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Fenoglio Irène. La didactique des langues à l'épreuve du sujet, Patrick Anderson. In: Langage et société, n°88, 1999. pp. 101-
102;
https://www.persee.fr/doc/lsoc_0181-4095_1999_num_88_1_2872
Voici un ouvrage sur la didactique des langues, riche et original. Son foisonnement,
sa présentation extrêmement dense - qui aurait gagné à s'alléger du carcan
"universitaire" - ne parviennent pas à masquer l'intérêt évident du propos, exactement
désigné par le titre de l'ouvrage et explicité progressivement dans la troisième partie
intitulée « Du sujet ».
C'est sur cette dernière que je m'arrêterai, me contentant, pour les première et
deuxième partie (respectivement intitulées « L'inscription de la DLE * » et « Le défi de
la langue »), d'inciter les spécialistes de DLE à aller y voir de près. Elles rendent
compte, en effet, de l'ensemble de la littérature du domaine d'une manière critique,
et couvrent quasi exhaustivement, les questions de ce champ.
L'auteur fait apparaître combien l'apprenant est actif puisqu'il « se trouve dans
l'obligation de construire et de se construire des repères stables et ceci grâce à la
demande inconsciente qu'il adresse à l'enseignant » (p. 260). Cependant cette «
institution d'une parole paternelle » se subvertit elle-même dans le désir de s'en
affranchir.
La conclusion de cette dernière partie de l'ouvrage s'ouvre de la façon suivante :
« La question qui surgit inévitablement devant le constat dressé est de se demander
pourquoi en découvrant l'intersubjectivité on fait et veut faire l'économie de la
totalité des conséquences de cette prise de position. » La conclusion générale de son
ouvrage répond à cela en ouvrant un débat d'ordre éthique : « si l'objet même de la
science est de rendre compte de la totalité de l'être de l'homme à partir de
connaissances positives, il faut bien admettre qu'elle bute à l'évidence sur le sujet. Pour la
pédagogie [...] c'est ce vide qui concerne l'évolution de l'acte d'apprendre comme s'il
n'était pas question à chaque fois d'êtres de chair » (p. 343).
Ces notes de lecture ne rendent pas complètement compte de l'intérêt qu'il y aurait
pour les didacticiens - mais aussi pour tous les « amoureux » de la langue - à ouvrir
cet ouvrage, placé sous les auspices du désir; désir précis, avoué d'aller vers une
"autre" langue, mais désir aussi non-dit, insu - inconscient - qui se blesse et s'use à
trop être ignoré, voire agressé, par le technicisme de l'apprentissage ou par les dérives
de la didactique cognitive qui oublie la "chair" et l'âme de l'apprenant.
Irène Fenoglio
CNRS, Paris