D’après vous / après ça comment trouvez-vous le
métier d’enseignant? / Après ça comment trouvez-vous le métier
d’enseignant? /

-464-
Communications de dimension spécifique

E1: Difficile (rire)


P2: (rire) Oui c’est pas facile / pour assumer bien votre tâche /
Oui c’est pas facile. / Oui peut-être une petite pause, / on s’arrête ici /
La consigne dans P1 (prononcée à la fin de la leçon) ne
sollicite pas une réponse, l’enseignante aurait dû ne pas la
produire.
1.2.3. L’acte perlocutoire se justifie en termes d’effet recherché (la
perlocution,c’est l’effet qui est produit par le propos sur l’allocutaire).
En d’autres termes, on accomplit les actes perlocutoires par le
fait d’avoir dit quelque chose et qui relèvent des conséquences
de ce que l’on a dit. Le parler de l’enseignant peut stimuler ou
endormir les apprenants. On peut ne rien reprocher à une séance
eu égard à son contenu, mais les élèves y «dorment» à cause
de la monotonie du discours pédagogique. L’idéal est d’avoir
une diction nette et chantante. Sinon, l’enseignant doit parler
distinctement et clairement en articulant bien les sons, ce que tout
le monde peut faire.
En dehors des moyens linguistiques interviennent aussi
dans le DP les moyens paraverbaux: geste et proxémique, rire et
sourire, rythme et intonation, déplacement en classe et écriture
au tableau. Tous ces facteurs participent de concert avec le verbal
au déroulement de la leçon. On peut ajouter encore l’humour.
Nous savons que ce dernier terme désigne une forme d’esprit
qui consiste à présenter la réalité de manière à en dégager les
aspects plaisants et insolites. Recourir à l’humour permet à
l’enseignant de rendre l’atmosphère de la classe moins tendue et
d’exploiter plus efficacement le document nouveau. L’analyse des
observations de classe doit prendre en compte tous ces facteurs
pour bien évaluer le poids perlocutoire.
1.3. Approche pédagogique
Jugeant que la plupart des approches habituellement
proposées ne tiennent pas compte du caractère spécifique des

-465-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

échanges verbaux dont la finalité exclusive est l’enseignement/


apprentissage d’un langage non-maternel, L. Dabène (1984)
a mis au point un appareil de description spécifique à ce type
particulier de dialogue dans son article intitulé «Communication
et métacommunication dans la classe de langue étrangère.»
Elle s’interroge tout d’abord en amont sur les conditions
de production de ces échanges, c’est-à-dire sur les statuts des
partenaires en présence, essentiellement déterminés par rapport
à la transmission d’un certain type de savoir. A partir de cette
réflexion, elle précisera les rôles spécifiques et concomitants que
l’enseignant est appelé à tenir. Trois fonctions principales que
l’enseignant doit conjointement ou alternativement assumer sont
les suivantes:
- Une fonction de vecteur d’information,
- Une fonction de meneur de jeu
- Une fonction d’évaluateur.
Ces trois fonctions structurent la métacommunication dans la
classeetseréalisentàtraversuneséried’opérationsmétalinguistiques.
D’après L. Dabène (1984), le discours pédagogique en classe de
langue comprend les sous-discours suivants: a) Les métadiscours
issus de la fonction d’ «informateur». b) Les métadiscours issus de la
fonction «meneur de jeu». c) Les métadiscours issus de la «fonction
d’évaluateur».
1.3.1. Métadiscours d’informateur
Cette fonction implique la transmission du savoir. Il s’agit d’un
savoir fixé par les concepteurs du manuel et par l’institution.En classe
de langue, elle consiste surtout à faire acquérir des connaissances
sur la langue et la culture étrangères. Ce travail représente une
partie importante du discours de l’enseignant. Ce vecteur entraîne
trois grands types de métadiscours: le métadiscours informatif, le
métadiscours explicatif, le métadiscours descriptif.

-466-
Communications de dimension spécifique

a) Métadiscours informatif
L’enseignant effectue cette opération en nommant les choses.
On voit ici un processus onomasiologique, qui part de la notion
vers le signe. Il s’agit d’opérations de dénomination. L’opération
de dénomination apparaît quand surgit dans la situation de classe
un manque lexical;en raison d’une absence de connaissance
linguistique ou de l’usage erroné d’un terme, l’enseignant peut
alors fournir le signe qui correspond au référent.
b) Métadiscours explicatif
Ce discours est appelé aussi «glose métalinguistique» par
H. Besse (1980: 102). Il est mis en œuvre par l’enseignant pour
élucider le sens d’un segment. Ces opérations se manifestent par
une grande diversité de réalisations discursives pour expliquer
le signe inconnu au moyen de la paraphrase (appelé aussi
«traduction intralinguale» ou reformulation par R. Jakobson,
1963), de la définition, du recours au contexte ou de l’utilisation
d’un exemple.
c) Métadiscours descriptif
Si les deux premiers types servent à l’explication du sens
d’un mot ou d’une séquence, le dernier est utilisé généralement
pour éclaircir des règles grammaticales. Ce type de métadiscours
vise à rendre compte de la constitution et du fonctionnement de la
langue-cible en tant que système. Il est d’ordre métalinguistique,
mais il ne correspond pas aux discours grammaticaux écrits
dans les livres de grammaire savante. L’objectif du travail de
l’enseignant est d’enseigner la langue et non pas de la décrire.
1.3.2. Opérations de meneur de jeu
La fonction de meneur de jeu se réalise tout d’abord par toute
une série d’opérations régulatrices de discours.

-467-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

a) Opérations de ponctuation de l’échange


Le pouvoir de gérer la classe donne à l’enseignant le droit
de désigner son interlocuteur dans les échanges pédagogiques.
Il s’agit d’opérations de distribution des tours de parole aux
apprenants.
b) Opérations d’incitation à la prise de parole
La communication didactique est caractérisée, comme nous
l’avons mentionné, par une dissymétrie entre les interlocuteurs.
L’apprenant a souvent un complexe d’infériorité provenant de son
niveau linguistique en langue cible et aussi de sa position passive
dans la mesure où son rôle est limité à réagir aux sollicitations
de l’enseignant: il tend à restreindre sa parole. La tâche de
l’enseignant est donc de le faire parler. Il utilise alors des énoncés
d’ordre métalinguistique qui incitent l’apprenant à prendre la parole.
Ces moyens peuvent se présenter sous la forme d’interrogation
(Qui sait? Qui veut prendre la parole?), d’injonction (Répondez, s’il
vous plaît!) ou de procédés indirects tels que l’intonation montante
invitant à la poursuite d’une production.
c) Opérations de mise en garde
Elles sont destinées à attirer l’attention de l’auditoire sur le
risque encouru. Un enseignant compétent doit être en mesure de
prévoir, à partir de ses expériences professionnelles, les fautes
souvent commises par les apprenants. Un bon enseignant doit
encore connaître les problèmes de chacun de ses apprenants
lors de la réalisation langagière en classe. Ainsi, il peut attirer
l’attention de ces derniers sur la faute qu’ils pourraient commettre.
C’est une mesure de prévention souvent utilisée pour améliorer
la production des apprenants.
Ces opérations se réalisent par des termes de mise en garde
(Attention à, N’oubliez pas de, Il faut…) qui s’accompagnent
des termes métalinguistiques portant sur le risque de la langue

-468-
Communications de dimension spécifique

apprise. Par exemple, Répondez en mettant les phrases au passé


composé, attention à l’accord du participe passé.
L’opération de meneur de jeu a ainsi pour but de guider les
apprenants dans l’acquisition de la langue étrangère. On les
met dans la bonne voie et les encourage à exécuter les tâches
pédagogiques. Vous êtes dans la bonne voie, continuez! / Le
mot que vous avez trouvé est dans le même domaine, trouvez
un autre plus proche! Telles sont les phrases qu’on peut utiliser
dans l’explication du vocabulaire, par exemple.
1.3.3. Opérations d’ «évaluateur»
La communication se fait en classe dans le cadre d’un triangle:
l’enseignant émet un message, généralement sous forme d’une
question qui provoque une réponse (réponse au sens propre du
terme ou exécution d’une tâche demandée par l’enseignant),
qui retourne par la suite à l’enseignant en déclenchant chez lui
une réaction. Cette structure de base des échanges pourrait se
présenter comme suit:
- Sollicitation de l’enseignant ;
- Réponse de l’élève ;
- Réaction évaluative de l’enseignant.
Les énoncés à des fins évaluatives représentent une partie
majeure d’une classe de langue. Au cours de leur apprentissage,
les apprenants sont souvent amenés à émettre des hypothèses
sur le fonctionnement de la langue étrangère. Ils attendent des
appréciations de la part de l’enseignant. Ce dernier se donne
la tâche de prononcer le verdict sur cette manifestation des
apprenants, et ces derniers améliorent ainsi leurs compétences
linguistiques. L’évaluation varie en fonction du type d’activités
pédagogiques et joue un rôle très important dans les échanges
de classe.

-469-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2. Une solution d’éclectisme


Nous avons passé en revue trois possibilités d’analyser
les observations de classe. Chacune a ses mérites. L’approche
linguistique insiste sur la précision du parler de l’enseignant: il
doit être exemplaire parce que les apprenants acquièrent des
connaissances par/dans ce parler. L’approche pragmatique met
l’accent sur l’efficacité du travail de l’enseignant: chaque énoncé
doit avoir un poids utilitaire. L’approche pédagogique se base sur
les fonctions de l’enseignant et l’interaction en classe à travers
le triangle pédagogique. Nous essayons de prendre en compte
tous ces points forts pour construire une piste d’analyse pour le
public vietnamien.
2.1. Chaque séance de pratique de la langue a ses objectifs
qui conditionnent le travail de l’enseignant. Par exemple, une
leçon de compréhension écrite comprend en général quatre
étapes: orientation, approche globale, compréhension détaillée
et appropriation. Il faut donc examiner tout d’abord les objectifs
que le professeur se propose d’atteindre dans telle ou telle étape.
C’est à partir de là que l’on examine les fonctions que le professeur
devrait remplir au moyen de son DP; elles sont au nombre de
trois: fonction de meneur de jeu, fonction d’informateur, fonction
d’évaluateur.
2.2. Les échanges en classe s’effectuent suivant une
structure tripartie: sollicitation de l’enseignant; réponse de l’élève;
réaction évaluative de l’enseignant. Nous l’appelons triangle
pédagogique en attribuant respectivement à ses constituants les
noms suivants: initiation, réponse, et feedback.
Initiation Réponse

Feedback
L’analyse des échanges se basera sur cette structure. Chaque
élément de ce triangle est le fruit d’une stratégie discursive et

-470-
Communications de dimension spécifique

peut avoir par conséquent des valeurs différentes suivant la


situation dans laquelle ils sont produits. En général, initiation est
liée aux fonctions de meneur de jeu et d’informateur, feedback à
l’évaluateur. Il est à souligner que si le feedback est la réaction
de l’enseignant à la réponse de l’apprenant, il est le plus souvent
jumelé avec une nouvelle initiation, qui s’inscrit dans la filiation
de la précédente pour ouvrir un autre échange. Il faut examiner le
fonctionnement de ce triangle à travers le discours pédagogique
qui s’y produit.
2.3.Si le DP est la matérialisation de la démarche pédagogique,
il est important d’en examiner les moyens d’expression. En tant
que non natifs, nous devons veiller à la qualité du discours
pédagogique qui présente selon nous un double intérêt. D’un côté,
il permet à l’enseignant d’exercer ses trois fonctions: informateur,
meneur de jeu et évaluateur. De l’autre, il constitue un modèle de
communication car de nombreux énoncés peuvent être réutilisés
par les apprenants dans la communication courante.
Les moyens peuvent être de nature linguistique et
paralinguistique. Dans le premier cas, le DP est réalisé par
des structures grammaticales et des moyens lexicaux. On peut
signaler par exemple le registre de langue, des types de question,
des techniques de paraphrase, l’emploi des articulateurs…
Les moyens paraverbaux (accent, geste, kinésique, rythme et
scriptural) sont une composante importante du DP et méritent
aussi d’être considérés. Le plan de l’analyse pourrait être le
suivant:
0. Objectifs et déroulement de la séance
1. Discours pédagogique et fonctions de l’enseignant
Fonction de meneur de jeu
Fonction d’informateur
Fonction d’évaluateur

-471-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2. Triangle pédagogique
Initiation
Réponse
Feedback
3. Moyens d’expression
Moyens linguistiques
Moyens paraverbaux.
Conclusion
Le discours pédagogique joue un rôle extrêmement
important dans l’enseignement/apprentissage. Il matérialise la
conduite de classe. Toute la communication en classe menée
par le professeur se fait par ce moyen. Dans l’enseignement du
FLE qui nous concerne, la langue apprise est aussi la langue de
communication; les apprenants acquièrent des connaissances
par/dans le discours de leur professeur. Ce discours est
d’autant plus valorisant qu’il est un des premiers facteurs qui les
impressionnent et créent chez eux une motivation.
En conséquence, le discours tenu par l’enseignant doit
figurer dans les recherches de la didactique. En général, on ne
s’aperçoit pas toujours de ses propres erreurs, il faut un regard
de l’extérieur. Là intervient le rôle des observations de classe.
Les possibilités d’analyse que nous avons présentées ci-dessus
peuvent se faire valoir dans ce travail.

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Communications de dimension spécifique

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-473-
LABORATION D’UN GUIDE D’AUTOFORMATION
POUR LES ENSEIGNANTS DE FRANÇAIS DE LA RÉGION
D’ASIE DU SUD-EST

LASÉMILLANTE Priscille
Institut français du Laos - Luang Prabang
NGUYEN Van Toan
Université de Hanoï
VO Van Chuong
Université de Cantho

Résumé:
Face aux besoins croissants en formation continue et perfectionnement
linguistique constatés chez les enseignants de français de la région d’Asie du
Sud-Est et, alors que les stages de formation continue en présentiel sont moins
fréquents qu’avant ou ne sont accessibles qu’à un nombre limité d’enseignants,
sous l’égide du CREFAP/OIF, le projet d’élaboration d’un guide d’accompagnement
à l’autoformation à destination de ce public a vu le jour en mai 2019.
Dans le cadre de ce travail, les besoins en autoformation des enseignants en
termes de compétences linguistiques et professionnelles ainsi que leurs attentes
vis-à-vis d’un guide d’accompagnement à l’autoformation sont identifiés au
moyen du test Evalang et d’un questionnaire construit à partir du référentiel des
compétences des enseignants de français de la région.
Le présent article décrit le projet d’élaboration dudit guide d’accompagnement
à l’autoformation, les premiers résultats de l’étude portant sur les besoins et attentes
des enseignants, ainsi que les répercussions de ces résultats sur l’évolution du guide.
Mots-clés: autoformation, formation continue, guide, enseignants de français,
Asie du Sud-Est
Communications de dimension spécifique

1. Contexte
Selon les estimations 2018 de l’Observatoire de la langue
française, il existe dans la région un nombre important d’enseignants
de français en activité: 650 - 700 au Vietnam, 450 - 650 au
Cambodge et 260 - 300 au Laos. Dans un contexte d’exercice en
mutation où on observe des changements en termes de référentiel
de compétences, de programme d’études, d’approche et de
supports pédagogiques, ces enseignants, notamment les plus
jeunes, sont en demande croissante d’accompagnement sous
forme de formation continue afin de faire face à ces nouveaux défis.
De plus, faute d’occasions de pratiquer la langue française dans
leur environnement quotidien, les enseignants ont parfois besoin,
en sus d’un renforcement de leurs compétences pédagogiques,
d’un renforcement de leurs compétences linguistiques.
Dans les années 2000, un effort conséquent a été mené par
les divers acteurs concernés afin de répondre à ces besoins en
formation. Nous assistons, par contre, depuis quelques années, à
une diminution de ces moments de regroupement et d’échanges
entre pairs, où, de surcroît, un nombre de plus en plus limité
d’enseignants peut y assister. Dans le but de pallier à ce qui est
perçu comme un manque en formation continue, les enseignants
ont de plus en plus recours aux ressources en ligne. Or, face à
la multitude des outils disponibles, ces derniers semblent avoir
des difficultés à gérer en autonomie et sans accompagnement le
renforcement de leurs compétences. Le choix des ressources, la
capacité à évaluer la fiabilité d’un document ou l’adéquation avec
des besoins réels sont des exemples des difficultés rencontrées.
Accompagner les enseignants dans le développement de
leur capacité à se former seul est donc un réel enjeu. Le projet
de conception d’un guide d’accompagnement à l’autoformation à
destination des enseignants de français est né de ce constat. Il est
important de préciser que le projet ne consiste pas en l’élaboration

-475-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

d’un manuel de formation continue avec des modules de formation


structurés selon un parcours prédéfini mais bien d’un guide
menant l’enseignant à évaluer ses besoins et à suivre au gré de
ses envies, curiosités, un ou plusieurs parcours proposés de façon
non-exhaustive.
L’objectif principal du guide d’accompagnement à l’autoformation
est d’appuyer les enseignants dans le développement de leurs
compétences linguistiques et professionnelles. En ce sens, le
guide devra:
- Aider chaque enseignant à identifier ses besoins en termes
d’autoformation et ce, d’une part, en fonction du référentiel de
compétences pour les enseignants de français de la région et,
d’autre part, grâce aux résultats obtenus à l’issu de la passation
du test de positionnement Evalang;
- Les orienter vers des ressources ou des outils existants,
mobilisables, fiables et convenant aux besoins identifiés;
- Fournir des conseils méthodologiques pour une autoformation
réussie.
La diffusion du guide sera assurée sous deux formats:
- Une version en ligne, pour une utilisation par l’enseignant
en totale autonomie. Cette version sera hébergée sur la plate-
forme du CREFAP ou celle de FAD-FLE;
- Une version téléchargeable et imprimable pouvant servir
de supports aux réunions pédagogiques organisées entre pairs
au sein des établissements scolaires, lors de regroupements
nationaux ou autres dispositifs favorisés par les Ministères de
l’Éducation, apporter un appui complémentaire aux dispositifs de
formation continue existant en ligne dans la région: FAD-FLE.
net, IFProf, plateforme ministérielle (Ecole de connexion du MEF
Vietnam), MOOC de Cavilam, Prof-Fle.

-476-
Communications de dimension spécifique

Ses objectifs énumérés, il convient d’attendre in fine que


le développement des compétences des enseignants serve à
améliorer la qualité de l’enseignement du français dans la région.

2. Choix méthodologiques pour l’étude des besoins


et attentes des bénéficiaires du guide
Le guide d’accompagnement à l’autoformation s’adresse
à tous les professeurs de français en milieu scolaire de la
région Asie du Sud-Est. Son organisation prévisionnelle prévoit
de suivre la structure du référentiel de compétences des
enseignants de la zone. Ce référentiel a été conçu en 2015 par
une équipe comprenant des experts du Ministère de l’Éducation
et de la Formation vietnamien, des formateurs d’établissements
de formation d’enseignants et des cadres formateurs des
départements de l’éducation des provinces et bénéficiant du
soutien technique et pédagogique du CREFAP/OIF, ainsi que
de l’expertise de Monsieur Jean Yves Bodergat, Maître de
Conférence auprès de l’université de Caen-Normandie.
Afin de répondre au mieux aux besoins et attentes des
enseignants, l’administration d’une enquête, auprès d’environ
200 professionnels, soit environ 10% des enseignants de français
de la région, a été établie. Elle était organisée comme suit:
- Un premier volet, apportant des éléments de réponses sur
les compétences professionnelles des enseignants, le format du
guide, ses contenus, ses modalités d’utilisation;
- Un deuxième, portant sur l’évaluation des compétences
linguistiques des enseignants.
Le premier volet, «Structure du guide et compétences
professionnelles», a été conçu spécifiquement pour les besoins de
l’enquête. Si au départ, l’adaptation du référentiel de compétences
des enseignants de français de la zone ainsi que de “La grille
de compétences de l’EPG (European Profiling Grid)”, avait été

-477-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

envisagée, il a finalement été décidé de n’avoir recours qu’au


référentiel de compétences régional afin de faciliter l’utilisation du
questionnaire par les enseignants.
Pour le volet «Compétences linguistiques», Evalang, test
de positionnement élaboré par le département évaluation et
certifications du CIEP, a été l’outil d’analyse. Il permet de définir
le niveau précis des enseignants pour les compétences de
compréhension de l’oral, compréhension de l’écrit et la maîtrise
de la grammaire et du lexique.
La passation des enquêtes devait permettre de confirmer
ou réviser la structure du guide telle qu’elle a été envisagée au
début de ce travail (Cf. annexe 1 - structure initiale du guide).

3. Les premiers résultats de l’étude des besoins


et attentes des enseignants
3.1. Premiers résultats de l’enquête Structure du guide
et compétences professionnelles
En décembre 2019, 62 enseignants dont 50 vietnamiens
et 12 laotiens avaient répondu à l’enquête (Cf. annexe 2 -
questionnaire). Aucune réponse de professeurs cambodgiens n’a
été recueillie, le questionnaire ayant pourtant été diffusé auprès
de plusieurs enseignants et auprès l’association des enseignants
de français du Cambodge.
Les premières informations collectées grâce à cette enquête
ont permis à l’équipe de projet d’avoir une idée approximative
sur le niveau de maîtrise des compétences professionnelles
des enseignants (positionnement par rapport au référentiel de
compétences des enseignants de français: assertions extrait
du référentiel à cocher puis positionnement global dans la
compétence renseignée) ainsi que leurs attentes vis-à-vis du
projet de guide (besoin en formation, structure du guide).

-478-
Communications de dimension spécifique

Les résultats obtenus sont ci-après développés (hors


évaluation globale par compétence).
3.1.1. Les compétences professionnelles des enseignants
Compétence 1 - Agir en professionnel

Compétence 2 - Agir en éducateur

Compétence 3 - Maîtriser la langue-culture française et des


pays francophones pour enseigner et communiquer

Compétences 4 et 5 - Concevoir, mettre en œuvre des


situations d’enseignement et d’apprentissage et prendre en
compte les spécificités de l’apprenant

-479-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Compétence 6 - Évaluer les élèves

Compétence 7 - Intégrer les éléments de la culture numérique


nécessaires à l’exercice du métier

-480-
Communications de dimension spécifique

Compétence 8 - Concevoir et mettre en œuvre une démarche


individuelle et collective de développement professionnel

Compétence 9 - Coopérer avec les parents d’élèves et les


partenaires de l’école

Remarques générales
- Pour les compétences 1 et 2 (agir en professionnel et
en éducateur), les enseignants maîtrisent plus les savoir-faire
(formulés en termes «je sais….) que les savoirs (formulés en
termes “je connais…” ).

-481-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

- En ce qui concerne les autres compétences professionnelles,


c’est plutôt l’inverse. Les enseignants ont moins de confiance en
leurs savoir-faire qu’en leurs savoirs.
- Les savoir-être (formulés en termes «j’agis de façon à…»)
restent toujours un point faible chez la plupart des enseignants.
- Les compétences 7 et 8 concernant les TICE et le
développement professionnel sont aussi à perfectionner. Le taux
d’enseignants, qui se déclarent être capables de maîtriser ces
compétences, est le plus bas et varie entre 35% et 60%.
3.1.2. Les attentes des enseignants vis-à-vis du projet de guide
Offre de formation continue institutionnelle

Selon 60% des enseignants enquêtés, l’offre de formation


continue institutionnelle est jusqu’ici suffisante. Seulement
39,6% disent qu’elle est à compléter. Pourtant, jusqu’à 69,4%
des enseignants interrogés ont exprimé le souhait de suivre des
formations de perfectionnement méthodologique (51,2%), de
perfectionnement linguistique (23,3%) et en évaluation (14%).
Habitudes dans l’autoformation
Même si la majorité des enseignants souhaite bénéficier
davantage de formation continue, ils consacrent très peu de
temps à leur autoformation. Seulement 7,6% des enseignants
interrogés le font quotidiennement et 13,2% toutes les semaines.

-482-
Communications de dimension spécifique

Pour le reste, soit ils ne le font pas souvent (69,8%), soit ils n’ont
pas de temps (7,6%), soit ils ne savent pas comment faire (1,9%).

Quant à leur pratique d’autoformation, elle prend souvent


la forme de lecture (60,4%) ou de participation à des réseaux
professionnels (49,1%).

Et il s’agit d’une démarche plutôt individuelle (61,5%) que


collective (38,5%).

-483-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Cette démarche s’appuie essentiellement sur le recours à


des ressources numériques en ligne (88,2%).

64,7% des enseignants interrogés se déclarent avoir un


accès facile à ce type de ressources.

Lorsqu’ils sont demandés de classer les compétences à


développer en autoformation, des plus aux moins importantes,
ils mettent en tête de classement, les 3 compétences suivantes:
compétences en pédagogie, compétences linguistiques et
compétences en évaluation. Ceci coïncide avec leurs propositions
sur les contenus de formation continue institutionnelle présentées
plus haut.

-484-
Communications de dimension spécifique

A propos du projet de guide d’accompagnement à l’autoformation,


100% des enseignants interrogés le jugent nécessaire et utile.

Et la plupart d’entre eux préfèrent que ce guide soit présenté


à la fois sous forme de livret imprimé et de plate-forme en ligne.

Quant aux contenus, ils les classent par ordre décroissant


comme suit:

-485-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Les contenus relatifs aux conseils méthodologiques et


au développement professionnel sont en tête du classement.
Viennent ensuite ceux portant sur les compétences linguistiques
et les compétences professionnelles. Pourtant, il semble que
les termes «développement professionnel» et «compétences
professionnelles» sont assez ambigus aux yeux des enseignants
interrogés en raison de la formulation par l’équipe de projet.
Il est fort probable que les enseignants les prennent pour les
compétences pédagogiques et les classent ainsi devant les
compétences en évaluation. D’ailleurs, si on croise ces réponses
avec celles recueillies précédemment, il ressort que les
conseils méthodologiques, les compétences linguistiques et les
compétences en évaluation sont les contenus les plus attendus
par les enseignants en autoformation.
3.2. Premiers résultats du test d’Evalang
Le test a été administré auprès de 58 enseignants mais
seulement 33, dont 2 laotiens et 31 vietnamiens, ont complété
l’ensemble des 3 épreuves du test, à savoir l’épreuve de
grammaire et de lexique, l’épreuve de compréhension écrite et
l’épreuve de compréhension orale.
Les premiers résultats obtenus montrent que les enseignants
testés possèdent des compétences linguistiques plus basses
que celles attendues:
• grammaire et lexique: A1 (12,1%), A2 (33,3%), B1 (45,5%),
B2 (9,1%), C2 (3%).
• compréhension écrite: A1 non atteint (6,1%), A1 (27,3%),
A2 (45,5%), B1 (18,2%), C2 (3%).
• compréhension orale: A1 non atteint (6,1%), A1 (45,5%),
A2 (27,3%), B1 (15,2%), B2 (3%), C1 (3%).

-486-
Communications de dimension spécifique

Le niveau moyen des enseignants testés en grammaire et


lexique se situe entre le A2 et le B1. Ils sont, par contre, moins à
l’aise à l’écrit et à l’oral. Leur niveau moyen varie entre le A1 et
le A2, seulement.
Il est à noter que ces résultats ne sont à prendre en
considération qu’à titre consultatif. Ceci pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, la population testée est loin d’être représentative
car 88,2% sont des enseignants de français LV2 ou enseignants

-487-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

des classes bilingues au primaire et au collège de la ville de


Can Tho.
Aussi, le format du test et l’interface de la plate-forme Evalang
ne leur étaient pas familiers.
Enfin, certains enseignants ont rencontré des problèmes
techniques lors de la passation du test.

4. Evolution du guide
4.1. Difficultés
La mise en œuvre du projet a fait apparaître des difficultés et
défis auxquels l’équipe de concepteurs doit trouver des solutions.
Ils sont d’ordres méthodologiques, motivationnels et techniques.
Au niveau méthodologique, la conception des outils d’enquête
et d’évaluation des compétences actuelles des enseignants de
français devait respecter plusieurs contraintes: simple mise en
œuvre, concordance avec le référentiel de compétences, recueil
des données au service de l’élaboration du guide. Au départ,
l’adaptation de “La grille de compétences de l’EPG (European
Profiling Grid)” a été effectuée afin de concevoir le questionnaire
type. Sa complexité et son niveau de précision trop détaillée le
rendait peu accessible au public bénéficiaire du projet. Après
concertation et discussion, l’équipe de concepteurs a décidé de
construire un questionnaire plus simple et facile d’accès pour le
public ciblé à partir du référentiel des compétences régional des
enseignants de français.
Au niveau motivationnel, bien qu’ils soient les premiers
bénéficiaires in fine du travail mené, les enseignants de français
de la région manifestent très peu d’entrain à participer à l’enquête
et au test de niveau linguistique.
Un premier envoi du questionnaire à un groupe test d’une
trentaine d’enseignants n’a permis d’obtenir qu’une seule réponse.

-488-
Communications de dimension spécifique

Dans un second temps, et avec un peu plus de succès, c’est au


cas par cas que les questionnaires ont été administrés, avec des
messages individualisés ou lors de regroupements en présentiel.
Concernant le test d’Evalang, il s’agit d’un excellent outil
d’évaluation de compétences linguistiques, offert gratuitement
aux enseignants, mais ces derniers ont beaucoup de réticences
à le faire. Cela pourrait être expliqué par le manque de motivation
et la peur d’être évalué.
Par ailleurs, parmi les trois pays ciblés, aucune participation
de la part des enseignants cambodgiens n’a été enregistrée.
Au niveau technique, étant donné la structure du questionnaire
et les différents types de questions proposées (QCM, questions à
réponse courte, questions ouvertes, évaluation sur une échelle,
classement, etc.), un outil informatique professionnel de sondage,
Monkey Survey, a été utilisé pour administrer l’enquête. Le choix
de cet outil payant a dû se faire car les outils gratuits existants
(Google Form, GetFeedback, Survey Planet…) ne pouvaient
répondre pleinement aux contraintes du projet.
Pour la passation du test Evalang, les enseignants participant
n’étaient pas familiarisés au format du test et aux manipulations
informatiques à effectuer. De plus, le test chronométré en a
déstabilisé un grand nombre. Certains enseignants n’ont, de fait,
pas pu terminer leur test dans les temps impartis. Les résultats
obtenus ne sont donc pas toujours représentatifs du niveau de
ces derniers.
4.2. Modifications à apporter
Au regard des résultats obtenus à ce jour, les modifications
suivantes seront apportées au guide.
Dans la partie renforcement des compétences linguistiques:

-489-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

• Ajout compétences de niveau A2.


En effet, les résultats des tests Evalang ont démontré que le
niveau de certains enseignants est relativement faible. Il a donc
semblé important de proposer un renforcement des compétences
dès ce niveau.
• Focus compétences de l’oral
Comme souvent, la maîtrise des compétences de l’oral fait
défaut. Dans un contexte exolingue, la pratique d’une langue
étrangère n’est pas facilitée. Les enseignants sont comme tout un
chacun concernés par cette problématique. Le renforcement des
compétences de l’oral s’inscrit, par ailleurs, dans les mouvements
didactiques et pédagogiques qui promeuvent la communication
et l’interaction, il s’avère donc primordial d’y accorder plus
d’importance.
Dans la partie compétences professionnelles:
• Intégration du volet éthique au volet développement
professionnel.
Il convenait de réorganiser cette partie afin d’éviter toutes
redondances possibles avec d’autres sujets traités dans le guide.

5. En guise de conclusion
Ce projet d’élaboration d’un guide d’accompagnement à
l’autoformation n’en est qu’à sa première phase de conception
mais montre déjà qu’il s’agit d’un travail complexe et ambitieux.
L’étude des besoins et attentes des bénéficiaires du guide
se poursuivra telle qu’elle a été définie dans le protocole de
recherche. Ses premiers résultats constituent tout de même
de premiers éléments d’analyse permettant de poursuivre la
construction du projet. Ils ont, d’ores et déjà, permis à l’équipe
de concepteurs de prendre du recul par rapport aux travaux en
cours de réalisation, d’apporter des modifications nécessaires à

-490-
Communications de dimension spécifique

la structure du produit final attendu, tant dans la forme que dans


ses contenus.

BIBLIOGRAPHIE
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du paradigme de l’instruction au paradigme de l’autonomie.
Paris. L’Harmattan.
2. Azzam-Hannachi, R. (2007). L’autoformation: une solution
pour optimiser la formation en langue vivante des professeurs
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3. Bertocchini, P. et Costanzo, E. (2017). Manuel de formation
pratique pour le professeur de FLE. CLE International,
deuxième édition.
4. Carré, P. et Moisan, A. (2002). La formation autodirigée:
aspects psychologiques et sociologiques. Paris: L’Harmattan.
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professionnelles de FLE/S en France, entre diversité et
qualité. Formation et pratiques enseignantes en contextes
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constructeur: cas d’enseignants de FLS en formation ou en
exercice et d’aspirants coopérants internationaux. Thèse de
doctorat en sciences de l’éducation, Université de Montréal,
Montréal.
7. Ciekanski, M. (2005). L’accompagnement à l’autoformation
en langue étrangère: contribution à l’analyse des pratiques
professionnelles (Étude des dimensions langagières et
formatives des pratiques dites ”de conseil” dans des systèmes
d’apprentissage autodirigé en langue étrangère). Education.
Université Nancy II.

-491-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

8. Conseil de l’Europe (2000). Cadre Européen Commun de


Référence pour les Langues. Paris. Didier.
9. Conseil des ministres de l’Éducation (Canada) [CMEC].
(2013). Parlons d’excellence: Compétences linguistiques
pour un enseignement efficace.
10. Eaquals Association, CIEP, Eurocentres et ACPLS. (2015).
Inventaire linguistique des contenus clés des niveaux du
CECRL.
11. Huberman, M. (1989). La vie des enseignants, évolution et
bilan d’une profession. Paris: Delachaux Niestlé.
12. Longuet, F et Springer, C. (2012). Développer et évaluer les
compétences professionnelles des enseignants de langues
à l’université: une mission impossible? Causa Mariella.
Formation initiale et profils d’enseignants de langues, De
Boeck, pp.330.
13. Ortun, F. et Pharand, J. (2012). L’autoformation d’enseignants
comme dispositif de formation continue. État des lieux et
recommandations. Biennale internationale de l’éducation, de
la formation et des pratiques professionnelles. Paris, France.
14. Perrenoud, P. (1994). La formation des enseignants entre
théorie et pratique. Paris: L’Harmattan.
15. Perrenoud, P. (2001). Développer la pratique réflexive dans le
métier d’enseignant. Paris: ESF Éditeur.
16. Tremblay, A-N. (2003). L’Autoformation: Pour apprendre
autrement. PU Montréal.

Annexes
Annexe 1: Structure initiale du guide d’accompagnement à
l’autoformation (structure proposée en juillet 2019)

-492-
Communications de dimension spécifique

PREAMBULE
• Présentation du guide, sa raison d’être, ses objectifs, ses
contenus…
AUTOFORMATION
• Description synthétique de différents modes d’autoformation
• Conseils pour une autoformation réussie
PARCOURS
• Test de positionnement avec résultats permettant d’identifier
son profil (à partir des résultats Evalang + portfolio compétences
professionnelles)
• Thèmes d’autoformation avec répertoire des ressources et
des outils:
COMPÉTENCES LINGUISTIQUES
INTRODUCTION
a. Approfondir ses compétences - Niveau B1
b. Approfondir ses compétences - Niveau B2
c. Compétences de l’enseignant: perfectionner son langage
professionnel
COMPÉTENCES PROFESSIONNELLES
1. MÉTHODOLOGIE DE L’ENSEIGNEMENT DU FLE
a. Introduction du volet - rappel des différents courants
didactiques et pédagogiques.
b. Concevoir et mettre en œuvre des situations d’enseignement
et d’apprentissage.
c. Prendre en compte des spécificités de l’apprenant et de
l’environnement éducatif.

-493-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

2. TICE
a. Introduction du volet - Les TICE au service de l’enseignement.
b. Outils et dispositifs.
c. Ressources.
3. EVALUATION
a. Introduction du volet - méthodologie d’évaluation.
b. Outils et dispositifs.
c. Ressources.
4. ETHIQUE
a. Prise de conscience des enjeux éthiques et déontologiques
du métier d’enseignant
(questionnaire sur les pratiques).
b. Ressources documentaires.
5. DÉVELOPPEMENT PROFESSIONNEL
a. Pratique réflexive - concevoir et mettre en œuvre
une démarche individuelle et collective de développement
professionnel.
a. Recherche(s) - participation à des séminaires, colloques.

Annexe 2: Questionnaire - compétences professionnelles


Lien enquête: https://fr.surveymonkey.com/r/DNRH6BR
Introduction
Dans le cadre du projet d’élaboration d’un guide
d’accompagnement à l’autoformation piloté par l’Organisation
Internationale de la Francophonie (OIF) à destination des
enseignants de français de la région d’Asie du Sud-Est, nous vous

-494-
Communications de dimension spécifique

invitons à répondre au questionnaire suivant. Vos réponses nous


permettront de déterminer vos besoins en terme d’accompagnement
à la formation continue et de concevoir un guide, ses contenus,
ses modalités et modes d’utilisation qui répondent au mieux à vos
attentes.
A- VOS DONNEES PERSONNELLES
Vous pouvez rester anonyme si vous voulez. Mais vous
pouvez aussi mentionner votre nom. Nom:
Sexe:
☐ Femme ☐ Homme
Tranche d’âge:
☐ moins de 25 ans
☐ de 25 ans à 35 ans
☐ de 35 ans à 45 ans
☐ 45 ans à 55 ans
☐ plus de 55 ans
Niveau d’enseignement (plusieurs réponses possibles:
☐ Primaire ☐ Collège ☐ Lycée ☐ Université
Durée d’exercice dans le métier (en année):
☐ moins de 5 ans
☐ de 5 ans à 10 ans
☐ de 10 ans à 20 ans
☐ plus de 20 ans
Type de formation initiale reçue, lieu, durée:
Obtention d’un certificat en langue (ex: DELF) - niveau, date:

-495-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

B - VOTRE PERCEPTION DU MÉTIER D’ENSEIGNANT


(réponses classées par ordre d’importance décroissante)
1- Quels sont les cinq devoirs les plus importants du métier
d’enseignant?
………………………………………
………………………………………
………………………………………
………………………………………
………………………………………
2 - Quels sont les quatre aspects les plus intéressants de
votre métier?
………………………………………
………………………………………
………………………………………
………………………………………
3 - Quelles sont les trois difficultés les plus courantes de
votre métier?
………………………………………
………………………………………
………………………………………
C - COMPÉTENCES PROFESSIONNELLES
Enquête basée sur le référentiel de compétences des
enseignants de français de la zone Asie du Sud-Est.
COMPÉTENCE 1 - Agir en professionnel
Tout enseignant contribue à la formation sociale et civique des élèves. Il fait
preuve de conscience professionnelle. Il exerce sa responsabilité pédagogique; il
connaît les droits et respecte les devoirs du métier.

-496-
Communications de dimension spécifique

Veuillez choisir ci-dessous le(s) compétence(s) vous


correspondant.
Je connais:
☐ le Code de l’éducation
☐ le système éducatif du pays, la politique éducative en
vigueur et les référentiels de compétences pour les langues
Je sais:
☐ faire comprendre, partager et respecter, à travers les
activités d’enseignement apprentissage de la discipline et extra-
disciplinaires, les valeurs socio-culturelles, civiques et morales
du pays ainsi que celles du monde moderne
J’agis de façon à:
☐ cultiver le sentiment d’appartenance à un collectif
d’enseignants de français
COMPÉTENCE 2 - Agir en éducateur
Dans son exercice professionnel, l’enseignant de langue française joue un
double rôle: il aide l’élève à maîtriser une langue-culture et en même temps
contribue à l’aider à construire sa personnalité.

Veuillez choisir ci-dessous le(s) compétence(s) vous correspondant.


Je connais:
☐ le profil socioculturel des élèves et celui de leurs parents
☐ les besoins sociaux (insertion socio-professionnelle,
études supérieures dans les filières, universités francophones,
débouchés professionnels)
Je sais:
☐ faire comprendre, partager et respecter, à travers les
activités d’enseignement-apprentissage de la discipline et extra-
disciplinaires les valeurs socio-culturelles, civiques et morales du
pays ainsi que celles du monde moderne

-497-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

☐ sensibiliser et conseiller les élèves de français quant à


leur orientation
J’agis de façon à:
☐ adopter une attitude favorisant l’écoute, le dialogue et la
collaboration avec différents acteurs
COMPÉTENCE 3 - Maîtriser la langue-culture française et
des pays francophones pour enseigner et communiquer

Le professeur, dans son usage de la langue comme matière à enseigner, doit la


maîtriser tant à l’écrit qu’à l’oral. Il est attentif à la qualité de la langue chez les élèves.
Qu’il présente des connaissances, fournisse des explications ou donne du travail, il
s’exprime avec clarté et précision, en tenant compte du niveau de ses élèves.

Je connais:
☐ le système linguistique et le fonctionnement de la langue
française
☐ la culture française et des pays francophones
☐ les apports de la diversité culturelle et linguistique
qu’offre l’enseignement du français
Je sais:
☐ m’exprimer avec clarté et précision et dans un langage
adapté à l’écrit et à l’oral avec les élèves
☐ communiquer dans des situations différentes (communication
courante, scientifique, professionnelle)
J’agis de façon:
☐ avoir le goût du français et le plaisir d’apprendre
COMPÉTENCES 4 et 5 - Concevoir, mettre en œuvre des
situations d’enseignement et d’apprentissage et prendre en
compte les spécificités de l’apprenants

L’enseignant maîtrise l’enseignement du français, il est capable de concevoir


et mettre en œuvre de façon raisonnée et concertée des situations d’enseignement

-498-
Communications de dimension spécifique

et d’apprentissage appropriées en vue d’atteindre les objectifs fixés. L’enseignant est


capable de prendre en compte des spécificités de l’apprenant et l’environnement éducatif.
Il est capable de différencier son enseignement en fonction des besoins et des facultés
des élèves. Il prend en compte les différents rythmes d’apprentissage, accompagne
chaque élève, y compris les élèves à besoins particuliers. Pour ce faire, il mobilise et
met en place une organisation de travail et des dispositifs didactiques appropriés.

Je connais:
☐ les programmes d’enseignement et le référentiel de
compétences national
☐ différents supports et outils (tableau, documents,..)
nécessaires à la conception et à la mise en œuvre des
apprentissages
☐ les mécanismes et processus d’apprentissage de l’écrit
et de l’oral en langue française
☐ les techniques d’animation de classe
☐ le rôle des autorités éducatives, les instructions
officielles dans le développement du français
☐ la diversité des élèves, leurs attentes et leurs besoins
Je sais:
☐ construire des séquences d’enseignement (choisir des
approches didactiques appropriées, identifier des objectifs, des
dispositifs, des contenus, des obstacles didactiques, des stratégies
d’étayage, des modalités d’entraînement et d’évaluation)
☐ définir une programmation et une progression des
apprentissages sur l’année et sur le semestre,
☐ conduire le groupe classe en fonction de la diversité des
élèves (pédagogie différenciée, aide personnalisée, programme
personnalisé de réussite éducative)
☐ réguler mon enseignement en fonction des rythmes
d’apprentissage et des besoins des apprenants, ☐ adapter son
enseignement aux élèves à besoins éducatifs particuliers

-499-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

☐ utiliser des supports pédagogiques existants en français


et en concevoir d’autres
☐ organiser la classe et piloter les activités d’apprentissage
☐ guider les élèves dans leurs projets de recherche
☐ apprendre à apprendre
J’agis de façon à:
☐ concevoir des situations d’enseignement et d’apprentissage
innovantes
☐ adopter une attitude favorisant l’écoute, le dialogue et la
collaboration
COMPÉTENCE 6: Evaluer les élèves

Tout enseignant doit être capable de concevoir et mettre en œuvre des opérations
d’évaluation afin de gérer la progression des apprentissages et envisager des régulations
dans l’enseignement- apprentissage. Il développe chez les élèves la capacité d’auto-
évaluation et de co-évaluation.

Je connais:
☐ les instructions officielles sur les modalités d’évaluation.
☐ les fonctions, les catégories de l’évaluation, les différents
types de tests de français
Je sais:
☐ reconnaître les différents types de tests de français et
leurs caractéristiques
☐ élaborer et utiliser les différents tests de français et grilles
d’évaluations en fonction des objectifs et du niveau d’exigence
de l’opération d’évaluation
☐ expliciter consignes et critères d’évaluation
☐ développer chez les élèves la pratique de l’auto-
évaluation et de la co-évaluation

-500-
Communications de dimension spécifique

J’agis de façon à:
☐ valoriser les acquis, le travail des élèves
COMPÉTENCE 7: Intégrer les éléments de culture numérique
nécessaires à l’exercice du métier

Tout enseignant doit être capable de développer des compétences relatives à


l’usage et à la maîtrise des technologies de l’information de la communication dans sa
pratique professionnelle.

Je connais:
☐ les attentes du système éducatif concernant l’utilisation
des TIC dans l’enseignement/apprentissage
☐ différentes composantes informatiques (lieux, outils,...)
de son environnement professionnel
Je sais:
☐ identifier les situations d’apprentissage propices à
l’utilisation des TICE
☐ choisir et utiliser les ressources et services disponibles
dans un espace numérique de travail (ENT)
☐ travailler en réseau avec l’utilisation des outils de travail
collaboratif
☐ compléter et actualiser les applications des nouvelles
technologies de l’information et de la communication
☐ mettre en œuvre des logiciels généraux ou spécifiques
à l’enseignement/apprentissage du français
☐ utiliser des outils informatiques d’évaluation et de suivi
pédagogique
J’agis de façon à:
☐ inciter chaque élève à utiliser de façon responsable les
outils numériques pour apprendre

-501-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

☐ utiliser des ressources en ligne ou des dispositifs de


formation à distance pour ma formation
COMPÉTENCE 8: Concevoir et mettre en œuvre une démarche
individuelle et collective de développement professionnel

Tout enseignant s’inscrit dans une logique de formation tout au long de la vie. Il
est appelé à concevoir son propre plan de développement professionnel et à le mettre
en œuvre seul et/ou de concert avec d’autres acteurs concernés.

Je connais:
☐ les avancées de la recherche concernant la pédagogie,
la didactique des langues, l’évolution de la langue française
☐ les attentes de l’établissement scolaire au sujet de la
formation professionnelle des enseignants
☐ des réseaux d’expertise et de ressources francophones
Je sais:
☐ analyser ma pratique, verbaliser mes expériences,
formaliser mes acquis, seul ou entre pairs
☐ me positionner par rapport au référentiel de compétences
établi à des fins d’auto-évaluation et de régulation
☐ dégager des problématiques issues du terrain professionnel
et m’engager dans des projets de recherche et d’innovation
pédagogique
J’agis de façon à:
☐ adopter une attitude critique et réflexive vis-à-vis de
mes pratiques professionnelles
COMPÉTENCE 9: Coopérer avec les parents d’élève et les
partenaires de l’école

Tout enseignant doit être capable de travailler avec les équipes éducatives de
l’école, de coopérer avec les parents, les différents partenaires de l’école en vue de
l’atteinte des objectifs éducatifs.

-502-
Communications de dimension spécifique

Je connais:
☐ les possibilités d’échanges et de collaborations avec
différentes associations, avec d’autres écoles ou établissements,
et les possibilités de partenariats locaux, nationaux et
internationaux
☐ l’organisation administrative, pédagogique, budgétaire,
les règlements de fonctionnement des écoles
Je sais:
☐ coopérer avec les équipes pédagogiques et éducatives
d’autres écoles ou établissements, notamment dans le cadre
d’un environnement numérique de travail
☐ animer des réunions d’information et de débat, conduire
des entretiens avec les parents d’élèves,
☐ convaincre les élèves et parents d’élèves des apports
du FLE et du plurilinguisme dans la mondialisation
J’agis de façon à:
☐ favoriser le dialogue et la collaboration avec et entre les
différents acteurs
D - FORMATION TOUT AU LONG DE LA VIE PROFESSIONNELLE
1 - Formation continue institutionnelle
1.1. Quel(s) type(s) de formation continue avez-vous suivi?
☐ stages de formation continue
☐ rencontres scientifiques (séminaire, colloque…)
☐ réunions pédagogiques
1.2. Quel(s) bénéfice(s) en avez-vous tiré?
1.3. A votre avis, l’offre de formation continue qui vous est
proposée est:

-503-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

☐ suffisante?
☐ insuffisante?
1.4. Quelle(s) formation(s) aimeriez-vous suivre actuellement?
2 - Auto-formation (apprendre quelque chose de nouveau)
2.1. Consacrez-vous du temps à votre auto-formation? (une
seule réponse possible)
☐ Non, je n’ai pas de temps
☐ Non, je ne sais pas comment faire
☐ Oui, mais pas souvent
☐ Oui, souvent (toutes les semaines)
☐ Oui, quotidiennement
2.2. Quelle(s) forme(s) prend votre autoformation? (plusieurs
réponses possibles)
☐ Non, je ne pratique pas d’autoformation
☐ Cours en présentiel?
☐ CLOM (Cours en Ligne Ouvert et Massif)
☐ Lecture
☐ Participation aux réseaux professionnels
☐ Autre?
2.3. Quelle(s) compétence(s) cherchez-vous à développer
en formation continue? Classez par ordre d’importance les
expressions suivantes 1 = le plus important:
☐ Compétences linguistiques
☐ Compétences en pédagogie
☐ Compétences en évaluation

-504-
Communications de dimension spécifique

☐ Compétences en TICE
☐ Compétences socio-culturelles
☐ Autres:
2.4. Est-ce quelque chose que vous faites le plus souvent
seul(e) ou entre collègues?
☐ seul(e)
☐ entre collègues
3 - Accès aux ressources d’autoformation en ligne
3.1. Avez-vous déjà participé à des modules de formation en
ligne?
☐ Oui
☐ Non
3.2. Si oui, quelle(s) formation(s) avez-vous suivie(s)? Sinon,
pourquoi?
3.3. Qu’en avez-vous pensé?
3.4. Utilisez-vous des ressources numériques pour compléter
votre formation, développer vos compétences?
☐ Oui
☐ Non
3.5 L’accès aux ressources de formation en ligne vous
semble-t-il facile?
☐ Oui
☐ Non
E - GUIDE D’ACCOMPAGNEMENT
1. Format

-505-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

1.1 Un guide pour vous accompagner dans le développement


de vos compétences, est-ce:
☐ nécessaire ☐ utile ☐ inutile
1.2 Sous quel format devrait-il être?
☐ Livret imprimé
☐ Plateforme en ligne
☐ Toutes les deux versions
2. Contenus
Que souhaitez-vous trouver dans un guide d’accompagnement
à la formation continue? Classez par ordre d’importance les
expressions suivantes 1 = le plus important:
DÉVELOPPEMENT PROFESSIONNEL
Concevoir et mettre en œuvre une démarche individuelle et
collective de développement professionnel
Recherche(s) - participation à des séminaires, colloques
DES CONSEILS MÉTHODOLOGIQUES
Rappel des différents courants didactiques et pédagogiques
Comment concevoir et mettre en œuvre des situations
d’enseignement et d’apprentissage
Comment prendre en compte des spécificités de l’apprenant
et de l’environnement éducatif
Comment introduire et utiliser les TICE en classe
ÉTHIQUE
Principes déontologiques du métier d’enseignant
Ressources documentaires
ÉVALUATION

-506-
Communications de dimension spécifique

Rappel des différents principes de l’évaluation


Outils et dispositifs existants
Ressources
COMPÉTENCES LINGUISTIQUES
Outils pour approfondir ses compétences - Niveau B1
Outils pour approfondir ses compétences - Niveau B2
Outils pour approfondir son langage professionnel
COMPÉTENCES PROFESSIONNELLES
Adopter une pratique réflexive
Se tenir informer
AUTRES (à préciser):

-507-
4. La classe et la pédagogie inversées
LA CLASSE INVERSÉE DANS L’ENSEIGNEMENT
DU FRANÇAIS DEUXIÈME LANGUE ÉTRANGÈRE
AU SECONDAIRE

NGUYEN Huu Tam Thu


École de langues étrangères - Université de Danang

Résumé:
«La classe inversée» est une approche pédagogique introduite depuis un
certain temps dans l’enseignement/apprentissage et semble bien se développer
grâce à des outils numériques de notre temps. Mais on peut quand même se
demander si elle peut être appliquée avec profit dans nos contextes scolaires. De
là, une expérimentation a été menée dans quelques classes de français deuxième
langue étrangère (DLE) au lycée à Danang au centre du Vietnam. Dans cet article,
nous relaterons notre tentative de contextualisation de cette pédagogie et les
résultats obtenus. Nous préciserons ensuite ce qui serait nécessaire pour sa mise
en place efficace dans les classes de français au secondaire.
Mots clés: classe inversée, contexte vietnamien, réactions, participation
active, expérimentation.

1. Introduction
La classe inversée est connue depuis un certain temps dans
différentes situations pédagogiques, notamment dans l’enseignement
des langues étrangères. Cette approche pédagogique, appelée
également «pédagogie inversée», «apprentissage inversé» ou
«flipped classroom» en anglais, vise à inverser le processus
d’enseignement et d’apprentissage dit traditionnel. Selon cette
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

méthode, les élèves préparent le cours chez eux à l’aide de


ressources documentaires (capsules vidéos, podcasts, documents,
etc.) fournies préalablement par l’enseignant. Ensuite, ils participent
à des activités proposées en fonction de la préparation à la maison.
Cette approche pédagogique pourrait donc inciter l’autonomie et la
participation active des apprenants dans l’apprentissage. Dufour
(2014) affirme que:
la classe inversée est bénéfique aux enseignants comme aux élèves […] Les
interactions avec les élèves permettent un cours plus vivant et personnalisé…
un environnement moins stressant pour les élèves.

En tant qu’enseignants, face à l’ambiance peu active des


séances de français dans des lycées à Danang (Vietnam), nous
nous sommes demandé si l’application de cette pédagogie
inversée pourrait aider à améliorer la situation d’enseignement/
apprentissage du français dans nos classes secondaires.
Nous avons donc décidé d’expérimenter cette pédagogie
de classe inversée au sein de nos trois groupes de lycéens de
classe de 11e (la première en France) qui apprennent le français
DLE avec le manuel Netado.vn(1), dont deux groupes sont du
lycée Hoang Hoa Tham et un autre du lycée Le Quy Don, tous de
la ville de Danang, au centre du Vietnam. Nous avons également
effectué une enquête par questionnaire après l’expérimentation.
L’objectif est de connaître les résultats de l’expérimentation et les
réactions des élèves, de là proposer quelques pistes de réflexion
en vue d’une meilleure application de cette pédagogie dans le
contexte vietnamien.

2. Cadre théorique
2.1. La classe inversée
D’après Lebrun, Gilson et Goffinet (2016), le premier concept
de la classe inversée a été introduit par deux enseignants de
chimie, Jonathan Bergmann et Aaron Sams, de l’école Woodland
Park High School, du Colorado aux États-Unis. Ces derniers ont

-510-
Communications de dimension spécifique

voulu aider leurs élèves malades ou absents à suivre le cours en


leur fournissant des capsules vidéos, et ils ont rendu compte par la
suite que ces capsules étaient visionnées par tous les autres élèves
et que les séances de cours étaient devenues plus animées. L’idée
d’inverser la classe leur est alors venue en 2007 avec le principe
est de proposer les leçons sous forme de vidéos à regarder
préalablement à la maison et de réserver le temps en présentiel
aux échanges et accompagnements. Depuis 2011, le concept de
la classe inversée a été largement diffusé lors d’une conférence
visionnée plus d’un million de fois, dans laquelle Salma Khan,
professeur de mathématiques, proposait une banque de vidéos
éducatives pour inverser la classe. Le professeur a également
créé son propre site éducatif (https://www.khanacademy.org/) qui
dispose aujourd’hui d’une banque de données de plus de 4500
vidéos proposées gratuitement. Selon Lebrun (2015), la classe
inversée consiste à déplacer la partie magistrale d’un cours à la
maison, et à utiliser le temps de classe ainsi libéré pour réaliser
les devoirs traditionnellement faits à la maison. Donc, cette
forme d’enseignement inverse le travail à distance et le travail en
présence.
En d’autres termes, avec cette approche pédagogique, ce
que les élèves et les enseignants font traditionnellement en classe
se passera avant le déroulement du cours, ce qui est effectué
d’habitude après le cours, par exemple les devoirs, constituera
les activités en classe.
Le tableau qui suit récapitule les principales caractéristiques
et différences entre la classe traditionnelle et la classe inversée,
selon Jacob (2015) et Lebrun - Lecoq (2015).
La classe traditionnelle La classe inversée
L’enseignant prépare la fiche pédagogique. L’enseignant crée et donne des cours à
domicile par le biais de capsules vidéos,
de sites d’Internet, etc.

-511-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Les apprenants écoutent et notent ce que Les apprenants lisent, étudient, résu-
le professeur explique en classe. ment le matériel et font des exercices à
la maison.
Les apprenants ne font des exercices Les apprenants sont en classe pour
qu’après l’explication de l’enseignant en pratiquer et échanger avec le professeur
classe. et leurs amis.
Les apprenants suivent les instructions. Les apprenants découvrent des nou-
veaux contenus, travaillent en groupe et
échangent en classe.
Le professeur est au centre de l’apprentis- Les apprenants sont au centre de l’ap-
sage. prentissage.
Les apprenants sont passifs. Les apprenants sont actifs.
Les apprenants n’ont pas le temps de dis- Les apprenants ont beaucoup de temps
cuter avec le professeur et leurs amis. pour interagir avec leurs amis et le pro-
fesseur. Ils peuvent recevoir un soutien
personnalisé en cas de besoin.
Moins de réflexion Nécessité de réflexion et de remue-mé-
ninges.
L’application informatique est limitée. L’application informatique est large-
ment utilisée.
Les apprenants se concentrent sur la théo- Les apprenants pratiquent et font des
rie. exercices.
Les exemples et les illustrations sont limi- Les exemples et les illustrations sont
tés. concrets, riches, vivants.
Les apprenants travaillent souvent seuls. Les apprenants travaillent souvent en
Il n’y a pas de liens entre les apprenants. groupes. La classe inversée aide à créer
l’interaction entre les apprenants, à renfor-
cer les acquis et à les mettre en application.

2.2. Le processus d’une classe inversée


À l’heure actuelle, il n’y a pas de modèle unique mais
généralement, la classe inversée se passe à la fois à distance et
en présentiel. D’après Dufour (2014), il existe
quelques éléments communs à toutes les classes inversées: l’élève réalise
un travail autonome pour acquérir des connaissances de base qui seront
mobilisées dans une séance de travail en classe, laquelle se réalise en groupe
et emprunte aux techniques d’apprentissage actif.

Lebrun, Gilson et Goffinet (2016) propose trois types de


classe inversée. Le type 1 concerne le concept initial de «les

-512-
Communications de dimension spécifique

leçons à la maison, les devoirs en classe». Selon ce processus,


les élèves préparent hors classe le cours en autonomie à l’aide de
capsules vidéos, de documents recommandés par l’enseignant.
Ils prennent des notes et travaillent à leur rythme, cela veut dire qu’ils
peuvent à tout moment retourner en arrière ou faire des pauses. La
séance en classe est réservée aux activités d’accompagnement
aux apprentissages. Le type 2 est une extension du type 1 dans
laquelle les activités à distances, effectuées par les élèves eux-
mêmes, de manière autonome ou en groupe, sont assez variées:
recherche d’informations, préparation d’un exposé ou d’un débat,
construction d’un dispositif de formation à l’intention des autres
élèves, etc. En présentiel, les élèves présentent les résultats de
leur préparation (informations et ressources retrouvées, exposés,
etc.) et entament des discussions avec d’autres groupes pour
faire émerger les questions, les hypothèses. Le type 3 est le
mélange des deux premiers types qui comprend quatre phases:
hors classe (recherche d’informations), en classe (confrontations,
échanges), hors classe (préparation de synthèses, de questions),
en classe à nouveau (consolidation des acquis, applications).
Bélanger (2016) divise la classe inversée en deux temps. Le
premier, l’activité préparatoire, détermine les tâches que l’élève
doit accomplir avant de se présenter en classe. Il recommande
ainsi que
l’activité préparatoire ne devrait pas se limiter au visionnement de quelques
capsules vidéos. L’apprentissage implique que l’élève soit actif cognitivement.

L’enseignant pourrait donc demander à l’élève de produire


quelque chose comme trace de l’apprentissage (un schéma de
concepts, un résumé, etc.). Le deuxième temps se passe en classe,
le travail en présentiel, est réservé aux échanges, aux questions.
Normand (2014) appelle les deux phases de la classe inversée
avant le cours et pendant le cours. Il ajoute un autre élément
avant le cours: la préparation de l’enseignant qui consiste dans

-513-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

le choix des contenus à enseigner, la préparation des ressources


et des activités en classe.
Nous constatons que les propositions mentionnées de ces
auteurs pourraient être pertinents dans plusieurs contextes
pédagogiques. Cependant, avec notre public et dans notre
contexte scolaire, nous n’avons pas pu reprendre la proposition
telle quelle. En effet, une séance de cours dans les lycées
vietnamiens se compose en principe de cinq phases: contrôle de
la leçon précédente, sensibilisation, leçon du jour, consolidation,
recommandations pour les devoirs et les tâches à accomplir à la
maison. Vu l’importance de la première phase (contrôle de la leçon
précédente) et la dernière (recommandations), nous aimerions
ajouter au processus de la classe inversé une troisième phase,
la phase d’après la classe.
Notre classe inversée comporte donc trois phases: avant,
pendant et après la classe. Avant la classe (à distance),
l’enseignant réfléchit et choisit le contenu à enseigner. Il prépare
ensuite les ressources documentaires à fournir à l’élève et des
activités pour la séance en présentiel. Nous ne disposons pas de
plate-forme éducative, les documents et les liens à accéder aux
documents sont donc diffusés aux élèves par mail ou par notre
groupe de discussion sur Facebook. L’élève prépare ensuite le
cours en autonomie ou en groupe à l’aide des documents fournis
ou recommandés par l’enseignant. Il travaille à son rythme, prend
des notes ou produit son support de présentation.
Notre séance pendant la classe se divise en trois temps.
Le premier temps est réservé au travail de groupe où les élèves
confrontent et discutent les résultats obtenus lors de la préparation
à la maison et construisent ensemble leur produit final. Pendant
ce temps, l’enseignant circule entre les groupes pour apporter
des éclaircissements, ou aides aux plus faibles en cas de besoin.
Les groupes présentent ensuite leur produit. Le troisième temps

-514-
Communications de dimension spécifique

est réservé aux discussions et aux échanges entre les groupes.


L’enseignant pourrait fournir des éclaircissements pour la mise
au point du contenu d’apprentissage.
La troisième phase, après la classe, donne à l’élève la
possibilité de réviser et de vérifier ses acquis afin de se préparer
à l’évaluation continue qui serait proposée à la prochaine séance
de cours.
Ce processus de notre classe inversée est résumé dans le
schéma suivant.

3. Mise en expérimentation
L’expérimentation de la classe inversée a été menée par
un groupe de cinq enseignantes dont une universitaire, deux du
secondaire et deux stagiaires qui faisaient un stage pédagogique
au lycée. Notre échantillon se composait de 91 lycéens de la
classe de 11e qui ont suivi près de 120 périodes de 45 minutes,
soit 90 heures de français deuxième langue étrangère. Nous
avons réalisé neuf séances de cours sur trois contenus:

-515-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

(1) la culture «Culture: Le tourisme au Maroc»


(2) le lexique «Les parties du corps»
(3) la grammaire «Masculin/féminin des adjectifs de sentiments»
Voici comment nous avons procédé:
3.1. Avant la classe
Analyse pré-pédagogique de l’enseignant
Cette étape d’analyse pédagogique était pour permettre à
l’enseignant d’identifier les objectifs à atteindre et de choisir des
documents de support convenables pour le travail autonome ou
en groupe des élèves.
Pour le contenu 1 «Culture: le tourisme au Maroc», nous
avons exploité les connaissances sur l’histoire, la géographie, les
villes et sites touristiques et la gastronomie du pays concerné.
Le contenu 2 consistait à trouver le plus de mots désignant les
parties du corps humain et le contenu 3 concernait la notion
masculin / féminin des adjectifs de sentiments.
Choix des documents
Le choix des documents était pour nous très important. Les
documents retenus devraient correspondre au sujet à explorer
et au niveau des élèves. Il vaudrait mieux qu’ils soient brefs,
complets et contiennent beaucoup d’illustrations vivantes pour
stimuler le désir d’apprendre des élèves.
Pour notre expérimentation, avec la partie Culture, les
élèves devaient trouver eux-mêmes des documents de support
car ceux-ci sont nombreux sur Internet. Pour le thème 2, deux
capsules vidéos leur ont été proposées: les parties du corps:
sur https://www. youtube.com/watch?v=bChrAwLzoSo et les
sentiments (masculin/féminin) sur https://www. youtube.com/
watch?v=pnWLQecMjM8 mais ils étaient aussi libres d’utiliser
les capsules de leur choix pour accomplir les tâches.

-516-
Communications de dimension spécifique

Préparation des apprenants, individuelle ou en équipes


Les élèves ont travaillé seuls chez eux pour les parties
Grammaire et Lexique. La partie Culture par contre exigeait le
travail en équipe et chaque groupe s’est occupé d’un des thèmes
de la leçon:
- Le groupe 1 s’occupait de l’histoire du Maroc.
- Le groupe 2 était responsable de la géographie marocaine.
- Le groupe 3 était chargé des villes et sites touristiques
connus.
- Le groupe 4 prenait en charge la gastronomie marocaine.
Le travail de groupe à ce stade pouvait se faire en face à face
ou à distance, via les réseaux sociaux ou logiciels de discussion
en ligne.
Nous avons encouragé les élèves à poser des questions
lorsqu’ils avaient des difficultés en recherche documentaire, via
notre groupe de discussion sur Facebook. Nous avons ainsi reçu
des commentaires et questions de nombreux élèves lors de leur
préparation à domicile. Les élèves avaient le droit de choisir eux-
mêmes le support de présentation de leur travail en classe: sur
papier ou power point.
3.2. Pendant la classe
Nos neuf séances de classe ont été réalisées de manière
suivante:
- Travail de mise au point
Des papiers de grand format, crayons de couleurs, ciseaux,
colle… étaient à la disposition des élèves en classe et les groupes
avaient d’abord 15 minutes pour achever leur travail, ou vérifier
pour la dernière fois leur exposé. Les élèves préparaient ainsi
leur présentation et l’enseignant circulait entre les groupes pour

-517-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

apporter aides, remarques et parfois rediriger vers les objectifs à


atteindre. Dans la réalité, ces discussions au sein des groupes ont
entraîné des modifications, parfois changements et améliorations
du produit final.
- Présentation des groupes
Le travail des groupes se présentait ensuite sous forme
d’affichages au tableau, sur le mur ou comme exposé oral. Un
représentant faisait un exposé pour présenter le produit de
son groupe. Après chaque présentation, les autres groupes
demandaient des éclaircissements ou précisions, posaient des
questions sur des points qui les intéressaient ou avec lesquels ils
n’étaient pas d’accord.
- Echanges en grand groupe (groupe-classe)
La phase d’échanges se faisait à la fin des présentations
des groupes. L’objectif était des observations et remarques pour
que les groupes améliorent ou peaufinent leur travail. L’ambiance
de la classe était toujours très animée à cette phase. C’était
aussi à ce moment que l’enseignant complétait le cours: ajouter
des éléments manquants dans le travail des groupes, fournir
des éclaircissements, informations complémentaires et faire le
point sur le contenu d’apprentissage. Les élèves étaient aussi
recommandés de faire des exercices dans le manuel qui, dans la
plupart des cas, étaient à leur portée.
3.3. Après la classe
Après la séance en présentiel, les groupes avaient à finaliser
ou/et améliorer leur travail. Ils devraient revoir les connaissances
et réviser la leçon pour un test qui serait proposé lors de la
prochaine séance. Ces tests à caractère compétitif se faisaient en
général sous forme de Quiz avec le logiciel Kahoot pour vérifier les
acquis des élèves. Annoncé tout au début de l’expérimentation,
ce type d’activité a réussi à rendre les élèves très attentifs lors
des présentations de leurs camarades.

-518-
Communications de dimension spécifique

4. Evaluation de l’expérimentation
A la fin de l’expérimentation de neuf séances de cours,
nous avons effectué une évaluation auprès de 91 élèves qui
ont participé au projet. L’évaluation s’est faite sous forme d’une
enquête, avec un questionnaire qui comportait 30 questions dont
27 questions de type Likert à cinq points et 03 questions à choix
multiples.
Après les dépouillements et analyses, les résultats obtenus
montrent que la quasi-totalité des élèves étaient à l’aise avec la
préparation à domicile et du travail en classe. En fait, 84% sont
totalement d’accord et 10% d’accord que la classe inversée leur
ait permis d’être autonomes dans leur apprentissage. Elle les
a laissés aussi libres dans leur rythme de travail à domicile. Ils
pouvaient en effet aller vite ou revenir en arrière, voir et revoir un
document plusieurs fois à leur gré. De plus, ils ont appris à prendre
la responsabilité des recherches et produits qu’ils présentaient
au groupe. Surtout, c’est ce travail préalable à domicile qui les
a rendus plus confiants en classe. En effet, nous avons reçu 61
réponses favorables (67% totalement d’accord) à l’item 18: «Je
suis plus confiant en moi en classe parce que j’ai déjà préparé
pour le cours».

Un autre résultat encourageant, c’est que plus de trois


quarts d’apprenants ont approuvé notre modalité de classe
inversée: 45% totalement d’accord et 33% d’accord. Ils ont trouvé
aussi que le travail en groupe intégré dans cette pédagogie était

-519-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

nécessaire, utile et indispensable dans certains cas, pour qu’ils


mènent à bien le travail en classe. Un élève du lycée Le Quy Don
a avoué qu’il n’arriverait jamais à achever l’exposé tel que celui
de son groupe s’il devait travailler tout seul. Par ailleurs, le travail
en équipe a facilité l’interaction entre les élèves, avec 91% de
réponses favorables (69% totalement d’accord et 22% d’accord).

Pourtant, la répartition de travail au sein des groupes reste à


améliorer. La moitié des élèves ont affirmé qu’il n’y avait pas eu
de répartition de travail vraiment équilibrée entre les membres du
groupe. Sur ce point, nous avons eu 26 réponses avec désaccord
(29%) et 19 de désaccord total (soit 21%).

Cependant, d’après nous, cette remarque critique pourrait


être expliquée par l’hétérogénéité des niveaux dans les groupes.
En fait, pour favoriser l’entraide entre pairs, nous avons constitué
des groupes qui se composaient des forts et des moins forts.
Bien sûr, les groupes avaient tendance de confier plus de travail
et surtout les tâches importantes et complexes à des élèves jugés

-520-
Communications de dimension spécifique

plus forts. Pourtant, cette composition s’est avérée bénéfique


pour les plus faibles. Une élève de la classe 11/13 (lycée Hoang
Hoa Tham) a ainsi témoigné:
«Mes camarades m’ont beaucoup aidée, ils m’ont indiqué
ce que je devais faire. Je n’ai pas beaucoup contribué au travail
de groupe mais j’étais toujours à l’aise et j’ai beaucoup appris».
La classe inversée a permis également aux élèves d’acquérir
des connaissances plus riches et variées tel que 87 élèves (96%)
l’ont affirmé. Ces dernières sont venues de plusieurs sources:
des recherches individuelles (67 élèves/ 91), des membres du
groupe (55 élèves/ 91), des autres groupes (52 élèves/ 91), et de
l’enseignant (48 élèves/ 91).

Ce qui nous semble une chose intéressante, c’est que la moitié


des élèves seulement (53%) ont affirmé qu’ils avaient acquis des
connaissances de la part de leur enseignant. Effectivement, avec
des équipements modernes, les élèves étaient dans la mesure
d’explorer et puis de maîtriser à un certain niveau le contenu à
apprendre grâce aux différentes tâches réalisées avant le cours.
Dans la plupart des cas, l’enseignant avait juste à confirmer,
apporter ajustements ou rectifications sur certains points de la
leçon. Cela devrait donc mener nos professeurs à changer notre
croyance que c’est l’enseignant qui détient le savoir, ou qu’il est
le seul détenteur du savoir!

-521-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Pour la partie en présentiel de la classe inversée, les


résultats de l’enquête ont montré que l’évaluation générale était
très positive. Les chiffres indiquent que presque tous les élèves
(89/91) ont trouvé la classe agréable et animée. De plus, cette
ambiance positive a beaucoup motivé les élèves selon 87% des
enquêtés (79 élèves/ 91).

5. Conclusion
En guise de conclusion, nous pouvons dire que la classe
inversée est très bénéfique dans notre cas d’enseignement du
français DLE au secondaire. Les premiers résultats que nous
avons obtenus lors de cette expérimentation nous paraissent plus
que satisfaisants. C’est encourageant même et ils nous donnent
l’envie d’élargir l’utilisation de cette nouvelle pédagogie dans
notre enseignement du français. D’abord, la classe inversée a
réellement aidé à développer l’autonomie de nos élèves. Ensuite,
elle les a rendus plus responsables, dans la consultation des
ressources et dans la participation au travail en classe. Enfin, elle
nous a permis un enseignement/apprentissage différencié. En
effet, dans leur travail à la maison, nos élèves ont eu la possibilité
d’apprendre par eux-mêmes et de travailler chacun à son rythme.
En classe, l’enseignant a eu plus de temps pour suivre ses élèves
individuellement pendant l’étape du travail de groupe et a pu ainsi
apporter le soutien approprié aux élèves qui en avaient besoin.
Enfin, la séance en classe avec des activités de pratique, de
travail en groupes a créé une ambiance de travail plus agréable:

-522-
Communications de dimension spécifique

les échanges des élèves entre eux, surtout le travail en groupe


ont permis une entraide entre pairs plus facile et plus efficace.
De ces résultats, nous sommes donc en mesure d’affirmer que la
classe inversée s’avère tout à fait applicable dans les classes de
français DLE au Vietnam.
Cependant, pour être tout à fait fiable, la généralisation de cette
pédagogie nécessitera d’autres expérimentations et études plus
approfondies dans différents contextes et établissements scolaires
afin d’aboutir à un modèle ou à un guide destiné aux enseignants et
apprenants. Nous sommes d’avis que l’expérimentation devrait être
réalisée pendant une période assez longue pour pouvoir évaluer
correctement tous les aspects institutionnels, professionnels et les
exigences matérielles de cette méthode et pour son application
dans le long terme et sur des grandes échelles.
Note: (1) Netado.vn est une méthode de français deuxième langue étrangère pour
le Vietnam élaborée dans le cadre de la coopération entre le Ministère de l’Éducation et
de la Formation du Vietnam et l’Organisation Internationale de la Francophonie.

BIBLIOGRAPHIE
1. BÉLANGER D. (2016). Inverser sa classe de manière
profitable. Pédagogie collégiale, Vol. 30, No1, Centre collégiale
de développement de matériel didactique.
2. DUFOUR E. (2014). La classe inversée. Revue Technologie
Eduscol (193), Septembre - Octobre, pp 44-47, Eduscol.
3. JACOB L., (2015). L’adhésion des étudiants au dispositif
de classe inversée change-t-elle en fonction de leur style
d’apprentissage? Mémoire de master en sciences de
l’éducation, Université de Strasbourg.
4. LEBRUN M. (2015). Classe inversée? Oui, mais… quoi et
comment? Transcription de la conférence. Université d’été
2015. Louvain-la-Neuve

-523-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

5. LEBRUN M. et LECOQ J. (2015). Classes inversées. Enseigner


et apprendre à l’endroit ! Réseau Canopé.
6. LEBRUN M., GILSON C., GOFFINET C. (2016). Contribution
à une typologie des classes inversées: éléments descriptifs
de différents types, configurations pédagogiques et effets,
Université catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve, Belgique.
7. NORMAND R., (2014), La classe inversée: une pédagogie
renversante?, Le Tableau, Volume 3, Numéro 1, Université
du Québec.

-524-
LA CLASSE INVERSÉE DANS L’ENSEIGNEMENT
DU FLE AUX DÉBUTANTS

TRINH Bich Thuy


Université de Langues et d’Études Internationales-
Université Nationale du Vietnam à Hanoï

Résumé:
En tant que jeune professeure et doctorante, nous nous intéressons beaucoup
au modèle de la «classe inversée», un modèle qui est déjà connu dans le monde
entier mais qui n’est pas encore bien appliqué dans les classes de français langue
étrangère, surtout au niveau universitaire. On n’a pas encore considéré ce modèle
comme une bonne approche qui peut augmenter la motivation chez les étudiants
et améliorer clairement leurs compétences de communication en langue étrangère.
C’est pourquoi nous avons décidé de mener une recherche sur l’application de
la «classe inversée» aux étudiants en première année. Nous espérons trouver
une solution de leurs difficultés dans la production orale et la production écrite,
et démontrer le rôle innovant de ce modèle de classe dans l’enseignement-
apprentissage du FLE.
Dans cette communication, nous présenterons tout d’abord notre méthodologie
de recherche-action. Puis, nous préciserons les points théoriques importants du
modèle de la classe inversée. Ensuite, nous décrirons notre application de ce
modèle dans les classes des débutants en français. Enfin, nous ferons quelques
conclusions sur cette approche pédagogique.
Mots-clés: classe inversée, FLE, niveau débutant
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Introduction
Aujourd’hui, les enseignants de langue doivent faire face
non seulement aux demandes professionnelles de plus en plus
élevés de la société en général mais ils doivent s’intéresser aussi
aux besoins des apprenants. Depuis longtemps, il existe une
tendance de concentrer sur l’apprenant plutôt que s’appuyer sur
un curriculum qui ne peut pas être changé en suivant la situation
réelle de la classe. Maintenant, les apprenants, surtout les adultes
- une grande partie des apprenants en langue étrangère, peuvent
exprimer clairement leurs besoins. Ils ont envie de participer aux
classes qui sont dynamiques, flexibles, qui ont une ambiance
chaleureuse, qui s’adaptent bien à leurs objectifs.
Par conséquence, les méthodes et les techniques d’enseignement
changent rapidement pour atteindre le niveau seuil des demandes
des apprenants. Il faut affirmer qu’il n’existe pas une méthode qui est
parfait dans toutes les situations. Mais en choisissant et même en
combinant les méthodes, l’enseignant pourrait trouver la meilleure
situation pour sa classe. C’est dans un berceau pareil que le modèle
de la classe inversée est née.
Nous, en tant que chercheure et enseignante au Département
de français, Université de Langues et d’Études Internationales,
Université Nationale du Vietnam à Hanoï, trouvons que dans
ce courant de changement de l’éducation et de la société, la
classe inversée peut être la réponse aux problèmes qui existent
depuis quelques temps dans nos classes de français pour les
débutants. Les étudiants se sentent ennuyés dans les salles de
classe. Ils ont très peu de motivation pour continuer à apprendre
cette langue. Ils ont beaucoup de difficultés en production orale
et production écrite. Ils ont tous besoin d’un grand changement
dans notre méthode d’enseignement pour avoir encore une fois
de l’enthousiasme pour la langue française.

-526-
Communications de dimension spécifique

Depuis des années, la classe inversée est devenue un modèle


très connu et très discuté dans le monde pédagogique. Au début
de notre travail, nous avons trouvé beaucoup de recherches
récentes sur cette méthode d’enseignement et d’apprentissage
en langue française, anglaise et vietnamienne. Nous pouvons
citer quelques recherches remarquables.
En langue française, nous avons découvert tout d’abord
les recherches de Bruno Marchal, chercheur lié avec le projet
de classe inversée du Centre Régional Francophone d’Asie-
Pacifique, qui a fait des travaux sur la région d’Asie Sud-Est, inclus
le Vietnam. Par exemple, en 2014, il a publié la communication
intitulé «Cinéma et médiatisation interculturelle en classe
inversée et en EAD» qui explique l’importance des moyens
interculturels médiatisés dans une classe inversée de langue
étrangère. Une autre recherche très profonde et intéressante
des professeurs de l’École Normale Supérieure de Lyon intitulée
«L’adhésion des étudiants à la classe inversée: une approche
par le style d’apprentissage» nous mène à une perception
critique des étudiants sur ce modèle de classe. La recherche de
la professeure Anabelle Viau-Guay de l’Université de Laval est
aussi très enrichissante pour notre propre travail, cette recherche
intitulée «La classe inversée comme approche pédagogique en
enseignement supérieur: état des connaissances scientifiques et
recommandations» porte sur l’état général de la classe inversée
au point de vue des pédagogues et des scientifiques.
En langue anglaise, en 2015, ERAMUS a publié le «Learning
guide in FTC in Adult Education» qui est le résultat de leur
recherche sur l’application de la classe inversée dans les pays
européens, aux différents niveaux d’éducation. Ce guide montre
aussi les points théoriques très facile à appliquer du modèle de
la classe inversée que nous allons présenter ci-dessous. Sur le
point théorique, l’article «Flipping The Classroom» de Cynthia
J. Brame (2012) est aussi une base détaillée qui explique les

-527-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

notions de façon facile à comprendre. Nous pouvons citer aussi


les recherches qui ont les résultats intéressants.
Même au sein de l’éducation universitaire au Vietnam, nous
avons eu la chance de lire plusieurs publications des professeurs
sur la classe inversée. Cette tendance de recherche nous
encourage beaucoup à réaliser notre projet.
Cette communication présentera notre méthodologie
de recherche, les points théoriques importants sur la classe
inversée et quelques pratiques en classe que nous avons
effectuées au cours de notre recherche. Nous signalons que
cette communication est juste la première partie de la recherche
que nous poursuivons en tant que chercheure doctorante.
Méthodologie de recherche
Nous avons choisi la méthode de «recherche-action»
(action research) pour cette recherche. Cette méthode a pour
but d’instaurer un processus de changement collectif (Gauthier,
1984). Il s’agit de modifier la situation des personnes concernées
pour s’adapter à leurs vrais besoins. Cette recherche est partie
des difficultés réelles des étudiants qu’on a pu montrer à partir
de l’enquête.
Au début de ce travail, nous avons réalisé une enquête sur
la connaissance de la classe inversée des enseignants et des
étudiants de la première année au Département de français,
Université de Langues et d’Études Internationales, Université
Nationale du Vietnam à Hanoï. Les résultats nous encouragent à
mettre en place une recherche profonde.
Plus précisément, pour les enseignants, 100% ont entendu
parler de ce modèle mais aussi 100% ont besoin des
formations supplémentaires concernant cette nouvelle méthode
d’enseignement. Pendant l’enquête, ils ont donné les perceptions
très vagues ou pas assez profondes de la classe inversée

-528-
Communications de dimension spécifique

comme «L’étudiant est l’acteur des activités en classe», «C’est


une classe où l’autonomie est donnée le plus aux apprenants.
Ils découvrent les connaissances activement», «Les étudiants
préparent la leçon à la maison ensuite pratiquent et posent des
questions au professeur en classe», etc. 80% des enseignants
ont l’intention de changer leur méthode d’enseignement pour
motiver plus les étudiants en appliquant la classe inversée car
ils ont constaté un manque de motivation chez leurs étudiants à
cause de «leur vision du futur métier», «les activités organisées
par le professeur», «l’organisation de la classe de la part de
l’enseignant», etc.
Pour les étudiants, 86,7% ne connaissaient pas ce modèle
de classe et c’est presque impossible pour eux de donner une
définition générale de la classe inversée. Concernant leur situation
réelle, 67% veulent avoir une autre approche d’enseignement -
apprentissage en classe. Ils citent beaucoup de difficultés dans
leur apprentissage qui sont causé par le manque de motivation,
le manque de temps de pratique en classe, l’ennuie des
exercices répétitifs, etc. Les étudiants ont besoin des nouveautés
dans l’apprentissage, ils voudraient avoir plus de pratiques et
d’expérimentations au cours d’une classe de langue, etc.
Nous constatons un manque important de connaissance
sur ce modèle de classe qui est déjà très connu depuis une
dizaine d’années dans le monde entier mais qui n’est pas encore
appliqué largement dans l’enseignement-apprentissage du FLE.
En découvrant les points théoriques de la classe inversée, nous
sommes convaincue que ce modèle de classe peut résoudre
une partie des problèmes que nos enseignants et nos étudiants
rencontrent maintenant.
Notre recherche se passe pendant les deux années scolaires,
de 2017 à 2019. Nous appliquons le modèle de la classe inversée
dans deux classe 17F6 (33 étudiants) et 18F4 (26 étudiants) avec

-529-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

l’aide des enseignants du Département de français, ULIS. Ces


étudiants, en entrant à l’ULIS, sont encore les vrais débutants en
français qui n’ont jamais appris cette langue jusqu’à leur arrivée
à l’université. Nos résultats de recherche sont basés sur les
résultats scolaires et les réactions de ces étudiants.
Base théorique

1. Historique de la classe inversée


La classe inversée est une pédagogie qui est née dans le
cadre de l’évolution sans cesse de l’approche actionnelle dans
l’enseignement des langues étrangères. Elle hérite les points
forts des méthodes précédentes. En même temps, ce modèle de
classe essaie de s’adapter à un monde moderne où les TICES
sont très développés et les besoins des apprenants s’évoluent
rapidement.
Alison King a publié en 1996 un livre intitulé «D’un savant
sur la scène à un guide à côté», dans lequel elle montre qu’en
classe, la construction des significations est plus important que
la transmission isolée des informations. Même si ce livre n’a pas
parlé directement du terme «inversée» mais on cite toujours le
travail de King comme le pionnier du modèle de la classe inversée
dans un apprentissage actif.
Le professeur Eric Mazur de l’Université Harvard a contribué
considérablement dans le développement de la conception de
l’enseignement inversé, à travers sa méthode pédagogique qui
s’appelle l’instruction interactive entre pairs (peer instruction). Il a
publié le livre «Instruction entre pairs: Guide pour les utilisateurs»
en 1997 qui souligne sa stratégie de classe. Il trouve que c’est
mieux de transférer les informations aux apprenants hors de
classe et d’assimiler ces connaissances en classe, afin de
pouvoir suivre le vrai progrès des apprenants et de ne pas donner
toujours les cours théoriques en classe.

-530-
Communications de dimension spécifique

En 2000, Lage, Platt et Treglia a publié une essaie intitulé


«Inverser une classe: Une porte à créer un environnement
d’apprentissage particulier» qui parle de leur recherche sur la
classe inversée au niveau universitaire. Dans le cadre de cette
recherche qui se concentre sur deux matières économiques à
l’université, Lage, Platt et Treglia affirment que c’est possible de
changer les activités en classe (on enseigne les connaissances
à travers les vidéos au lieu de donner les cours magistraux) pour
s’adapter aux besoins des étudiants ayant différentes façons
d’apprendre.
En 2002, l’université de Wisconsin-Madison a utilisé les
cours et les présentations en ligne pour remplacer les cours face-
à-face de l’informatique. À la fin des années 90, J. Wesley Baker
a expérimenté la même idée à l’université de Cedarville. Il a écrit
une essaie qui présente sa façon de définir le terme «inverser
une classe» dans une conférence d’éducation en 2000. C’est
peut-être la première fois qu’on emploie le terme «inverser» en
associant avec ce modèle d’enseignement et d’apprentissage.
Kaw et Hess, en 2007, a publié leur essaie qui compare
l’efficacité des 4 modalités d’un même cours de STEM (technologie,
ingénieur et mathématiques): une classe traditionnelle, une
classe hybride (compris l’utilisation des sites web et la méthode
traditionnelle), une classe auto-apprentissage avec l’aide des sites
web et une classe inversée (compris auto-apprentissage avec
l’aide des sites web et les discussions en classe). Leur statistique
a montré que la deuxième modalité donne les meilleurs résultats.
Le plus connu pionnier de ce modèle de classe est probablement
Salman Khan, un éducateur américain. En 2004, Khan a commencé
à enregistrer les vidéos pour une cousine dont il était tuteur parce
qu’elle pense que les vidéos l’aident à sauter les parties qu’elle a
déjà maîtriser et à revoir plusieurs fois les parties qu’elle n’a pas
compris. Salman Khan a créé Khan Academy en basant sur ce

-531-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

modèle. Pour certaines personnes, Khan Academy est synonyme


de la classe inversée mais en effet, les vidéos présentent seulement
une forme de la stratégie de la classe inversée.
Suite des pionniers de la classe inversée, Wisconsin
Collaboratory for Enhanced Learning a créé deux centres
concernant l’apprentissage inversé et hybride. La structure de
la classe comprend les technologies modernes et les espaces
sympathiques d’apprentissage collaboratif. Cette structure met
l’accent sur l’apprentissage individuel en utilisant les modèles de
classe comme la classe inversée.
Dans notre région de l’Asie Sud-Est, la classe inversée est
devenu depuis quelques temps un sujet abordé par beaucoup
d’enseignants et chercheurs. En 2017, avec l’appui du Centre
régional francophone d’Asie-Pacifique, l’association des
enseignants de français de Da Nang, Vietnam a organisé le stage
de formation portant sur le thème «La classe inversée». Ce stage
a regroupé 21 enseignants venant de différents établissements
scolaires dans la région. Il est évident que la classe inversée
gagne une place de plus en plus importante dans la communauté
éducative et scientifique des langues étrangères, y compris la
langue française.

2. Définition de la classe inversée


La classe inversée est une classe où les apprenants obtiennent
les connaissances chez eux en lisant les documents ou surtout en
regardant les vidéos capsules. En classe, l’enseignant joue le rôle
d’un guide dans les activités de pratique. Ce modèle renverse la
routine où l’apprenant apprend quelque chose en classe et fait les
exercices à la maison. Il provoque les changements considérables
dans le rôle de l’enseignant et de l’apprenant.
Lebrun et Lecoq (2015) ont clarifié ce qui est et ce qui n’est
pas une classe inversée. Ils ont cité les éléments suivants.

-532-
Communications de dimension spécifique

La classe inversée est:


- Un moyen d’amplifier les interactions et les contacts
personnalisés entre les élèves et l’enseignant. Un environnement
dans lequel les étudiants prennent la responsabilité de leurs
propres apprentissages sous la guidance du formateur;
- Une classe dans laquelle l’enseignant n’est pas le maître
sur l’estrade mais l’accompagnateur attentif en permettant ainsi
différentes formes de différenciation;
- Un mélange fertile de la transmission directe avec une
approche constructiviste ou encore socioconstructiviste de
l’apprentissage (c’est aux apprenants qu’il revient d’apprendre)
- Une classe dans laquelle les élèves qui sont absents ne
sont pas laissés «en arrière»;
- Une classe où les contenus travaillés sont accessibles tout
le temps pour les révisions, les examens, la remédiation;
- Une classe où les étudiants sont davantage engagés dans
leurs apprentissages;
- Un lieu où les étudiants peuvent recevoir un accompagnement
personnalisé.
Nous pouvons aussi voir la différence entre une classe
inversée et une classe traditionnelle à travers un schéma qui
est cité dans le Guide académique d’inverser la classe dans
l’éducation pour les adultes d’ERAMUS.

-533-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Il existe trois différentes démarches qui peuvent être


appliquées dans une classe inversée.
Premièrement, la «vraie» classe inversée.
- Les étudiants apprennent les nouvelles connaissances en
suivant les cours et les vidéos en ligne, avant de venir en classe.
- En classe, les étudiants se discutent et participent aux
activités collectives pour montrer ce qu’ils ont acquis avant de
venir en classe.
- Les activités en classe demandent aux étudiants de
pratiquer, d’appliquer leurs connaissances et de résoudre les
situations problématiques.
Deuxièmement, la classe traditionnelle «innovée».
- Les étudiants commencent avec un cours en classe.
- Après ce cours, les étudiants se documentent à la maison,
avec guide de l’enseignant.
- Ce cours en classe a pour but de motiver les étudiants à
découvrir eux même les connaissances plus profondes.
- Les exercices en ligne servent d’aider les étudiants à pratiquer
leurs compétences, d’appliquer leurs connaissances.
Troisièmement, une classe hybride.
- Avant de venir en classe, les étudiants préparent en
regardant les vidéos pédagogiques ou en lisant les documents
donnés.
- En classe, les étudiants participent aux discussions, aux
activités collectives pour appliquer leurs connaissances dans
des situations problématiques.
- Après la session en classe, les étudiants vérifient leurs
acquis à travers les exercices en ligne.

-534-
Communications de dimension spécifique

Dans notre pratique, nous préférons le troisième modèle


de la classe inversée. Ce modèle sert bien aux vrais débutants
dans une classe de langue qui n’ont jamais eu contact avec cette
nouvelle langue et qui n’ont même pas encore les techniques pour
découvrir eux même un contenu pédagogique. Nous expliquons
plus précisément notre démarche dans la partie suivante.
Pratique en classe
Notre classe inversée se déroule en quatre phases en suivant
ce schéma qui est cité dans le Guide académique d’inverser la
classe dans l’éducation pour les adultes d’ERAMUS.

Premièrement, les étudiants découvrent à la maison ou dans


un moment choisi par eux même les connaissances nécessaires
pour la leçon (grammaticales, lexiques, culturelles, etc.) à travers
le dossier. C’est un ensemble des documents thématiques qui
est créé par les enseignants du Département en regroupant les
sources fiables du FLE. Nous visons à ne plus être «esclave»
d’un seul manuel de français. Les documents dans ce dossier
sont seulement les suggestions pour découvrir la leçon abordée
et les étudiants sont libres à utiliser d’autres sources de document
pendant leur découverte.
Deuxièmement, en classe, l’enseignant joue le rôle d’un
guide qui organise les activités mettant l’accent sur la pratique

-535-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

des compétences communicatives. Nous donnons rarement les


explications qui sont seulement les répétitions des écritures dans
le dossier. Les étudiants auront de la chance pour s’entraîner
dans différentes situations, différentes activités. Troisièmement,
après la séance directe en classe, les étudiants pratiquent sur les
site-web avec les exercices variés qui leur aident à aller plus loin
dans leur acquisition. Nous avons un MOODLE qui est réservé
aux exercices de grammaire et de vocabulaire, les thèmes
présentés ici suivent la progression du dossier en classe. Nous
appliquons aussi le logiciel Flipgrid pour organiser les activités
orales sur Internet.
Quatrièmement, les étudiants réalisent les projets en groupe,
c’est-à-dire qu’ils fabriquent les produits qui peuvent démontrer
comment ils mobilisent leurs acquis (les vidéos, les scènes de
théâtre, les reportages, etc.)
Nous avons obtenu les résultats positifs après avoir appliqué
ce modèle de classe. Les étudiants montrent leur engagement
dans les travaux à la maison et en classe. Ils trouvent que la
classe de langue est devenue un lieu très actif où ils sont
les acteurs de leur processus d’apprentissage. Le travail de
préparation des enseignants est plus complexe qu’avant mais
ils se situent maintenant dans une position plus sympathique
en tant que guide, que conseiller qui ne verse pas simplement
les connaissances dans la mémoire des étudiants mais qui
découvre le monde avec eux. Les produits après chaque projet
des étudiants démontrent aussi un progrès considérable dans
leur pratique de la production écrite et la production orale.
Pourtant, nous sommes conscients qu’il reste des limites de
cette application. D’abord, pour rassurer la qualité du dossier, cela
demande un travail gigantesque des enseignants mais il existe
toujours les points à améliorer, à changer pour avoir le plus correct
dossier. Ce point mène aussi à un autre problème concernant la

-536-
Communications de dimension spécifique

découverte autonome des étudiants. Les enseignants ne peuvent


pas être au courant de tous les documents que les étudiants
ont consulté alors la fiabilité de leurs connaissances n’est pas
rassurante. Ensuite, nos étudiants viennent de différentes
conditions de vie alors certains entre eux n’ont pas du tout de
capacité informatique, c’est pourquoi ils rencontrent les difficultés
dans la révision sur Internet.
Conclusion
On se pose la question si la classe inversée est une
innovation dans l’historique de l’enseignement des langues
étrangères. Nous pouvons affirmer ce constat. Innover, cela ne
s’agit pas de remplacer tout ce qui est vieux par une autre chose.
La classe inversée ne s’agit pas de remplacer les enseignants
par les vidéos ou de négliger les connaissances construites par
l’humanité. C’est, en effet, de rendre accessible ce trésor mental
à tout le monde, tous les types d’apprenants en utilisant les
moyens numériques de cette ère moderne. Cette caractéristique
de la classe inversée aide bien les étudiants à progresser dans
leurs compétences de production. Il existe encore les doutes
de l’utilisation de ce modèle de classe, surtout à partir des
enseignants qui ont pratiqué les méthodes plus traditionnelles,
alors il faut mettre l’accent sur la flexibilité de cette approche
pédagogique. Nous espérons que nos précisions théoriques
dans cette communication peuvent éclairer petit à petit sur ce
point discutable.
Notre communication reste le début d’une grande recherche
et nous espérons d’analyser plus profondément les résultats
obtenus de cette recherche dans une publication dans l’avenir.

-537-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

BIBLIOGRAPHIE:
1. ERAMUS. (2015). Learning guide on flipping the classroom
in Adult Education.
2. Flipped classroom. (2019, 11 29). Retrieved from Wikipedia:
https://en.wikipedia.org/wiki/Flipped_classroom
3. Guilbault, M., & Viau-Guay, A. (2017). La classe inversée
comme approche pédagogique en enseignement supérieur:
état des connaissances scientifiques et recommandations.
Revue internationale de pédagogie de l’enseignement
supérieur, 33.
4. Le, H. T. (2010). Lý luận và phương pháp nghiên cứu ngôn ngữ
học ứng dụng với thực tiễn nghiên cứu ngôn ngữ và dạy tiếng ở
Việt Nam. Thông tin khoa học, 11-80.
5. Lebrun, M., & Lecoq, J. (2015). Classe inversée - Enseigner
et apprendre à l’endroit ! Paris: Réseau Canopé.

-538-
5. Pour plus d’autonomie dans l’apprentissage
du/en français
ACCOMPAGNER VERS L’AUTONOMIE EN APPRENTISSAGE
DE LANGUE: LE CAS D’UN COURS DE LINGUISTIQUE
FRANÇAISE

DO Thanh Thuy
Département de français, Université de Langues et d’Études internationales
Université nationale du Vietnam à Hanoï (ULIS)

Résumé:
Durant trois ans, nous avons introduit le projet de théâtre dans notre cours de
linguistique française, dont un des objectifs est d’accompagner nos étudiants vers
l’autonomie. En tant que professeure et accompagnatrice, nous y avons modifié, à
la troisième année, le degré d’intervention et avons observé les changements des
effets dans le travail des étudiants. Les conclusions tirées portent sur l’importance
et les défis du travail d’accompagnement dans l’autonomisation de l’apprentissage
de langue étrangère, ainsi que sur la conscience du tuteur des difficultés que
l’accompagné peut rencontrer.
Mots-clés: Accompagnement, autonomie en apprentissage de langue, difficultés,
cours de linguistique, projet de théâtre

1. Problématique
L’autonomie signifiant «se gouverner par ses propres lois»1
n’exclut pas la présence d’un tuteur. En quoi consiste le travail
d’accompagnement vers l’autonomisation des apprentissages?
L’apprentissage est lui-même un processus complexe, qui se

1 Source: https://www.cnrtl.fr/definition/autonomie, date de consultation: le 28 août 2019.


Communications de dimension spécifique

manifeste différemment chez les individus dont les conditions et


les capacités sont dissemblables. Alors comment et à quel moment
intervenir pour soutenir ce processus? Dans cette communication,
nous partons d’abord des difficultés lors des apprentissages en
contexte d’enseignement/apprentissage de langue étrangère,
afin de saisir ce que la présence d’un accompagnateur peut
contribuer à l’autonomisation. Ces réflexions nous ont amenée à
effectuer, depuis trois ans, une expérimentation dans notre cours
de linguistique française où nous avons proposé aux étudiants
un projet de théâtre. À la troisième année, nous avons cherché à
modifier nos interventions pour examiner les effets dans le travail
des étudiants.

2. Difficultés lors des apprentissages


Notre étude en didactique des langues (Thanh Thuy Do,
2018) a montré que les difficultés en apprentissage pouvaient
se présenter lors de deux phases: phase de prise de décision
(ou au niveau stratégique) et celle de réalisation concrète de la
décision (ou au niveau de la compétence). «La prise de décision
est un processus par lequel un individu pèse les avantages et
les inconvénients de différentes options afin de faire un choix»
(Westen, 2000: 383). Donc ce qui importe dans la phase de
prise de décision, c’est la prévision des effets/conséquences des
actions à l’état futur avant d’agir. La concrétisation du mécanisme
de prise de décision est la planification (Thanh Thuy Do, 2018). À
ce niveau stratégique, le choix des buts, des moyens et des plans
d’action est volontaire (conscient). L’acteur-apprenant prévoit
les étapes d’action en fonction des effets de ces actions à l’état
futur (ibid.). Sa détermination des buts et moyens d’action doit
dépendre des situations concrètes, et plus précisément, de sa
prévision des conditions d’action/apprentissage1. Les difficultés

1 Dans notre contexte, les conditions d’action sont aussi les conditions d’apprentissage parce
qu’on apprend par l’action (learning by doing – John Dewey).

-541-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

existent si l’acteur-apprenant manque d’expérience, notamment


quand il va réaliser une tâche pour la première fois, car il n’a
jamais rencontré les conditions semblables dans le passé.
Ignorant les conséquences de ses futures actions dans de telles
conditions, l’apprenant hésite sur les buts et les moyens qu’il doit
choisir. Sa décision reste difficile, elle lui pèse, parce qu’il devra
être responsable des conséquences de ses actions.
Au stade de la concrétisation de la décision, ou au niveau de
la compétence, ces difficultés se manifestent. Devant une nouvelle
tâche, qu’on peut appeler par un terme générique «un problème
à résoudre», l’acteur-apprenant fait face, à une nouvelle situation/
au changement des conditions d’action/apprentissage qui exige
qu’il établisse de nouveaux plans d’actions, ou bien modifier les
plans liés aux anciennes situations d’apprentissage, avec des
changements de buts et moyens. Si la nouvelle planification pour
la réalisation de la tâche ne s’adapte pas à la nouvelle situation,
la modification ou rectification des buts et moyens doit se fait au
fur et à mesure tout au long de cette réalisation concrète, jusqu’à
ce que le problème soit résolu.

3. Accompagnement en cours de linguistique française


L’importance du rôle du tuteur est soulignée par J. S. Bruner
et L. Vygotsky dans l’acquisition et le développement du langage
en langue maternelle. Bruner la décrit comme un processus
d’étayage où «l’adulte restreint la complexité de la tâche
permettant à l’enfant de résoudre des problèmes qu’il ne peut
accomplir tout seul» (Bruner, 1998:288). L’idée de l’étayage est
liée au concept vygotskien de zone proximale de développement
définie comme l’écart entre le niveau de développement actuel
tel qu’on peut le déterminer à travers la manière dont l’enfant
résout des problèmes lorsqu’il est assisté par l’adulte ou collabore
avec d’autres enfants plus avancés (Vygotsky, 1978). Dans
le contexte de l’apprentissage et de l’acquisition d’une langue

-542-
Communications de dimension spécifique

étrangère, le rôle de l’étayage de Bruner est interprété comme


le fait que l’interactant plus compétent laisse l’apprenant agir
en le guidant, dans le but de l’amener vers l’autonomie (Bange,
1996), (Bange, Carol, Griggs, 2005). Le soutien vers l’autonomie
ne doit pas négliger la conscience des niveaux de difficultés lors
des apprentissages. À notre avis, le tuteur va aider l’apprenant
à pouvoir prendre lui-même des décisions adéquates dans son
apprentissage pour qu’il puisse aller jusqu’au bout d’un itinéraire
lié à des conditions d’action/apprentissage déterminées.
Dans le programme de formation de notre département de
français, les cours de théorie de la langue sont destinés aux
étudiants en troisième et quatrième années. Notre démarche
empirique est entamée au sein d’un cours de linguistique dont
le contenu porte sur la syntaxe de la phrase et le verbe en
français. Ce cours a lieu au 2ème semestre de la troisième année
de l’université. Dans ce cours, la linguistique examine l’étude du
fonctionnement de la langue et la relation entre des phénomènes
linguistiques et des phénomènes non-linguistiques. Pour
comprendre dans quel contexte utiliser la langue et/ou appliquer la
théorie, l’interprétation des phénomènes linguistiques étrangers
est toujours liée aux éléments culturels. Il s’agit d’un cours donné
au public non-natif où la langue étrangère est à la fois le but et le
moyen de l’apprentissage. La théorie et la pratique de la langue
y sont étroitement liées.
Nous y avons proposé aux étudiants un projet de théâtre,
pour deux buts principaux: leur faire découvrir des contenus
théoriques liées à la dimension culturelle, et accompagner
nos étudiants dans leur autonomisation de l’apprentissage. En
jouant le rôle des personnages, ils pourraient vivre des tranches
de vie d’autres cultures et notamment des émotions qu’ils
exprimeraient au moyen des actions verbales et non-verbales. Le
projet rendrait les étudiants «acteurs sociaux» ayant à accomplir
des tâches qui ne sont pas seulement langagières. Ce projet

-543-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

implique plusieurs tâches à faire ainsi que la mobilisation et


l’enrichissement de différents types de savoir. La moitié du temps
du cours est réservée à la pratique, donc le projet de théâtre. Le
projet comporte quatre phases: choix du texte théâtral, exercices
d’expression émotionnelle, mise en scène avec texte, mise en
scène sans texte. L’évaluation compte pour 20% de la note totale
du cours. Jusqu’à présent, l’expérimentation s’est effectuée 3 fois.

À la troisième année (2017-2018), nous avons changé notre


façon d’intervention, en gardant le même programme du projet
avec quatre phases citées. Précisément, la définition des moyens
et des buts intermédiaires n’y était pas guidée, les étudiants se
sont débrouillés eux-mêmes. Nous n’avons pas contrôlé le respect
de petits délais, et avons visé plutôt le but final qui était la mise
en scène à la fin du semestre. Nous avons formulé l’hypothèse
que les étudiants auraient moins de pression, qu’ils auraient plus
d’autonomie dans leur organisation du temps et du travail collectif.
Résultat
Quel est le résultat de ce changement? Nous avons
remarqué que le progrès des étudiants était très hétérogène par
rapport à celui des deux années précédentes. Vu que le degré de
guidage s’est diminué, ces étudiants avaient plus de difficultés
durant le projet. Ils ont pris plus de temps à planifier, à déterminer
les moyens et les buts intermédiaires pour accomplir la tâche
qu’ils n’ont jamais faite avant. Ce projet exige beaucoup d’efforts
et concentration, car la pratique théâtrale est liée à plusieurs
compétences autres que la compétence linguistique, telles que
le travail en groupe, la compétence culturelle, les compétences

-544-
Communications de dimension spécifique

en communication, l’expression émotionnelle… Le changement


nous a fait voir les nets écarts entre les étudiants, qui ne
dépendaient pas forcément de leur niveau linguistique. Ce qui
importe est leur possibilité de surmonter les défis en participant
aux activités proposées. Et nous avons réalisé que quand ces
étudiants étaient placés dans les situations où la tâche donnée
était difficile, on pouvait observer le réveil de leur force intérieure.
Pendant la mise en scène finale, à l’intérieur d’un groupe, il arrive
qu’un ou deux membres brille/brillent beaucoup plus par rapport
aux autres.
Nous avons constaté qu’il y avait 3 meilleures mises en
scènes. L’une était présentée par un groupe d’étudiants en
classe d’excellence (réunissant les meilleurs étudiants de la
promotion par épreuves de sélection), deux autres par deux
groupes d’étudiants en classe normale. Nous avons réfléchi
sur les raisons de réussite de ces groupes. Comme nous le
savons, la langue française y est à la fois le moyen et le but
de l’apprentissage. Le groupe en classe d’excellence a un bon
niveau de français, ses membres avaient une certaine confiance
quand ils assumaient cette tâche. Ils avaient quelques embarras
quand ils devaient utiliser leur langage corporel, mais en général
ils ont réalisé la tâche avec progrès. Le deuxième groupe était
très sérieux et ils ont trouvé une bonne entente dès le début du
projet. Ils ont rapidement distribué les rôles après le choix du
texte théâtral et se sont entraînés sur le texte avec concentration.
C’était le groupe le plus assidu. Quant au troisième groupe,
ses membres ont un niveau de français moyen par rapport aux
autres mais ces étudiants semblaient avoir beaucoup d’aptitudes
pour le théâtre. Durant leur travail en groupe, le rythme n’était pas
stable, ils étaient tantôt studieux, tantôt distraits. Pendant la mise
en scène, leur prononciation avait des problèmes, pourtant ils ont
bien joué les rôles, avec enthousiasme. Selon l’observation de
tous les étudiants de la classe normale et la nôtre, on peut dire

-545-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

que le deuxième groupe a gagné le cœur de la majorité. Ils ont


fait une percée dans la mise en scène officielle (on a toujours une
répétition avant).
Le résultat de cette 3ème expérimentation, avec des modifications
d’intervention, nous montre que la difficulté dans le travail de
tutorat se montre quand on doit «doser» sa présence en tant
qu’accompagnateur, et se positionner entre un pôle de prise en
charge et un pôle d’autonomie. Les résultats des mises en scène
des deux années précédentes sont bons dans l’ensemble, et le
progrès des étudiants y est quasiment homogène. À la troisième
année, les étudiants se progressent au rythme différent. On ne peut
pas dire que la plupart des mises en scène y sont bonnes, mais
il y a des étudiants qui s’avancent considérablement. Alors quelle
intervention est meilleure? L’accompagnement est une interaction
complexe entre des êtres humains. Les interactants ne sont pas des
robots qui fonctionnent par un simple levier. Ce travail exige qu’on
observe attentivement l(es)’accompagné(s) pour pouvoir intervenir
au bon moment. L’accompagnement a aussi besoin d’une stratégie
où on planifie et prévoit les futures situations en se basant sur les
expériences retirées des situations similaires dans le passé. Le
tuteur ou «l’apprenant expérimenté» peut être aussi confronté aux
difficultés à deux niveaux que nous avons mentionnées: niveau de
la stratégie et celui de la compétence.

4. Conclusion
Cette étude a permis d’éclairer nos réflexions autour du
travail d’accompagnement vers l’autonomie en apprentissage
de langue étrangère. Le soutien se réalise par le guidage
sur la détermination des buts et moyens devant une tâche
d’apprentissage. Le fait de sensibiliser l’acteur-apprenant aux
éléments à la fois linguistiques et non linguistiques pertinents
pour la réussite favorise la décision de l’apprenant sur ses futures

-546-
Communications de dimension spécifique

actions. Le défi semble consister à savoir «doser» sa présence au


rôle de tuteur. Ce dernier doit connaître le moment où on laisse
agir l’accompagné et lui faire découvrir lui-même ses capacités
cachées ainsi que ses lacunes, ce qui lui permet de rectifier/
modifier sa planification pour le progrès.

BIBLIOGRAPHIE
1. Bange, P. (1996). Considérations sur le rôle de l’interaction
dans l’acquisition d’une langue étrangère. Les Carnets Du
Cediscor, (4), 189-202.
2. Bange, P., Carol, R., & Griggs, P. (2005). L’Apprentissage
d’une langue étrangère: Cognition et Interaction. Paris:
L’Harmattan.
3. Bruner, J. S. (1998). Le Développement de l’enfant: savoir-
faire, savoir dire (6è édition). Paris: Presses Universitaires de
France.
4. Vygotsky, L. (1978). Mind in Society: The Development of Higher
Psychological Processes. Cambridge: Harvard University Press.
5. Westen, D. (2000). Psychologie: pensée, cerveau et culture.
Bruxelles: De Boeck.
6. Thanh Thuy Do (2018). Vers une autonomie en apprentissage
selon le chemin du milieu (le cas des étudiants de français à
l’université nationale du Vietnam à Hanoï). Hanoï: Édition de
l’université nationale du Vietnam à Hanoï.

-547-
AUTO-APPRENTISSAGE DU FRANCAIS COMME LANGUE
ÉTRANGÈRE CHEZ LES ÉTUDIANTS DE LA FACULTÉ DES
LANGUES ÉTRANGÈRES DE L’UNIVERSITÉ TAY NGUYEN

NGUYEN Thi My Lien


Faculté des langues étrangères - Université Tay Nguyen

Résumé:
L’apprentissage du français est obligatoire pour les étudiants de la Faculté
des langues étrangère de l’Université Tay Nguyen. C’est pourquoi le but de cette
étude est de comprendre la réalité de l’auto-apprentissage du français chez les
étudiants de la Faculté des langues étrangères de l’Université Tay Nguyen. Depuis
lors, nous voulons proposer des solutions pour y améliorer la qualité de l’auto-
apprentissage du français.
Nous avons mené une enquête auprès des étudiants de l’université à l’aide
d’un questionnaire sur l’auto-apprentissage du français et des entretiens chez les
étudiants, afin de mieux comprendre les problèmes rencontrés et les limites à
surmonter pour améliorer l’apprentissage du français par les étudiants de la Faculté
des langues étrangères de l’Université Tay Nguyen. Après notre étude, les résultats
obtenus nous montrent que les étudiants se rendent compte de l’importance de
l’auto-apprentissage; que le temps qu’ils réservent pour l’auto-apprentissage est
court; qu’ils ne sont pas habitués au travail d’équipe; que leur lecture n’est pas
vraiment efficace.
Mots-clés: apprentissage du français, auto-apprentissage du français, étudiants.
Communications de dimension spécifique

1. Problématique
En mettant en œuvre le projet de rénovation de l’éducation et
de la formation, plusieurs universités vietnamiennes ont changé
la forme de formation du système traditionnel en système de
crédits. L’un des objectifs qui fait la différence entre une formation
basée sur les crédits et une formation selon le régime d’études
annuel est la réduction du nombre d’heures de cours théoriques
et l’augmentation du temps d’auto-apprentissage, de l’autonomie
des étudiants et le développement de l’esprit créatif dans
l’apprentissage. Ainsi, les compétences d’auto-apprentissage
des étudiants doivent être pleinement développées afin de
s’adapter à cette forme de formation. Par conséquent, pour aider
les étudiants à s’intégrer rapidement à ce type de formation, il
est nécessaire d’améliorer l’auto-apprentissage, ce qui a une
signification pratique à long terme. Ce sont l’auto-apprentissage,
l’auto-apprentissage régulier et l’auto-apprentissage tout au long
de la vie qui sont les conditions de base pour que les hommes
acquièrent le trésor des connaissances de l’humanité. Grâce à
quoi, la personnalité se forme et se développe.
Le français est considéré comme une langue étrangère pour
les étudiants en anglais de la Faculté de langues étrangères
de l’Université Tay Nguyen. Cette belle langue y est enseignée
depuis la fondation de la faculté en 1995.
Cependant, aujourd’hui beaucoup de personnes pensent
que le français n’est plus utile, et que c’est une langue qui se
parle de moins en moins. C’est vrai que la langue française n’a
plus la même place dans le monde que celle qu’elle occupait au
XIXe siècle, mais elle a tout de même un rôle très important et
c’est la deuxième langue la plus apprise dans le monde après
l’anglais. Comme l’anglais, c’est une langue qui est parlée sur
les cinq continents et qui offre surtout de réelles perspectives
professionnelles pour les jeunes. La maîtrise du français est un

-549-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

avantage pour trouver un emploi notamment dans les pays


francophones.
Pour les raisons précédentes , nous avons choisi le sujet
«Auto-apprentissage du français comme langue étrangère chez
les étudiants de la Faculté des langues étrangères de l’Université
Tay Nguyen” comme notre sujet de recherche.
A partir de ce sujet d’étude, nous formulons 3 questions de
recherche comme suit:
1. Les étudiants de la Faculté des langues étrangères
comprennent-ils eux-mêmes l’importance de l’auto-apprentissage
du français?
2. Comment se passe l’auto-apprentissage du français chez
les étudiants?
3. Comment faire pour améliorer la qualité de l’apprentissage
du français chez les étudiants?
Nous avons mené cette étude sur 400 étudiants de la Faculté
des langues étrangères de l’Université Tay Nguyen en 5 mois, du
mars 2019 au juillet 2019.

2. Méthodologie de recherche
2.1. Méthode de recherche documentaire
En étudiant ce sujet, nous avons fait une recherche de
nombreux documents liés au sujet, y compris des livres de nombreux
auteurs nationaux et étrangers, et des revues pédagogiques.
Grâce à l’étude de documents, nous pouvons construire une base
théorique pour les activités d’auto-apprentissage des étudiants.
2.2. Méthode d’enquête par questionnaire
Afin de comprendre la réalité de l’auto-apprentissage du
français chez les étudiants et de collecter des informations

-550-
Communications de dimension spécifique

relatives à leurs activités d’auto-apprentissage, nous avons


élaboré un questionnaire (annexe 1) comprenant 29 questions. Le
questionnaire a été distribué à tous les étudiants du Département
des langues étrangères (413 étudiants) mais nous avons
récupéré seulement 400 fiches. Les résultats de cette enquête
par questionnaire sont ceux de la recherche.
2.3. Méthode descriptive
Les données collectées par le biais du questionnaire sont
statistiquées, classées et traitées sur ordinateurs avec le logiciel
Microsoft Excel.

3. Aspect théorique de l’étude


3.1. Auto-apprentissage
Les chercheurs ont donné la définition de l’auto-apprentissage
sous différents aspects.
Joffre Dumazedier a écrit: «L’auto-apprentissage semble être
un moyen pour les apprenants de développer leurs connaissances
et leurs aptitudes en fonction de leurs capacités, grâce au choix
des meilleurs moyens d’apprentissage.» [10]
Pour Pierre Landry, chercheur en éducation: «Les activités
d’apprentissage individuelles basées sur leurs capacités s’appellent
auto-apprentissage ou auto-formation.» [14]
Philippe Carré a donné cette définition: «L’auto-apprentissage
est le processus d’autonomie, d’indépendance par sujet» [12].
Selon un auteur vietnamien, Nguyen Canh Toan: «L’auto-
apprentissage est un auto-brainstorming, une réflexion, une
utilisation des capacités intellectuelles (observation, comparaison,
analyse, synthèse, etc.) et parfois des muscles (lorsque les
outils sont utilisés), des qualités, et même des motivations,
des sentiments (telles que l’honnêteté, l’objectivité, la bonne
volonté, la persévérance, la patience, la passion pour la science,

-551-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

le désir de réussir, etc.) afin d’acquérir un certain domaine des


connaissances humaines, de transformer ce domaine en vos
propres «. [5, 59, 60]
Le chercheur Vu Duy Yen a un autre point de vue: «L’auto-
apprentissage à la maison est la continuation de la logique
d’apprentissage formelle en classe, exigeant des étudiants une
discipline personnelle et une grande autonomie, car il n’ya pas de
supervision directe ni de direction de la part de l’enseignant. «. [9]
3.2. Activités de l’auto-apprentissage
D’après Nguyen Canh Toan, les activités d’auto-apprentissage
se déroulent sous trois formes [5]:
- 1re forme: auto-apprentissage contrôlé (étude en face-à-
face): écouter des conférences, des cours, des discussions de
groupe, des expériences, etc.
- 2e forme:auto-apprentissage sans contrôle (auto-apprentissage
sans face à face): Il s’agit d’une activité menée par les apprenants
de manière autonome, consciemment, sans contrôle direct de
l’enseignant, par moyens d’apprentissage...
- 3e forme: les apprenants trouvent leurs propres connaissances
pour satisfaire leurs besoins de connaissances en cherchant
des documents, en s’appuyant sur leurs propres expériences en
matière de réflexion, d’auto-analyse, d’auto-évaluation...
3.3. Caractéristiques des activités d’auto-apprentissage
- L’auto-apprentissage des étudiants constituent une activité
autonome, volontaire et positive dans le but d’acquérir des
connaissances, des compétences, des techniques et une orientation
vers les valeurs. L’objet de l’auto-apprentissage est la connaissance,
les aptitudes et les habiletés. [6, 87]
- Les activités d’auto-apprentissage sont différentes des
autres activités. Elles ne visent pas à modifier l’objet de l’activité,

-552-
Communications de dimension spécifique

mais visent principalement à transformer le sujet de l’activité - à


transformer la personnalité des étudiants. [6, 13]
- Les activités d’auto-apprentissage des étudiants sont des
activités de recherche [7, 97].
3.4. Facteurs influant sur les activités d’auto-apprentissage
3.4.1. Facteur subjectif
+ Motivation d’auto-apprentissage
Ce sont les stimuli internes qui incitent les étudiants à
participer activement au processus d’auto-apprentissage.
+ Compétences d’auto-apprentissage
Il existe trois groupes de compétences de base:
- Compétences pour les activités de planification en autoformation
(planification en autoformation).
- Compétences pour organiser la mise en œuvre du plan.
- Compétences pour l’auto-évaluation.
+ Habitude d’auto-apprentissage
Les habitudes d’auto-apprentissage sont l’un des éléments
essentiels pour que l’auto-apprentissage fonctionne ou non.
3.4.2. Facteur objectif
• Contenu d’enseignement
Le contenu d’enseignement est celui dans des manuels,
des matériaux de référence et d’autres sources d’informations.
Si le contenu de l’enseignement est approprié et répond aux
besoins des apprenants, il aura un impact positif sur la création
d’enthousiasme, de passion, de diligence, de créativité, d’initiative,
de conscience de soi, d’exploration de soi, d’auto-apprentissage
dans le processus d’apprentissage.

-553-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

• Méthodes d’enseignement
Les méthodes d’enseignement associent les activités des
enseignants et les apprenants dans le processus d’enseignement
afin de mettre en œuvre le contenu d’enseignement. [3,147]
• Conditions et environnement d’apprentissage
Il s’agit d’équipements tels que supports audiovisuels, équipements
visuels, matériel pédagogique, ouvrages de référence, etc.
En bref, les activités d’auto-apprentissage des étudiants
sont influencées par de nombreux facteurs à la fois subjectifs et
objectifs. En particulier, le facteur subjectif joue le rôle de force
interne pour promouvoir les efforts, la détermination dans le but
d’aider les étudiants à obtenir de bons résultats dans les activités
d’auto-apprentissage. Le facteur objectif constitue la base
fondamentale pour que les résultats de l’auto-apprentissage des
étudiants atteignent des niveaux plus élevés.

4. Résultats
4.1. Perception des étudiants face à l’auto-apprentissage du français
En sondant 400 étudiants, nous avons obtenu les résultats
suivants:
- 295 étudiants (soit 73,75%) déclarent que l’auto-apprentissage
du français est très important.
- 105 étudiants (soit 26,25%) pensent que l’auto-apprentissage
du français est important.
Ainsi, les étudiants apprécient bien le rôle de l’auto-
apprentissage du français.
4.2. Estimation de l’étudiant du rôle des activités
d’auto-apprentissage du français
La plupart des étudiants comprennent bien le rôle de
l’auto-apprentissage du français, même si le choix de chaque

-554-
Communications de dimension spécifique

étudiant est différent. De manière générale, tous pensent que


l’auto-apprentissage est nécessaire car il aide les apprenants
à promouvoir l’ apprentissage positif, proactif et créatif (373/400
étudiants), ainsi la consolidation, la maîtrise et le développement
des connaissances (358/400 étudiants) et l’amélioration de leur
capacité à les analyser et à les synthétiser (268/400 étudiants)...
Cela montre que les étudiants ont maîtrisé la perspective
éducative en matière de promotion des ressources internes en
éducation et en formation, en appliquant la devise: «transformer le
processus d’apprentissage en auto-apprentissage; le processus
de formation en auto-formation».
Cependant, trop peu d’étudiants pensent que l’auto-apprentissage
du français les aide à préparer leurs compétences pour un apprentissage
tout au long de la vie. Ce nombre n’atteint que 95/400 étudiants, soit
23,75% et se place au dernier rang dans le tableau.
4.3. Estimation des étudiants sur l’organisation
de l’ auto-apprentissage du français
4.3.1. Temps d’auto-apprentissage du français
Le temps que les étudiants réservent à l’auto-apprentissage
du français est trop court. En effet:
6,6% des étudiants en première année; 1,74% des étudiants en deuxième
année; 7,83% des étudiants en troisième année et 4,69% des étudiants en
quatrième année ont un temps d’auto-apprentissage du français de 5 heures
ou plus.
22,64% des étudiants en première année; 22,61% des étudiants en deuxième
année; 13,04% des étudiants en troisième année et 12,5% des étudiants en
quatrième année n’étudient que moins d’une heure par jour.

La plupart des étudiants font de l’auto-apprentissage du


français à raison de 1 à 2 heures: 58/106 étudiants en première
année (soit 54,72%); 64/115 étudiants en deuxième année (soit
55,65%); 54/115 étudiants en troisième année (soit 46,96%) et
27/64 en quatrième année (42,19%).

-555-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

4.3.2. Planification personnelle


La planification de l’auto-apprentissage du français pour
la plupart des étudiants n’a pas été fréquente, seulement
occasionnellement ou jamais. Lors de la préparation à l’examen,
les étudiants ont seulement l’habitude de planifier leur révision:
58/400 des étudiants représentent 14,5% du niveau fréquent et
202/400 des étudiants soit 50,5% au niveau occasionnel. Il y a
trop d’étudiants qui n’ont jamais planifié leurs propres études:
71,75% des étudiants (soit 287/400 étudiants) n’ont jamais
planifié chaque jour, chaque semestre. 76% des étudiants
(304/400) n’ont jamais eu l’habitude de se préparer à la lecture ...
4.3.3. Méthode d’auto-apprentissage du français
Les étudiants ont utilisé différentes méthodes d’auto-
apprentissage selon les matières. Cependant, peu d’étudiants
apprécient la méthode d’échange et de discussion sur les leçons
avec leurs amis, dans la plupart des matières. Pour la pratique
linguistique permanente la plus élevée, 97/400 étudiants
représentent 24,25% des affectations régulières. Mais pour les
matières de théorie de langues, les étudiants lisent souvent les
manuels scolaires et le matériel de référence pour les nouvelles
leçons (75/400 étudiants).
4.3.4. Compétences en lecture
19/400 étudiants représentent 4,75% de la même fréquence
et 29/400 étudiants soit 7,25% lisent occasionnellement des
textes en français. 149/400 élèves représentent 37,25% de la
lecture fréquente. Pour les documents concernant les leçons,
107/400 étudiants lisent régulièrement et 174/400 étudiants lisent
occasionnellement. En revanche, 278/400 étudiants, représentant
69,5%, ne lisent jamais de journal scientifique.
La plupart des livres, des références que les étudiants lisent,
sont empruntés souvent à des amis (316/400 étudiants) ou

-556-
Communications de dimension spécifique

à la bibliothèque (306/400 étudiants). En raison de conditions


financières, le nombre d’étudiants achetant des livres et des
références n’est pas très élevé (175/400 étudiants). De plus, les
étudiants n’ont pas l’habitude d’accéder à Internet pour y exploiter
des ressources (158/400 étudiants).
Avec 11 types de lecture, 342/400 étudiants, soit 85,5%, ont
choisi de feuilleter le matériel, de saisir l’idée principale. Ceci
est la méthode de lecture la plus populaire chez les étudiants.
Presque très peu d’étudiants, seulement 27/400, qui lisent à
haute voix. Ces étudiants ont dit que c’était leur habitude. Même
si les étudiants étudient la leçon, ils doivent la lire à voix haute
pour comprendre ou mieux comprendre la leçon. Les étudiants
choisissent également deux méthodes de lecture, telles que la
lecture de la section principale (341/400 étudiants) ou la lecture
silencieuse et réfléchie (321/400 étudiants).
Très peu d’étudiants lisent les documents du début à la fin
(48/400 élèves) ou résument leur contenu de chaque partie,
chaque chapitre (28/400 élèves).
4.3.5. Méthode de systématisation des connaissances
Lorsqu’ils systématisent les connaissances, 284/400 étudiants
représentant 71% résument souvent leurs connaissances à leur
discrétion. Seuls 124/400 étudiants soit 31% font du schéma général
ou 157/400 étudiants, représentant 39,25% font du schéma détaillé
lors de la systématisation de leurs connaissances. Cependant, les
étudiants ne donnent pas volontairement des commentaires et
des suggestions sur les cours de leurs enseignants, seulement
46/400 étudiants représentant 11,55%.
Les étudiants suivent principalement les instructions des
enseignants (384/400 étudiants soit 96%). Ensuite, ils suivent
leur contenu systématique (376/400 étudiants soit 94%).
Seuls 196/400 étudiants qui mémorisent la leçon par coeur.
Généralement, lors de la révision, ils établissent leur plan de
révision (345/400 étudiants soit 86,25%).

-557-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

5. Conclusion et propositions
5.1. Conclusion
Après cette étude, nous constatons que les étudiants sont
conscients de l’importance de l’auto-apprentissage. Cependant,
ils ne comprennent pas encore la nature de cette activité: l’auto-
apprentissage est celui tout au long de leur vie. De plus, ils ne
savent pas organiser leur auto-apprentissage; le temps qu’ils
consacrent à l’auto-apprentissage est limité; ils n’ont pas l’habitude
de planifier régulièrement leur auto-apprentissage; la discussion
et le travail en groupes ne sont pas répandus; lors de leur lecture,
les étudiants n’analysent ni n’approfondissent jamais toutes les
parties déjà lues; ils résument rarement le contenu de chaque
partie, chaque chapitre des documents qu’ils ont lus; la recherche
de documents spécialisés en français n’est pas populaire; ils
n’exploitent pas pleinement les documents d’Internet, ils les
empruntent principalement à des amis ou à la bibliothèque; ils ne
sont pas vraiment courageux pour faire des commentaires, des
suggestions sur les leçons des leurs enseignants.
5.2. Quelques propositions visant à aider les étudiants à améliorer
leur auto-apprentissage du français
5.2.1. Pour l’université
L’université peut organiser des séminaires, des conférences,
des échanges d’expériences, des activités parascolaires afin de
permettre aux étudiants de prendre conscience du rôle important
de l’auto-apprentissage du français.
De plus, l’université devrait créer des conditions et des
environnements pédagogiques favorables: mise en place
d’unebibliothèque riche de livres et de références en français et
des classes équipées des matériels modernes.
Il serait important égaalement pour l’université d’organiser
l’auto-apprentissage du français, de créer des conditions permettant

-558-
Communications de dimension spécifique

aux étudiants de participer activement à la recherche scientifique et


ainsi d’organiser des conférences scientifiques sur le thème «Auto-
apprentissage pour survivre et se développer».
5.2.2. Pour les enseignants
«Chaque enseignant et chaque enseignante est un exemple
d’auto-apprentissage et de créativité», selon les principes de
l’éducation. Plus précisément:
Grâce à l’enseignement en classe, les enseignants devraient
guider et former les étudiants avec les compétences nécessaires:
compétences pour la lecture, pour l’écoute en classe, pour les
notes des leçons, pour la systématisation des connaissances,
des leçons, etc.
La sélection et l’utilisation de méthodes d’ enseignement
appropriées jouent un rôle important, car elles déterminent la qualité
et l’efficacité du processus d’enseignement et d’apprentissage et
aident les étudiants à développer leurs propres méthodes d’auto-
apprentissage.
Après chaque jour, même après chaque leçon, les étudiants
devraient recevoir une adresse, une source leur permettant
d’exploiter les informations relatives à la leçon.
Chaque enseignant et enseignante devrait se construire
un sujet de recherche à long terme sur lequel il est possible de
demander aux étudiants de travailler ensemble. Ce sont de très
bonnes directions pour leurs recherches scientifiques dans le
futur, pour leur auto-apprentissage tout au long de leur vie.
Face au développement du multimédia, les enseignants
devraient savoir comment aider les étudiants à collecter et traiter
les informations afin d’enrichir leurs connaissances, les aider à
trouver des moyens pour résoudre les problèmes de manière
autonome.

-559-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

5.2.3. Pour les étudiants


Il faudrait que les étudiants organisent l’auto-apprentissage
du français efficacement comme suit:
Les étudiants devraient augmenter les heures d’auto-
apprentissage du français en élaborant un contenu et un plan
d’apprentissage qui s’appliquent à eux-mêmes, à leur situation
personnelle et à leurs conditions, pour qu’ils exercent ce plan
d’auto-apprentissage plus efficace.
Les étudiants apprendraient avec une conscience positive, avec
passion et un grand enthousiasme, en pratiquant constamment
l’auto-apprentissage par eux-mêmes.
Chaque étudiant serait volontaire, confiant et proactif dans la
recherche scientifique.
L’auto-apprentissage du français est indissociable de la
lecture, il est donc nécessaire de disposer de méthodes de lecture
en français efficaces.
En outre, en tant qu’enseignant à l’avenir, il est important que les
étudiants apprennent à se former dès maintenant. Par conséquent,
les étudiants en pédagogie en général et les étudiants de la Faculté
des langues étrangères en particulier doivent considérer la formation
et l’auto-apprentissage comme un besoin personnel.

BIBLIOGRAPHIE
En vietnamien
1. Đỗ Thị Châu, Sinh viên đánh giá kỹ năng tổ chức hoạt động tự
học và việc đổi mới phương pháp dạy học của giáo viên, Tạp chí
Giáo dục, số 139, 2006, tr.21.
2. Đặng Thị Thanh Mai - Nông Thị Hà, Tăng cường khả năng tự học
của sinh viên qua hướng dẫn sinh viên cách học, Tạp chí Giáo
dục, số 177, 2007, tr.18.

-560-
Communications de dimension spécifique

3. Phan Trọng Ngọ, Dạy học và phương pháp dạy học trong nhà
trường, NXB Đại học sư phạm, 2005.
4. Dương Đức Sáu, Đôi điều về tự học ở đại học, Tạp chí Giáo dục,
số 154, 2007, tr.34.
5. Nguyễn Cảnh Toàn, Quá trình dạy-tự học, NXB Giáo dục, 1997.
6. Nguyễn Cảnh Toàn (chủ biên), Học và dạy cách học, NXB Đại học
Sư phạm, 2002.
7. Lê Công Triêm (Chủ biên), Một số vấn đề hiện nay của phương
pháp dạy học đại học, NXB Giáo dục, 2002.
8. Trần Quốc Tuấn, Tổ chức việc tự học ở nhà môn lịch sử cho học
sinh trung học phổ thông, Tạp chí Giáo dục số, 143, 2006, tr.32.
9. Vũ Duy Yên, Đổi mới việc chỉ đạo hoạt động tự học ở nhà của học
sinh, Tạp chí Giáo dục, số 164, 2007, tr.43.

En français
10. Joffre Dumazedier, Aides à l’autoformation: un fait social
d’aujourd’hui, Éducation permanente, n0 122, 1995, p. 243-
256, Arcueil, France
11. Patrice Pelpel, Se former pour enseigner, Dunod, 1998.
12. Philippe Carré, “Self-directed learning in France” in European
views of Self-directed learning: historical, conceptional,
empirical, pratical, vocational. Waxmann, 2000.
13. Philippe Carré, Un état de la recherche sur l’autoformation,
Communication au 6ème colloque sur l’autoformation.
Montpellier: 5 décembre 2001.
14. Pierre Landry, “Auto-formation, autodidaxie et formation: quels
rapports?”, Observatoire des technologies pour l’éducation
en Europe, 2007.

-561-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

ANNEXE
Questionnaire réservé aux étudiants
Veuillez répondre aux questions suivantes, les résultats sont
uniquement à des fins de recherche.
Question 1: À votre avis, quelle est l’importance de l’auto-
apprentissage du français pour améliorer votre niveau?
a. Très important b. Important
c. Moins important d. Pas important
Question 2: Combien de temps consacrez-vous à vos
activités d’auto-apprentissage du français pendant la journée (en
dehors des heures en classe)?:
a. Moins d’une heure b. De 1 à 2 heures
c. De 3 à 4 heures d. À partir de 5 heures
Question 3: L’auto-apprentissage du français vous aide à
(cochez X dans les phrases que vous choisissez):
a. Consolider et maîtriser les connaissances et compétences
futures.
b. Développer vos connaissances.
c. Découvrir et résoudre les problèmes liés à vos connaissances.
d.Améliorer la capacité d’analyse, de synthèse et de généralisation.
e. Promouvoir un apprentissage positif, proactif et créatif.
f. Préparer des possibilités nécessaires pour un apprentissage
continu.
Question 4: Veuillez indiquer votre plan d’auto-apprentissage
du français:

-562-
Communications de dimension spécifique

Plan de/d’… Souvent Parfois Jamais


a. Auto-apprentissage du français pour toute
l’année
b. Autoformation du français pour chaque se-
mestre
c. Auto-apprentissage du français pour chaque mois
d. Auto-apprentissage du français pour chaque
semaine
e. Auto-apprentissage du français pour chaque jour
f. Auto-apprentissage du français pour toutes
les matières
g. Auto-apprentissage du français par chaque sujet
h. Lecture en français
i. Révision du français
j. programme de cours de français
k. discussion en groupe en français

Question 5: Comment apprenez - vous le français sous forme


d’auto-apprentissage?

No Méthode Souvent Parfois Jamais


1 Apprendre par coeur la leçon et le manuel
2 Faire le plan et apprendre comme le plan
Lire des manuels et des documents pour
3
mieux comprendre la leçon
Poser des questions et répondre au conte-
4
nu de chaque leçon
Lire des manuels et des documents quand
5
on fait des exercices à la maison
Rédiger un résumé de la leçon après
6 l’avoir écoutée l’explication du professeur
en classe
7 Faire tous les exercices à la maison
Lire le manuel à l’avance pour la nouvelle
8
leçon
9 Discuter les leçons avec les amis
Écouter et regarder des émissions en
10
français.

-563-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

La fréquence de lecture pour les documents et les livres.


Vous lisez souvent …....?
Question 6: les documents liés à filière d’étude
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 7: les documents liés au sujet d’étude
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 8: les documents écrits en français
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 9: les documents écrits en vietnamien
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 10: le journal scientifique en français
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 11: les documents littéraires, artistiques, physiques
et sportifs en français
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 12: Comment pouvez-vous lire les livres, les
documents en français? (Cochez X dans la phrase que vous
choisissez)
a. Emprunter chez les amis.

-564-
Communications de dimension spécifique

b. Emprunter à la bibliothèque.
c. Acheter.
d. Télécharger de l’Internet.
Lors de la lecture, vous ....?
Question 13: jetez un coup d’oeil, saisir l’idée principale
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 14: lisez attentivement, prenez des notes
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 15: déterminez les objectifs requis du document.
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 16: lisez les titres avant la lecture principale.
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 17: lisez en silence et réfléchissez.
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 18: lisez du début à la fin du document.
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 19: analysez, approfondissez sélectivement toutes
les parties déjà lue.

-565-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 20: comprenez et vous rappelez l’essentiel du
document
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 21: lisez à haute voix.
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 22: résumez le contenu de chaque partie, chaque
chapitre des documents.
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 23: établissez le plan de lecture, choisissez les
livres
a. Régulièrement b. Parfois
c. Rarement d. Jamais
Question 24: Que faites-vous lorsque vous systématisez vos
connaissances?
1. Systématiser les connaissances par sujet.
2. Préparer un aperçu général.
3. Préparer un plan détaillé.
4. Faire un résumé des connaissances principales selon
l’opinion des enseignants.
5. Faire un résumé des connaissances à apprendre.

-566-
Communications de dimension spécifique

6. Tirer des conclusions en sections.


7. Poser des questions sur les idées que vous n’avez pas
comprises.
8. Donner des commentaires et des suggestions sur la leçon
qui n’est pas raisonnable.
Pour la révision et la préparation de l’examen. Vous ...
Question 25: mémorisez et apprenez par coeur selon des
notes dans le cahier.
a. Régulièrement b. Parfois c. Jamais
Question 26: préparez un plan de révision pour apprendre.
a. Régulièrement b. Parfois c. Jamais
Question 27: suivez les instructions de l’enseignant.
a. Régulièrement b. Parfois c. Jamais
Question 28: étudiez selon votre contenu systématique.
a. Régulièrement b. Parfois c. Jamais
Question 29: Vous êtes étudiant (e) en:........................ année.
MERCI POUR VOTRE COOPERATION

-567-
INDEX DES AUTEURS

1. BARON Agnès, Université du Québec à Montréal


baron.agnes@uqam.ca
2. CHARPENTIER Jaruwan, Université de Mahasarakham -Thaïlande
jaruwancharp@gmail.com
3. DANG Kim Hoa, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
kimhoadang@gmail.com
4. DANG Thi Thanh Thuy, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
thuy8374397@gmail.com
5. DAO Anh Huong, Ecole supérieure de Génie civil - Vietnam
anhhuong57@gmail.com
6. DEJAMONCHAI Sirajit, Université Thammasat - Thaïlande
sirajitd@gmail.com
7. DINH Hong Van, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
dhvan2001@gmail.com
8. DO Lan Anh, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
lananh2391984@yahoo.fr
9. DO Thanh Thuy, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
aquableu95@yahoo.fr
10. DO Thi Bich Thuy, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
dbthuy2003@gmail.com
Index des auteurs

11. HOANG Thi Bich, Université de Langues et d’Études


Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
htbich2011@gmail.com
12. HOANG Thi Thu Hanh, Université de Langues Étrangères -
Université de Hué - Vietnam
htthanh@hueuni.edu.vn
13. LASEMILLANTE Priscille, Institut français du Laos
p.lasemillante@gmail.com
14. LE Ngo Thu Thao, Université de Jean Monnet Saint-Étienne -
France
lengothuthao@gmail.com
15. LUU Dinh Phuc, Université Nong Lam - Vietnam
ldphuc@hcmuaf.edu.vn
16. MARCHAL Bruno, Université Thammasat - Thaïlande
bruno.m@arts.tu.ac.th
17. MARTINEZ Pierre, Université Paris VIII Saint Denis - France
pierre.martinez@univ-paris8.fr
18. NGUYEN Canh Linh, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
nclinhv@yahoo.fr
19. NGUYEN Hong Hai, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
nhh209@gmail.com
20. NGUYEN Huu Binh, Université de Langues Étrangères -
Université de Da Nang - Vietnam
nhbinh@ufl.udn.vn
21. NGUYEN Huu Emilie, Université de Can Tho - Vietnam
emilie_nguyen_huu@hotmail.com
22. NGUYEN Huu Tam Thu, Université de Langues Étrangères -
Université de Da Nang - Vietnam
nhtthu@ufl.udn.vn

-569-
ACTES DU SÉMINAIRE
Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

23. NGUYEN Quang Thuan, Université de Langues et d’Études


Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
ngquangthuan295@gmail.com
24. NGUYEN Thi Hue, Académie de la Police populaire - Vietnam
huetuan.nguyenthi@gmail.com
25. NGUYEN Thi Mi Dung, Université de Commerce - Vietnam
dungtmai@gmail.com
26. NGUYEN Thi My Lien, Université de Tay Nguyen - Vietnam
mylien_dhtn@yahoo.com.vn
27. NGUYEN Thi Thu Hong, Université de Commerce - Vietnam
hongphapdhtm@gmail.com
28. NGUYEN THUC Thanh Tin, Université de Pédagogie
d’HoChiMinh-Ville - Vietnam
nguyenthuc.thanhtin@hcmue.edu.vn
29. NGUYEN Van Toan, Université de Hanoï - Vietnam
toannvf@hanu.edu.vn
30. NGUYEN Viet Quang, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
nvquang74@yahoo.fr
31. PHAM Anh Tu, Université de Langues Étrangères - Université
de Hué - Vietnam
panhtu@hueuni.edu.vn
32. PHAM Duc Su, Service de l’Education et de la Formation ,
Province de Khanh Hoa - Vietnam
ducsupham05@yahoo.fr
33. PHAM Song Hoang Phuc, Université de Pédagogie
d’HoChiMinh-Ville - Vietnam
phucpsh@hcmue.edu.vn
34. PHAM Thi Hong Ha, Académie des Sciences militaires -
Vietnam

-570-
Index des auteurs

35. RISPAIL Marielle, Université de Jean Monnet Saint-Étienne


- France
marielle.rispail@univ-st-etienne.fr
36. THIPKONG Penphan, Université de Phayao - Thaïlande
phenphan.thipkong@gmail.com
37. TRAN Dinh Binh, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
tbinhfrance@gmail.com
38. TRAN Xuan Lam, École supérieure de Génie civil - Vietnam
txuanlam@yahoo.fr
39. TRINH Bich Thuy, Université de Langues et d’Études
Internationales - Université Nationale du Vietnam à Hanoï
trinhthuy211296@gmail.com
40. TRUONG Hoang Le, Université de Langues Étrangères -
Université de Hué - Vietnam
thoangle@hueuni.edu.vn
41. VIEN The Khanh Toan, Université de Pédagogie d’HoChiMinh-
Ville - Vietnam
toanvtk@hcmue.edu.vn
42. VO Van Chuong, Université de Can Tho - Vietnam
vvchuong@ctu.edu.vn

-571-
Giám đốc - Tổng Biên tập: (024) 39715011
NHÀ XUẤT BẢN
Hành chính: (024) 39729436
ĐẠI HỌC QUỐC GIA HÀ NỘI
Biên tập: (024) 39714896
16 Hàng Chuối - Hai Bà Trưng - Hà Nội Kế hoạch xuất bản: (024) 39728806

Chịu trách nhiệm xuất bản: Giám đốc - Tổng biên tập: TS. PHẠM THỊ TRÂM

Biên tập chuyên môn: ĐẶNG TÙNG DƯƠNG


Biên tập xuất bản: LÊ THỊ HỒNG THƠM
Chế bản: NGUYỄN CÔNG CƯƠNG
Trình bày bìa: NGUYỄN NGỌC ANH
Đối tác liên kết: TRUNG TÂM PHÁP NGỮ CHÂU Á - THÁI BÌNH DƯƠNG
Số 280 An Dương Vương, Quận 5, TP. Hồ Chí Minh

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ACTES DU SÉMINAIRE: Enseignement/apprentissage du et en français: regards croisés

Mã số: 2L - 196 ĐH2020


In 100 bản, khổ 16x24cm tại Công ty CP In Thương mại Truyền Thông Việt Nam
Địa chỉ: Số 7, ngách 28, ngõ 29, phố Vĩnh Tuy, phường Vĩnh Tuy, quận Hai Bà Trưng, TP. Hà Nội
Số xác nhận ĐKXB: 4963-2020/CXBIPH/01-361/ĐHQGHN, ngày 24/11/2020
Quyết định xuất bản số: 1554 LK-XH/QĐ-NXB ĐHQGHN ngày 27/11/2020
In xong và nộp lưu chiểu năm 2020

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