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des représentants de la loi et de l’ordre, précipite les « gilets jaunes », yeux crevés et mains arrachées,
l’avènement de pouvoirs autoritaires, remettant en subissant le même sort que les jeunesses racisées des
cause les libertés et les droits fondamentaux. Loin quartiers populaires.
d’être un combat annexe des enjeux démocratiques, Que ces surgissements interviennent alors que
sociaux ou écologiques, l’antiracisme en est le ressort l’humanité est confrontée à une pandémie universelle
universel car il proclame le refus intraitable des ne tient pas au hasard. Car la maladie est aussi un
idéologies inégalitaires. révélateur social. « Selon que vous serez puissant ou
Terreau des dominations économiques, le darwinisme misérable / Les jugements de cour vous rendront blanc
social des gagnants, vainqueurs, puissants et autres ou noir » : que la morale des Animaux malades de
« premiers de cordée » est cousin des idéologies la peste, cette fable de La Fontaine sur une épidémie
racistes. Il fait l’éloge de la compétition, de la (« Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient
concurrence, de la rivalité quand l’antiracisme défend frappés »), soit précisément la question de l’injustice
la solidarité, la fraternité et l’entraide. Comment, de et l’inégalité sociales n’est pas sans à-propos. La
ce point de vue, ne pas être frappé que le formidable négation du racisme systémique en France a ainsi
sursaut autour de l’affaire Adama, ce rassemblement permis d’invisibiliser les inégalités et injustices liées
immense du mardi 2 juin (voir le portfolio de Rachida à l’origine ethnique. Et, dès lors, de ne pas prendre
El Azzouzi et Khedidja Zerouali), ait été précédé, conscience du tribut payé au Covid-19, au sein des
le samedi 30 mai, par le succès de la « Marche des classes populaires (la Seine-Saint-Denis, département
solidarités », elle aussi interdite (lire ici) ? le plus pauvre de France, fut le plus touché), par les
À la protestation contre l’invisibilité officielle des minorités (lire l’article de Camille Polloni).
crimes racistes, ce déni qui en redouble la violence, Il est temps d’en finir, de dire « stop », de mettre
faisait écho le défilé des invisibles, ces travailleurs un coup d’arrêt définitif à cette course à l’abîme dont
sans papiers qui font tourner la machine économique, le racisme, en actes et en paroles, est l’accélérateur.
ces sans-droits dont nombre d’entre eux ont assuré le Encourager, tolérer ou nier le racisme revient au
quotidien d’une nation confinée par le coronavirus, même : à le laisser proliférer. Il n’y a qu’une différence
ces exilés, migrants et demandeurs de refuge qui nous de degré entre un président américain explicitement
rappellent au respect de ce dont la France aime se suprémaciste blanc, incendiaire soufflant sur les
glorifier sans le respecter, à savoir : « Les hommes braises de la haine raciale, et un président français
naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les indifférent au sort des nombreuses victimes de
distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur violences policières, sans un mot de compassion
l’utilité commune » (article 1er de la Déclaration de ou d’indignation, mais en revanche extrêmement
1789). soucieux de celui d’un idéologue raciste patenté en la
personne d’Éric Zemmour, définitivement condamné
Combattre sans relâche le racisme, c’est être du
à ce titre par la justice mais néanmoins toujours promu
côté des « premiers de corvée », en défendant
par des médias pousse-au-crime (lire l’article d’Ellen
une exigence sociale sans frontières, sans guerre
Salvi).
fratricide des opprimés entre eux, dans l’union face
à des adversaires communs. De par le monde, la La France n’a aucune leçon à donner aux États-
mobilisation contre les violences policières est le Unis, sinon de se lever pour en finir avec le racisme
chemin de cette convergence, exprimant la conscience ici même, chez elle. En pleine émotion mondiale
aiguë que ces répressions étatiques cherchent à provoquée par le meurtre de George Floyd, le préfet
congédier, museler, étouffer les protestations, révoltes de police de Paris, déjà devenu le symbole d’un État
et colères populaires (lire l’article de François en guerre contre la société, s’est empressé de nier
Bougon). En France, ce fut l’épreuve traversée par l’évidence de pratiques, comportements et violences
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racistes dans l’institution policière, tout en interdisant documentées, par exemple nos enquêtes inaugurales
et calomniant les manifestations de solidarité (lire ici). sur les contrôles au faciès ou les quotas dans
Les révélations successives de Mediapart/Arte et de le football. C’est par ses informations que le
Streetpress sur l’effroyable banalisation du racisme public prend progressivement conscience des liens
au sein de la police devraient suffire à le disqualifier. entre toutes les discriminations, qu’elles soient
S’il fallait un énième symbole disant combien, à racistes, antisémites, sexistes, homophobes, comme
travers le combat antiraciste, se joue notre sort le prouvent abondamment les enregistrements des
commun, on le trouverait dans ce rôle d’une policiers rouennais que nous avons révélés (lire ici).
presse libre et indépendante, celle-là même que les Nous faisons ce travail parce que c’est notre métier,
pouvoirs tolérants vis-à-vis du racisme mettent en au nom d’un droit fondamental, le droit de savoir tout
cause, suspectent ou répriment. C’est par elle que ce qui est d’intérêt public, qui garantit l’exercice de
les récits mensongers sur les violences policières la souveraineté populaire. Mais nous le faisons aussi
sont démasqués, ainsi de nos révélations sur parce que toute tolérance vis-à-vis du racisme nous
l’affaire Legay à Nice (lire les articles de Pascale est insupportable. Parce que c’est le combat de notre
Pascariello et Fabrice Arfi). C’est par elle que vie : comment pourrions-nous continuer à respirer si
les discriminations quotidiennes et ordinaires sont le racisme nous étouffe ?
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