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UNIVERSITE GRENOBLE ALPES Année universitaire 2023-2024

Semestre 6

DROIT CIVIL DES BIENS

Niveau L3 Enseignant : Alexandre DELMOTTE

Travaux dirigés :
Mme E. BARRET

FASCICULE DE TRAVAUX DIRIGES

1
SEANCE 1
LA NOTION DE PATRIMOINE

Lectures

A. SERIAUX, « Notion de patrimoine », RTD Civ. 1994, p. 801

Exercices
1/ Après avoir lu la méthode du commentaire d’arrêt, vous rédigerez l’introduction et réaliserez
le plan détaillé d’un commentaire de l’arrêt de la première chambre civile du 2 mai 2001

2
Cass. civ. 1ère, 2 mai 2001

Donne acte à Mlle Monzo-Villaplana de son Attendu qu'en ordonnant la compensation entre
désistement partiel au profit de la caisse primaire les sommes versées en trop à l'enfant par la
d'assurance maladie des Hauts-de-Seine ; société Axa et celles que cette société devait à
Sur le moyen unique : sa mère, à titre personnel, bien qu'elle eût
Vu l'article 802 du Code civil ; constaté que cette dernière n'avait accepté la
Attendu qu'il résulte de ce texte que les biens succession de son fils que sous bénéfice
personnels de l'héritier qui a accepté une d'inventaire, la cour d'appel a violé le texte
succession sous bénéfice d'inventaire sont susvisé ;
distincts des biens dépendant de la succession PAR CES MOTIFS :
et qu'aucune compensation n'est, dès lors,
possible entre les créances personnelles de CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il
l'héritier bénéficiaire et les dettes de la a dit que les comptes entre Mlle Caroline Monzo-
succession ; Villaplana et la société Axa assurances se feront
Attendu que l'enfant Charlie X... ayant été par compensation, l'arrêt rendu le 25 septembre
grièvement blessé dans un accident de la 1998, entre les parties, par la cour d'appel de
circulation, la société Axa assurances a versé Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce,
une provision de 700 000 francs à valoir sur la cause et les parties dans l'état où elles se
l'indemnisation de son préjudice définitif ; que trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit,
l'enfant est ensuite décédé des suites de ses les renvoie devant la cour d'appel de Versailles,
blessures et que son préjudice définitif a été autrement composée.
évalué à 340 000 francs tandis que celui subi
personnellement par sa mère a été fixé à 169
095 francs ;

3
SEANCE 2
DISTINCTION DES MEUBLES & DES IMMEUBLES

Lectures
H. PERINET-MARQUET, « Regard sur les nouveaux biens », JCP 2010, 2701 (disponible sur
l’espace cours Moodle)

H. PERINET-MARQUET, « Évolution de la distinction meubles-immeubles depuis le code civil »,


in Etudes BEGUIN, Litec 2005, p.642

H. PERINET-MARQUET, L’immeuble et le code civil, in 1804-2004, Le code civil, Un passé, un


présent, un avenir, Dalloz 2004, 395.

Exercices
1/ Pour chaque arrêt de la fiche, vous devez pouvoir présenter le sens, la valeur et la portée de
la décision. Vous n’êtes pas nécessairement obligés de formaliser une fiche d’arrêt, même s’il
est vivement conseillé de le faire.
2/ Après avoir lu la méthode du commentaire d’arrêt, vous rédigerez l’introduction et
réaliserez le plan détaillé d’un commentaire de l’arrêt de la troisième chambre civile du 26 juin
1991

4
Cass. civ. 3ème, 26 juin 1991, RTD civ. 1992, 144, obs. F. ZENATI

Sur le moyen unique : Vu l'article 517 du Code vérandas conservent, jusqu'au règlement de la
civil ; dernière mensualité du prêt, un caractère
Attendu que les biens sont immeubles, ou par mobilier et n'appartiennent pas aux époux
leur nature, ou par leur destination, ou par Pelloux, propriétaires du fonds dont elles
l'objet auquel ils s'appliquent ; deviendront ensuite l'accessoire, permettant de
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 8 juin les considérer alors comme immeubles par
1989), que les époux Pelloux ont conclu avec la destination ;
société Union pour le financement des Qu'en statuant ainsi, alors que la nature,
équipements techniques et thermiques immobilière ou mobilière, d'un bien est définie
(UFITH) un contrat de location-vente leur par la loi, et que la convention des parties ne
accordant un prêt pour le financement de la peut avoir d'incidence à cet égard, la cour
construction de trois vérandas sur leur d'appel a violé le texte susvisé ;
immeuble, moyennant une redevance PAR CES MOTIFS :
mensuelle ; CASSE ET ANNULE, dans toutes ses
Attendu que pour débouter les époux Pelloux de dispositions, l'arrêt rendu le 8 juin 1989, entre
leur demande d'annulation du contrat et de les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
remboursement des mensualités versées, l'arrêt remet, en conséquence, la cause et les parties
retient que la clause de réserve de propriété, dans l'état où elles se trouvaient avant ledit
jusqu'au paiement intégral du prix entre les arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant
mains du prêteur, conduit à considérer que les la cour d'appel de Lyon […]

Cass. Ass. Plén.15 avril 1988, RTD civ. 1989, 345, obs. F. ZENATI

Sur le moyen unique du pourvoi n° 85-10.262, fresques litigieuses, originairement immeubles


pris en sa première branche, et sur le premier par nature, étaient devenues immeubles par
moyen du pourvoi n° 85-11.198, pris en sa destination depuis la découverte d'un procédé
première branche, réunis : permettant de les détacher des murs sur
lesquels elles étaient peintes ; qu'il en déduit
Vu l'article 524 du Code civil ; que leur séparation de l'immeuble principal,
dès lors qu'elle est intervenue sans le
Attendu que seuls sont immeubles par consentement de tous les propriétaires, ne leur
destination les objets mobiliers que le a pas fait perdre leur nature immobilière, dont
propriétaire d'un fonds y a placés pour le service Mmes Ribes et Poncy peuvent continuer à se
et l'exploitation de ce fonds ou y a attachés à prévaloir à l'égard de tous, de sorte que l'action
perpétuelle demeure ; exercée par elles est une action en revendication
immobilière ;
Attendu que des fresques qui décoraient l'église
désaffectée de Casenoves ont été vendues par Attendu qu'en statuant ainsi alors que les
deux des propriétaires indivis de ce bâtiment fresques, immeubles par nature, sont devenues
sans l'accord des deux autres, Mmes Ribes et des meubles du fait de leur arrachement, la cour
Poncy ; que détachées des murs par l'acquéreur, d'appel a violé le texte susvisé ;
puis réparties en deux lots, elles se trouvent Et vu les articles 627 et 96 du nouveau Code de
actuellement en la possession de la Fondation procédure civile ;
Abegg et de la ville de Genève, contre lesquelles
Mmes Ribes et Poncy ont formé une demande Attendu que les parties défenderesses étant
en revendication devant le tribunal de grande domiciliées en Suisse, la juridiction française
instance de Perpignan ; que la Fondation Abegg était incompétente en vertu de l'article 1er de la
et la ville de Genève ayant soulevé convention franco-suisse du 15 juin 1869 ;
l'incompétence de ce tribunal au profit des
juridictions helvétiques, par application de la PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de
convention franco-suisse du 15 juin 1869, qui, statuer sur les autres griefs des pourvois ;
en matière mobilière, attribue compétence au CASSE ET ANNULE, dans toutes ses
tribunal du domicile du défendeur, l'arrêt dispositions, l'arrêt rendu le 18 décembre
attaqué (Montpellier, 18 décembre 1984) 1984, entre les parties, par la cour d'appel de
retient, pour rejeter leurs contredits, que les Montpellier sous le n° 84/2797 ; statuant à
5
nouveau, dit que le tribunal de grande instance juridiction française n'étant compétente,
de Perpignan est incompétent et, aucune renvoie les parties à mieux se pourvoir ;

Conseil d’État, 24 février 1999, JCP 2000, II, 10 232, note P. DEUMIER.

détériorés, ou sans briser ou détériorer la partie


Vu le code civil ; du fonds à laquelle ils sont attachés (...)" ;
Vu la loi du 31 décembre 1913 modifiée ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes de
Vu le code des tribunaux administratifs et des l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre
cours administratives d'appel ; 1913 : "Les immeubles dont la conservation
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, présente, au point de vue de l'histoire ou de l'art
le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la un intérêt public, sont classés comme
loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; monuments historiques en totalité ou en partie
Après avoir entendu en audience publique : (...)" ; que selon l'article 9 de la même loi :
- le rapport de M. Rousselle, Maître des "L'immeuble classé ne peut être détruit ou
Requêtes, déplacé, même en partie, ni être l'objet d'un
- les observations de la SCP Waquet, Farge, travail de restauration, de réparation ou de
Hazan, avocat de la SOCIETE TRANSURBA et modification quelconque, si le ministre des
de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat beaux-arts n'y a donné son consentement (...)" ;
du ministre de la culture et de la que l'article 14 dispose que : "Les objets
communication, mobiliers, soit meubles proprement dits, soit
- les conclusions de Mme Daussun, immeubles par destination, dont la
Commissaire du gouvernement ; conservation présente, au point de vue de
Considérant que le rapport rédigé à la demande l'histoire, de l'art, de la science ou de la
du ministre de la culture et de la technique, un intérêt public, peuvent être
communication par M. Jamet, ébéniste, à la classés par un arrêté ministériel (...)" ; qu'enfin,
suite des constatations effectuées au château de aux termes de l'article additionnel à la même
la Roche-Guyon le 15 octobre 1996 et qui était loi, issu de la loi du 23 juillet 1927 : "Quand un
joint au mémoire complémentaire d'appel immeuble ou partie d'immeuble aura été
produit par le ministre le 5 décembre 1996, a été morcelé ou dépecé en violation de la présente
communiqué à la SOCIETE TRANSURBA et loi, le ministre des beaux-arts pourra faire
d'ailleurs discuté par elle devant la cour ; rechercher, partout où ils se trouvent, l'édifice
qu'ainsi, et alors même que les constatations ou les parties de l'édifice détachées et en
ont été faites postérieurement à la visite des ordonner la remise en place, sous la direction et
lieux ordonnée par le tribunal administratif, le la surveillance de son administration, aux frais
moyen tiré de ce que la cour n'aurait pas des délinquants vendeurs et acheteurs pris
respecté le caractère contradictoire de la solidairement" ; qu'eu égard aux termes de
procédure doit être écarté ; l'article 14, les dispositions de l'article
Considérant que la cour a répondu à tous les additionnel ne peuvent s'appliquer qu'aux
moyens qui étaient présentés devant elle ; immeubles par nature ;
Considérant, d'une part, que l'article 516 du Considérant que, pour annuler le jugement du
code civil dispose que : "Tous les biens sont 4 juillet 1996 par lequel le tribunal administratif
meubles ou immeubles", et l'article 517 que : de Versailles a annulé l'arrêté du 10 juillet 1995
"Les biens sont immeubles, ou par leur nature, du ministre de la culture ordonnant à la
ou par leur destination, ou par l'objet auquel ils SOCIETE TRANSURBA la remise en place dans
s'appliquent" ; qu'aux termes de l'article 518 : le grand salon du château de la Roche-Guyon de
"Les fonds de terre et les bâtiments sont deux bas-reliefs en marbre, la cour
immeubles par leur nature" et que, selon le administrative d'appel de Paris a estimé que,
dernier alinéa de l'article 524 : "Sont aussi d'une part, les bas-reliefs en cause, œuvre du
immeubles par destination, tous effets sculpteur Lecomte, ayant été réalisés en 1769
mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds pour être intégrés dans le décor du grand salon
à perpétuelle demeure" ; qu'enfin l'article 525 du château de la Roche-Guyon dont
dispose que : "Le propriétaire est censé avoir l'aménagement a été terminé à cette date, et,
attaché à son fonds des effets mobiliers à d'autre part, la partie des murs située au-dessus
perpétuelle demeure, quand ils y sont scellés en des portes d'accès à ce grand salon ayant été
plâtre ou à chaux ou à ciment, ou lorsqu'ils ne spécialement aménagée pour que les deux bas-
peuvent être détachés sans être fracturés et reliefs y soient encastrés, ces bas-reliefs
6
formaient avec l'ensemble du grand salon, dispositions précitées du code civil et de la loi
auquel ils ont été, dès l'origine, intimement et du 31 décembre 1913 susvisée ;
spécialement incorporés, un tout indivisible ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que
qu'ils avaient, dès lors, le caractère d'immeubles la SOCIETE TRANSURBA n'est pas fondée à
par nature et bénéficiaient en conséquence du demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
classement comme monument historique du
château de la Roche-Guyon, opéré par un arrêté DECIDE :
du 6 janvier 1943 ; qu'après avoir
souverainement apprécié les faits de la cause et Article 1er : La requête de la SOCIETE
en l'absence de toute dénaturation, la cour TRANSURBA est rejetée.
administrative d'appel de Paris a pu légalement Article 2 : La présente décision sera notifiée à
estimer que les bas-reliefs, objets du litige, la SOCIETE TRANSURBA et au ministre de la
avaient le caractère d'immeubles par nature et culture et de la communication.
non d'immeubles par destination au sens des

Req., 23 mars 1926, DP 1928, 22.

LA COUR ; - Sur le premier moyen, pris de la culture, ont arbitré le prix de l’hectare de terre
violation des art. 1149, 1350, 1351, 1619 C. civ. et arable à 1 418 F 30 cent. ; - Attendu, en
7 de la loi du 20 avril 1810 : - Attendu que Patte conséquence, que les experts ayant suivi les
a acquis de Broet, pour un prix de 235 000 F, la prescriptions de l’arrêt interlocutoire, l’arrêt
propriété de Faveyrolles, comprenant, d’une attaqué, qui s’approprie leurs constatations et
part, un château avec parc et dépendances, homologue leurs conclusions, a justifié
d’autre part le domaine de culture de légalement sa décision sans violer aucun des
Faveyrolles, la contenance totale de cette textes visés au pourvoi ;
propriété étant fixée à 50 hectares 75 ares ; que
Patte s’est plaint d’un manquant de superficie Sur le second moyen, pris de la violation des art.
qu’il a prétendu de plus de un vingtième, et a 524, 525, 1350, 1351 C. civ. et 7 de la loi du 20
encore réclamé divers objets mobiliers devenus avril 1810 : - Attendu que le pourvoi reproche à
immeubles par destination qui ne lui étaient pas l’arrêt attaqué d’avoir, en ce qui concerne les
délivrés ; qu’après expertise, un déficit de objets mobiliers réclamés par Patte, considéré
superficie a été reconnu de 13 hectares 30 ares, comme meubles un certain nombre d’objets
pour lequel la cour de Grenoble a fixé attachés au domaine de Faveyrolles, tout en
l’indemnité à 10 854 F 48 cent. ; Attendu que le reconnaissant qu’ils étaient affectés à son
pourvoi fait grief à l’arrêt attaqué (Grenoble, 28 exploitation ;
mars 1924) d’avoir estimé l’indemnité en
déduisant du prix une somme arbitrairement - Mais attendu qu’on ne peut considérer comme
fixée pour la valeur du château et en divisant la immeubles par destination, dans le sens des art.
différence par le nombre d’hectares vendus, par 524 et 525 C. civ., d’autres objets mobiliers que
le motif qu’il en aurait été ainsi décidé par un ceux qui ont été placés par le propriétaire sur le
arrêt antérieur avant dire droit, alors que cet fond comme étant absolument indispensables
arrêt décidait seulement et fort juridiquement et affectés directement à l’exploitation de ce
que le déficit portant exclusivement sur les fonds ; qu’il appartenait, dès lors, aux juges du
terres arables, la valeur de ces terres devait être fond, en se référant aux conclusions des
appréciée en soi pour le calcul de l’indemnité ; - experts, d’apprécier pour quels motifs, dans
Mais attendu que l’arrêt interlocutoire de la quel but et à quelle destination les objets
cour de Grenoble du 1er juillet 1921 ayant litigieux avaient été placés par le propriétaire
ordonné que les experts procéderaient à la dans l’immeuble vendu, et qu’en déduisant des
ventilation du prix de 235 000 F, en vue de constatations des experts que certains de ces
déterminer la valeur à attribuer soit au château, objets n’étaient pas immeubles par destination
soit aux terres du domaine rural, cette dernière parce qu’ils n’étaient pas rigoureusement
partie du prix devant servir à établir le prix de indispensables à l’utilité du fonds ou ne
l’hectare et à calculer sur cette base le montant formaient pas un tout avec lui, l’arrêt n’a violé
de l’indemnité, les experts ont évalué le château aucun des textes visés au moyen ;
et ses annexes, ont déduit la somme ainsi
obtenue du prix de 235 000 F, et, sur le surplus Par ces motifs, rejette
représentant le prix propre du domaine de
7
Cass. civ., 27 juin 1944, RTD civ. 1945, 127, obs. SOLUS

LA COUR : Sur le moyen unique, Vu l’article


524 du Code civil ; Attendu que la qualité Attendu que l’arrêt attaqué a fait droit à sa
d’immeuble par destination dépend de demande, motif pris, d’une part, de ce que cet
conditions fixées par la loi et que la seule outillage, nécessaire à l’exploitation de
volonté du propriétaire, impuissante à créer l’entreprise commerciale, faisait partie du fonds
arbitrairement des immeubles par destination, de commerce et avait comme lui le caractère
ne saurait non plus suffire à leur faire perdre mobilier, et, d’autre part, de ce que les époux
cette qualité s’il n’y a pas eu soit séparation Mérand, en le comprenant dans le
effective entre l’immeuble par nature et nantissement de leur fonds, l’avaient par là-
l’immeuble par destination, soit aliénation de même considéré comme meuble et non comme
l’un ou de l’autre ; immeuble par destination ;

Attendu que les époux Mérand, ayant installé Mais attendu, d’une part, que lorsqu’un
un outillage de brasserie dans un immeuble leur matériel est immeuble par destination, son
appartenant et spécialement aménagé à cet affectation à une exploitation commerciale ne
effet, avaient constitué hypothèque au profit des saurait lui faire perdre ce caractère ;
époux Raynaud et leur avaient, en outre, donné Attendu, d’autre part, que le nantissement d’un
en nantissement leurs fonds de commerce en y fonds de commerce, ne pouvant porter que sur
comprenant le matériel d’exploitation ; que les des meubles, est nul en tant qu’il vise un
époux Raynaud ont saisi l’immeuble matériel qui est immeuble par destination ;
hypothéqué y compris l’outillage, immeuble par D’où il suit que l’arrêt attaqué, en statuant
destination, mais que le percepteur de comme il l’a fait a violé le texte susvisé ;
Chamalières, qui avait saisi ce même outillage Par ces motifs, - Casse et annule l’arrêt rendu
par voie de saisie-exécution, a demandé qu’il entre les parties par la Cour d’appel de Riom
soit distrait de la saisie immobilière ;

Cass. civ. 3eme, 3 octobre 1969, D. 1970, 49.

Sur les deux moyens réunis : Mais attendu que la cour d'appel, se livrant a
Attendu qu'il est fait grief a l'arrêt attaque une interprétation nécessaire des termes du
d'avoir, sur une demande des consorts Péri en contrat, constate d'abord que le droit concédé
renouvellement du bail qui leur avait été par la convention est l'extraction de l'argile,
consenti par les consorts Forcioli-Conti pour avec l'autorisation, pour les preneurs, d'édifier
l'exploitation d'une carrière, décide que sur les terrains tous bâtiments nécessaires à
l'exploitation litigieuse n'était pas un bail l'exploitation, que les conventions ne laissent
commercial, mais une simple vente de meubles aucun doute sur l'intention des parties, le bail,
par anticipation, et qu'en conséquence les qualifie "location de carrière d'argile",
preneurs n'avaient pas droit au renouvellement, mentionnant le terrain "exploite comme
alors, selon le pourvoi, que, d'une part, le bail ne carrière" et la possibilité de cession de la
pouvait, sans dénaturation, s'entendre comme "carrière" ;
une simple concession d'extraction d'argile, la
location du terrain jointe a l'autorisation Que l'autorisation a été concédée aux preneurs
d'édifier des bâtiments et de céder a un d'édifier sur le terrain loué des constructions
successeur dans le commerce, impliquant pour l'exploitation de la carrière, mais non
nécessairement l'intention de créer une d'une industrie indépendante en droit et en fait
entreprise commerciale pour l'exploitation de la de l'extraction de l'argile, prévue à la convention
carrière, et que, d'autre part, les juges auraient ; que la cour d'appel écarte ensuite l'argument
du examiner, pour déterminer le caractère de la tire de l'approbation tacite qu'aurait donnée le
convention, le comportement des parties bailleur à une exploitation industrielle, en
postérieurement au contrat, et notamment énonçant à bon droit qu'une attitude passive ne
l'affectation donnée aux locaux par les preneurs peut être génératrice d'obligation ; d’où il suit
avec le consentement exprès ou tacite ou que le moyen n'est pas fonde ;
propriétaire ; Par ces motifs : rejette

8
Cass. Civ. 1ère, 1er décembre 1976, RTD Civ.1978, 158, obs. GIVERDON.

Sur le premier moyen : attendu que le divorce Attendu qu'il est fait grief aux juges du fond d'en
des époux p.-r., qui s'étaient mariés en 1952 avoir ainsi décidé et d'avoir dénié au stock
sous le régime de la communauté réduite aux d'eau-de-vie litigieux le caractère d'immeuble
acquêts, a été prononce par un arrêt dont les par destination en procédant d'une idée a priori,
effets, quant aux biens, remontaient au 11 sans rechercher si, en fait, ce stock avait été ou
octobre 1963 ; non affecte au service de la propriété viticole de
p., a l'existence et au développement de laquelle
Que les y... Laurent et Sidoux ont été commis il était indispensable ;
pour procéder à la liquidation ;
Mais attendu que les juges du fond, statuant sur
Qu'ils ne purent se mettre d'accord, et que seul les seuls moyens sur lesquels les parties avaient
Laurent rédigea un état liquidatif ; fait porter la discussion, ont constaté que le
cognac produit par le domaine, destine à être
Que, lors du partage de la succession de ses vendu, ne pouvait être considéré comme affecté
parents, en 1953, p. S'était vu attribuer, outre un spécialement à l'exploitation du domaine, cette
domaine agricole et viticole, un stock d'eau-de- exploitation pouvant s'exercer sans l'existence
vie que l'arrêt attaque chiffre a 128 hectolitres ; d'un stock ;

Qu'en octobre 1963, le stock d'eau-de-vie était Que, de ces constatations, ils ont déduit à bon
de 421 hectolitres ; droit que le stock d'eau-de-vie produit par le
domaine n'était pas immobilisé par
Que p. prétendit que ce stock, immobilise par destination ;
destination, lui appartenait pour le tout sans
donner lieu à récompense ; D'où il suit que le moyen ne saurait être
accueilli ; (…)
Que l'arrêt confirmatif attaque a décidé que le
cognac stocke était un bien meuble et que seuls Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre
les 128 hectolitres provenant de la succession de l'arrêt rendu le 17 juin 1975 par la cour d'appel
ses parents étaient propres a p. ; de bordeaux.

Cass. civ. 1ère, 7 avril 1998, D. 1998, Somm., 344, obs. A. ROBER
cour d'appel ne pouvait donc, pour décider que
Sur le moyen unique : les machines mises en vente conservaient le
caractère d'immeubles par destination jusqu'au
Attendu que M. Jean-Pierre X..., commissaire- moment de la vente, retenir qu'elles n'avaient
priseur, fait grief à l'arrêt attaqué (Douai, 19 pas été au préalable matériellement séparées du
juin 1995), d'avoir dit que la vente d'un lot de fonds avant celle-ci, et que la seule volonté du
machines dans les locaux d'une usine, organisée propriétaire de les vendre séparément du fonds,
par la SCP Gosse, Coornaert, Heurtefeu, ne pouvait leur faire perdre la qualité
notaires à Saint-Dié, était conforme à d'immeubles par destination sans violer les
l'ordonnance du 26 juin 1816, instituant le articles 524 du Code civil et 3 de l'ordonnance
monopole des commissaires-priseurs en du 26 juin 1816 ;
matière de ventes mobilières, alors selon le
moyen que le caractère d'immeuble par Mais attendu que la cour d'appel a jugé, à bon
destination disparaît nécessairement lorsque droit, que la seule volonté du propriétaire ne
l'objet immobilisé, institué pour le service de pouvait faire perdre aux machines en cause leur
l'exploitation du fonds, se trouve séparé du qualité d'immeubles par destination, laquelle,
fonds auquel il était attaché, notamment en cas en l'absence d'enlèvement effectivement
d'aliénation séparée du fonds ou de l'objet réalisé, ne disparaissait qu'après la vente ; D'où
immobilisé ; qu'à cet égard, seule doit être prise il suit que le moyen n'est pas fondé ;
en compte la volonté du propriétaire de vendre
séparément l'objet immobilisé, sans qu'il soit Par ces motifs : rejette le pourvoi.
exigé dans ce cas d'autre signe matériel ; que la

9
Cass. civ. 3ème, 23 janvier 2002, JCP N, 2002, p. 1690, note H. PERINET-MARQUET

Sur le premier moyen : (Publication sans A... à le garantir de cette condamnation, l'arrêt
intérêt) ; rendu le 1er juin 1999, entre les parties, par la
Sur le second moyen, pris en ses deuxième et cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence,
troisième branches, réunies : (Publication sans quant à ce, la cause et les parties dans l'état où
intérêt) ; elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être
fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de
Mais sur le second moyen, pris en sa première Versailles
branche : Vu les articles 517 et 518 du Code
civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er juin


1999), que la société civile immobilière
Vauroger (la SCI), dont les associés étaient M.
Yves A..., M. Daniel A..., et Mme A..., épouse
Y..., a été déclarée en liquidation ; que M. Z...,
liquidateur, a vendu l'immeuble dont la SCI
était propriétaire aux consorts X... et B... par
acte du 17 mai 1995 spécifiant que le transfert
de propriété et l'entrée en jouissance étaient
fixés au 1er avril 1994 ; que l'immeuble a été
occupé par M. Yves A... jusqu'au 31 mars 1995
et que les acquéreurs ont assigné M. Z..., ès
qualités, en réparation du préjudice résultant
de la détérioration des lieux consécutive au
retrait des convecteurs électriques lors de leur
prise de possession ; que M. Z..., ès qualités, a
appelé M. Yves A... en garantie de la
condamnation prononcée entre lui ;

Attendu que, pour accueillir la demande, l'arrêt


retient, par motifs propres et adoptés, que le
retrait par M. A..., à son départ, des convecteurs
électriques qui existaient dans toutes les pièces
de la maison, nécessairement reliés au circuit
électrique, avait entraîné l'arrachage des fils
électriques et que ces convecteurs, constituant
l'un des composants de l'immeuble lui-même
qu'aucun candidat à l'acquisition d'un bien
immobilier ne penserait voir exclure de la vente
après les avoir vus dans l'immeuble visité,
constituaient des immeubles par nature ;

Qu'en qualifiant d'immeuble par nature des


convecteurs électriques, sans rechercher si ces
appareils, et non leur installation électrique,
étaient indissociablement liés à l'immeuble et
ne pouvaient être enlevés sans porter atteinte à
son intégrité, la cour d'appel n'a pas donné de
base légale à sa décision de ce chef

Par ces motifs : CASSE ET ANNULE, mais


seulement en ce qu'il condamne M. Z..., en sa
qualité de liquidateur de la SCI Vauroger, au
paiement de la somme de 14 250 francs au titre
du remplacement des convecteurs, et M. Yves

10
Cass. civ. 3ème, 7 Juillet 1981, n°80-12516 D. 1983, IR, 13, Obs. A. ROBERT.

Sur le premier moyen : attendu, selon l'arrêt que la cour d'appel a donc violé l'article 525 du
attaqué (Pau,21 février 1980), que les époux Code civil" ;
y..., qui avaient vendu à Penne une maison
d'habitation, ont enlevé huit radiateurs Mais attendu, d'une part, que, par des motifs
électriques ; non dubitatifs, et hors les dénaturations
prétendues, l'arrêt énonce qu'un avantage du
Que Penne a demandé aux vendeurs des chauffage électrique consiste dans la mobilité
dommages-intérêts en raison de cet et l'interchangeabilité des radiateurs, que
enlèvement et de vices caches affectant ceux-ci étaient simplement vissés et reliés à
l'installation électrique ; l'installation par des dominos, et que leur
enlèvement a seulement laissé sur le mur
Attendu que penne fait grief à l'arrêt d'avoir quelques traces faciles à cacher, sans fracture
rejeté sa demande relative aux radiateurs, qu'il ni détérioration ;
prétendait être immeubles par destination,
alors, selon le moyen, "que, premièrement, les Attendu, d'autre part, que dans ses
motifs dubitatifs équivalents a une absence de conclusions prises devant la cour d'appel,
motifs et entrainent l'annulation de la décision Penne, pour prétendre que les radiateurs
qui en est affectée, que tel est le cas en l'espèce étaient immeubles par destination, s'était
ou la juridiction du second degré s'est fondée seulement prévalu de leur scellement aux
sur une circonstance qui, d'après elle, "parait" murs du bâtiment ;
seulement résulter d'un constat d'huissier de
justice, qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article Qu'en tant que le moyen soutient pour la
455 du nouveau code de procédure civile ; première fois devant la Cour de cassation que
ces appareils, quoiqu'ayant conservé leur
Alors que, deuxièmement, il ressort au mobilité, avaient été affectés par les époux y...
contraire du constat de l'huissier de justice que Au service et à l'exploitation du fonds, il est
l'enlèvement du radiateur de la chambre n° 1 a nouveau et mélange de fait et de droit ;
provoqué l'arrachage de la tapisserie, qu'ainsi
la cour d'appel, qui a dénaturé ce document, a D'où il suit que le moyen, pour partie
violé l'article 1134 du code civil ; irrecevable, n'est pour le surplus pas fondé ;

Alors que, troisièmement, en énonçant que le Sur le deuxième moyen : attendu que Penne
premier juge a considère implicitement reproche à l'arrêt d'avoir, pour rejeter sa
comme des immeubles par destination les demande relative aux défauts affectant
radiateurs dont s'agit, la juridiction du second l'installation électrique de l'immeuble, retenu
degré a dénaturé le jugement du tribunal de que les normes techniques avaient été
grande instance de Dax, rendu le 1er février modifiées depuis la construction du bâtiment
1978, lequel a formellement déclaré "qu'il est et que penne ne pouvait envisager d'en jouir
établi par constat de Millade, huissier à dans de meilleures conditions que les
Peyrehorade, dressé le 7 juillet 1976, que les vendeurs en faisant supporter a ceux-ci les
huit radiateurs ont été enlevés, et que les vis de frais de mise en conformité, alors, selon le
fixation ont été coupées, ce qui indique à moyen, "que si effectivement l'acquéreur ne
l'évidence que ces radiateurs étaient scellés, pouvait prétendre vivre dans la maison vendue
qu'il y a lieu d'en conclure qu'ils étaient avec de meilleures conditions d'habitabilité et
immeubles par destination", qu'ainsi la cour de confort aux frais du vendeur, du moins
d'appel a encore violé l'article 1134 du Code était-il en droit de le faire dans des conditions
civil ; identiques, que la juridiction du second degré
n'a pas déduit de ses constatations, selon
Alors que, quatrièmement, les objets lesquelles le vendeur avait enlevé les
nécessaires au service normal de tous les radiateurs de sorte que la remise en état de
immeubles constituent des immeubles par l'installation électrique selon les normes en
destination, qu'il en est ainsi des radiateurs, le vigueur au moment de sa restauration était
chauffage présentant à l'époque actuelle un nécessaire pour la pose d'autres radiateurs, les
caractère à la fois courant et indispensable, conséquences légales qui en résultaient,

11
qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 1614 du constatations aucune responsabilité à la
Code civil" ; charge des vendeurs ; que le moyen doit être
écarté ; sur le troisième moyen : (sans intérêt)
Mais attendu que l'arrêt, qui constate que les
époux y... ont enlevé les radiateurs, décide Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre
qu'ils étaient en droit de le faire ; que dès lors, l'arrêt rendu le 21 février 1980 par la cour
la cour d'appel ne pouvait déduire de ses d'appel de Pau

12
SEANCE 3
LA PROPRIETE
L’EXCLUSIVITE : LE CAS DE L’EMPIETEMENT

Lectures
A.-L. MEANO, « Présentation du droit positif en matière d'empiètement », Defrénois 2018, n° 33, p. 19.

B STURLESE, « Empiètement : critique du refus de la Cour de cassation du contrôle de


proportionnalité », Defrénois 2018, n° 33, p. 24.

Exercices
1/ Pour chaque arrêt de la fiche, vous devez pouvoir présenter le sens, la valeur et la
portée de la décision. Vous n’êtes pas nécessairement obligés de formaliser une fiche
d’arrêt, même s’il est vivement conseillé de le faire.
2/ Vous rédigerez un commentaire de l’arrêt de la troisième chambre civile du 10
novembre 2016 (deuxième arrêt de la plaquette - pourvoi n°15-19561)

13
14
Cass. civ. 3ème, 10 novembre 2016, pourvoi n°15-1956

Sur le moyen unique :


Condamne les consorts X...- Y... aux dépens
Vu les articles 544 et 545 du code civil ; ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 2 rejette la demande des consorts X...- Y... et
juillet 2015), que M. et Mme X..., les condamne à payer la somme de 3 000
propriétaires de la parcelle AN 305, et M. et euros à M. Z... ;
Mme Y..., propriétaires de la parcelle AN Dit que sur les diligences du procureur
151, ont assigné leur voisin, M. Z..., général près la Cour de cassation, le présent
propriétaire de la parcelle 462, en arrêt sera transmis pour être transcrit en
enlèvement d'un bâtiment constituant un marge ou à la suite de l'arrêt partiellement
atelier-garage empiétant sur leurs fonds ; cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation,
Attendu que, pour ordonner la démolition troisième chambre civile, et prononcé par le
totale du bâtiment, l'arrêt retient qu'il président en son audience publique du dix
empiète sur le fonds de M. et Mme X..., que novembre deux mille seize.
les considérations de l'expert selon lequel
l'empiétement représenterait une bande
d'une superficie de 0, 04 m ² sont MOYEN ANNEXE au présent arrêt
inopérantes au regard des dispositions des
articles 544 et 545 du code civil et que cet Moyen produit par la SCP Boulloche,
empiétement fonde la demande de avocat aux Conseils, pour M. Z....
démolition de la construction litigieuse ;
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif d'AVOIR
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, condamné M. Frédéric Z... à démolir le
comme il le lui était demandé, si un bâtiment édifié sur sa parcelle 462, ... à
rabotage du mur n'était pas de nature à Decize (58) et d'AVOIR dit que cette
mettre fin à l'empiétement constaté, la cour démolition devrait être achevée dans un
d'appel n'a pas donné de base légale à sa délai de six mois à compter de la
décision ; signification de l'arrêt, sous astreinte de 200
€ par jour de retard passé ce délai ;

PAR CES MOTIFS : AUX MOTIFS QUE l'expert B... ne


conteste pas que l'emplacement des bornes
CASSE ET ANNULE, mais seulement en anciennes (2 et 20) est connu, indiquant par
qu'il condamne M. Z... à démolir le ailleurs « jouxtant la propriété des époux
bâtiment édifié sur sa parcelle 462, ... à X..., l'angle (3) Sud-Ouest est en retrait de 4
Decize (58) et dit que cette démolition cm et l'angle (18) Nord-Ouest empiète de 2
devra être achevée dans un délai de six mois cm » ; que cet empiètement est confirmé par
de la signification du présent arrêt, sous le fait que la distance entre les bornes 1 et 2,
astreinte de 200 euros par jour de retard implantées en 1970 et qui garent toute leur
passé ce délai, l'arrêt rendu le 2 juillet 2015, valeur au plan juridique aujourd'hui, était de
entre les parties, par la cour d'appel de 21, 47 en 1970 et n'est plus que de 21, 32 m
Bourges ; remet, en conséquence, sur ce en 2010 ; qu'ainsi l'empiètement du
point, la cause et les parties dans l'état où bâtiment édifié par Frédéric Z... sur le fond
elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour des époux X... est parfaitement établi tant en
être fait droit, les renvoie devant la cour ce qui concerne le bâtiment lui-même qu'en
d'appel d'Orléans ; ce qui concerne les tuiles de rive pour lequel

15
il n'était pas contesté par Frédéric Z... qu'il minime de l'empiètement en cause, de
n'y avait cependant toujours pas apporté l'ordre de 0, 04 m ², la Cour d'appel a privé
remède le jour où le tribunal a statué ; sa décision de base légale au regard des
qu'ainsi les époux X... font justement grief articles 544 et 545 du Code civil ;
aux premiers juges d'avoir considéré que
l'empiètement n'était pas établi par 2°) ALORS QUE nul ne peut user de son
référence à des parcelles non concernées par droit de propriété de façon abusive ; qu'en
le présent litige, les premiers juges semblant condamnant M. Frédéric Z... à la
avoir été sensibles au développement de destruction de l'intégralité du bâtiment qu'il
l'expert selon lequel l'empiètement avait édifié sur sa parcelle sans rechercher,
représenterait une bande d'une superficie de ainsi qu'il lui était demandé, si la persistance
0, 0 4 m ², considération inopérante au des consorts X... à solliciter une telle
regard des dispositions des articles 544 et sanction en dépit du caractère très minime
545 du Code civil ; que cet empiètement de de l'empiètement, de l'ordre de 0, 04 m ², ne
la construction de Frédéric Z... sur le fonds procédait d'une malveillance et d'un
des époux X... fonde la demande de acharnement constitutifs d'un abus de droit,
démolition de la construction litigieuse la Cour d'appel a privé sa décision de base
sollicitée par les appelants, sans qu'il soit légale au regard des articles 544 et 545 du
nécessaire d'aller plus loin dans l'analyse Code civil ;
des moyens de ces derniers ; qu'ainsi la
démolition sera ordonnée dans les termes du 3°) ALORS QU'en toute hypothèse, le
dispositif ci-après le jugement entrepris propriétaire du fonds sur lequel empiète une
étant infirmé de ce chef ; construction n'a le droit qu'à la cessation de
l'empiètement ; qu'en refusant, pour
1°) ALORS QU'il appartient au juge condamner M. Frédéric Z... à démolir
d'apprécier la proportionnalité d'une l'intégralité du bâtiment qu'il avait édifié, en
sanction en ayant égard à ses conséquences ce compris la partie se trouvant sur sa
et aux intérêts et droits en présence ; qu'en propre parcelle, de déterminer la mesure
condamnant M. Frédéric Z... à démolir exacte de l'empiètement afin de ne
l'intégralité du bâtiment qu'il avait édifié sur supprimer que la fraction dépassant sur le
sa parcelle sans rechercher, ainsi qu'il lui fonds voisin, la Cour d'appel a violé les
était demandé, si une telle sanction n'était articles 544 et 545 du Code civil.
pas disproportionnée eu égard au caractère

Cass. civ. 3ème, 10 novembre 2016, pourvoi n°15-19561

Sur le premier moyen : parcelle cadastrée C 508, ont assigné les


consorts Y..., propriétaires d'une parcelle
Vu l'article 545 du code civil ; voisine cadastrée C 507, en démolition
d'éléments de toiture et d'ouvrages résultant
Attendu que nul ne peut être contraint de de travaux de surélévation effectués en
céder sa propriété, si ce n'est pour cause 1982 et empiétant sur leur fonds ;
d'utilité publique et moyennant une juste et
préalable indemnité ; Attendu que, pour rejeter la demande en
démolition des consorts X..., l'arrêt retient
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 18 que le toit du bâtiment des consorts Y...
mars 2015), que les consorts X..., empiète de vingt centimètres sur la
propriétaires d'une maison édifiée sur une propriété X... mais que ce débord n'est à

16
l'origine d'aucun désordre ni sinistre et que Moyens produits par la SCP Boré et Salve
sa rectification, alors qu'il englobe le de Bruneton, avocat aux Conseils, pour les
conduit de la cheminée des consorts X..., consorts X...
pourrait modifier un équilibre et engendrer
des infiltrations dans le mur mitoyen, ce qui PREMIER MOYEN DE CASSATION
serait préjudiciable aux deux parties, et que
la démolition des éléments de la toiture est IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué
disproportionnée, en l'absence de préjudice, d'AVOIR confirmé le jugement déféré en ce
et inadaptée, compte tenu de la qu'il avait débouté les consorts X... de leur
configuration des lieux ; demande tendant à la démolition de la
toiture appartenant aux consorts Y...,
Qu'en statuant ainsi, par des motifs empiétant sur leur propriété et de leur
inopérants, alors que les consorts X... demande en réparation du préjudice que
étaient en droit d'obtenir la démolition de la devraient engendrer les travaux de remise
partie du toit empiétant sur leur propriété, la en état ;
cour d'appel a violé le texte susvisé ;
AUX MOTIFS QUE sur le débord de
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu toiture, l'expert a conclu qu'il y a un
de statuer sur le second moyen : débordement sur le toit X... à savoir que le
versant Sud-Est surplombe le mur mitoyen
CASSE ET ANNULE, en toutes ses et que le surplomb du versant Nord-Ouest
dispositions, l'arrêt rendu le 18 mars 2015, est plus important puisque mesurant 20
entre les parties, par la cour d'appel de centimètres environ ; qu'il s'en déduit que le
Bastia ; remet, en conséquence, la cause et toit empiète effectivement sur la propriété
les parties dans l'état où elles se trouvaient X... ; que Melle X... reproche à l'expert de
avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les ne pas avoir fait de propositions pour
renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en- remédier à l'empiétement constaté ; que
Provence ; cependant il ressort de l'avis du sapiteur, M.
Condamne les consorts Y... aux dépens ; A... cité plus haut et des conclusions de M.
Vu l'article 700 du code de procédure civile, B... que le débord de la toiture est
condamne les consorts Y... à payer la indispensable compte tenu de la nature de sa
somme de 3 000 euros aux consorts X... ; conception ; que ce débord n'est à l'origine
rejette la demande de Mme Marie- d'aucun désordre ni sinistre et que le
Dominique et M. Don Paul Y... ; rectifier alors qu'il englobe le conduit de la
Dit que sur les diligences du procureur cheminée des X... pourrait modifier un
général près la Cour de cassation, le présent équilibre et engendrer des infiltrations dans
arrêt sera transmis pour être transcrit en le mur mitoyen, ce qui serait préjudiciable
marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; aux deux parties ; qu'il en résulte que la
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, solution préconisée par l'appelante, à savoir
troisième chambre civile, et prononcé par le la démolition des éléments de la toiture, est
président en son audience publique du dix disproportionnée en l'absence de préjudice
novembre deux mille seize. et inadaptée compte tenu de la configuration
MOYENS ANNEXES au présent arrêt des lieux ; qu'il y a lieu en conséquence de
débouter Melle Joannie X... de ce chef de
prétention ; que le jugement querellé sera
également confirmé sur ce point ; que sur
les autres demandes, Melle Joannie X...
succombant, elle ne peut prétendre à la
condamnation des intimés à lui payer la
somme de 10. 000 euros, en réparation du

17
préjudice subi à l'occasion des travaux de le toit des consorts X... était déjà plus basse,
remise en état ; et qu'en outre trois conduits de cheminée
étaient présents entre les deux propriétés,
AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT dont l'un était inséré dans la toiture de
ADOPTÉS QUE concernant l'empiétement Madame Y... ; que les travaux
allégué sur le fondement de l'article 545 du d'exhaussement du mur de l'habitation de
code civil en vertu duquel nul ne peut être Madame Y... ont à l'évidence nécessités que
contraint de céder sa propriété, si ce n'est le conduit de cheminée de Monsieur et
pour cause d'utilité publique, et moyennant Madame X... soit lui aussi surélevé jusqu'au
une juste et préalable indemnité, il incombe faîte du toit appartenant à la défenderesse ;
à celui qui soutient qu'il a été porté atteinte que d'ailleurs les travaux de surélévation
à sa propriété d'en rapporter la preuve entrepris ultérieurement par Monsieur et
conformément à la loi ; qu'en l'espèce Madame X... sont venus prendre appui sur
Monsieur et Madame X... affirment que la le mur exhaussé par Madame Y..., la
preuve de la voie de fait est rapportée par gouttière dans laquelle les eaux de pluies
les constatations opérées le 23 avril 2003, provenant du toit de Madame Y... viennent
par la S. C. P. Z..., huissiers de justice à se déverser ayant été à l'évidence mise en
Corte ; que l'huissier instrumentaire a place à cette époque, et donc
constaté que la descente de gouttière de la nécessairement en tenant compte du
toiture de l'immeuble cadastré section C n° raccordement de la gouttière installée sur la
507 versant ouest, se jetait dans la gouttière toiture de l'immeuble de Madame Y... situé
de l'immeuble X..., que le conduit de en contre haut, ce qui va dans le sens d'un
cheminée qui émerge de la toiture de ce accord entre les parties, tel que le soutient la
dernier était en partie encastré dans le mur défenderesse ; que par ailleurs si l'huissier
de surélévation de la maison de Madame de justice fait état d'un débordement de la
Y..., la souche et le chapeau semblant toiture situé en contre haut il ne mentionne
légèrement décalés par rapport au conduit, pas qu'il y ait un empiétement au niveau du
et a ajouté qu'au pied de la souche et tout mur ; que la preuve de l'empiétement n'est
autour une étanchéité avait été réalisée ; que donc pas rapportée, de même que Monsieur
la toiture de la façade pignon déborde de 30 et Madame X... qui fondent également leur
centimètres environ sur la toiture du action sur les dispositions de l'article 1382
requérant ; que ces seules constations ne du code civil, ne rapportent pas la preuve au
suffisent pas à caractériser l'empiétement vu de ce qui précède, que leur voisin aurait
dont les demandeurs se disent victimes ; commis une faute ; qu'en tout état de cause,
qu'en effet il n'est pas contesté que les ils ne démontrent pas être victimes d'un
travaux d'exhaussement réalisés par l'auteur préjudice directement lié à la faute qu'ils ne
de Madame Marie Dominique Y... l'ont été caractérisent pas, le fait que la cheminée ne
en 1982, soit il y a aujourd'hui 27 ans, et que fonctionne plus en raison de son
des travaux de surélévation ont également encastrement ne reposant que sur leurs
par la suite été effectués sur le fonds de seules allégations, et n'est invoqué
Monsieur et Madame X..., ce que les clichés rappelons-le que 27 ans après la réalisation
photographiques annexés au constat des travaux litigieux ; que quant aux
d'huissier laissent clairement apparaître, si infiltrations constatées à l'intérieur de leur
bien qu'il est impossible en l'état actuel des logement par l'huissier de justice, au-dessus
constructions de déterminer avec exactitude de ladite cheminée le long du mur, il n'est
qu'elle était la configuration des lieux avant pas prouvé qu'elles soient imputables aux
1982 ; que les photographies des lieux travaux de surélévation du fonds Y...,
produites par Madame Y..., et datant d'avant comme pouvant trouver leur origine dans
l'exhaussement de son fonds, démontrent en ceux qu'ils ont eux-mêmes entrepris
revanche que la ligne de faîte constituée par quelques années plus tard, qu'il a, à ce sujet,

18
déjà été indiqué que l'huissier de justice l'expertise réalisée par M. B... ne peuvent
avait constaté que l'étanchéité avait été être valablement critiquées, l'expert
réalisée au pied de la souche de la cheminée argumentant ses conclusions par des
; qu'en conséquence, en l'absence constations techniques, s'étant fait assister
d'empiétement avéré et de preuve de ce que par un sapiteur, expert ingénieur en
Madame Y... aurait commis une faute, structure et ayant répondu aux dires ; qu'au
Monsieur et Madame X... seront déboutés vu de ces conclusions, il est établi que les
de l'ensembles de leurs demandes ; murs des deux fonds sont superposés à
savoir que la construction Y... s'est faite sur
ALORS QUE le propriétaire d'un fonds sur le mur existant de la propriété X... en
lequel la construction d'un autre propriétaire incluant la cheminée X... dans la moitié du
empiète est fondé à en obtenir la démolition mur ; que pour parvenir à cette conclusion,
; qu'en déboutant les consorts X... de leur l'expert a fait procéder à la destruction
demande tendant à la démolition des partielle des cloisons et au percement du
éléments de toiture, appartenant aux mur ; que pour confirmer le mode
consorts Y..., qui empiètent sur leur constructif, il a fait appel à M. A...,
propriété, au motif que la démolition de ces ingénieur en béton armé, lequel a dit dans
éléments serait disproportionnée en son avis (annexe 3) que :- le mur de refend
l'absence de préjudice et inadaptée compte entre les deux maisons est un mur mitoyen,-
tenu de la configuration des lieux, la Cour le mur de refend a une position oblique (non
d'appel a violé l'article 545 du Code civil. perpendiculaire) par rapport aux murs
extérieurs,- compte tenu de cet oblique, le
SECOND MOYEN DE CASSATION mur de surélévation Y... construit à
l'équerre par rapport aux murs de façade
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué empiète de façon différente sur le mur de
d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en refend mitoyen (plus « pincé » par rapport
ce qu'il avait débouté les consorts X... de au nu du mur coté ruelle et plus « ouvert »
leur demande tendant à la démolition du coté façade donnant sur la vallée),- le mur
mur de surélévation et de leur demande en en surélévation a conduit à devoir surélever
réparation du préjudice que devraient le conduit de cheminée sans créer d'autre
engendrer les travaux de remise en état ; gêne ; que quant à l'empiétement de 3
centimètres de la surélévation datant de
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 1982, l'expert l'explique par l'irrégularité du
545 du Code civil, nul ne peut être contraint mur en précisant que la discordance à
de céder sa propriété, si ce n'est pour cause l'endroit précis du mesurage ne signifie pas
publique, et moyennant une juste et qu'elle soit constante sur toute la longueur
préalable indemnité ; que sur l'empiétement du mur ; que compte tenu de la nature du
du mur, Melle Joannie X... soutient que le mur, il est effectivement indiffèrent qu'un
mur Sud du fonds Y... a été construit contre écart de 3 centimètres dont il n'est pas
le mur de son fonds et qu'il empiète sur sa prouvé qu'il soit constant puisse constituer
propriété ; qu'il est constant que la maison l'empiétement allégué ; qu'au vu de
X... (parcelle C 508) a été construite en l'ensemble de ces éléments notamment du
premier dans les années 1800 et que la rapport d'expertise, il n'existe pas
maison Y... (parcelle C 507) a été d'empiétement du mur Y... sur le mur X... ;
reconstruite en 1934 après s'être écroulée ; que le jugement querellé sera confirmé sur
que la maison Y... a ensuite été surélevée ce point ; que sur les autres demandes,
d'un étage en 1982 puis que les X... ont Melle Joannie X... succombant, elle ne peut
effectué en 1990 une surélévation en prétendre à la condamnation des intimés à
s'appuyant sur celle faite par les Y... lui payer la somme de 10. 000 euros, en
précédemment ; que les conclusions de

19
réparation du préjudice subi à l'occasion des le toit des consorts X... était déjà plus basse,
travaux de remise en état » ; et qu'en outre trois conduits de cheminée
étaient présents entre les deux propriétés,
AUX MOTIFS PRÉTENDUMENT dont l'un était inséré dans la toiture de
ADOPTÉS QUE concernant l'empiétement Madame Y... ; que les travaux
allégué sur le fondement de l'article 545 du d'exhaussement du mur de l'habitation de
code civil en vertu duquel nul ne peut être Madame Y... ont à l'évidence nécessités que
contraint de céder sa propriété, si ce n'est le conduit de cheminée de Monsieur et
pour cause d'utilité publique, et moyennant Madame X... soit lui aussi surélevé jusqu'au
une juste et préalable indemnité, il incombe faîte du toit appartenant à la défenderesse ;
à celui qui soutient qu'il a été porté atteinte que d'ailleurs les travaux de surélévation
à sa propriété d'en rapporter la preuve entrepris ultérieurement par Monsieur et
conformément à la loi ; qu'en l'espèce Madame X... sont venus prendre appui sur
Monsieur et Madame X... affirment que la le mur exhaussé par Madame Y..., la
preuve de la voie de fait est rapportée par gouttière dans laquelle les eaux de pluies
les constatations opérées le 23 avril 2003, provenant du toit de Madame Y... viennent
par la S. C. P. Z..., huissiers de justice à se déverser ayant été à l'évidence mise en
Corte ; que l'huissier instrumentaire a place à cette époque, et donc
constaté que la descente de gouttière de la nécessairement en tenant compte du
toiture de l'immeuble cadastré section C n° raccordement de la gouttière installée sur la
507 versant ouest, se jetait dans la gouttière toiture de l'immeuble de Madame Y... situé
de l'immeuble X..., que le conduit de en contre haut, ce qui va dans le sens d'un
cheminée qui émerge de la toiture de ce accord entre les parties, tel que le soutient la
dernier était en partie encastré dans le mur défenderesse ; que par ailleurs si l'huissier
de surélévation de la maison de Madame de justice fait état d'un débordement de la
Y..., la souche et le chapeau semblant toiture situé en contre haut il ne mentionne
légèrement décalés par rapport au conduit, pas qu'il y ait un empiétement au niveau du
et a ajouté qu'au pied de la souche et tout mur ; que la preuve de l'empiétement n'est
autour une étanchéité avait été réalisée ; que donc pas rapportée, de même que Monsieur
la toiture de la façade pignon déborde de 30 et Madame X... qui fondent également leur
centimètres environ sur la toiture du action sur les dispositions de l'article 1382
requérant ; que ces seules constations ne du code civil, ne rapportent pas la preuve au
suffisent pas à caractériser l'empiétement vu de ce qui précède, que leur voisin aurait
dont les demandeurs se disent victimes ; commis une faute ; qu'en tout état de cause,
qu'en effet il n'est pas contesté que les ils ne démontrent pas être victimes d'un
travaux d'exhaussement réalisés par l'auteur préjudice directement lié à la faute qu'ils ne
de Madame Marie Dominique Y... l'ont été caractérisent pas, le fait que la cheminée ne
en 1982, soit il y a aujourd'hui 27 ans, et que fonctionne plus en raison de son
des travaux de surélévation ont également encastrement ne reposant que sur leurs
par la suite été effectués sur le fonds de seules allégations, et n'est invoqué
Monsieur et Madame X..., ce que les clichés rappelons-le que 27 ans après la réalisation
photographiques annexés au constat des travaux litigieux ; que quant aux
d'huissier laissent clairement apparaître, si infiltrations constatées à l'intérieur de leur
bien qu'il est impossible en l'état actuel des logement par l'huissier de justice, au-dessus
constructions de déterminer avec exactitude de ladite cheminée le long du mur, il n'est
qu'elle était la configuration des lieux avant pas prouvé qu'elles soient imputables aux
1982 ; que les photographies des lieux travaux de surélévation du fonds Y...,
produites par Madame Y..., et datant d'avant comme pouvant trouver leur origine dans
l'exhaussement de son fonds, démontrent en ceux qu'ils ont eux-mêmes entrepris
revanche que la ligne de faîte constituée par quelques années plus tard, qu'il a, à ce sujet,

20
déjà été indiqué que l'huissier de justice
avait constaté que l'étanchéité avait été
réalisée au pied de la souche de la cheminée
; qu'en conséquence, en l'absence
d'empiétement avéré et de preuve de ce que
Madame Y... aurait commis une faute,
Monsieur et Madame X... seront déboutés
de l'ensembles de leurs demandes ;

ALORS QU'une contradiction de motifs


équivaut à un défaut de motifs ; qu'en
constant l'existence d'un empiétement de 3
cm du mur de surélévation, comme l'avait
relevé l'expert judiciaire aux termes de son
rapport d'expertise, tout en affirmant qu'au
vu du rapport d'expertise, il n'existait pas
d'empiétement du mur Y... sur le mur X...,
la Cour d'appel, qui s'est contredite, a violé
l'article 455 du Code de procédure civile.

21
SEANCE 4
ABUS DE DROIT ET TROUBLE ANORMAL DE
VOISINAGE

Lectures

Ph. STOEFFEL-MUNCK, « La théorie des troubles du voisinage à l'épreuve du principe de


précaution : observations sur le cas des antennes relais », D. 2009, p. 2817.
A. PENNEAU, « De quelques nouvelles variations sur le thème de la théorie du trouble
anormal de voisinage », RLDC Janvier 2006, 15.

Exercices
1/ Pour chaque arrêt de la fiche, vous devez pouvoir présenter le sens, la valeur et la
portée de la décision. Vous n’êtes pas nécessairement obligés de formaliser une fiche
d’arrêt, même s’il est vivement conseillé de le faire.

2/ Vous rédigerez intégralement un commentaire de l’arrêt de la deuxième chambre


civile du 5 février 2004 (p. 2)

22
Req., 3 août 1915.

MOYEN DE CASSATION : du droit de propriété et plus


spécialement du droit de clore, violation
Violation des articles 544 et suiv. et 552 par fausse application des articles 1388
du Code civil, des règles du droit de et suivants du code civil, violation de
propriété, violation par fausse l’article 7 de la loi du 20 avril 1810,
application des articles 1382 et suiv. du défaut de motifs et de base légale.
Code civil, violation de l’article 7 de la
loi du 20 avril 1810, défaut de motifs et Attendu qu’il ressort de l’arrêt attaqué
de base légale, que Coquerel a installé sur son terrain
attenant à celui de Clément-Bayard, des
En ce que d’une part, l’arrêt attaqué a carcasses en bois de seize mètres de
considéré comme un abus du droit de hauteur surmontées de tiges de fer
propriété le fait par un propriétaire de pointues ; que le dispositif ne présentait
construire sur son terrain une clôture pour l’exploitation du terrain de
élevée, destinée à empêcher le Coquerel aucune utilité et n’avait été
propriétaire du fonds voisin de pénétrer érigée que dans l’unique but de nuire à
chez lui ou de tirer de son fonds un Clément-Bayard, sans d’ailleurs, à la
usage quelconque destiné à rendre sa hauteur à laquelle il avait été élevé,
jouissance plus commode, sous le constituer au sens de l’article 647 du
prétexte que cette construction avait été code civil, la clôture que le propriétaire
faite uniquement dans une intention est autorisé à construire pour la
malveillante, alors qu’un propriétaire a protection de ses intérêts légitimes ;
le droit absolu de construire sur son que, dans cette situation des faits,
terrain tels ouvrages de défense ou de l’arrêt a pu apprécier qu’il y avait eu par
clôture qu’il lui plait pour éviter toute Coquerel abus de son droit et, d’une
incursion sur son terrain, et qu’il ne part, le condamner à la réparation du
peut y avoir abus de droit que si le dommage causé à un ballon dirigeable
propriétaire exécute chez lui, sans de Clément-Bayard, d’autre part,
aucun profit pour lui-même, un acte qui ordonner l’enlèvement des tiges de fer
apporte un trouble au propriétaire du surmontant les carcasses en bois.
fonds voisin restant dans les limites de
sa propriété, ce qui n’était aucunement Attendu que, sans contradiction, l’arrêt
le cas. a pu refuser la destruction du surplus
du dispositif dont la suppression était
Et en ce que d’autre part, l’arrêt n’a rien également réclamée, par le motif qu’il
répondu à la théorie de droit ainsi n’était pas démontré que ce dispositif
formulée dans le dispositif des eût jusqu’à présent causé du dommage
conclusions d’appel. à Clément-Bayard et dût
PAR CES MOTIFS et tous autres à nécessairement lui en causer dans
produire, déduire ou suppléer, l’avenir
l’exposant conclut à ce qu’il plaise à la
Cour de Cassation : Casser l’arrêt Attendu que l’arrêt trouve une base
attaqué avec toutes les conséquences de légale dans ces constatations ; que,
droit. dûment motivé, il n’a point, en statuant
ainsi qu’il l’a fait, violé ou faussement
LA COUR : appliqué les règles de droit ou les textes
Sur le moyen de pourvoi pris de la visés au moyen.
violation des articles 544 et suivants, Par ces motifs, rejette la requête,
552 et suivants du Code civil, des règles condamne le demandeur à l’amende

20
Cass. civ. 1re, 20 janvier 1964, JCP 1965, II, 14 035, note B. Oppetit.

Sur le premier moyen, pris en sa


première branche : vu l’article 1382 du Mais attendu que la même décision,
Code civil ; après avoir rappelé et déclaré
constantes les constatations de fait des
Attendu que l’exercice du droit de premiers juges, a relevé "qu’il apparait
propriété, qui a pour limite la bien des éléments de la cause que les
satisfaction d’un intérêt sérieux et parties vivent dans une mésintelligence
légitime, ne saurait autoriser certaine" et que "l’instance... Reflète et
l’accomplissement d’actes malveillants, caractérise la psychologie de demoiselle
ne se justifiant par aucune utilité Lassus, recherchant la satisfaction d’un
appréciable et portant préjudice à mobile malicieux" ;
autrui ;
Attendu qu’en se refusant, dans de
Attendu que la cour d’appel a refusé telles circonstances, à accorder à dame
d’ordonner la suppression d’un rideau Blum réparation du préjudice dont elle
de fougères de 1,70 m de hauteur, se plaignait, alors qu’ils constataient en
plante par demoiselle Lassus, a environ même temps, à la charge de demoiselle
0,85m du mur de la maison de dame Lassus, un exercice purement
Blum, et empêchant le passage de la malicieux, partant abusif, de son droit
lumière par une ouverture a verre de propriété, les juges du second degré
dormant dont l’aménagement avait été ont violé le texte visé par le pourvoi ;
judiciairement autorisé pour l’éclairage
d’une cuisine ; que pour statuer ainsi, Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu de
l’arrêt infirmatif attaque se fonde sur ce statuer soit sur les autres branches du
que, s’il était fait droit a la prétention de premier moyen, soit sur le second
dame Blum, l’héritage voisin se moyen : casse et annule l’arrêt rendu
trouverait grevé "d’une véritable entre les parties par la cour d’appel
servitude d’éclairement... d’Agen, le 28 mars 1962 ; […]
Contractuellement inexistante" ;

Cass. civ. 2ème, 5 février 2004, D. 2004, somm. comm., 2468, note N. Reboul-
Maupin.

Sur le moyen unique : disposition soit prise pour éviter la


chute des arbres se trouvant en position
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Riom, 21 instable ;
mars 2002), qu’à la suite d’une tempête
survenue à la fin de l’année 1999, de Attendu que M. X. fait grief à l’arrêt
nombreux arbres plantés sur un terrain confirmatif d’avoir fait droit à ces
appartenant à M. X... se sont abattus demandes alors, selon le moyen, que :
sur le terrain voisin, appartenant à
Mme Y..., cependant que d’autres 1 / la chute d’arbres sur une propriété
arbres menaçaient de s’écrouler sur ce voisine provoquée par la circonstance
terrain ; que Mme Y... a assigné M. X..., de deux cyclones dévastateurs sur
sur le fondement du trouble anormal de l’ensemble du territoire français à la fin
voisinage, pour obtenir l’enlèvement de l’année 1999 caractérise l’existence
des arbres tombés sur son terrain, la d’une cause imprévisible et
remise en état de ce terrain, et que toute insurmontable exonérant de sa

21
responsabilité civile le propriétaire des M. X... s’étaient abattus sur une
arbres ainsi abattus ; qu’en faisant longueur de 120 mètres et une largeur
néanmoins application au litige de la de 20 mètres sur la parcelle exploitée
responsabilité encourue à raison des par Mme Y..., que 40 ares de cette
troubles anormaux de voisinage à parcelle ne pouvaient plus être
raison du défaut d’enlèvement du bois exploités, que les arbres de la propriété
ainsi tombé sans un rapport quelconque de M. X... étaient encore enracinés, que
avec un trouble du voisinage, l’arrêt certains arbres étaient couchés et
attaqué a violé l’article 1382 du Code d’autres menaçaient de tomber, que
civil ; l’herbe avait poussé à une hauteur d’un
mètre environ, que le sol était brûlé, car
2 / subsidiairement, la cour d’appel ne les arbres étaient des épineux, retient
caractérise aucun dépassement des que M. X..., qui connaissait
troubles anormaux de voisinage par la parfaitement cet état de fait, s’est
seule abstention d’un propriétaire à abstenu pendant plus de deux ans de
faire débarrasser le territoire d’une nettoyer le terrain de sa voisine, malgré
parcelle voisine des arbres tombés par une mise en demeure de celle-ci ;
l’effet d’une tempête d’une violence
exceptionnelle et ayant engendré de Qu’en l’état de ces constatations et
nombreuses destructions d’immeubles énonciations, procédant d’une
et de végétaux, que partant, l’arrêt appréciation souveraine des éléments
attaqué, en déclarant que Mme Y... de preuve et desquels il ressort que les
subissait un trouble anormal de troubles, qui, en raison de leur durée, ne
voisinage par le simple fait de M. X... de résultaient plus d’un cas de force
ne pas débarrasser sa parcelle des majeure, excédaient les inconvénients
arbres ainsi tombés, a violé normaux du voisinage, la cour d’appel a
l’article 1382 du Code civil ; légalement justifié sa décision ;

Mais attendu que l’arrêt, par motifs PAR CES MOTIFS : REJETTE le
propres et adoptés, après avoir constaté pourvoi ;
que les sapins plantés sur le terrain de

Cass. civ. 2ème, 7 novembre 1990, Bull. civ. II, n° 225.

Sur le premier moyen : gestion en réparation de troubles


Attendu, selon l’arrêt attaqué anormaux de voisinage ;
(Bordeaux, 13 avril 1989), que
M. Raviol acheta en 1977 une maison Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt
dans une commune rurale au voisinage d’avoir condamné M. Maciosyck à
de laquelle se trouvait un élevage de réparer le dommage, alors que, selon les
porcs géré par M. Maciosyck ; que constatations de l’arrêt, l’exploitation
courant 1979 et 1984 celui-ci obtint des de la porcherie à l’origine du trouble
permis de construire de nouvelles allégué existait antérieurement à
installations à usage de porcherie ; que, l’acquisition par M. Raviol de sa maison
se disant incommodé par les odeurs qui de campagne ; qu’il en aurait dû être
en provenaient, M. Raviol assigna nécessairement déduit que cette activité
M. Maciosyck et le Groupement n’étant pas contraire aux normes en
agricole d’intérêt économique (GAEC) vigueur et s’étant poursuivie dans les
de Rivailles dont celui-ci assurait la mêmes conditions, M. Raviol ne
pouvait prétendre à aucun droit à

22
réparation ; qu’en décidant le contraire plus de quatre cents et qu’ensuite
la cour d’appel aurait méconnu la l’odeur en provenance des porcheries
portée juridique de ses constatations et était devenue insupportable ;
violé, par refus d’application, l’article
L. 112-16 du code de la construction et Qu’en l’état de ces énonciations d’où il
de l’habitation ; résulte que les activités occasionnant
les nuisances ne se sont pas poursuivies
Mais attendu que l’arrêt, après avoir dans les mêmes conditions après
relevé que antérieurement à l’acquisition de son bien par M. Raviol,
l’acquisition de sa maison par la cour d’appel n’a pas encouru les griefs
M. Raviol, il n’existait qu’un petit du moyen ;
élevage qui ne causait aucune nuisance
aux voisins mais que, postérieurement, Sur le second moyen : (sans intérêt) ;
M. Maciosyck avait obtenu un permis
de construire une porcherie destinée à PAR CES MOTIFS : REJETTE le
porter le nombre des bêtes de vingt à pourvoi ;

Cass. civ. 2ème, 10 juillet 1991, Bull. civ. II, n° 234.

Sur le moyen unique, pris en ses exploitation ultérieure, nonobstant la


diverses branches : réserve des droits des tiers, la cour
d’appel aurait méconnu les principes
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt gouvernant le trouble anormal de
attaqué d’avoir débouté les époux voisinage, ensemble l’article 8 de la loi
Randu de leur demande en réparation du 19 juillet 1976 ; alors qu’enfin, après
du trouble anormal de voisinage avoir constaté le caractère inesthétique
résultant de la construction et de de l’entrepôt et la perte quasi totale
l’extension par M. Croize d’un atelier de d’ensoleillement en résultant pour la
carrosserie, alors que, d’une part, en maison des requérants, circonstances
déniant toute portée à la préoccupation établissant l’anormalité du trouble, la
individuelle des requérants et des cour d’appel aurait cependant refusé de
avantages normalement attendus par tirer les conséquences légales de ses
eux de la réglementation applicable au propres constatations ;
moment où ils ont acquis leur maison
en 1969, dans une zone exclusivement Mais attendu qu’après avoir relevé que
résidentielle, la cour d’appel aurait la construction litigieuse avait été
méconnu les principes gouvernant le édifiée conformément à la
trouble anormal de voisinage, ensemble réglementation applicable, qu’elle avait
l’article L. 112-16 du Code de la une esthétique fonctionnelle mais de
construction et de l’habitation ; alors bonne qualité, que l’activité de
que, d’autre part, les décisions carrosserie était déjà pratiquée depuis
administratives relatives aux de longues années presque en face du
installations classées sont, d’après domicile des époux Randu, l’arrêt
l’article 8 de la loi du 19 juillet 1976, énonce qu’il n’est pas démontré que
toujours accordées " sous réserve des l’extension de l’activité de carrosserie
droits des tiers " ; qu’en opposant dès aurait entraîné une augmentation
lors aux requérants l’irréprochabilité de notable des bruits, et que la perte
l’installation litigieuse au regard de la d’ensoleillement n’excède pas les
réglementation applicable au moment inconvénients normaux du voisinage,
de son implantation et de son

23
par suite de la mauvaise orientation excédaient les inconvénients normaux
d’origine de la maison ; du voisinage, a légalement justifié sa
décision ;
Que, par ces constatations et
énonciations, la cour d’appel, qui a usé PAR CES MOTIFS :
de son pouvoir souverain pour REJETTE le pourvoi
apprécier si les troubles invoqués

Cass. civ. 2ème, 17 mars 2005, D.2005, IR, 917, RDC 2005, N° 738, obs. C. KLeitz.

Sur le moyen unique : depuis 1993, ce qui n’était pas contesté,


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en- de sorte qu’elle n’avait aucune qualité
Provence, 14 octobre 2003), que pour agir à leur encontre ; qu’en
Mme X... se plaignant de ce qu’un arbre, n’examinant pas ce moyen de nature à
appartenant à M. et à Mme Y..., démontrer que la demande de Mme X...
habitant le même immeuble en rez-de- était irrecevable, la cour d’appel a privé
jardin, lui obstruait la vue dont elle sa décision de base légale au regard des
jouissait à partir de son appartement, a articles 31 et suivants du nouveau Code
fait assigner ceux-ci devant le tribunal de procédure civile ;
d’instance afin de faire cesser ce trouble
anormal de voisinage ; Mais attendu que le principe selon
lequel nul ne doit causer à autrui un
Attendu que M. et Mme Y... font grief à trouble de voisinage s’applique à tous
l’arrêt de les avoir condamnés à élaguer les occupants d’un immeuble en
cet arbre sous peine d’astreinte, alors, copropriété quel que soit le titre de leur
selon le moyen : occupation ; Et attendu que l’arrêt
1 / qu’ils faisaient valoir dans leurs retient que Mme X... habitait le premier
conclusions d’appel que Mme X..., qui étage d’un immeuble en copropriété et
se prétend copropriétaire ne l’était plus que la vue de son logement était masqué
depuis 1993, ce qui n’était pas contesté, par un arbre appartenant aux époux
de sorte qu’elle n’avait aucune qualité Y... ; Que de ces constatations et
pour agir à leur encontre ; qu’en énonciations, la cour d’appel a déduit à
n’examinant pas ce moyen de nature à bon droit, sans avoir à mieux s’en
démontrer que la demande de Mme X... expliquer, que l’action de Mme X... était
était irrecevable, la cour d’appel a violé recevable ; D’où il suit que le moyen
l’article 455 du nouveau Code de n’est pas fondé
procédure civile ;
2 / qu’ils faisaient valoir dans leurs PAR CES MOTIFS : REJETTE le
conclusions d’appel que Mme X..., qui pourvoi ; Condamne M. et Mme Y... aux
se prétend copropriétaire ne l’était plus dépens

Cass. civ. 3ème, 3 mars 2010, D. 2010, 2419, note E. Bouchet-le-Mappian ; JCP
G 2010 II 658, note D. Tapinos

Sur le moyen unique : d’une source d’eaux minérales


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Nîmes, naturelles exploitée par la Société
10 juin 2008) que les époux X..., d’économie mixte Vals (la SEM) ont fait
propriétaires d’un terrain à proximité réaliser courant 2001 un forage pour

24
l’arrosage de leur jardin ; que la SEM les
a assignés en fermeture de ce forage, en Mais attendu, d’une part, que selon
se prévalant d’une violation du principe l’article L. 110-1 II 1° du code de
de précaution et d’un abus du droit de l’environnement, le principe de
propriété ; précaution est celui selon lequel
l’absence de certitudes, compte tenu des
Attendu que la SEM fait grief à l’arrêt de connaissances scientifiques et
rejeter sa demande alors, selon le techniques du moment, ne doit pas
moyen : retarder l’adoption de mesures
1° / que le principe de précaution, qui effectives et proportionnées visant à
impose d’anticiper et de prévenir tout prévenir un risque de dommages graves
risque même non encore identifié, doit et irréversibles à l’environnement à un
conduire le juge à ordonner la coût économiquement acceptable ;
fermeture d’un forage réalisé à qu’ayant relevé, par motifs propres et
proximité d’un captage d’eau minérale adoptés, que le forage, qualifié
naturelle destiné à la consommation d’improductif par l’expert, avait été
humaine, quand bien même le risque de exécuté par une entreprise spécialisée
pollution n’est pas encore établi ; qu’en dans les règles de l’art et le respect des
s’abstenant de rechercher, comme il le autorisations administratives, et que
lui était demandé, si le principe de l’expert avait conclu que ce forage se
précaution n’imposait pas la fermeture situant à l’aval du captage des eaux
du forage des époux X..., au regard des minérales de Saint-Jean Lachaud sans
conclusions de l’expert judiciaire qui, lien direct par faille avec celui-ci, n’avait
bien qu’excluant a priori tout risque de aucune possibilité de polluer les eaux
pollution des eaux minérales par le exploitées par le captage, même si l’on y
forage des époux X..., avait néanmoins précipitait des produits nocifs ou des
rappelé la nécessité de protéger le germes délétères, la cour d’appel qui a
captage et préconisé la condamnation retenu, à bon droit, que le risque de
du forage, la cour d’appel a privé sa pollution ayant été formellement exclu
décision de base légale au regard des par l’expert judiciaire, le principe de
articles 1382 et 1383 du code civil ; précaution ne pouvait trouver
2° / que le droit du propriétaire de application, a pu en déduire que les
capter sur son fonds les eaux époux X... n’avaient pas commis de
souterraines qui s’y infiltrent ou faute ;
s’écoulent dans son héritage dégénère
en abus lorsque, agissant sans utilité Attendu, d’autre part, que la cour
pour lui-même, ce forage est susceptible d’appel, qui a retenu que la valeur d’un
de porter atteinte à la qualité d’une eau forage à productivité réduite relevait de
minérale naturelle destinée à la la seule appréciation des époux X... et
consommation humaine et exploitée qu’il ne résultait de ce forage ni absence
depuis plus de cent ans ; qu’en jugeant d’utilité, ni intention de nuire, ni
que la réalisation du forage litigieux dommage causé à la SEM, a pu en
n’était pas constitutive d’un abus de déduire qu’aucun abus du droit de
leur droit de propriété par les époux propriété n’était établi ;
X..., bien que l’expert ait constaté
l’improductivité de ce forage dont il a D’où il suit que le moyen n’est pas
préconisé la fermeture en application fondé ;
du principe de précaution, la cour PAR CES MOTIFS : REJETTE le
d’appel a violé les articles 552 et 642 du pourvoi
code civil ;

25
Cass. civ. 3ème, 10 novembre 2009, D. 201, Pan., 2183, note N. Reboul-Maupin.

Sur le moyen unique : Vu l’article 544 Attendu que pour débouter


du code civil, ensemble l’article 646 du M. Raymond X... de sa demande en
même code ; revendication de la propriété de la
portion du terrain cadastré AT 528 sur
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Saint laquelle il a construit un mur et le
Denis la Réunion, 3 octobre 2008), que, condamner à sa démolition sous
par acte authentique des 29 novembre astreinte, l’arrêt retient que la seconde
et 2 décembre 1991, M. Mardé X... a fait convention de bornage, signée le 20
donation partage de quatre parcelles novembre 2001 par toutes les parties au
provenant de la division d’un terrain lui litige, y compris de M. Raymond X...,
appartenant situé à Saint André suivant s’impose et fait la loi des parties en ce
document d’arpentage du 15 octobre qui concerne les limites de propriétés
1991 établi par un géomètre expert ; que respectives ;
deux de ces parcelles cadastrées AT 527
et AT 528 ont été données à Qu’en se fondant exclusivement sur un
MM. Marceau et Alexandre X... ; que procès-verbal de bornage, lequel ne
M. Raymond X..., nu propriétaire d’une constitue pas un acte translatif de
parcelle AT 99 jouxtant les précédentes, propriété, la cour d’appel a violé les
a signé avec l’ensemble des donataires textes susvisés ;
et des propriétaires des terrains
contigus un procès-verbal de bornage le PAR CES MOTIFS : CASSE ET
20 novembre 2001 ; que, faisant grief à ANNULE, dans toutes ses dispositions,
M. Raymond X... d’avoir déplacé une l’arrêt rendu le 3 octobre 2008, entre les
borne délimitant la partie nord entre les parties, par la cour d’appel de Saint
parcelles AT 527 et AT 99 et d’avoir Denis la Réunion ; remet, en
construit un mur empiétant sur le conséquence, la cause et les parties dans
terrain cadastré AT 528, les consorts l’état où elles se trouvaient avant ledit
Alexandre et Marceau X... l’ont assigné arrêt et, pour être fait droit, les renvoie
aux fins, notamment, de déterminer les devant la cour d’appel de Saint-Denis la
limites de propriétés conformément à la Réunion, autrement composée ;
convention de bornage établie le 20 Condamne MM. Marceau et Alexandre
novembre 2001 et de condamner X... aux dépens ; Vu l’article 700 du
M. Raymond X... à démolir la partie de code de procédure civile, condamne
son mur qui empiète sur leur terrain ; MM. Marceau et Alexandre X... à payer
à M. Raymond X... la somme de 2 500
euros ; rejette leur propre demande

Cass. civ. 3ème, 10 novembre 2009, Bull. civ. III, n° 97.

Sur le second moyen : Vu l’article 544 consorts Y...-Z...ont demandé


du code civil, ensemble l’article 646 du l’enlèvement par M. X... d’un ouvrage se
même code ; trouvant dans l’axe d’un puits ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Rennes, Attendu que pour accueillir cette
28 février 2012), que M. X..., demande, la cour d’appel retient que cet
propriétaire de différentes parcelles, a ouvrage empiète, après délimitation des
assigné les consorts Y...-Z..., parcelles, sur le fonds Y...-Z... ;
propriétaires d’une parcelle contiguë, Qu’en statuant ainsi, alors que l’action
en bornage de leurs propriétés ; que les en bornage dont elle était saisie a

26
seulement eu pour effet de fixer les ordonné à M. X... d’enlever l’ouvrage en
limites des fonds contigus sans métal implanté sur le puits situé dans la
attribuer aux consorts Y...-Z...la cour, l’arrêt rendu le 28 février 2012,
propriété de la portion de terrain sur entre les parties, par la cour d’appel de
laquelle se trouvait l’ouvrage en métal Rennes ; remet, en conséquence, sur ce
édifié par M. X..., la cour d’appel a violé point, la cause et les parties dans l’état
les textes susvisés ; où elles se trouvaient avant ledit arrêt
Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer et, pour y être fait droit, les renvoie
sur le premier moyen qui ne serait pas devant la cour d’appel de Rennes
de nature à permettre l’admission du autrement composée ; Condamne les
pourvoi ; consorts Y...-Z...aux dépens des
pourvois ; Vu l’article 700 du code de
PAR CES MOTIFS : CASSE ET procédure civile, rejette les demandes ;
ANNULE, mais seulement en ce qu’il a

27
SEANCE 5
LA POSSESSION IMMOBILIERE

Lectures

G.-A. LIKILLIMBA, « La possession corpore alieno », RTD civ. 2005, 1


A.-V. LE FUR, « L’acte d’exploitation de la chose d’autrui », RTD civ. 2004, 429

Exercices
1/Pour chaque arrêt de la fiche, vous devez pouvoir présenter le sens, la valeur et la
portée de la décision. Vous n’êtes pas nécessairement obligés de formaliser une fiche
d’arrêt, même s’il est vivement conseillé de le faire.

2/Vous rédigerez intégralement un commentaire de l’arrêt de la troisième chambre


civile du 17 février 2015 (dernier arrêt de la plaquette)

28
Cass. civ. 3ème, 13 janvier 1999, JCP G 1999, I, 175, n° 5, obs. PERINET-MARQUET.

Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par déclarée irrecevable pour défaut de qualité ;
la défense : que le 20 mars 1992, M. Ah Dip a saisi le
Attendu que les consorts Chan Hin Chun tribunal de grande instance afin de voir
qui s’étaient opposés à la demande de M. reconnaître sa qualité de propriétaire des
Ah Dip, tant en première instance que dans constructions élevées sur son terrain, par
leurs conclusions du 15 décembre 1995 prescription trentenaire ;
signifiées en cause d’appel en faisant valoir Attendu que, pour accueillir cette demande,
qu’ils n’avaient jamais cessé d’être l’arrêt retient que M. Ah Dip est possesseur
considérés comme propriétaires des des constructions édifiées sur la parcelle
bâtiments litigieux par l’Administration, dont il a acquis la propriété en 1956, au sens
ont un intérêt à critiquer la disposition de de l’article 2229, depuis plus de 30 ans et
l’arrêt reconnaissant à M. Ah Dip la qualité que les diverses actions engagées par lui à
de propriétaire ; l’encontre de l’auteur des consorts Chan
D’où il suit que le pourvoi est recevable ; Hin Chun en sa qualité prétendue de
Sur le moyen unique : propriétaire, constituent des actes matériels
Vu l’article 2229 du Code civil ; de possession en qualité de propriétaire ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Saint-Denis Qu’en statuant ainsi, par des motifs qui ne
de la Réunion, 11 octobre 1996), que M. Ah suffisent pas à caractériser l’existence
Dip, devenu propriétaire d’une portion de d’actes matériels de possession de M. Ah
terrain, à la suite d’un jugement Dip sur le local objet du litige, la cour
d’adjudication du 3 avril 1956 précisant que d’appel n’a pas donné de base légale à sa
les constructions édifiées sur cette parcelle décision ;
n’étaient pas comprises dans la désignation
du bien, a saisi le juge des loyers PAR CES MOTIFS : CASSE ET
commerciaux pour faire fixer le loyer du ANNULE, dans toutes ses dispositions,
local commercial dans lequel Mme Chan l’arrêt rendu le 11 octobre 1996, entre les
Hin Chun exerçait son activité ; que par parties, par la cour d’appel de Saint-Denis
arrêt du 1er juillet 1977 cette demande a été de la Réunion ;

Cass. civ. 3ème, 30 juin 1999, JCP G 2000, I, 211, n° 2, obs. H. PERINET-MARQUET.

Sur le moyen unique :Vu les articles 2229 consorts Paniandy produisent un acte
et 2262 du Code civil ; notarié du 3 décembre 1984 constatant que
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Saint-Denis leur auteur a acquis, par prescription, la
de la Réunion, 8 novembre 1996), que les parcelle en cause, et réglé les impôts
consorts Paniandy, se prétendant fonciers la concernant ;
propriétaires d’une parcelle de terre,
occupée par les consorts Lindor, ont assigné Qu’en statuant ainsi, alors que l’existence
ces derniers afin d’obtenir leur expulsion ; d’un acte notarié constatant une usucapion
Attendu que, pour accueillir cette demande, et le paiement d’impôts ne pouvaient établir
l’arrêt retient que les sachants entendus par celle-ci, sans relever l’existence d’actes
l’expert ont tous déclaré que M. Lindor et matériels de possession accomplis par les
son père avaient exploité le terrain en demandeurs pendant une durée de trente
qualité de colons, que les consorts Lindor ans, la cour d’appel n’a pas donné de base
n’ont pas, dans ces conditions, occupé la légale à sa décision ;
parcelle en qualité de propriétaires, que les

29
PAR CES MOTIFS : conséquence, la cause et les parties dans
l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses et, pour être fait droit, les renvoie devant la
dispositions, l’arrêt rendu le 8 novembre cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion,
1996, entre les parties, par la cour d’appel autrement composée
de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en

Cass. civ. 3ème, 24 janvier 1990, D. 1991, somm. 20, obs. A. ROBERT.

Document 3 prévaloir des actes de possession


prétendument accomplis sur un talus par les
Sur le moyen unique : Vu l’article 2228 du fermiers qui se sont succédé dans les lieux
Code civil ; loués et qui n’ont exercé qu’une détention
précaire ;
Attendu que la possession est la détention
ou la jouissance d’une chose ou d’un droit Qu’en statuant ainsi, alors que le
que nous tenons ou que nous exerçons par propriétaire d’un terrain peut invoquer les
nous-mêmes ou par un autre qui la tient ou actes de possession accomplis en son nom
qui l’exerce en notre nom ; par le fermier, la cour d’appel a violé le
texte susvisé ;
Attendu que, statuant sur une instance en
bornage de leurs fonds contigus introduite PAR CES MOTIFS : CASSE ET
par M. Alfred Pirault contre M. Pierre ANNULE, dans toutes ses dispositions,
Pirault, l’arrêt attaqué (Rennes, 24 juin l’arrêt rendu le 24 juin 1987, entre les
1987), qui a fixé la limite séparative des parties, par la cour d’appel de Rennes ;
propriétés selon les indications de l’expert, remet, en conséquence, la cause et les
a écarté l’exception de prescription parties dans l’état où elles se trouvaient
acquisitive présentée par M. Alfred Pirault avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les
en retenant qu’il n’était pas fondé à se renvoie devant la cour d’appel de Caen

Cass. civ. 3ème, 17 oct. 2007, n° 06-17.220, Bull. civ. III, n° 180.

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en- Attendu que les consorts Z... font grief à
Provence, 29 mars 2006) que par acte du 12 l’arrêt d’accueillir cette demande alors,
décembre 1931, Mme Berthe X... a acquis selon le moyen :
de Mme Y... la parcelle de terre HL 45 ; que 1°/que le jeu de la prescription acquisitive
par acte notarié du 3 décembre 1980, suppose l’accomplissement d’actes
intitulé notoriété prescriptive », M. Jean Z... matériels d’usage ou de jouissance de la
a fait constater qu’il avait acquis cette chose, manifestant l’exercice d’une
parcelle par prescription trentenaire ; que le possession réelle ; que les actes
18 avril 2000 Mme Élisabeth X..., veuve d’exploitation d’une parcelle, notamment la
A... et Mme Juliette B..., veuve X..., mise en culture des terres et les plantations
héritières de Mme Berthe X..., ont assigné d’arbres, caractérisent, de manière non
M. Jean Z..., aux droits duquel se trouve équivoque, l’intention de l’exploitant de se
M. Daniel Z..., et Mme Rose Z..., son comporter comme le propriétaire des lieux ;
épouse, afin d’être déclarées seules qu’en décidant néanmoins que les actes
propriétaires de la parcelle HL 45 ; d’exploitation réalisés, pendant plus de

30
trente ans, par M. Z... sur la parcelle de considéré que comme un détenteur précaire,
Mme X..., tels que la culture de divers fruits, que si les consorts Z... établissaient avoir
la plantation des arbres fruitiers, l’entretien réalisé depuis plus de trente ans un certain
des oliviers et l’installation d’un système nombre d’actes d’exploitation sur la
d’arrosage, ne caractérisaient pas sa volonté parcelle, ces actes ne caractérisaient pas la
manifeste de se comporter comme le volonté de se comporter en tant que
propriétaire de la parcelle, pour en déduire propriétaires, dans la mesure où ils
qu’il ne pouvait se prévaloir de la pouvaient avoir été effectués à titre de
prescription acquisitive, la cour d’appel a détenteurs précaires, que l’interversion de
violé l’article 2229 et 2238 du code civil ; titre n’était intervenue qu’au jour où M. Z...
2°/qu’il est toujours possible de prescrire avait clairement fait connaître qu’il se
contre un titre ; qu’en décidant néanmoins considérait comme propriétaire, à savoir au
que le titre de propriété de Mme Berthe X... jour de la publication de l’acte notarié en
étant antérieur à la possession invoquée par date du 3 décembre 1980, soit le 27
M. Z..., les consorts X... avaient la preuve novembre 1981, la cour d’appel a déduit
du droit le meilleur et devaient être déclarés exactement de ces motifs, sans adopter ceux
seuls propriétaires de la parcelle litigieuse contraires du jugement confirmé, que le
conformément à leur titre, la cour d’appel a point de départ de la prescription acquisitive
violé l’article 712 du code civil ; trentenaire devant être fixé à cette date et
alors qu’au jour de l’assignation moins de
Mais attendu qu’ayant retenu à bon droit trente années s’étaient écoulées, les
que le détenteur précaire ne pouvait consorts Z... ne pouvaient se prévaloir de la
prescrire que si le titre de sa possession se prescription acquisitive ; D’où il suit que le
trouvait interverti notamment par la moyen n’est pas fondé ;
contradiction qu’il avait opposée au droit du
propriétaire, et constaté que M. Z... qui PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi
s’était vu confier la parcelle par M. C..., ;
époux de Mme Berthe X..., ne pouvait être

Cass. civ. 3ème, 20 fév. 2013, D. 2013, p.1531, note A. TADROS.

Sur le moyen unique : Vu l’article 2229 du pouvant être retenue avec suffisamment de
code civil dans sa rédaction antérieure à la certitude la période de 1934 à 1948 ;
loi du 17 juin 2008 ; Qu’en statuant ainsi, alors que la possession
Attendu, selon l’arrêt attaqué, (Papeete, 9 légale utile pour prescrire ne peut s’établir à
décembre 2010) que les consorts X... ont l’origine que par des actes matériels
assigné la Polynésie française pour se voir d’occupation réelle et se conserve tant que
déclarer propriétaires, par prescription le cours n’en est pas interrompu ou
acquisitive, des parcelles cadastrées n° 14 et suspendu, la cour d’appel, qui n’a pas
15 dénommées « la terre Atararo » ; recherché si la possession des consorts X...
Attendu que pour rejeter la demande et ne s’était pas poursuivie au-delà de 1948
constater que cette terre appartient à la par la seule intention, sans être interrompue
Polynésie française, l’arrêt retient qu’aucun avant l’expiration du délai de prescription
fait matériel d’occupation effective n’a été par un acte ou un fait contraire, n’a pas
constaté au moment du transport sur les donné de base légale à sa décision ;
lieux en 2007 et que les témoignages PAR CES MOTIFS :
produits n’étaient pas suffisamment CASSE ET ANNULE, dans toutes ses
probants pour établir une possession de dispositions, l’arrêt rendu le 9 décembre
trente ans par les consorts X..., seule 2010, entre les parties, par la cour d’appel

31
de Papeete ; remet, en conséquence, la Vu l’article 700 du code de procédure
cause et les parties dans l’état où elles se civile, condamne la Polynésie française à
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait payer aux consorts X... la somme de 2 500
droit, les renvoie devant la cour d’appel de euros ; rejette la demande de la Polynésie
Papeete, autrement composée ; française ;
Condamne la Polynésie française aux
dépens ;

Cass. civ. 3ème, 17 Février 2015, n° pourvoi 13-26678

Sur le moyen unique : 2°/qu’en énonçant, pour retenir que les


consorts Y... – Z... avaient acquis par
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, prescription les empiétements réalisés par
12 septembre 2013), que, se plaignant les fondations de leurs constructions, la
d’empiétements sur la parcelle leur cour d’appel a énoncé que l’empiétement
appartenant, M. et Mme X... ont, après réalisé par les fondations était « manifeste
expertise, assigné en destruction des pour les précédents propriétaires qui ne
constructions réalisées M. Y... et Mme Z... pouvaient ignorer que les fondations telles
(les consorts Y... – Z...) propriétaires des qu’elles se réalisaient à l’époque
parcelles voisines ; que ces derniers se sont débordaient du mur de construction » ; qu’il
prévalus de la prescription acquisitive ; ressort des constatations de l’arrêt que si les
fondations débordaient habituellement le
Attendu que M. et Mme X... font grief à mur de construction, elles devaient
l’arrêt de rejeter leur demande, alors, selon cependant respecter la limite séparative des
le moyen : fonds, de sorte que c’est le mur de
construction qui était édifié en retrait de la
1°/que pour pouvoir prescrire, la possession ligne séparative et non les fondations qui
doit être continue, paisible, publique, non débordaient cette dernière ; qu’en retenant
équivoque et à titre de propriétaire ; que que l’habituel débordement des fondations
pour retenir que les consorts Y... – Z... justifiait l’empiétement sur le fonds voisin,
avaient acquis par prescription les quand il ne justifiait que le retrait du mur de
empiétements réalisés par les fondations de construction au regard de la limite
leurs constructions, la cour d’appel a retenu séparative, la cour d’appel n’a pas tiré les
que les fondations « ne sont pas toutes conséquences légales de ses propres
enterrées » et étaient « encore apparentes au constatations et a violé l’article 544 du code
jour de l’expertise » ; qu’en ne recherchant civil ;
pas, ainsi qu’il le lui était demandé, depuis 3°/qu’en déduisant de ce que M. et Mme
quand elles étaient apparentes, et X... savaient que les fondations débordaient
notamment si elles n’avaient pas été généralement les constructions, qu’ils
excavées et rendues apparentes en divers connaissaient leur emplacement effectif de
points de sondage à la demande de l’expert, sorte que les consorts Y... – Z... avaient pu
de façon seulement contemporaine à prescrire, la cour d’appel a violé les
l’expertise, la cour d’appel a privé sa articles 2258 et suivants du code civil ;
décision de base légale au regard des 4°/qu’en tout état de cause, en justifiant
articles 2258 et suivants du Code civil; l’usucapion des débordements litigieux par
des motifs généraux, la cour d’appel n’a pas

32
satisfait à son obligation de motiver et n’a que les consorts Y... – Z... avaient prescrit
pas satisfait aux exigences de l’article 455 l’assiette de ces empiétements, a ainsi
du code de procédure civile ; légalement justifié sa décision ;

Mais attendu qu’ayant constaté que les PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi
empiétements des fondations, intervenus ; Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
depuis les années 1930, étaient apparents et Vu l’article 700 du code de procédure
leur présence manifeste pour les auteurs de civile, condamne M. et Mme X... à payer la
M. et Mme X... au vu notamment des somme de 3 000 euros aux consorts Y...
techniques de construction de l’époque, la – Z...; rejette la demande de M. et
cour d’appel, qui en a exactement déduit Mme X...;

33
SEANCE 6
LA POSSESSION MOBILIERE
« EN FAIT DE MEUBLES, POSSESSION VAUT TITRE »

Lecture

W. DROSS, « Le singulier destin de l’article 2279 du Code civil », RTD civ. 2006, 27

Exercice

Voici une séance un peu plus légère qu’à l’accoutumée, mais qui doit vous permettre de vous aguerrir
sur l’exercice du commentaire d’arrêt. Je vous demande donc, en vous mettant dans les conditions
les plus proches de l’examen, de rédiger intégralement un commentaire de l’arrêt ci-dessous.
L’objectif est de vous tester sur cet exercice, en temps limité (3h maximum), en essayant de ne faire
appel qu’à vos connaissances, sans document autre que votre Code civil.

L’objectif de ce travail est de vous tester sur l’exercice et de faire vous-même le point sur ce qui vous
pose problème afin d’identifier les difficultés et d’en discuter, le cas échéant, avec votre chargé de TD
ou moi-même lors du cours.

34
Civ. 1re, 9 janvier 1996, JCP G., 1999, I, 3972, obs. H. PERINET-MARQUET

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que M. Ustinov fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 14 juin 1993) d'avoir déclaré M. Guillot
propriétaire d'une automobile de collection de marque Hispano-Suiza, détournée à son préjudice, et
acquise par M. Guillot auprès d'un garagiste ; qu'il est reproché à la cour d'appel, d'une part, de ne pas
avoir recherché si M. Guillot ne s'était pas volontairement dépossédé en s'abstenant de s'opposer à la
demande de M. Ustinov en restitution de l'automobile, placée sous autorité de justice pendant l'instance
pénale, d'autre part, d'avoir fait prévaloir la possession du tiers acquéreur sur le droit du propriétaire
d'origine remis en possession par une décision de justice, l'arrêt ayant ainsi méconnu l'article 2279 du
Code civil et inversé la charge de la preuve en faisant bénéficier le tiers acquéreur d'une présomption de
bonne foi ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés du jugement, la cour d'appel a souverainement retenu
que M. Guillot était acquéreur de bonne foi et que sa dépossession avait été involontaire, du fait de la
décision de saisie prise pendant l'information pénale ; qu'elle en a exactement déduit qu'il était demeuré
en possession de l'automobile, que cette possession, exempte de vices, avait eu pour effet de lui conférer
la propriété de l'automobile, et que M. Ustinov, victime d'un abus de confiance et non d'un vol, ne
disposait pas de l'action prévue par l'article 2280 du Code civil pour obtenir la restitution en remboursant
le prix payé par M. Guillot ;

Que la cour d'appel a ainsi, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision ; PAR
CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

35
SÉANCE 7
INTERROGATION ECRITE

Exercices
Pour cette séance qui sera consacrée à l’interrogation écrite, vous devez
avoir relu votre cours et la méthodologie du commentaire d’arrêt.

36
SÉANCE 8
L’ACCESSION IMMOBILIÈRE

Lectures

J.-P. BERTREL, « L’accession artificielle immobilière », RTD civ. 1994, 737


P. HILT, « La date de l’effet de l’accession dans les baux immobiliers, plaidoyer pour
l’accession différée », JCP G, 2003, I, 183
Th. LAMARQUE, « L’accession différée : une nouvelle approche des grandes
classifications », RTD civ. 2006, 2.

Exercices
1/Pour chaque arrêt de la fiche, vous devez pouvoir présenter le sens, la valeur et la
portée de la décision. Vous n’êtes pas nécessairement obligés de formaliser une fiche
d’arrêt, même s’il est vivement conseillé de le faire.

2/Vous rédigerez intégralement un commentaire de l’arrêt de la troisième chambre


civile du 1 juin 2010 (dernier arrêt de la plaquette)

37
Cass. civ. 1re, 18 juin 1970, D. 1970, 516, note A.B..

Sur le moyen unique, pris en sa que partiellement les factures produites


première branche : par Hermas, alors que, la contribution
Attendu qu’il résulte des énonciations de la femme aux charges du ménage
de l’arrêt attaque que Jean-Marie n’étant pas de nature à empêcher un
Hermas a épousé Henriette Michel, le 7 règlement de comptes ultérieur,
avril 1949, leur union ayant été lorsqu’il s’agit d’une dépense non
précédée d’un contrat portant adoption susceptible d’évaluation quotidienne,
du régime de la séparation de biens : telle que la construction d’un logement,
que, pendant le mariage, Hermas a fait et le contrat de mariage ne prévoyant
faire d’importants travaux sur un nullement la centralisation entre les
immeuble indivis entre sa femme, sa mains du mari de cette contribution de
belle-sœur et sa belle-mère ; que, le la femme et, bien au contraire, chacun
divorce ayant été prononcé entre les des époux étant réputé propriétaire des
époux par jugement du 21 mars 1958, il fonds en sa possession, il aurait dû être
a réclamé le remboursement de présumé que les dépenses faites par l’un
diverses sommes ayant servi au des époux, en dehors des charges
paiement des travaux ; que la cour courantes du ménage, l’avaient été avec
d’appel a décidé qu’Hermas ne pouvait des deniers lui appartenant jusqu’à
se prévaloir des dispositions de preuve du contraire, qu’il incombait, en
l’article 555 du Code civil, ne s’agissant conséquence, à l’autre époux
pas de constructions, mais de simples d’apporter ;
impenses ; attendu qu’il est reproché à Mais attendu, que la cour d’appel n’a
l’arrêt attaqué d’avoir ainsi statué, sans pas décidé que la contribution de la
s’expliquer sur les raisons pour femme aux charges du ménage rende
lesquelles il a refusé d’admettre impossible un règlement de comptes
l’existence de constructions, cette ultérieur ; qu’elle ne s’est pas non plus
notion s’étendant pourtant à des référée au contrat de mariage des époux
travaux de l’importance de ceux qui pour admettre qu’ » en dépit du régime
avaient été faits ; contractuel de séparation de biens,
Mais attendu que l’article 555 du Code Hermas disposait en principe de la
civil ne s’applique pas aux contribution de sa femme aux charges
améliorations qui ne constituent pas du ménage », ce qui résulte des
une chose nouvelle pouvant être l’objet dispositions mêmes du Code civil ;
d’une accession au profit du qu’enfin Hermas, n’ayant pas conclu
propriétaire du sol ; qu’en la cause, la devant les juges du second degré qu’aux
cour d’appel avait constaté qu’il termes de son contrat de mariage,
s’agissait « de travaux de rénovation et chacun des époux était réputé
de surélévation à exécuter sur la maison propriétaire des fonds en sa possession,
Michel » ; qu’elle a pu, dès lors, peut se prévaloir de cette clause devant
admettre « que les travaux auxquels a la Cour de cassation ; que le moyen n’est
contribué (Hermas) ne sauraient en donc pas fondé dans les deux premiers
aucune façon constituer une griefs de sa seconde branche et que,
construction au sens de l’article 555 du dans la troisième, il est nouveau et,
Code civil ; qu’ainsi le moyen ne peut mélangé de fait et de droit, a ce titre
qu’être rejeté en sa première branche ; irrecevable ;
Et sur la seconde branche du même Par ces motifs : Rejette le pourvoi formé
moyen : attendu qu’il est encore fait contre l’arrêt rendu, le 30 septembre
grief à l’arrêt attaqué de n’avoir retenu 1968, par la cour d’appel de Rio

38
Cass. civ. 3e, 6 nov. 1970, D. 1971, 395.

Sur le moyen unique : renonciation ne se présumant pas, le fait,


Vu les articles 551 et 555 du code civil ; par un bailleur, de convenir que les travaux
Attendu que les dispositions du premier de effectués dans l’immeuble ont été payés par
ces textes, suivant lesquelles tout ce qui les preneurs, dont ils demeureront la
s’unit et s’incorpore a la chose appartient au propriété, n’implique pas que ledit bailleur
propriétaire, ne sont pas d’ordre public et ait renoncé à se prévaloir des dispositions
peuvent être écartées par la renonciation légales qui lui permettent, soit de
expresse de celui-ci ; que les dispositions du demander l’enlèvement des ouvrages, soit
second régissent exclusivement le cas où le de les conserver moyennant indemnité ;
constructeur n’est pas, avec le propriétaire Attendu qu’en statuant par ces motifs, alors
du sol, dans les liens d’un contrat se qu’il lui appartenait de rechercher, par une
référant aux ouvrages élevés ; interprétation de la convention litigieuse,
Attendu qu’il résulte des énonciations des si, dans la commune intention des parties,
juges du fond que, par acte sous seings le propriétaire n’avait pas renoncé au
privés du 31 mars 1953, les époux David, bénéfice de l’accession pour l’ensemble des
locataires, et veuve Lemaignon, constructions qui étaient immeubles,
propriétaire, aux droits de laquelle est rendant, dans ce cas, inapplicables, pour
dame Ruhl, ont dressé un état des travaux leur sort, les dispositions de l’article 555 du
exécutés dans les lieux par les époux David Code civil, la cour d’appel n’a pas donné de
et sont convenus que ceux-ci en resteraient base légale à sa décision ;
propriétaires ; Par ces motifs : Casse et annule l’arrêt
Attendu que l’arrêt infirmatif attaqué, rendu entre les parties, par la cour d’appel
reconnait à dame Ruhl le droit d’exercer en de Rouen, le 12 décembre 1968 ; remet, en
fin de bail, une option en indiquant ceux conséquence, la cause et les parties au
des travaux qu’elle entend conserver à même et semblable état où elles étaient
charge par elle de payer l’indemnité prévue avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les
à l’article 555 du code civil au motif que, la renvoie devant la cour d’appel de Reims

Cass. civ. 3e, 10 nov. 1999, D. 2000, AJ, 77, ROUQUET.

Sur le deuxième moyen : indemnité pour la construction du


Attendu, selon l’arrêt attaqué hangar ;
(Montpellier, 17 septembre 1997), que Attendu que les consorts Pescatores
M. Bascunana ayant pris à bail, à font grief à l’arrêt d’accueillir la
compter du 1er janvier 1972, une demande, alors, selon le moyen, 1° que
parcelle de terre avec un atelier, à usage l’article 555 du Code civil relatif aux
commercial, appartenant aux consorts constructions édifiées sur un fonds n’est
Pescatores, a construit sur place un pas applicable lorsque le preneur avait
hangar ; que, postérieurement au été autorisé par le bailleur à effectuer
renouvellement du contrat de location des travaux ; que la cour d’appel a
en 1981, les bailleurs ont délivré au retenu que les preneurs avaient été
preneur, le 15 janvier 1993, un congé autorisés par les propriétaires à édifier
avec offre de renouvellement du bail qui les constructions litigieuses, de sorte
a été suivi d’une décision fixant le qu’en déclarant applicable l’article 555
montant du loyer ; qu’après cession du du Code civil aux rapports entre ces
fonds de commerce à la société Ayme parties, la cour d’appel n’a pas tiré les
pneus, les époux Bascunana ont assigné conséquences légales qui résultaient de
les propriétaires en paiement d’une ses propres constatations et a violé le
texte susvisé ; 2° qu’en toute hypothèse,

39
l’autorisation accordée par le bailleur Mais attendu, d’une part, que
au preneur de faire construire des l’autorisation du bailleur d’effectuer des
ouvrages sur les lieux loués est de travaux n’étant pas de nature à écarter
nature à écarter l’application de l’application de l’article 555 du Code
l’article 555 du Code civil lorsqu’à cette civil, à défaut d’une convention réglant
occasion, le sort de ces ouvrages a été le sort des constructions réalisées par le
prévu ; qu’en déclarant l’article 555 du locataire, la cour d’appel, qui a constaté
Code civil applicable aux rapports entre l’existence d’une autorisation des
les consorts Pescatores et les époux consorts Pescatores ainsi que l’absence
Bascunana, sans constater d’une convention, et qui n’était pas
préalablement que l’autorisation de tenue de procéder à une recherche qui
construire, selon elle accordée aux ne lui était pas demandée, a retenu à
preneurs, ne réglait pas, à cette bon droit que l’article 555 du Code civil
occasion, le sort des constructions devait régir les rapports entre les
litigieuses à l’issue du bail, la cour parties ;
d’appel a privé sa décision de base Attendu, d’autre part, qu’ayant retenu
légale au regard de l’article 555 du Code exactement qu’elle ne pouvait pas se
civil ; 3° que, subsidiairement, il substituer au propriétaire dans
n’appartient pas au juge de choisir à la l’exercice du choix des modalités de
place du propriétaire le mode de calcul calcul de l’indemnité due au
de l’indemnité due au titre des constructeur et relevé que les époux
constructions faites sur son fonds ; Bascunana réclamaient une somme
qu’après avoir relevé que les consorts égale à la valeur du coût des matériaux
Pescatores n’avaient pas exercé leur et de la main-d’œuvre et que les
choix des critères d’évaluation de consorts Pescatores n’avaient pas levé
l’indemnité due au titre des l’option accordée au propriétaire, la
constructions litigieuses, la cour d’appel cour d’appel a pu en déduire que le
a décidé que ces derniers devaient, à ce constructeur était fondé en sa
titre, aux époux Bascunana une somme demande ;
représentant le remboursement du coût D’où il suit que le moyen n’est pas
des matériaux et de la main-d’œuvre et fondé ;
a violé, de la sorte, les alinéas 3 et 4 de Sur le troisième moyen : (sans intérêt) ;
l’article 555 du Code civil ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le
pourvoi

Cass. civ. 3e, 21 novembre 1969, RTD civ. 1970, 391, obs. J.-D. BREDIN.

Sur le premier moyen : un terrain voisin, le propriétaire de ce


dernier ne peut poursuivre la démolition de
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt l’ouvrage contrevenant si le constructeur a
confirmatif attaqué d’avoir condamné agi de bonne foi ;
Samuel, ès qualités de syndic de la Mais attendu qu’aux termes de l’article 545
copropriété de l’îlot S 27 au Havre, dont le du Code civil, nul ne peut être contraint de
mur de l’immeuble empiète sur le fonds de céder sa propriété, si ce n’est pour cause
Monlon, à procéder, sous astreinte d’utilité publique ; que la cour d’appel,
comminatoire, a tous travaux de ayant retenu, pour accueillir la demande de
destruction pour faire cesser cette atteinte Monlon, qu’il s’agissait d’un empiètement
au droit de propriété de celui-ci, sans réalisé sans droit sur le terrain voisin, et
rechercher si le constructeur avait ou non non d’une construction édifiée sur le terrain
agi de bonne foi, alors que, même en cas de d’autrui dans les circonstances prévues a
simple empiètement d’une construction sur l’article 555 du Code civil, a, par ce seul

40
motif, et sans avoir à rechercher si le pour la première fois, en cause d’appel, à
constructeur était ou non de bonne foi, raison de son caractère conservatoire, c’est
légalement justifié sa décision ; que le à la condition que le tiers appelé à
premier moyen est sans fondement ; intervenir ne soit pas contraint d’accepter
Sur le second moyen : le débat judiciaire dans des conditions qui
Attendu qu’il est encore reproché à l’arrêt ne lui permettaient pas de défendre
d’avoir déclaré irrecevable la demande en pleinement ses droits ; qu’en retenant « que
intervention formée en instance d’appel par Royon faisait valoir, à juste titre, que sa
Samuel contre l’architecte Royon, qui avait mise en cause était tardive après le
été chargé de l’établissement et de la jugement du tribunal, qui avait ordonné
conception des plans de l’immeuble l’expertise, et après l’expertise elle-même
litigieux, alors, selon le pourvoi, qu’une où il n’a pu apporter ses observations », les
telle demande n’avait pas pour objet juges d’appel n’ont fait qu’appliquer le
d’obtenir une condamnation contre Royon, principe sus énoncé et ont légalement
mais seulement une déclaration d’arrêt justifié sur ce point leur décision ; qu’ainsi
commun ; le second moyen ne peut non plus être
Mais attendu que, si l’assignation en accueilli ;
déclaration d’arrêt commun peut être faite, Par ces motifs : rejette le pourvoi […]

Cass. civ. 1re, 1er décembre 1964, JCP 1965, II, 14 213, note ESMEIN

Sur le moyen unique : l’article 555 du Code civil ; alors qu’à défaut
Attendu qu’il résulte des énonciations de de disposition particulière dans le bail, le
l’arrêt confirmatif attaqué que les consorts droit commun devait être appliqué, et que
Pocchiola ont donné à bail à Ferouillet un le droit d’accession des bailleurs devait être
terrain nu sur lequel le preneur a édifié des reconnu dès l’instant de l’édification des
constructions qui ont été détruites par fait constructions ;
de guerre ;
Qu’un différend s’étant élevé entre les Mais attendu que si, en l’absence d’accord
contractants quant à l’attribution de des parties, le sort des constructions
l’indemnité de dommages de guerre, la cour élevées par le preneur est réglé à
d’appel a attribué cette indemnité aux l’expiration du bail par l’article 555,
ayants cause du preneur, les consorts alinéas 1 et 2 du Code civil, le preneur reste
Ferouillet ; propriétaire, pendant la durée de la
location, des constructions qu’il a édifiées
Attendu qu’il est fait grief aux juges d’appel sur le terrain du bailleur ; qu’ainsi le moyen
d’avoir ainsi décidé, au motif que la doit être écarté ;
prétention des bailleurs à se prévaloir de Par ces motifs : Rejette le pourvoi formé
l’accession au fur et à mesure de contre l’arrêt rendu le 18 mars 1958 par la
l’édification des constructions est en cour d’appel d’Aix-en-Provence.
opposition avec l’interprétation
couramment admise en jurisprudence de

Cass. civ. 3e, 12 juillet 2000, JCP G 2001, II, 10 537, note C. CHALAS

Sur le premier moyen : (Publication Attendu que s’il a été fait un état des
sans intérêt) ; lieux entre le bailleur et le preneur,
Sur le deuxième moyen : (Publication celui-ci doit rendre la chose telle qu’il l’a
sans intérêt) ; reçue, suivant cet état, excepté ce qui a
Mais sur le troisième moyen : péri ou a été dégradé par vétusté ou
Vu l’article 1730 du Code civil, force majeure ;
ensemble l’article 555 du même code ;

41
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Basse-
Terre, 18 mai 1998), que M. X..., Qu’en statuant ainsi, alors que le terme
propriétaire d’un terrain, a constitué de bonne foi, employé par l’article 555
avec un associé la Société frigorifique de du Code civil, s’entend par référence à
Bergevin (Sofriber) à laquelle il a donné l’article 550 de ce Code et ne vise que
le terrain à bail ; qu’il a perdu ensuite le celui qui possède comme propriétaire
contrôle de cette société ; qu’après qu’il en vertu d’un titre translatif de
ait donné congé à la locataire, la cour propriété dont il ignore le vice et que le
d’appel de Basse-Terre, par arrêt bailleur était en droit de réclamer la
irrévocable du 11 mars 1991, a décidé restitution de la chose louée en son état
que la Sofriber ne pouvait revendiquer primitif, la cour d’appel a violé les textes
le bénéfice des dispositions du décret du susvisés ;
30 septembre 1953 ; que la société
locataire a assigné M. X... en PAR CES MOTIFS : CASSE ET
indemnisation pour la plus-value ANNULE, mais seulement en ce qu’il a
donnée au terrain par les constructions décidé que la locataire était de bonne
réalisées par elle ; foi, l’arrêt rendu le 18 mai 1998, entre
Attendu que pour décider que le 4e les parties, par la cour d’appel de Basse-
alinéa de l’article 555 du Code civil Terre ; remet, en conséquence, quant à
devait s’appliquer, l’arrêt retient que la ce, la cause et les parties dans l’état où
société Sofriber ayant réalisé des elles se trouvaient avant ledit arrêt et,
constructions nouvelles sur une longue pour être fait droit, les renvoie devant la
période avec l’accord du propriétaire, cour d’appel de Basse-Terre, autrement
devait être considérée comme de bonne composée.
foi ;

Cass. civ. 3e, 5 décembre 2001, JCP G 2001, II, 10 189, note V. BONNET

Sur le moyen unique : que l’article 555 du Code civil doit


Vu l’article 545 du Code civil ; recevoir application s’agissant d’évincer
un tiers dont les plantations et ouvrages
Attendu que nul ne peut être contraint ont été faits à tort avec des matériaux lui
de céder sa propriété, si ce n’est pour appartenant sur le fonds des époux Y... ;
cause d’utilité publique ;
Qu’en statuant ainsi, alors que
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Pau, 24 l’article 555 du Code civil ne trouvant
novembre 1999), que, les époux X... ont pas application lorsqu’un propriétaire
édifié une clôture et planté une haie empiète sur la parcelle voisine, la cour
d’arbustes sur le fonds des époux Y..., à d’appel a violé le texte susvisé ;
60 cm de la ligne séparative ;
PAR CES MOTIFS :
Attendu que pour rejeter la demande de
démolition et condamner les consorts CASSE ET ANNULE, dans toutes ses
Y... à indemniser les consorts X... du dispositions, l’arrêt rendu le 24
coût des matériaux, des plantations et novembre 1999.
de main-d’œuvre, la cour d’appel retient

42
Cass. civ. 3e 8 octobre 1974, JCP 1975. II. 17 930, note THUILLIER

Vu leur connexité, joint les pourvois acte translatif de propriété constitue un


n° 73-11 036 et n° 73-12 464 ; Sur les juste titre, même si le a... n’est pas le
premiers moyens des deux pourvois : véritable propriétaire du terrain vendu,
Attendu qu’il résulte des énonciations du moment qu’il a pour but d’en
de l’arrêt attaqué que par acte du 3 juin transférer la propriété et que
1919, les époux X... ont vendu aux époux l’acquéreur a cru que celui qui lui a
Z... un terrain d’une contenance de transmis l’immeuble en était le
961,50 mètres carres dépendant d’une véritable propriétaire ; Qu’il est aussi
propriété sise a..., et ont en même soutenu que la cour d’appel ne pouvait
temps subrogé les acquéreurs dans sans contradiction, constater que les
l’effet de promesses de vente a eux consorts Y..., B..., et la société civile
consenties et portant sur deux parcelles immobilière, acquéreur, avaient voulu
d’une superficie totale de 181,50 mètres de bonne foi faire porter la vente sur la
carrés comprises entre le terrain, objet parcelle litigieuse, et pourtant refuser
de la vente, et le surplus de propriété de reconnaître a l’acte du 17 juin 1954 le
donnant rue marcadet ; Que, par acte caractère d’un juste titre ; Qu’il est enfin
des 30 mars, 3, 4 et 7 avril 1920, les reproché à l’arrêt d’avoir dénaturé les
époux Z... ont acquis ces deux parcelles ; termes clairs et précis de la clause dudit
Que néanmoins, n’ayant pas respecté acte portant désignation du bien vendu,
leurs engagements de paiement du prix qui englobait nécessairement les
du premier terrain, des décisions parcelles revendiquées en déclarant que
irrévocables ont prononcé, à leurs torts, rien dans le contenu de l’acte ne laissait
la résolution de la vente ; Que ce terrain, à penser que les consorts Y... ou leurs
devenu la propriété de Y..., a été cédé auteurs avaient pu à un moment
par sa veuve, suivant acte du 17 juin quelconque être propriétaires du
1954, a la société civile immobilière terrain litigieux ;
des..., laquelle a transmis une partie de
ses droits immobiliers a la société civile Mais attendu que par adoption des
immobilière marcadet-ordener ; Que, motifs non contraires des premiers
par acte du 26 juin 1965, les héritiers juges la cour d’appel a fait sien celui du
des époux Z..., se prétendant jugement qui a souverainement estimé
propriétaires des deux parcelles de que la société civile du... ne justifiait
181,50 mètres carrés, acquises par leurs d’acte de possession effective sur le
auteurs en 1920, ont fait assigner la terrain revendiqué qu’à compter de
société civile immobilière marcadet- mars 1960 de telle sorte que la
ordener, puis la société civile condition de durée de dix ans prévue à
immobilière des... la restitution de ces l’article 2265 du Code civil faisait
deux parcelles après démolition de défaut ;
toutes les constructions qui y auraient Que par ce seul motif, étranger aux
été édifiées sans droit et des dommages- critiques des pourvois, elle a légalement
intérêts ; Que les sociétés assignées ont justifié sa décision sur ce point ;
appelé en garantie les consorts Y... ; Qu’ainsi le premier moyen des deux
pourvois ne peut être accueilli ;
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt
attaqué d’avoir décidé que l’acte du 17 Et, sur le second moyen du pourvoi
juin 1954 ne constituait pas un juste n° 73-12 464 : [non reproduit]
titre et rejeté la prétention des sociétés Mais, sur le second moyen du pourvoi
civiles et des consorts Y... à l’usucapion n° 73-11 036 :
abrégée, alors, selon le moyen, qu’un Vu les articles 550 et 555 du code civil ;

43
Attendu que pour ordonner, par civil, ne constituait pas pour l’acquéreur
infirmation du jugement, la démolition un titre putatif lui permettant
de la construction élevée par les sociétés d’invoquer la qualité de tiers évincé de
civiles sur les parcelles restituées aux bonne foi au sens des articles susvisés,
consorts Z..., la cour d’appel énonce que la cour d’appel n’a pas donné de base
ce n’est pas une construction légale à la décision ;
indépendante et entière qui a été édifiée
sur le terrain des consorts Z..., « mais Par ces motifs : CASSE ET ANNULE,
seulement partie d’une construction mais seulement dans la limite du
beaucoup plus importante s’étendant second moyen du pourvoi n° 73-11 036,
sur un ou des terrains voisins et qu’il l’arrêt rendu entre les parties le 21
s’agit en l’espèce d’un empiètement, ce novembre 1972 par la cour d’appel de
qui exclut l’application des dispositions Paris ; Remet, en conséquence, quant à
de l’article 555 du Code civil », retenues ce, la cause et les parties au même et
par le tribunal ; semblable état ou elles étaient avant
Attendu qu’en statuant de la sorte, sans ledit arrêt et, pour être fait droit, les
rechercher si l’acte de vente du 17 juin renvoie devant la cour d’appel de
1954, qu’elle avait écarté comme juste Reims.
titre au sens de l’article 2265 du Code

Cass. civ. 3e, 1 juin 2010, RTD civ. 2010, 590, obs Th. REVET

Sur le moyen unique, qui est recevable : civil et décider de leur indemnisation en
Vu l’article 1730 du code civil, ensemble application de ces dispositions, l’arrêt
l’article 555 du même code ; retient qu’ils ont fait édifier des
constructions sur les terrains loués avec
Attendu que s’il a été fait un état des l’autorisation du bailleur ;
lieux entre le bailleur et le preneur,
celui-ci doit rendre la chose telle qu’il l’a Qu’en statuant ainsi, alors que le terme
reçue, suivant cet état, excepté ce qui a de bonne foi, employé par l’article 555
péri ou a été dégradé par vétusté ou du Code civil, s’entend par référence à
force majeure ; l’article 550 de ce code et ne vise que
celui qui possède comme propriétaire,
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Fort-de- en vertu d’un titre translatif de
France, 17 juillet 2008) que Mme X..., propriété dont il ignore le vice et que le
devenue propriétaire de parcelles de bailleur était en droit de réclamer la
terrain louées à diverses personnes, restitution de la chose louée en son état
dont MM. Y... et Z..., les a assignés pour primitif, la cour d’appel a violé les textes
obtenir paiement d’un arriéré de loyers, susvisés ;
la résiliation des baux, leur expulsion et
la remise en état des parcelles louées PAR CES MOTIFS :
aux frais des occupants, outre des CASSE ET ANNULE, mais seulement
dommages-intérêts pour le préjudice en ce qu’il a dit qu’Antoine Y... et Pierre
subi ; Z... étaient constructeurs de bonne foi,
avant dire droit sur l’évaluation de
Attendu que pour déclarer MM. Y... et l’indemnisation des constructions
Z... constructeurs de bonne foi au sens édifiées sur les terrains loués, ordonné
du 4e alinéa de l’article 555 du Code une expertise et débouté Mme X..

44
SÉANCE 9
SEANCE DE REVISION

Travail
Vous devez relire la méthodologie du commentaire d’arrêt et réaliser le commentaire de la
décision de la troisième chambre civile de la Cour de cassation rendue le 10 novembre 2016.

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 544 et 545 du code civil ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Bourges, 2 juillet 2015), que M. et Mme X..., propriétaires de
la parcelle AN 305, et M. et Mme Y..., propriétaires de la parcelle AN 151, ont assigné leur
voisin, M. Z..., propriétaire de la parcelle 462, en enlèvement d’un bâtiment constituant un
atelier-garage empiétant sur leurs fonds ;

Attendu que, pour ordonner la démolition totale du bâtiment, l’arrêt retient qu’il empiète sur
le fonds de M. et Mme X..., que les considérations de l’expert selon lequel l’empiétement
représenterait une bande d’une superficie de 0, 04 m 2 sont inopérantes au regard des
dispositions des articles 544 et 545 du code civil et que cet empiétement fonde la demande
de démolition de la construction litigieuse ;

Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si un rabotage du mur
n’était pas de nature à mettre fin à l’empiétement constaté, la cour d’appel n’a pas donné de
base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en qu’il condamne M. Z... à démolir le bâtiment édifié sur
sa parcelle 462, ... à Decize (58) et dit que cette démolition devra être achevée dans un délai
de six mois de la signification du présent arrêt.

45
METHODOLOGIE - 1
INTRODUCTION DU COMMENTAIRE D’ARRET

Le commentaire d’arrêt est considéré, dans les facultés de droit françaises, comme
l’exercice le plus formateur pour l’esprit du juriste. Souvent mal perçu par les étudiants qui le
redoutent, le commentaire d’arrêt constitue l’épreuve phare de nombreux examens, tout au
long des études de droit. Il convient donc de s’y exercer et de le maitriser et ça commence
maintenant !
Commenter une décision consiste à en apprécier le sens, la valeur et la portée.
Autrement dit, cela revient à porter une appréciation critique sur la façon dont les juges ont
interprété et appliqué la règle de droit et à rechercher l’influence éventuelle de leur décision
sur le droit positif.
Réaliser un commentaire suppose, au préalable, d’avoir bien lu et bien compris la
décision à commenter. Ce travail se réalise grâce à une (ou plusieurs) lecture attentive de la
décision et à la fiche d’arrêt.
La difficulté du commentaire est souvent exagérée par les étudiants, qui n’ont pas assez
confiance en eux, en leurs connaissances et en leur jugement critique. Si commenter une
décision peut sembler être un exercice inhabituel et inquiétant, il existe quelques éléments
simples qu’il convient de connaître et de mettre en œuvre. Le reste sera surtout une question
d’entrainement, plus que de talent.
Tout commentaire d’arrêt débute par une introduction. L’introduction du commentaire
d’arrêt est un élément souvent fort mal réalisé par les étudiants qui n’en perçoivent pas
l’importance et la rédige dans la précipitation. L’introduction constitue pourtant une
étape essentielle du devoir qui ne doit jamais être négligée. Elle est fondamentale
et peut à elle seule représenter jusqu’à un tiers de la note finale. En outre,
l’introduction obéit à une architecture qui demeure toujours la même. Il convient donc de
s’entrainer lire des décisions et à rédiger des introductions.

Une introduction de commentaire d’arrêt repose sur la fiche d’arrêt. Il faut donc savoir-
faire une fiche d’arrêt. L’introduction est toujours construite de la façon suivante :

46
1) L’accroche du commentaire

L’accroche est la phrase par laquelle débute le commentaire. Elle vise à placer la décision dans
son contexte et à la présenter.
Toute accroche comporte nécessairement l’indication de la formation de jugement (juridiction
et chambre) qui a rendu la décision, de la date de la décision et du domaine concerné par l’arrêt
(par exemple, la formation du contrat pour reprendre le thème du jour).
Il n’est pas inutile, pour replacer l’arrêt dans son contexte de souligner immédiatement le
contexte dans lequel l’arrêt intervient. Il faut d’emblée signifier au lecteur, lorsque c’est
possible, l’intérêt de la décision (par exemple lorsqu’il s’agit de la confirmation d’une position
antérieure critiquée ou ambiguë, expliquer que la Cour de cassation rend un arrêt attendu,
dans lequel elle confirme sa position). Il ne faut pas hésiter à immédiatement insister sur
l’importance de l’arrêt (s’il est important). Vous expliquerez dans le reste du devoir pourquoi
cette décision est importante.

2) Le rappel des faits

Pour bien présenter une décision, il convient d’en présenter les faits. Lorsque les faits sont
simples, il est possible de ne pas les rappeler en intégralité et de ne conserver que l’essentiel,
c’est-à-dire ce sur quoi porte l’arrêt. Vous les évoquez alors succinctement, mais précisément.
Lorsque, en revanche, les faits sont compliqués, il ne faut pas hésiter les rappeler
intégralement. Pensez aux dates indiquées dans l’arrêt, car elles jouent souvent un rôle
important !
Attention : vous ne devez pas utiliser les noms des parties (c’est-à-dire ceux indiqués par la
décision), mais leurs qualités. Par exemple, il ne faut pas évoquer « M. X » ou « Mme Y ». Vous
devez qualifier les parties, c’est-à-dire remplacer le nom des parties par leur qualité. Par
exemple « le vendeur » ou « le conjoint ».

3) La procédure

Vous retracez l’ensemble du processus judiciaire, en commençant par la saisine du juge de


première instance. Il importe de rappeler la qualité de chaque partie lors de chacune des phases
de saisine : qui est demandeur ? Qui est défendeur en première instance ? En appel ? Etc.
Il importe aussi de préciser les dates des décisions et le résultat de chacune d’entre elles :
quelles sont les juridictions saisies avant la présente ? Quelles sont les dates de rendu des
précédentes décisions de justice ?
Lorsque l’arrêt à commenter est une décision de Cour de cassation, il faut donner la solution
de la Cour d’appel. Le mieux est de le faire in extenso, car il faut être très précis, notamment
sur le vocabulaire utilisé par la Cour d’appel.
Dans les décisions de la Cour de cassation, les motifs de la Cour d’appel sont détaillés, il faut
les donner tout de suite, avant de signaler qu’un pourvoi est formé, car c’est précisément la
raison de ce pourvoi et le fondement des griefs formulés par celui qui saisit la Cour de
cassation.

47
. C’est, en outre, sur ces motifs uniquement (sauf question de pure droit) que la décision de la
Cour de cassation va se positionner. Ces motifs sont donc très importants et il vous faut donc
les restituer intégralement et fidèlement.

4) Les prétentions des parties

Il s’agit de retrouver, dans la décision, les arguments et les raisonnements de toutes les parties
s’il s’agit d’un arrêt devant une juridiction du fond.
S’il s’agit d’une décision de la Cour de cassation, il faut dire qui forme un pourvoi et quel est le
grief formulé contre la décision de la Cour d’appel. C’est la raison pour laquelle les motifs de la
Cour d’appel doivent avoir été donnés précisément avant !
Attention : cette étape est délicate ! Le risque est de mélanger les positions des partie ou des
juridictions. Il importe donc de faire preuve de rigueur, de procéder à une lecture attentive et
surtout de ne pas travailler dans la précipitation.

5) Le problème de droit

C’est l’enjeu essentiel de votre travail lors de la fiche d’arrêt.


Il convient, en termes clairs et précis, de formuler le problème juridique posé aux juges à
l’occasion du litige. C’est en confrontant les différents raisonnements développés par les
parties au litige que l’on retrouve la question de droit. Lorsque le problème est repéré, il faut
l’énoncer en utilisant des expressions et termes juridiques exacts, en se détachant des faits
propres au litige.
Par exemple : La Cour de cassation devait donc trancher la question suivante : quelle est la
sanction de la rétractation par le promettant d’une promesse unilatérale de vente pendant le
délai de la promesse et antérieurement à la levée de l’option ?

6) La réponse fournie par la juridiction

C’est l’étape la plus simple de votre travail. Vous reprenez le dispositif et les motifs retenus par
les magistrats, quelle que soit la juridiction. Le mieux est de la citer in extenso, pour ne rien
oublier.
Vous allez dire quelle est la solution adoptée par la juridiction ayant rendu la décision
commentée et en faveur de quelle partie se prononce la juridiction. Et également quels sont les
motifs retenus par la juridiction pour justifier sa décision. N’oubliez pas d’indiquer à la fois
la décision de la juridiction et sa motivation. Votre travail est d’analyser cette
motivation.
N’oubliez rien, car chaque détail du dispositif compte ! Il faut donc reprendre les visas et
l’intégralité des motifs, sans rien retirer. Le mieux est donc de la citer in extenso !
Une fois cela fait, vous allez devoir l’expliquer pour justifier votre plan. Ce sont les explications
apportées qui vous permettront de justifier votre plan mais aussi vous servir à amener votre
annonce pour ne pas que cela soit brutal (cf point 7 ci-dessous).

48
7) L’annonce de plan

L’annonce de plan est une phase délicate puisque c’est elle qui va présenter votre plan et donc
votre raisonnement. Jusque-là, vous aviez suivi l’arrêt. Vous l’avez, en principe, fidèlement
présenté.
Au moment de l’annonce de plan, c’est à vous de reprendre le fil, de reprendre la parole, car
vous devez justifier votre plan. L’annonce ne doit pas être brutale. Il faut savoir l’amener.
En principe, elle se fait en deux phases. On dit aussi qu’elle se réalise par vagues.
La première phase (préannonce) vous permet de souligner l’apport et les enjeux de la
solution. C’est ici que vous devez expliquer ce que dit la décision, comment et pourquoi elle le
dit comme cela. Il ne faut pas la négliger, car c’est cela qui permet d’aboutir à votre plan. Il
s’agit d’expliciter les points saillant de la décision que vous avez citée juste avant. En d’autres
termes, il s’agit de dire ce que cette solution signifie, sans hésiter à apporter votre vision, votre
explication du sens que cela a.
C’est essentiel, car on doit absolument tout savoir du sens, de la valeur et de la
portée de la décision dès l’introduction. Il convient donc de tout dire, sans le développer
(ça, cela relève des développements). Il n’y a aucun suspens, on sait tout, il restera, dans les
développements, à étayer ce que vous avez dit en introduction.

La seconde phase vous permet ensuite de réaliser l’annonce proprement dite. Il convient de
reprendre aussi fidèlement que possible les titres de vos intitulés de parties. Seuls I et II sont
annoncés dans l’introduction. L’annonce doit être aussi fluide que possible.

L’annonce doit être aussi fluide que possible, sans aucun changement de style.
Faites des phrases les plus simples possible, en évitant d’alourdir votre style par le recours à
des formules comme « dans un premier temps… dans un second temps » ou encore « nous
verrons d’abord, puis nous verrons ensuite… ». Outre leur lourdeur et leur aspect redondant,
ces formules rompent souvent avec le style, plus fluide utilisé avant. Essayé plutôt d’intégrer
votre annonce dans la dernière vague par une phrase simple qui témoigne de l’articulation de
votre plan. Le secret pour ne pas rompre le style et partir dans des choses lourdes, c’est ne de
pas utiliser le « nous » ou le « on » et de rester sur ce que dit ou fait la cour.
Par exemple :
« Si la Cour fait de l’adage infans conceptus un principe général (I) c’est avant tout parce qu’il
est de l’intérêt de l’enfant d’avoir, par anticipation de son existence et donc sa personnalité, un
patrimoine (II). »

49
MÉTHODOLOGIE - 2
LE CORPS DU COMMENTAIRE : LES
DÉVELOPPEMENTS

Même si elle a une importance majeure, l’introduction n’est pas tout le commentaire d’arrêt.
Il se compose également de développements ordonnés, structurés au sein d’un
plan qui, classiquement, s’établit en deux parties et deux sous-parties.
La décision doit être commentée dans chaque subdivision de votre devoir (I. A/B ; II. A’/B’),
faute de quoi vous êtes hors sujet sur la ou les parties qui ne traite pas directement de l’arrêt.
Pour cela il est nécessaire d’adopter un plan qui colle le plus possible au problème juridique
soulevé et résolu par la décision. Vous ne devez commenter que l’arrêt que l’on vous demande
de commenter et rien d’autre.
Dans le cadre du commentaire d’un arrêt de la Cour de cassation, faites attention de ne pas
confondre la position de la Cour d’appel avec la solution de la Cour de cassation. En outre,
l’arrêt de la Cour d’appel, s’il peut être abordé et évoqué par vos développements, ne doit pas
faire l’objet d’un commentaire dans une sous-partie et encore moins dans une partie entière.
Ce plan sera apparent jusqu’au deuxième niveau de titre (A/B), au-delà il est préférable de
fondre les subdivisions dans le corps du texte, mais chaque idée nouvelle pour le même
argument sera matérialisée par un retour à la ligne. Chaque nouvel argument sera matérialisé
par le saut d’une ligne.
Ne perdez jamais de vue que votre seul objectif est de présenter la décision et le
raisonnement du juge et donc qu’il faut impérativement vous faire comprendre.
Le lecteur ne doit jamais avoir à deviner, décrypter ou supposer quelque chose
dans votre présentation. Cela signifie qu’il faut être clair et précis.
Vous devez soigner votre écriture et votre orthographe. Vous devez également soigner
la présentation du devoir qui doit être aérée et agréable à lire. Il ne s’agit pas d’un détail, car il
ne faut pas oublier que si la forme n’est pas l’essentielle, elle est toujours au service du fond. Si
tel n’est pas le cas et que la forme laisse à désirer, vous rendez l’accès au fond du devoir plus
compliqué et vous risquez de perdre votre lecteur. Ne l’obligez pas à reformuler vos idées, cela
ne jouerait pas en votre faveur.

Architecture d’un plan de commentaire

I/ Intitulé du I
Le chapeau : Le chapeau du I est là pour annoncer le A et B qui vont suivre. Bien que le chapeau
ne soit le lieu de la démonstration, il est là pour annoncer le sens du raisonnement au lecteur.
Il faut, autant que possible reprendre les intitulés du A et B dans l’annonce qui conclue le
chapeau.

50
Le A et le B sont inscrits entre parenthèses dans l’annonce. Par exemple s’il convient
d’admettre l’élargissement du champ d’application de … (A), c’est au prix d’un resserrement
de la définition … (B).
A/ Intitulé du A
Il faut toujours repartir de l’arrêt lorsque l’on commence une sous-partie. Cela évite de trop
s’en éloigner et de glisser vers la dissertation.
La fin du A doit servir de transition pour passer vers le B. Il convient donc d’organiser la A afin
d’avoir le meilleur enchainement possible avec le B.

B/ Intitulé du B
Le B du I est une partie importante. C’est le cœur de votre développement avec le A du II. Il
faut donc y mettre les choses essentielles. Là encore, afin de ne pas risquer de perdre l’arrêt de
vu, il convient de commencer votre B en parlant de la décision à commenter.
Compte tenu de l’importance du B du I, il peut être plus long que le A. Ce n’est pas très grave,
pourvu que le déséquilibre ne soit pas non plus exagéré.
La fin du B sert de transition vers le II.

II/ Intitulé du II
Là encore il faut un chapeau qui annonce les A et B.

A/ Intitulé du A’
La structure du II est identique. On repartira de l’arrêt pour débuter la sous-partie.
Le A du II étant au cœur du devoir, il peut être de taille équivalente au B du I et donc être plus
long que le B du II.
Il faut aussi faire une transition vers le B.

B/ Intitulé du B’
Là encore il ne faut pas hésiter à reprendre l’arrêt pour commencer.
La fin du B peut servir à élargir le propos sur une autre application ou un autre domaine…C’est
ce que l’on appelle une « ouverture »

Il est inutile de rédiger une conclusion. L’ensemble du devoir (Introduction et


développements) suffit à exposer l’ensemble du raisonnement.

Conseils sur la formulation des intitulés

51
Chaque intitulé doit correspondre à une idée en lien direct avec l’arrêt objet du commentaire.
En outre, il est préférable que les intitulés « se répondent » c’est-à-dire qu’ils s’articulent les
uns avec les autres.
Un bon intitulé se doit avant toute chose d’être clair, précis et concis. Ne cherchez pas à
faire quelque chose de beau avant d’avoir atteint ces trois objectifs.
Comme pour la rédaction de l’ensemble du commentaire, la formulation des intitulés doit
rester sobre. Ne cherchez pas à faire quelque chose de pompeux ou d’alambiqué. Cela ne sert
à rien et vous risquez de perdre votre lecteur/correcteur. Un bon intitulé est un intitulé
simple et signifiant.
Les intitulés ne doivent pas contenir de verbe conjugués, ni de signe de ponctuation.

La réalisation du plan du commentaire

La difficulté de l’exercice de commentaire d’arrêt réside non seulement dans la rédaction du


devoir, qui doit être claire et précise, mais aussi et surtout dans l’élaboration du plan. À cet
égard, les directives suivantes peuvent être suivies :

• Si la décision se prononce sur plusieurs moyens répondant à autant de problèmes


juridiques distincts et que ces problèmes sont relatifs à la matière qui vous concerne,
la tâche est simple, il suffit de proposer des parties en fonction des problèmes
juridiques, au besoin en les regroupant, quand cela est possible, de façon à retomber
sur un plan en deux parties.

• Si la décision ne se prononce que sur un moyen ou si un seul problème vous semble


pertinent (les autres points de droit doivent être éliminés dans l’introduction), il est
souvent possible de procéder par scission du motif principal (c’est ce qu’on appelle
« l’attendu principal »). C’est la meilleure façon de coller à la décision et de ne pas
glisser vers une dissertation. Observez bien la manière dont la décision est rédigée. Il
faut ainsi prêter attention aux virgules et aux conjonctions de coordination (« et »,
« ou »). De part et d’autre se trouvent bien souvent des éléments (locutions) pouvant
être commentés distinctement et donc éventuellement faire l’objet d’une partie ou
d’une sous-partie. (On peut par exemple trouver la solution et son fondement, ou
encore la définition d’une notion juridique et ses conséquences ou son champ
d’application, etc…)

• Si le motif principal ne se laisse pas scinder, alors vous pouvez recourir à un plan type
(plan bateau) afin de replacer l’arrêt dans un contexte plus vaste. Il s’agit de solution
de secours que vous ne devez envisager que faute de pouvoir faire mieux. On pourra
alors éventuellement faire un plan logique du type sens/ portée, ou encore un plan

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chronologique (vous situez l’arrêt dans un courant jurisprudentiel) ou enfin un plan
distributif (vous comparez l’arrêt avec des solutions légales, des opinions doctrinales).

Rappels
En toutes hypothèses et quel que soit le plan réalisé, le commentaire doit faire
ressortir le sens, la valeur et la portée de la décision.

Le sens de la décision
Le sens de la décision exprime ce que la décision veut dire. Il s’agit ici de déterminer avec la
plus grande précision le sens des mots employés par la juridiction en lisant son attendu.
Chaque mot compte et a son importance.
Vous devez prêter attention au motif de cassation. En effet, les arrêts n’ont pas le même sens
selon le motif de cassation.

La valeur de la décision
La valeur de la décision revient à analyser le bien-fondé de la solution. Cela se réalise en
confrontant la solution au visa pour voir si cela correspond ou s’il y a des discordances.
Vous devez, s’agissant de la valeur, avoir un regard critique sur la décision. Attention, la
critique n’est pas nécessairement négative. Vous pouvez également voir des choses positives.
Il y en a toujours, car les juridictions visent toujours un objectif lorsqu’elles rendent une
décision. Mais attention, soyez prudents et humbles dans la formulation des critiques. Il ne
faut pas être péremptoire et votre critique doit être celle d’un technicien du droit et donc
reposer sur des arguments juridiques. Redisons-le, ce n’est pas parce qu’une décision est
donnée à commenter qu’elle est forcément mauvaise ! Appuyez-vous sur des données que vous
maitrisez et que vous pouvez donner avec précisions. Il ne faut pas inventer ni faire des
commentaires approximatifs.
Il est conseillé de lire systématiquement les textes cités dans l’arrêt de façon à éviter les
contresens, les oublis, et les confusions.
Attention, si vous utilisez les références de jurisprudence que vous trouvez sous les articles que
vous lisez dans les codes annotés, faits en sorte de ne faire référence qu’à ceux dont vous
connaissez les faits. En effet, si vous citez des décisions que vous ne connaissez pas, vous vous
exposez au risque que les décisions aient été rendues dans un tout autre contexte et ne puissent
servir votre raisonnement. Ne vous contentez donc pas du résumé. Lorsque cela est possible,
allez voir l’arrêt (lorsque vous commentez un arrêt à la maison par exemple).

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La portée de la décision
La portée de la décision consiste à vérifier comment elle se place dans la jurisprudence pour
voir comment elle va influencer le droit positif.
Est-ce un arrêt d’espèce ou de principe ? Est-ce une solution nouvelle ou non ? Le cas échéant,
est-ce un cas de figure qui ne s’était, jusque-là, pas présenté ou bien est-ce un cas connu qui
fait l’objet d’un revirement ? Que vient-elle apporter de plus, quel élément nouveau en ressort
(définition, précision…) ?

Attention : Vous devez garder à l’esprit que le commentaire d’arrêt n’est pas une
dissertation. Cette confusion des genres est la principale source d’échec des étudiants qui,
prenant prétexte du thème de la décision, dissertent sur ce thème sans jamais réellement parler
de l’arrêt et encore moins l’expliquer.
Ile commentaire ne consiste pas davantage à réciter son cours, car l’exercice est à finalité
pratique.
Vous ne devez parler que de l’arrêt et des connaissances que vous avez et qui y sont relatives.
On ne récite pas une partie du cours qui est en lien plus ou moins proche.
Il ne s’agit pas non plus d’une simple paraphrase de l’arrêt. Votre explication de l’arrêt, de ce
qui est dit est importante, mais elle se double de votre appréciation critique de juriste. Il y a
donc une plus-value attendue : vos connaissances en lien avec la décision et votre analyse
critique.
Pour éviter de glisser vers une dissertation ou la récitation de cours, il est utile
de repartir de l’arrêt au début de chaque sous-partie de votre commentaire.
Rattachez les motifs de la Cour de cassation au droit positif, aux critiques doctrinales et à tous
les développements que vous aurez vus en cours et que vous aurez lus à l’occasion de la
préparation des TD et qui sont en lien avec le sujet de l’arrêt.
L’entrainement est nécessaire pour parvenir à réaliser correctement l’exercice. Il
faut donc s’attacher à réaliser des introductions et des plans dès que l’occasion se présente.
Faites-le même sans forcément rédiger le commentaire. En tout état de cause, il ne faut pas
espérer parvenir à un résultat satisfaisant le jour de l’examen sans un minimum
d’entrainement durant les TD et chez vous. Cela sera d’autant plus vrai que l’épreuve de
l’examen se déroule en principe sur 3h. Il vous faut donc aussi avoir des repères temporels
pour vous organiser correctement le jour de l’épreuve.

Encore quelques conseils...

De façon générale, vous allez devoir faire passer votre pensée à votre lecteur. Il faut donc
impérativement faire preuve de pédagogie et de simplicité.
Le commentaire d’arrêt est un exercice universitaire au travers duquel on
montre que l’on a compris une décision et que l’on est capable de porter un regard
critique sur elle.

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Mais l’exercice sert également à montrer que l’on sait expliquer son point de vue,
que l’on sait extérioriser sa pensée en la rendant compréhensible par tout juriste
(car vous restez un technicien du droit) qui ignorerait tout de la question juridique abordée
dans l’arrêt.
C’est une part importante de l’exercice, car vous devez conserver en tête que tout juriste doit,
à un moment ou à un autre de sa carrière (quelle qu’elle soit), être en mesure d’expliquer le
fruit de sa réflexion : pour convaincre un juge quand on est avocat, pour rendre la justice quand
on est juge, pour éclairer les décideurs de l’entreprise quand on est juriste, pour conseiller son
client quand on est notaire ou avocat...
Le commentaire d’arrêt est donc un formidable outil d’apprentissage de ce point de vue.

N’ajoutez pas de la difficulté ! Parmi les idées reçues les plus fréquentes, les étudiants
pensent que le niveau exigé pour un commentaire doit nécessairement être très élevé. Cela
participe à renforcer la crainte de l’exercice et donc vos difficultés.
En réalité, le niveau attendu est souvent moindre que ce que vous croyez !!!
L’erreur commise par beaucoup d’étudiants consiste à croire que ce qui est attendu, ce sont des
idées géniales, des réflexions brillantes, des fulgurances.
Ce n’est pas le cas ! Les points distribués sur une copie sont le plus souvent attachés aux choses
simples, fondamentales, voire évidentes. Il faut savoir les dire et savoir le faire correctement et
de façon organisée. Soyez simple et clair.
De plus, il ne faut pas croire qu’il est exigé des étudiants qu’ils répondent absolument à toutes
les questions qu’ils soulèvent. Un commentaire qui pose de bonnes questions, sans y répondre
systématiquement, est déjà d’une grande qualité.

Ayez confiance en vous ! votre niveau est souvent bien meilleur que ce que vous pensez.
Très souvent, on constate que les étudiants raisonnent bien. Ce qui leur est difficile, par
manque d’habitude, d’entrainement, consiste extérioriser leur raisonnement. C’est la raison
pour laquelle il arrive que les notes obtenues ne reflètent pas toujours votre véritable niveau.
Apprenez à exprimer votre raisonnement de façon complète et précise. C’est
l’intérêt de travailler son écriture, son expression, afin de parvenir à aligner vos résultats sur
votre véritable niveau... L’entrainement doit évidemment se faire à l’écrit, mais vous pouvez
également le travailler plus régulièrement à l’oral, car si l’expression est différente, le processus
de formalisation est le même.

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