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Les Réformes Administratives Et Financières
Les Réformes Administratives Et Financières
ÉDOUARD PHILIPPE
JEAN-LUC PISSALOUX
LISTE DES ABRÉVIATIONS UTILISÉES
L’administration
La réforme administrative
(1) Cité par Charles Debbasch et Marcel Pinet dans Les grands textes administratifs et dans
L’histoire de la fonction publique en France, t. 3, M. Pinet (dir.), p. 277.
introduction 25
(2) P. Gibert et J.-C. Thoenig, La modernisation de l’État, une promesse trahie ?, Paris, Classiques
Garnier, 2019, p. 54.
(3) In J. Chevallier, R. Drai et F. Rangeon, Communication administration-administrés, Paris,
PUF, 1983.
(4) M.-O. Baruch, « Le cercle ou la spirale ? Remarques en forme de conclusion », RFAP,
Généalogies de la réforme de l’État, M.-O. Baruch et Ph. Bezes (coord.), n° 120, 2006.
(5) B. Jobert et P. Muller, L’État en action, politiques publiques et corporatisme, Paris, Presses
universitaires de France, 1987 ; P. Muller et Y. Surel, L’analyse des politiques publiques, Paris,
Montchrestien, 2000.
(6) M. Weber, Économie et société, 1922, Paris, Plon, 1971.
26 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
Réforme et révolution
(9) P. Muller, « Esquisse d’une théorie du changement dans l’action publique : structures,
acteurs et cadres cognitifs », Revue française de science politique, (1) 2005.
(10) Par exemple : M. Crozier, Comment réformer l’État ? Trois pays, trois stratégies : Suède,
Japon, États-Unis, Rapport au ministre de la fonction publique et des réformes administratives, Paris,
introduction 31
La Documentation française, 1988 ; S. Trosa, Moderniser l’administration, comment font les autres ?,
Paris, Éd. d’Organisation, 1995 ; H. Guillaume, G. Dureau et F. Silvent, Mission d’analyse com-
parative des systèmes de gestion de la performance et de leur articulation sur le budget de l’État,
Inspection générale des finances, 2000.
(11) R. Aron, Entretiens, avec J.-L. Missika et D. Wolton, Julliard, 1981.
32 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
(17) P. Muller et Y. Surel, L’analyse des politiques publiques, Paris, Montchrestien, 2000.
(18) G. Braibant, préface de Le citoyen et son administration, M. Le Clainche et C. Wiener (dir.),
Imprimerie nationale, 2000, voy. aussi Les cinq « mai 1968 » des institutions financières publiques,
dossier GFP, n° 3, 2018 (M. Le Clainche, coord.).
36 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
Le budget
J’ai pris l’engagement, et je le confirme devant vous, de contenir
la progression des dépenses budgétaires à un taux inférieur à celui
de la croissance de la production nationale.
19. Les politiques de réformes ont connu une actualité récur-
rente depuis la fin des années 1960 jusqu’à actuellement (19). La
présentation chronologique fait apparaître une succession impres-
sionnante d’initiatives de réformes tout au long de la période :
1968-1969 : Présidence du général de Gaulle. Le thème de la
réforme administrative émerge au nom de la légitimité de l’État
et de l’efficacité des politiques publiques d’accompagnement de
la croissance économique (Premières institutions dédiées, rationa-
lisation des choix budgétaires).
1969‑1974 : Présidence de Georges Pompidou. Le Premier
ministre, Jacques Chaban-Delmas, intègre le thème des réformes
administratives dans son projet de nouvelle société… (Médiateur,
critiques de la bureaucratie, simplifications).
1974-1981 : Présidence de Valéry Giscard d’Estaing. Des inno-
vations libérales de grande portée sont adoptées (Nouveaux droits
des usagers, émergence des préoccupations de gestion).
1981-1986 : Présidence de François Mitterrand. La gauche
applique son programme (Décentralisation, nouvelle citoyenneté,
statut général de la fonction publique, impôt général sur la fortune).
1986-1988 : Cohabitation. Cette période est marquée par le
retour du néo-libéralisme et une vision très critique des fonc-
tionnaires (Les cercles de qualité).
1988-1995 : Second mandat de François Mitterrand. La circu-
laire Rocard sur le renouveau du service public lance les premiers
outils managériaux (L’évaluation des politiques publiques, les pro-
jets de service et les centres de responsabilité, la CSG).
1995-1997 : Présidence de Jacques Chirac. La circulaire Juppé
poursuit la dynamique (Commissariat à la réforme de l’État,
démarches qualité, simplifications).
(19) Pour une autre chronologie et un point de vue différent sur les réformes administratives
et financières, voy. not. Ph. Bezes, Réinventer l’État, Les réformes de l’administration française
(1962-2008), Paris, PUF, 2009, qui donne la vision du politiste et La modernisation de l’État, une
promesse trahie ?, de P. Gibert et J.-C. Thoenig, Paris, Classiques Garnier, 2019 qui analyse les
programmes transversaux du point de vue de la sociologie des organisations.
40 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
Présentation de l’ouvrage
Ouvrages
Articles
S ites internet
www.budget.gouv.fr
www.economie.gouv.fr
www.fipeco.fr
www.fonction-publique.gouv.fr
www.impot.gouv.fr
www.insee.gouv.fr
www.modernisation.gouv.fr
www.performance-publique.gouv.fr
www.vie-publique.fr
Chapitre 1.
SOURCES ET TYPOLOGIES DES RÉFORMES
§ 1. Les sources
a) Le droit public
(5) L. von Bertallanfy, General System Theory, Foundations, Developments, Applications, New
York, G. Bazillier, 1968, Théorie générale des systèmes, Paris, Dunod, 1973.
(6) J. Lesourne, Les systèmes du destin, Paris, Dalloz, 1976.
(7) M. Crozier et E. Friedberg, L’acteur et le système, Paris, Le Seuil, 1977.
56 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
(8) P. Lalumière, Les finances publiques, coll. U, Paris, Armand Colin, 1973, p. 524.
(9) J.-C. Thoenig et F. Dupuy, Sociologie de l’administration française, Paris, Armand Colin, 1983.
(10) M. Crozier, La crise de l’intelligence, Essai sur l’impuissance des élites à se réformer, Paris,
Interéditions, 1995.
sources et typologies des réformes 57
(16) M. Leroy, Sociologie des finances publiques, Paris, La Découverte, 2007 ; L’impôt, l’État et
la société, Paris, Economica, 2010.
(17) T. Lambert, « Le fiscaliste, un juriste comme les autres », GFP, nos 3/4, mars-avril 2014.
(18) P.-M. Gaudemet, Précis de finances publiques, t. 1, Paris, Montchrestien, 1970, p. 2.
(19) Pour une défense et illustration de l’interdisciplinarité en finances publiques, C. Husson-
Rochcongar (dir.), La légitimité en finances publiques, Paris, Mare & Martin, 2022, not. C. Husson-
Rochcongar, Conclusion générale, pp. 600 et s.
sources et typologies des réformes 59
sur la levée de l’anonymat, sur les études d’impact ou sur les pou-
voirs de coordination des préfets montre les limites des injonc-
tions normatives.
40. En outre, cette réforme du droit par le droit n’est pas
exempte d’ambigüité puisque, dans un premier temps, elle vient
alourdir et complexifier le droit applicable.
41. Malgré leurs réticences, les juristes ne peuvent rester
insensibles aux limites de l’approche juridique classique comme
le leur a rappelé le Premier ministre, Pierre Mauroy, au colloque
« Administration et société » organisé en janvier 1983 par l’Ins-
titut français des sciences administratives (20) : « Permettez-
moi de trouver discutable que le droit administratif soit encore
construit sur l’idée d’inégalité entre l’administration et l’admi-
nistré. Surtout quand la conséquence qui en découle est la non-
information des usagers ». Au minimum, il faut faire la distinction
entre les activités de puissance publique et les activités de ser-
vices et reconnaître que les rapports inégalitaires entre l’admi-
nistration et les administrés organisés par le droit public ne sont
justifiés que dans le premier domaine. On peut aller plus loin et
considérer que, même dans les services régaliens, l’administration
gagne en légitimité et en efficacité en se bornant pas à appliquer
strictement les textes et en prenant mieux en compte les attentes
effectives de ses usagers. La démarche sociologique a ainsi pris
en considération la réalité du fonctionnement de l’administration
(voy. n° 35). Elle a connu un succès certain et a été intégrée à la
formation des hauts fonctionnaires (Michel Crozier, Jean-Daniel
Raynaud, Renaud Sainsaulieu). Mais, focalisée sur les processus
de décisions et les jeux d’acteurs à l’intérieur des organisations,
elle n’a pas répondu au besoin de renouvellement des sources de
légitimité de l’action administrative.
(20) Institut français des sciences administratives, Administration et société, vers une autre admi-
nistration ?, colloque des 27‑28 janvier 1983, RFAP, n° 26, 1983.
60 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
(21) A. Bartoli, Management dans les organisations publiques, 3e éd., Paris, Dunod, 2009.
sources et typologies des réformes 61
(23) Voy. par exemple RFAP, Gestion publique, gestion privée, n° 59, juillet-septembre 1991.
(24) C. Hood, « The new public management in the 1980’s: variation on a theme », Accounting,
organization and society, vol. 20, nos 2‑3, 1995 ; Ch. Pollitt et G. Bouckaert, Public Management
Reform. A comparative Analysis-New Public Management, Governance and the Neo-Weberian State,
3e éd., Oxford, Oxford University Press, 2011.
sources et typologies des réformes 63
(25) OCDE, La gestion publique en mutation. Les réformes dans les pays de l’OCDE, 1995 ; OCDE,
Moderniser l’État, la route à suivre, 2005.
64 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
(34) Voy. par exemple F. Dupuy, La faillite de la pensée managériale, Lost in management ?,
Paris, Seuil, 2015.
(35) A. Bartoli et S. Trosa (coord.), Les paradoxes du management par le sens, Rennes, Presses
de l’EHESP, 2016.
sources et typologies des réformes 69
§ 1. De l’usager au client
(36) G. Jeannot, Les usagers des services publics, Paris, PUF, 1998.
(37) P. Ripoche, « La maladministation aujourd’hui », RFAP, n° 45, janvier-mars 1998, p. 10.
(38) M. Sapin, Rapport sur la place et le rôle des usagers dans les services publics, 1983.
70 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
b) Le contribuable
(39) P. Beltrame et C. Muselin, « Les enjeux de la communication interne dans les adminis-
trations financières », RFFP, n° 57, 1997, p. 13.
sources et typologies des réformes 71
c) Le citoyen
telle notion est donc loin de faire l’unanimité chez les juristes qui
ajoutent deux arguments classiques : d’une part, les intéressés
ne souhaitent aucunement participer à la gestion des services
publics ou à l’élection de leurs agents, d’autre part, le caractère
démocratique de l’administration doit être assuré par la soumis-
sion à un pouvoir politique démocratiquement désigné et non par
l’intervention directe de l’administré dans son fonctionnement.
67. La notion de citoyenneté a cependant été soutenue par
des grands publicistes (Jean Rivero, Guy Braibant (44)). Elle a
eu son heure de gloire au début des années 1980 et elle est pério-
diquement réactualisée, par exemple dans le titre de la loi du
12 avril 2000 sur « les relations des citoyens avec les adminis-
trations » (45) et sous la forme de l’idée d’une « coproduction »
des services publics entre la puissance publique et les citoyens
eux-mêmes (46). Ainsi, les politiques vont promouvoir une admi-
nistration plus proche des usagers, attentive à leurs besoins,
adaptable aux lieux et aux circonstances. L’articulation de cette
relation plus directe entre l’administration et les citoyens avec les
processus démocratiques selon lesquels l’administration répond
de son action d’abord devant des instances politiques et juridic-
tionnelles, qui elles-mêmes procèdent des citoyens, reste difficile
(voy. nos 207‑219). Il peut y avoir des conflits de légitimité entre
des représentants désignés par l’élection et d’autres recrutés de
manière plus informelle avec l’appui d’associations.
En finances publiques, l’articulation entre le contribuable et le
citoyen est plus simple, au moins en théorie : le citoyen consent à
l’impôt par l’intermédiaire de ses représentants ; le contribuable
paie le montant d’impôt qui lui est assigné individuellement. En
pratique, il peut y avoir des conflits ou des confusions : préfé-
rences individuelles ou catégorielles pour l’allègement des impôts
pouvant aller jusqu’à la révolte fiscale ; demande de participa-
tion plus directe à la détermination de l’usage des impôts (par
exemple, budgets participatifs ; voy. n° 206) (47).
(44) J. Rivero, in Administration : droits et attentes des citoyens, IFSA, La Documentation fran-
çaise, 1998 ; G. Braibant, préface dans Le citoyen et son administration, Imprimerie nationale, 2000.
(45) Loi n° 2000‑321 du 12 avril 2000 sur l’amélioration des relations des citoyens avec les
administrations.
(46) J. Godbout, « Les ambigüités de la notion de co-production », in Droit des usagers et co-
production, Actes du colloque À quoi servent les usagers ?, Plan urbain, RATP, ministère de l’Équi-
pement, 1991.
(47) J.-C. Martinez, Le statut du contribuable, Paris, LGDJ, 1980 ; E. De Crouy-Chanel,
Le contribuable-citoyen, histoire d’une représentation fiscale (1750‑1999), Thèse Paris 1, 1999 ;
sources et typologies des réformes 73
d) Le client
69. Bien entendu, cette logique a des limites que même ses
promoteurs reconnaissent. Dans le cadre des administrations
régaliennes, l’administré est dans une situation subordonnée où
il dispose de plus de devoirs que de droits. La notion d’usager
présente l’avantage d’être plus neutre mais elle dissimule par-
fois un manque de conceptualisation ou de courage pour appeler
« administré » celui à qui on doit rappeler ses devoirs et « client »
celui qui est en droit d’exiger la qualité de la prestation. En outre,
si le service public est au service des usagers, le bon exercice de sa
mission dépasse la réussite de la relation directe et concerne aussi
le citoyen, qu’il soit contribuable ou bénéficiaire de la solidarité
nationale. Il appartient aux pouvoirs publics d’arbitrer entre
différentes catégories d’usagers et de hiérarchiser les attentes.
L’usager des services publics, même qualifié de client, a rarement
un choix très ouvert de services et, en général, ne paie pas la
prestation à un prix calculé en fonction du service consommé. En
outre, plusieurs raisons s’opposent à l’assimilation des administrés
(48) André Demichel avait critiqué en 1980 l’avènement du « self-service public ». Aujourd’hui,
la notion de « co-production » est employée dans un sens plus positif (voy. n° 67).
(49) A. Gherards, Le rapport Lambda, enquête d’une simple citoyenne sur l’administration de
son pays, Paris, Seuil, 1987.
sources et typologies des réformes 75
Enquête réalisée par Kantar Public par internet entre le 8 et le 22 novembre 2021
à partir d’un échantillon représentatif de 2.500 personnes.
(50) A. Spire, Résistances à l’impôt, attachement à l’État, enquête sur les contribuables français,
Paris, Seuil, 2018.
76 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
Ouvrages
Sapin M., Rapport sur la place et le rôle des usagers dans les services
publics, 1983.
Sfez L., L’administration prospective, Paris, Armand Colin, 1970.
Sfez L., Critique de la décision, Paris, Armand Colin et Fondation
nationale des sciences politiques, 1973.
Simon H.A., Administration Behavior, New York, Mac Millan,
1958.
Sinnassamy Ch., Le management public, Organisation, gestion et
évaluation des politiques publiques, Paris, Berger Levrault, 2014.
Spire A., Résistances à l’impôt, attachement à l’État, enquête sur
les contribuables français, Paris, Seuil, 2018.
Thoenig J.-C. et Dupuy F., Sociologie de l’administration fran-
çaise, Paris, Armand Colin, 1983.
Warin Ph. (dir.), Quelle modernisation des services publics ?, Les
usagers au cœur des réformes, Paris, La Découverte, 1997.
Articles
(1) M. Le Clainche, « Le débat sur les ressources publiques pendant la campagne pour les élec-
tions présidentielles du printemps 2012 », RFAP, n° 144, 2012.
86 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
(2) Voy. les concurrence entre ministères (Intérieur, Finances, ministères techniques) exposées
par Bezes Philippe, Réinventer l’État, 2009.
les acteurs et le pilotage des réformes 87
(3) M. Crozier, La crise de l’intelligence, Essai sur l’impuissance des élites à se réformer, Paris,
Interéditions, 1995.
(4) M. Massenet, La nouvelle gestion publique. Pour un État sans bureaucratie, Paris, Éd. Hommes
et techniques, 1975.
(5) A. Peyrefitte, Le mal français, Paris, Plon, 1976.
88 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
(6) Ph. Galy, Gérer l’État. Corriger la déviation bureaucratique, Paris, Berger-Levrault, 1977.
(7) R. Fauroux et B. Spitz (dir.), Notre État, Le livre-vérité de la fonction publique, Paris, Robert
Laffont, 2000.
les acteurs et le pilotage des réformes 89
1993, rapport Picq en 1994. Ils ont en commun une critique assez
sévère de l’administration (rigide, paperassière, routinière…) et
des hauts fonctionnaires (loin des réalités, fonctionnant en réseau
d’affinités, socialement homogènes), la promotion de certains
outils du management, corrigée par une défense de certaines
spécificités du service public. Ils se proposent de moderniser le
modèle français pour mieux le préserver dans un climat de mon-
dialisation et de concurrence.
(9) Cour des comptes, Le recours par l’État aux conseils extérieurs, 2014 ; E. Assassi, rapport au
nom de la Commission d’enquête n° 578, t. 1, 16 mars 2022 « Un phénomène tentaculaire : l’influence
croissante des cabinets de conseil sur les politiques publiques ».
les acteurs et le pilotage des réformes 91
(10) Extraits du rapport de la Cour des comptes publiés par Le Monde du 14 décembre 2022.
92 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
(11) R. Fauroux et B. Spitz (dir.), Notre État, Le livre vérité de la fonction publique, Paris,
Robert Laffont, 2000.
(12) F. Massé, Urgence et lenteur. Politiques, administration, collectivités, un nouveau contrat,
Paris, Fauves Éditions, 2020.
(13) S. Soriano, Un avenir pour le service public. Un nouvel État face à la vague écologique,
numérique, démocratique, Paris, Odile Jacob, 2020.
les acteurs et le pilotage des réformes 93
(14) Voy. P. Gilbert et J.-C. Thoenig, La modernisation de l’État, Paris, Classiques Garnier,
2019. En limitant leur étude critique aux programmes transversaux, les auteurs ont minimisé les
apports positifs des réformes.
94 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
§ 2. L’administration de la réforme
94. Les ministres s’appuient naturellement sur divers orga-
nismes administratifs qui garantissent la technicité et une cer-
taine continuité. Au niveau du Premier ministre, le Secrétariat
général du Gouvernement, au titre de ses fonctions de coordi-
nation interministérielle, assure la permanence d’une démarche
de réforme qui est à la fois interministérielle et essentiellement
juridique. Son rôle est particulièrement net sur les questions de
simplifications et de lutte contre l’inflation normative. Mais il a
aussi joué un rôle non négligeable au début de l’informatisation
des services. L’autre service permanent, qui est d’ailleurs aussi
partiellement rattaché au Premier ministre, est la direction géné-
rale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP).
Chargée en premier lieu de la politique interministérielle de ges-
tion des fonctionnaires (concours, formation, dialogue social…),
elle s’est toujours intéressée aux réformes, notamment quand
celles-ci relevaient d’un ministre chargé également de la Fonction
publique.
95. Cependant, ces organismes ont des effectifs réduits et
ont vocation davantage à la coordination qu’à la gestion.
C’est pourquoi des organes spécialisés ont été créés au fur et à
mesure des avancées des programmes de réforme : ainsi le pre-
mier Centre interministériel de renseignements administratifs
(CIRA) a été créé en 1959 et le Centre d’enregistrement et de
révision des formulaires administratifs (CERFA) a été créé en
1966. Une administration de mission spécifiquement dédiée à
l’animation de la réforme administrative se constituera très
les acteurs et le pilotage des réformes 95
(16) Décret n° 2003‑41 du 21 février 2003 portant création de services interministériels pour la
réforme de l’État.
98 les réformes administratives et financières en france ( 1972-2022 )
Ouvrages
Articles
S ection 1. Le Médiateur
Il peut en outre se saisir d’office ou être saisi par les ayants droit
de la personne dont les droits et libertés sont en cause.
Il est saisi des réclamations qui sont adressées à ses adjoints.
Article 7 – Une réclamation peut être adressée à un député, à un
sénateur ou à un représentant français au Parlement européen, qui
la transmet au Défenseur des droits s’il estime qu’elle appelle son
intervention. Le Défenseur des droits informe le député, le sénateur
ou le représentant français au Parlement européen des suites don-
nées à cette transmission.
Les membres du Parlement peuvent, de leur propre initiative,
saisir le Défenseur des droits d’une question qui leur paraît appeler
son intervention.
Sur la demande de l’une des commissions permanentes de son
assemblée, le président de l’Assemblée nationale ou le président du
Sénat peut transmettre au Défenseur des droits, dans les domaines
de sa compétence, toute pétition dont l’assemblée a été saisie.
Le Défenseur des droits instruit également les réclamations qui lui
sont transmises par le Médiateur européen ou un homologue étranger et
qui lui paraissent relever de sa compétence et appeler son intervention.
On peut rattacher au même courant réformiste, différentes
initiatives tendant à faciliter les contestations des décisions admi-
nistratives et à valoriser ces recours.
(7) Loi n° 2000‑31 du 2 avril 2000 sur les droits des citoyens dans leur relation avec
l’administration.
Ouvrages
Articles
(1) G. Braibant, « Droit d’accès et droit à l’information », Mélanges Charlier, Emile Paul, 1981.
(2) A. Holleaux, « Les lois de la troisième génération des droits de l’Homme, ébauche d’étude
comparative », RFAP, n° 15, 1980.
(3) « Le projet Safari ou la chasse aux Français », Philippe Boucher, Le Monde, 21 mars 1974.
(6) Titre 1er de la loi n° 78‑759 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des
relations entre l’administration et le public.
(22) Décret n° 83‑1025 du 28 novembre 1983 relatif aux relations des administrations avec leurs
usagers.
(23) Loi n° 2000‑321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec
les administrations.
(25) Loi n° 2018‑727 du 17 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance » (dite
« Loi Essoc »).
Ouvrages
Articles
(1) Les formulaires, conception et réalisation des formulaires administratifs, M. Le Clainche (dir.),
ministère des Finances, Scom, 1982.
(2) Décret n° 83‑656 du 18 juillet 1983, décret n° 90‑1125 du 18 décembre 1990 et décret
n° 98‑1083 du 2 décembre 1998.
(5) Décret n° 2000‑1277 du 26 décembre 2000 pour les deux premières mesures et décret
n° 2001‑899 du 1er octobre 2001.
(6) Loi n° 2013‑1005 du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations
entre l’administration et les citoyens et loi n° 2014‑1 du 2 janvier 2014 d’habilitation du gouverne-
ment pour simplifier la vie des entreprises.
(13) Ch. Eoche-Duval, « Un “mal français”, son “é-norme” production juridique ? », Revue de
droit public, n° 2, 2022 et Le Monde du 5 août 2022, p. 28. Une autre source, qui estime les volumes
en pages PDF, aboutit à des proportions semblables : 33.997 en 2004 à 83.270 en 2021.
(14) Décret n° 89‑647 du 12 septembre 1989 et loi 99‑1071 du 16 décembre 1999.
parmi les plus récents qui intéressent les sujets traités dans cet
ouvrage : le Code des relations entre le public et l’administration
publié en 2015, le Code de la commande publique en 2018, le Code
général de la fonction publique en 2021 et le Code des impositions
sur les biens et services en 2022.
L’encadrement de la production de normes a fait l’objet de
plusieurs dispositifs : études d’impact préalables à l’édiction
de nouvelles normes, obligation de supprimer une ou plusieurs
normes anciennes pour pouvoir en créer de nouvelles, moratoires
pour figer la réglementation, évaluation ex post de la qualité de
la législation. De nombreux textes sont intervenus : circulaires
du 26 juillet 1995, du 21 novembre 1995 et du 26 janvier 1998
relative aux études d’impact des projets de lois et de décrets
en Conseil d’État, loi organique du 15 avril 2009 (15) qui définit
précisément les études d’impact des projets de loi, circulaires
des 26 août 2003 et 30 septembre 2003 relatives à la maîtrise
de l’inflation normative, circulaire du 6 juillet 2010 relative au
moratoire concernant les collectivités territoriales, circulaire du
17 février 2011 concernant les entreprises et les collectivités ter-
ritoriales. Ces deux secteurs sont particulièrement sensibles car
ils concernent des organisations qui ont la capacité de s’exprimer
publiquement. Les normes applicables aux collectivités locales
ont fait l’objet de plusieurs rapports du Sénat. Une mission
de lutte contre l’inflation normative, sur la simplification du
stock des normes en vigueur et sur la gestion du flux des nou-
velles règles, a été confiée à MM. Alain Lambert et Jean-Claude
Boulard par le premier CIMAP du 18 décembre 2012 (16). La
Commission consultative d’évaluation des normes, créée en 2007
auprès du Comité des finances locales, a été transformée par la loi
du 17 octobre 2013 en Conseil national d’évaluation des normes
qui peut être saisi par le Gouvernement, les commissions parle-
mentaires, des collectivités territoriales ou s’autosaisir (17).
162. Deux circulaires du 17 juillet 2013 organisent à nouveau
l’évaluation préalable des textes réglementaires et instaurent un
« gel » par application de la règle « une suppression gage la création
d’un nouveau texte ». Une circulaire du 12 octobre 2015 précise
(15) Loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 prise pour l’application de l’article 39 de la
Constitution relatif aux études d’impact des textes législatifs.
(16) J.-C. Boulard et A. Lambert, Rapport de la mission de lutte contre l’inflation normative, 2013.
(17) Loi n° 2013-921 du 17 octobre 2013.
(21) Pour une vision critique des actions de simplification et des indicateurs de suivi de l’activité
normative : M. Benzerafat-Alilat et P. Gibert, « De l’inflation normative à l’amplification des
lois dans le processus parlementaire. Pistes pour une analyse avancée des facteurs inflationnistes »,
RFAP, n° 182, 2022, p. 541.
Ouvrages
Articles
(1) La sociologie du guichet a été étudiée en France, par exemple par Jean-Marc Weller (« Les
figures de l’usager dans les réformes de modernisation des services publics », Informations sociales,
n° 198, 2018/3 et par Vincent Dubois (La vie au guichet, relation administrative et traitement de la
misère, 3e éd., Paris, Economica, 2021).
(2) M. Le Clainche, « La place des services publics dans la politique de la ville », RFAP, n° 71,
juillet-septembre 1994. Sur le même sujet, voy. aussi J. Donzelot et P. Estèbe, L’État animateur,
Essai sur la politique de la ville, Paris, Esprit, 1994 ; C. Grémion et Ch. Mouhana, « Les paradoxes
d’une institution : le sous-préfet chargé de mission pour la politique de la ville », RFAP, n° 71,
juillet-septembre 1994.
(3) Loi n° 85‑30 du 9 janvier 1985 relative à la protection et au développement de la montagne et
loi n° 95‑115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire.
(6) M. Leroy, « Les mutations de l’action publique : les expériences de polyvalence des services
publics », PMP, vol. 18, n° 1, 2000, pp. 19‑41 ; Dix ans d’offre publique de services de proximité en
France, Annuaire des collectivités locales, t. 23, 2003, pp. 21‑34.
(7) M. Le Clainche, rapport prospectif de synthèse du colloque Illettrisme et complexité des admi-
nistrations contemporaines, Commission française pour l’Unesco, La Documentation française, 1993.
(8) Vaincre la phobie administrative grâce aux sciences comportementales, guide pratique, avril
2019, DITP, ministère de l’Action et de la Transformation publique.
§ 2. Le marketing public
186. Une conception de plus en plus ambitieuse de la com-
munication va s’imposer. Les campagnes de communication
relatives à la circulation routière (Bison futé), à la prévention
des accidents domestiques, à la lutte contre l’alcoolisme au
volant, à la protection des consommateurs, à la lutte contre
le sida, au passage à l’euro, à la prévention du bug de l’an
2000 ou à la promotion du développement durable, illustrent
un nouveau type de communication. Celle-ci vise, au-delà de
l’information, de l’écoute ou de la promotion de l’image ins-
titutionnelle, à faire évoluer les comportements sociaux dans
un but d’intérêt public. La tâche est ambitieuse car elle a pour
objectif de préparer et d’accompagner de véritables révolutions
culturelles.
(15) Baromètre des prélèvements obligatoires en France, 1re éd., 2021, Conseil des prélèvements
obligatoires, février 2022.
(16) Sondages IPSOS pour Le Monde et FONDAFIP, Le Monde du 14 octobre 2013, Les Français
face à l’impôt, commenté par Michel Bouvier : « Un grand débat sur la question fiscale est urgent » ;
Le Monde du 22 novembre 2018, Le ras-le-bol fiscal s’accentue en France, commenté par Michel
Bouvier : « Les Français ont massivement le sentiment que l’impôt est mal utilisé ».
(17) Vaincre la phobie administrative grâce aux sciences comportementales, guide pratique, avril
2019, DITP, ministère de l’Action et de la Transformation publique.
Ouvrages
Articles
(1) Voy. aussi la proposition de loi du sénateur René Regnault, enregistrée le 7 février 1989
à la présidence du Sénat et tendant à la création d’un conseil national et de conseils locaux des
services publics.
Composition
La lettre de mission adressée au CESE par le Premier ministre
assigne à la CCC un mandat précis : définir une série de mesures
pour parvenir, dans un esprit de justice sociale, à diminuer d’ici
2030 les émissions de gaz à effet de serre (GES) de la France
d’au moins 40 % par rapport à 1990. Cet objectif coïncide avec
les engagements pris par la France dans le cadre de l’accord de
Paris.
Le CESE se voit attribuer un budget de 5,4 millions d’euros
pour organiser la Convention. Ce montant couvre l’organisation
logistique, l’animation, la venue d’experts et l’indemnisation des
participants.
La Convention se compose de 150 membres tirés au sort sur la
base des listes électorales et des listes d’abonnés téléphoniques censés
refléter la diversité de la société française.
Travaux de la Convention
Les sessions ont lieu au CESE ou en ligne du 4 octobre 2019 au
21 juin 2020. Les participants auditionnent 140 experts dont la
liste est rendue publique (climatologues, économistes, associations,
acteurs économiques et sociaux). Le collège des garants contrôle la
transparence des débats. Une plateforme de contribution accessible
en ligne sur le site de la CCC permet à toute personne ou entité
déclarée de déposer des propositions.
Les participants se répartissent en cinq groupes thématiques :
consommer ; produire et travailler ; se déplacer ; se loger ; se
nourrir.
Durant la septième session, fin juin 2020, les participants fina-
lisent leurs 150 propositions, et chacune fait l’objet d’un vote. Une
seule est rejetée : la réduction du temps de travail hebdomadaire
de 35 à 28 heures sans perte de salaire dans un but d’écono-
mie d’énergie. La Convention adopte ainsi, le 21 juin 2020, 149
propositions dans le cadre de la lutte contre le réchauffement
climatique.
Propositions
Elles se regroupent suivant les cinq thèmes de travail et se
déclinent en propositions. La Convention préconise aussi de révi-
ser la Constitution « afin de mieux garantir […] la lutte contre
le dérèglement climatique et pour le respect de l’environnement ».
(2) Loi organique n° 2021‑27 du 15 janvier 2021 relative au Conseil économique, social et
environnemental.
Article 4
Après l’article 4‑1 de l’ordonnance n° 58‑1360 du 29 décembre
1958 précitée, sont insérés des articles 4‑2 et 4‑3 ainsi rédigés :
« Art. 4‑2. – Lorsque le Conseil économique, social et environ-
nemental associe le public à l’exercice de ses missions par une
consultation ou la participation aux travaux de ses commissions,
les modalités de cette association doivent présenter des garanties de
sincérité, d’égalité, de transparence et d’impartialité. La définition
du périmètre du public associé assure une représentativité appro-
priée à l’objet de la consultation ou de la participation ».
« Art. 4‑3. – Pour l’exercice de ses missions, le Conseil écono-
mique, social et environnemental peut, à son initiative ou à la
demande du Premier ministre, du président de l’Assemblée natio-
nale ou du président du Sénat, recourir à la consultation du public
dans les matières relevant de sa compétence. Il peut organiser une
procédure de tirage au sort pour déterminer les participants de la
consultation. À cette fin, il nomme un ou plusieurs garants tenus
à une obligation de neutralité et d’impartialité, chargés de veiller
au respect des garanties mentionnées à l’article 4‑2 ».
« La procédure de tirage au sort assure une représentation équi-
librée du territoire de la République, notamment des outre-mer, et
garantit la parité entre les femmes et les hommes parmi les parti-
cipants ».
« Le Conseil publie les résultats de ces consultations et les trans-
met au Premier ministre ainsi qu’au président de l’Assemblée natio-
nale et au président du Sénat ».
§ 6. Le référendum
213. Le référendum constitue un échelon supérieur de l’asso-
ciation des citoyens à la décision publique. Au niveau national,
des propositions de complément à l’article 11 de la Constitution
pour créer une procédure de référendum populaire ont été émises
par les comités Vedel en 1993 et Balladur en 2002. L’article 6
de loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 et la loi organique du
6 décembre 2013 ont institué le référendum d’initiative parta-
gée (3). La proposition de loi doit être signée par un cinquième
des parlementaires puis être soutenue par 10 % du corps
(3) Loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation de la vie publique et la loi organique
n° 2013‑1114 du 6 décembre 2013.
Ouvrages
Articles
(1) Cour des comptes, Rapport « Les effectifs de l’État 1980‑2008 : un état des lieux », 16 décembre 2009.
(2) Fiche du site www.fipeco.fr.
(3) Outre le rapport de la Cour des comptes, différentes études, fondées sur les données de l’INSEE
et de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, sont cependant unanimes.
L’institut IFRAP évalue l’augmentation du nombre de fonctionnaires de 4,6 millions en 1980 à
5,5 millions en 2019, soit plus 32,6 % (note de l’IFRAP, 1980‑1999 : Quelle évolution des effectifs
de la fonction publique et de la masse salariale ?, sur www.ifrap.org, 28 décembre 2021). Le site
FIPECO calcule une augmentation de 22 % entre 1997 et 2021 contre 17 % pour l’emploi total et
13 % pour la population (note d’analyse de François Ecalle sur www. Fipeco.fr, 17 janvier 2003).
1980 : 3.894.960
1990 : 4.257.653
2000 : 4.699.690
2007 : 5.567.935
(Rapport « Les effectifs de l’État 1980‑2008 : un état des lieux »,
16 décembre 2009)
– D’après l’INSEE (2007-2020)
2007 : 5.363.881
2010 : 5.379.649
2020 : 5.695.800
(Effectifs de la fonction publique par versant et ministère, don-
nées annuelles)
222. Dans la période récente, l’accroissement a été modéré mais
s’est poursuivi notamment dans les collectivités locales. Compte
tenu de son incidence sur le fonctionnement de l’administration et
sur la politique budgétaire, la gestion de la fonction publique est un
des axes essentiels de la gestion publique et des réformes adminis-
tratives. La fonction publique fait l’objet d’approches différentes
selon les tendances politiques : depuis 1970, certaines périodes
voient des infléchissements liés à une conception néo-libérale, par
exemple en 1986 ou, à partir de 2002, pendant la RGPP : réduction
des effectifs et du périmètre du secteur public, accent mis sur les
économies budgétaires et sur les obligations des fonctionnaires ; les
périodes où la gauche est au pouvoir sont plus favorables aux fonc-
tionnaires, à partir de 1981 ou de 2012 par exemple : accent mis
sur la spécificité de la gestion du service public, renforcement du
dialogue social. Mais ces oppositions se sont progressivement atté-
nuées, notamment en raison de la contrainte budgétaire, comme le
montre, par exemple, le gel du point d’indice entre 2010 et 2016.
Le passage d’une administration du personnel à l’aide d’outils
principalement juridiques à une gestion des ressources humaines
plus qualitative et plus personnalisée est le facteur principal de la
modernisation de la gestion de la fonction publique. Cette muta-
tion se manifeste par les sources du droit de la fonction publique
(section 1), par l’évolution des certaines règles applicables à la fonc-
tion publique (section 2), par l’émergence explicite d’une gestion
interministérielle des ressources humaines (section 3) et par la poli-
tique relative à l’encadrement supérieur (section 4).
§ 1. Du statut au code
223. Après la victoire de la gauche en 1981 et parallèlement
aux grandes lois de décentralisation, le ministre Anicet Le Pors
reprend l’idée de refonder la fonction publique avec un nouveau
statut dont la principale originalité est qu’il comporte une partie
commune à l’ensemble de la fonction publique (loi du 13 juillet
1983 portant définition des droits et obligations des fonction-
naires) et des parties déclinées pour chacun des versants : loi
du 11 janvier 1984 pour la fonction publique de l’État, loi du
26 janvier 1984 pour la fonction publique territoriale et loi du
9 janvier 1986 pour la fonction publique hospitalière (4).
(4) Loi n° 83‑634 du 13 juillet 1983 portant définition des droits et obligations des fonctionnaires ;
loi n° 84‑16 du 11 janvier 1984 pour la fonction publique de l’État ; loi n° 84‑53 du 26 janvier 1984
pour la fonction publique territoriale et loi n° 86‑33 du 9 janvier 1986 pour la fonction publique
hospitalière.
(5) Loi n° 2007‑148 du 2 février 2007 sur la modernisation de la fonction publique ; loi n° 2010‑75
du 5 juillet 2010 relative au dialogue social ; loi n° 2016‑483 du 20 avril 2016 relative aux droits
et obligations des fonctionnaires ; loi n° 2019‑828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction
publique.
(6) Ordonnance n° 2021‑1574 du 24 novembre 2021 portant partie législative du code général
de la fonction publique.
(7) L. Silicani, Livre blanc sur l’avenir de la fonction publique, Paris, La Documentation fran-
çaise, 2008.
§ 2. La négociation collective
229. Une autre modification du cadre de gestion de la fonction
publique résulte de l’importance grandissante du dialogue social
après les grandes négociations salariales de 1968 et après 1981.
La négociation collective devient une source indirecte du droit,
comme dans le monde des entreprises mais sans avoir la même
portée juridique. Une loi du 5 juillet 2010 sur le renouveau du
dialogue social dispose que, pour être valides, les accords devront
être signés par des organisations représentants 50 % des effec-
tifs. Pour entrer dans le droit positif, leurs clauses doivent être
reprises par des dispositions législatives et réglementaires. Ainsi,
le protocole Durafour du 9 février 1990 organise une refonte de la
grille salariale étalée sur 7 ans ; la formation continue fait l’objet
d’accords-cadres en 1989, 1992 et 1996 ; le dialogue social est
rénové par l’accord de Bercy du 6 juin 2008 ; le déroulement des
carrières est amélioré par de nombreux textes mettant en œuvre
le protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations
(PPCR) de septembre 2015 ; en dernier lieu, un accord sur le
télétravail dans la fonction publique a été signé le 13 juillet 2021
en pleine crise sanitaire. Une conférence sur les perspectives sala-
riales a été ouverte le 21 septembre 2021 : la ministre chargée
de la Fonction publique annonçait le maintien du gel du point
d’indice mais proposait une négociation sur des sujets plus limités
et plus qualitatifs (bas salaires, carrières, égalité entre les femmes
et les hommes, contractuels).
§ 1. Rémunérations et carrières
231. Les rémunérations de base ont continué à être fixées en
fonction de la grille indiciaire sur la base de la valeur du point d’in-
dice dont l’actualisation est, depuis les années 1960, détachée de
(8) Depuis 1994, la valeur du point d’indice a augmenté de 20 % alors que l’inflation a connu
une progression de 39,38 % (source DGAFP).
(9) Loi n° 91‑73 du 18 janvier 1991.
(10) Décret n° 2008‑1535 du 22 décembre 2008.
§ 2. Les obligations
235. Les textes et la jurisprudence ont soumis les fonction-
naires à de multiples devoirs et obligations (devoir de réserve,
discipline…) dont certaines à consonances morales (prévention de
délits et fraudes, non-cumul…). La loi du 20 avril 2016 a énoncé
de nouvelles valeurs qui s’imposent à la fonction publique : obli-
gations de dignité, d’impartialité, d’intégrité, de probité, de neu-
tralité, de respect de la laïcité. Elle exige une déclaration d’intérêt
et une déclaration de patrimoine pour certains postes à respon-
sabilité, institue des référents déontologues dans les administra-
tions et comprend des dispositions relatives à l’égalité entre les
hommes et les femmes et aux contractuels.
236. La notion de déontologie, qui est large et floue, a été
introduite dans les règles de la fonction publique pour contrô-
ler le pantouflage, c’est-à-dire le passage d’un emploi du secteur
public à un emploi dans une entreprise privée. Une Commission
de déontologie de la fonction publique a été créée en 1991 (16).
Elle est chargée notamment d’examiner si les passages du secteur
public au secteur privé ne portent pas atteinte à des intérêts
publics. Précisé par la loi du 29 janvier 1993, dite loi Sapin 1,
réformé en 2007, puis par la loi du 20 avril 2016 relative aux
droits et obligations des fonctionnaires, le système a été modifié
profondément par la loi de transformation de la fonction publique
du 6 août 2019 : contrôle primaire exercé par l’administration
appuyée par des référents déontologues, transfert des compé-
tences de la Commission de déontologie à la Haute autorité pour
(16) Décret n° 91‑109 du 17 janvier 1991 pris pour l’application de l’article 72 de la loi 84‑16
du 11 janvier 1984.
§ 1. La formation professionnelle
238. La formation professionnelle est le premier thème rele-
vant de la gestion de ressources humaines dans lequel l’action de
la direction générale de l’administration et de la fonction publique
s’est déployée, sans doute parce qu’elle comporte un aspect trans-
versal qui se prête bien à une action interministérielle. À côté des
écoles techniques enseignant l’ingénierie, les finances publiques
ou l’action sanitaire et sociale, des formations interministérielles
ont été développées à l’image de l’École Nationale d’Adminis-
tration créée en 1945. Les cinq instituts régionaux d’administra-
tion ont été créés à partir de 1971 pour former les attachés de
divers ministères et de la Caisse des dépôts et consignations. Les
concours d’entrée aux IRA sont réformés par arrêté du 28 mars
2019 selon des formules originales qui valorisent l’appréciation
des compétences et de l’expérience plus que les connaissances
théoriques et juridiques.
(25) P. Bourdieu, La noblesse d’État : grandes écoles et esprit de corps, Paris, Éditions de Minuit,
1989.
(26) J. Mandrin, L’énarchie ou les mandarins de la société bourgeoise, La Table Ronde, 1964, 1980.
Le reproche du « pantouflage ».
D’ailleurs, les meilleurs ne résistent pas toujours aux sirènes
du privé, où les salaires sont plus généreux que dans la fonction
publique… Emmanuel Macron, par exemple, a bénéficié de la mise
en disponibilité à l’Inspection générale des finances pour devenir
banquier d’affaires chez Rothschild, rappelle Vincent Jauvert, l’au-
teur de « Les Intouchables d’État » (2018, Robert Laffont). « La
proportion des anciens élèves ayant définitivement quitté le service
public est limitée à 8 % », argue l’école.
246. La délocalisation de l’École à Strasbourg décidée en 1991
dans le cadre du plan de délocalisations des administrations pari-
siennes et la fusion avec l’Institut international d’administration
publique (IIAP) en 2002 n’ont pas modifié fondamentalement
l’École. Des tentatives pour réformer substantiellement la for-
mation, le classement de sortie et les règles d’affectation n’ont
pas abouti. Toutefois, des évolutions importantes ont été effec-
tivement réalisées : introduction d’enseignements relatifs au
management et au dialogue social ; stages en entreprises et en
ambassades ; troisième concours ouvert aux responsables écono-
miques, aux élus et aux responsables associatifs (loi n° 90‑8 du
2 janvier 1990) ; classes préparatoires égalité des chances créées
en 2009.
Un plan de transformation a été présenté par le directeur
nommé en 2017 et mené à bien jusqu’en 2021 : multiplication
des classes préparatoires, refonte de la formation axée sur le
développement des compétences et non plus sur l’acquisition
des connaissances, ouverture de mastères spécialisées en mana-
gement, quatrième concours ouvert aux doctorants en 2018,
partenariat avec l’Université Paris Sciences et Lettres. Mais ces
adaptations ne touchaient que modérément à l’essentiel : la diver-
sification du recrutement et l’affectation dans les grands corps
en fonction du classement.
(27) P. Bourdieu, Esquisse pour une auto-analyse, Paris, Raisons d’agir, 2004 ; C. Jaquet, Les
transclasses ou La non-reproduction, Paris, PUF, 2014.
(28) Ordonnance n° 2021‑702 du 2 juin 2021, décret n° 2021‑1556 du 1er décembre 2021, décrets
nos 2022‑1452, 1453, 1454, 1455 et quatre arrêtés du 23 novembre 2022.
Ouvrages
Articles
S ection 1. La déconcentration
(1) B. Le Clère et V. Wright, Les préfets du Second Empire, Paris, Armand Colin, Cahiers de
la Fondation nationale des sciences politiques, 1973.
(2) Décret n° 64‑250 du 14 mars 1964 relatif aux pouvoirs des préfets, à l’organisation des ser-
vices de l’État dans les départements et à l’organisation administrative ; décret n° 64‑251 relatif à
l’organisation des services de l’État dans les circonscriptions d’action régionale.
(3) Décret n° 82‑389 du 10 mai 1982 relatif aux pouvoirs des commissaires de la République et
à l’action des services et organismes publics de l’État dans les départements ; décret n° 82‑390 du
10 mai 1982 relatif aux pouvoirs des préfets de région, à l’action des services et organismes publics
de l’État dans la région et aux décisions de l’État en matière d’investissement public.
(4) Voy. par exemple les ouvrages du préfet P. Bernard, L’État et la décentralisation (Du préfet au
commissaire de la République), Paris, La Documentation française, 1983 ; Le préfet de la République,
Le chêne et l’olivier, Paris, Economica, 1992.
(5) Loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République.
d’une part, elle « met en scène » le rôle de l’État dans les territoires,
d’autre part, elle indique que la réforme ne porte pas seulement
sur la répartition juridique des pouvoirs mais peut concerner éga-
lement les structures des administrations, leur champ d’activité
par rapport au secteur privé, leurs modes de gestion…
(7) Décret n° 2004‑374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l’organisation et à
l’action des services de l’État dans les régions et départements.
(8) Décret n° 2004‑1053 du 5 octobre 2004 relatif aux pôles régionaux de l’État et à l’organisation
de l’administration territoriale dans les régions.
(9) Décret n° 2004‑1085 du 14 octobre 2004 relatif à la délégation de gestion dans les services
de l’État.
Article 3
Le préfet de région détermine les orientations nécessaires à la
mise en œuvre dans la région des politiques nationales et commu-
nautaires de sa compétence.
Il les notifie aux préfets de département qui s’y conforment dans
leurs décisions et lui en rendent compte.
Article 9
Sous réserve des compétences du préfet de région, le préfet de
département met en œuvre dans le département les politiques natio-
nales et communautaires.
Article 11
Le préfet de département a la charge de l’ordre public, de la
sécurité et de la protection des populations.
Article 14
Le sous-préfet d’arrondissement est le délégué du préfet dans
l’arrondissement.
Il assiste le préfet dans la représentation territoriale de l’État.
Article 15
Le préfet prend les décisions dans les matières relevant des attri-
butions des services déconcentrés des administrations civiles de
l’État dans la région ou dans le département.
Article 16
Sous réserve des dispositions de l’article 33, le préfet a seul qualité
pour recevoir les délégations des ministres chargés des administra-
tions civiles de l’État et les pouvoirs de décision relatifs aux attribu-
tions des services déconcentrés des administrations civiles de l’État.
Article 17
Le préfet de région a autorité sur les chefs des services décon-
centrés, les délégués ou les correspondants à l’échelon régional des
administrations civiles de l’État, quelle que soit la nature ou la
durée de leurs fonctions.
Il en va de même pour le préfet de département sur les chefs
des services déconcentrés, délégués ou correspondants à compétence
départementale.
Article 19
Le préfet est responsable de la gestion du patrimoine immobilier
et des matériels des services de l’État placés sous son autorité.
Article 20
Le préfet est l’ordonnateur secondaire des services déconcentrés
des administrations civiles de l’État.
(10) Décret n° 2010‑146 du 16 février 2010 modifiant le décret n° 2004‑374 du 29 avril 2004
relatif aux pouvoirs des préfets, à l’organisation et à l’action des services de l’État dans les régions
et départements.
(11) M. Le Clainche, « Le changement dans la fonction publique de l’État : l’exemple des services
déconcentrés », in D. Espagno-Abadie et A. Penerenda (dir.), Fonction(s) publique(s) : le défi du
changement, Paris, Presses EHESP, 2018.
(12) Décret n° 2015-510 du 7 mai 2015 portant charte de la déconcentration.
(13) Cour des comptes, Les services déconcentrés de l’État, décembre 2017.
(14) Décret n° 2019‑377 du 26 avril 2019 ; décret n° 2020‑1050 du 14 août 2020 ; circulaire n° 6104/
SG du 2 août 2019 et décret n° 2020‑99 du 7 février 2020.
(18) Rapport n° 560, du 11 juin 2019, déposé par les sénateurs Jean-Marie Bockel et Mathieu
Darnaud, Réduire le poids des normes en aval de leur production : interprétation facilitatrice et
pouvoir de dérogation aux normes.
(19) Décret n° 2017‑1845 du 29 décembre 2017 ; décret n° 2020‑412 du 8 avril 2020.
S ection 2. L a décentralisation
(23) Loi n° 72‑619 du 5 juillet 1972 portant création et organisation des régions.
(24) Lois n° 82‑213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départe-
ments et des régions et n° 83‑8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les
communes, les départements, les régions et l’État.
(25) J.-E. Vié, La décentralisation sans illusion, Paris, PUF, 1982 ; Les sept plaies de la décentra-
lisation, Paris, Economica, 1986. En sens contraire, P. Bernard, L’État et la décentralisation (Du
préfet au commissaire de la République), Paris, La Documentation française, 1983 ; Le préfet de la
République, Le chêne et l’olivier, Paris, Economica, 1992.
(26) Loi n° 88‑18 du 5 janvier 1988 d’amélioration de la décentralisation.
(27) Loi n° 95‑115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement du territoire et loi
n° 99‑533 du 25 juin 1999 d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du
territoire.
(28) Loi n° 2003‑704 du 1er août 2003, loi n° 2003‑705 du 1er août 2003 et loi n° 2004‑758 du
29 juillet 2004.
(29) Loi n° 2004‑809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
(35) M. Leroy, La logique financière de l’action publique conventionnelle dans le contrat de plan
État-Région, Paris, L’Harmattan, 2000 ; M. Leroy, « Les contrats de plan État-Régions en France :
quelles leçons pour le développement des territoires », Revue Gestion et Finances Publiques, novembre-
décembre 2017, n° 6, pp. 13‑24.
(36) Loi n° 2017‑257du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain.
(37) Cour des comptes, L’organisation territoriale de l’État, 2013.
a) L’administration de mission
291. Une des premières formes de services distincts des admi-
nistrations centrales classiques a été l’administration de mission.
La théorie en a été exposée en 1956 par Edgard Pisani (44). Cette
expression désigne des organismes qui appartiennent incontesta-
blement à l’administration centrale de l’État mais qui exercent
des fonctions de réflexion ou de pilotage par opposition aux fonc-
tions de gestion, activité prédominante de la plupart des direc-
tions des ministères. Elles présentent quelques caractéristiques
communes : structures légères, effectifs réduits, haut niveau de
recrutement, ouverture sur l’extérieur sous forme de partenariat,
de recrutement de contractuels ou d’instances de concertation,
positionnement interministériel. De grands organismes créés
parfois bien antérieurement ont ainsi mis en œuvre et poursuivi
après 1970 la politique de reconstruction et de développement
économique et social d’après-guerre pour accompagner la fin des
« trente glorieuses », puis elles ont été supprimées et remplacées
par d’autres organismes porteurs d’ambitions plus restreintes et
mieux adaptées à une économie moins dirigiste : le Commissariat
général du Plan (créé en 1946, supprimé en 2006, remplacé dans
sa mission prospective par France Stratégie et recréé sous une
forme très allégée en 2020) ; la Délégation à l’aménagement du
territoire et à l’action régionale (la DATAR, créée en 1963, sup-
primée en 2014 et remplacée partiellement par le Commissariat
général à l’égalité des territoires devenu l’Agence nationale de
cohésion des territoires) ; la mission interministérielle d’amé-
nagement touristique du littoral du Languedoc-Roussillon. Le
bilan de ces administrations de mission est très positif. Elles ont
réussi leur insertion dans le système politico-administratif et sont
parvenues dans leurs domaines respectifs à des résultats remar-
quables. Si une adaptation pouvait être justifiée par une posture
a) Les agences
294. Les agences se sont développées à partir des années 1970,
sous l’influence de l’exemple anglais et de la théorie managériale
de l’agence qui prône de séparer les organes de conception et
d’exécution. Le Conseil d’État y a consacré une importante étude
en 2012 (46). La distinction entre les établissements publics tradi-
tionnels et les « vraies » agences n’est pas aisée. La différence tient
à l’autonomie de gestion (les établissements publics sont placés
sous la tutelle d’une autorité ministérielle), au suivi des résultats
et à la responsabilisation des dirigeants. Les statuts peuvent être
divers (services à compétence nationale, établissements publics
administratifs ou industriels et commerciaux, société d’économie
mixte…). Les appellations sont plus une forme d’affichage qu’un
label. On peut ainsi citer les Agences de bassin (1964), devenues
Agences de l’eau en 1992, l’Agence nationale pour l’emploi deve-
nue Pôle emploi (1967‑2008), l’Agence nationale pour l’amélio-
ration de l’habitat (Anah, 1971), l’Agence de l’environnement
et de la maîtrise de l’énergie (Ademe, 1991), l’Agence nationale
de rénovation urbaine (Anru, 2003), l’Agence nationale de la
cohésion sociale et de l’égalité des chances (Acsès, 2006‑2015).
L’une des plus récentes, l’Agence nationale de cohésion des ter-
ritoires, a été créée par la loi du 22 juillet 2019 et le décret du
18 novembre 2019 (47) pour offrir des services d’ingénierie aux
(46) Conseil d’État, Les agences, une nouvelle gestion publique ?, 2012.
(47) Loi n° 2019‑753 du 22 juillet 2019 et décret n° 2019‑1190 du 18 novembre 2019.
Ouvrages
Articles
(2) P. Drucker, The practice of mangement, New York, Harper, 1954 ; O. Gélinier, « Direction
participative par objectifs », Revue Hommes et Techniques, n° spécial 281, 1968.
(6) Voy. par exemple les travaux de Jean-René Brunetière : « Les indicateurs de la LOLF : une
occasion de débat démocratique ? », RFAP, n° 117, 2006, p. 95 ; « Les objectifs et les indicateurs de
la LOLF quatre ans après… », RFAP, n° 135, 2010, p. 477 ; « Indicateurs, évaluation et typologie
des objectifs : contrôle de gestion et performance sociale », RFAP, n° 148, 2013, p. 967 ; « Heurs et
malheurs du contrôle de gestion en politique – Pour un “nouveau management politique” », RFAP,
n° 155, 2015, p. 745.
(7) Voy. aussi : M. Benzaraf, L. Garcin, P. Gibert et J.-F. Gueugnon, « Le mangement par
objectifs met-il fin à l’ambiguïté dans la gestion publique ? », PMP, 28 (3), 2011.
(8) R. Epstein, « Gouverner à distance. Quand l’État se retire des territoires », Esprit, novembre
2005.
(9) A. Supiot, La gouvernance par les nombres, 2012-2014, Paris, Fayard, 2015 ; A. Pariente
(dir.), Les chiffres en finances publiques, Paris, Mare & Martin, 2019.
(10) P. Viveret, L’évaluation des politiques et des actions publiques, Rapport au Premier ministre,
La Documentation française, 1989.
(12) Décret n° 98‑1048 du 18 novembre 1998 relatif à l’évaluation des politiques publiques.
(13) Conseil d’État, Conduire et partager l’évaluation les politiques publiques, 2020.
(14) Morel à L’Huissier Pierre, Petit Valérie, Rapport sur l’évaluation des politiques publiques,
rapport, n° 771, Assemblée nationale, 15 mars 2018.
(15) Sur le débat entre démocratie et expertise voy. D. Estlund, L’autorité de la démocratie. Une
perspective philosophique, Paris, Hermann, 2011.
(16) Décret n° 2022‑1549 du 8 décembre 2022 relatif à l’évaluation des politiques publiques
territoriales.
Ouvrages
Articles
§ 1. L’informatisation
327. L’informatisation de la société (le rapport de Simon Nora
et Alain Minc est présenté en 1978) et celle de l’administration
s’accélèrent dans les années 1980. L’informatique pénètre dans
les bureaux.
S ection 2. L e numérique
§ 1. La numérisation de l’administration
337. La stratégie numérique est désormais une partie essen-
tielle de tous les programmes de réforme administrative. Le
numérique devient un outil essentiel du « choc de simplification »
annoncé en mars 2013. La plupart des mesures de simplification
annoncées à partir de 2014 reposent sur la dématérialisation des
procédures et la numérisation des contacts. L’Agence du numé-
rique est créée par le décret du 13 février 2015 (7). La saisine
de l’administration par voie électronique est envisagée pour 9
démarches sur 10 pour la fin 2015. Un identifiant unique avec
mot de passe (France Connect) permet d’accéder à tous les ser-
vices publics en ligne. Le site interministériel service.public.fr
est entièrement refondu. En 2017, le plan « préfectures nouvelle
génération » vise à dématérialiser au maximum la délivrance des
titres usuels (permis de conduire, carte grise, passeport, carte
d’identité). Sa mise en place sera difficile, soulignant ainsi l’im-
portance des mesures d’accompagnement à l’intention des agents
et du public.
338. La transformation numérique est l’un des cinq chan-
tiers transverses du programme Action publique 2022 lancé
par Édouard Philippe, Premier ministre, le 13 octobre 2017.
Elle est animée par la nouvelle direction interministérielle du
numérique et des systèmes d’information et de communication
(DINSIC) placée sous l’autorité d’un secrétaire d’État dédié. Un
décret du 5 octobre 2019 (8) lui substitue la direction du numé-
rique (Dinum), placée sous l’autorité de la ministre chargée de
la Transformation et de la Fonction publiques. Les programmes
sont décrits dans des « feuilles de route » : dématérialisation des
procédures (ciblage de 250 démarches usuelles suivies dans un
« observatoire de la dématérialisation », développement de France
Connect qui assure un accès unifié et sécurisé aux services publics
(objectif 2022 : 30 millions d’utilisateurs, 1.300 services connec-
tés), poursuite du programme « Dites le nous en une seule fois »
et des échanges d’informations entre administrations (décret du
28 janvier 2018 et décret du 16 avril 2021 (9)), développements
d’applications nouvelles, ouverture des codes sources et des
bases de données, infrastructures nouvelles mutualisées (réseau
§ 2. L’État-plateforme
339. Le numérique va ouvrir de nouveaux horizons qui
dépassent très largement la simple dématérialisation des procé-
dures mais ira même jusqu’à une nouvelle conception de l’inter-
vention publique. L’ouverture des données publiques a été un
nouveau pas important. On s’était interrogé longtemps sur les
conditions d’accès et d’utilisation des données administratives,
notamment sur le niveau de tarification légitime compte tenu
des investissements publics réalisés en amont et du droit de la
concurrence. Puis l’accès aux données publiques et la possibilité
de leur réutilisation ont été ouverts mais limités (ordonnances du
6 juin 2005 et du 17 mars 2016 (10)). Ils ont été érigés en principe
par la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique (11).
Un administrateur général des données est nommé pour animer
et impulser la politique d’open data au sein des administrations
de l’État. Les données stockées par 1.200 organismes étaient
disponibles en janvier 2018 sur le portail www.data.gouv.fr. Le
deuxième plan pour un gouvernement ouvert comporte 21 enga-
gements en faveur de la transparence de l’action publique, de
l’ouverture des données publiques, de la participation citoyenne.
Conformément à la loi, la mission Etalab a créé une plate-forme
open.data.gouv pour regrouper et rendre accessibles les codes
sources des logiciels libres du secteur public et a publié un guide
juridique des logiciels libres exposant les règles de publication des
codes sources des administrations. La plateforme met en ligne,
(12) E. Bothorel, Pour une nouvelle ère pour la politique publique de la donnée, rapport au
Premier ministre, décembre 2020.
(16) Défenseur des droits, Rapport 2019, Dématérialisations et inégalités d’accès aux services
publics ; Rapport 2022, Dématérialisation des services publics, où en est-on trois ans après ?
(17) Conseil d’État, décisions nos 452798, 452806 et 454716 du 3 juin 2022 ; avis nos 461694, 461695
et 461922 du 3 juin 2022.
Ouvrages
(18) Cour des comptes, Relations aux usagers et modernisation de l’État. Vers une généralisation
des services publics numériques, janvier 2016.
(19) Conseil d’État, Puissance publique et plateformes numériques, accompagner l’ubérisation, 2017 ;
Conseil d’État, L’intelligence artificielle pour un meilleur service public, 30 août 2022.
(20) Décret n° 2022‑676 du 26 avril 2022.
Articles
(1) À ce propos, le doyen Vedel avait exposé la « loi des brodequins : au début cela fait mal puis
on s’y habitue et on ne veut plus en changer » rappelée par Benoît Chevauchez in « La loi organique
de 1959, trente ans après », RFFP, n° 26, 1989.
(6) Par exemple : D. Migaud, Allocution lors de la rentrée solennelle de la Cour des comptes en
2015 ; Le bilan de dix années de mise en œuvre de la LOLF, GFP, n° 6, 2016 ; La LOLF du 1er août
2001 : des avancées considérables, une application qui s’est éloignée peu à peu des objectifs initiaux,
des évolutions souhaitables, RFFP, n° 158, mai 2022, p. 17 ; A. Lambert, Les ministres de Bercy,
pilotes ou otages de la structure ?, Pouvoirs Bercy, n° 168, Paris, Seuil, 2019.
(9) Loi 2021‑1577 du 6 décembre 2021 et loi organique n° 2021‑1836 du 28 décembre 2021 relative
à la modernisation de la gestion des finances publiques.
(10) Lois organique et ordinaire nos 2022‑354 et 355 du 14 mars 2022 relatives aux lois de finan-
cement de la sécurité sociale.
Ouvrages
Articles
(1) Décret n° 2012‑1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique
(GBCP).
(4) Cour des comptes, La comptabilité générale de l’État, dix ans après : une nouvelle étape à
engager, 2016.
décalé des réalités. Ainsi la Cour des comptes juge les comptes
et non les comptables, ce qui signifie qu’elle peut ne pas tenir
compte des « circonstances de l’espèce » qui pourraient atténuer la
responsabilité du comptable (par exemple, le manque de moyens,
la faute d’un collaborateur ou celle de l’ordonnateur). Elle est
subie par des comptables publics chargés d’un contrôle exhaustif
et formaliste des actes des ordonnateurs symbolisé par la liste des
pièces justificatives de la dépense, chef-d’œuvre bureaucratique
régulièrement mis à jour (en dernier lieu par un décret du 23 mars
2022 (8)). La culture des comptables est d’autant plus rigoureuse
sur les questions de forme qu’ils sont soumis à une responsabilité
extrêmement large qui couvre les actes de leurs collaborateurs
et dans certaines conditions ceux de leurs prédécesseurs. Elle
est commandée par une série de raisonnements juridiques sub-
tils (distinction entre contrôle de la légalité interne et contrôle
de la régularité financière, entre manquements préjudiciables et
les autres…). Ce dispositif a fait l’objet de critiques diverses du
point de vue de la gestion publique : l’irresponsabilité de fait des
ordonnateurs est inéquitable pour les comptables et ne favorise
pas une bonne gestion des crédits publics ; il fait porter la charge
de la régularité à un seul des acteurs de l’exécution budgétaire qui
est celui qui se trouve en bout de chaîne ; il est inadapté aux exi-
gences d’un management moderne qui exige prise en compte des
enjeux, coopération, transversalité, rapidité, et il est incohérent
par rapport aux objectifs de la LOLF visant à responsabiliser
les gestionnaires. En effet, il se limite à garantir la régularité
formelle sans s’intéresser à l’essentiel : la qualité de la gestion.
(10) L’article 168 de la loi n° 2021‑1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.
(11) Décret n° 2021‑604 du 18 mai 2021.
Ouvrages
Articles
§ 1. La création de la DGFiP
380. Le sujet du rapprochement des deux administrations qui
contribuent à la gestion de l’impôt est ancien. En raison d’une
interprétation rigoureuse du principe de séparation des ordonna-
teurs et des comptables dans la première moitié du XIXe siècle,
une distinction organique a été opérée entre les services chargés
respectivement de l’assiette et du contrôle des impôts (régies
financières puis en 1948 direction générale des impôts) et ceux
chargés du recouvrement (direction de la comptabilité publique)
aussi bien au niveau central que dans les services en relation avec
les publics. L’organisation n’était pas aussi simple : la sépara-
tion était à peu près appliquée en matière d’impôts directs mais
méconnue dans le domaine des impôts indirects et des droits
d’enregistrement dont l’assiette et le recouvrement relevaient des
régies financières. Par ailleurs, diverses attributions extra-fiscales,
notamment celles rattachées à la comptabilité publique et rela-
tives à la gestion financière de l’État, des collectivités locales et
des établissements publics, ont rendu le découpage administratif
plus complexe. En 1948, les différentes régies financières ont été
fusionnées pour constituer la puissante direction générale des
impôts. Cette réforme n’a été achevée qu’en 1970 par la réorga-
nisation des services de base. En 1990, après une grande grève,
dans le contexte de l’ouverture européenne et du renouveau du
service public, une nouvelle vague de modernisation est interve-
nue (1). De son côté, la direction de la comptabilité publique
se modernisait également notamment par l’informatisation des
comptabilités et du recouvrement. Elle continuait d’exercer des
missions très diverses de normalisation et de centralisation comp-
tables, de tenue des comptes de l’État, des collectivités locales et
des établissements publics, de payeur de la plupart des dépenses
publiques, de contrôle de la régularité financière et, enfin, du
recouvrement des impôts directs des particuliers. Une clarifica-
tion s’imposait. Le système administratif était trop complexe
pour être compris des contribuables, il empêchait la mise en com-
mun de moyens, il était incompatible avec une informatisation
performante de la gestion des impôts. Une nouvelle organisation
pouvait être fondée sur la distinction classique entre l’assiette
et le recouvrement en élargissant les missions de recouvrement
(2) J.-P. Sereni et Ch. Villeneuve, Le suicide de Bercy. La réforme est-elle impossible en France ?,
Paris, Plon, 2002. Le point de vue de l’animateur du projet : Th. Bert, Mission 2003, Construire
ensemble le service public de demain, Paris, La Documentation française, janvier 2000. Th. Bert,
« La réforme de Bercy, paralysie ou suicide collectif », in R. Fauroux et B. Spitz (dir.), Notre État,
Paris, Robert Laffont, 2000. Pour une analyse plus sereine : J.-M. Pernot, « Le ministère des finances
et la mission 2003, Regards sur une réforme manquée », Revue de l’IRES, n° 39-2, 2002, p. 115.
(5) Accès autorisé à titre expérimental pendant trois ans par l’article 154 de la loi n° 2019‑1479
du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
(6) Cour des comptes, La DGFiP dix ans après la fusion, une transformation à accélérer, juin
2018 ; Inspection des finances, Bilan du contrat d’objectifs et de moyens de la DGFiP pour la période
2020‑2022, septembre 2022.
(7) Loi n° 59‑1472 du 28 décembre 1959 ; l’article 21 de la loi n° 70-601 du 9 juillet 1970 codifié
à l’art. 1649quinquies E du Code général des impôts ; loi n° 87‑502 du 17 juillet 1987 (loi Aicardi).
(10) Loi n° 2018‑898 du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude. Le rapport du sénateur
Jean-François Husson, La lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, n° 72, 25 octobre 2022, dresse
un bilan positif de l’application de cette loi.
(11) Décret n° 2008‑371 du 18 avril 2008 et décret n° 2020‑872 du 15 juillet 2020.
(12) Ordonnance n° 2021‑1190 du 15 septembre 2021 ; loi n° 2022‑1157 du 16 août 2022 de finances
rectificative pour 2022, art. 26 ; décret n° 2022‑1299 du 7 octobre 2022.
(13) Art. 109 de la loi n° 2016‑1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
Ouvrages
Articles
Les impôts existants n’ont pas cessé d’être adaptés aux circons-
tances, ce qui a engendré une complexité croissante qui confine à
l’impossibilité de comprendre ou de maîtriser le système fiscal. Ce
constat se vérifie pour les impôts de l’État (§ 1) et, plus encore,
au niveau des finances locales (§ 2).
a) La TVA
401. La TVA est créée en 1954 et généralisée en 1968. Ces prin-
cipes n’ont pas été modifiés pendant toute la période, sous réserve
du régime de la TVA intra-européenne qui, depuis 1992, est
acquittée dans le pays d’origine et non dans le pays de consom-
mation des biens et services. Son rendement, indexé sur l’acti-
vité des entreprises, a considérablement augmenté pour en faire
la première ressource fiscale (de 108 milliards d’euros en 1983 à
153,8 milliards d’euros dans le PLF 2022). Le cadre législatif est
désormais harmonisé au niveau européen depuis la 6e directive de
1978 qui laisse une certaine marge de manœuvre aux États, par
exemple en matière de taux à l’intérieur de fourchettes prédé-
terminées. En 1970 les taux étaient les suivants : réduit 7,5 % ;
intermédiaire 17,6 % ; normal 23 % ; majoré 33,33 %. Le taux
majoré, sur les consommations dites de luxe, a été diminué jusque
22 % puis supprimé en 1992. Un taux super-réduit de 2,1 % a été
créé en 1992 sur certains produits de première nécessité (santé,
presse). Depuis 2014, les taux s’établissent ainsi : super-réduit
2,1 % ; réduit 5,5 % ; intermédiaire 10 % ; normal 20 %. Divers
groupes de pression tentent régulièrement d’obtenir le bénéfice de
taux réduits comme l’ont fait le bâtiment et les travaux publics et
la restauration. Le bilan de cet avantage fiscal décidé en 2019 est
très faible : les restaurateurs ont répercuté moins d’un quart de
la baisse de TVA sur les consommateurs et ont créé 6.000 emplois
sur les 20.000 annoncés (1). En 2012, un projet de TVA sociale,
qui consistait à augmenter la TVA pour financer la protection
sociale en remplacement de cotisations assises sur les salaires,
devait avoir pour effet de soutenir l’emploi en réduisant le coût
du travail et de stimuler l’activité des entreprises françaises en
pénalisant les importations. Il a été supprimé par le gouver-
nement d’après les élections présidentielles pour qui la justice
(1) Assemblée nationale, commission des finances, rapport d’information n° 337 relatif aux consé-
quences de la TVA dans la restauration, 30 octobre 2012.
transfert d’impôts d’État tels que la CSG. Sur la base des propo-
sitions de la mission Richard-Bur (3), la loi de finances pour 2020
acte la disparition totale de la taxe d’habitation sur les résidences
principales en 2023 et prévoit l’attribution aux communes de la
part départementale de la taxe foncière ainsi que des transferts
complémentaires d’une part de TVA aux départements et aux
communes.
409. En 2021, les régions étant particulièrement affectées
par la réduction des impôts de production portant principale-
ment sur la CVAE régionale ont reçu une nouvelle attribution
de TVA. Celle-ci devient en 2022 la première ressource des col-
lectivités locales (53,2 milliards d’euros) (voy. n° 402), ce qui
leur assure une ressource dynamique mais réduit encore leur
pouvoir fiscal.
410. Les réformes successives en matière de finances et de fis-
calité locale complexifient encore plus le dispositif mais ne par-
viennent pas à masquer la réduction de l’autonomie fiscale des
collectivités territoriales dont une part de ressources est progres-
sivement remplacée par des dotations de l’État. Selon le Conseil
constitutionnel, cette évolution n’est pas contraire au principe
de libre administration des collectivités territoriales, ni à celui de
leur autonomie financière posés par la révision constitutionnelle
du 28 mars 2003 et la loi organique du 29 juillet 2004 (4). Mais
elle offre moins de garanties aux collectivités et suscite les pro-
testations des associations d’élus. La Cour des comptes, dans un
rapport d’octobre 2022, souligne la complexité et l’illisibilité du
système de financement des collectivités territoriales. Elle sug-
gère de réserver la fiscalité locale au bloc communal, d’orienter
des financements solidaires vers les départements et de partager
des impôts économiques d’État avec les régions (5).
(3) Mission « Finances locales », rapport sur la refonte de la fiscalité locale, mai 2018.
(4) Décision n° 2009‑599DC du 29 décembre 2009.
(5) Cour des comptes, Les scénarios de financement des collectivités territoriales, octobre 2022.
b) La CSG
412. La création de la contribution sociale généralisée (CSG),
par la loi n° 90‑1168 de finances pour 1991 (7), va contribuer à
bouleverser le financement de la protection sociale. Elle répond
initialement à la volonté d’en élargir la base. À l’origine, assu-
rance professionnelle pour les travailleurs en activité, la protec-
tion sociale devient de plus en plus universelle et le besoin de
financement augmente. Il est donc envisagé de remplacer une
partie des cotisations calculées sur les revenus du travail par un
prélèvement assis sur l’ensemble des revenus quelle qu’en soit
l’origine. Selon Michel Rocard, le Premier ministre de l’époque,
cette nouvelle ressource doit financer des prestations « non contri-
butives » qui ne relèvent pas d’un système d’assurance, telles que
les allocations familiales et elle doit être d’un niveau modéré pour
ne pas augmenter le volume total des prélèvements obligatoires.
Cette nouvelle contribution, affectée spécialement au finance-
ment de la protection sociale, est traitée par le droit européen
comme une cotisation sociale mais peut être aussi assimilée à un
impôt général sur les revenus. À l’origine, il est proportionnel
et d’un taux modéré de 1,1 %. Il est d’autant mieux accepté
qu’il est relativement discret puisque prélevé par les tiers pour
l’essentiel (employeurs, organismes de retraite, caisse de sécurité
sociale, banques…). Au cours des années, l’impôt s’est complexi-
fié et alourdi. On distingue aujourd’hui une contribution sur les
revenus d’activité et de remplacement, une contribution sur les
revenus du patrimoine, une contribution sur les produits de pla-
cement et une contribution sur les jeux. Son produit est passé
de 4,6 milliards d’euros en 1991 à 120 milliards d’euros en 2019,
soit plus que l’impôt sur le revenu. Son assiette a été élargie à
certains revenus de remplacement ou du patrimoine non visés à
(7) Loi n° 90‑1168 du 29 décembre 1990 de finances pour 1991, art. 127 et s.
(8) C. Landais, Th. Piketty et E. Saerz, Pour une révolution fiscale, Paris, Seuil, 2011.
a) La fiscalité environnementale
413. La définition de la fiscalité environnementale a évolué
et elle est encore incertaine. Selon une conception large, cette
expression recouvre tous les impôts et taxes calculées sur la base
d’un indice qui a une incidence sur l’environnement : volume de
déchets, consommation d’énergie… Selon une conception plus
étroite, appelée « fiscalité écologique », ne sont pris en compte que
les impôts qui ont pour objet ou pour effet d’influencer les com-
portements relatifs à l’environnement. Une définition encore plus
rigoureuse ne retient que la fiscalité incitative qui a pour objet
d’augmenter le coût des activités nuisibles à l’environnement en
application du principe pollueur-payeur. Eurostat retient une
définition intermédiaire : les impôts dont l’assiette est constituée
par une nuisance environnementale. La plupart des statistiques
ajoutent aux impôts et taxes les redevances pour services ren-
dus et les dépenses fiscales qui répondent à ces critères. Il reste
d’importantes questions de délimitation. Ainsi des impôts anciens
comme la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, calculée
comme la taxe foncière, n’est pas une taxe écologique mais la
redevance pour enlèvement des ordures ménagères, quand elle
est calculée par rapport au volume des déchets, en est une. La
taxe intérieure de consommation de produits pétroliers (TICP,
ancienne TIPP) est la plus importante des taxes environnemen-
tales (entre 20 et 30 milliards d’euros de produit par an) mais
c’est avant tout une taxe de rendement qui est rarement gérée
en fonction d’objectifs écologiques.
414. Après la redevance des agences de l’eau créée en 1964, une
fiscalité écologique en France se développe dans les années 1990.
Elle est estimée à 50,4 milliards d’euros en 2020, soit 2,19 % du
PIB et 5 % des prélèvements obligatoires, ce qui est inférieur à
la moyenne de l’OCDE. Aux taxes sur la consommation de car-
burants, de gaz et d’électricité, il faut ajouter les diverses taxes
sur les transports, les taxes sur les déchets incluses dans la taxe
générale sur les activités polluantes (TGAP) et les redevances de
bassin. Les niches fiscales sont plutôt défavorables à l’environ-
nement puisque les plus importantes d’entre elles visent à allé-
ger le poids des taxes environnementales sur certaines activités
(agriculture, transports).
(11) M. Le Clainche, « Les décisions financières et fiscales de crise : le cas des crises sociales »,
GFP, n° 1, 2022, p. 43.
(13) P. Saint-Amans, « Innover dans la lutte contre l’optimisation fiscale, une solution à deux
piliers pour réformer la fiscalité internationale », in A. Baudu, X. Cabannes et M. Le Clainche,
Le renouveau des finances publiques nationales, RFAP, n° 182, 2022.
(14) Loi n° 2007‑1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat
(TEPA).
(15) Une évaluation de ces mesures par France Stratégie parue en octobre 2022 indique qu’elles
ne semblent pas avoir eu l’effet attendu d’augmentation des investissements dans les entreprises.
En revanche, elles ont induit une augmentation des dividendes et une diminution de l’exil fiscal.
Ouvrages
(16) Toutefois, la loi n° 2022‑1720 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 (art. 40) prévoit
une contribution des entreprises du secteur des énergies fossiles de 33 % sur les profits supérieurs
de 20 % à la moyenne des années précédentes. L’article 55 de la même loi organise la suppression
de la CVAE (dont le taux avait été divisé par deux en 2021) sur les exercices 2023 et 2024.
A rticles
Albert J.-L., « Retour sur le colloque “la nouvelle ère des finances
locales : de quoi la rigueur est-elle le nom ?” », Austérité et
rigueur dans les finances locales, Paris, L’Harmattan, 2017,
pp. 281‑288.
Baudu A., « Le verdissement de la fiscalité française : une voie
sans issue ? », REIDF, n° 4, 2015, p. 518.
Beltrame P., « Idéologies politiques et réforme fiscale », RFFP,
n° 60, novembre 1997.
Beltrame P. et Bin F., « La politique fiscale de Valéry Giscard
d’Estaing. Vingt ans de novations fiscales », GFP, n° 3, 2022.
Bouvier M., « Autonomie fiscale et libre administration des col-
lectivités locales », RFFP, n° 81, mars 2003.
Calmette J.-F., « La discrète montée en puissance de la CSG »,
GFP, n° 6, 2019, p. 85.
Degron R., « Les finances publiques vertes en France, entre
ambition écologique et réalités socio-fiscales », RFAP, n° 179,
2021, p. 669.
Domingo L., « La fiscalité environnementale, outil d’une poli-
tique publique », in Baudu A., Cabannes X. et Le Clainche M.,
Le renouveau des finances publiques nationales, RFAP, n° 182,
2022.
Dubergé J., « De l’impôt sur la fortune à l’impôt sur les grandes
fortunes », RFFP, n° 23, 1988.
France Stratégie, « Quels principes pour une fiscalité simpli-
fiée ? », GFP, n° 3, 2017, p. 46.
Hertzog R., « L’avenir financier du secteur communal : grande
réforme ou marasme durable ? », RFAP, n° 156, 2015,
p. 1005.
Le Clainche M., « L’écotaxe poids lourds en France (2007‑2017),
l’échec d’une innovation fiscale », GFP, n° 2, 2019, p. 98.
426. Les réformes dans les domaines financiers ont suivi une
dynamique propre liée par exemple à la situation budgétaire
ou à la conjoncture économique. Elles ont aussi entretenu des
rapports étroits avec les autres réformes administratives. La
LOLF et l’évolution des procédures comptables ont eu pour but
d’améliorer la qualité de la gestion publique en enrichissant les
objectifs et les données sur l’action publique et en permettant
un meilleur pilotage des politiques publiques. Les réorganisa-
tions de l’administration fiscale, l’amélioration des relations
avec les contribuables, même à l’occasion du contrôle fiscal, et
l’inventivité fiscale sont en symbiose avec les réformes de la ges-
tion publique qui tendent à donner une plus grande autonomie
aux acteurs. Ces réformes, intervenant des domaines régaliens,
manifestent combien l’administration et le dispositif public sont
capables de s’adapter aux évolutions sociales : les impulsions poli-
tiques mais aussi les obligations internationales et européennes,
les réalités économiques sont autant de facteurs de changement
pas toujours maîtrisés par les décideurs. Les limites de l’action
réformatrice apparaissent également : les réformes réalisées sont
souvent assez éloignées des réformes annoncées (exemple, la CSG
qui devait rester modérée et réservée au financement de la pro-
tection sociale), les réformes sont souvent des mesures partielles,
fruit de compromis provisoires (par exemple, la responsabilité des
comptables, la fiscalité verte), les réformes ne sont guère durables
dès lors qu’un train de réformes chasse l’autre (l’ISF). Malgré
des progrès, les objectifs espérés de simplification, d’équilibre
des rapports avec les citoyens, de rationalisation de la gestion
publique semblent toujours hors d’atteinte. La complexité effec-
tive, qui n’est pas propre au domaine financier mais qui y est
Articles
Article
(1) F. Lafarge, « La révision générale des politiques publiques : objet, méthodes et redevabilité »,
RFAP, n° 136, 2010, p. 755.
Ouvrages
Articles
Articles
nous-mêmes en être les acteurs à tous les niveaux, suivant ses prin-
cipes d’action que je viens de dire étant lucide sur notre force et nos
insuffisances, car si nous ne la pensons pas nous-mêmes, alors des
gens qui n’aiment pas l’action publique, qui n’aiment pas l’État,
la menaceront malgré nous. À nous donc de faire. Mais dans ce
moment et je finirai mon propos sur ces points, je veux aussi vous
donner les moyens d’agir davantage.
Nous devons aujourd’hui changer radicalement la manière dont
on recrute, dont on forme, dont on sélectionne, dont on construit les
parcours de nos hauts fonctionnaires.
Ouvrages
Articles
(3) Ph. Bezes et Ch. Muselin, « Le new public management entre rationalisation et marchandi-
sation ? », in L. Boussaguet, S. Jacquot et P. Ravinet (dir.), Une « French touch » dans l’analyse
des politiques publiques ?, Presses de Sciences Po, 2015 ; D. Huron et J. Spindler, Management et
finances publiques, Les marqueurs du New Public Management, Paris, L’Harmattan, 2019.
(4) Référence à G. Archier et H. Serieyx, L’entreprise du troisième type, Paris, Seuil, 1984.
(5) « Les figures croisées du juriste et du manager dans la politique française de réforme de l’État »,
RFAP, nos 105/106, 2003, pp. 121‑134.
(6) J. Chevallier, L’État post-moderne, 4e éd., Paris, LGDJ-Lextenso, 2017.
(7) M. Bouvier, « L’État, les métropoles, l’impôt, le numérique : quel équilibre du politique dans
un monde en transition ? », in Mélanges en l’honneur de Gilbert Orsoni, 2018, p. 373.
(8) E. Ostrom, Gouverning the commons (1990), La gouvernance des biens communs, Bruxelles,
De Boek, 2020 ; J. Tirole, Économie du bien commun, Paris, PUF, 2016.
(11) A. Bartoli, Management dans les organisations publiques, 3e éd., Paris, Dunod, 2009.
(12) P. Gibert et J.-C. Thoenig, « La gestion publique : entre l’apprentissage et l’amnésie »,
PMP, vol. 11 (1), 1993.
(13) M. Crozier, La crise de l’intelligence, Essai sur l’impuissance des élites à se réformer, Paris,
Interéditions, 1995.
(14) France Stratégies, Soutenabilités : Orchestrer et planifier l’action publique, mai 2022.
(15) V. Feltesse et S. Soriano, Services publics et transitions, réformer la réforme de l’État,
Terra Nova, mai 2022.
Ouvrages
(16) F. Massé, Urgences et lenteur, quel management public à l’aube du changement du monde,
Paris, Éditions Fauve, 2018.
Articles
M es remerciements ............................................................................... 7
P réface ................................................................................................. 9
A vant - propos ......................................................................................... 13
L iste des abréviations utilisées ............................................................ 17
S ommaire ............................................................................................... 21
I ntroduction ......................................................................................... 23
Définitions : Les réformes administratives et financières...................................... 23
L’administration................................................................................................ 23
La réforme administrative............................................................................... 24
Les réformes financières................................................................................... 27
Réforme administrative et réformes sectorielles.................................................... 28
Réforme administrative, réforme de l’État, action publique.................................. 29
Réforme et révolution................................................................................................. 30
Réforme administrative en France et à l’étranger................................................... 30
Méthodes et plan de l’ouvrage :................................................................................. 31
Le travail d’un « spectateur engagé ».............................................................. 31
Approche chronologique : 1972‑2022.............................................................. 34
Approche thématique : les réformes juridiques
et les réformes managériales.................................................................. 40
Présentation de l’ouvrage.................................................................................. 43
B ibliographie générale ......................................................................... 45
Première partie
La conception des réformes :
des approches juridiques
aux approches managériales
Deuxième partie
Les relations avec les usagers : du médiateur à la démocratie
administrative
Chapitre 4. Les droits des usagers dans la procédure administrative. ................... 129
Chapitre 6. Les démarches centrées sur la relation avec les usagers. .................. 169
Troisième partie
La gestion publique : du statut de la fonction publique
à l’administration numérique
Quatrième partie
Le budget et la fiscalité : de la LOLF au projet d’impôt mondial
sur les sociétés
Cinquième partie
Les programmes transversaux : du renouveau du service public
à la transformation de l’action publique