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MÉDIAS
BUT 1
2022-2023
Frédéric Gai
COURS 2
AUX ORIGINES ÉTAIT
LA PRESSE
i.
Les médias et
l’opinion
Naissances d’un débat permanent
Un domaine large
■ Affronter l’histoire des médias, c’est entrer dans un domaine très large. On met un
pied dans l’histoire des idées, et dans les modalités de leurs diffusion. Elle est
dépendant de l’évolution des mentalités collectives, ce qui implique de s’interroger :
– Sur la culture des peuples et leur accès à l’information ;
– Sur les réactions du public ;
– Sur les évolutions politiques ;
– Sur les cadres économiques ;
– Sur les mutations techniques.
■ Démarrer avec la presse est donc un choix arbitraire, qui ne doit pas nier
qu’auparavant des pratiques médiatiques étaient en place.
Un problème de sources
En somme, nous avons peu de certitudes sur le débat d’idées qui précède
la publication.
L’opinion en question
Même s’ils caricaturent, les sondages existent peu, et nous n’avons pas accès
aux sensibilités d’une époque.
Très rapidement se posent des problèmes d’écart entre ce qui est rapporté
par la presse et ce qui relève de la réalité. L’exemple le plus marquant est le
Première Guerre mondiale.
Le rôle structurant des médias
■ Avec les Achéménides (Perse, 550-330 av. JC), puis avec Rome, Byzance, Athènes
et le monde musulman, on constate une domination progressive de l’écrit.
■ Ce constat se fait à partir d’une forte augmentation de la correspondance
personnelle, lettres qui vont d’ailleurs de plus en plus loin, et dont la diffusion est
organisée (poste).
■ La destinée des postes est inégale, notamment en Europe. Avec la chute des
empires, les liaisons routières deviennent parfois plus dangereuses… Le système
des postes ne commence qu’à se réorganiser réellement qu’au XIIIe siècle, avant de
devenir un structure nationale.
Culture et économie
■ Le XVIIIe siècle connaît un effet d’accélération, dépendant d’une forme de libéralisation, en France,
et de détente, suite à la fin du règne de Louis XIV (1715), mais aussi à l’aune de progrès
techniques et de développement de circuits de diffusion.
■ Tout au long du siècle, les médias écrits vont se développer : gazettes, mercures… sont ainsi
attendus des lecteurs, au même titre que les ouvrages de littérature.
■ La lecture de périodiques s’imposent dans le quotidien des élites françaises et européennes,
nouant ainsi un lien complexe avec la diffusion de la pensée des Lumières et de l’esprit
philosophique.
■ A la fin du siècle, l’expression de « quatrième pouvoir » sera ainsi répandue, mettant ainsi en doute
la force médiatique dans la préparation des grands mouvements politiques, à commencer par la
Révolution française.
■ Il ne faut pas omettre que cette histoire n’est pas linéaire et, d’un point de vue européen, la
Grande-Bretagne fait rapidement figure d’espace d’innovation sur différentes sujets : la morale, la
politique, l’économie, mais aussi la liberté d’expression. Le « continent », et ce même si la France
est la terre d’élection des Lumières, paraît « en retard ».
Le rôle du Royaume-Uni dans
l’évolution européenne
■ Le point de départ de la spécificité britannique se déroule en 1695, date à laquelle le Licensing
Act – une autorisation préalable de publication – est aboli. Il est alors possible de construire sa
propre entreprise de presse, sans autorisation politique. Naît rapidement le premier grand
quotidien: le Daily Current (1702-1735). En 1711, le Spectator parvient à publier à 3 000
exemplaires / jour.
■ Trois raisons expliquent l’avance britannique en matière de presse :
– Des luttes politiques, qui ont mené à une forme d’alternance, appelant débat, chaque parti
appelant alternativement à la liberté d’expression ;
– Un public formé au débat politique, notamment, et dans les grandes villes déjà très
alphabétisé. Les « cabinets de lecture » se développent à Londres, et on lit à voix haute les
journaux dans les cafés, indiquant une civilisation encore à la jonction de l’oral et de l’écrit.
– Des talents originaux et puissants, qui s’emparent de la presse, comme terrain d’expression
de premier ordre pour s’adresser au « peuple ». C’est le cas de deux illustres exemples :
Daniel Defoe (Robinson Crusoé, 1719) et Jonathan Swift (Voyages de Gulliver, 1726).
La France, entre élans et freins
■ Des hommes de presse deviennent des figures de proue de la Révolution française : Marat, Desmoulins,
Mirabeau, Brissot. Un des grands quotidiens de l’époque, Les Révolutions de Paris, appelle ouvertement
au soulèvement des peuples.
■ La production de titres explose en 1789. On dénombre alors à Paris de 140 à 190 périodiques dont 23
quotidiens. En comparaison, on dénombre pour l’année précédente 170 périodiques de langue française
dans un monde largement francophone. La révolution est aussi celle de la lecture, de l’information et de
l’opinion. De 1789 à 1793, tous les courants de pensée cohabitent , avant que la presse royaliste soit
interdite.
■ La presse installe alors trois thèmes fondateurs : le secret est détestable, notamment parce qu’il protège
des privilèges ; le soutien à la démocratie directe, notamment au travers de l’image de l’Antiquité ; la
presse doit être un acteur central de la révolution politique, notamment en lui offrant une teneur
narrative (accélération de l’Histoire).
■ Si la Révolution peut apparaître comme un mouvement collectif, voire de foules, il n’en reste pas moins
que la période interroge l’opinion publique, comme expression d’une « vague » incontrôlable, spontanée.
Il est peut-être en charge de la presse de la réguler, en lui substituant la notion d’« esprit public », qui va
miser sur l’unité et l’organisation.