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Nous sommes les héritiers et les bénéficiaires des siècles d'histoire de l'architecture.
Cet héritage est riche et vient du monde entier. Nous devons nous demander si en nous serons les
continuateurs ou les liquidateurs. Le choix nous appartient. Il est capital.
Il prouve que les mêmes formes architecturales et le même langage ont sans cesse
réapparu pour être à nouveau interprétés par les générations successives.
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Temple de la Concorde à Sicile,432 Bav. J-C Poggio a Caiano, villa médicis de Sangallo, xv è siècle
Le monde ancien nous a également légué, intacte, toute une série de travaux
théoriques, comme le traite de l'architecture, écrit par l'ingénieur et architecte romain Vitruve, Marcus
Vitruvius Pollio (1ers. av. J.C). Les idées de Vitruve et les termes qu'il utilise constituent encore de nos
jours la base d'un grand nombre de théories architecturales.
Il affirme qu'un édifice obéit à trois conditions : il doit être sain (firmitas) sur le plan
structural, il doit avoir une fonction pratique (utilitas) et doit répondre à des critères esthétiques
(venustas). Chacun de ces trois aspects a donné lieu à des études séparées, mais même les auteurs
modernes démontrent que la forme définitive d'un bâtiment dépend du respect de ces trois règles.
Cependant, en fonction des époques, l'aspect social, esthétique ou technologique a pu l'emporter sur
les autres.
Dès le début de la Renaissance, Brunelleschi et Alberti ont utilisé les règles de Vitruve
pour étudier les ruines des constructions romaines ; le traité de reaedifficatoria (imprimé en 1485)
écrit par Alberti, qui exerça une grande influence, n'est rien d'autre qu'un plagiat des travaux de
Vitruve. Alberti se montre caustique à propos de certaines erreurs de l'architecte romain. Il n'en reste
pas moins que le développement de l'architecture de la Renaissance eût été impossible sans cette base
théorique.
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Même au milieu du XIXe siècle, un précurseur tel que Gottfried Semper commence
son ouvrage Der Stil (1860-1863) par une discussion sur la symétrie et l’eurythmie ; Le Modulor de Le
Corbusier, publié en 1950, constitue une tentative pour créer une échelle plus souple de proportions
nouvelles. Fondée sur les dimensions humaines, elle devait remplacer le système de Vitruve codifié
par la Renaissance.
Les traités et les ouvrages théoriques n'ont été qu'un moyen de transmission des idées
sur l'architecture. Ce moyen a souvent dicté la forme définitive des constructions. Néanmoins, la
source la plus évidente des concepts réside dans l'étude effective des bâtiments, puis dans celle des
modèles et des représentations bidimensionnelles.
A partir du milieu du XVIIIe siècle, on commence à publier des livres qui illustrent non
seulement le style de l'époque, mais aussi les styles de toutes les périodes et de tous les peuples. La
mentalité du XIXe siècle, qui établit le culte du musée, classe, répertorie et multiplie les exemples.
L'architecte est désorienté, mais les illustrations lui permettent d'être certain que, quel que soit le
modèle choisi, il obtiendra un résultat convenable du moins quant aux extérieurs des édifices.
Nous pourrions nous « passer » (c'est peut-être un sacrilège) des romans de grands
auteurs et des symphonies de virtuoses. Mais, nous ne pouvons nous passer de quatre murs et d'un
toit - ceux d'une hutte, d'une cabane ou d'une ferme, d'un temple ou d'une cathédrale, d'un atelier ou
d'une usine, d'un château, d'un pavillon de banlieue ou d'un gratte-ciel. A l'homme sa maison, que ce
soit sur terre ou ailleurs, c'est la condition première de sa vie et de sa survie à laquelle confusément il
aspire. L'histoire de l'architecture, c'est donc l'histoire de la condition humaine depuis la préhistoire.
L'histoire de l'architecture, écrite à travers les siècles par le génie des architectes et
constructeurs, est indissociable de notre destin.
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L'art correspond à un besoin fondamental de l'homme. Son premier objet est une
interprétation plus complète de la vie dans toute sa plénitude. Il lui arrive, il est vrai, de servir d'autres
fins : religieuses, politiques, sociales, symboliques, mais ces fins louables ou non, sont étrangères à la
fonction première de l'art et peuvent même constituer un obstacle à son accomplissement. L'art ne
contribue pas à la satisfaction des nécessités premières de la vie. L'humanité ne peut vivre sans
nourriture, sans abri et sans vêtements ; elle peut subsister sans art. Lorsque l'existence même de
l'homme est en jeu, l'art, qui n'a aucune valeur immédiate ou pratique, peut être subordonné à des
besoins plus urgents.
Peu d'activités humaines sont sujettes à autant d'interprétations diverses que l'art,
dont la signification varie pour chacun. Aristote y trouve les éléments d'une théorie esthétique ;
Spengler y voir le reflet d'une civilisation. Un savant ou un ingénieur ne s'intéressera peut-être qu'à
son aspect technique alors que d'autres seront plus sensibles à l'expression personnelle. L'harmonie
des formes qui se manifeste dans la peinture, la sculpture ou l'architecture séduire l'esprit de l'esthète,
tandis que la beauté globale de ces formes accroîtra le plaisir que tout homme retire des objets qui
l'entourent. Le créateur ou l'amateur très sensible trouvera dans l'art une catharsis(purification)de ses
sentiments.
L'œuvre d'art est comme un triangle dont les côtés seraient le sujet, l'expression et la
forme. Ces trois éléments sont interdépendants mais pas nécessairement égaux. Un artiste peut
s'attacher à un aspect plutôt qu'à un autre. Puisqu’aucun de ces éléments n'a, en soi, plus de valeur
que les autres, accentuer l'aspect formel n'est ni pire ni meilleur que d'accorder une importance
capitale à l'élément expressif ou au sujet.
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Sujet
Forme Expression
Les côtés de notre triangle ne doivent pas être confondus avec les moyens techniques
de l'art - ligne, masse, volume, espace, couleur et matière - qui permettent à l'artiste de matérialiser
le sujet, l'expression et la forme.
L'élément figuratif n'intervient pas en architecture, ni dans la plupart des arts dits
mineurs ; sont équivalente est alors la fonction, c'est-à-dire le service que doit rendre l'édifice ou
l'objet. L'architecture diffère des arts figuratifs par l'importance accordée à ce facteur. Dans le domaine
de la peinture et de la sculpture, le sujet - terme que nous employons pour définir des possibilités
descriptives - peut être primordial ou négligeable. Par contre, sauf quelques rares exceptions, la
fonction est vitale en architecture. Il est indispensable que toute construction puisse être utilisée
efficacement. Un édifice qui répond à sa fonction n'est pas toujours esthétiquement réussi, mais sa
construction est inutile lorsqu'il n'y répond pas.
II. 3 L'EXPRESSION
En effet, l'expression n'est rien d'autre que l'analyse du modèle, du sujet par l'artiste.
Le choix du sujet implique déjà un jugement de l'artiste puisqu'il indique ce qui lui parait important ou
esthétiquement intéressant. En général, de nombreux autres facteurs entrent également en jeu. Deux
artistes réagissent rarement de la même façon à un même sujet. Un incident de la vie quotidienne
peut paraître amusant à un artiste, tragique à un autre ; un troisième y trouvera prétexte à juger la
société. Cette grande variété de réactions met en lumière la personnalité de chaque artiste. La réaction
est parfois si individuelle que seuls des hommes au tempérament semblable peuvent la comprendre
entièrement. A la limite, puisque chaque personnalité est unique, l'expression peut être si particulière
qu'elle n'est plus compréhensible que pour l'artiste lui-même.
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En pratique, la destination d'un bâtiment nous est souvent suggérée par l'image
traditionnelle que nous nous en faisons, image conditionnée par nos connaissances.
Nous nous attendons à ce qu'une école ait non seulement l'air d'une école mais qu'elle
ressemble aux écoles qui nous sont familière, ce qui est malencontreux lorsque les bâtiments que nous
identifions comme écoles ne correspondent pas à cette fonction. De plus, nous pouvons demander au
plan d'exprimer la spiritualité dans une église, le divertissement dans un théâtre. Cette notion de
spécificité se retrouve aussi parfois dans la peinture et la sculpture.
II. 4 LA FORME
Les chaudes couleurs des vitraux du Moyen Age sont extrêmement décoratives. On y
trouve des arbres et des plantes jaune or, bleus ou violets, non pas parce que le vert n'était pas
disponible - on les trouve parfois dans le même vitrail - ni parce que l'artiste a vu des buissons violets,
mais parce que ces couleurs, ainsi associées, créent un ensemble hautement décoratif. Il en va le même
pour l'étonnante gamme de coloris des miniatures persanes.
Ces trois éléments, sujet, expression et forme, se retrouvent ainsi dans les œuvres
d'art. L'artiste peut donner la priorité à un seul ou les associer selon le but qu'il se propose ; son choix
peut être déterminé par des facteurs historiques (conceptions esthétiques et techniques de son temps)
; quoi qu'il en soit, il doit arriver à une unité qui permette à l'observateur de saisir essentiel de son
œuvre.
En ce qui concerne le contenu, il arrive que l'artiste traite plusieurs sujets à la fois,
comme l'intrigue principale et les intrigues secondaires dans un roman. On peut avoir un immeuble
avec appartements, bureaux et commerce, mais généralement un sujet central prédomine.
L'introduction d'un sujet accessoire, quelle qu'en soit la valeur expressive ou formelle, tend à
détourner l'attention du thème principal. Cependant, des détails secondaires bien choisis peuvent
enrichir le sujet. L'artiste peut également ajouter à dessein des objets contrastants pour accentuer
l'effet qu'il recherche.
II. 5 LA COMPOSITION
Les éléments de la composition offrent un champ infini de possibilité, que tout artiste
met en application, instinctivement ou non. On en retrouve les principes non seulement dans les arts
plastiques mais dans d'autres formes d'expression artistique et dans la nature même. L'organisation
de la nature en général est si complexe qu'elle défie toute analyse, mais elle nous offre des illustrations
innombrables de l'harmonie, du rythme et de l'équilibre. La symétrie d'un pin et la réparation
équilibrée des feuilles de chaque côté de la tige de certaines plantes sont des exemples bien connu.
II. 6 LA COULEUR
Pour parler de la couleur avec plus de précision, il faut savoir que ce terme implique
trois propriétés dont les noms peuvent varier. La première est la couleur proprement dite : rouge, bleu
ou jaune, etc. Cependant, chacune d'elles peut être utilisée en plusieurs tons, par exemple bleu de
Prusse, bleu outremer, bleu gris, etc., ayant chacun un éclat propre que l'on nomme intensité.
Finalement la couleur peut être plus ou moins claire et changer ainsi de valeur. La gamme complète
des tons est infinie mais un artiste peut en déterminer les limites pour une œuvre déterminée, créant
ainsi des possibilités d'harmonie.
Giotto, lui estime que la solidité, autrement dit le volume de ses modèles, est plus
importante que la surface plane de son mur. Il suggère donc, par la couleur, différents degrés de
luminosité pour créer une sensation de masse. De même, Maillol met l'accent sur la masse, le poids
de la femme assise ; ces mêmes éléments sont mis en valeur par les pyramides de Gizeh. Toutefois, le
volume peut être aussi bien léger que massif. La forme du Bauhaus de Dessau est presque aussi simple
que celle des pyramides mais l'observateur perçoit l'espace contenu à l'intérieur, contrastant avec la
densité de la pyramide.
Lorsque Giotto vit ses personnages comme des volumes, il lui fut nécessaire de créer
pour eux un espace à trois dimensions. Chez lui cet espace est encore limité, mais plus tard un Pozzo
parviendra à créer dans ses fresques une illusion de très grande profondeur. De même les trois figures
de la Madone del Cardellino de Raphaël forment une pyramide compacte, se détachant dans l'espace
illimité du paysage, tandis que les personnages de l'embarquement pour Cythère de Watteau se
fondent dans l'espace. Le Parthénon d'Athènes et la cathédrale de Reims présentent la même
opposition. Le premier est un prisme se détachant sur l'espace environnant alors que la plupart irriter
est conçu comme un tour indépendant de l’extérieur ; dans les architectures modernes, les murs de
verre constituent une séparation minimum entre l'intérieur et l'extérieur, si bien que deux espaces s'y
rejoignent.
La palette d'un peintre de fresque est moins étendue que celle d'un peintre à l'huile,
de même que les possibilités de la peinture à l'huile diffèrent de celles de l'aquarelle. Dans le domaine
de la sculpture, le choix de la pierre impose une conception plus stylisée du modèle. Les limites se sont
néanmoins considérablement élargies.
Quoique le choix des matériaux n'exerce pas une influence plus grande sur
l'architecture que sur la sculpture ou la peinture, les conséquences de ce choix sont plus perceptibles.
Le bois, matière fibreuse relativement solide par rapport à son poids, peut être taillé en longueur pour
former des poutres ou des colonnes. D'étroits montants de bois supportant des poutres allongées
donnent des rectangles plus larges que hauts. Dans la salle de conférence de Tôshodaiji dont la
charpente est en bois, ces rectangles apparaissent dans les proportions et dans tous les détails de la
construction. Le poids de la pierre appelle une destination différente.
Un linteau en pierre aussi long et étroit que les pièces en bois de l'édifice japonaise
rompait sous son propre poids et ne pourrait certainement pas supporter la charge supplémentaire
d'un toit ou d'un étage. Les linteaux en pierre doivent par conséquent être courts et les supports
rapprochés. Des facteurs identiques expliquent les proportions plus lourdes des colonnes en pierre.
Il en résulte des rectangles verticaux plus hauts que larges. Les premiers exemples
d'architecture, comme le site préhistorique de Stonehenge illustrent cette esthétique de la pierre. Ce
cercle de monolithes réunis par des linteaux forme une série de rectangles verticaux. Jusqu'à
l'invention du béton, la majeure partie de l'architecture occidentale était basée sur la construction en
pierre. Certains styles comme le Georgien du dix-huitième siècle aux Etats-Unis, firent souvent appel
au bois, mais les proportions et le vocabulaire architectural étaient influencés par ceux de la
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maçonnerie. Certains détails étaient cependant adaptés aux matériaux : colonnes amincies au point
qu'elles n'auraient pu être exécutées en marbre.
Stonehenge
II. 8 LA GEORGRAPHIE
Jusqu'à présent nous nous sommes intéressés aux problèmes propres à l'artiste. Si
celui-ci œuvrait dans le vide, eux seuls compteraient. Mais ce n'est pas le cas ; d'autres facteurs
influencent sa création, liée à l'époque et au pays où son œuvre voit le jour, et déterminent aussi bien
sa façon d'aborder les problèmes esthétiques que sa pensée.
Ensuite, lorsque l'architecture est particulière à une région, nous pouvons nous
attendre à trouver un toit à faible pente ou plat dans les pays méridionaux, un toit à forte inclination
dans le nord. La faible pente du toit du Parthénon est suffisante pour évacuer la plume, mais elle serait
bien moins appropriée s'il fallait tenir compte d'importantes chutes de neige. Le toit fortement incliné
des chalets de Haute-Savoie convient au climat de la région. Dans le désert, les édifices présentent
toujours des tous plats : villages pueblos du Nouveau-Mexique ou temples égyptiens. Néanmoins, bien
d'autres considérations peuvent intervenir : vent, type de construction, matériaux employés,
transmission d'un style architectural d'une région à une autre, etc.
II. 9 L'ECONOMIE
Il faut enfin tenir compte de la diffusion des styles artistiques d'un pays à l’autre : l'art
doit beaucoup plus aux voies commerciales et à certains voisinages qu'on ne l'imagine.
Les conditions économiques jouent un rôle encore plus déterminant. Une longue
période de chaos économique peut éliminer l'art. La guerre de Cent Ans, en France, mit fin à la
construction des cathédrales et fut relativement stérile en œuvres d'art. La guerre de Trente ans laissa
derrière elle une Allemagne artistiquement desséchée. Les siècles de misère et de confusion qui
déferlèrent sur l'Europe occidentale après la chute de l'Empire Romain éteignirent presque la flamme
créatrice. Quelques édifices insignifiants, de rares manuscrits, des sculptures en ivoire, des émaux et
d'autres petits objets sont le seul héritage que nous possédions de cette période en Occident. Il est
vrai qu'avant l'occupation romane beaucoup de ces régions possédaient un art autochtone très
primitif.
D'autre part, il peut y avoir des ruptures entre vie économique et art. Le passage de la
technique artisanale à la technique mécanisée dans la production des matériaux de construction est,
dans une certaine mesure, à l'origine du style architectural contemporain, mais ce passage ne s'est pas
fait sans hésitations ou oppositions.
Le régime politique en soi a sans doute moins d'importance et son influence peut le
plus souvent se ramener à des facteurs économiques. Lorsque les impôts se calculèrent d'après le
nombre ou dimensions des fenêtres, les constructeurs en tinrent évidement compte. De même,
l'impôt perçu sur le nombre d'étages amena la construction de mansardes, stratagème permettant
d'ajouter un étage sous le toit. Par contre, l'appui de certains groupes sociaux a toujours été un facteur
décisif. La richesse et la puissance de l'église au Moyen Age expliquent l'art essentiellement sacré de
cette époque.
Mais de tous ces éléments, la structure sociale d'une époque est sans doute le plus
important, puisque c'est elle qui, en dernière analyse, définit ses critères. La puissance Rome impériale
créa une civilisation, et par conséquent un art, à son image : dimensions colossales, marbres aux
couleurs somptueuses, effets grandioses. Les démocrates aristocratiques de la Grèce, avec leur
propension aux discussions philosophiques et esthétiques, devaient fatalement développer un art
équilibré, délicat et raffiné. L'importance accordée aux salons, pendant le dix-huitième siècle français,
produisit un art de boudoir aux dimensions réduites, badin, sans lois précises mais jamais vulgaire.
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II. 10 LA RELIGION
Si l'art naît de l'esprit d'une époque, il façonne aussi la culture de cette époque et des
temps à venir. Tout comme Homère cristallisa dans ses vers les conceptions éthiques des Grecs, les
cathédrales romanes et gothiques, nées des rites et de la foi, confirmèrent ces rites et consolidèrent
cette foi. Après les innovations de Giotto dans le domaine de la peinture, les italiens de la renaissance
ne purent plus concevoir l'homme comme on l'avait fait jusqu'alors. C'est peut-être par un tel pouvoir
que l'art apporte sa plus grande contribution à l'histoire de l'humanité.
Dans la mesure où une période constitue une entité historique, le régime, la religion
et la structure de la société contribuent à l'expression artistique, engendrent un style. C'est ainsi que
nous pouvons parler d'une période gothique, de la renaissance ou du style baroque, indiquant de la
sorte qu'il existe certaines similitudes dans les créations d'une époque déterminée. Mais, si certaines
constantes sont valables pendant une période donnée et dans des régions géographiques relativement
étendues, d'autres ne le sont pas en ces mêmes lieux, où leur importance varie à l'intérieur de zones
plus restreintes. C'est ainsi que l'on peut considérer le style gothique ou celui de la renaissance dans
leur ensemble, mais aussi constater, par exemple, qu'il y a des dissemblances entre le gothique anglais
et le français, entre le baroque flamand et l'italien.
IX. 1 GENERALITES
Les métaux que nous leur devons sont le cuivre et le bronze, en attendant le fer dont
l'introduction sera plus tardive. Leurs arts sont surtout ceux où le feu intervient, leur époque celle d'un
des plus surprenants efforts de l'activité inventive : ces mêmes hommes qui nous ont donné les métaux
se présentent à nous comme les créateurs d'une mécanique assez puissante pour, permettre la
manœuvre des blocs monstres qui seront les premiers monuments de l'architecture.
Les premières œuvres peintes, gravées ou sculptures, datent des temps obscurs de la
préhistoire, alors que les glaciers recouvraient encore la plus grande partie de l'Europe septentrionale.
Les archéologues en ont découvert des vestiges dans de nombreux sites d'Europe, d'Afrique et d'Asie.
Les exemples les plus connus et les plus frappants de cet art se trouvent dans certains abris souterrains
et grottes du sud de la France et de l'Espagne septentrionale et orientale, habités à la fin du
Paléolithique (période glaciaire), c'est-à-dire il y a environ douze mille à vingt mille années.
d'une centaine de grotte nous a permis d'acquérir des connaissances de plus en plus approfondies sur
l'homme de la Préhistoire et son art.
Un peu partout dans le monde l'homme primitif creusa, grava ou peignit les parois
rocheuses de ses abris ou grottes : en Afrique méridionale, centrale et septentrionale ; dans les régions
occidentales des Etats-Unis ; en Océanie, en Australie et en de nombreuses autres contrées. Toutes
ces manifestations d'art rupestre ne datent pas de la même époque ; en fait, les archéologues sont
souvent réduits à émettre de pures hypothèses sur
leur âge ; néanmoins, en de nombreux points du Les principaux représentants de la faune
globe, cet art primitif présente des caractères pléistocène étaient des animaux
communs. Sa première expression (la plus actuellement éteints dont :
représentative) fut probablement celle du
paléolithique supérieur en Europe du Sud-ouest. • Sculptures
• Bas-reliefs
On distingue deux centres d'art
• Le grand hippopotame
primitif européen, celui du nord de l'Espagne et du
• Le mammouth
sud-ouest de la France, ou région franco-
• Le rhinocéros à narines
cantabrique, et, plus au sud, celui, un peu moins Cloisonnées
ancien, de l'Espagne orientale ou région levantine. • Le grand ours des cavernes
Le centre franco-cantabrique correspond à • Le grand cerf d'Irlande
l'Aurignacien et au Magdalénien, à la première et à • L'urus
la troisième période du Paléolithique supérieur, qui • L'hyène des cavernes
doivent leurs noms à des sites du sud-ouest de la
France. Les œuvres d'art de cette contrée furent en
général retrouvées dans des grottes profondes, alors que celles de la zone méridionale apparaissent
sur les parois rocheuses d'abris sous roche.
• Chasse
• Pêche
Activités • Fabrication d'arme
• Fabrication d'instrument d'os et de silex
A. LE TRAVAIL DU BOIS
Les emplois du bois réduits à ce qui peut s'exécuter à l'aide de la hache et de la scie de
silex, sont bien restreints : la charpenterie proprement dite suppose au moins des instruments de
bronze. Et, même à leur aide, la taille des assemblages est pénible ; elle l'est à ce point, qu'on voit les
constructions creuser leurs pirogues dans des troncs d'arbres plutôt que de les composer de pièces
ajustées. Lorsqu'il s'agit de bâtir des huttes, les assemblages sont autant que possible remplacés par
des ligatures plus ou moins semblables à celles qui fixent les instruments de silex à leurs manches : la
vannerie, qui n'exige aucun outil, doit avoir précédé la charpente ; et la charpente par ligatures
devance nécessairement la charpente d'assemblage. Planter des poteaux dans le sol, et relier à ces
poteaux à l'aide de harts des traverses de planches ou de toitures, voilà en somme le résumé de la
charpente préhistorique.
B. LA PIERRE
La pierre était d'un emploi plus difficile encore : le tranchant du silex se brise par les
chocs. Le bronze même entame mal le roc et permet moins de le tailler que de l’« étonner » par
percussion, toutefois, rend-il le travail possible ; l'architecture de pierre n'était praticable qu'à l'époque
des métaux : de là sa tardive apparition.
Les éolithes
fig. 1.
Veut-on soulever le bloc ? Il suffit de lui adapter une série jointive de leviers
qu'on charge en queue (croquis M) ;
Veut-on la faire cheminer ? On donnera (fig.2) au massif qui la porte une légère
inclinaison, et on rendra glissante la surface d'appui en la revêtant d'un corroi d’argile ; cela
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fig.2
fig. 3
Elle est lente, mais on sait combien le temps compte peu chez les peuples
primitifs. Elle demande une somme de travail énorme, mais le fait seul de ces monuments
sans utilité matérielle témoigne d'une formidable organisation autoritaire : le mégalithisme,
où la dépense de travail compense la pénurie d'outils, est bien l'architecture de populations
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❖ Le totémisme
Théorie qui proclame qu'à chaque clan correspondrait un animal totémique objet de
prohibitions, alimentaires en particulier, et parfois objet d'une sorte de culte.
→ un nombre certain d'animaux est porteur de flèches ou de blessures incompatibles avec la
prohibition propre aux animaux totémiques.
❖ Le structuralisme
Aux années 60, A. Leroi-Gourhan (1911-1986), proclame que derrière le désordre apparent de
l'art pariétal il existe un ordre, une structuration de la grotte dans son ensemble avec des
figures d'entrée et de fond, une organisation des panneaux avec des figures centrales et
périphériques, et surtout une dualité fondamentale femelle/mâle représentée par le couple
symbolique bison-aurochs/cheval, à la fois opposé et complémentaire.
Une cinquantaine d'années s'est maintenant écoulée sans que la structure tant cherchée n'ait
pu être mise en évidence de manière sure. Bien au contraire certaines recherches ont abouti
à une dualité bison/cheval mais de polarité sexuelle inverse.
❖ Le pouvoir magique et la chasse
Hypothèse soutenue par l'Abbé Breuil (1877-1961). L'ancêtre est présumé être un chasseur
affamé, certains animaux paraissent atteints par des flèches, les figures mi-animales mi-
humaines sont vues comme des chasseurs travestis pour approcher le gibier. Cette théorie de
la chasse magique suppose une relation d'identité entre l'image et son sujet. Le bison dessiné
est symboliquement tué avant de l'être réellement. Théorie de chasse magique plutôt que
religion primitive (Grotte Lascaux : Chapelle Sixtine de la Préhistoire).
→ Quelques animaux paraissent effectivement blessés par des flèches. Cependant les
animaux blessés ne sont pas très nombreux, surtout les fouilles montrent que le bestiaire
représenté ne correspond pas à ce qui était réellement consommé par les paléolithiques
(échantillon culinaire).
→ Ce pouvoir magique est contredit également par les nombreuses représentations
d'animaux et d'éléments sans rapport avec la chasse (mains, figures humaines, ...)
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Zone image
Les contours, en ocre rouge, sont très stylisés et l'artiste a dessiné seulement
deux pattes. Aucun détail n'a été indiqué à l'intérieur de la silhouette. L'incision un peu plus
récente de la grotte des Combarelles, en Dordogne, représente un mammouth de profil, les
quatre pattes sont visibles en perspective et des lignes brisées évoquent les longs poils de la
bête. La grotte des Combarelles, découverte en 1901, referme uniquement des figures
gravées mais les caractères du style paléolithique y apparaissent clairement : lignes continues
ou brisées, emploi de petits traits gravés pour évoquer les aspérités du corps.
Les figures animales de la préhistoire (ronde-bosse, relief, incision ou peinture)
ont toutes un style d'un réalisme absolu et saisissant. Cet art vibrant est caractérisé par une
conception (visuelle » et dynamique de l'animal.
Zone image
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Les grottes d'Altamira furent les premières découvertes, en 1868, non loin de
Santander dans le nord de l'Espagne. Ce n'est cependant qu'en 1819 qu'une petite fille
remarque les peintures sur les parois et la voûte. L'immense caverne d'environ 300 mètres de
long est ornée d'incisions et de peintures animales ; certaines sont cernées de noir, d'autres
sont entièrement peintes en rouge ou en noir, d'autres encore sont polychromes. La peinture
la plus importante, et la plus connue, est la « Grande fresque » de la voûte, mesurant environ
14 mètres. On y voit plus d'une vingtaine d'animaux de la fin du Paléolithique, comme le cerf,
le sanglier le bison ; ces figures qui peuvent mesurer de 1 à 2 mètres, sont presque toutes
polychromes et ont été incisées avant d'être peintes. Le réalisme de ces animaux en pleine
course, blessés ou aux abois, est saisissant. La gamme de couleurs est particulièrement riche
et les irrégularités géologiques ont été habilement incorporées aux formes animales pour leur
donner plus de relief.
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L'invasion qui apporte les métaux coupe court à ce premier essor : avec elle,
l'art imitatif disparaît brusquement. L'homme de l'âge de la pierre polie, des mégalithes et des
métaux, devient absolument étranger aux représentations figurées. Dès l'apparition de ce
peuple asiatique, l'idée du grand efface l'idée du beau abstrait, le métier supplante l'art : la
perfection du travail remplace l'élégance des décorations. A l'âge antérieur on ciselait les
armes, désormais on en lisse les surfaces au polissoir ; et, par un phénomène de survivance
bien digne de remarque, nous voyons les premiers instruments de bronze reproduire par pure
imitation les formes traditionnelles des instruments de silex : ainsi verrons-nous l'art grec lui-
même rappeler dans son architecture de pierre les formes de la construction en bois.
A ces naïfs essais succèdent, dans l'Europe du Nord, les runes qui sont déjà des
écritures figurées ; des scènes navales gravées d'un trait expressif et ferme sur les rochers de
la Scandinavie ; et, aux antipodes de notre Europe, les colosses de l'île de Pâques.
Ces statues océaniennes d'un si puissant relief, ces têtes d'une facture franche,
sûre et vraiment monumentale, ne sont-elles pas les productions récentes d'un art issu
peuvent être de quelque continent disparu, où la sculpture en plein relief gardait les libres
allures que la gravure a traduites aux STATIONS TERRESTRES, LACUSTRES OU
premiers âges de l'humanité ? PALUSTRES
Concurremment à Les Néolithiques vivent à l'air libre, dans les huttes sur
l'architecture austère des dolmens, il les plateaux et les sommets escarpés pourvus des
aurait existé dans ces lointains régions sources et au bord de l'eau, sur les versants en pente
douce exposés au midi ou au levant.
une architecture où les
représentations de la nature vivante Ils construisirent aussi au-dessus des lacs, des étangs et
jouaient leur rôle, et qui un jour peut des marécages, des cabanes sur pilotis.
être prendre sa place dans l'histoire
des origines de l'art. Les grottes et les abris sous-roche ne servent plus guère
que d'asile aux morts.
IX.4 MONUMENTS Les huttes néolithiques étaient en partie souterraines.
Elles consistaient en une excavation ronde ou ovale
Les édifices se classent d'étendue et de profondeur variables creusée dans le sol
comme des témoins marquant le et recouverte d'un toit fait des branchages et revêtue de
genre de vie et l'état moral de gazons ou d'une épaisse couche d'argile. Une entrée le
plus souvent en plan incliné, donnait accès à l'intérieur
l'humanité chacun de ses âges :
de la hutte ; la fumée du foyer s'échappait sans doute
par une ouverture aménagée au-dessus du toit.
A l'âge préglaciaire le
climat, avons-nous dit, n'impose ni Les emplacements des huttes, les fonds de cabane, se
l'existence nomade ni l'abri construit. présentent sous la forme de cuvettes creusées dans le
Les seuls indices des stations sol vierge et remplies de terres noires ou noirâtres,
coloration due au centre du foyer et aux matières
préglaciaires sont des foyers,
organiques décomposés, débris des cuisines, os,
ordinairement creusés en contrebas détritus. On y retrouve habituellement des pierres des
du sol, où se sont accumulés des foyers, des ustensiles en silex et en os, des fragments de
charbons, des cendres, les ossements poterie, de meules à broyer les grains et parfois aussi les
des animaux sauvages dont nos débris de torchis c'est-à-dire des morceaux d'argiles
accidentellement durcis par le feu et porte des
premiers ancêtres faisaient leur
empreintes souvent très nettes de bois et des
nourriture. branchages dont le toit de la hutte était constitué.
Lorsqu'à l'époque Les Néolithiques, qui, les premiers ont appris à connaitre
glaciaire la rigueur du climat rend les bienfaits du développement et de la vie sociale
nécessaire un abri, l'homme, encore groupent leurs huttes en villages terrestres ou lacustres.
exclusivement chasseur, cherche dans
ses migrations cet abri sous les surplombs des falaises, ou bien à l'entrée des grottes naturelles
; il faut descendre jusqu'à l'âge actuel, l'âge.
27
INTERPRETATION
On a vu dans ces enfilades de pierres des enceintes sacrées ou des signes servants, à
défaut d'écriture, à perpétuer la mémoire de quelque grand événement. Ces pierres, éclatées comme
les silex, semblent de gigantesques simulacres de l'arme primitive. Le deutéronome nous représente
les hébreux dressant en souvenir d'une victoire des pierres non taillées et semblables aux mégalithes
de la Bretagne : reste à savoir si ce caractère commémoratif doit s'étendre à la famille entière de ces
mystérieux monuments.
D'autres conjectures ont cours sur la destination des pierres levées, des tumuli et des
dolmens :
L'orientation de certaines avenues a fait penser qu'elles pouvaient être des symboles
astronomiques.
En ce qui concerne les tumuli, on a remarqué que fort souvent, d'un tumulus la vue
s'étend à plusieurs autres : ce qui a suggéré l'hypothèse d'une utilisation comme buttes à signaux.
Des dolmens à l'air libre ont été considérés comme des tables de sacrifices, des autels
; mais est-il sûr que des terres autrefois accumulées au-dessus d'eaux n'aient pas disparu ?
Dans toutes ces conjectures il peut y avoir une part de vérité, et aucune d'elles n'est
incompatible avec l'idée de monuments dont la destination principale eût été de consacrer un
souvenir.
Mais ce qu'on ne saurait trop remarquer, c'est le choix pittoresque des sites : la plupart
des tumuli s'élèvent bien en vue, sur des croupes de collines d'où se découvrent de larges horizons :
les auteurs de ces primitifs monuments avaient tout au moins l'art d'associer la nature à leurs œuvres.
Une partie des alignements du Ménec. Ici, chaque menhir mesure entre 1 et 2 mètres
Les pierres levées, les dolmens, ces monuments d'un art à la fois si rude si
imposant, répondent en fait à des dates très variables : telle contrée possédait une
architecture relativement savante au moment où d'autres étaient encore à la période des
essais ; on peut assimiler les groupes humains à des individus qui parviennent à la même date
aux différents degrés de leur croissance.
29
Les dolmens les plus anciens, si l'on en juge par les armes et les outils de silex qu'ils
renferment, appartiennent aux premiers temps de la pierre polie, les plus récents sont
contemporaines des civilisations historiques. En plein moyen âge des dolmens s'élevaient dans les
contrées scandinaves ; les Germains, lors des invasions qui mirent fin à l'empire romain, se servaient
encore d'armes de silex ; la tradition des palafittes s'est continuée dans les îles de l'Océanie jusqu'à
nos jours : gardons-nous donc de conclure de la similitude des procédés à la communauté des dates.
Gardons-nous aussi d'inductions trop faciles sur l'histoire des races humaines : un type de construction
en désaccord avec les matériaux d'une contrée nouvelle ne saurait s'y perpétuer, et la différence des
procédés n'implique souvent autre chose que la variété des ressources. Ce qui du moins parait hors de
doute, c'est qu'il y eut une époque où régnait d'un bout du monde à l'autre le même outillage, qui
implique dans le mode de bâtir d'inévitables ressemblances. L'aspect des silex taillés est à bien peu
près le même de l'Amérique au japon ; tout fait présumer des communications incessantes à travers
des continents peut être disparus, une transmission d'idées que la vie errante des chasseurs établit
entre les contrées les plus lointaines.
On s'est demandé si les mégalithes sont le propre d'une race, d'un peuple à part ?
Qu'on les rapporte sur une carte, on les voit jalonner une ligne parfois interrompue, allant du Japon
au pays de Galles et du pays de Galles au Maroc, avec quelques rameaux branchés sur la direction
principale : ces traînées paraissent indiquer une transmission d'influences. Et d'ailleurs un argument
puissant en faveur de l'hypothèse d'un peuple des mégalithes, réside dans la nécessité d'une méthode.
Les procédés sont simples, mais nullement instinctifs ; ils supposent une tradition commune, et
donnent au moins la vraisemblance à l'hypothèse d'une commune origine.
L'autre foyer est la Chaldée et là aussi nous sommes sur un sol d'argile où
l'homme put être constructeur avant d'être outillé.
Nous examinerons en premier lieu l'art dans ces deux grands foyers, pour
étudier ensuite le rayonnement qui en émane, les foyers secondaires qui interviennent et les
architectures qui naissent de leurs mutuelles influences.
30
Dans l'antiquité le statut du chef des ouvriers est incertain de nombreuses inscriptions
montrent que dans l'Egypte des premières dynasties, il était directement lié au milieu sacerdotal
honoré pour son savoir mathématique et astrologique. L'image de l'architecte que donne la littérature
grecque (Platon, Aristote, Lucien...) est ambivalente. Il science, la plus prestigieuse, des
mathématiques. A l'époque classique, son rôle et son est à la fois utilisé comme paradigme de l'artisan
qui informe la matière et est associé à prestige personnel sont effacés par ceux des hommes politiques
qui font appel à lui. Il en est de même à Rome où le cas d'Apollodore de Damas, architecte de Trajan
constitue une exception ; le panthéon est lié au nom de l'empereur Hadrien ; on ignore celui de son
architecte. Le panégyrique de l'architecte composé par Vitruve dans le De architectura (dédié à
Auguste), est un plaidoyer pro domo pour l'obtention d'un statut « libéral » admis par quelques rares
auteurs, tels Pline et Cicéron. A la faveur d'une formation intellectuelle spécialisée, ce statut paraît
admis à la fin de l'Empire romain, et notamment à Byzance jusque vers le VIIe siècle.
Vitruve considéré comme un architecte était un ingénieur militaire qui aspirait à être
un artiste. Il demandait à l'architecte de faire preuve d'imagination et d'avoir une formation. Pour lui,
celui-ci devait non seulement connaître les données pratiques et théoriques de la construction, mais
encore savoir dessiner, utiliser les instruments de géométrie, connaître l'optique, l'arithmétique,
l'histoire, la philosophie, la musique, la médecine, le droit et l'astronomie. Certaines raisons invoquées
par Vitruve pour justifier l'étendue de ce savoir sont assez surprenantes. Il estimait que la connaissance
de la musique est nécessaire pour s'assurer de la tension égale des cordes d'une catapulte et pour
évaluer aussi l'acoustique d'un théâtre...
La plupart des architectes romains avaient une formation d'ingénieur. Leur rang social
était moins élevé que celui des architectes de la Grèce antique qui, elle, a conservé en grande partie
le nom de ses bâtisseurs. Il semble qu'ils aient été responsables à la fois des dessins et de la supervision
des constructeurs. A Rome, et même au Moyen Age, le rôle de l'architecte est passé de celui d'un
artiste à celui d'un technicien formé aux arts mécaniques. Les édifices de cette période portent plus
souvent le nom du client que celui de l'architecte. Le client a souvent joué le rôle le plus important
dans la construction. Ainsi, pour le toit de l'abbaye de Saint-Denis (années 1140 et suivantes), il fallait
du bois de construction de plus de 10 mètres de long pour fabriquer des entraits, et l'abbé Suger, le
client, effectua lui-même les recherches pour trouver le bois approprié.
Le terme architecte avait disparu au Moyen Age. Les édifices romans et gothiques
montrent cependant, à l'évidence, que la fonction de directeur de la construction demeure. Celui qui
l'assume et dont les connaissances mathématiques et stéréotomiques apparaissent dans des
documents comme les Carnets de Villard de Honnecourt ou des dessins d'exécution tels ceux
conservés au Musée de l'œuvre de la cathédrale de Strasbourg, est alors appelé magister fabricae
31
(maitre d'œuvre, expression demeuré en usage) ou encore magister artificium (maitre en chef
des artisans). Cette terminologie révèle la relation étroite entretenue par le maître (maçon ou
charpentier) avec la pratique et le chantier d'une part, avec le système corporatif de l'autre.
Elle sous-entend également le rôle joué par les clercs qui commandent les œuvres.
Malgré tout, nous connaissons le nom d'un grand nombre de maîtres d'œuvre
du Moyen Age ; les renseignements dont nous disposons sur la façon dont ils étaient
rémunérés prouvent qu'ils jouissaient d'une haute considération. C'était, au sens propre du
terme, des ingénieurs-architectes, maîtres de leur art, bien que la notion d'artiste tel que nous
le concevons de nos jours n'existât pas encore. Les dimensions des grandes cathédrales,
abbayes et châteaux étaient telles que les maîtres d'œuvre voyaient rarement l'achèvement
de leurs travaux. Cela étant, nul n'avait alors conféré à un plan une valeur d'œuvre d'art à
laquelle rien ne pourrait être ajouté ou enlevé.
⁶Ce fut le 12 avril 1334 que la commune de Florence honora Giotto du titre de « Magnus magister (Grand maître) et le
nomma architecte en chef (capomaestro) de Santa Maria del Fiore, appelée alors Santa Reparata. Comme architecte et
comme sculpteur, Giotto a laissé à Florence un monument d'une élégance et d'une harmonie incomparables, le campanile
de la cathédrale.
32
Mais le terme architecte ne retrouve réellement son usage qu'au XVe siècle, en Italie
dans le cadre d'une réorganisation et d'une réévaluation des savoirs et des pratiques, sous l'influence
de l'humanisme. L'architecte est alors investi d'un nouveau statut intellectuel et social, défini pour la
première fois dans De réaedificatoria d'Alberti : « ce n'est pas un ordinaire charpentier que j'appelle
architecte mais ... celui qui est l'égal des hommes les plus éminents dans les autres disciplines (et qui)
au moyen d'une méthode sûre et parfaite, s'assigne à la fois de concevoir par l'esprit et le
raisonnement et de réaliser par la construction » (prologue). Trois traits spécifient désormais la figure
de l’architecte : il devient grand ordonnateur du cadre bâti dans son ensemble, sa tâche n'étant pas
limitée à l'édification des bâtiments individuels, sa discipline est fondée en théorie ; la finalité de sa
pratique est esthétique. Il est promu théoricien et artiste.
Dans les autres pays d'Europe, le titre d'architecte est introduit avec un décalage d'un
siècle. Il marque l'apparition plus tardive de la renaissance et il est lié à l'introduction de la nouvelle
architecture, venue de l'Italie. En France, le terme d'architecte ou architecteur est réservé dans la
première partie du XVIe siècle, aux artisans italiens (Fra Giocondo, Domenico da Cortona, S. Serlio)
appelés par les souverains. Chambriges qui dirige les travaux de Chambord, demeure un magister
fabricae. Philibert de Lorme (1568) s'enorgueillit le premier de ce titre qui l'oppose aux artisans,
entrepreneurs et ouvriers. Son homologue anglais est J.Shute (the first chief grounds of architecture,
1563, qui fait éloge de l'architecte (sic) or mayster of building: ni l'un ni l'autre ne sont d'ailleurs issus
de la tradition des maîtres maçons.
La plupart des premiers ouvrages anglais sur l'architecture sont destinés aux arpenteurs⁸
géomètres et présentent les instruments mathématiques dont ils avaient besoin, mais c'est la
prolifération de ces écrits qui permit à l'amateur de dessiner des bâtiments. Les mêmes connaissances
de base se trouvèrent alors à la portée de l'amateur éclairé, du maçon, du constructeur ou du
charpentier avertis. L'ingénieur-architecte n'avait pas disparu. On doit se souvenir que parmi les trois
plus grands virtuoses du baroque, deux, Borromini et Guarini, avaient été formés dans la tradition
gothique et l'autre, Balthasar Neumann était ingénieur militaire. L'église de Vierzehnheiligen
(Allemagne), œuvre de Balthasar Neumann (1742-1772), fut achevé au cours de la même décennie où
fut construit le célèbre pont en fer de Coalbrookdale (1779) ⁹.
Le problème a pris une acuité dramatique avec la révolution industrielle parce que :
⁸ Arpenteur : celui qui mesure les terres (arpent : ancienne mesure agraire de vingt à cinquante ares)
⁹ Ce pont permit aux ingénieurs et aux architectes de se rendre compte des possibilités structurales en fer.
34
¹⁰ L'institution du diplôme d'architecte, en 1867, a pour finalité la défense des intérêts professionnels des architectes, face
aux menaces représentées par les corps d'ingénieurs. Les définitions de Dauzat traduisent la banalisation et
l'appauvrissement qui en ont résulté.
35
Dans ses formes les plus primitives, en effet, l'architecture locale ne correspond
pas aux règles ni aux fondements de l'architecture principale (ce que l'on appelle en musique
le « système diatonique »), mais elle peut s'épanouir dans une période réceptive à ses qualités,
être également modifiée et influencée par le développement stylistique général. Sa
caractéristique essentielle, qui pourrait au moins faire l'objet d'une définition, réside dans le
fait que la contribution de l'individu, qu'il soit anonyme ou non, passe toujours après les
dominantes du style local. Un bâtiment dont l'individualité transcende des vertus locales.
L'organisation sociale, le climat et les matériaux disponibles ainsi que
L’aptitude à les utiliser constituent les facteurs qui donnent sa forme à ce type
d'architecture. Les traditions formelles et décoratives jouent certainement un rôle, mais les
similitudes de formes rencontrées en divers endroits où il ne saurait être question d'influence
suggèrent qu'il s'agit là d'un problème tout à fait secondaire.
La majorité des constructions comportent des murs qui entourent un espace intérieur
et un toit servant de couverture. Les matériaux utilisés dans un bâtiment ont deux fonctions : tout
d'abord, supporter la structure et, ensuite, clore l'espace. Là où l'édifice touche le sol, on construit
généralement une assise intermédiaire dont dépend entièrement la stabilité du bâtiment et qui sert
de fondations.
Malgré tout, un grand nombre d'édifices médiévaux s'appuient sur des fondations
inappropriées. On a souvent employé la maçonnerie pour soutenir l'ensemble de la charge et pour
fournir une enveloppe protectrice à l'intérieur. Si les matériaux résistent à la poussée et si les murs en
maçonnerie demeurent verticaux et ne sont pas soumis à des forces latérales, ils resteront stables. S'ils
sont couverts d'une voûte qui exerce une poussée latérale, il faudra les soutenir à l'aide d'arcs-
boutants ou bien augmenter leur épaisseur. La déformation vers l'extérieur d'un mur en maçonnerie
entraîne des risques importants d'instabilité ; les poutres des planches et des plafonds sont en mesure
d'augmenter la stabilité en jouant le rôle d'entraits et en transférant la charge verticalement le long
du mur. Dans une paroi en dur, les ouvertures peuvent être à linteau droit (bien que dans un mur lourd
le linteau soit soumis à une importante pression au centre). Elles peuvent être contrées, et dans ce
cas, une grande partie de la charge sera transférée aux murs situés de chaque côté de l'ouverture. On
incorpore des arcs de décharge dans la maçonnerie au-dessus de l'ouverture, ce qui libère le linteau
37
ou un arc authentique d'une grande partie de la poussée qui s'exerce sur eux. Les romains pratiquèrent
très souvent cette méthode, par exemple au Panthéon, pour renforcer les murailles.
La construction par ossature est née d'une architecture fondée sur le bois ; elle fut
adaptée aux constructions en maçonnerie au cours de la période gothique. Le XIXe et les XXe siècles
ont vu l'apparition de la charpente en fer (à laquelle on a ajouté du verre), ainsi que la charpente en
acier associée à des murs en béton. Dans un bâtiment de cette espèce, les parois ne supportent pas la
charge. Celle-ci est répartie sur l'ensemble des éléments, les uns sous tension et les autres sous
pression, le tout produisant un équilibre de forces.
La construction de surface réside dans l'utilisation de matériaux très fins ; ceux-ci sont
considérés comme éléments structuraux et non comme éléments de revêtement ou de remplissage.
Cette technique, toute récente, est réservée essentiellement aux constructions en coque qui utilise le
béton ; elle permet d'élaborer la forme des toitures. Mais les structures à revêtement faites de tôle et
de bois sont fréquentes de nos jours. Le matériau est utilisé de façon bidimensionnelle et traité comme
s'il n'avait pas d'épaisseur. La construction de surface se caractérise par l'importance accordée au
traitement de la surface elle-même.
Pour les architectes, le problème de la couverture des bâtiments a été bien plus
difficile à résoudre que celui de la construction des murs. La forme de toit la plus simple est celle qui
repose sur le principe du montant et du linteau : un cadre rigide triangulaire est placé au sommet des
murs, ce qui fournit en même temps un plafond plat et un toit en pente assurant une protection contre
les intempéries.
Cette méthode est commune à tous les bâtiments vernaculaires, mais son application
aux grands édifices est limitée par la longueur de bois nécessaire. Jusqu'en 1800 environ, le bois était
le seul matériau disponible pour édifier un toit de ce genre. On imagina des méthodes ingénieuses
pour ne pas avoir recours à des poutres d'une grande longueur et pour accroître la hauteur du plafond
à l'aide de consoles en bois. Il existait pourtant d'autres méthodes, du moins pour les constructions en
maçonnerie, à savoir la voûte et le dôme, son dérivé. La voûte est un arc développé en profondeur
pour couvrir la surface d'un bâtiment.
38
Outre, les problèmes de construction qu'elle soulève, la voûte en berceau produit une
poussée latérale qui nécessite la mise en place d'arcs-boutants extérieurs. Le développement du
voûtement en pierre et le système d'arcs-boutants constituent les meilleures réalisations des
architectes gothiques. Cette méthode ne fut pas contestée jusqu'aux XIXe et XXe siècles, époque à
laquelle les ingénieurs purent couvrir de grandes surfaces avec des voûtes en fer et en verre et, ensuite,
en béton armé.
Zone image
Les matériaux utilisés en architecture ont été choisis pour leurs propriétés
physiques, leur coût et leur disponibilité. On a tout d'abord prix celui qui était à la portée de
la main : le bois.
charpentiers à imaginer des structures plus complexes avec des bois plus courts. Les entraits
qui enjambaient la nef de l'ancienne basilique Saint-Pierre de Rome avaient 23 mètres de long.
Les piliers de la lanterne de bois de la cathédrale d'Ely (Grande Bretagne) du bois très épais,
donc très lourd. Afin de construire des bâtiments à deux étages et plus, on utilisa le système
des avancées. Les solives étaient placées en encorbellement sur le mur, et les murs des étages
supérieurs construits de façon à dépasser ceux du dessous. Dans les rues d'une ville comme
Paris, les étages supérieurs des maisons se touchaient presque au milieu des rues, ainsi en est-
il encore à Troyes, dans la rue des Chats. Villard de Honnecourt, architecte au milieu du XIIIe
siècle, donne également une description sur la façon de construire un pont en utilisant du bois
de 20 pieds.
Les matériaux propres à la construction des murs en dur sont tirés de la terre :
boue, tourbe, brique et pierre. Les constructions en boue, tourbe et pisé ont rarement survécu
; il est pourtant certain qu'à l'époque où le bois n'était pas utilisé pour les constructions
régionales ces matériaux étaient plus fréquemment employés. Les murs de ces constructions
n'étaient pas assemblés, mais la caractéristique de la maçonnerie en brique et pierre réside
dans le fait que les ensembles individuels sont réunis pour former une structure cohérente.
La stabilité et la résistance aux intempéries dépendent de la qualité des assemblages.
Normalement, on cimente les ensembles avec du mortier, bien que l'on trouve des murs en
pierre sèche dans certaines régions. Comme les ouvertures d'un mur en dur diminuent sa
résistance, il existe moins de fenêtres dans les constructions en maçonnerie que dans les
maisons à ossature en bois. Rares sont les bâtiments primitifs en pierre qui ont survécu : les
trulli de l'Apulie, en forment de ruche d'abeille et faits en pierre taillée grossièrement,
constituent une exception.
comme base de sculpture architecturale. L'introduction par les romains de l'arc en maçonnerie
dans les formes de l'architecture élargit considérablement le champ de la construction en
pierre et en brique. Les ponts ont exigé une virtuosité particulière dans des techniques qui
sont, par la suite, devenues une partie du langage architectural. En Europe du Nord, il faut
attendre le XIIe siècle pour que la pierre domine largement dans la construction des maisons
individuelles. Simultanément, le style gothique se développe ; il exploite dans ses diverses
formes les qualités structurales, expressives et décoratives de la pierre.
La qualité de la pierre varie beaucoup ; elle va du silex aux granits très durs, en
passant par les marbres, les grès (d'une couleur crème pâle aux rouges éclatants), dont
certains sont doux et d'autres d'une grande dureté, les pierres volcaniques et les diverses
variétés d'argile (la fameuse pierre de l'Ile-de-France et de Caen a fourni les matériaux
nécessaires à la construction d'un grand nombre de cathédrales gothiques). La pierre de
France fut exportée en Angleterre pendant très longtemps et utilisée pour la construction de
la tour de Londres, l'abbaye de Westminster, la cathédrale de Cantorbéry et de nombreux
édifices importants. Cependant, l'habileté nécessaire au travail de la pierre rend son utilisation
moins fréquente que celle du bois de construction.
Jusqu'aux XIXe siècle, le bois, la brique et la pierre sont les principaux éléments
structuraux de l'architecture, bien qu'il existe d'autres matériaux de construction. Ceux qui
servaient à édifier les toits jouaient un rôle dans l'aspect définitif d'un bâtiment. Dans les
constructions régionales, ils déterminaient même la pente du toit. Ainsi, les toitures en
ardoises avaient une pente inférieure à celle des toitures en tuiles. Le chaume était également
très tuilé. Le chaume était également très utilisé compte tenu de ses qualités d'isolation et de
sa légèreté. Pour se protéger contre les intempéries, les murs étaient souvent recouverts d'un
matériau protecteur. Dans ce cas également, le climat et les ressources naturelles jouaient un
rôle prépondérant dans le choix des formes et des matériaux. L'utilisation de planches en bois
est typique de l'Amérique du Nord, mais dans les habitations urbaines l'usage du stuc ou du
plâtre était plus fréquent. On a souvent choisi le plâtre à des fins décoratives dans
l'architecture rurale, et ce, depuis le Moyen Age ; mais let stuc modelé de façon à imiter la
pierre couvre des millions de maisons urbaines dans le monde entier. Quand la maçonnerie
42
n'est pas apparente dans les intérieurs, le bois et le plâtre restent les matériaux les plus
courants ; tous deux ont donné naissance à un grand nombre de styles décoratifs.
La combinaison du fer et du verre est utilisée dans les ossatures du XIXe siècle,
bien que ces deux matériaux aient été largement mis en œuvre dans le passé. Le fer avait servi
depuis l'Antiquité à lier la maçonnerie (bien que la préférence ait été donnée au bronze, moins
corrosif) ; son rôle fut déterminant dans la construction de nombreux bâtiments, du dôme de
la cathédrale de Florence, construit par Brunelleschi (1377-1446), jusqu'au Panthéon,
construit par Soufflot (1713-1780) à Paris. Le verre entre tout d'abord dans la construction des
fenêtres, à l'époque romaine, sous la forme de boudines encastrées dans une ossature en
bois. En installant l'arc dans les murs en dur, l'architecture romaine développe les possibilités
de la fenêtre, élément conducteur de lumière dans toute architecture qui accorde
l'importance aux espaces intérieurs. Normalement, les fenêtres auraient dû être closes par
des volets, mais on s'habitua à les revêtir d'un matériau transparent. Les fenêtres en verre
furent très souvent utilisées dans les établissements de bains ainsi que dans les maisons. On
employait également du sélénite. A Ravenne, capitale byzantine de l'Italie, elles furent dotées
de panneaux d'albâtre transparent. Dans ce cas, le verre était utilisé à des fins décoratives. De
la même façon, les mosaïques qui couvraient les murs étaient constituées de toutes petites
tessères de verre. Il y avait de plus en plus de verre dans les mosaïques murales depuis le 1er
siècle. Celles-ci tirent profit de la qualité spéciale de ce matériau riche en reflets. Lorsque les
fenêtres d'albâtre, couleur de miel, de Ravenne, illuminent le verre, celui-ci donne aux
mosaïques une intensité extraordinaire.
Au cours du moyen âge, les fenêtres des bâtiments séculiers sont généralement
couvertes de membranes animales (comme le parchemin) ou de toile huilée, mais dès le XIe
siècle, le développement des vitraux va de pair avec celui de l'architecture chrétienne.
Normalement, le verre était coloré au cours de sa fabrication (bien que l'on posa
généralement du rouge sur de verre blanc pour l'empêcher de devenir trop dense) ; de plus,
les morceaux de verre étaient généralement soufflés plutôt que coulé, selon la technique
employée à l'époque romaine. Ainsi pouvait-on obtenir des panneaux plus grands et plus
résistants. Au cours du moyen âge, les panneaux avaient au maximum 50 cm environ.
Dans son Utopie, ouvrage paru en 1516, Thomas More, décrit encore des
fenêtres revêtues de toile huilée qui se substitue au verre dans les maisons de sa cité idéale.
Celui-ci est utilisé de plus en plus au XVIe siècle pour les grandes maisons. Harrdwick Hall
(1590-1596) est un exemple de développement de la technique du verre appliquée à une
maison privée à la fin du XVIe siècle. Cent ans plus tard, Wren dispose de panneaux de 74 sur
53 centimètres pour le salon de la reine à Hampton Court (Grande Bretagne).
43
Ainsi une poutre en béton armé peut-elle absorber une plus grande contrainte
qu'une poutre en maçonnerie ou en acier ordinaire. Afin de rendre ce procédé efficace, il est
important que le renforcement en acier soit effectué aux endroits où le ciment absorbera le
mieux les contraintes. Comme ce renforcement a pour but de fournir une résistance à la
traction, les câbles (parfois placés dans des conduits ou dans des gaines) qui sont étirés soit
avant, soit après le coulage du béton peuvent offrir une meilleure résistance que les tiges
d'acier.
En outre, ce procédé est plus rentable. Le béton précontraint s'est révélé
particulièrement utile à la construction de structures de longue portée, telles que les ponts,
On peut l'adapter à presque tous les climats ; il est cependant nécessaire de l'envelopper d'un
revêtement destiné à le protéger des intempéries.
Bien que le béton puisse être utilisé pour de simples constructions, les
bâtiments à ossature continue et à assemblages rigides donnent naissance à des ensembles
monolithiques qui permettent de mieux répartir les contraintes, et la structure dans son
ensemble contribue à supporter des charges qui sont localisées en certains points. L'ossature
en béton permet d'obtenir une grande variété de formes de base (y compris le simple
encorbellement). Les structures linéaires qui reposent sur des nervures en béton en
découlent. Le développement de telles structures, essentiellement bidimensionnelles, qui
reposent sur une dalle ou une coque, est le résultat des travaux des ingénieurs, comme ceux
du suisse Robert Maillart (1872-1940).
44
Les ponts de Maillart eurent une très grande influence dans le développement
de la technique du béton. Ils encouragèrent l'emploi de dalles, économiques et élégantes, du
même matériau placé en encorbellement. Maillart est également à l'origine du système des «
piliers champignons » ; ceux-ci ne supportent pas le plancher comme un poteau le fait pour
une poutre, mais font partie de la structure, la dalle étant renforcée en tous points. La
construction de panneaux et de minces coquilles en béton qui permettent une grande liberté
de forme, en particulier pour les toits, dérive de l'utilisation structurale de la dalle en béton.
Les structures en coquille ont souvent été préférées en raison de la rigidité donnée par la
forme de la double courbure.
Tout cela montre la force que peut apporter le béton dans un ensemble
structural. Mais on peut également l'utiliser pour ses qualités sculpturales. Les travaux des
expressionnistes, certaines réalisations de Le Corbusier et même, en poussant les choses à
l'extrême, le mur de l'atlantique construit par les allemands permet de se rendre compte de
cette force. En plus, ce matériau précolé à l'usine a élargi le domaine d'application de la
préfabrication ; sa souplesse d'utilisation est apparue très récemment dans les édifices de
grande hauteur qui comprennent, dans leur construction, une partie centrale en béton
supportant la charge et abritant tous les services. D'autres matériaux ont suggéré de nouvelles
formes structurelles, comme les structures dites « minimales » de Frei Otto et d'autres
architectes (grandes tentes à couverture suspendue supportées par des poteaux et des
câbles).
La suspension par câble a été utilisée très efficacement par Kenzo Tange, au
Japon, pour soutenir des toits. La « structure spatiale » de Buckminister Füller ne repose pas
sur une nouvelle application des matériaux, mais sur un principe structural qui permet aux
forces internes d'être absorbées. Ainsi, les domes peuvent être construits dans des
dimensions pratiquement sans limite.
¹¹Joseph Monier dépose des brevets relatifs à la fabrication de tuyaux en béton arme (1868), de panneaux (1869), de
colonnes et poutres (1877), et de ponts précoulés (1880). Dans les années 1880, l'ingénieur François Hennebique
commence à travailler sur des planchers en béton armé, et vers 1891, François Coignet construit à Biarritz un plancher
soutenu par des poutres en béton précoulés.
45
Le choix des modèles que fait l'architecte ou la manière dont il les imite ou les
dépasse nous apprennent beaucoup de choses: Lorsque la rivalité a été très forte, la compétition a eu
tendance à se concentrer sur un type de bâtiment soit en portant la forme à ses limites (en particulier
dans les clochers et les voûtes gothiques ou dans les gratte-ciel comme l'empire State Building par
exemple), soit en essayant d'atteindre la perfection dans un cadre très étroit, comme dans les temples
grecs classiques. Une telle rivalité peut donner naissance à une grande variété dans un seul style, mais
d'une façon générale, elle manquera tout à fait de créativité et tendra à se cristalliser sur un genre de
construction.
¹²Voir chapitre II
46
Dans le climat matérialiste du XXe siècle, on estimait que le rôle de la construction est
de s'harmoniser avec les exigences pratiques de la vie sociale et de les. Refléter tant dans la forme que
dans l'expression. Bien entendu, le renouveau d'intérêt pour l’architecture locale est directement
associé à cette vue. Alors qu'un tel principe devrait donner naissance à l'architecture la plus humaine
qui soit, il n'est que trop facile pour la forme de l'habitation de dicter le cadre de vie qu'elle doit
refléter. Le spectre de la machine qui passe du rôle de domestique à celui de maître nous est trop
connu pour que nous puissions apprécier la définition donnée par le Corbusier de la maison, « machine
a habiter ». Il est encourageant de constater que l'architecture des dix dernières années s'est de plus
en plus préoccupé de la vie propre des habitants dans ces bâtiments, qu'ils soient clients ou non. Pour
Philibert de l'Orme, architecte français de la renaissance, il était préférable qu'un architecte fasse des
erreurs dans la décoration, dans les proportions et les façades plutôt que dans les domaines pratiques.
Les bâtiments mal dessinés auraient rendu malheureux ceux qui y habitaient.
Les formes fondamentales des bâtiments qui n'étaient pas conçus pour y vivre furent
(comme pour les demeures) dictées par leur utilisation. Les formes des temples grecs ou romaines et
des églises chrétiennes sont liées aux cultes qui y sont célébrés. D'autres lieux de rassemblement, tels
ceux réservés au commerce, au travail, etc. (bureaux, installations sportives, théâtres), reçurent une
forme adaptée aux relations qu'auraient entre eux leurs utilisateurs. Les exigences prises en compte
sur le plan de l'aspect, de l'acoustique, des possibilités d'accès, du mode de vie des personnes en
général imposèrent une présentation qui devint complètement nouvelle après élaboration. Elle servit
de base à la création d'autres modes d'expression qui suivaient la norme ou s'en écartaient.
Avant le XIXe siècle, il existait peu de types distincts de construction, alors que de nos
jours elles ont d'une grande variété. Cependant, le langage architectural a été appauvri plutôt
qu'enrichi par ce phénomène. L'uniformité de l'architecture contemporaine, avant le milieu du siècle,
et l'augmentation du maniérisme formel depuis cette époque ne nous ont pas laissé de
caractéristiques spéciales qui permettraient de faire une distinction entre les divers types de
bâtiments. La seule variété de construction qui échappe peut-être à cette règle est l'installation
sportive où s'accomplit ce qui est pour la majorité la plus importante des fonctions de la communauté
de nos jours.
A la tendance moderne qui insiste sur une forme exprimant une fonction utilitaire
correspond une tendance à insister sur une forme qui met authentiquement en valeur la structure et
les matériaux. Le message moral de ce respect de la vérité de la nature a été prêché avec tant de force
qu'il serait impossible de le mettre en doute s'il n'était pas aussi contradictoire. Le temps semble
donner du cachet à ce qui est factice prétentieux et sans valeur. Des bâtiments que le moraliste,
condamnait absolument passent pour être charmants aux yeux des conservateurs romantiques. Adolf
Loos (1870-1933) décrivait Vienne comme la ville de Potemkine en se référant aux façades en bois
érigées par l'amant de Catherine la grande en vue de l'impressionner. Non seulement les édifices de la
Ringstrasse de Vienne étaient construits dans des styles d'emprunt, mais même la maçonnerie de
pierre sculptée s'avéra être du stuc. On constate avec ironie que des bâtiments comme le parlement
de Londres ou l'Opéra de Paris sont devenus les symboles populaires de la ville qu'ils embellissent ou
trahissent. Cependant, le mensonge délibéré est moins fréquent que la flatterie. Les styles empruntés
à d'autres courants et utilisés d'une façon inappropriée par des constructeurs qui imitaient leurs
modèles avec naïveté sont plus des incongruités que des tromperies. Le « trompe-l’œil » du baroque
affirmait l'illusion théâtrale, et le cinéma des années 1930 présentait des idées fantaisistes qui
48
n'avaient pas le moindre rapport avec la réalité. Les grands bâtiments électriques du XIXe siècle étaient
plus souvent un hommage au passé que l'expression d'une prétention quelconque.
Le moraliste sévère rejetait tout ceci. Théoricien français, l'abbé Marc Antoine Laugier
(1713-1769) insistait sur l'utilisation correcte et naturelle de la colonne son rôle est de supporter une
poutre ; elle ne doit jamais soutenir un arc et le pilastre est contre nature ; la décoration qui n'a pas
été consacrée par l'usage qu'en ont fait les Grecs doit être complètement condamnée. Si pour lui le
clinquant de l'architecture baroque a été prisé par "Europe pendant plusieurs siècles, fallait-il le
condamner avec moins de sévérité ? Les extravagances de Borromini sont-elles plus supportables
parce qu'elles sont été acceptées par Rome et qu'elles ont été copiées avec affectation ? Le succès des
arts repose sur un principe, sinon, il n'y a pas de règles, il n'y a que des innovations poser une règle
fixe à laquelle l'architecte devra se conformer et qui aura pour conséquence d'éliminer ses idées
capricieuses.
Remarquons que Laugier avait fait figurer l'observation suivante dans son index : << Le
préjugé n'est pas l'origine de la beauté ». Pour lui, l'architecture devait être << naturelle »>, c'est-à-
dire qu'elle devait nécessairement dériver de l'architecture grecque celle-ci, en effet, trouve son
origine dans la nature même qui serait la source de toute forme de construction. La critique de Laugier
que fait le jeune Goethe est plus proche de la vérité Ainsi se moque-t-il de sa théorie sur les origines
de l'architecture en soulignant que les maisons sont faites de murs et non de colonnes.
Autrement dit, l'abbé Laugier apparaît comme cherchant à imposer un système d'idées
qui ne correspondent pas à nos vrais besoins. Pour Goethe, il faut la vérité et non des systèmes, car
l'art véritable découle de l'unité de la conception. Mais le principe du respect de la nature peut justifier
toutes les formes d'architecture. Il est certain que la stérilité du néo-classicisme monumental, pour
lequel plaide Laugier, est égalée par les étendues de béton brut souillées par la pollution urbaine.
La vertu de l'intégrité est indéniable. Bien qu'elle soit utilisée par Goethe pour
défendre le gothique (allemand) contre le classique (français et italien), son application est plus large.
L'intégrité implique l'unité en soi, ce qui signifie une relation visuelle et spatiale entre l'intérieur et
l’extérieur ; elle implique également relation entre un bâtiment et son cadre ; l'utilisation des
matériaux locaux peut, à cet égard, se révéler bénéfique. Malgré tout, trop d'insistance sur ce point
peut trahir une ignorance du rôle des matériaux de revêtement en matière de décoration et de
protection.
Cependant, vers 1828, Heinrich Hübsch publie un livre sur l'architecture religieuse
intitulé dans quel style devrions-nous construire ? Et le XIXe siècle développe le concept de style, en
utilisant le mot pour indiquer les caractéristiques générales d'une époque et d'un lieu particuliers,
découlant des matériaux et des ressources techniques disponibles. Voilà qui peut même apparaître
comme du déterminisme historique dans les œuvres de William Morris et de Semper, même si ce
dernier souligne que la forme est la manifestation de l'idée, en harmonie avec les ressources
matérielles, mais sans être déterminées par elles. Adolf Loos, au début du XXe siècle, attaque les
tentatives du style Sezession et du Werkbund en Allemagne et en Autriche. Pour lui, il est superflu de
vouloir créer un style « pour notre époque » en prétendant que « chaque période a son propre style,
mais pour ce qui est de la nôtre, on lui a même dénié le droit d'en avoir un ».
Initialement, le mot « style » signifie écriture manuscrite. Et celle-ci ne peut pas être
comparée à un gant que l'on enfile. Contrairement aux prétentions des critiques déterministes, il ne
faut pas confondre la main et l'écriture. La main est ce qu'elle est, compte tenu des divers événements
extérieurs. Mais c'est elle qui est guidée par un esprit original et indépendant pour produire l'écriture,
c'est-à-dire le style. Ni les normes ni les conventions n'ont jamais enfermé l'artiste original ; de la même
façon, elles n'ont jamais permis à l'artiste de seconde zone de réaliser des œuvres d'art. Au cours de
l'histoire de l'architecture occidentale, c'est l'interférence de l'originalité et de la tradition qui a permis
d'obtenir ces constructions qui peuvent nous émouvoir aujourd'hui et qui sont porteuses de messages
sociaux, politiques, artistiques et religieux.
Les normes formulées pendant la renaissance n'ont pas arrêté le développement des
formes architecturales, pas plus que ne l'avait fait la géométrie du moyen âge. Il est vrai que les
constructions d'Alberti et de Palladio étaient différentes des idées qu'ils exprimaient dans leurs écrits.
Cependant, Bramante (1444-1514), architecte de la renaissance italienne, utilisait encore le langage
de l'architecture romaine comme un langage vivant qui élargissait l'imagination de l'architecte. Ce
50
mode d'expression classique a pu être considéré comme un langage vivant jusqu'au XIXe siècle
par des architectes comme Sir John Soane (1753-1837) et l'Allemand Karl Friedrich Schinkel
(1781-1841). Même au cours de ce siècle, Lutyens se sentit soumis à l'influence des anciens
Grecs alors qu'il travaillait dans le style dorique. Cependant, la tendance actuelle est opposée
aux normes. Le langage de l'architecture contemporaine se reflète aussi bien dans le style des
critiques que dans le goût contemporain. Il est déterminé par notre préoccupation pour les
personnes qui vivront dans les bâtiments et non pour ceux qui les ont commandités, par notre
souci de l'environnement, par notre rejet de l'austérité et du pur fonctionnalisme, par notre
préférence pour les structures organiques qui conditionnent notre attitude envers
l'architecture présente et passée.
Les créateurs modernes sont les architectes qui ont brisé les normes, les
architectes grecs et médiévaux pour qui les principes n'étaient pas des a priori, des
préconceptions, mais une attitude d'application de leur expérience pratique; Brunelleschi,
Michel-Ange, Borromini qui ont personnellement contribué à l'enrichissement du langage
classique; Telford, Bogardus, Eiffel, Maillart dont les travaux ont transcendé l'argumentation
mesquine à propos du style; Morris, l'urbaniste; Camillo Sitte, Sullivan, Wright qui réagirent
contre la schématisation de la programmation qu'on leur imposait, prévoyant
l'agrandissement au-delà de la cellule centrale. Nous apprécions l'architecture vernaculaire
industrielle du XIXe siècle et d'autres styles historicistes. Certains de nos principaux inventeurs
ont été abhorrés dans le passé, mais nous devons faire preuve d'objectivité pour comprendre
ce que l'on a voulu dire autrefois par l'expression << architecture devant être fidèle à la nature
ou dont la forme doit épouser la fonction ».
Renaissant Rococo
51
Gothique International
Préhistoire
Antiquité (-3500-400)
Au sens large, le Moyen Age se réfère aux mille ans entre la fin de la domination de l'Empire romain et
la renaissance des idéaux classiques qui a commencé avec la Renaissance au XVe siècle en Italie.
Renaissance (1420-1620)
Période en Europe à partir de la fin du quatorzième au XVIe siècle, caractérisée par un regain d'intérêt
dans l'art classique centrée sur l'homme, de la littérature, et de l'apprentissage.
52
Renouveau (et adaptation) de l'architecture grecque et romaine, avec des dômes, des colonnes
rectangulaires (pilastre) souvent intégrées aux murs. Voir aussi l'humanisme.
Au XVIIe siècle, dans les pays du nord de l'Europe et en France s'épanouit le style classique, empruntant
ses formes à l'architecture antique (colonnes, trophées, frontons...). Les lignes sont rectilignes, la
symétrie et les rigueurs de la géométrie sont respectées. Dans le nord de l'Europe (pays protestants),
les églises ont un décor simple. Leur style tranche avec les exubérances du baroque.
Baroque (1600-1750)
Un style dominant de l'art en Europe au XVIIe siècle caractérisé par le jeu théâtral ou dramatique,
l'utilisation de la lumière et la couleur, par ses formes ornées, et par son mépris des principes
classiques de la composition. Ce style se développa surtout en Italie mais eu une influence dans toute
l'Europe (exemple : église Saint-Paul à Paris).
Rococo (1700-1750)
Ce baroque tardif (c. 1715-1775) style chargé utilisé dans la décoration intérieure et de la peinture
caractérisée par des formes curvilignes, des sculptures complexes, les couleurs pastel et la lumière,
souvent frivole objet. Ce style d'art était populaire dans les trois premiers quarts du 18e siècle,
notamment en France, mais a eu un impact dans le sud de l'Allemagne ainsi
Néoclassicisme (1750-1840)
Un regain de forme classique grecque et romaine dans l'art, la musique et la littérature, en particulier
pendant les XVIIIe et XIXe siècles en Europe et en Amérique. Il faisait partie d'une réaction aux excès
du baroque et rococo.
Ne pas confondre avec les « genres » (les catégories en général). Lorsqu'ils sont utilisés dans l'art, la
peinture, le terme « genre » le plus souvent décrit un tableau assez petit, réaliste qui a pour objet les
événements quotidiens, les gens, ou leur entourage. Ces peintures ne sont pas religieuses, historiques,
mythologiques ou abstraite, ils ne sont pas des portraits.
Théorie et pratique d'art à la fin du XIXe et du XXe siècle, qui veut que chaque nouvelle génération
doive s'appuyer sur styles du passé dans de nouveaux moyens ou rupture avec le passé afin de rendre
la prochaine contribution historique majeur. Caractérisée par l'idéalisme, considéré comme « grand
art », comme différenciée de l'art populaire. Dans la peinture, il est le plus clairement exprimé dans
les travaux des postimpressionnistes, en commençant en 1885 ; dans l'architecture, il parait plus
évident dans les travaux du Bauhaus et le Style international, du début 1920 environ.
Une attitude ou la tendance des années 1970, 1980 et 1990, dans lequel les artistes et les architectes
d'accepter tout ce qui rejette la modernité. En architecture, l'éloignement ou au-delà de ce qui était
devenu ennuyeux adaptations du style international, en faveur d'une approche imaginative et
éclectique. Dans les autres arts visuels, le post-modernisme se caractérise par une acceptation de
toutes les époques et styles, y compris le modernisme, et une volonté de combiner des éléments de
tous les styles et les époques. Bien que le modernisme fasse des distinctions entre le grand art et le
goût populaire, post-modernisme ne fait pas de tels jugements de valeur.
Tendances actuelles
• Le Style international
• Le Brutalisme
• L'Architecture high-tech
• Le Post-modernisme,
• Architecture verte
Zone image
54
L'espace a été défini par les mesures linéaires. L'attention s'est portée sur l'harmonie
de celles-ci, même si le système de Pythagore, qui est à la base de l'architecture médiévale et classique,
donne à l'harmonie des mesures linéaires une unité plus abstraite.
L'historien de l'art autrichien Alois Riegl a été le premier, peu avant 1900, considérer
l'histoire de l'architecture en partant de l'espace interne des bâtiments. Plus récemment, notion
d'espace et de temps dérivée des idées d'Einstein et de Minkowski été appliquée à l'espace
architectural. Nous considérons maintenant celui-ci non comme un ensemble statique, mais comme
un élément qui a une relation dynamique avec l'observateur. Chaque bâtiment contient de l'espace
et il est contenu dans un espace plus grand. Il existe pour qu'on le traverse et pour qu'on s'y déplace,
et ce mouvement couvre à la fois l'espace et le temps. Le temps est simultanément une dimension de
l'architecture et de la musique. En outre, il paradoxal de constater que notre perception de cet espace
dynamique est immédiate.
On pourrait penser qu'il est anachronique de parler d'architecture d'un lointain passé
avec cette notion moderne d'espace dynamique ou d'espace actif, mais elle est utilisée pour décrire
un aspect fondamental de l'architecture, qui a toujours préoccupé les hommes de l'art. Les
constructions ne permettent pas d'avoir de doutes à cet égard. De plus, c'est une base essentielle pour
tout langage qui se rapporte à l'architecture contemporaine et à celle du passé.
Comment percevons-nous l'architecture ? C'est une expérience qui n'a pas beaucoup
de rapport avec la façon dont nous percevons la photographie d'un bâtiment. Elle a défié tous les
moyens de reproduction mécanique. Par conséquent, elle garde son impact unique. Celui-ci a été
partiellement détruit par les enregistrements, la radio, la télévision, en ce qui concerne la musique, la
peinture et même la sculpture.
Quand nous approchons d'un bâtiment, nous sommes conscients qu'il influence tout
son voisinage, comme un champ magnétique. En fonction du volume ou impression d'une partie de
celui-ci. Il peut se révéler de lui-même, nous fournir une indication en ce qui concerne sa taille, sa
fonction, sa structure et ses matériaux, et nous avons une idée de l'intérieur. Lorsque nous y
pénétrons, nous comprenons presque tout de suite s'il s'agit d'un espace simple ou complexe et la
direction dans laquelle nous devons nous diriger. D'autres impressions suivent rapidement.
Notre perception de ce qui entoure l'espace vient après notre première perception de
l'espace lui-même. En définitive, ce n'est pas seulement notre première impression, mais aussi notre
plus grande impression ; la principale préoccupation esthétique.
55
Le chemin qui conduirait à cette définition n'était pas sans méandres. Le terme
a monument historique » a dominé les désignations jusqu'à tout récemment. Les deux mots
qui composent l'expression ne sont pas innocents : le premier – « monument » – se référait à
une valeur de signal attachée à l'objet ; l'adjectif accolé – « historique » – conférait la
dimension temporelle du « souvenir ». Alois Riegl, au début du XXe siècle, au premier proposé
une définition du monument passant par le processus de sa constitution. Dans son esprit
s'opposaient le monument « intentionnel » et le monument « historique ». Ce dernier,
perverti de sa destination originelle pour devenir objet de remémoration, n'était pas, au
contraire du monument « intentionnel », créé ou édifié « dans le but précis de conserver
toujours présent et vivant dans la conscience des générations futures le souvenir de telle
56
Le patrimoine fait appel à l'idée d'un héritage légué par les générations qui nous
ont précédés, et que nous devons transmettre intact ou augmenté aux générations futures,
ainsi qu'à la nécessité de constituer un patrimoine pour demain. On dépasse donc largement
la simple propriété personnelle (droit d'user « et d'abuser » selon le droit romain). Il relève du
bien public et du bien commun.
sont la propriété de tous (...) Tous les monuments de sciences et d'arts sont recommandés à
la surveillance de tous les bons citoyens. »
Quelles sont les restrictions que l'on imposera aux architectes lorsqu'il sera nécessaire de
construire de nouveaux bâtiments ?
Les résultats ont été trop souvent désastreux. La pression exercée pour
conserver chaque chose a conduit à la préservation de constructions médiocres. D'autres qui
étaient, au contraire, magnifiques et occupaient de beaux sites ont été détruits. On impose
tellement de restrictions aux architectes que toute chance de succès dans la création d'une
nouvelle architecture est compromise dès le départ. La puissance économique a été l'origine
de la désacralisation des centres historiques. Il eût presque mieux valu laisser une entière
liberté à tout le monde. La nouvelle brasserie Truman de Londres est un signe encourageant
à cet égard. Dans cet exemple, l'ancienne architecture a été incorporée dans un nouveau
concept sans aucun compromis.
Nous devons comprendre que l'architecture doit évoluer avec la société, car les
changements étant rapides, elle est vite périmée. Seule une infime partie des ouvrages
architecturaux existant à l'heure actuelle ont conservé la fonction pratique et symbolique
qu'ils avaient il y a soixante-dix ans. Les églises, les palais, les fermes, les écoles et les gares
doivent être adaptées à une structure de société nouvelle. Cependant, dans le passé, le travail
de l'architecture devait toujours être considérés à long terme. La croissance des églises
médiévales ou des châteaux était, comme celle des
villes, organique. Le dôme prévu par Arnolfo Di Cambio
pour la cathédrale de Florence, à la fin du XIIIe siècle,
fut dessiné et réalisé au XVe siècle par Brunelleschi.
D'ailleurs, c'est souvent la découverte des temples, des tombes somptueuses, des
marchés, des places qui signalent l'existence des grandes civilisations. Ces édifices sont des miroirs du
passé qui permettent d'examiner les croyances, la culture, les talents artistiques et techniques des
peuples d'autrefois
Dans ce chapitre, nous proposons d'enseigner à partir de ce qui est palpable et visible,
ce qui entoure les étudiants et leur montrer qu'ici, dans la ville de Kinshasa, il y a un riche patrimoine
architectural qui peut leur permettre de côtoyer les notions qui semblent lointaines et insaisissables.
Nous parlons de plusieurs styles enseignés en deuxième année en mentionnant des bâtiments à
Kinshasa.
Assistant a l'ISAU
¹³Un certain nombre de commentaires, d'images de cet article se réfèrent à ce travail ou à cette cane qui mentionnent 112
points d'intérêt architectural ou urbanistique Les auteurs enseignants sont José BAMENIKIO, Richard VIBILA, Ko BOKO
TEKE, Alexis TSHIUNZA, Philippe LECOQ et Yves ROBERT avec la participation de plusieurs étudiants.
¹⁴Résolution du Conseil de l'Union Européenne sur la qualité architecturale dans l'environnement urbain et rural du 12
février 2001 (2001/C73/04) rappelant les objectifs assignes à la Communauté en vertu de l'article 151 du traité et de la
directive 85/384/CEE Les détails au point 5.
60
son effacement comme cela est plusieurs fois arrivé dans le passé. Nous ne pourrons qu'être plus fiers
de notre identité et proposer des projets enracinés dans notre histoire et notre culture.
Trouver un équilibre cohérent et viable à long terme entre ces trois enjeux, le progrès
économique (1), la justice sociale (2) et la préservation de l'environnement (3), est la finalité du
développement durable. Si une activité peut générer des revenus ou être bénéfique, tout suit des
schémas en respectant la nature et en promouvant le social, alors elle est durable.
Ces trois aspects, qualifiés de piliers, sont les éléments à prendre en compte dans la
définition de la durabilité d'un projet.
Source : Wikipédia
Il n'y a rien de plus lié à la durabilité que l'architecture. Depuis avant Vitruve I'UTILITAS,
c'est-à-dire le service social ou économique que doit rendre l'édifice, est au cœur du travail de
l'architecte. Les projets se nomment hôpital, école, appartement, usine, bureau...etc. Et si en
recherchant le VENUSTAS, par son expression des façades ou de la perspective, il nous permet
d'identifier le service que rend le bâtiment (une église, une habitation...etc.), c'est assurément parce
que cela est lié à une image traditionnelle culturelle, que nous en avons déjà 16. Que le mot durable
soit pris dans la temporalité ou dans la soutenabilité", il répond à l'exigence du FIRMITAS, car les
matériaux, les structures, tout le travail de l'architecte ne durera que s'il est solide et respecte
l'environnement. Même si le terme écologie est à la mode depuis peu, l'architecte a toujours cherché
à faire des bâtiments qui se fondent dans leur paysage, qui répondent au climat et qui permettent le
maximum d'hygiène. C'est aussi lui qui choisit les matériaux les moins chers qui soient les plus en
adéquation avec son projet et qui durent dans le temps. Il permet aux ouvriers de trouver du travail. Il
laisse des œuvres qui lui survivent des siècles et qui sont les témoins vivants de la culture et du mode
de vie passé. N'est-ce pas cela le durable ?
¹⁵ Ruth SLAVID, 10 principles of architecture, VIVAYS PUBLISHING, CHINE, 2012, p. 12. Marcus Vitrivius a dit que le bâtiment
devait répondre à trois grandes exigences : être utile (utilitas), beau (venustas) et solide (firmitas) et cela reste vrai jusqu'à
nos jours quelles que soient les théories artistiques et styles proposées après. 16 EVERARD UPJOHN, PAUL WINGERT, JANE
MAHLER, Histoire mondiale de l'art, les arts de la préhistoire à la Grèce antique, édition Marabout, Belgique, 1975, p.13
Une forme francisée de Sustainability (en anglais) qui emporte l'idée d'une exploitation des ressources naturelles sans
détruire l'équilibre écologique de la région.
61
Pour établir la valeur patrimoniale des bâtiments à Kinshasa, il nous faut nous servir
des critères utilisés par l'UNESCO pour le patrimoine mondial²³ :
• Apporter un témoignage unique, ou du moins exceptionnel, sur une tradition culturelle ou une
civilisation vivante ou disparue ;
André CHASTEL, Architecture et Patrimoine. Chroniques parus dans LE MONDE, éd Monuments Nationaux,
France, 2012, p.185 19 Bernard QUENEE et Gilles MARTINET, Le Patrimoine produit du Développement Durable
in LERM INFOS n 22, Décembre 2011, consulte le 16 novembre 2012 sur le site http://www.lerm.fr ²⁰ Martin
DROUIN, le Combat du patrimoine, presse de l'université du Québec, Canada, 2007, p.4 Même la célèbre
Charte de Venise (1964) sur la conservation utilise le terme « monument historique et non patrimoine.
Les monuments sont les églises, les mosquées, les édifices publics, les résidences de haut-rang, les mémoriaux
et autres structures analogues. Ils forment un contraste avec leur contexte, discret ou spectaculaire selon les
cas. Les bâtiments formant le tissu urbain sont utilisés pour les résidences ordinaires et les commerces. Dans
les villes qui fonctionnent bien, ces bâtiments forment une structure physiquement cohérente, qui révèle le
tissu social sous-jacent. Matthew FREDERICK, 101 petits projets qui font les grands projets, édition DUNOD,
Paris, 2012, p.89 22 Certains bâtiments sont construits avec l'intention d'en faire des patrimoines. On parle
alors de patrimoine intentionnel. Ce sont souvent des monuments au sens littéral. 23 Microsoft Encarta 2009.
62
• Etre directement ou matériellement associé à des événements ou des traditions vivantes, des
idées, des croyances ou des œuvres artistiques e littéraires ayant une signification universelle
exceptionnelle
Marc GEMOETS, urbaniste et enseignant belge, avec son équipe ont relevé 400
bâtiments et sites exceptionnels rien qu'à Kinshasa²⁵.
Pour situer le contexte de cette histoire, le plan d'urbanisme des architectes beiges
prévoit une zone pour les belges, une autre pour les indigènes et un zone tampon ou sanitaire. La
partie indigène est un plan en damier et celle belge est construite en cité jardin.
Soria y Mata et Ebenezer Howard avaient lancé, peu avant, le concept de ville-jardin
qui est faite de bâtiments entourés par un jardin ou de la verdure. La notion a évolué et de petits
espaces ont pu être aménagés avec ce concept. Il s'agit alors de construire des immeubles éparpillés
dans un espace entouré de verdure ou jardin.
²⁴Bernard QUENEE et Gilles MARTINET, op.cit. Consulté le 16 novembre 2012 sur le site http://www.lem.fr 25
Laure EGGERICX, « Un belge au Congo aujourd'hui », in les nouvelles du patrimoine n°128 (les architectes
belges au Congo), éd. Les Amis de l'UNESCO, Bruxelles, 2010, p. 43 26 Les mouvements artistiques d'avant-
garde, dadaïste, cubiste, futuriste, constructiviste, néo-plasticienne, apporté une contribution importante à
l'architecture. (EVERARD UPJOHN, PAUL WINGERT, JANE MAHLER, Histoire mondiale de l'art, les arts primitifs,
l'art moderne, édition Marabout, Belgique, 1975, p.191) Mais nous ne parlerons qu'en passant de leurs
influences sur l'architecture dans cet article, quoique cela soit donné aux étudiants en deuxième. Un
commentaire aux touristes ne ferait que rehausser la compréhension de l'évolution du bâtiment tant ici
qu'ailleurs. 27 Mikael Raeburn (dir), Op.cit. p.234
63
Zone image
Avant cet urbanisme, il y avait déjà plusieurs bâtiments assez éparpillés dans le style
bungalow et préfabriqué. Le type bungalow tropical avec les éléments préfabriqués métalliques a été
préféré et construit par les européens pour répondre au besoin d'acclimatation Mentionnons :
- deux maisons de type bungalows préfabriqués, sur pilotis métalliques avec véranda, de la
BMS (Baptist Missionnary Society), sur avenue Kalemie à Gombe, parmi les premières
habitations de Kinshasa, 1880²⁸.
- La commune de Ngaliema, qui était l'hôpital de la Croix-Rouge, sur l'ancienne route de
caravane, 1899
- Une ancienne maison pour fonctionnaire sur avenue de la Justice, de structure métallique et
de type bungalow, devenu bureau de la Croix-Rouge, 1910.
Zone image
PAVILLON CRO-ROUGE
Source ULBISAU
²⁸ Le territoire du Congo ne sera attribué au Roi des Belges officiellement qu'en 1885
64
COMMUNE DE NGALIEMA
Source ULB/ISAU
Dans les années vingt, d'autres styles rattachés aux pays d'origine des propriétaires
apparaissent.
Citons en exemple :
- les maisons dites hollandaises sur l'avenue Tombalbaye (1925-1930), avec frontons de style «
Cape Dutch ».
- le Casino Restaurant Bingo Royal, 1925-1928 avec les frontons portugais mezzanines et
colonnes.
- Le supermarché Mikael, ex-African-Lux, de l'architecte Callebout, 1925. Avec la coupole
orientale.
3.1. Le Néoroman
3.2. Le Néogothique
église construite en briques en 1948, et sur avenue Isiro, le centre paroissial Sainte-Anne dont
la cathédrale REYGARTS, construit entre 1913 et 1914. On peut faire remarquer les arcs en
ogive, les vitraux, les contreforts, … etc. caractéristiques du gothique.
²⁹ Philippe CROS, les styles en Architecture, et les Essentiels de Milan Fran, 2007, p48
³⁰ Philippe CROS op Ct., p.50
³¹ Mikael Rachum (dir) op. p. 249
67
Mentionnons qu'à part le modernisme, l'art déco est le style le plus rencontré à Kinshasa. Nous
donnons comme exemples, le lycée BOSANGANI ex- Sacré-Cœur, édifié dès 1928 et l'Eglise Saint
Léopold sur avenue des Ecuries a Ngaliema érigé en 1951.
Quant au style « paquebot », c'est de l'Art déco tardif caractérisé par les formes courbes
accentuées, les longues lignes horizontales, et parfois les éléments empruntés à l'univers nautique,
d'où le nom paquebot
68
Le Stijl, inspiré de Der Stil de Gottfried SEMPER, paraît en octobre 1917 et s'appuie sur le
néoplasticisme. Il encourage l'usage exclusif des lignes droites horizontales ou verticales agencées
parallèlement ou perpendiculairement. Les trois couleurs primaires sont les seuls utilisées. L'art déco
transmet bien la pensée Stijl.
GARE CENTRALE
Source : TSHIUNZA
3.7. Le modernisme
Courant architectural qui rompt avec le style et aboutit à une expression plus libre, le
modernisme est encouragé par un grand nombre d'architecte ayant participé à l'exposition de
Werkbund en 1927 et ayant constitué les Congrès Internationaux d'Architecture Moderne (C.I.A.M).
69
Charles Van Nueten, architecte de la Brasserie de Léopoldville en est membre. Il laisse au Congo une
œuvre d'une esthétique et homogène³².
Ce style propose une approche rigoureuse ou les effets esthétiques sont produits par les
formes, les plans et les ombres comme le disait Le Corbusier : « architecture consiste à rassembler des
masses dans la lumière³³ ».
Quand le modernisme reprend les vertus classiques telles que les porches monumentaux et
une structure lisible et régulière, il est alors qualifié de classicisant et/ou monumental.
Mentionnons :
- Le bâtiment administratif de la SCTP, Tex-ONATRA, ensemble monumental de Van
- Ackere, 1952-1955
- La Poste Centrale avec un porche monumental, de VERSCHUERE, 1949-1952
- Le Ministère de la Fonction Publique, ensemble monumental, de Genet. 1954-1955,
- UNIKIN (université de Kinshasa) de BOULENGIER, 1952-1960
Il est qualifié de tropical quand il intègre les dispositifs climatiques. Les éléments de
composition ou les formes sont ainsi choisies pour répondre au besoin climatique des pays. Il s'agit
notamment des espaces semi-ouverts pour apporter l'isolation, l'ombre et la ventilation³⁴.
Parmi les solutions proposées courantes, il y a l'orientation nord-sud, les ailerons (lames pare-
soleil pivotantes), les lamelles en béton, les claustras devant les vitrages, des structures faisant une
deuxième peau comme brise-soleil, les toitures parasol, débordantes ou même dédoublées, les
³² Alice Wallez, CHARLES VAN NUETEN, in les nouvelles du patrimoine n°128 Op.cit p. 25
³³ Mikael Raeburn (dir), Op. Citsss. p. 259
³⁴ DEQUEKER Paul, KANENE MUDIMUBADU Corneille, L'architecture tropicale, théorie et mise en pratique en Afrique
tropicale humide, Centre de Recherches Pédagogiques, 1992, p.5
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auvents, les dédoublements de mur avec vide entre parois, les revêtements appropriés, les
pilotis...etc.³⁵
Philip Johnson et Henry Russell Hitchock appelle aussi le modernisme, le style international³⁶.
Durant la deuxième république, plusieurs bâtiments sont construits avec des techniques de
construction importées et l'utilisation de la climatisation généralisée. Citons l'actuelle Congo Fleuve
Hôtel, la tour de la RTNC (radiotélévision Nationale du Congo) des architectes Arack et Dougnac.
³⁵ CALTAGIRONE Sandra, « Maurice HOUYOUX sous les tropiques », in les nouvelles du patrimoine nº128.Op.cit p. 25
³⁶ Mikael Raeburn (dir), Op.cit. p. 262
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habitation faite de terres pour symboliser une société bâtie sur l'exploitation minière, des
produits de la terre Bien que le postmoderniste Venturi ait qualifié cela de canard³⁷et³⁸, ce genre de
renouveau esthétique et de production architecturale sont capables de contribuer au patrimoine
mondial par leur différence.
Le postmodemisme n'est pas facile à expliquer tant ce n'est pas un style précis qu'une
philosophie. Il encourage plus d'individualité et d'originalité dans la conception architecturale sans
rejeter les styles passés sur lesquels il s'appuie pour une continuité historique. Un de ses pionniers,
sinon son plus grand représentant, Robert Venturi, a écrit dans son livre culte qu'à notre époque, les
bâtiments pouvaient avoir l'intérieur et la façade complètement différents, comme les magasins de
Las Vegas. Il a appelé cela le « hangar décoré³⁹et⁴⁰ ».
³⁷ On a affaire à un canard e Quand les systèmes architecturaux d'espace, de structure et de programme sont submergés
et déformés par une forme symbolique d'ensemble », Robert Venturi, l'enseignement de Los Vegas, éd. Mardaga, Belgique,
2008 p.97
³⁸ Un bâtiment qui exprime de manière littérale sa signification. Matthew FREDERICK, Op.cit, p.94
³⁹On a affaire à un hangar décoré Quand les systèmes d'espace et de structure sont directement au service du programme
et que l'ornementation est appliquée indépendamment d'eux. Robert Venturi, ibidem.
⁴⁰ Un édifice de forme neutre qui transmet sa signification par une signalisation et par un ornement architectural Matthew
FREDERICK, Op.cit, p.95
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BATIMENT TIGO
Source TSHIUNZA
On retrouve, après rénovation, l'immeuble UTEXAFRICA, occupé par Tigo, avec une façade
travaillée à la manière hangar décoré de Venturi. Le bâtiment reste comme un grand hangar d'usine,
avec ses deux versants de toiture, mais la façade reflète une entreprise de communication.
Nous sommes les héritiers d'un grand patrimoine et beaucoup de constructions actuelles
montrent la volonté d'aller de l'avant et de créer. Les historiens de l'art, les architecturologues et les
architectes auront le plaisir de nous dire dans quels styles nous construisons.
Notons en passant que tout ce qui se fait en dans le monde se retrouve aussi ici. Arrêtons-nous
par exemple sur l'image, ci-dessous, d'un bâtiment près de la gare, une composition dynamique et
équilibrée, avec des expressions déconstructivistes (façades saillantes, fenêtres inclinées, structure
déstabilisante...) et high tech à la fois (le métal et le verre comme matériaux d'enveloppe, des
structures porteuses sophistiquées comme le V portant le toit...). Mais en même temps, des bâtiments
conformes à l'architecture générale de Kinshasa, dans l'esprit art déco et moderniste, continuent
d'être érigés, comme l'immeuble occupé par le MSH.
Nous pourrions nous étendre sur tout le cours de la deuxième année sans finir. Toutefois,
quelques dangers guettent ces patrimoines et il est bien d'en parler avant de voir comment les éviter
et réussir à déterminer une politique appropriée à l'égard des trésors architecturaux.
Nous savons qu'au cours de l'histoire, les bâtiments qui ont survécu sont souvent ceux pour
lesquels on a pu trouver une utilisation au fur et à mesure du changement de la société⁴¹. La difficulté
de l'Afrique vient de cela. Son territoire est un palimpseste où se lit difficilement l’histoire. Celle-ci est
régulièrement effacée pour une réécriture L'Afrique a connu :
L'arrivée de l'islam en Afrique a eu des conséquences sur son urbanisme et son organisation
sociale. La place accordée à un culte animiste, avec des arbres ou autres éléments de la nature comme
temples des ancêtres a été prise par la mosquée. Le cas de Toumbouctou est un bel exemple.
L'empereur Moussa y fit construire en 1325 la prestigieuse mosquée de Djingereiber, par l'architecte
Abou Ishaq es-Sahéli. L’université de Sankoré qui fut fréquentée par plus de vingt-cinq mille étudiants
vit également le jour. On ne peut imaginer, avec de tels changements, retrouver la même architecture.
4.3. L'immense placage urbain d'origine européenne et l'exportation des œuvres d'art africaines à
l'étranger.
Les européens ont succédé aux arabes dans beaucoup de coins de l'Afrique et eux aussi ont
organisé la société. Ils ont créé des villes sur des emplacements des villages et ont apporté la religion
chrétienne. Les Européens ont sauvé beaucoup d’œuvres d'art que les Africains jetaient et n'avaient
nullement intention de réutiliser, d'abord dans un but ethnologique, ensuite comme œuvre d'art,
quand ils y ont décelé des éléments esthétiques⁴².
Les œuvres d'art africaines sont donc dans les musées européens et NON en Afrique. Il faut
rappeler ici que pour la République Démocratique du Congo, la situation est la même. Les œuvres
anciennes de ses artistes ou artisans sont dans le Musée Royal de Tervuren, en Belgique⁴³.
4.4. La modernisation
Certes les travaux techniques sont indispensables pour que les bâtiments restent vivants au
lieu de devenir des pièces de musée, néanmoins, comment déterminer si on doit restaurer, conserver,
rénover ou reconvertir ?
Par exemple, que devait-on faire de la place de la Gare ? La restaurer et la réhabiliter ou bien la rénover
et la reconvertir, comme c'est le cas ? Quelle approche adopter ? Surtout avant de démolir, comme
l'exige souvent la modernisation, souvenons-nous que les œuvre d'art qui semblent à certains si
inutiles, ne disparaissent pas sans accroitre la solitude et le malheur de ceux qui vivaient, même
distraitement, auprès d'elle⁴⁴.
5. Patrimonialisation
L'approche architecturale à adopter face au patrimoine dépend de ce que l'on veut transmettre aux
générations futures. Répondant à la question << quelle politique patrimoniale pour l'aménagement du
territoire de la République Démocratique du Congo ?», Yves Robert⁴⁵ présente un schéma avec quatre
pôles ou points d'intérêt.
• Si l'intérêt est contemplatif, on restaure autrement dit on répare ce qui est abime pour garder
le bâtiment comme l'original. Les matériaux et si possible les techniques sont ceux utilisés à
l'époque de la construction.
• Si l'intérêt est cognitif, on conserve autrement dit on maintient en bon état ou on préserve de
la destruction. On peut alors enseigner sur base du modèle vivant. On peut même reconstruire
et cela répond aussi au pôle suivant.
• Si l'intérêt est identitaire, on valorise. Une patrimonialisation par l'UNESCO par exemple,
donne de la valeur à un édifice et renforce l'identité et la fierté du peuple à qui cela appartient.
POLES DE PATRIMONIALISATION
Source : YVES ROBERT
On déterminera donc la politique culturelle et c'est en fonction d'elle qu'on « définira le champ
dans lequel se poseront les questions techniques, et ce sont les valeurs qui sous-tendent les réponses
qui jugeront de la pertinence des solutions pratiques à mettre en œuvre ⁴⁷ ».
L'architecture a une dimension immatérielle que les hommes apprécient et cela ajoute de la
valeur aux œuvres architecturales. Celles-ci, tout comme les autres œuvres d'art sont porteuses de
culture matérialisée, transmettent un message significatif, des connaissances, des savoir-faire,
d'imaginaires et de l'émotion. Un bâtiment a d'autant plus de valeur qu'il est vieux et peut renforcer
notre identité. Il peut donc être facile d'éveiller l’intérêt pour l'architecture et cela est de première
importance.
Les européens et les architectes en particulier ont déclaré l'architecture d'intérêt public et
invitent tous à y travailler, notamment dans le patrimoine, pour certaines raisons que nous avons
combiné à notre guise, dont quelques-unes qui suivent :
• Un toit est la première dignité. L'accessibilité du logement est essentielle à son usage
L'esthétique de l'habitat est un droit pour tous et le logement doit être un lieu de créativité et
d'innovation pour chacun.
⁴⁷ Bernard QUENEE et Gilles MARTINET, op.cit. Consulté le 16 novembre 2012 sur le site http://www.lerm.fr
⁴⁸ Résolution du Conseil de l'Union Européenne op.cit. :
⁴⁹ Manifeste droit à l'architecture sur WWW.architecte.org consulté en février 2012
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• La ville est source d'épanouissement culturel et le logement tisse le lien social. La qualité
architecturale est un élément constitutif de l'environnement tant rural qu'urbain. Les villes
doivent offrir la possibilité d'un habitat adapté aux besoins et ressources de chacun tout au
long de la vie ;
• la dimension culturelle et la qualité du traitement physique des espaces doivent être prises en
compte dans les politiques régionales et de cohésion communautaires ; la réhabilitation des
quartiers est préférable à leur destruction violente. L'intérêt général doit présider à
l'aménagement de l'espace et nos concitoyens doivent donner un sens à leur territoire.
Ces éléments sont en fait la matière qui peut constituer un cours d'initiation à l'architecture,
cours qui peut même se donner depuis l'école primaire pour faire de tous des acteurs avertis de
l'environnement urbain. Cette sensibilisation aboutira à l'acquisition de la culture architecturale⁵⁰ qui
manque tant dans notre ville de Kinshasa et qui est à la base de tant des conflits, de promiscuité et de
pollution.
Nous croyons comme Chastel que « La vérité artistique de l'architecture ne peut être utilement
dégagée que si l'on subordonne les aspects politique, sociologique, technique, physiologique même
de l'activité édificatrice - si souvent mis en évidence par les théories et
50 Sophie PAVIOL, Mireille SICARD et Marianne VEILLEROT, Transmettre l'architecture en milieu scolaire,
Ecole Nationale Supérieur d'Architecture de Grenoble, France, 2011, p.24
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Les histoires à celui où s'exerce véritablement l'effort créateur⁵¹ ». Pour cela, il nous faut
connaître les aspects politique, sociologique, technique, et même physiologique de l'acte de bâtir pour
reconnaitre et mieux apprécier le génie créateur Pour les étudiants en architecture, cela nécessite un
enseignement plus poussée sur l'histoire de l'art et sur la sociologie.
De plus, quand les villes sont pleines, la pratique de l'architecture se tourne vers l’existant, la
rénovation, la réhabilitation, la restauration c'est-à-dire le patrimoine. Une connaissance de l'histoire
peut devenir pour eux une question de survie.
Il y a donc un avantage, que ce soit pour la sensibilisation ou pour l'exercice de son métier que
le passé préoccupe l'architecte.
Conclusion
Une œuvre n'est pas africaine parce qu'elle est faite sur le sol africain, elle doit porter et
transmettre des valeurs culturelles ancrées en nous pour être qualifiée comme telle. Mais il est aussi
possible de nous approprier ce que les architectes belges nous ont laissé comme héritage parce que
cela nous sert doublement, tant comme habitation, bureau, hôpital...etc. que support pour
l'enseignement.
Nous ne mettrons pas des bâtiments dans des musées, et nous ne devons pas les garder
simplement parce qu'ils sont vieux. Qu'il fasse partie d'un environnement planifié ou qu'il soit le
résultat d'une croissance organique, chaque bâtiment doit être en harmonie avec ceux qui l'entoure.
Une étude du patrimoine facilitera l'intégration.
Une recherche sur le patrimoine, même un assez récent, permettra donc d'élaborer un cadre
pour le tourisme, une valorisation identitaire, des bases pour l'enseignement d'une histoire de
l'architecture et des repères pour que les projets de modernisation et les nouvelles constructions
gardent leur âme et ne détruisent le peu qu'il nous reste de l'histoire.
Un proverbe asiatique déclare "Si tu fais des plans pour un an, sème des graines. Si tu fais des
plans pour dix ans, plante des arbres. Si tu fais des plans pour cent ans, instruis les gens. La durabilité,
pris dans la temporalité nous oblige à travailler dans l'enseignement, la sensibilisation et la recherche.
⁵¹ André CHASTEL, (extrait du 4 janvier 1952, « apprendre à voir l'architecture ») op.cit., p.77
⁵² KABULO KULUNGUYI, THEORIE DE COMPOSITION, Note du cours d'INITIATION A L'ARCHITECTURE, ISAU 2008