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Théorie de la mesure et probabilité

Professeur : MONTASSER HICHMANI

Année universitaire : 2023-2024


Table des matières

1 Tribus, applications mesurables et mesures 3


1.1 Tribus et Applications mesurables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.1.1 Tribus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.1.2 Applications mesurables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.1.3 Mesure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

2 Intégrale de Lebesgue 10

2
Chapitre 1

Tribus, applications mesurables et


mesures

1.1 Tribus et Applications mesurables


Dans toute la suite, E désigne un ensemble et on notera P(E) l’ensemble des parties de
E.

1.1.1 Tribus
Définition 1.1.1. Soit B ∈ P(E), on dit que B est une tribu sur E, si
1. ∅ ∈ B ,
2. A ∈ B alors A c ∈ B ,
3. si ( A n )n≥1 B alors ∪n≥1 A n ∈ B .

Proposition 1.1.1. soit B une tribu, alors on a


1. E ∈ B ,
2. ( A n )n≥1 ∈ B implique ∩n≥1 A n ∈ B ,
3. Si A, B ∈ B et A ∈ B alors A \ B ∈ B ,
4. A, B ∈ B alors A ∆ B ∈ B .

Démonstration. 1. On a E ∈ B donc E c = ∅ ∈ B .
2. Soit ( A n )n≥1 ∈ B ⇒ ∪n≥1 A nc ∈ B ⇒ (∪n≥1 A nc ) c ∈ B et ca implique que ∩n≥1 A n ∈ B .
3. Soit A, B ∈ B , alors B\ A = (E\ A ) ∩ B ∈ B .
4. Immédiat (en sachant que A ∆B = ( A \B) ∪ (B\ A )).

3
4 CHAPITRE 1. TRIBUS, APPLICATIONS MESURABLES ET MESURES

Example 1.1.1.

1. La tribu grossière B = ∅, E .
© ª

2. L’ensemble des parties P(E), et on appelle B = P(E) la topologie discréte .


3. Soit E = a, b, c, d , alors B = ∅, E, a, b , c, d est une tribu sur E.
© ª © © ª© ªª

Définition 1.1.2. Le couple (E, B ) est appelé un espace mesurable, et les elements de B sont
appelés les ensembles mesurables.

Proposition 1.1.2. Soit A ⊂ B , on appelle la tribu engendré par A et on la note σ( A ), la plus


petite tribu sur E contenant A , de plus A est l’intersection de toutes les tribus de parties de E
qui contiennent A .

Démonstration. Soit C l’ensemble des tribus sur E qui contiennent A , Alors

B= = B ⊂ E¯ ∀ D ∈ C ; B ∈ D
\ © ¯ ª
D ∈C

est une tribu qui contient A. Par définition, cette tribu est contenue dans toutes les tribus
contenant A.

Example 1.1.2. La tribu engendrée par un sous ensemble A de E est définie par σ( A ) =
∅, A, A c , E .
© ª

Proposition 1.1.3. Soit E1 un ensemble, (E2 , B2 ) un espace mesurable, et f : E1 → E2 une


application. L’ensemble définie par

f −1 (B2 ) = f −1 ( A ), A ∈ B2 ,
© ª

est une tribu sur E1 appelé tribu image reciproque de B2 par f .

Démonstration. - On a f −1 (∅) = ∅ ∈ B2 donc f −1 (B2 ) ̸= ∅.


- Soit C ∈ f −1 (B2 ), alors il existe A ∈ B2 , telque C = f −1 ( A ), alors A c ∈ B2 , donc
f −1 ( A c ) ∈ f −1 (B2 ), de plus on a f −1 ( A c ) = E1 \ f −1 ( A ), donc E1 \ f −1 ( A ) ∈ f −1 (B2 ),
et donc finalement on obtient C c ∈ f −1 (B2 ).
- Soit (C i ) i∈ I ∈ f −1 (B ) tel que I n’est pas finis, même pas dénombrable. On a, ∀ i ∈ I il
existe A ∈ B2 tel que C i = f −1 ( A ), alors on peut créer un suite d’ensemble (B i ) i∈ I ∈ B2
tq ∀ i ∈ I, C i = f −1 (B i ), et donc on a i∈ I B i ∈ B2 , de plus f −1 ( i∈ I B i ) ∈ f −1 (B2 ), or
S S

f −1 ( i∈ I B i ) = i∈ I f −1 (B i ) (à vérifier par l’étudiant), donc i∈ I f −1 (B i ) ∈ f −1 (B2 ), c’est


S S S

a dire i∈ I C i ∈ f −1 (B2 ), et donc f −1 (B2 ) est une tribu.


S
1.1. TRIBUS ET APPLICATIONS MESURABLES 5

Proposition 1.1.4. Soient (E, B ) un espace mesurable et A ⊂ E, l’ensemble B A = B ∩ A, B ⊂


©

B est une tribu sur A appelée la tribu induite par B sur A .


ª

Démonstration. En classe.

Définition 1.1.3. Considérons un espace topologique (E, T). La tribu borélienne B (E) sur E
est définie comme la tribu engendrée par les ensembles ouverts de (E, T), et les éléments de
B (E) sont appelés les boréliens.

Définition 1.1.4. On appelle droite achevée, la droite que l’on obtient en ajoutant les deux
éléments −∞ et +∞, et on la note par R = R ∪ − ∞, +∞ .
© ª

Proposition 1.1.5. Sur R muni de sa topologie usuelle, la tribu borélienne est engendré par
1. Les intervalles ouverts bornés.
2. La classe des intervalles de la forme (−∞, a) avec a ∈ R.
3. La classe des intervalles de la forme (−∞, a] avec a ∈ R.

Démonstration. En classe.

1.1.2 Applications mesurables


Définition 1.1.5. Soient (E1 , B1 ) et (E2 , B2 ) deux espaces mesurables. On dit qu’une appli-
cation f : E1 → E2 est mesurable si f −1 (B2 ) ⊂ B1 , c’est à dire ∀ A ∈ B2 , on a f −1 ( A ) ⊂ B1 .

Proposition 1.1.6. Soient (E1 , B1 ) et (E2 , B2 ) deux espaces mesurables, f une application de
E1 dans E2 et A un ensemble de parties sur E2 telle que σ( A ) = B2 . Alors f est mesurable si
et seulement si l’image réciproque de tout élément de A est dans B1 .

Corollary 1.1.1. Soit E1 et E2 deux espaces topologiques munis de leur tribus boréliennes,
alors toutes application continue de E1 dans E2 est mesurable.

Démonstration. On sait qu’une application est continue si et seulement si l’image réciproque


de toutes ouvert est ouverte. D’ou le resultat.

Proposition 1.1.7. On dit qu’une application f : (E, B ) → R est mesurable si


1. ∀a ∈ R, x ∈ E : f (x) ≤ a ∈ B ,
© ª

2. ∀a ∈ R, x ∈ E : f (x) < a ∈ B ,
© ª

3. ∀a ∈ R, x ∈ E : f (x) > a ∈ B ,
© ª

4. ∀a ∈ R, x ∈ E : f (x) ≥ a ∈ B .
© ª

Démonstration. Se déduit directement des deux proposition (1.1.5) et (1.1.6).


6 CHAPITRE 1. TRIBUS, APPLICATIONS MESURABLES ET MESURES

Stabilité

Proposition 1.1.8. — Soit (E1 , B1 ), (E2 , B2 ) et (E3 , B3 ) trois espaces mesurables, et f :


(E1 , B1 ) → (E2 , B2 ) et g : (E2 , B2 ) → (E3 , B3 ) deux applications mesurables, alors f ◦ g
est mesurable.
f
— Soit f , g : E → R deux application mesurables, alors f + g, f g, g , et | f | sont mesurables.

Démonstration. Exercice.

Proposition 1.1.9. 1. Soit ( f n )n≥0 une suite de fonctions mesurables sur (E, B ) à valeur
dans R. les fonctions su p f n , in f f n , lim su p f n et lim in f f n sont mesurables.
2. Soit ( f n )n≥0 une suite d’applications mesurables de E dans R tel que ( f n )n≥0 converge
simplement vers f , alors f est mesurable.

Démonstration. 1. On a ( f n )n≥a0 mesurables alors pour tout n ≥ 0 et pour tout a ∈ R,


l’ensemble f n ≤ a est dans B . Or su p f n ≤ a = n≥0 f n ≤ a , donc par la proposition
© ª © ª T © ª

(1.1.7), su p f n est mesurable. et on a in f f n = − su p − f n , donc in f f n est mesurable, et


par ce qui précède on deduit que lim su p f n et lim in f f n sont mesurables (lim in f f n =
© © ¯ ªª
supn∈N in f f k ¯ k ≥ n ).
2. On a lim su p f n = lim in f f n = f , donc f est mesurable.

1.1.3 Mesure
Définition 1.1.6. Soit (E, B ) un espace mesurable. Une mesure positive sur (E, B ) est une
application µ : E → R+ satisfaisant les conditions suivantes :

1. µ(;) = 0,
2. si ( A n )n≥0 est une suite d’éléments deux à deux disjoints (c’est-à-dire ∀ n ̸= m, A n ∩ A m =
; ), alors µ ¶
X
µ µ( A n ).
[
An =
n≥0 n≥0

Cette deuxième propriété est appelée la σ−additivité.


- Une mesure positive vérifiant µ(E ) < ∞ est dite finie.
- Si elle vérifie µ(E ) = 1, c’est une mesure de probabilité.
- Enfin, s’il existe une suite ( A n )n≥0 d’éléments de E telle que E = A n et pour tout n ∈ N,
S
n≥0
µ( A n ) < ∞, on dit que µ est σ-finie.

Définition 1.1.7. Un espace mesuré est défini comme le triplet (E, B , µ) où (E, B ) est un
espace mesurable, et µ une mesure positive sur (E, B ).
1.1. TRIBUS ET APPLICATIONS MESURABLES 7

Example 1.1.3. Le triplet (N, P (N), card) est un espace mesuré. Nous avons noté précédem-
ment que P (N) est une tribu sur N. De plus, les affirmations suivantes sont vérifiées :
1. Pour tout ensemble A dans P (N), le cardinal de A (c’est-à-dire le nombre d’éléments
dans A ) appartient à l’intervalle [0, +∞].
2. L’ensemble vide ; est de cardinal 0.
3. Si A 1 , A 2 , A 3 , . . . sont des ensembles dans P (N) qui sont deux a deux disjoints (c’est-à-
dire qu’ils n’ont pas d’éléments en commun), alors le cardinal de l’union des ensembles
A n est égale à la somme des cardinals des A n , et on écrit
µ ¶
[ X
card An = card( A n ).
n≥0 n≥0

Proposition 1.1.10. Une application µ : E → R+ est une mesure si et seulement si les trois
conditions suivantes sont satisfaites :
1. µ(;) = 0 ;
2. Si A et B sont des ensembles dans E qui sont disjoints, alors µ( A ∪ B) = µ( A ) + µ(B) ;
3. Pour toute suite croissante (B n )n≥0 d’éléments de E , µ ( n≥0 B n ) = limn→∞ µ(B n ).
S

Proposition 1.1.11. Soit (E, B , µ) un espace mesuré, et A et B deux parties de B tel que
B ⊂ A , alors
1. µ(B) ≤ µ( A ).
2. Si de plus µ( A ) < +∞, on a µ( A \ B) = µ( A ) − µ(B).

Démonstration. On a µ( A ) = µ( A \ B) + µ(B) (car A \ B et B sont disjoints). Donc µ(B) ≤ µ( A ).


Si µ( A ) < +∞, alors µ( A \ B) = µ( A ) − µ(B).

Proposition 1.1.12. Soit (E, B , µ) un espace mesuré. Si (B n )n≥0 est une famille d’éléments
de E , alors µ ( n≥0 B n ) ≤ n≥0 µ(B n ).
S P

Sk−1
Démonstration. Pour tout entier k ≥ 1, nous définissons B k = A k \ i =0
A i (où B0 = A 0 ). Les
ensembles B0 , B1 , B2 , . . . sont deux à deux disjoints. Nous avons alors :
µ ¶ µ ¶
µ An = µ
[ [
Bn
n≥0 n≥0

et on a les ensembles B0 , B1 , B2 , . . . sont deux à deux disjoints, donc


µ ¶
X
µ µ( B n )
[
Bn =
n≥0 n≥0
8 CHAPITRE 1. TRIBUS, APPLICATIONS MESURABLES ET MESURES

or pour chaque n, on a B n est inclus dans A n , donc on obtient

X X
µ( B n ) ≤ µ ( A n ),
n≥0 n≥0

et donc par conséquent µ ¶


X
µ µ( A n ).
[
Bn ≤
n≥0 n≥0

Proposition 1.1.13. Soit (E, B , µ) un espace mesuré. Si A 0 , A 1 , A 2 , . . . ∈ B sont tels que A 0 ⊂


A 1 ⊂ . . . ⊂ A n ⊂ A n+1 ⊂ . . . (resp A 0 ⊃ A 1 ⊃ . . . ⊃ A n ⊃ A n+1 ⊃ . . . ) et µ( A 0 ) ≤ +∞, alors on a
µ ( k≥0 A k ) = limn→∞ µ( A n ) resp µ ( k≥0 A k ) = limn→∞ µ( A n ).
S T

Démonstration. Pour tout entier k ≥ 1, nous définissons B k = A k \ A k−1 (c’est-à-dire B k = { x ∈


A k | x ∉ A k−1 }) et B0 = A 0 . Alors, nous avons les égalités suivantes :
à ! à !
X n
X
µ Ak = µ µ(B k ) = lim µ( B k )
[ [
Bk =
n→∞
k≥0 k≥0 k≥0 k=0

De plus, pour tout n, nous avons :

n
X
µ( B k ) = µ( A n )
k=0

Par conséquent, nous avons :


à !
µ A k = lim µ( A n ).
[
n→∞
k≥0

Pour tout entier k ≥ 1, nous définissons B k = A k \ A k+1 . Les ensembles B0 , B1 , B2 , . . . sont


deux à deux disjoints. Alors nous avons :
à ! à !
µ A k = µ( A 0 ) − µ
\ [
Bk
k≥0 k≥0

n
X
= µ( A 0 ) − lim µ( B k )
n→∞
k=0
à !
n
X
= lim µ( A 0 ) − µ( B k )
n→∞
k=0
à à !!
= lim µ( A 0 ) − µ
[
Bk
n→∞
0≤ k ≤ n

= lim µ( A n+1 ).
n→∞
1.1. TRIBUS ET APPLICATIONS MESURABLES 9

Theorem 1.1.1 (Mesure de Lebesgue). Il existe une unique mesure λ sur (R, B (R)) telle que :
1. λ([0, 1]) = 1,
2. Pour tout a ∈ R et tout B ∈ B (R), λ(a + B) = λ(B).
Cette mesure est appelée la mesure de Lebesgue sur R.

Example 1.1.4 (Mesure de Lebesgue d’un intervalle quelconque). Soient a ≤ b des éléments
de R. Nous avons :
λ([a, b]) = λ(]a − 1, b + 1[\(]a − 1, a[∪] b, b + 1[))

= λ(]a − 1, b + 1[) − λ(]a − 1, a[∪] b, b + 1[)

= λ(]a − 1, b + 1[) − λ(]a − 1, a[) − λ(] b, b + 1[)

= ( b + 1 − (a − 1)) − (a − (a − 1)) − ( b + 1 − b)

= b − a.

De même, λ([a, b[) = λ(]a, b]) = b − a.

Example 1.1.5 (Mesure d’un singleton). Soit x ∈ R. Pour tout entier n ≥ 1, on a x ⊂ [ x − n1 , x +


1
n ]. Donc, on a :

1 1 2
∀ n ≥ 1, λ({ x}) ≤ λ([ x − , x + ]) = .
n n n
Donc, λ({ x}) = 0.

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