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2.1 INTRODUCTION
La physique des roches couvre, selon les auteurs, un domaine plus ou moins vaste. Il
s’agit, dans ce manuel, de la description du milieu poreux (grains, pores et fissures)
et de la quantification de ses principales propriétés physiques, à l’exclusion des
propriétés mécaniques, traitées au chapitre 3. Une roche peut être définie comme un
assemblage de minéraux ayant hérité de liaisons plus ou moins fortes au cours de
son histoire géologique. La description d'une roche se fait sur un échantillon observé
à la loupe et éventuellement au microscope optique polarisant ou électronique à
balayage. On décrit la texture, les minéraux présents, la taille des grains, les fissures
et les altérations.
On présente ensuite les définitions et les méthodes d’étude de la porosité et de la
perméabilité, dont l’incidence est grande sur les propriétés mécaniques, à sec ou en
présence de fluides. Les propriétés acoustiques sont considérées comme participant
à la caractérisation des roches (l’ensemble est appelé en anglais index properties).
On évoque les propriétés thermiques mais on laisse de côté les propriétés
magnétiques et électriques en dépit de certaines applications.
Les propriétés mesurées au laboratoire ne tiennent pas compte des discontinuités
apparaissant à l’échelle du massif, joints de stratification, diaclases, failles, qui sont
traitées aux chapitres 4 et 5. Lorsque ces discontinuités sont rares ou espacées
l’échantillon est représentatif du massif jusqu’à une large échelle, comme dans les
craies et les roches argileuses.
Il faut faire attention aux dénominations issues des cartes géologiques, dérivées de
l'appellation chronologique (étage) pour les roches sédimentaires. Il peut y avoir des
variations latérales de faciès qui font que le nom de la formation ne représente pas la
lithologie de tout l'ensemble.
Les roches métamorphiques résultent de la transformation profonde à l'état solide
de roches sédimentaires ou magmatiques préexistantes sous l'effet d'une
augmentation de la température et/ou de la pression. Il y a recristallisation complète
des roches primitives. Les roches formées portent en général la trace de l'anisotropie
du tenseur des contraintes sous lequel elles ont cristallisé, ce qui peut se traduire par
une schistosité ou une foliation accompagnée de linéation. Les roches les plus
communes sont les schistes, les micaschistes et les gneiss, beaucoup plus massifs,
mais dans lesquels les minéraux apparaissent nettement orientés. Les marbres et les
quartzites sont des roches massives entièrement recristallisées dans lesquelles
l'orientation des minéraux (calcite ou quartz) n'est que rarement visible à l'œil nu.
La description d'une roche comprend les observations suivantes, effectuées à l'œil nu
ou de préférence à la loupe ou au microscope :
! identification des minéraux présents,
! taille, arrangement des minéraux et des vides associés (texture),
! proportion des différents constituants,
! vides et défauts : pores et fissures,
! état d'altération des minéraux.
L'analyse minéralogique des constituants contribue à une meilleure description de la
roche et permet d'approcher son altérabilité, son potentiel de gonflement, son
aptitude au « collage », éventuellement son abrasivité. L'analyse minéralogique
s'effectue couramment par diffraction X, et dans le cas où des minéraux argileux
gonflants sont susceptibles d'être présents il est nécessaire de réaliser un traitement
spécial. Cette analyse conduit à une identification des minéraux présents et après
interprétation une composition quantitative peut être obtenue.
Pour les roches carbonatées argileuses, le dosage de la teneur en CaCO3 précise
l'identification de la roche.
L’état d'altération de la roche se décrit précisément en s'attachant à identifier s'il
s'agit d'une altération essentiellement météorique ou d'une altération d'origine
profonde, hydrothermale (souvent liée au volcanisme actuel ou plus ancien).
Vv
n" (2-1)
Vt
ou par rapport au volume du squelette Vs,
Vt % Vs V
n" " 1% s (2-2)
Vt Vt
Ces deux expressions peuvent différer car les techniques de mesures de Vv et Vs ne
sont pas équivalentes (tableau 2-2). Les méthodes 3 et 6 sont équivalentes, et
permettent de déterminer la porosité connectée. Les méthodes 4 et 6 (sur poudre)
déterminent le volume des solides sans les vides non connectés et donnent donc la
porosité totale, au sens strict.
Volume total
1. Mesure directe des dimensions de l'éprouvette
2. Poussée d'Archimède dans le mercure, qui ne mouille pas la roche et ne pénètre
pas dans les pores sans une forte pression
Volume du solide
4. Mesure au pycnomètre de la masse volumique du solide, après broyage
5. Poussée d'Archimède dans un fluide mouillant saturant la roche, par différence
entre masse sèche et immergée
6. Compressibilité des gaz parfaits, en réalisant une détente isotherme en reliant une
enceinte V1 (contenant l'échantillon) de volume V1 à la pression P1 à une enceinte
vide de volume V2 (pycnomètre à hélium). Après détente, la pression d'équilibre P2
permet de calculer le volume d’une masse connue de poudre ou de roche.
Saturation
résiduelle
irréductible
Saturation
R2
R1
r
np
2ème injection
nl
1° et 2° retraits
R(µm)
0
0,001 0,01 0,1 1 10 100
La perméabilité au gaz est avec les paramètres définis dans l’équation 2-11 et Patm,
la pression atmosphérique (Pa) :
2Q$LPatm
k" (2-12)
( Pg2 % Pf2 )S
R 2h n
k" (2-14)
2 t2
où le paramètre Rh = Vv /Ap, appelé rayon hydraulique, constitue la longueur
caractéristique recherchée. Les autres paramètres sont la porosité n et la tortuosité t,
alors que 2 est un facteur qui dépend de la géométrie des pores, et qui présente une
variabilité très faible (approximativement entre 2 et 3). Le point faible du modèle
réside dans le paramètre «tortuosité», qui quantifie l’accroissement de la distance
parcourue par le fluide, difficile à estimer en raison de la complexité topologique du
milieu poreux.
Une approche différente est possible. Au lieu d’utiliser des grandeurs
macroscopiques, on peut s’attacher à décrire les processus d’écoulement à l’échelle
des composants élémentaires (les pores, les fissures), puis par différentes techniques
remonter à la propriété macroscopique, la perméabilité. A l’échelle locale,
l’écoulement dans les pores et les fissures considérés comme des entités propres est
régi par la loi de Poiseuille. Ces pores et ces fissures interagissent entre eux du fait
de l’existence de connexions multiples dans les milieux poreux. L’information
essentielle à fournir concerne la distribution statistique des propriétés
dimensionnelles des pores ou des fissures, représentés par des canaux d’écoulement
individuels. On peut considérer une distribution aléatoire de tubes ou s’attacher à
décrire de manière plus détaillée la topologie complexe des milieux poreux par une
approche de type réseau.
La vitesse des ondes P varie à lithologie constante avec la porosité de pores, mais
diminue plus fortement encore avec la porosité de fissures. Pour estimer la part
relative de porosité de pore ou de fissure dans des roches de lithologie différente on
utilise l’indice de continuité IC défini comme le rapport de la vitesse des ondes P
mesurée dans l’échantillon à la vitesse des ondes calculée Vp* à partir de la
composition minéralogique. Vp* est la moyenne arithmétique pondérée des vitesses
44 Manuel de Mécanique des Roches
Vp
IC (%) = 100 V * avec Vp* = 5 ci x V i (2-18)
p
Ce rapport des vitesses varie comme le rapport K/K* des compressibilités K globale
(bulk modulus) de la roche et K* de la matrice (les minéraux constitutifs de la
roche) en fonction de la porosité de pores np et de la porosité de fissures nf , mais la
sensibilité à la présence de fissures est beaucoup plus marquée. On peut écrire :
IC = 100(1 –A np - B nf) (2-19)
avec nf + np = ntotale et nf << np
Dans le cas des roches exclusivement poreuses (ntotale = np ), il y a une relation
expérimentale entre l’indice de continuité IC = ICp et la porosité n :
100
Indice de continuité IC (%)
90
80
70 0%
60
25%
50
40
50%
30
20
75%
10
Porosité (%)
0
0 10 20 30 40 50
(figure 2-7) situées sous la droite des milieux non fissurés. On peut donc, à partir de
la mesure de la porosité, de la vitesse des ondes Vp, et du calcul de l’indice de
continuité IC, estimer la densité de fissuration d’une roche.
La vitesse des ondes P est sensible à l'état de saturation des roches. Le modèle
classique explicatif est celui de Wyllie donnant la vitesse de propagation des ondes à
travers un milieu biphasique (phase 1 et 2) :
1 n 1% n
" + (2-23)
V V1 V2
où V1, V2 sont les vitesses de propagation dans les milieux 1 et 2, n et (1-n) sont les
proportions volumiques des milieux 1 et 2.
Cette approche donne des résultats satisfaisants pour des milieux consolidés saturés
(calcaires et grès) ; dans ce cas, le milieu 1 est le fluide, le milieu 2 la matrice, et n la
porosité.
Une autre formulation de la propagation d'une onde dans un milieu biphasique a été
proposée par Wyllie en tenant compte du module de compressibilité K et du
coefficient de Poisson 3. La relation reliant la vitesse V à K, 3 et à la masse
volumique # est de la forme :
#V 2
K" (2-24)
1+ q
où q est un paramètre déduit des relations d’équivalence entre modules élastiques,
fonction du coefficient de Poisson 3'
De nombreux auteurs ont proposé des formules de Wyllie modifiées selon le volume
de porosité présent. En réalité le milieu n’est pas toujours saturé en liquide et il peut
donc contenir de l’air et de l’eau ou plusieurs liquides. Les vitesses varient alors
selon la nature du liquide et son degré de saturation. Si on s’intéresse au cas d’une
roche partiellement saturée en eau les variations de Vp et Vs avec le degré de
saturation Sr sont relativement complexes car plusieurs effets se superposent. Si on
compare les vitesses Vp et Vs en milieu sec et saturé, on observe Vp sec < Vp saturé
et une petite tendance inverse pour Vs. Le module de compressibilité est plus élevé
en milieu saturé alors que le module de cisaillement reste constant et la densité
augmente avec la saturation.
présentés sur la figure 2-9. Les vitesses décroissent globalement entre l'état sec et un
degré de saturation intermédiaire (Vp minimale) puis augmentent jusqu'à une valeur
maximale correspondant à la saturation totale. La saturation partielle de l'échantillon
provoque d'abord une augmentation de la densité donc une diminution de la vitesse.
Par contre, quand les pores sont presque totalement saturés, ils sont plus difficiles à
comprimer d'où une augmentation de la rigidité et de la vitesse. La compétition entre
effet de module et de densité est fortement dépendante du type de réseau poreux,
puisque les variations sont différentes pour différents calcaires.
Les roches bien que contenant des minéraux fortement anisotropes sont souvent
isotropes ou faiblement anisotropes. Si une anisotropie apparaît c’est qu’il existe
peut-être une orientation préférentielle des minéraux, mais surtout une orientation de
la microfissuration affectant l’échantillon. Les mesures de vitesses des ondes
permettent de mettre en évidence l’anisotropie de structure ou de fissuration et de
décider en fonction de son importance d’en tenir compte ou non dans un programme
d’essais mécaniques (chapitre 3). Considérons une symétrie hexagonale comme sur
la figure 2-10. La vitesse Vp sera la même suivant les directions principales 2 et 3 du
plan de base, mais elle sera plus faible dans la direction 1 affectée par les plans
d’anisotropie. Les ondes S sont émises et reçues par des céramiques polarisées de
manière à ce que le déplacement des particules se fasse perpendiculairement à la
direction de propagation. La vitesse de l’onde S suivant la direction 1 sera la même
dans toutes les directions, la vibration se faisant dans un plan homogène. Par contre
suivant les directions 2 ou 3 le plan d’anisotropie est parallèle à la direction de
propagation de l’onde.
Vp3 Vp23
Figure 2-10 : Directions de Figure 2-11 : Directions de
propagation et correspondances avec propagation et correspondances avec
les éléments Cij de la matrice de les éléments Cij de la matrice de
raideur (symétrie hexagonale ou raideur (symétrie orthotrope)
isotrope transverse)
La variation de volume associée est /V/V = 7ij = 34T. La quantité 4v=34 est
appelée coefficient de dilatation thermique volumique. Si la roche est anisotrope, il
est nécessaire de déterminer le coefficient de dilatation thermique suivant les
directions principales d’anisotropie.
Le coefficient de dilatation linéaire des roches varie en fonction de la minéralogie, la
texture, la porosité et la microfissuration. Il varie entre 5 10-6K-1 et 25 10-6K-1 pour
la plupart des roches. Il est de 40 10-6K-1 pour le sel gemme. Pour l’ardoise
perpendiculairement à la schistosité il est de 24 10-6K-1 alors que suivant les deux
autres directions principales il n’est que de 17 10-6K-1.
Dès lors que la roche n’est plus libre de toute liaison et/ou que la variation de
température n’est plus uniforme des contraintes d’origine thermique peuvent
apparaître dans la roche (chapitre 10).
50 Manuel de Mécanique des Roches
SÉLECTION BIBLIOGRAPHIQUE
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92U
(6 + 2$) grad div U - $ rot rot U = # (2-29)
9t2
Physique des Roches 51
920
(6 + 2$) ;2 0 = # (2-30)
9t2
1/ 2
1 920 & 6 + 2$ )
;2 0 = 2 2 avec Vp " ( + (2-31)
Vp 9t ' # *
Si nous considérons maintenant un mouvement sans changement de volume tel que
U = rot: avec div rot: = 0, l'équation du mouvement de l'onde devient :
1/ 2
1 92 : & $)
;2 : = avec Vs " ( + (2-32)
V s2 9t2 ' #*
Un modèle viscoélastique linéaire est communément utilisé pour rendre compte de
la dissipation d'énergie durant le passage de l'onde, et donc de son atténuation.
Dans ce cas, l'équation du mouvement est donnée par :
92U 92U
# = M(<) (2-33)
9t2 9x2
où M(<) est un module complexe qui découle de la loi de comportement (<
pulsation).
Pour une onde plane, on démontre qu'une solution de l'équation du mouvement peut
s'écrire sous la forme :
< (2-35)
U = Uo e- 4x e[i<(t - x/c)], avec k* = c - i 4
2 !Wmax
Q" (2-37)
/W
Ces deux paramètres sont liés entre eux par la relation suivante :
!f !
Q" " (2-38)
QV 4
où f est la fréquence et V la vitesse de l'onde. Cette relation est simplifiée mais
donne une bonne estimation de la relation entre Q et 4.
LOI DE FOURIER ET ÉQUATION DE LA CHALEUR
Considérons un milieu continu, homogène, isotrope, thermiquement isolé et de
température non uniforme. Dans ce milieu, on considère les isothermes du champ de
température. Soit (S) la surface isotherme de température T, soit A un point de (S) et
n le vecteur normal à (S) au point A et orienté dans le sens des températures
décroissantes.
La loi de Fourier stipule que pour une petite surface 8s de dimension finie et tracée
sur (S) autour de A, traversée dans la direction n durant le temps 8t par la quantité
de chaleur 8Q, on pose a priori :
9T
8Q = - 6 8s 9n 8t (2-39)
9T
où 9n 8t (2-40)
9T & 92 T 92 T 92 T )
#C " 6( 2 + 2 + 2 + (2-46)
9t ' 9x1 9x 2 9x 3 *
CHAPITRE 3
COMPORTEMENT MÉCANIQUE DES ROCHES
3.1 INTRODUCTION
Les propriétés mécaniques des roches se divisent en deux catégories :
! les résistances à des sollicitations mécaniques : traction, compression uniaxiale
ou triaxiale, définissant des seuils ou critères de rupture ;
! les déformabilités sous l'effet des sollicitations mécaniques : modules
instantanés ou différés.
Au delà de ces propriétés, qui s’expriment par des données chiffrées, on préférera
parler de comportement, un terme plus général. Le terme de « loi de
comportement » désigne d'une manière générale l'expression mathématique de la
relation entre les contraintes et l'histoire des déformations subies par l'échantillon.
Dans ce chapitre, il ne sera fait référence qu’à des lois de comportement
élémentaires, élasticité et plasticité, les lois « avancées » étant présentées dans le
chapitre 8.
Le comportement et les propriétés mécaniques des roches sont étudiés au
laboratoire, à partir d'échantillons continus de dimensions centimétriques à
décimétriques. La représentativité d'échantillons de laboratoire, c'est-à-dire leur
aptitude à représenter les propriétés du site dont ils sont extraits, se heurte à
plusieurs types de difficultés :
! présence de fractures : certains types de fractures, présentes sur le site, peuvent
ne pas être présentes dans l'échantillon prélevé, trop petit pour les contenir, et
donc échappent à l'analyse (c'est notamment le cas pour les discontinuités
majeures - fractures régionales, failles... - qui ne sont évidemment pas
susceptibles de prélèvement). D'une manière générale, tout bloc extrait du site a,
en quelque sorte, déjà subi une « sélection naturelle » interdisant la présence de
discontinuités importantes (qui conduiraient à une division du bloc en blocs plus
petits) ;
! hétérogénéité du massif : certains massifs sont hétérogènes, c'est-à-dire formés
d'éléments de propriétés mécaniques différentes, par exemple alternance de
schistes et de grès ;
! variabilité des propriétés mécaniques au sein du massif rocheux, même au
sein d'une formation identifiée ; il convient alors d’utiliser la géostatistique pour
décrire et modéliser la nature de cette variabilité et, éventuellement, le type
d'échantillonnage à effectuer en vue d'une « représentativité correcte » ;
! enfin l'effet d'échelle : les roches présentent généralement un « effet d'échelle »
plus ou moins marqué, lié à la présence au sein de la matrice rocheuse, de divers
types d'hétérogénéités et de discontinuités ; cet effet d'échelle se manifeste par
le fait que les propriétés mécaniques mesurées sont fonction des dimensions de
l'éprouvette.
L'étude des discontinuités présentes dans le massif rocheux, et susceptibles d'en
affecter les propriétés mécaniques, fait l'objet des chapitres 4 et 5. Les
56 Manuel de Mécanique des Roches
Plateau
supérieur
Eprouvette
Plateau
inférieur
Figure 3-1 : Dispositif pour essai Figure 3-2 : Frettage d'une éprouvette
brésilien en compression
3.2.3 ESSAI DE COMPRESSION UNIAXIALE
C'est l'essai le plus communément réalisé. Il est effectué sur éprouvettes
cylindriques, d'élancement L/D (L, hauteur, D diamètre) compris entre 2 et 2,5.
L’élancement est un point important qui se comprend lorsqu’on examine les
conditions de contact machine-éprouvette. Il existe un état de contrainte non
homogène dans des zones en forme de cône (figure 3-2) correspondant à un frettage
de l’éprouvette. Le frettage est dû au frottement empêchant le déplacement libre des
extrémités de l’éprouvette, engendré par le contraste de déformabilité entre la roche
et les plateaux de la presse. Les roches sont toujours plus déformables que les aciers
avec lesquels elles sont en contact durant l'essai. Ce frettage augmente
artificiellement la résistance à la compression de l'éprouvette. Il convient donc de
diminuer les zones d'influence du frettage en jouant sur l’élancement :
! élancement faible (L/D = 1) : les deux cônes s'interpénètrent, la résistance à la
compression est alors surévaluée ;
58 Manuel de Mécanique des Roches
#1
S2
#2
#3
S1
1 1
# # #
a b c
Si #2 = #3 ' #1: la roche est probablement isotrope transverse et le plan (S2, S3 ) est
un plan isotrope.
Si #2 ' #3 ' #1: la roche est peut être orthotrope.
3.4.2 CARACTÉRISATION DE LA MICROFISSURATION NATURELLE
Schématisons une microfissure sous forme d’un ellipsoïde aplati, caractérisé par un
grand axe de longueur 2c et une ouverture 2a (figure 3-7). Cette fissure est définie
par un coefficient de forme a/c de l’ordre de 10-3. Sous l'effet d'une charge normale,
l'ouverture va diminuer jusqu'à ce que les lèvres de la fissure se touchent.
Supposons qu'une roche isotrope possède une population de fissures de ce type,
réparties de manière aléatoire et effectuons un essai de compressibilité. Du fait de
l'isotropie et de la répartition aléatoire des microfissures, la réponse des jauges sera
telle que #1 = #2 = #3. La figure 3-8 représente l'évolution de la variation de volume
&V/V en fonction de la pression Pc.
Pc
B
p
2a
Pf A
2c
0 &V/V
nf
! (MPa) #3 #2 #1
S1 40
30
20
S3
10
S2 # .10-4
0
1 2 3 4 5
Figure 3-9 : Repère structural Figure 3-10 : Essai de compressibilité
sur un marbre présentant un plan de
foliation
La figure 3-11 montre un essai de compressibilité sur une ardoise, qui présente une
anisotropie forte due à la présence d'un plan de discontinuité (plan de fissilité). La
direction S1 est prise perpendiculaire à ce plan. On remarque que, les déformations
selon S2 et S3 sont sensiblement identiques tant du point de vue « fermeture des
fissures » que du point de vue de l'élasticité. Par contre la réponse selon S1 est très
différente:
! la fermeture des fissures est beaucoup plus importante, ce qui indique que les
microfissures sont dans le plan de schistosité et c'est ce qui permet le délitage
des ardoises ;
! la pente des déformations élastiques est différente, ce qui semble indiquer que
cette roche est isotrope transverse.
La figure 3-12 présente un essai de compressibilité sur un échantillon d'argilite : la
direction S1 est prise perpendiculaire au plan de stratification.
60 60
Pc (MPa) Pc (MPa)
#3 #2 #1
#2 #3 #1
40 40
20 20
#.10-6 #.10-3
0 0
0 500 1000 1500 0 5 10 15
Figure 3-11 : Essai de compressibilité Figure 3-12 : Essai de compressibilité
sur une ardoise sur une argilite
64 Manuel de Mécanique des Roches
L'allure des courbes présentées est très semblable à celle de l’ardoise et les
conclusions voisines. Les remarques portent sur l'interprétation de la « fermeture des
fissures »: dans le cas d'une argilite, il est plus correct de parler de « serrage des
feuillets argileux » que de fermeture de fissures. Notons que le mécanicien des sols
interprète cette partie convexe comme étant indicatrice d'un état de surconsolidation
du matériau et que la pression Pc serait la pression de consolidation.
3.4.4 CAS DES ROCHES TRÈS POREUSES : PRESSION D'EFFONDREMENT
DES PORES
Figure 3-13 : Essai de
60 compressibilité sur une craie
Pc
Les matériaux très poreux, par
exemple les craies, présentent
40 lors de l’essai de compressibilité,
un comportement particulier. Un
exemple est donné par la figure
20
Pt 3-13, qui présente l'évolution de
la variation de volume en
Pcol. fonction de la pression de
#v 10-2 confinement. A partir de
0 l'examen des résultats de cet
0 4 8 12 16 essai, on peut faire les remarques
suivantes :
! la craie ne présente pas de microfissures décelables, le comportement est
linéaire élastique dès l'origine ;
! à partir d'une certaine pression pcol, la variation de volume (compaction) est
plus grande que dans la zone élastique, ce qui signifie que la microstructure
commence à évoluer (destruction des joints de grains) pour réduire sa porosité.
La pression Pcol correspond donc à une pression de début d'effondrement de
structure. Elle est appelée « pression d'effondrement des pores » (p o r e
collapse) ;
! au delà d'une certaine pression Pt, le gradient de variation de volume s'inverse à
nouveau: la roche semble « se raidir ». En fait, à partir de la pression Pt
l'effondrement de la microstructure poreuse tend à se stabiliser.
La pression Pcol joue un grand rôle dans la compaction des réservoirs pétroliers. La
valeur de cette pression dépend de la nature de la roche, c'est à dire de la nature des
joints de grains, et de la porosité : plus la porosité de la roche est importante, plus la
valeur de Pcol diminue.
3.4.5 REMARQUES SUR L'ISOTROPIE
La disposition des jauges de la figure 3-4 ne permet pas de conclure avec certitude
que les résultats de la figure 3-6a conduisent à une roche isotrope, et que les résultats
de la figure 3-6b conduisent à une roche isotrope transverse. L'hypothèse d'isotropie
impose de vérifier la même propriété quelle que soit l'orientation. Or les jauges
d'extensomètrie ont été placées selon trois directions particulières. Pour s'assurer de
la validité de l'hypothèse d'isotropie, soit spatiale soit planaire, il est nécessaire
d’ajouter des jauges suivant trois autres orientations.
Comportement mécanique des roches 65
!1
!c
!l
!d
!f
!r
!s
#3 #1
12
!1 (MPa)
10
!t . !a
8
2
#.10-3
0
-6 -4 -2 0 5 10
Figure 3-16 : Courbes !1 - #a , #t et . ; grès
!1 (MPa)
40
#t . #a
30
20
10
#.10-3
-0,5 0 0,5 1,5
25 !1 (MPa)
#t . #a
20
15
10
5
#.10-3
0
-2 -1 0 2 4
S1 S2
S1 X1
S2 S1
X3
S3 S1
S3
S2
S3 plan
d’anisotropie
Figure 3-19 : Instrumentation pour les Figure 3-20 : Essai clinotrope sur
modules principaux roche isotrope transverse
Pour l'essai de compression selon S1 la jauge axiale permet de calculer le module de
Young E1 et la jauge transversale, le coefficient de Poisson $ 12 . Pour l'essai de
compression selon S2, la jauge axiale permet de déterminer E2, la jauge transversale
collée dans le plan [S2, S3], le coefficient de Poisson $23, la jauge transversale collée
perpendiculairement à la schistosité, c’est-à-dire au plan [S2, S3], le coefficient de
Poisson $21.
Essais clinotropes - Mesure de G12
Effectuons une rotation . du repère principal des contraintes autour de S2 et
caractérisée par "+2 % . " S(1,X1). Pour un essai de compression réalisé dans une
orientation . différente de 0° et 90°, une jauge axiale (figure 3-20) donne une valeur
du module E(.) qui doit être égale à (Annexe de ce chapitre) :
1 sin 4 . ( 1 $ $ + cos 4 .
" '* % 12 % 21 - sin 2 . cos 2 . ' (3-9)
E (. ) E1 ) G12 E1 E2 , E2
Les paramètres E1, E2, $12, $21 étant connus, le calcul de G12 s'en déduit. Il est donc
possible, de déterminer le module de cisaillement G12 par jauges d'extensométrie. Il
faut néanmoins faire très attention à bien mesurer un paramètre élastique E(.), car la
présence de microfissures dans le plan d’anisotropie peut masquer le comportement
élastique.
70 Manuel de Mécanique des Roches
2
!1 !1 !1
1 2*
P0 P0 P0 3
P0 Pc P0 Pc P0 Pc
0 0 0
!1
4* !1
(!1)0
5
P0
4 P0
P0 Pc P0 Pc
0 0
20 !1-!3 (MPa)
6 MPa
100 !1-!3 (MPa) !3=50 MPa 15 17 MPa
3 MPa
80
13 MPa
60 10
! 3=30 MPa
40
!3=10 MPa
20 5
!3=5 MPa
#.10-3 1 MPa
#%
0 20 40
0
0 0,5 1 1,5 2,0 2,5
Figure 3-23 : Influence de la pression Figure 3-24 : Influence de la pression
de confinement sur le comportement de confinement sur le comportement
d'une marne en fonction de la pression d'une craie en fonction de la pression
de confinement de confinement
Représentation dans le plan de Mohr
A partir des essais triaxiaux, il est possible d'étudier l'influence de la pression de
confinement sur la limite élastique ou la rupture (chapitre 9). La première
représentation et la plus communément pratiquée est la représentation de Mohr. Il
suffit de tracer les cercles, centrés sur l’axe des contraintes principales, et coupant
cet axe en ! 1 et Pc, correspondant aux conditions limites recherchées (limite
élastique ou rupture) et de prendre l'enveloppe de ces cercles. La figure 3-25 donne
l'exemple d’une marne. On remarque que plus la pression de confinement augmente,
plus l'enveloppe « s'aplatit » pour tendre vers une asymptote / = constante,
caractéristique d'un comportement ductile (§3.7).
/ (MPa)
30
20
10
20 40 60 80 100 ! (MPa)
Figure 3-25 : Représentation de Mohr des conditions de rupture pour une marne
Représentation en plan principal
C'est la représentation la plus directe à partir des résultats de l'essai triaxial. Deux
types de représentation sont possibles:
! dans le plan des contraintes principales, c'est-à-dire dans le plan (!1, !3) ;
! dans le plan (P,Q) avec P contrainte moyenne (P = (!1 + 2!3)/3) et Q contrainte
déviatorique (Q = (!1 - ! 3)). La notation habituelle est souvent en minuscules ;
les majuscules sont employées ici, pour qu’il n’y ait pas de confusion avec la
pression interstitielle notée p.
Comportement mécanique des roches 73
Les figures 3-26 et 3-27 donnent ces représentations pour la même marne en
conditions de rupture.
120 80
!1 (MPa) Q (MPa)
100 60
80
40
60
40 20
!3 (MPa) P (MPa)
20 0
0 10 20 30 40 50 0 10 30 50 70
Figure 3-26 : Représentation dans le Figure 3-27 : Représentation dans le
plan expérimental des conditions de plan (P,Q) des conditions de rupture
rupture pour une marne pour une marne
Représentation en Invariants
Cette représentation peut être intéressante pour certains types de critères tels que
Cam Clay ou Drucker-Prager (chapitre 9). Elle représente par exemple la variation
de 03J2 (J2 deuxième invariant du tenseur déviatorique des contraintes ; voir
Annexe générale) en fonction de I1, I1 premier invariant du tenseur des contraintes.
Notons que dans le cas de l'essai triaxial, cette représentation est équivalente à la
représentation (P,Q) puisque P=I1/3, et Q=03J2.
3.6.3 ESSAIS DRAINÉS ET ESSAIS NON DRAINÉS
Dans ce qui précède, nous avons supposé que la roche était sèche ou que la pression
du fluide interstitiel restait nulle durant l'essai triaxial. Nous allons maintenant
envisager le cas où la roche est parfaitement saturée en fluide avant d'effectuer
l’essai. Le dispositif expérimental (figure 3-28) comprend des embases drainantes en
tête et pied d'échantillon reliées à des capteurs de pression (A) et (B) et à des vannes
(A) et (B). Notons p la pression du fluide interstitiel.
Essai non drainé
L'essai non drainé signifie que, durant l’essai, la masse de fluide dans l'échantillon
reste constante. Donc pour réaliser cet essai, il faut :
! fermer la vanne B ;
! mettre le fluide interstitiel à une pression initiale p0. On vérifiera que le capteur
B indique cette pression p0 ;
! fermer la vanne A.
On note au cours de l'essai triaxial l'évolution de la pression p avec le chargement.
Les deux capteurs de pression doivent donner la même valeur. L’essai triaxial
classique (trajet 1) comprend une partie hydrostatique et une partie déviatorique. La
figure 3-29 donne l'évolution de la pression p interstitielle en fonction de la pression
de confinement pour une craie (première partie de l'essai). On remarque une relation
linéaire entre p et Pc donnant BS, le coefficient de Skempton (chapitre 10) :
BS = &p/&Pc (3-10)
74 Manuel de Mécanique des Roches
A
Embase !1 A
supérieure Mesure
drainante de
volume 30
Pc (MPa)
Gaine
!3 = Pc
20
Embase B 10
inférieure
drainante B
p (MPa)
0
0 5 10 15 20
Figure 3-28 : Dispositif expérimental Figure 3-29 : Pression interstitielle en
pour essai drainé et non drainé fonction de la pression de confinement
pour une craie (essai non drainé )
La figure 3-30 donne l'évolution de la pression durant un chargement déviatorique
sur un grès. On remarque que la pression augmente lorsque la variation de volume
de l'échantillon diminue, et que la pression chute dès qu'apparaît la dilatance.
300 300
!1 - !3 !3 = 10 MPa !1 - !3 !3 = 10 MPa
(MPa) (MPa)
200 #3 . #1 200
100 100
#.10-3 p (MPa)
0 0
-10 -5 0 5 10 -1 0 1 2 3
Cet essai peut être réalisé aussi avec une pression p = p0, en utilisant des contrôleurs
de pression qui gardent la pression constante et qui font simultanément la mesure de
variation de volume.
Critère de rupture en contrainte effective
La roche, au cours des essais drainés et non drainés, est soumise à une pression
interstitielle non nulle. Le concept de contrainte effective est alors utilisé dans toutes
les lois de comportement et pour l’expression du critère de rupture. On pose : !’= !
- bp, avec b, le coefficient de Biot (chapitre 10), compris entre 0 et 1. A la rupture, b
est pris généralement égal à 1. Dans le chapitre 10, on verra que ce sont les
contraintes effectives et non les contraintes totales qui gouvernent les déformations
du milieu poreux. Le concept de contrainte effective est donc lié à la loi de
comportement de la roche et il est important de dissocier les contraintes effectives
élastiques, des contraintes effectives gouvernant la rupture.
! !
b
a !p
# #
3.7.3 ÉLASTOPLASTICITÉ
Rappelons, tout d’abord, quelques définitions relatives à la plasticité. La surface
d’écoulement est la surface dans l’espace des contraintes définissant des états de
contrainte pour lesquels se développent des déformations plastiques. La loi de
durcissement règle les changements possibles en forme, taille et position de la
surface d’écoulement. La règle d’écoulement gouverne l’incrément des
déformations plastiques. Dans le domaine non linéaire, l'incrément de déformation
totale consiste en la somme des incréments de déformation élastique et de
déformation plastique :
8Q
d# pl " d9 (3-17)
8!
d #pl
Figure 3-34: Règle d’écoulement
non associée
nQ
Cette équation exprime la con-
d! dition que dans l'espace superposé
Q
! des contraintes et des déforma-
tions, le vecteur représentant l'in-
F=
0 crément de déformation plastique
est directement le vecteur extérieur
normal à la surface représentant le
!,#
potentiel plastique au point qui
78 Manuel de Mécanique des Roches
correspond à l'état courant de contraintes. A noter que d9 est une inconnue qu’on ne
peut déterminer qu’en résolvant un problème de structure. La règle d'écoulement est
associée si le potentiel plastique et la surface d'écoulement coïncident. Si ce n’est
pas le cas la règle d’écoulement est non associée (figure 3-34 où nQ = 8Q/8!).
# !
!0
#0 b b
!:
t t
! #
!0 #0
a a
t0 t t0 t
Figure 3-35 : Chemin et réponse d’un Figure 3-36 : Chemin et réponse d'un
essai de fluage essai de relaxation
Comportement mécanique des roches 79
L'essai de relaxation est un autre essai qui permet de rendre compte des effets du
temps sur le comportement : c'est l’essai dual de l'essai de fluage. Il est décrit par la
figure 3-36. Dans cet essai on applique une déformation # = #0 au temps t = t0 ; cette
déformation est maintenue constante. La réponse est donc en contrainte ; si le temps
a un effet sur le comportement, la contrainte décroît (compression >0) avec le temps
depuis ! = !0 au temps t = t0, pour tendre généralement vers une asymptote ! =
!: < !0.
3.8.2 INFLUENCE DE L'INTENSITÉ DU DEVIATEUR
SUR LE COMPORTEMENT DIFFÉRÉ.
Prenons un essai de fluage en compression simple et faisons varier la contrainte
appliquée à l'éprouvette (figure 3-37). Si la charge est faible par rapport à la
contrainte de rupture, la vitesse de fluage s'annule rapidement après une phase
transitoire (courbe a). La déformation reste toujours faible. Ce fluage est
relativement bien traduit par une expression sous forme logarithme du temps, par
exemple :
# - #0= A ln ( ;t + 1) (3- 18)
Ce fluage est aussi appelé fluage < ou fluage logarithmique. A noter que cette
expression n’est vraie que pour une fenêtre t = [0,T].
La courbe de fluage (b) correspond à des niveaux de contraintes plus élevés et peut
être décomposée en deux stades :
! stade I : ou fluage primaire ou fluage transitoire ou fluage >. C'est un stade de
transition ou la vitesse de fluage diminue rapidement avec le temps. Ce fluage
peut prendre la forme :
# - #0 = A t m (3-19)
avec m compris entre 0,3 et 0,6 selon les conditions expérimentales ;
! stade II : ou fluage secondaire ou fluage stationnaire. Dans ce stade, la
vitesse de fluage est constante, et cette constante est analogue à la viscosité des
fluides.
Après ce stade, les déformations peuvent s'amortir ou se poursuivre à une vitesse
constante (fluage permanent). La vitesse de fluage croît avec la contrainte appliquée
avec une loi de la forme :
c !
#
???
! Fluage
b
??
? ?? Relaxation
? Courbe
a limite
t
#
! la résistance croît puis décroît : les deux effets se compensent. L'effet de surface
a tendance à dominer pour de petites dimensions d'échantillons.
Quelques exemples des différents comportements sont présentés ci-après.
250 !c (MPa)
Granite
200 Grès 1
Calcaire 1
150 Marbre
Calcaire 2
100
Grès 2
Charbon
50
0
Ø (cm)
0 2 4 6 8 10 12
avec ! u, la plus petite contrainte que tout élément de volume élémentaire peut
supporter, !o, la contrainte de référence, m, un paramètre d'échelle. Dans le cas où
la distribution des contrainte est uniforme :
m
1 ! % !u 4
3 6 représente donc le risque de rupture pour le volume élémentaire.
2 !o 5
Prenons deux éprouvettes :
m m
1 !1 % ! u 4 1 !2 % !u 4
3 6 V1 " 3 6 V2 (3-23)
2 !o 5 2 !o 5
1/ m
!1 1 V2 4
si !u = 0 on obtient "3 6 (3-24)
! 2 2 V1 5
Coefficient de
variation (%)
8
6 !c (MPa)
180
4
170
2 160
Ø éprouvette (cm)
Volume (cm3 ) 150
0
0 400 800 1200
Figure 3-40 : Dispersion de la Figure 3-41 : Effet d'échelle inverse sur
résistance et volume essayé le granite de Senones
Comportement mécanique des roches 83
Cet effet d'échelle inverse serait lié à des détériorations de la couche externe de
l'éprouvette modifiant les propriétés mécaniques de la roche sur une certaine
épaisseur. Or, la surface externe par unité de volume décroît lorsque les dimensions
de l'éprouvette diminuent. Ainsi, l'effet de surface est prépondérant (lorsqu'il existe)
pour les éprouvettes de petit diamètre.
3.9.4 EFFET D’ÉCHELLE MIXTE
Pour illustrer l’effet d’échelle mixte, composé d’un effet de surface pour les
éprouvettes de petit diamètre et d’un effet de volume pour les diamètre plus
importants, les figures 3-42 et 3-43 présentent des résultats d’essai de compression
uniaxiale réalisés sur une ardoise suivant les deux directions principales
d’anisotropie.
!c (MPa) !c (MPa)
150
200
Ø (cm)
50
Ø (cm)
100 2 4 6 8 10 12
2 4 6 8 10 12
SÉLECTION BIBLIOGRAPHIQUE
AFNOR : Normes NFP 94-420, 94-422, 94-423, 94-425, 94-426.
Bieniawski Z.T. - The effect of specimen size on compressive strength of coal. Int. J. Rock
Mech. Min. Sci., vol. 5, pp. 325-335, 1968.
Bernaix J. - Etude géotechnique de la roche de Malpasset, Dunod, 1967.
Einstein H., Baecher G. & Hirschfeld R. - The effect of size on strength of a brittle rock. 2ème
Congrès ISRM, Belgrade, vol. 2, thème 3, 1970.
Homand F. - Comportement mécanique des roches en fonction de la température. Mémoire
Sci. de la Terre 46, 261 p., 1986.
Houpert R. & Tisot J.P. - Effet d'échelle et dispersion des contraintes de rupture en
compression simple dans le cas d'un granite. Revue de l'Industrie Minérale,
n° spécial, pp. 29-34, 1969.
Mandel J. – Propriétés mécaniques des matériaux. Eyrolles, 284 p., 1978.
Morlier P., Amokrane K. & Duchamps J.M. - L'effet d'échelle en mécanique des roches,
recherche de dimensions caractéristiques. Revue Française de Géotechnique,
49, pp. 5-13, 1989.
Niandou H., Shao J.F., Henry J.P. & Fourmaintraux D. – Laboratory investigation of the
mechanical behaviour of Tournemire shale. Int. J. Rock Mech. Min. Sci., 34
(1), pp. 3-16, 1997.
Shao J.F. & Henry J.P. – Modélisation du comportement d’une craie blanche très poreuse et
validation. Revue Française de Géotechnique, 43, pp. 35-46, 1988.
Comportement mécanique des roches 85
39+2/ 9 E
E=/ 9+/ $ = 2 (9 + /) G = / K = 3 (1 - 2$) (3-30)
et inversement :
86 Manuel de Mécanique des Roches
E$ E
9 = (1 + $) (1 - 2 $) / = G = 2 (1 + $) (3-31)
# = A.! ( 3- 32)
avec : # vecteur des taux de déformation, ! vecteur des contraintes et A matrice
d’élasticité à 36 coefficients
La relation (3-32) constitue la loi de Hooke généralisée. On démontre par des
considérations énergétiques que cette matrice est symétrique. Le nombre de
coefficients indépendants est donc réduit à 21.
( 1 $ yx $ zx Ax, yz Ax, xz Ax, xy +
*E % %
* x Ex Ex G yz G xz G xy --
* 1 $ zy Ay, yz Ay, xz Ay, xy -
%
( #x + * Ey Ey G yz G xz G xy - ( ! x +
*# - * -* -
* y- * 1 Az, yz Az, xz Az, xy - * ! y -
* #x - * Ez G yz G xz G xy - * ! x -
* -"* -* - (3-33)
* ; yz - * 1 / yz, xz / yz, xy - * / yz -
* ; xz - * G yz G xz G xy - * / xz -
* - * -
/ xz, xy - **/ xy --
*) ; xy -, * 1 ) ,
* G xz G xy -
* -
* 1 -
* G xy -,
)
où
! Ex, Ey, Ez sont les modules de Young dans les directions x, y et z ;
! Gyx , Gxz, Gxy sont les modules de cisaillement pour les plans respectivement
parallèles aux plans yOx, xOz et xOy ;
! $yz, $zx, $zy, $xy, $xz, $yz sont les coefficients de Poisson.
! Les coefficients de Poisson $ij correspondent au rapport de la déformation dans
la direction j (effet) et de la déformation dans la direction i dues à la contrainte
agissant dans la direction i (cause). Les coefficients de Poisson $ij et $ji sont tels
que $ij/Ei = $ji/Ej
! /xz,yz : ........ : /xz,xy sont appelés coefficients de Chentsov et sont tels que /ij,kl
caractérise le cisaillement dans le plan parallèle à kl induit par la contrainte
tangentielle dans le plan parallèle à ij. Autrement dit,
/ik,jk /jk,ik
Gjk = Gik (3-34)
! Ayz,x ........ Axy,z sont appelés les coefficients d'influence mutuelle de premier
ordre ; A x,yz,........ Az,xy sont appelés les coefficients d'influence mutuelle de
Comportement mécanique des roches 87
Aij,k Ak,ij
Ek = Gij (3-35)
Rappelons que dans le cas général de l'anisotropie, il n’y a jamais concordance des
directions principales de contrainte et de déformation, contrairement au cas de
l'isotropie.
LE MILIEU ORTHOTROPE
Les milieux naturels présentent souvent une structure orientée planaire (présence de
plans et orientation préférentielle des grains dans ces plans par exemple). Repérons
la matrice rocheuse suivant le repère orthonormé de structure noté S de la figure
3-9, avec :
• S1 direction orthogonale aux plans ;
• S2 direction d'allongement des grains par exemple ;
• S3 de telle façon que le repère S = S1,S2,S3 soit direct.
Une approche très physique consiste à écrire la matrice d'élasticité [A] en
introduisant des coefficients (complaisances) entre cause (contrainte normale ou
tangentielle) et effet (allongement et variation angulaire), au lieu de déduire les
relations de la matrice de l’équation générale (3-33). Prenons le repère R identique
au repère S pour définir les tenseurs de contrainte et déformation et par conséquent
la matrice [A]. Dans ce repère particulier, les contraintes normales n'induisent que
des allongements (un cube se transforme en un parallélépipède rectangle), et les
cisaillements ne provoquent aucun allongement. Le tableau 3-1 synthétise alors la
relation entre cause et effet.
Cause
Contrainte normale Contrainte tangentielle
S1 S2 S3 S2,S3 S3,S1 S1,S2
!11 !22 !33 /23 /31 /12
S1 #11 1/E1 -$21/E2 -$31/E3 0 0 0
Allonge-
ment
La notation $ij postule que i est l'indice lié à la cause et j l'indice lié à l'effet. Du fait
de la symétrie de la matrice, on doit avoir :
$ij $ji
Ei = Ej (3-36)
* 0 0 0 0 1/G12 0
-
) 0 0 0 0 0 1/G12 ,
$12 $21 E2
E1 = E2 et G23 = 2(1 + $ ) (3-38)
23