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Dans sa pièce de théâtre Les Justes, Albert Camus dit« Tout le monde

ment ; bien mentir, voilà ce qu’il faut. » Dans cette citation, nous observons tout
d’abord que le mensonge est universelle mais qu’il est aussi un art selon Camus.
Tout le monde doit mentir, voila ce qu’il faut.

Dans cette même optique, Voltaire déclare : « Le mensonge n'est un vice que
quand il fait du mal ; c'est une très grande vertu quand il fait du bien. Soyez
donc plus vertueux que jamais. Il faut mentir comme un diable, non pas
timidement, non pas pour un temps, mais hardiment et toujours. ». Cette
citation semble être une invitation à remettre en question les normes morales et à
reconnaître la nécessité parfois de mentir pour s'adapter à un environnement
social qui peut être injuste ou répressif. Elle pourrait être vue comme une
expression de la nécessité de lutter contre l'oppression en utilisant parfois des
moyens non conventionnels, y compris le mensonge, pour parvenir à un bien
plus grand, comme la liberté individuelle ou la justice sociale.

C’est pourquoi nous pouvons nous poser la question : « Dans quelles


circonstances un mensonge peut-il être considéré comme une "très grande vertu
ou non", et quels critères peuvent être utilisés pour évaluer sa justesse ? Doit-il
être utilisé tout le temps comme l’énonce voltaire ?».

Nous examinerons ces questions à la lumière du roman libertin du 18ème siècle de


Laclos, Les liaisons dangereuses, du drame romantique de Musset, Lorenzaccio
et des essais moderne d’Hannah Arendt Vérité en Politique et plus
particulièrement du Mensonge en politique.

Dans de nombreuses situations, le mensonge peut être perçu comme un


acte vertueux lorsqu'il est utilisé dans le but de protéger la sécurité ou l'intégrité
d'autrui. Celui-ci permet de sauver des vies dans certains cas ou bien préserver
l’intégrité physique d’un patient en médecine. Dans Lorenzaccio, la quête
initiale de Lorenzo est de sauver la ville de Florence de la tyrannie du Duc de
Florence, son cousin. Tel Janus, le dieu romain représenté par une statue à 2
visages, Lorenzo apparait au cœur du drame comme un personnage aux
multiples masques, un personnage qui se sert de ses masques pour faire croire et
s’approprier les faveurs du duc pour le détruire. Son patronyme fait en effet
l’objet d’une déclinaison infinie, tant la liste de ses caractéristiques est longue. Il
est à la fois Lorenzo, Lorenzaccio, Renzo, Lorenzetta... Pour faire croire, il lui
est alors nécessaire et naturel de mentir pour forger ses propres masques. Dans
cette œuvre, Lorenzo le fait que trop bien et ses mensonges semblent même le
perdre. En effet, à la fin de la pièce, Lorenzo ne se reconnait plus, il dit à l’acte 5
scène 7 : « Je suis plus creux et plus vide, qu’une statue de fer blanc ». Il semble
donc que même si le mensonge semble utile pour sauver des vies, il peut aussi
au contraire nous détruire.

Dans "Les Liaisons dangereuses" de Laclos, le mensonge est souvent


dépeint comme un outil puissant mais destructeur qui finit par causer des
dommages considérables aux personnes qui l'utilisent. Les personnages
principaux, la Marquise de Merteuil et le Vicomte de Valmont, maîtres
manipulateurs, sont eux-mêmes victimes des conséquences de leurs mensonges
et de leurs manipulations.

La Marquise de Merteuil, en particulier, est un exemple frappant de la manière


dont le mensonge peut finalement se retourner contre celui qui le pratique. Elle
est constamment engagée dans des intrigues complexes et des manipulations
pour maintenir son pouvoir et sa réputation. Cependant, à la fin du roman, ses
propres mensonges et trahisons sont révélés, ce qui entraîne sa chute sociale et
morale (Lettre 168, CLXVIII).

De même, le Vicomte de Valmont, bien qu'il semble initialement maîtriser le


mensonge et la manipulation, finit par être dépassé par ses propres jeux. Sa
réputation est ruinée et il subit des conséquences tragiques à cause de ses
mensonges et de ses manipulations.

Mais alors comment peut-on savoir si un mensonge est juste et peut être
considéré comme une grande vertu.

Dans la réflexion sur l'utilisation du mensonge, il est crucial d'adopter une


approche nuancée qui reconnaît à la fois les dangers et les circonstances
exceptionnelles où le mensonge peut être justifié. Premièrement, il est essentiel
de considérer les dangers associés à une utilisation systématique du mensonge
même si celui-ci a pour but d’aider. En effet, recourir constamment à la
tromperie peut mettre les trompeurs dans une position où ils doivent justifier des
actions qui contredisent leurs valeurs fondamentales. De plus, cela peut
également avoir un impact dévastateur sur la confiance dans les relations
interpersonnelles et éroder les fondements de la société. En effet, même si celui-
ci est utile et nécessaire, pour un autre il ne l’est pas forcément.

La politique échappe à ceci. En effet, comme nous avons l’habitude de le dire,


un bon politicien est un bon menteur. Comme le dit Hannah Arendt dans
Mensonge en Politique, les Etats Unis ont employé toutes les stratégies possibles
pour gagner la guerre du Vietnam. A partir de 1965, l’objectif principal fut « de
convaincre l’ennemi qu’il ne pourrait jamais parvenir à les vaincre » et
« d’éviter une défaite humiliante » (p.27). Le bien-être de la nation passe au
second plan. Seul compte « la réputation des Etats-Unis et leur Président ».
Nous pouvons alors nous dire que les Etats Unis prenait un risque en
s’engageant dans cette guerre. Cependant leur but 1er était de persuader le monde
de la capacité des Etats-Unis à venir en aide à un « petit pays arriéré » (p.29). Se
comporter comme une grande puissance, « tel fut le seul objectif poursuivi en
permanence ».

Cependant, dans certains cas, le mensonge peut être considéré comme un dernier
recours nécessaire dans la vie quotidienne. Dans ces circonstances, la moralité
du mensonge dépend largement des intentions derrière son utilisation, favorisant
les motivations altruistes et la protection des individus.

Enfin, bien que la philosophie de Voltaire encourageant l'utilisation


constante du mensonge puisse sembler séduisante dans certaines situations, elle
doit être examinée avec prudence. Une telle approche peut négliger les
conséquences morales et sociales négatives du mensonge.

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