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Olivier Ihl : "la stratégie adoptée par Michel Destot" a été très payante : A LA CONQ...

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10.03.2008

Olivier Ihl : "la stratégie adoptée par Michel Destot" a été


très payante

Olivier Ihl, politologue, professeur de science


politique et directeur de Sciences Po Grenoble,
revient sur le résultat du premier tour de ces
municipales en s'attardant notamment sur la
situation grenobloise.

A l'occasion de ces municipales, le PS et ses


alliés totalisent sur un plan national, plus de
47,5% des suffrages tandis que la droite de
gouvernement ne recueille que 40 %.
Comment interpréter ce coup de barre à gauche moins d'un an après
l'élection de Nicolas Sarkozy ?

Ces élections municipales sont le premier test électoral du gouvernement mis


en place par Nicolas Sarkozy. Elections intermédiaires, elles ont permis à une
partie de l'électorat de manifester son désarroi, sinon son agacement, devant
l'absence de résultats économiques tangibles de la part de l'exécutif. La
question du pouvoir d'achat a pesé sur les comportements de vote, même s'il
ne faut pas oublier que ce scrutin conserve une forte dimension locale. A ce
titre, le résultat renseigne d'abord sur la forte implantation des partis de
gauche dans les circonscriptions municipales et cantonales.

Le score mitigé de l'UMP marque-t-il un signe d'avertissement des


Français envers l'exécutif et la politique menée par ce dernier ?

Sans aucun doute. On peut estimer entre 5 et 10 % la variation de vote due à


l'effet « vote sanction ». Soit en s'abstenant, soit en changeant d'orientation de
vote, les électeurs de droite (mais aussi ceux de gauche qui avaient été séduits
par la candidature de Nicolas Sarkozy) ont exprimé leur désappointement dans
les urnes.

Malgré tout, la droite semble résister dans certaines villes notamment


à Marseille où Jean-Claude Gaudin est en tête et à Bordeaux où Alain
Juppé fut réélu dès le premier tour face au socialiste Alain Rousset. Au
fond, l'enjeu national a-t-il réellement pesé sur le scrutin ?

Le facteur personnel (popularité de l'élu local et de son équipe) ou les enjeux


territoriaux (ex : politiques de transport, question du logement social…) sont
des variables cruciales surtout pour des municipales. De même que le système
d'alliance tissé dans chaque circonscription. Chaque ville offre de ce point de
vue une relative autonomie (composition socio-économique de la population,
histoire politique et culturelle, système d'accords entre partis…). Il faut donc se
garder de déduire de la situation nationale des enseignements censés valoir en
toutes circonstances ou de façon mécanique. Chaque scrutin local propose sa
propre configuration. Et donc appelle des explications ad hoc.

Le PS fait la course en tête à l'issue du premier tour mais crie à la


prudence. Craint-il, selon vous, une démobilisation de son électorat
pour le second tour ?

C'est un risque : chaque tour de scrutin a sa logique propre. L'abstentionnisme,


relativement important lors de ce premier tours, laisse entrevoir des « réserves
» pour les partis qui pourront se maintenir. Les reports de voix peuvent aussi
faire bouger quelque peu les lignes. Il faudra voir notamment si les électeurs
de droite qui se sont abstenus au premier tour iront au bureau de vote
dimanche prochain. Et en quelle proportion.

Certains militants du PS craignent une victoire trop importante qui


ferait oublier au premier parti d'opposition son devoir de rénovation
idéologique comme en 2004 lors des régionales. Partagez-vous cet
avis ?

Assurément, il y aurait erreur à confondre les enjeux propres à chaque scrutin.


De bons résultats aux cantonales et municipales ne changeront rien à la défaite
subie par la gauche en mai et juin derniers. Ni au diagnostic établi sur les
raisons de cet échec. Création d'un leadership partisan, rénovation doctrinale,
définition d'une stratégie et d'un système d'alliance : les conditions de la
réussite sont connues. Reste à les réunir et à mettre concrètement en œuvre
une telle action : c'est la clef d'un renouveau pour la gauche à l'échelle des
scrutins nationaux.

A Grenoble, le socialiste Michel Destot a totalisé près de 43% des


suffrages face à l'UMP Fabien de Sans Nicolas (28%) et à l'écologiste
Maryvonne Boileau (15%). Comment interpréter ces résultats
notamment par rapport au scrutin de 2001 ?

La stratégie d'alliance du PS local, notamment avec le Modem et le PC, a mis


l'équipe du maire sortant dans une position très favorable à la veille du second
tour. L'adversaire direct est à 15 points (ce qui constitue un désaveu pour
l'UMP) et la liste arrivée en tête dispose d'une réserve importante de voix à
gauche. La stratégie adoptée a donc été payante.

http://spgrenoble.blogs.nouvelobs.com/archive/2008/03/10/olivier-ihl-la-strategie-ado... 10/03/2008
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En 2001, les écologistes avaient totalisé près de 20% des voix,


devenant ainsi incontournables pour Michel Destot. Au soir du premier
tour, ils ont enregistré un net recul. Quelles sont les marges de
manoeuvre pour les Verts à une semaine du second tour ?

Les Verts font un bon score à Grenoble si on le compare à leurs résultats


nationaux et même aux derniers scrutins sur Grenoble compte tenu d'une
conjoncture pour eux plus difficile. Reste que leur stratégie électorale les place
devant une question redoutable : comment sauront-ils le mieux défendre les
intérêts de leur électorat, par une alliance avec leur ancien partenaire du PS ou
par une cure d'opposition ?

Se pose alors la question des alliances. Quelles sont les marges de


manoeuvre réelles du candidat socialiste ? Peut-il vraiment se passer
des Verts au risque d'avoir une campagne de second tour plus
difficile ?

Le candidat socialiste a rassemblé largement sur son bilan et sur son


programme. Il peut aborder le second tour en position de force.

Revenons un instant sur le score de Fabien de Sans Nicolas. Crédité de


28% des voix, il enregistre le plus faible score de l'histoire de la droite
grenobloise. Comment expliquer un tel recul par rapport aux sondages
qui plaçaient le candidat UMP à près de 32% des suffrages et qui
n'avait pas de liste concurrente à sa droite ?

Conjoncture nationale défavorable, divisions intestines, abstentionnisme


frondeur d'une partie de son électorat, manque de relais sociologiques : les
raisons du faible score de M. de Sans Nicolas sont claires. Et sont à rapporter
aux analyses des précédents scores de l'UMP lors des scrutins présidentiels et
législatifs dans l'agglomération grenobloise. La droite locale est aujourd'hui au
pied du mur. Il lui faut reconstruire les « fondamentaux » de son influence
locale.

Dès lors, quelles sont les marges de manoeuvre pour Sans Nicolas ?
Pour contrer Michel Destot, peut-il compter sur une coalition de
mécontents en captant notamment une partie de l'électorat
écologiste ?

Le pari était difficile pour l'UMP à la veille de ce premier tour. Il l'est encore
plus aujourd'hui. Des reports se produiront. Mais on voit mal comment ceux-ci
pourraient renverser profondément la donne.

Un pronostic pour le second tour ?

Non, c'est aux électeurs que revient le premier comme le dernier mot. La
souveraineté du vote, c'est celle de chaque bulletin, pas celle des observateurs
ou des prédictions.

Propos recueillis par Gilles Johnson

http://spgrenoble.blogs.nouvelobs.com/archive/2008/03/10/olivier-ihl-la-strategie-ado... 10/03/2008

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