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ELEMENTS DE CORRIGE TEXTE 6

INTRODUCTION

« Un infini de passions peut tenir dans dix minutes » : cette citation de Gustave
Flaubert fait écho à notre étude linéaire portant sur la première rencontre du chevalier
Des Grieux avec Manon Lescaut héroïne du roman écrit par l’Abbé Prévost.
De son vrai nom, Antoine-François Prévost, l’auteur est un écrivain, poète, journaliste,
traducteur et homme d’Eglise français.
Il est né en 1697 à Hesdin et meurt à Courteuil en 1763. « Manon Lescaut » est un
roman- mémoires qui fait partie des « Mémoires et aventures d’un homme de qualité
qui s’est retiré du monde », sept volumes au total rédigés entre 1728 et 1730.
Dans l’extrait soumis à notre étude, le chevalier Des Grieux est le narrateur, il nous
raconte de manière rétrospective sa première rencontre avec Manon Lescaut qui
marquera à jamais sa propre destinée.
On peut donc se poser la question suivante : comment le chevalier Des Grieux fait-il
de sa rencontre avec Manon Lescaut, un élément fondateur ?
Nous présenterons les trois mouvements de cet extrait, de la ligne 1 à 5 les
circonstances précises de la rencontre entre ces deux personnages, la fascination
ressentie par Des Grieux pour Manon lignes 5 à 12, puis étudierons les premières
paroles qu’ils ont échangées lignes 12 à 21.

Mouvement 1
Les circonstances de la rencontre

Ce premier mouvement nous donne d’ores et déjà des indications d’ordre


spatio-temporel sur cette rencontre. On apprend que le récit se déroule dans le Nord
de la France à Amiens. Le chevalier Des Grieux est le narrateur. Il intervient en
commentant ses actions passées. L’interjection « Hélas ! » (l.1) témoigne de son
jugement rétrospectif marqué par le regret. La phrase négative et exclamative qui suit
« Que ne le marquai-je un jour plus tôt ! » explicite la raison du remords : le choix du
jour du départ d’Amiens. Avant le récit même de l’événement, le narrateur procède à
une dramatisation visant à susciter l’intérêt de son auditeur et à souligner l’importance
de cet épisode. Il signifie que si son départ avait eu lieu un autre jour son destin aurait
été tout autre.
L’emploi du conditionnel passé ligne 2 « j’aurais porté » traduisant l’irréel du passé,
souligne le caractère irréversible des conséquences associées à la perte de
« l’innocence » (l.2). Il insiste sur le caractère funeste du choix de ce jour de départ
qu’il n’était pas en son pouvoir d’échapper à cette rencontre qu’il présente comme une
œuvre du destin.
Les précisions géographiques « Arras » (l.4) « l’hôtellerie » (l.4) et de nature spatio-
temporelle « la veille » (l.2) renforcent l’effet de réel et renvoient à la vie quotidienne
d’une ville de province.
La vue de l’arrivée du coche constitue une action de premier plan relatée au passé
simple alors que le participe présent « étant » (l.3) fait de la promenade de des Grieux
et de son ami Tiberge une action de second plan qui est ainsi interrompue.
Ils modifient leur trajet, comme l’indique le verbe de mouvement ligne 4 « nous le
suivîmes ». Cette mise en relief d’un événement en apparence anecdotique « pas
d’autre motif que la curiosité » (l.5) annonce qu’il s’agit en fait d’un événement
perturbateur.

Mouvement 2
La fascination de Des Grieux
Le récit de Des Grieux traduit l’agitation qui règne dans cette ville de province.
Les verbes au passé simple « il en sortit », « se retirèrent » (l.5) signalent l’apparition
de femmes descendant du coche, (la voiture de voyageurs tirée par les chevaux) et
dont la présence n’est qu’éphémère.
L’adverbe « aussitôt » renforce cet effet. Ces femmes disparaissent aussitôt.
A cette agitation s’oppose l’immobilité de Manon qui elle « s’arrêta » (l.6). Le narrateur,
Des Grieux caractérise Manon avec des termes mélioratifs qu’il renforce par des
adverbes d’intensité « fort jeune » « si charmante » (l.8).
Il ne s’attarde pas sur sa silhouette, ni sur les traits de son physique, seule est décrite
l’impression qu’elle lui suscite. Pour souligner le ravissement dont il est l’objet, Des
Grieux prend soin de mettre en évidence son innocence et sa tempérance, comme le
prouvent les négations « qui n’avais jamais pensé à la différence des sexes, ni regardé
une fille avec un peu d’attention » (l.8-9) et les tournures hyperboliques « tout le monde
admirait la sagesse et la retenue » (l.9 et 10) et « excessivement timide » (l.11).
La rencontre produit un véritable bouleversement et révèle la violence de sa passion.
Dès le premier regard porté sur elle, il la met sur un piédestal et se sent sous emprise.
Les termes « enflammé » « transport » et la périphrase « maîtresse de mon cœur »
(l.12) pour désigner Manon sont empruntés au registre tragique et augurent d’une
influence sur lui à la fois néfaste et inévitable.

Mouvement 3
Les premières paroles échangées
Après avoir été fasciné à la vue de Manon et après avoir opéré un
rapprochement physique, Des Grieux entame un dialogue avec la jeune femme. La
proposition circonstancielle de concession « quoiqu’elle fût encore moins âgée que
moi » (l.12) renvoie au comportement de Manon qui paraît plus précoce.
« Elle reçut mes politesses sans paraître embarrassée » (l.13) renforce cette idée de
maturité au contraire de Des Grieux qui lui n’a aucune expérience de l’amour et des
femmes.
Par le biais de paroles rapportées, Des Grieux s’enquiert de savoir ce qui amène
Manon à Amiens et découvre que ses parents l’envoient au couvent. Manon lui répond
« ingénument » (l. 14) cet adverbe permet à Des Grieux de souligner l’absence de
malice et la naïveté de Manon. Le lecteur peut mettre en doute cette idéalisation de
Manon par Des Grieux qui cherche rétrospectivement à donner des gages de la
sincérité de départ de la jeune fille.
Manon est sous domination d’une autorité familiale qui souhaite la voir devenir
religieuse. Des Grieux compare ce dessin parental à « un coup mortel pour mes
désirs » (l.16).
Ligne 18 « c’était malgré elle qu’on l’envoyait au couvent », le pronom indéfini « on »
paraît renvoyer à un groupe plus large que sa famille : c’est l’ensemble de la société
qui impose ce choix de la réclusion religieuse pour mettre un terme à son « penchant
au plaisir ». Elle apparaît comme une enfant ingérable dont l’éducation doit être stricte
et renforcée.
Seul contre tous, des Grieux est contraint d’agir et de combattre le dessein familial
opposé à la violente passion qui l’étreint. Il fait part à Manon de ses sentiments et de
son « amour naissant » (l.20). Le chevalier Des Grieux va inévitablement vers sa
destinée et confirme l’importance de cette rencontre et sa dimension tragique « dans
la suite tous ses malheurs et les miens » (l.19) suscitant ainsi l’empathie et la curiosité
de ses auditeurs et des lecteurs qui de fait attendent des péripéties nombreuses.

CONCLUSION

Pour conclure, nous allons répondre à notre problématique qui était de savoir comment
Des Grieux fait de sa rencontre avec Manon Lescaut un élément fondateur.
Des Grieux expose avec précision comment il rencontre Manon Lescaut, à quel point
il la trouve extraordinaire et de quelle manière elle influencera sa propre destinée.
Il évoque l’importance de leurs premiers échanges et bien qu’il sache que sa vie va
s’en trouver bouleversée, il s’engage passionnément dans cette union romanesque et
attise ainsi, et dès le début du roman, la curiosité des lecteurs.
L’Abbé Prévost n’est pas le seul à placer au centre de son roman des passions
amoureuses marginales ou interdites. En effet, Shakespeare dans sa tragédie Roméo
et Juliette, raconte également l’histoire d’un amour passionnel, chahuté et
inévitablement fatal.

Analyse linéaire N°6 - conclusion (Morgane)

Nous nous sommes demandé comment cette scène de première vue annonçait les malheurs issus de
la rencontre entre le chevalier et Manon Lescaut.
Nous avons donc vu que la rencontre entre les deux personnages était le fruit du hasard et de la
destinée. Des Grieux est alors tombé fou amoureux de Manon sans même la connaître. Il exprime
ensuite la puissance de ses tous nouveaux sentiments amoureux en échangeant quelques paroles
avec Manon. Tous ces éléments nous mettent donc en garde contre la passion funeste qui anime Des
Grieux.
Dans l’œuvre Notre-Dame de Paris, de Victor Hugo, l’auteur raconte également l’histoire de
personnages marginaux qui défient les bonnes mœurs de la société et de leur époque pour suivre
leurs passions. Ces deux romans poussent donc les lecteurs à s’interroger sur les sentiments qu’ils
éprouvent et ce que cela peut les amener à faire.

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