Vers la possibilité de repenser la mécanisation agricole

en grandes cultures grâce à la robotique ?

M. Berducat

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M. Berducat. Vers la possibilité de repenser la mécanisation agricole en grandes cultures grâce à la
robotique ?. PHLOEME. 1ères biennales de l’innovation céréalière, Jan 2018, Paris, France. 446 p.
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 PHLOEME, 1ères biennales de l'innovation céréalière, 24-25 janvier 2018, Paris

Vers la possibilité de repenser la mécanisation agricole

en Grandes Cultures grâce à la robotique ?
Michel Berducat

Irstea, Département Ecotechnologies, Unité de recherche TSCF, centre de Clermont-Ferrand, France.

michel.berducat@irstea.fr

Vers la possibilité de repenser la mécanisation agricole en Grandes Cultures grace à la robotique ?

Cette intervention lors de la séance «LE FORUM DES POSSIBLES: Le futur de l’agriculture» s’appuiera sur différents exemples
(vidéos, photos) du monde de la recherche et de l’industrie permettant d’entrevoir différentes voies possibles d’évolution de la
mécanisation agricole en Grandes Cultures. L’objet sera d’essayer de « toucher du doigt » différentes possibilités dont beaucoup
d’entre elles empruntent aux technologies de la robotique. Pour chacune d’elles, l’exposé s’attachera à souligner certains points
limitant à ne pas omettre ou négliger pour leur permettre de répondre aux besoins concrets des utilisateurs finaux que sont les
agriculteurs.

Toward the opportunity to rethink agricultural machinery in high crop production thanks to the robotic?

From several support illustrations (videos, pictures), this presentation in the session named «LE FORUM DES POSSIBLES: Le futur de
l’agriculture» will propose a classification about different evolution ways of agricultural machines used in high crop production. In
all of them, Robotic Technologies play an important role. So we will put attention on some specific issues to solve in order to give a
chance to satisfy pragmatic requirements of farmers as End Users.

INTRODUCTION basse pression s’est démocratisé permettant de limiter le

Au cours des 7 dernières décennies, les progrès dans le
domaine des machines agricoles ont accompagné les progrès
dans les domaines zootechniques et agronomiques. Pour la
production végétale en général et les Grandes Cultures en
particulier, l’accroissement de la taille des machines a permis
d’augmenter les rendements de chantiers compensant ainsi
les diminutions du nombre d’exploitations agricoles et de la
main d’œuvre associée (Jeanneaux, 2016).
Cette augmentation de la taille des machines s’est
accompagnée logiquement par l’augmentation de leurs
puissances, mais également de leurs poids. Dans son rapport
de 2004, le Groupe de Travail «Stratégie pour la protection des
sols » diligenté par la Commission Européenne (EUR 21319
EN/6, 2004) mentionnait que « la compaction des sols est à
l’origine de la dégradation des sols de 33 millions d’hectares en
Europe» en ajoutant «que ces connaissances semblent être
négligées par les constructeurs de machines agricoles toujours
plus lourdes».
Depuis (grâce notamment aux travaux des instituts techniques
couplés aux efforts des constructeurs de matériels agricoles et
des manufacturiers de pneumatiques), force est de constater
que des progrès ont été réalisé pour réduire l’impact des
machines en terme de compaction. L’emploi de pneumatiques
tassement des sols en surface, sans pour autant apporter de
plus-value en terme de limitation de la compaction des
couches profondes du sol qui dépendent elles de la charge sur
l’essieu de la machine (Diserens, 2011).
A l’heure actuelle où l’on parle de l’arrivée future des voitures
autonomes, de robots agiles dans les usines pour la production
de produits manufacturés,… il est intéressant de s’interroger
et partager sur le rôle à jouer de la robotique dans l’évolution
des machines agricoles. Dit autrement la Robotique peut-elle
permettre de nouvelles alternatives/solutions technologiques
dans le domaine des agroéquipements face à l’offre (restée
longtemps unique) du «toujours plus gros, toujours plus
puissant, mais toujours plus lourd !! » ?
1ERE, 2ND, 3EME VOIES : UNE DISTINCTION TOUJOURS
D’ACTUALITÉ
Une intervention du Cemagref (devenu depuis Irstea) au
colloque « Machines Intelligentes » qui s’est tenue lors du
SIMA 2007 proposait de distinguer 3 voies possibles dans
l’évolution des machines agricoles (voir également Berducat,
2009). Cette préfiguration garde toujours sa pertinence
aujourd’hui, chacune d’elle ayant donné lieu depuis à des
concrétisations de la part de différents acteurs. La
 PHLOEME, 1ères biennales de l'innovation céréalière, 24-25 janvier 2018, Paris
présentation illustrera ces avancées, tout en en soulignant
certaines limites à lever pour en faire des outils répondant
vraiment aux besoins des agriculteurs.
1ere Voie : la première voie consiste à robotiser les grosses
machines existantes : le concept de tracteur autonome
présenté au SIMA 2017 par le groupe CNH, véritable tracteur
sans cabine, est un bon exemple de cette première catégorie.
Compte tenu cependant que « les travaux agricoles ne
commencent pas au champ, mais dans la cours même de
l’exploitation !! », il est nécessaire que le constructeur propose
des solutions pour faciliter par exemple l’attelage automatique
des outils si dans ce schéma le tracteur conserve toute sa
polyvalence. En effet contrôler finement la position et
l’orientation du tracteur pour atteler des outils classiques
depuis la tablette informatique dans les mains d’un opérateur
à proximité de la manœuvre n’est certainement pas aussi
immédiat qu’il n’y parait.
Voie 1bis: une variante de cette première voie se traduit par le
développement d’automoteurs robotisés. Même si on
attendait a priori comme première illustration la
moissonneuse-batteuse sans cabine, c’est un automoteur
robotisé de semis qui le premier a fait le « buzz » en 2016 à
l’initiative de la société innovante DotRun. A vrai dire au-delà
du module semoir, il convient de préciser que la base mobile
proposée par cette société canadienne peut aussi embarquer
d’autres modules (ex : trémie pour assurer la fonction de
ravitailleur dans le champ, pulvérisateur).
Pour pouvoir prétendre accéder à une mise en œuvre
opérationnelle chez des exploitants agricoles, nul doute que
ces engins de grande taille appartenant à cette Voie 1 (tracteur
autonome de forte puissance + outils) ou 1bis (automoteur
robotisée de forte puissante) nécessitent que le parcellaire soit
tout autour des bâtiments de l’exploitation agricole hors accès
à toutes voies de circulation publiques.
nd
2 Voie : Cette seconde Voie en totale rupture avec la
précédente consiste à associer plusieurs petites machines au
sein d’une même parcelle. L’exemple type est la preuve de
concept développé par le constructeur allemand FENDT dans
le cadre du projet européen MARS qui vise le déploiement
jusqu’à 70 vecteurs robotisés pour réaliser l’opération de
semis. Salué par une médaille d’argent lors du dernier salon
AGRITECHNICA qui s’est déroulé mi-novembre 2017 à
Hanovre, FENDT a rebaptisé pour ce Rendez-vous sa solution
sous le nom de XAVER pour montrer la transition du stade
Recherche vers le stade de la Commercialisation. Dans ce cas
de la mise en œuvre de petites machines travaillant en
«essaim», les problématiques concrètes en termes de
logistique/temps passé de préparation de la mission depuis la
cours de ferme telles que la réalisation du plein d’énergie
(recharge des batteries / remplissage des réservoirs de
carburant) se posent de manière exponentielle par rapport à
l’intervention sur une seule machine (cf. Voie 1). Un autre
aspect qu’il convient aussi de souligner (dont on ne fait jamais
mention) est la capacité de ces petites machines à engendrer
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
• Jeanneaux, Quels enjeux pour l’exploitation à l’heure de la révolution numérique ?, Séminaire sur la robotisation et l’automatisation en
agriculture, RMT AgroETICA-Ecotechs, 4 Oct 2016, Montoldre.
• EUR 21319 EN/6, CEE 2004, Office for Official Publications of the European Communities, Luxembourg, 872 pp.
• Berducat & all, Evolution of agricultural machinery: the third way, 7th European Conference on Precision Agriculture, Wageningen, NL,
p363-369.
• Diserens & All, Prediction of the Contact Area of Agricultural Traction Tyres on Firm Soil. Biosystems Engineering, 110(2), 2011, pp 73-82.
une compaction superficielle du sol du fait des passages
multiples et répétées de ces machines sur le terrain !!
3eme Voie : Cette voie préconise la coopération de machines de
taille moyenne (qqs dizaines de KWh). L’ordre de grandeur du
nombre de machines pouvant évoluer dans une même
parcelle est ici compris entre 2 et 10. Irstea et ses partenaires
associés dans le projet de recherche ANR Safeplatoon (2011-
2014) ont développé des lois de contrôle/commande adaptées
pour contrôler une telle flotte en dépassant l’approche
«Maitre/Esclave» classique proposée jusqu’alors par certains
constructeurs. La société australienne SwarmFarm Robotics a
présenté récemment un ensemble de 3 ou 4 plateformes
robotisées dédiées à la pulvérisation. Le poids du véhicule est
de l’ordre de 2 tonnes (cuve pleine) pour une largeur de rampe
de traitement de 8m. Comme troisième exemple emprunté à
cette 3eme Voie, on citera l’annonce faite par le constructeur
japonais Kubota également lors du dernier salon
AGRITECHNICA relative à sa solution Agri Robo. Celle-ci permet
de faire coopérer 3 tracteurs de puissance moyenne (séries M
ou L du constructeur) sous le contrôle d’un seul opérateur
humain installé sur l’un des tracteurs de la flotte. Dans un tel
attelage, on note ainsi que l’opérateur a changé de statut
passant du rôle de «chauffeur» au rôle de «superviseur» d’un
ensemble de machines intelligentes. Indépendamment de la
nécessité d’interfaces Homme-Machine les plus conviviales
possibles pour permettre une gestion véritablement
opérationnelle et aisée des différents modes de coopération
au cours des différentes phases du travail, il convient
également que la législation routière évolue pour autoriser
que ces convois de machines puissent emprunter le réseau
routier lors des déplacements (accrochées virtuellement les
unes derrière les autres en mode « colonne»).
CONCLUSION
Bien entendu ces 3 Voies ne sont pas les seules possibilités
d’évolution des machines agricoles dans le cas des grandes
cultures. La présentation s’attachera à en illustrer d’autres y
compris des plus futuristes !!. Ces différentes alternatives
mobilisant pour beaucoup d’entre elles les sciences et
technologies de la robotique doivent être vues et considérées
comme autant d’opportunités pour développer de nouvelles
solutions en rupture avec l’offre unique (et logique) constatée
depuis le milieu du siècle dernier. Pour trouver un véritable
marché, chacune de ces voies devra cependant être capable
de prouver qu’elle est capable de satisfaire à de nombreuses
exigences (qualité du travail, performances délivrées, facilité
d’utilisation,…) et ce dans toutes les phases d’utilisation de la
machine comme cet exposé a essayé de le mettre en relief.
Sans oublier un dernier critère impératif : celui de démontrer
du Retour sur Investissement de la Voie retenue à l’utilisateur
final qu’est l’agriculteur.