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Dans cette pièce, Marivaux nous présente une jeune fille, moderne, qui ne veut pas que
sa vie soit bouleversée par un mariage malheureux. Son père lui laisse la liberté de choisir son
mari. D’où se produit un certain débat entre le cœur et la raison. Nous allons voir comment
Silvia et Dorante, personnages principaux de la pièce, sont déchirés entre leur amour et la
raison qui leur interdit une pareille mésalliance.
Le titre de la pièce dit assez sur cette dernière et explique son enjeu principal : le jeu
n'est qu'un simple travestissement devenant un ballet des personnages déguisés. Ce jeu
devient, pour Silvia et Dorante, un jeu sérieux, et pour Orgon et Mario, un divertissement
léger. Ceux-ci se réjouissent de mener le jeu, tandis que les valets sont contents de prendre la
place des maîtres. Le jeu permet un désordre du hasard favorable à la révélation de l'amour.
Nous pouvons bien dire que le hasard est l'origine de l'intrigue. Car c’est lui qui permet le jeu
et qui fait naître l'amour. Et Donc le rôle du hasard est primordial au déroulement de
l'intrigue.
Dès lors nous pouvons nous demander si le hasard est vraiment le seul
conducteur de l’action dans cette pièce. Afin de répondre à notre problématique et
d’aborder la thématique dans cette pièce de théâtre, nous allons tout d’abord étudier dans
quelle mesure le hasard favorise l’intrigue. Ensuite, nous allons aborder l’acceptation et le
refus du hasard comme décideur du sort des protagonistes. Et enfin nous allons décortiquer les
éléments de la fin heureuse que nous propose Marivaux dans sa comédie.
Littérature du XVIIIe siècle
Le Jeu de l’Amour et du Hasard, Marivaux
Leçon littéraire : Le hasard
Travail réalisé par : ABDELKRIMI Imane
Plan :
Développement :
Le hasard représente une composante primordiale dans l’exposition aussi que dans le
déroulement de cette pièce. Une composante qui se déclenche dès l’intitulé de la
comédie : Le Jeu de l’Amour et du Hasard notamment pour souligner son importance et sa
place. Il s’agit dans cette partie d’étudier les éléments qui permettent de comprendre
l’intérêt que porte la thématique étudiée à l’intrigue.
3. Un divertissement assuré
Si le hasard a donné naissance à l’amour et a permis la rencontre des deux valets qu’ils
n’avaient pas planifié. Il est essentiel de mentionner qu’il a assuré à Monsieur Orgon et à
Mario une source de divertissement et d’enjouement. Le père qui se trouve à l’origine de la
manipulation des autres personnages ressent une certaine satisfaction d’être omniscient de ce
qui se passe sur scène, de l’état d’avancement des choses et surtout de connaitre que les
évènements qui se produisent sont au service de son dessein défini au préalable à savoir le
mariage de Silvia et Dorante. Quant à Mario, il n’hésite pas à avouer son enjouement dès le
début « C’est une aventure qui ne saurait manquer de nous divertir, je veux me trouver au
début, et les agacer tous les deux. » (Acte I, Scène 4)
Pour le cas de Lisette et Arlequin, ils s’acceptent et ils s’aiment sans aucun désir de
changer quelque chose. Le hasard les a unis et ils ont subi « Lisette : Souvenez-vous qu’on
n’est pas les maitres de son sort » (Acte II, Scène 5). « Jurons-nous de nous aimer toujours en
dépit de toutes les fautes d’orthographe que vous aurez faites sur mon compte. » (Acte II,
Scène 5). Le hasard a permis à ces deux personnages une union et un amour sincère qui a
demeuré le même après avoir avouer leurs véritables identités. Ils n’ont exprimé aucun
désespoir après leurs confessions même s’ils ont tous les deux projeter de faire une fortune :
Lisette en croyant qu’il épousera Dorante et Arlequin en voulant épouser Silvia. Et ils se sont
contentés de dire : « Arlequin : Pardi oui, en changeant de nom, tu n’as pas changé de visage,
et tu sais bien que nous nous sommes promis fidélité en dépit de toutes les fautes
d’orthographe » pour que Lisette lui répond par : « va le mal n’est pas grand, consolons-nous ;
ne faisons semblant de rien, et n’apprêtons point à rire » (Acte III, Scène 6)
Les personnages ont éprouvé des réactions différentes au hasard qui les a unis et
auquel ils ont fini par subir. Entre satisfaction, risque et perturbation, Marivaux inscrit sa
comédie dans la fameuse fin heureuse d’où il me parait opportun de se demander dans quelle
mesure nous pouvons considérer l’amour qui régnait vers la fin de la pièce un amour sincère.
Fruit d’un hasard la pièce finit par l’union d’un couple de domestiques et d’un autre
couple de maitres. L’enjeu que met Marivaux en scène réside dans le fait de chercher la
sincérité d’un amour qui se déclenche par un hasard et s’alimente par un jeu.
Certes que le hasard a déclenché l’intrigue mais le jeu en étant aussi un fruit du hasard
la continuer à l’alimenter et à en rajouter d’autres éléments qui nous pousse à nous interroger
comment l’amour déguisé a servi l’amour vrai ? Jouer à aimer est un risque encouru par les
personnages qui s'y prêtent et dont les conséquences peuvent être fâcheuses. Dans les pièces
de Marivaux, ce jeu constitue la trame de l'action et installe un quiproquo qui sert à nourrir la
progression des événements. Le déguisement est défini par Pavis comme étant un «
Travestissement d'un personnage changeant d'identité, en même temps que de costume ou de
masque »1 ; sur un plan dramaturgique, « il est une technique fréquemment employée, en
particulier dans la comédie, pour produire toutes sortes de situations dramatiquement
intéressantes ». Se déguiser ce n'est pas seulement changer d'identité et/ou d'apparence, cela
peut être aussi un changement de condition. Si les moyens utilisés sont variés mais la finalité
reste la même puisqu'il s'agit de tromper l'autre ou les autres dans un but plus ou moins
louable.
Mais quelle que soit la forme adoptée, le déguisement qui est une dissimulation, fait
intervenir la dialectique de l'être et du paraitre puisque le personnage n'est pas perçu pour ce
qu'il est mais pour ce qu'il n'est pas ; c'est le jeu de l'illusion dont sont complices ou victimes
les autres personnages. Ainsi conçue, la structure de tout déguisement, physique ou verbal,
implique que le vrai soit du côté du paraitre : tout ce que dit le personnage déguisé est accepté
comme vrai, ou du moins comme possible, même si c'est un possible qui choque. Fondé donc
sur le hasard et le jeu dans quelle mesure cet amour pourrait être sincère ?
3. Un amour sincère
Dans les comédies de ses prédécesseurs, l'amour n'a jamais eu à lutter contre lui-
même, mais contre un obstacle extérieur. Marivaux rejette ce ressort traditionnel. Il écrit à ce
propos : « L'amour n'est en querelle qu'avec lui seul et finit par être heureux malgré lui.»
Ainsi l'hésitation naît elle des personnages eux-mêmes, jouets des préjugés sociaux. Si les
protagonistes du Jeu de l'amour et du hasard ont choisi à l'insu l'un de l'autre de se déguiser,
1
Pavis, Dictionnaire du théatre, Paris, Dunod, 1996 p : 83
Littérature du XVIIIe siècle
Le Jeu de l’Amour et du Hasard, Marivaux
Leçon littéraire : Le hasard
Travail réalisé par : ABDELKRIMI Imane
ce n'est pas pour leurrer le futur partenaire et construire ainsi une vie conjugale bâtie sur les
apparences. La motivation de chacun des deux est appelée à servir une cause bien plus
légitime : il s'agit, par le biais du déguisement, d'apprendre à connaitre et éventuellement à
aimer l'autre en faisant abstraction des attributs sociaux. En somme, c'est un déguisement qui
vise à éventer cet autre déguisement qu'est la dissimulation des âmes et qui était une pratique
courante au XVIII s i è c l e où les mariages étaient arrangés indépendamment de la volonté
des futurs époux. Silvia s'acharne contre une telle pratique et Dorante également aspire au
bonheur qu'assure un mariage bâti sur une sincérité et une transparence mutuelles. S'il recourt
au déguisement c'est parce qu'il sait « combien l'engagement qu'il va prendre est sérieux.
Ainsi que nous l'avons vu, bien que Marivaux ait rompu avec ses prédécesseurs, li n'en
demeure pas moins vrai qu'il a su redonner à la comédie une fraicheur à l'image des
personnages qu'il met en scène. Certes, ses personnages ne se connaissent pas avant le lever
du rideau ce qui ne les empêche pas de se découvrir et de s'aimer. En fait il s'agit de cœurs qui
s'éveillent à l'amour et qui nous font participer à toutes les étapes de cette éclosion du
sentiment amoureux. Ici ils ont décidé de se déguiser non pas pour se leurrer l'un l'autre mais
pour mieux connaître la personne avec laquelle ils vont se lier.
Les deux protagonistes se jouent la comédie de l'amour se trouvent donc pris au piège
de l'amour vrai, celui qu'aucun des deux n'avait envisagé. Et le hasard a permis de
sauvegarder l'ordre social. Est-ce àdire que l'on ne peut être attiré que par quelqu'un de la
même condition sociale que soi, indépendamment de toute autre considération ?
Outre cet aspect, Marivaux a réussi à faire de deux personnages, comiques dans leur
conception, des personnages touchants dans leur conflit suscité par les contradictions qu'ils
vivent. Tous deux souffrent de cet amour représenté comme une lutte contre soi- même et qui
se manifeste de façon inconsciente avant de se muer en souffrance.
Cette épreuve d'humilité pour Silvia, mais surtout pour Dorante n'aura été en fin de
compte qu'un jeu, celui que Silvia définit comme « un combat entre l'amour et la raison. »
Marivaux offre ainsi un plaisir nouveau et subtil : celui d'assister aux détours
qu'emprunte la passion pour se faire reconnaitre et admettre. Ce n'est pas le spectateur qui est
surpris, mais les personnages eux-mêmes qui, faisant la découverte de l’amour, hésitent plus
ou moins longtemps avant de se l’avouer et de l’avouer à l’autre.