Vous êtes sur la page 1sur 11

Phosphate

Un phosphate est un composé dérivé de l'acide


phosphorique H3PO4 par perte ou substitution d'un ou Phosphate
plusieurs de ses hydrogènes, par d'autres atomes ou
groupes fonctionnels.

En chimie minérale, c'est un sel résultant de l'attaque d'une


base par cet acide, ou l'anion faisant partie de ce sel. Les
ions orthophosphates sont les formes chimiques les plus
fréquentes du phosphate dans l’environnement (H2PO4−,
HPO42−, PO43−), tous dérivés de l'acide phosphorique par
Structure tridimensionnelle d'un ion
perte d'un à trois atomes d'hydrogène. Ils sont utilisés dans phosphate
certains engrais, produits lessiviels, comme inhibiteurs de
corrosion ou additifs alimentaires (ils portent alors les
numéros E338 à E343 si ce sont des orthophosphates,
E450 à E455 si ce sont des polyphosphates). Présents en
excès dans l'eau, ils sont source d'eutrophisation (voire de
dystrophisation).
Structure d'un groupe phosphate lié à un
radical R
En chimie organique, un phosphate est un type de
composé organophosphoré ; les groupes substituants des Identification
hydrogènes de l'acide phosphorique peuvent alors être des
No CAS 14265-44-2
chaînes carbonées, on parle parfois de phosphate
organique. PubChem 1061
SMILES [O-]P(=O)([O-])[O-]
PubChem, vue 3D
Dosage
InChI InChI : vue 3D
InChI=1/H3O4P/c1-
La mesure de la concentration en phosphate est basée sur
5(2,3)4/h(H3,1,2,3,4)/p-
l'apparition du complexe phosphomolybdate 3/fO4P/q-3
d'ammonium (en) qui est détecté par spectrophotométrie
dans l'ultraviolet. Les ions chlorure peuvent gêner et Propriétés chimiques
doivent être éliminés en faisant bouillir avec deux gouttes Formule PO43−
d'acide nitrique ; l'addition au réactif molybdique de
tartrate améliore la spécificité. Masse 94,971 4 ± 0,001 2 g/mol
molaire1 O 67,39 %, P 32,61 %,
Une solution d'orthomolybdate d'ammonium
(NH4)2MoO4 mélangée à chaud à de l'acide nitrique 6M
Unités du SI et CNTP, sauf indication
et à un phosphate, donne un précipité jaune de contraire.
phosphomolybdate d'ammonium (NH4)3PO4(MoO3)2.

Les ions argent pour le phosphate donnent un précipité jaunâtre Ag 3PO4. L'hydrogénophosphate de
sodium donne avec l'ion Ag+ un précipité jaune de phosphate d'argent soluble dans l'acide nitrique et dans
l'ammoniaque.
Un protocole de dosage a été validé en France par l'AFNOR3.

Caractéristiques moléculaires et
chimiques
L'ion phosphate (ou orthophosphate) est un anion polyatomique de Le phosphore, oligo-élément
formule chimique brute PO43− et de masse moléculaire de indispensable à la vie, est
94,97 daltons. Il se présente sous la forme d'un tétraèdre dont les inégalement réparti sur terre et dans
sommets sont formés par les quatre atomes d'oxygène encadrant un les océans, les poissons et les
atome de phosphore. oiseaux jouent un rôle important
dans sa concentration et dans son
Cet ion, qui comporte trois charges négatives, est la base conjuguée retour à la terre (bioturbation)2.
de l'ion hydrogénophosphate HPO42− (ou phosphate inorganique ,
4

noté « Pi ») qui est lui-même la base conjuguée de l'ion


dihydrogénophosphate H2PO4− qui est lui-même la base conjuguée
de l'acide phosphorique H3PO4. C'est une molécule hypervalente
sachant que l'atome de phosphore possède dix électrons libres sur sa
couche de valence.

Un sel de phosphate se forme lorsqu'un cation se lie à l'un des


atomes d'oxygène de l'ion phosphate, formant un composé ionique.
La plupart des phosphates sont insolubles dans l'eau aux conditions
normales de température et de pression, excepté pour les sels de Phosphate dans une coupelle.
métaux alcalins.

Solubilisé dans une solution aqueuse, le phosphate existe sous ses quatre formes selon le taux d'acidité. En
allant du plus basique au plus acide :

La première forme à prédominer est l'ion phosphate (proprement dit) PO4 3− (fortement
basique) ;
La seconde forme est l'ion hydrogénophosphate HPO4 2− (faiblement basique) ;
la troisième forme est l'ion dihydrogénophosphate H2PO 4− (faiblement basique) ;
La quatrième est la forme phosphate de trihydrogène (à l'état cristallin non ionisé) ou acide
phosphorique H3PO4 (fortement acide en solution).
5, 6
Le pKa des couples acide/base précédents est :
HPO 2− / PO 3− : 12,32 ;
4 4
H2PO4 / HPO 42− : 7,09 ;

H3PO4 / H2PO4− : 2,15.

L'ion phosphate peut former des ions polymères, par exemple :


diphosphate P O 4− (aussi appelé pyrophosphate) ;
2 7
triphosphate P O 5−.
3 10
Les phosphates formant des complexes avec le calcium (contrôle micro-environnemental pendant la (bio-
)minéralisation), ils entrent souvent dans la composition des lessives. Riche en phosphore, les rejets
lessiviels augmentent donc le risque d'eutrophisation. Depuis les années 1980, les fabricants utilisent donc
de plus en plus des substituts, telles les zéolithes.

Formation et répartition
Le minerai de phosphate (roche concentrée en sels de phosphate) est une roche sédimentaire dite roche
exogène : elle se forme par concentration lorsque des ions phosphate précipitent dans une roche en
diagenèse. Les formes biogènes, telles les guanos d'oiseaux et de chauve-souris, sont exploitées depuis des
siècles.

Les gisements les plus importants se trouvent au Maroc, plus particulièrement à Khouribga, au Sahara
Occidental7, en Amérique du Nord, sur l'île de la Navasse, en Tunisie, au Togo, en Israël, en Jordanie, en
Chine et sur certaines îles d'Océanie : Nauru, Banaba et Makatea et le Sénégal.

Synthèse industrielle
La synthèse des superphosphates fut développée à échelle
industrielle par les Établissements Kuhlmann déjà producteurs
d'acide sulfurique, à partir des années 1840, d'abord pour satisfaire
les besoins des producteurs de betteraves de la région de Lille8.

Des composés du phosphates peuvent être industriellement


synthétisés. Ainsi Rhodia produisait par exemple du Tri- poly
phosphaté (TPP) en France (à Rouen) dans une unité de
fabrication finalement fermée dans le cadre des restructurations
industrielles9.

Utilisation
Les phosphates sont utilisés dans l'agriculture et le jardinage comme
engrais pour fournir aux plantes (fruits, légumes…) une source de
Frédéric Kuhlmann chimiste français
phosphore. Les engrais phosphatés représentent, de loin, la
fondateur des Établissements
principale utilisation des phosphates. Le minerai, en général des
Kuhlmann, en 1881
phosphates de calcium, peut être épandu directement sur les terres
acides après avoir été finement broyé. Ayant tendance à se
recombiner au calcium des sols, ce qui le rend moins assimilable, il
doit être rendu plus hydrosoluble avant d'être employé sur les sols calcaires, ce qui passe par la fabrication
des superphosphates. Suivant l'origine du minerai et le traitement, ces engrais sont susceptibles d'apporter
des éléments fertilisants variés outre le calcium et le phosphore. Ces engrais peuvent être d'origine
organique (poudre d'os, arêtes de poissons, etc.) ou inorganique (attaque d'acide sur du minerai), ce qui est
de plus en plus le cas, hormis en agriculture biologique où les engrais de synthèse sont interdits.

Le superphosphate simple peut être utilisé pour l'assainissement des litières en élevage. Il passe dans le
fumier et joue à nouveau un rôle de fertilisant.
Le phosphate se trouve aussi impliqué dans la fermentation vinicole (type de fermentation éthylique).
Les dihydrogénophosphates H2PO4− de calcium ou sodium (E450)
et le phosphate d'aluminium sodique acide (E541) sont utilisés
associés au bicarbonate de sodium comme poudre à lever en
boulangerie-pâtisserie. Ils ont fait partie des premières levures
chimiques, ne laissent pas d'arrière-goût et ont en grande partie
remplacé la levure de boulanger.

Les polyphosphates sont utilisés comme prétraitement des eaux


calcaires potables ou traitement préalable ou principal à
l'adoucissement de l'eau en général. Ils ont été utilisés massivement
comme composants des lessives.

Tous les êtres vivants contiennent des phosphates : ainsi les groupes
phosphate sont des éléments de la chaîne composant les hélices de
l'ADN, l'adénosine triphosphate sert de vecteur d'énergie dans les Granulés de superphosphate triple,
cellules, les os et les dents sont essentiellement constitués engrais titrant 45 % de P2O5.
d'hydroxyapatite (Ca5(PO4)3(OH))…

L'acide phosphorique est généralement obtenu comme coproduit de


la fabrication des superphosphates (attaque des minerais phosphatés
par l'acide sulfurique).

La phosphatation et ses variantes bondérisation et parkérisation sont


des traitements de protection de surface des aciers. On y utilise des
bains d'acide phosphorique pour produire une couche superficielle
de phosphate de fer.
Ouvriers (probablement chinois)
Des orthophosphates (OP) ajoutés à une eau potabilisée permet de
d'une mine de Nauru, 1917.
déposer des complexes stables (ex. : pyromorphite, Pb5(PO4)3)
avec le fer, le plomb ou le cuivre issu de la corrosion de conduites
métalliques. Ces complexes forment un film qui diminue le contact
entre l'eau (et son oxygène dissous) et le métal toxique de la paroi
interne d'une canalisation métallique. La corrosion est alors inhibée
ou ralentie. Un tel traitement est permis au Royaume-Uni et aux
USA depuis les années 1990 puis a été utilisé au Canada, et plus
récemment en Irlande. En Belgique et en République Tchèque il est
utilisé pour protéger les canalisations en fer.

Utilisé dans les accumulateurs LFP (ou Li-FePO4 : Lithium-Fer- Mines de Nauru.
Phosphate, apparu en 2007). Les batteries LFP sont moins cher à
produire que les batteries NMC ([Li]-NiMnCo) et leur impact
environnemental est moindre (fer et phosphate au lieu de nickel, manganèse et cobalt). Leur densité
énergétique est plus faible mais leur durée de vie plus longue.

En France : Les branchements publics et canalisations intérieures en plomb doivent être remplacés par des
tuyaux sans plomb, pour lutter contre le saturnisme et mieux respecter la réglementation sur la potabilité de
l’eau (directive européenne 98/83/CE relative à la qualité des « eaux destinées à la consommation
humaine » (EDCH). La limite de qualité (LQ) pour le paramètre plomb (Pb) est passée de 50 à 25 μg/L en
décembre 2003, puis de 25 à 10 μg/L en décembre 2013, conformément aux préconisations de l’OMS. En
complément à ces mesures qui prennent du temps, et à certaines conditions, une circulaire permet un
traitement filmogène des canalisations par ajout à l'eau d'acide phosphorique ou d’orthophosphates (OP).
Ceci peut limiter le relarguage de plomb à partir des tuyauteries, des soudures et des éléments de robinetterie
(le laiton contient du plomb). Ainsi, alors que les tuyauteries des maisons anciennes tardaient souvent à être
changées, de 2003 à 2013, en France dix usines de production
d’EDCH ont testé un traitement par OP (avec autorisation
préfectorale) 12.
En 2012 et 2013, la Direction générale de la santé (DGS) puis le
ministère de l’environnement et le CGDD ont demandé au Haut
Conseil de la santé publique (HCSP) d’évaluer l’efficacité de ce
type de traitement et de prendre position sur l’intérêt de le
poursuivre ou de le généraliser à d’autres réseaux de distribution (et
si oui et à quelles conditions… sachant qu’un arrêt du traitement
pourrait peut-être aussi déséquilibre les équilibres microbiens des
Grand four électrique de fusion de
biofilms déposés sur les tuyaux)12. Cette demande a été traitée par
phosphate, utilisé pour produire du
un groupe de travail dénommé « Traitement des EDCH par des
phosphore élémentaire dans une
Orthophosphates » dont les conclusions ont été adoptées le 4
usine chimique de la TVA
juillet 201712. Outre l'acide phosphorique (NF EN 974) des
(Tennessee Valley Authority) dans la
polyphosphates utilisables pourraient être selon l'ANSES 12 : zone de Muscle Shoals en Alabama
(États-Unis), juin 1946.
Des dihydrogénophosphates de sodium (NF
EN1198) ;
Des phosphates trisodiques (NF EN 1200) ;
Des dihydrogénophosphates de potassium (NF
EN1201) ;
Des hydrogénophosphates de potassium (NF
EN1202) ;
Des phosphates tripotassiques (NF EN 1203).

En France le dosage devrait être de 2 mg/L de PO43− en injection


continue dans l'eau le temps que la couche protectrice se forme Diminution des ventes de
(jusqu’à 6 mois), puis à 1 mg/L de PO43− (soit 0,3 mg/L de phosphates en France, qui ne s'est
Phosphore)12. Ailleurs les taux varient (selon les pays) de 0,5 à 6 pas partout traduite par une
mg/L environ de PO43− .
12 diminution des teneurs des sols (qui
ont diminué dans 34 % des régions,
Retours d'expérience : ils montrent une certaine réduction du sont restées stables dans 24 % et
relargage
13, 14, 15 12
mais non sa suppression totale ; dans un cas ont augmenté dans 43 % dont en
étudié en France 1 mg/L en PO43− a suffi à réduire le plomb en Bretagne), en raison notamment des
solution de 60 % « sans pour autant que la LQ de 10 μg/L soit apports de lisiers et boues
systématiquement respectée au robinet en raison de particularités d'épuration.
dans certaines constructions »12 ; l'effet varie beaucoup selon la
concentration en plomb et selon la qualité de l’eau (pH, dureté et
TAC et présence éventuelle de couples galvaniques plomb-cuivre…). En février 2007 l'AFSSA notait
« que la mise en place de traitements de phosphatation de l'eau ne constitue qu'une étape transitoire pour
ramener les teneurs en plomb de l'eau au robinet du consommateur sous 25 μg/L mais qu'elle ne saurait se
prolonger au - delà de 2013, date à laquelle la limite de 10 μg/L ne pourra être respectée que par le
remplacement de ces canalisations en plomb dans les réseaux publics et privés12. »

Engrais phosphatés utilisés en agriculture


L'utilisation d'engrais est une des bases de la production agricole
moderne. Parallèlement au développement de la production
industrielle des superphosphates (Établissements Kuhlmann), les
fondements de l'utilisation des engrais sont explicités et vulgarisés
par le chimiste allemand Justus von Liebig dans son ouvrage : La
chimie organique appliquée à la physiologie végétale et à
l'agriculture, objet de nombreuses rééditions de 1840 à 186516.

Cependant des problèmes concrets concernant l'utilisation du


phosphore (la plus grande partie du phosphore du sol se trouve sous
forme insoluble bloquée par la matière minérale ou organique17) et
les particularités de son assimilation sont mis en lumière par les
agronomes et les agriculteurs (surtout par les praticiens de
l'agriculture biologique). Ils seront peu à peu élucidés par les
travaux sur la structure du sol et les interactions plantes-
microorganismes. Ces interactions sont encore aujourd'hui l'objet de
Justus von Liebig, chimiste
recherche18.
allemand, fondateur de l'agrochimie,
vers 1886
Les phosphates naturels minéraux (guano ou phosphates d'origine
sédimentaire) ont été très utilisés, notamment dans les sols acides où
le phosphore est un des nutriments limitant pour les plantes mais
facilement mobilisable. La minette lorraine (minerai de fer) contient aussi de l'apatite ; le procédé Thomas
permettait d'obtenir un acier de qualité et de récupérer un coproduit, les scories Thomas, contenant des
silicophosphates et phosphates de calcium (12 à 18 % de P 2O5 ) et d'autres éléments (magnésium, oxydes
métalliques). Il fut l'engrais phosphaté le plus utilisé en France (40 % de la consommation en 1966) 16. La
minette n'est plus exploitée depuis 1997.

Dans les sols à pH neutre ou basique, on utilise plutôt les superphosphates plus facilement assimilables. Ce
sont des phosphates naturels traités à l'acide phosphorique,à l'acide sulfurique, à l'ammoniac , selon :

super phosphate triple ou Triple Super Phosphate (TSP), principalement Ca(H2PO4)2,


titrant 45 % de P2O5.Il est fabriqué avec du phosphate et de l'acide phosphorique ;.

le superphosphate simple ou Single Super Phosphate (SSP), de formule Ca(H2PO4)2,


titrant 18 % de P2O5 avec en proportions variables du phosphogypse CaSO4, 2H2O
susceptible de fournir du soufre.Il est fabriqué avec du phosphate de l'acide sulfurique et
de l'eau ;
le superphosphate double peu répandu intermédiaire entre les deux autres formules ;
les superphosphates ammoniés : le phosphate de diammonium (DAP en anglais),
(NH4)2HPO4 et le phosphate de monoammonium (MAP), NH4H2PO4 , sous forme sèche
ou liquide, etc. qui fournissent de l'azote. Le DAP est fabriqué avec de l'ammoniaque et de
l'acide phosphorique, l'ammoniaque apporte l'azote et l'acide phosphorique le phosphore.

On utilise ces engrais seuls ou plus souvent associés à de l'azote et du potassium (NPK)

Conséquences

La fertilisation phosphatée est considérée comme indispensable à l'agriculture actuelle. Les phosphates
naturels et superphosphates simples sont loin d'être des produits purs et peuvent comporter des éléments
autres que le phosphore dont la présence peut être souhaitable ou non. La présence de calcium, magnesium,
soufre et d'oligo-éléments (zinc, manganèse…) est généralement considérée comme bénéfique.
Si les phosphates sont normalement présents et utiles à faible dose
dans l'eau et les sols, leur excès est (avec celui des teneurs en
nitrates) une des causes majeures de l'eutrophisation voire de
dystrophisation de l'environnement. Les transferts horizontaux ou
verticaux de phosphates vers les eaux de surface varient fortement
(de 0,1 à 2,5 kg ha−1 an−1), selon le type de sol, son pH, sa teneur
en humus, et ses usages (labour, prairie permanente, etc.). En
moyenne, 9 % du phosphore (dont la moitié apporté par les engrais)
19
est emporté par les eaux de ruissellement .

Ils contribuent notamment aux problèmes de turbidité liés au


verdissement des eaux (dont lors de blooms planctoniques) et aux
phénomènes de zones marines mortes en aval des estuaires.

Ils sont aussi source de « métaux lourds », qui sont pour certains Sydney G. Thomas, scientifique et
éventuellement radioactifs, car le phosphore d'origine minérale est philanthrope britannique, inventeur du
souvent, dans les engrais, associé à des métaux toxiques (cadmium procédé Thomas
-1 20
(jusqu'à 87 mg·kg dans le phosphal produit au Sénégal , le
chrome (Cr), le mercure (Hg) et le plomb (Pb), et à des éléments
radioactifs, dont l'uranium (U). Certains engrais phosphatés contiennent des quantités importantes
d'uranium, donc de radium et conduisent à une émanation plus importante de gaz radon, [réf. nécessaire]. Les
teneurs atteignent jusqu'à 390 mg·kg-1 dans les mines tanzaniennes de Minjingu contre 12 mg·kg-1 dans le
gisement tunisien de Gafsa20, or le phosphate de Minjingu est agronomiquement très efficace, et peu
coûteux, et donc très utilisé sur des sols 21,
acides
22
cultivés, ce qui pose des questions toxicologiques et
sanitaires concernant les ouvriers des mines et écotoxicologiques concernant les stériles minières (dont
crassiers de phosphogypse radioactif). L'uranium des phosphates est parfois récupéré23 et compte pour
environ 5 % de la production mondiale d'uranium en 2010 (extraction de l'uranium).

Le cadmium dont la première source dans un champ est souvent l'engrais phosphaté peut poser de graves
problèmes, et il est particulièrement bioassimilable dans le cas d'engrais phosphatés hydrosolubles, alors
que, parce que lié à l'apatite, il est moins soluble dans les engrais non hydrosolubles24. Il est encore plus
bioassimilable dans les sols acides24 et/ou en présence d'une carence en certains autres oligo-éléments
(fer…).
Les engrais phosphatés minéraux sont aussi très riches en fluor (provenant de l'apatite qu'ils contiennent).
Le fluor dépasse souvent 3 % du poids total. Ce fluor peut causer une fluorose aux animaux qui pâturent les
sols traités, probablement pas parce qu'ils absorbent ce fluor via les plantes (qui le bioconcentrent peu), mais
parce qu'ils ingèrent de la terre ainsi enrichie en fluor, avec leur nourriture ou en se léchant25.

Cependant le traitement de l'apatite à l'acide phosphorique pour la fabrication des superphosphates triples
entraîne la réaction suivante :

Ca5(PO4)3F + 7 H3PO4 → 5 Ca(H2PO4)2 + HF, HF réagit avec la silice du minerai pour former H2SiF6
utilisé dans la métallurgie de l'aluminium, ce qui permet de soustraire le fluor à l'engrais.

Dans les cultures, le phosphore est normalement absorbé par les plantes par l'intermédiaire des mycorhizes.
Cette voie concerne la plupart des familles à l'exception notable des crucifères et des chénopodiacées. Or,
les apports excessifs d'engrais phosphatés conduisent les plantes à se passer des mycorhyzes qui se
développent peu, rendant inopérante cette étape clé du cycle du phosphore17. Les plantes cultivées ne
peuvent ainsi plus profiter de ce mécanisme, et ne peuvent plus assimiler le phosphore autrement que par de
nouveaux apports massifs de phosphates26. Le phosphore des engrais excédentaire, lessivé par les pluies
peut s'accumuler dans les sédiments des étangs où il reste plus
longtemps disponible que les nitrates (plus ou moins selon la
concentration du sédiment en fer sous forme d'oxyhydroxyde de
fer(III) FeO(OH) et selon le pH de ce sédiment.

En France, selon le bilan19 publié en 2009 sur les phosphates dans


les sols de la France métropolitaine, en 2001, 775 000 tonnes ont
été apportées aux sols français sous forme d'engrais minéraux. Six
ans plus tard (en 2007) sur 2 372 points de mesure, près de la moitié
des sols analysés en France posent encore problème : 2 % sont de
qualité mauvaise, 4 % médiocre, 12 % moyenne, 55 % bonne et
27 % très bonne.

Les engrais minéraux restent la première source de phosphore perdu


dans les eaux (50 %) en France, devant les déjections animales
(directement ou plus souvent via les fumiers et épandages de lisier)
(40 %). Viennent ensuite les effluents urbains domestiques (environ
5 %) et industriels (2 %) ainsi que les boues d'épuration (2 %)19. Affiche vantant l'utilisation des
superphosphates avec la liste des
En France et dans d'autres pays d'Europe, les agriculteurs ont usines Kuhlmann, 1916
globalement acheté moins d'engrais minéraux phosphatés (deux
tiers en moins de 1972 à 2008), mais cette diminution concerne
surtout les zones de déprise agricole ou d'agriculture biologique ; les analyses montrent que des teneurs en
phosphore de certains sols agricoles ont fortement augmenté (+ 43 % des cantons étudiés, notamment en
Bretagne, Pays de la Loire, Champagne-Ardenne et Aquitaine)19. Avec le développement des stations
d'épuration et de l'élevage hors-sol, les quantités de boues et fumiers ou lisiers épandus ont fortement
augmenté depuis les années 1970. Ces boues sont le plus souvent épandues, comme les fientes d'élevage
avicoles sur les sols agricoles.

Évolution possible

En France, les mesures agroenvironnementales telles que le « couvert environnemental permanent » ou les
« bandes enherbées » peuvent contribuer à piéger une partie des phosphates ruisselant à partir des champs
afin qu'ils ne soient pas emportés par les cours d'eau. Le lagunage naturel peut aussi contribuer à mieux
traiter les nitrates et le phosphore, éventuellement en traitement tertiaire en aval d'une station d'épuration
« classique ».

Au vu des connaissances acquises sur les organismes du sol et en particulier sur les mycorhizes depuis
1990, une nouvelle approche de la fertilisation phosphatée semble possible. En favorisant le développement
des mycorhizes17 et éventuellement en les inoculant, technique déjà éprouvée29, il serait envisageable de
29, 18
réduire drastiquement le niveau de la fertilisation phosphatée . Des biologistes comme Marc-André
Selosse proposent d'étudier précisément cette voie.

Recyclage
La récupération des phosphates contenus dans les eaux usées permet de limiter l'eutrophisation des cours
d'eau et constitue un complément de ressource phosphatée. Cette activité, encore peu développée, fait l'objet
de nombreuses recherches. Le traitement le plus répandu consiste à faire précipiter le phosphore ; coûteux, il
pourrait à terme être remplacé ou associé à des traitements biologiques30.
Pour les excréments humains, les toilettes à litière bio-maîtrisée constituent une alternative : d'une mise en
œuvre simple et peu coûteuse, elles contournent le problème de l'assainissement de l'eau et permettent de
produire un compost bon marché.

Production et réserves
La Chine, le Maroc et les États-Unis sont les trois principaux pays
producteurs de phosphate, ils assurent plus de 70 % de la
production mondiale. Le Maroc accapare plus de trois quarts de la
réserve mondiale confirmée, la grande portion de sa réserve se situe
en dehors du Sahara occidental. Le phosphore est une ressource
finie qui, dans les conditions d'utilisation actuelles, connaîtra
éventuellement un pic de son exploitation.

Train transportant du minerai,


Métlaoui, Tunisie, 2012

Vous aimerez peut-être aussi