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UNIVERSITÉ DE LOMÉ

FACULTÉ DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES


(FLESH)

DEA PLURIDISCIPLINAIRE
LABORATOIRE D’ÉTUDE ET DE RECHERCHE SUR
LES DYNAMIQUES SOCIALES ET POLITIQUES
(LERDYSOP)

Appropriation politique des réseaux


sociaux et ses effets sur la participation
politique : cas de la ville de Lomé
MÉMOIRE

Pour l’obtention du Diplôme d’Études Approfondies (DEA)


ès-Lettres et Sciences Humaines

SECTION : SOCIOLOGIE
SPÉCIALITÉ : Sociologie politique

Présenté et soutenu par : Directeur de Recherche :


BAITA Yawa Mawusi Prof. Roger Tamasse DANIOUÉ
Maitre de Conférences ès Sociologie
Politique

DECEMBRE 2012
.

2
DEDICACE

Ylona-Maiwenn

3
REMERCIEMENTS

Pour une année académique qui a été particulière pour moi, il a fallu sans doute
assez d’énergie et de renoncement de soi, mais aussi beaucoup de conseils et
d’encouragements pour arriver à cette étape de ma formation. Grande est donc ma
reconnaissance envers tous ceux qui ont porté avec moi, de quelque manière, ce
projet de recherche.

En premier lieu, je témoigne toute ma gratitude au Professeur Roger Tamasse


Danioué, Maître de Conférences en sociologie politique à l’Université de Lomé,
pour sa disponibilité, ses conseils, sa résolution personnelle à promouvoir les
jeunes intellectuels en général et mon humble personne en particulier ; je n’ai pas
de mots pour lui dire merci.

Ma reconnaissance va aux membres du jury qui ont bien voulu évaluer cette
recherche malgré leurs diverses occupations. Je n’oublie pas le corps enseignant du
Département de Sociologie en général et tous les enseignants qui ont eu à intervenir
en DEA pour l’année académique 2011-2012.

Mes remerciements vont à tous les membres de ma famille. Vous avez été d’un
soutien sans faille. Ma pensée va particulièrement à toi, Marko Milós Popoviç.

Je ne peux guère perdre de vue mes deux copines, Flora Yosso et Kafui Gameti :
merci de m’avoir toujours soutenue à y arriver.

A tous mes camarades de cette dernière promotion de DEA de l’Université de


Lomé, particulièrement à notre délégué Elom Tchoko, je dis infiniment merci pour
les moments que nous avons passés ensemble. Ce fut une belle année grâce à vous.

A tous ceux qui ont participé de près ou de loin à l’aboutissement de ce mémoire,


j’adresse ma gratitude. La liste serait longue en vous citant tous.

4
LISTE DES ACRONYMES

ANC : Alliance Nationale pour le Changement

ART&P : Agence de Réglementation des Télécommunications et Postes

CAR : Comité d’Action pour le Renouveau

CREDOC : Centre de Recherches pour l’Etude et l’Observation

des Conditions de vie –France

CST : Collectif - Sauvons le Togo

CDPA : Convention Démocratique des Peuples Africains

DEA : Diplôme d’Etudes Approfondies

OBUTS : Organisation pour Bâtir dans l’Union, un Togo Solidaire

NET : Nouvel Engagement Togolais

RGPH : Recensement général de la population et de l’Habitat

SMSI : Sommet Mondial sur la Société de l’Information

UFC : Union des Forces du Changement

UIT : Union Internationale des Télécommunications

UNESCO : United Nations’ Organization for Education, Science and Culture

UFC : Union des Forces du Changement

UNIR : Union pour la République

5
SOMMAIRE

Dédicace …………………………………………………………… 3
Remerciements …………………………………………………….. 4
Liste des acronymes ……………………………………………...... 5
Sommaire ………………………………………………………….. 6
Introduction ………………………………………………………. 7
Première Partie : Cadres théorique et conceptuel, 10
méthodologie et champ d’étude ………………………………….
Chapitre Premier : Cadres théorique et conceptuel .……………….. 11
Chapitre Deuxième : Méthodologie et champ d’étude ……………. 58
Deuxième Partie : Résultats provisoires de la recherche ……… 69
Chapitre Troisième : Présentation du plan provisoire de la thèse…. 70
Chapitre Quatrième : Présentation et commentaire des résultats 85
provisoires de la recherche …………………………………………
Conclusion ………………………………………………………… 94
Bibliographie ……………………………………………………..... 96
Annexe …………………………………………………………..... 101
Table des matières …………………………………………………. 103

6
INTRODUCTION

L’idéal démocratique repose sur la conception d’une citoyenneté active, c'est-à-


dire, non seulement la jouissance des droits civiques attachés à la nationalité (le
droit de vote, l’éligibilité, les libertés publiques), mais aussi le devoir de
s’impliquer dans la vie politique, d’y participer. Depuis que les territoires
africains ont évolué vers des « Etats modernes », l’exercice de la citoyenneté
politique, longtemps resté l’apanage de certaines catégories de personnes
(autorités traditionnelles, colons, citadins, instruits), a été reconnu à tous par les
différentes constitutions. Cette évolution, suite d’une série de luttes et crises
politiques, a été possible grâce à la libéralisation des arènes de délibération
politique (Habermas, 1962), notamment les partis politiques, les syndicats, les
mouvements et associations, la télévision, la radio, permettant la reconnaissance
des droits syndicaux, des libertés publiques et la réintégration des populations,
dans le jeu politique.

Cependant, en dépit du fait que la masse des citoyens soit autorisée à participer à
la vie publique, de très nombreuses personnes sont exclues de la vie politique,
ou du reste ont le sentiment de l’être. Sans bien sûr en être toute l’explication, il
semble que les formes traditionnelles de participation politique (partis
politiques, syndicats, les médias traditionnels) ne semblent plus en mesure de
remplir leurs fonctions classiques qui consistent à faire le lien entre les citoyens
et les institutions, à favoriser les mobilisations collectives et à construire des
identités politiques. Dans ce contexte politique, marqué par des grognes
sociales, des conflits ouverts ou latents, la montée du populisme et du

7
terrorisme, de nouveaux espaces d’expression citoyenne émergent et rivalisent
les anciens cadres de délibération : les réseaux sociaux 1du web 2.0.

En effet, à partir des années 2000, le web 2.02 s’est profilé comme ce nouvel
espace public susceptible de donner un sens à une "citoyenneté active", c’est-à-
dire de redonner la parole à tous sans distinction de statut social. On retrouve ici
deux principes démocratiques forts : la liberté d'expression et la libre circulation
des opinions qui découlent d'une liberté politique première, formalisée dans la
Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 (Art. 11) et reprise
par toutes les constitutions « démocratiques ». Ces médias sociaux (facebook,
twitter, youtube), offrent aux utilisateurs, de la correspondance, de l'information
en temps réel afin de se forger leurs propres idées du monde, mais et surtout
facilitent les interactions sociales, la création de contenus et de différentes
activités (Munoz, 2006).

Le Togo n’échappe pas à cette dynamique numérique. Selon le ministère des


Postes et Télécommunications, le nombre d’internautes togolais est estimé en
2012 à 7,8% de la population totale et près d’une centaine de sites et de blogs
(Art&P, 2010). Des chiffres relativement honorables quand on sait que pour
l’Afrique subsaharienne, le taux de pénétration d’Internet oscille entre 1 et 10%
(IUT, 2009). Quant aux utilisateurs des réseaux sociaux, il suffit de
tagger « Togo », ou « Lomé » pour comprendre l’attrait et la proportion.

En effet, Lomé concentre près de la moitié des internautes (pages consacrées,


institutions, personnes physiques, groupes, etc.). Cette prédominance s’explique
par le fait qu’à l’instar de toutes les capitales africaines, Lomé abrite la majorité

1
_ la différence entre les réseaux sociaux et les médias sociaux ne fait pas encore l’unanimité parmi les
chercheurs. Dans le cas de cette recherche tout en nous intéressant spécifiquement aux réseaux sociaux
facebook et twitter, les deux termes seront employés.
2
_Évolution du web axée sur des fonctionnalités visuelles et interactives qui ouvrent l’Internet à l’intervention
de communautés d’utilisateurs (Larousse, 2012)

8
des équipements et infrastructures de connexion et l’urbain est par excellence
l’internaute type (PNUD, 2005).

Au regard du développement actuel des réseaux sociaux, de leur appropriation


croissante par la population togolaise, la curiosité sociologique s’interroge sur la
contribution desdits espaces à l’information et à la formation politique des
citoyens, voire leur politisation.
La présente étude ambitionne de répondre à la question principale suivante : au
Togo en général et à Lomé en particulier, la fréquentation des espaces
sociaux numériques a-t-il un impact sur la production du politique ?

La politisation peut en effet susciter l’engagement politique et ce dernier peut


être un moyen d’affirmer sa qualité de citoyen (Bourdieu, 2000). Il s’agira de
mettre en lumière l’appropriation politique des réseaux sociaux par les Loméens
afin d’en examiner les effets possibles sur l’expression et la participation
citoyenne, mais aussi d’y analyser les constructions identitaires politiques.

De plus, Lomé, de par sa fonction politico-économique et historique, est le


champ de prédilection des convulsions sociopolitiques qu’a connu le pays
depuis 1990 ; le développement de ces espaces de dialogue et de concertation en
ligne favorise-t-il une meilleure participation démocratique et par là une
résorption des crises ?

L’intérêt de ce thème de recherche est multiple. Primo, le passage au numérique


a produit un effet de « dénaturalisation » ou de « déterritorialisation » sur un
ensemble de pratiques et sur un nombre considérable de concepts tels que ceux
de citoyenneté, de participation ou d’engagement (Wojcik, 2011). Malgré les
disparités numériques, les médias sociaux font partie du quotidien de milliers de
personnes. Il y a lieu alors de reformuler les théories de socialisation politique
en général et plus particulièrement celle de la socialisation en ligne, c'est-à-dire

9
décrire les mutations opérées et liées au fait des nouvelles fonctionnalités
autorisées par le web 2.0. Ces deux éléments nourrissent le cadre théorique de
la présente recherche : la socialisation politique et la communication de masse.

Secundo, la démarche s'inscrit dans un « renouveau » de la sociologie politique


qui cherche à situer les opinions et les comportements dans leur environnement
social et relationnel (Braconnier, 2010 ; Mayer, 2010). Le web 2.0 est bien
adapté à cette démarche, car son « actualité » permet de reconsidérer sans idées
préconçues les cadres et les dynamiques de la socialisation politique. On peut
notamment se demander s'il s'agit d'une politisation « par le haut » ou « par le
bas », et quels sont les contextes qui favorisent ou l’empêchent (Eliasoph, 2010 ;
Hamidi, 2006).

En sociologie, afin d’avoir des résultats rigoureux, le respect des principes


méthodologiques est indispensable, ce pourquoi la collecte des informations de
l’étude a connu deux phases : la phase théorique qui a consisté en une recherche
documentaire et la phase pratique qui a été menée sur le terrain à travers une
observation participante des médias sociaux numériques.

Le mémoire a été subdivisé en deux parties : la première présente les cadres


théorique et conceptuel de l’étude tandis que la deuxième s’articule autour de
l’analyse des résultats, de la discussion et des limites de la recherche.

10
PREMIERE PARTIE

CADRES THEORIQUE ET CONCEPTUEL


DE LA RECHERCHE, METHODOLOGIE
ET CHAMP D’ETUDE

11
CHAPITRE PREMIER
CADRES THEORIQUE ET CONCEPTUEL

I – Cadre théorique de la recherche

I.1 – Analyse de la situation et problématique

Objet de recherche pluridisciplinaire, les médias sociaux, font l’objet d’une


attention particulière des sciences sociales dans la mesure où ils deviennent de
plus en plus usuels dans le fonctionnement des sociétés contemporaines. Plus
encore, le politique (territoires, pouvoirs publics, acteurs, organisations,
bloggeurs et ou simples activistes, médias classiques et journalistes), l’utilise
aujourd’hui pour diffuser des messages politiques, mener les activités politiques
traditionnelles (recueillir des fonds et constituer des réseaux de soutien). Cet
attrait s’explique car les médias sociaux sont censés favoriser le vrai dialogue
politique et une meilleure connaissance des domaines d’intérêt et des besoins
des populations (électeurs potentiels ou futurs) (Rheingold, 1994).

Le Togo en général, et Lomé en particulier, est également pris par l’engouement


autour des médias sociaux et l’appropriation de ces espaces par les politiques se
vérifie. A titre d’exemple, Google3 dénombre en termes de liens à contenus
politico-togolaise : 135.000 pages facebook, 81.800 comptes twitter, 101.000
lien youtube ; 199.000 sites web (toutes catégories confondues). Le contenu de
ces comptes varie : informations des partis ou de mouvements idéologiques ;

3
_Enquête menée dans le cadre de cette recherché sur www.google.fr, le 10 février 2013.

12
données personnelles des politiciens ou journalistes ; journaux et médias en
ligne (tv, presse, radio…) ; débats multiformes.

Dans un contexte où les cadres traditionnels de participation semblent en crise,


la sociologie s’interroge sur les effets de l’appropriation politique des médias
sociaux sur la vie démocratique à Lomé.

Dans les années 1990, Howard Rheingold (op.cit) associait le web à l’espace
public « habermassien ». Cette vision politique sera reprise par de nombreux
auteurs et notamment Haegael qui voyait dans l’avènement du web 2.0, le retour
de l’isegora4 (Marchaut, 2012), d’une nouvelle agora (Haegel, cité par Wojcik,
2011).

En effet, selon les théoriciens de la délibération, le processus délibératif


transforme et façonne les individus. Ceci implique dans l’espèce de cas des
médias sociaux que grâce à la persuasion des internautes, permise par la force du
meilleur argument, les préférences individuelles évoluent, mais aussi que
l'identité même des participants change (Cohen, 1997). L'historienne française
Arlette Farge (1992), disait que l’émancipation par la discussion politique
permet au peuple de se forger une identité. Dans cette logique, la problématique
de la recherche semble avoir trouvé une réponse. Mais, l'agencement
institutionnel et procédural des débats sur les médias sociaux, influence-t-il
véritablement la volonté et l’opinion de l’internaute ?

Pour Mark Poster (1997, cité par Flichy, 2008), les débats en ligne ne
correspondent pas aux caractéristiques de l’espace public. Certes, ils sont
ouverts à tous mais dans la réalité, ils sont souvent le siège de guerres d’injures
où les internautes défendent violemment des opinions dont ils ne veulent plus

4
_ Isegora : « droit à la parole », (Marchaud, 2011).

13
démordre. Parlant de la blogosphère politique togolaise, Wolali Ahlijah5 (2010)
déclare :

« Quant aux pratiques, elles sont quasiment uniformes. Chaque


blogueur disposant d’un espace de publication en ligne pour relayer
des informations et des analyses de l’actualité ; lequel espace est le
plus souvent raccordé à un réseau social (Twitter et Facebook en
l’occurrence) en vue d’en assurer une plus grande visibilité. La
plupart du temps, les blogs mêmes sont dénués de commentaires. Pour
en mater, il faut se rapporter à la page Facebook de l’auteur où les
internautes se livrent à de véritables échanges et parfois à des
joutes. »

Cette situation peut soit constituer un frein à ceux qui voudraient bien discuter
avec des internautes dont ils ne partageraient (pas encore) les valeurs et soit
accroitre l’apathie civique chez ceux qui ont peur des joutes verbales, surtout les
femmes. Mais, ces réflexions ne résistent pas à la critique, du moins pour les
forums car ils sont en théorie toujours administrés. De plus, la censure est
intrinsèque au champ politique et l’exclusion objective qu’opèrent certains
internautes des discussions politiques ne peut être dévolue seulement aux
caractères des débats en ligne.
Partant du postulat que l’individu est un être rationnel, dans la grisaille des
informations, ne s’opère-t-il pas une socialisation politique de l’internaute ?

Plusieurs études démontrent que les médias sociaux normalisent davantage les
positions politiques existantes, vu que les individus filtrent les informations en
fonction de leurs intérêts préexistants. Une étude de Marsouin en France (2006)
portant sur 2.300 lecteurs de blogs politiques a montré que 94% d'entre eux ne
lisaient que des blogs du même bord et 15% seulement des liens trouvés sur les
sites des bloggeurs eux-mêmes renvoient à des blogs de l'autre camp. Jean-
Pierre Esquenazi (2005) admet cette convergence d’opinions entre le public et
les médias sociaux :

5
_ Wolali Ahlijah, bloggueur togolais

14
« Les gens ont accès à quantité d’informations qui proviennent de
différentes sources. Ils se forgent leur propre opinion et la confirment
ensuite par le média de leur choix ».

Pour Sunstein (2007 ; cité par Flichy, 2008), cette normalisation


balkanise davantage le discours politique, fragmente l’espace public et cristallise
les positions politiques existantes.

Mais la délibération a une force modulatrice et les instruments de


communication peuvent transformer ceux qui communiquent (Bourdieu, 2001).
De même la justification des choix politiques au sein de l’espace public, qu’elle
soit virtuelle ou physique se traduit en général par une modification des opinions
individuelles. C'est ce que John Elster qualifie de « forces civilisatrice de
l'hypocrisie » (Elster, 1994, cité par Taplin, 2003).

Le citoyen universellement n’étant pas intéressé par la politique, (Gaxie, 2000),


les messages en lignes arrivent-ils véritablement à atteindre les cibles ? Aussi
dans l’exubérance informationnelle de l’Internet, les néophytes ont des
difficultés à trouver et organiser une information pertinente. De ce fait, une «
fracture civique » nait entre les internautes : ceux qui sont déjà très intégrés dans
le système politique vont tirer parti pour accroitre davantage leurs ressources
alors que ceux qui n’avaient pas d’intérêt politique dans la vie active, malgré les
sollicitations cognitives des médias sociaux, n’en tireront aucun profit (Delli-
Carpini & Keeter, 2003, cité par Wojcik, op.cit.). Les médias sociaux
signeraient ainsi une nouvelle ère médiatique d’« effets minimaux », défavorable
à des publics segmentés, auxquels il ferait de plus en plus défaut un niveau
même basique de connaissances politiques.

Cette analyse semble disqualifier les médias sociaux. Certes, le champ politique
exerce en soi, une violence symbolique contre ceux qui n’ont pas les capacités
cognitives et sociales de parler politique, les mettant hors jeu ; c’est ce que
Bourdieu appelle l’absence de compétence politique ou du sentiment de

15
compétence politique (Bourdieu, 1979). Mais aussi, selon Bourdieu, l’intérêt ou
la perméabilité à la politique, bref, l’habitus politique, est à la fois inné (en
socialisation primaire par la famille) ou acquis (socialisation secondaire par
l’école, les groupes de pairs et les médias). Ainsi, la construction identitaire est
un processus linéaire et plurielle tout au long de la vie. L’individu, au-delà de
son héritage social (famille, capital social), construit et reconstruit son identité
en fonction du contexte et des possibilités. La non délibération dans l’espace
public ne peut plus s’expliquer par une absence de capital politique. Ce pourquoi
une analyse de la politisation ne doit pas se focaliser sur les seules socialisations
primaires, mais prendre aussi en compte les effets des contextes d’action de
l’acteur (Michon, 2010).

Plusieurs travaux, a contrario, vont à l’encontre de cette idée de fracture


civique, qu’elle soit ou non objectivée, chez des individus en recherche active
d’informations. Andrew Chadwick (2010) souligne ainsi que les caractéristiques
de l’information politique en ligne (sa quantité, sa richesse, sa pertinence, et son
accessibilité) créent un environnement médiatique bénéfique à l’acquisition de
connaissances et de compétences requises pour appréhender les enjeux
politiques, voire s’investir ultérieurement dans des discussions politiques en
ligne (Mossberger, Tolbert & McNeal, 2008).

Depuis les travaux de Lazarsfeld, les réflexions sociologiques sur les médias ont
compris la nécessité de prendre en compte tout autant la relation « du média vers
l’individu » mais aussi de « l’individu vers le média » (Dolez, 2010). Ainsi, en
raison de leurs préférences à l’égard de certains types de dispositifs numériques,
certaines catégories de la population traditionnellement considérées comme peu
intéressées par la politique (les jeunes) tirent davantage profit des informations
politiques recueillies à travers la fréquentation de certains réseaux sociaux
(Facebook, Twitter,Youtube…) et nombre d’entre eux utilisent de manière
privilégiée les médias sociaux lorsqu’ils recherchent de l’information politique

16
ou veulent en discuter (Coleman & Spiller, 2003). Loin d’un univers dé-
socialisateur, les médias sociaux, par l’intermédiaire des échanges, des liens, et
de la super-interactivité sont un canal de socialisation. De la sorte, ils participent
de manière indirecte au processus de politisation des internautes au-delà de leurs
habitus culturels et sociaux.

Mais Markus Prior (2007, cité par Norris) affirme que du fait qu’en sus des
questions politiques, les espaces en ligne favorisent d’autres supports ludiques
avec une offre thématique et des possibilités accrues de personnalisation des
contenus ; ils éloignent les internautes qui préfèrent le divertissement d’être
exposés à la politique. En somme, les médias sociaux dépolitiseraient davantage.

L’internaute est un acteur social ; dans quelle mesure la fréquentation d’espace


de sociabilité numérique l’incite-t-il à s'engager et/ou à réorganiser la politique ?
Deux postulats se présentent : soit l’internaute intentionnellement va sur les
médias sociaux pour des objectifs entre autres politiques, soit la fréquentation de
ces espaces (consultation de liens hypertextes politiques) l’amène à s’intéresser
à la politique.
Dans tous les cas, la fréquentation permettra de compenser le manque, de
diffuser ou de renforcer les opinions. De plus, l’utilisation des espaces sociaux
numériques est générateur des effets réseaux et des effets informationnels(Le
Guel & al, 2011).
En effet, Facebook ou Twitter sont créés et fondés sur ces effets réseaux : plus
un internaute a d’amis politiquement engagés, plus il sera amené à participer au
débats et à devenir plus politisé. En somme, l’intérêt politique augmenterait avec
le nombre global d’amis ou de followers aimant la politique. Pour peu que
l’internaute consulte occasionnellement ou non un site à contenu idéologique,
plus recevra t-il des pop-up6 de contenus similaires.

6
_ Fenêtre publicitaire qui s’ouvre automatiquement sur des sites Internet

17
Les effets informationnels extrapolent l’univers du web et sont souvent à
l’origine de comportements mimétiques. Internaute ou non ultilisateurs
d’Internet sont invités et amener, à s'abonner à une page pour s’informer ou pour
échanger des fichiers afin de pouvoir argumenter politique non plus seulement
en ligne mais aussi dans la vie courante. Les « gens apprennent des choses sur
les politiques […] dans le cours des activités ordinaires » ; et l’utilisation des
médias sociaux est devenue une pratique routinière pour certains internautes
(Popkins, cité par Flichy, op.cit.). Cette routinisation ne favoriserait elle pas une
construction identitaire politique?

La minorisation par le web 2.0 de certaines contraintes des dispositifs


participatifs en face-à-face (rapports de classe, d’âge, de sexe, d’instruction;
incompétence politique, éloignement géographique, agoraphobie), n’est-il pas
un atout pouvant permettre à ceux qui ont le sentiment ou décident d’être exit,
de prendre la parole ? Mieux, ces opportunités discursives, ne peuvent elles
susciter l’intérêt politique de catégories de la population considérées comme à la
fois désaffiliées de la politique?

La compétence politique étant aussi liée à la détention d’un niveau d’instruction


élevé, et le fait que la majorité des internautes jouissent d’un niveau
relativement moyen en général, ne favorise t-il pas une perméabilité plus grande
aux messages politiques ?

Au croisement de la sociologie des usages des médias et de la sociologie


politique, cette étude permettra d’explorer, au-delà des approches centrées sur
les effets, et les logiques sociales, de s’interroger sur les logiques d’action des
acteurs, mais aussi sur la contribution de la routinisation des informations
politiques sur les médias sociaux dans la politisation des Loméens.

18
I.2 – Objectifs de la recherche

I.2.1 – Objectif général

L’étude vise à déterminer les effets des espaces numériques sociaux sur la
participation politique des Loméens, voire leur politisation.

I.2.2 – Objectifs spécifiques

- Examiner les relations entre la fréquentation d’espaces de sociabilité


numérique et l’intérêt des individus pour la politique ;
- Analyser les recompositions par les médias sociaux des pratiques de
participation et d’information en matière politique au niveau des populations
de Lomé ;
- Evaluer les effets de la socialisation primaire par rapport à la socialisation
secondaire dans la participation politique en ligne.

I.3 – Hypothèses de la recherche


I.3.1 – Hypothèse principale

Les médias sociaux sont un nouvel espace d’interaction et de mobilisation


politique des Loméens.

I.3.2 – Hypothèses sous-jacentes

- La mobilisation politique des Loméens à travers les médias sociaux


favorise un intérêt conséquent et une amélioration du niveau de leurs
capacités cognitive et informationnelle ;
- L’embrigadement en ligne des militants et sympathisants, se substituent
aux formes de mobilisation traditionnelles;
- Les médias sociaux contribuent à une meilleure participation politique des
Loméens.

19
II - Cadre de référence théorique

Au-delà de l’actualité, l’intérêt sociologique de cette étude est de mieux


comprendre les formes et mécanismes de politisation, mais aussi de produire de
nouveaux savoirs dans le cadre des théories de la socialisation croisées à celles
de la participation. Ces deux éléments structurent le cadre théorique et
permettent d’explorer certains postulats sociologiques à savoir : l’agir
communicationnel et la politique délibérative de Jürgen Habermas, la
compétence politique chez Pierre Bourdieu, et plus encore la théorie de two
steps flow de Paul Lazarsfeld.

II.1 – La théorie de l’agir communicationnel

En 1987, Jürgen Habermas, fait volteface à l’école de Francfort, avec la Théorie


de l'agir communicationnel. Il démontre qu’en débattant de manière
argumentée, la raison communicationnelle permet de parvenir à la
compréhension mutuelle, à une finalité émancipatoire qu’il nomme « l’agir
communicationnel ». La théorie habermassien est simple : par la discussion et le
débat public, tout individu, dans la mesure où il prend en compte les intérêts des
autres, est capable de comprendre et de se faire comprendre et peut donner à ses
affirmations une prétention à la validité universelle. L’agir communicationnel
permettrait le savoir culturel, l’intégration sociale ou/et la formation de l’identité
personnelle. En somme, la communication servirait de cadre de socialisation et
donc probablement de formation de l’identité politique. L’auteur écrit :

« Par la force illocutoire d’une expression, un locuteur peut motiver


un auditeur à accepter l’offre de son acte de parole, et par là, à
engager un lien rationnellement motivé. Ce concept présuppose que
des sujets (…) puissent mettre au fondement de leur communication
un système de mondes supposé commun. » (Théorie de l’agir
communicationnel, chapIII, p 102, Habermas, 1970).

Habermas différencie par la communication, deux types de rationalité : l’agir


communicationnel et l’agir instrumental ou stratégique. L’agir instrumental est

20
basé sur la finalité (l’imposition des opinions subjectives), la manipulation des
personnes concernées ou leur utilisation comme objet afin d’obtenir leurs
propres fins. L’agir communicationnel se caractérise par la compréhension
mutuelle, et permet le consensus sur la réalisation des objectifs ; les actions ne
sont pas toujours orientées vers des résultats, mais surtout sur une
compréhension mutuelle, la confiance et à la connaissance partagée.

Dans la norme, la discussion dans l’espace public ouvre la perspective d’une


« situation idéale de parole » informée, sans contrainte, mais Habermas reste
conscient de la réalité sociale, qui est largement dominée par la communication
déformée ou une non-communication (Wolton, 1997). C’est pourquoi partant de
l’agir communicationnel, il en vient à énoncer une éthique de la
discussion stipulant : le besoin de reconnaissance personnelle et réciproque, la
liberté et l’autonomie des acteurs. Afin que les individus puissent agir parler,
toute forme de coercition et d’inégalité doit être proscrite et les personnes
doivent pouvoir manifester leurs attitudes, désirs et besoins. La
« communication », devient ainsi à même de produire un accord démocratique.

Dans nos sociétés contemporaines où des formes et cadres de plus en plus


démocratiques de socialisation et de communications s’imposent, la théorie de
l’agir communicationnel prend une pertinence sociologique important.

II.2 – La politique délibérative

Pour Habermas, le débat public est le fondement de la démocratie délibérative.


L’échange discursif entre les citoyens, par le partage d’idées et d’arguments,
permet de faire entrer en jeu le pluralisme inhérent aux sociétés contemporaines.
Mais pour un usage critique et public de la raison, Habermas exige le principe
de publicité. Ce pourquoi, il accordera plusieurs travaux à l’espace public qui
selon lui permet la véritable délibération et la démocratie : c'est-à-dire

21
l’expression et la prise en compte de toutes les opinions. Le principe de publicité
(rendre public) devient alors une source de légitimation et donne à l'espace
public un véritable pouvoir critique, un "pouvoir d'assiégement permanent"
selon Habermas. Le débat public, ou la délibération constante et publique des
individus, qui constitue la démocratie délibérative devient ainsi un principe de
légitimité de l’Etat et de politisation relayé par l'espace public.

C’est dans Droit et Démocratie (1975) qu’Habermas expose véritablement la


notion de politique délibérative. La procédure idéale de délibération
démocratique n’est possible que s’il y a prise en considération de la diversité des
formes de communication qui conduisent à l’entente commune. La politique
délibérative s’appuie donc sur les conditions de la communication, conditions
qui visent à tisser des liens sociaux, à favoriser l’identité collective et les
discussions sur la justice sociale. L’auteur se rend compte, en effet, que dans
l’esprit d’une démocratie directe, tout le monde ne peut pas participer à toutes
les discussions. C’est pourquoi et pour palier à ces insuffisances, la théorie
délibérative doit se dérouler de deux façons : sous la forme institutionnalisée de
délibérations menées dans les corps parlementaires et dans le réseau des
communications des espaces publics politiques. Ces espaces publics politiques
sont des « arènes » où une formation plus ou moins rationnelle de l’opinion et de
la volonté peut s’opérer à propos de thèmes pour la société entière. Habermas
énonce sa pensée comme suit :

« La formation informelle de l’opinion débouche sur des choix


institutionnalisés et sur des décisions législatives, par lesquels le
pouvoir généré par voie de communication est transformé en pouvoir
applicable par l’administration. » (Habermas, 1972).

C’est dire que pour Habermas, les lieux de discussion à travers les canaux de
communication permettent non seulement aux individus de résoudre différents
problèmes, de partager des valeurs communes et mais sont aussi un outil
d’empowerment de l’individu qui peut ainsi utiliser sa raison critique pour

22
censurer l’Etat. Et cet Etat se retrouve ainsi confronté à prendre en compte ces
opinions du citoyen lambda et a charge de les faire respecter. Ces structures
peuvent donc développer par voie de différenciation, en même temps qu’un
espace public politique, une arène spécifique ayant pour tâche de percevoir,
d’identifier, d’évaluer et de traiter les problèmes concernant la société dans son
ensemble
Deux principes forts sont mis en lumière par la politique délibérative : l’espace
public autonome est un lieu de formation de l’opinion et de la volonté qui
favorise la politisation et la participation politique. Ce sont ces principes qui ont
retenu l’attention de cette étude à éclairer davantage la théorie habermassien.

En partant de la théorie de l’agir communicationnel, Habermas parvient à


remonter jusqu’à une politique délibérative en passant par une éthique de la
discussion. Les trois domaines sont liés et se comprennent ensemble. Le fil
conducteur qui va de l’agir communicationnel à la politique délibérative est sans
doute le lien, entre communication, rationalité et action. Seule la communication
(et non l’information) reposant sur des bases rationnelles peut conduire à une
altération de l’identité politique et donc à une action librement consentie. La
discussion apparaît ainsi comme le paradigme de la concertation menant à
l’action.

II.3 – La notion de compétence politique et la délibération par Bourdieu

A travers la question de la compétence politique, Pierre Bourdieu remet en


discussion la relation liberté individuelle et déterminisme sociologique.
S’insurgeant contre le rationalisme moderne, l'universalisme abstrait hérité des
Lumières (Rousseau, Montesquieu, Descartes, Habermas), il formule une
Realpolitik de l'universel et démontre que l’accès à la parole politique, la faculté
de bien juger, de bien distinguer et d'accéder à une action rationnelle loin d'être

23
universellement partagée, dépend directement des dispositions sociales héritées
c'est à dire de l'habitus de chacun (Talpin, 2003).

Pour parler politique, il faut se sentir capable et autorisé à le faire. Dans ce sens,
l’expression politique loin d’être universelle, est réservée à une élite. Elle
dépend aussi directement du capital culturel de chaque individu, hérité de sa
famille ou transmis par l'école. Pour, avoir des chances d'accéder au discours
politique, il faut être issu d’un milieu social « politique » ou en avoir acquis la
compétence à l’école, or, comme on le sait, la compétence scolaire est
directement liée, chez Bourdieu, au milieu social d'origine. La politique pour
Bourdieu n’est pas une affaire de la masse. Bourdieu (1997 : 86-87) écrit à ce
propos :

« Il y a donc des conditions historiques de l'émergence de la raison.


Et toute la représentation, à prétention scientifique ou non, qui repose
sur l'oubli ou l'occultation délibérée de ces conditions tend à légitimer
le plus injustifiable des monopoles- ces privilégiés du point de vue du
sexe, de l'ethnie ou de la position sociale qui, détenant un monopole
de fait des conditions d'appropriation de l'universel, s'octroient par
surcroît la légitimation de leur monopole.»

L'inclusion formelle se traduirait par une exclusion réelle et par conséquent le


processus de socialisation secondaire par la communication n’aboutirait point.
Bourdieu ne renie pas la formation discursive et collective de la volonté des
individus via l’échange discursif. L’auteur souligne que les instruments de
communication nécessaires pour établir l'accord ou le désaccord sont capables
de transformer les contenus communiqués et ceux qui communiquent (Bourdieu,
2002 : 7-11).

La dimension normative de sa théorie est certes la délibération, mais dans


l'égalisation des conditions économiques et sociales. Sa théorie délibérative
s'articule donc en deux temps. Tout d'abord l'égalisation des conditions
économiques et sociales. Ensuite, celle-ci permettant d'égaliser la compétence
politique, on pourra transformer le mode de formation de la volonté collective

24
dans un espace discursif. La véritable révolution devra donc être d'abord
économico-sociale, et ensuite politique.

C’est dans la logique de ces différentes théories (Bourdieu, Habermas),


appuyées par la théorie du two-step flow de Lazarsfeld (1955 (2008) que
s’articule la présente recherche.

III – Cadre conceptuel de la recherche

III.1 – L’état de la question

Tout travail scientifique s’inscrit dans un continuum (Quivy, 1995) et tout


progrès est le fruit de la confrontation de différentes recherches. C’est pourquoi,
il est impérieux en sociologie, pour une recherche nouvelle d’établir un état des
lieux des travaux antérieurs déjà menés sur le phénomène à l’étude. Cette étude
n’a pas dérogé à cette démarche et un inventaire de la bibliographie existante sur
le thème a été effectué.

Depuis 2008 où la campagne de Barack Obama7 s’est basée sur une mobilisation
d’électeurs et de fonds à travers les médias sociaux, un regain d’intérêt a rejailli
parmi la communauté scientifique internationale sur les dynamiques politiques
que peuvent susciter les médias sociaux. De nombreux articles et ouvrages ont
été rédigés et consacrés à ce sujet. Il sera donc passé en revue quelques-unes de
ces productions scientifiques antérieures afin de mieux situer la problématique
du présent travail. Nous, nous baserons sur l’article de Stéphanie Wojcik
(2011) : « Prendre au sérieux la démocratie électronique. De quelques enjeux et
controverses sur la participation politique en ligne » qui a offert un bilan
presque exhaustif des recherches sur la participation politique en ligne. Les
réseaux sociaux n’étant qu’une des fonctionnalités du web 2.0, plusieurs auteurs

7
- Barack Hussein Obama, président des Etats Unis d’Amérique (2009 à nos jours).

25
ne l’ont pas dissocié dans leur analyse. La revue de littérature sera présentée
selon des structurations thématiques.

III.1.1 – Médias sociaux et espace public

Habermas (1962) montre comment au 18è siècle, les réunions de salon et les
cafés ont contribué à la multiplication des discussions et des débats politiques,
lesquels jouissent d'une publicité par l'intermédiaire des médias de l'époque. La
dimension publiciste est intrinsèque et fondamentale de l’espace public.

Aujourd'hui l'espace public est au centre de nombreuses problématiques et les


sciences de l’information et de la communication sont indéniablement le
deuxième champ où le concept se déploie (Paquot, 2009) ; elles s’interrogent sur
le lien : médias de masse et « espace public » en revisitant l’angle unitaire et
bourgeois de Habermas (1993, 1962) à savoir lieu de formation de la volonté
politique des citoyens libre et égaux par la l’argumentaire et l’usage de la raison.
Plus encore, les médias sociaux constituent ils un espace public : lieu, virtuel,
d’information et de discussion où la société et les citoyens peuvent se définir à
travers un processus d’argumentation rationnelle, (Habermas, idem) ?

Neveu & Bastien (1999) démontrent que dans les sociétés contemporaines, le
développement des médias favorise une fragmentation de l’espace public
politique en « espaces publics ». Cette vision plurielle de l’espace public,
découle du constat de démocratisation du discours politique générée par les
nouveaux médias. Grace à ces derniers, une interaction face à face et multiple
est davantage possible et des individus de différentes catégories peuvent accéder
à l’espace public. Mais aussi remarquent-ils, avec les fonctionnalités des réseaux
sociaux gagnés par l’émotion et les individualités, les discussions tendent
rarement vers un consensus et la ligne entre propagande et information est
diffuse.

26
Pour Magali Nonjon (2005) dans un article intitulé « de l’agora à l’archipel »,
grâce aux nouveaux espaces publics générées par les médias sociaux, le citoyen
lambda à partir de son cercle privé (self- média) peut favoriser l’émergence
d’un espace discussif ouvert à tous et tourné vers le général même si ces espaces
sont fortement dépendants des contextes politiques et donc éphémères.

Il n’est plus possible de parler d’espace public sans considérer qu’il est
désormais technologiquement constitué par des appareils médiatiques, parmi
lesquels l’Internet (Chardel (2012).

« Après les médias de masse, apparaît l’avènement d’un self-


média8qui fait l’objet d’appropriations personnelles et qui rend
possible une démultiplication des modes d’information, créant ainsi
les conditions d’une inscription plus hétérogène dans la sphère
publique (…)Les formes d’engagement que l’on voit apparaître avec
les technologies numériques s’affranchissent plus aisément des ordres
établis, qu’ils soient politiques, culturels ou religieux. » (Chardel,
idem)

Le principe de liberté et de déterritorialisation des discussions ici recoupent les


principes forts de l’espace public « habermassien » et sa théorie de l’agir
communicationnel.
Analysant les révolutions tunisiennes et le rôle qu’y ont joué les facebookers et
les bloggeurs, le sociologue Jean-Marc Salmon va plus loin et émet l’hypothèse
d’un « bouclage numérique » grâce aux médias sociaux. En permettant aux
citoyens de devenir émetteurs, récepteurs et relais d’information dématérialisant
l’espace public qui s’affranchit dès lors de l’Etat, les médias sociaux favorisent
incontestablement l’émergence d’un espace public.
Toutefois, Chardel (op.cit.) nuance son analyse et met en garde contre une
vision techno-déterministe qui occulterait les contextes sociaux et historiques,
car les médias sociaux sont ambivalents : autant ils permettent une liberté de
parole mais aussi ils peuvent permettre à réduire les libertés politiques.

8
- Cf. Gilles Lipovetsky et Jean Serroy, 2007, L’écran global. Culture-médias et cinéma à l’âge hypermoderne,
Paris, Seuil.

27
Dominique Cardon (2008) explique en détail les mécanismes de l'exposition de
soi, les motivations et la forme qui en découle :

« La communication privée en public est l'un des formes d'échange les


plus originales qui soient apparues avec les réseaux sociaux de
l'Internet (...) Cet étrange jeu théâtral, dans lequel les utilisateurs
miment l'aparté tout en parlant au su et au vu des spectateurs
potentiels, permet de parader devant eux (...) [ouvrant] une
microscène » (Cardon, 2008 : 63).

Ces “petites” conversations finissent par croiser les “grandes” conversations et


donner une forme nouvelle d'action collective, opportuniste, sans centre, volatile
mais puissante.

Bertrand Calenge (2003) dans un billet intitulé « Réseaux sociaux et


espace public » reconnait la fonction indéniablement socialisatrice des médias
sociaux même s’il en fait la reproche de leur effet faible de sociabilité. Le
mécanisme de réticulation des médias sociaux favorise l’échange des
informations et en tant que veille peut faciliter les convictions.

Si tout semble concourir à faire assimiler les réseaux sociaux à des espaces
publics d’échanges et de débats sociaux et sociétaux, autant que culturels et
politiques, sont ils véritablement un espace politique ?

Les réseaux sociaux permettent de toucher un nombre important de citoyens, de


publiques des sujets, interrogations privés, d’en discuter mais ce n’est pas pour
autant que les médias sociaux peuvent être considérés comme espace public et
/ou un espace politique. Nombreux sont les pionniers du réseau qui considèrent
le bouton “I like” de Facebook comme le degré zéro de l'argumentation. Le
sociologue Dominique Chardon (cité par Calenge, op.cit.) écrit :

« Les élites culturelles universalisent leur propre désir de société et


croient que parce qu’ils ont des pratiques ouvertes, elles sont
immédiatement accessibles à tous! C’est ce que Bourdieu appelait
l’ethnocentrisme de classe, cette maladie typiquement “intellectuelle”
de généraliser aux autres sa propre vision du monde. Cela a nourri

28
beaucoup de discours très “naïfs” sur … la constitution d’un espace
public mondial ».

Ce n’est pas le débat ouvert seul qui détermine un espace public, il faut que les
échanges permettent de passer du débat à la bonne organisation de la vie de la
cité en garantissant sa continuité sous le contrôle des institutions choisis par
tous, et en respect de principes fondamentales (constitution, traités). Tout en
faisant émerger des groupes de pressions qui peuvent agir politiquement, les
arènes de discussions en ligne ne peuvent être « encore » assimilés à des espaces
public citoyen car se pose le problème de la régulation et du contrôle des
réseaux. L’autorégulation de l’espace est illusoire : par exemple c’est facebook
qui met en relation les internautes selon une logique non connue.

Les débats en ligne ne sont que faussement inclusif : dès qu’un internaute a un
avis différent, une horde de partisans s’acharnent à l’invectiver. Alors que le
débat démocratique est très âpre et nécessite des conflictualités certes non
violentes mais des conflictualités afin d’arriver à un consensus , la connivence
prédomine en ligne. De plus, les débats en ligne ont rarement une assise
historique.

« Cette faculté de la prise de parole et de l’écoute était et doit être


garantie pour chaque citoyen par des institutions collectives ancrées
dans une histoire collective, bref des agoras institutionnelles, inscrites
dans la chair de la cité. Or ce qui me frappe, c’est l’impermanence
des réseaux sociaux : ce sont des murs constamment repeints, des fils
éphémères non organisés pour proposer des échanges argumentés et
capitalisés » (Calenge, Comment les réseaux sociaux transforment
l’espace public, 2012 :2 s.ed)

La fracture numérique exclut une bonne partie des citoyens des espaces
numériques, peu reconnaissent une légitimité collective à ces échanges. Faisant
référence à l’espace public athéniens (Arendt, 1994) et bourgeois (Habermas,
op.cit.), il souligne que même ceux qui n’y prenaient jamais la parole avaient la
certitude que c’était le lieu où se débattaient les questions communes et avaient
le sentiment que leurs voix étaient portés. Mais les espaces médiatiques sociaux

29
sont justement des espaces non représentatives de l’ensemble de la société
surtout de ceux qui se retrouvent « des fracturés numériques » (Guichard, 2003).
Calenge (op.cit.) finit son analyse en reconnaissant les vertus des réseaux
sociaux, leurs potentialités, mais ne leur permet pas aujourd’hui de « se
prétendre (encore ?), espaces publics de construction et de délibération
citoyenne ou de lieux centraux du débat citoyen ».

Les médias sociaux jouent le rôle de l'infrastructure qui matérialise l’espace


public et pourraient servir de supplément aux contacts interpersonnels en face-à-
face ou selon une autre modalité, instituer un réseau matériel possible pour les
flux d'information, via des inforoutes construites sur une série de recours
immatériels préalables: confiance, réciprocité, et engagement dans les questions
publiques car la sphère publique est comprise comme « ensemble d'espaces
physiques et immatériels où les agents sociaux peuvent rendre effective leur
participation dans le processus de communication publique » (Matos, 2009).

Des réserves sont toutefois émises après études empiriques (Suraud, 2008) sur
l’élargissement de l’espace du débat public par les forums en ligne, même s’ils
permettent une meilleure participation au débat et la mobilisation.

En général, les médias de masse servent de lieu principal, comme forum, pour la
représentation de l’espace public. Renée van Os & Nicholas W. Jankowski
(2010), analysant les médias sociaux et « l’espace public européen », conclurent
que, puisqu’il n’y a aucun média paneuropéen où des discours sur la vie
politique européenne pourraient se tenir, il y a un déficit d’espace public. Sans
cet espace pour un débat européen auprès d’un large public, l’Union Européenne
(UE) manque d’une véritable communauté politique de citoyens, qui se traduit
par l’érosion de la confiance et même la crise de la légitimité de l’UE. Ils voient
des opportunités nouvelles avec Internet, qui offre des caractéristiques
prometteuses pour répondre la redéfinition de l’espace public par Habermas

30
(1996) à savoir un « espace politique qui permet aux citoyens de prendre des
positions en même temps, sur les mêmes sujets, avec la même pertinence ».

Le web 2.0 constitue à cet effet, un espace public car il permet au-delà de
l’information et de la formation à la disposition de tous et surtout des partis
politiques, une « intégration des personnes entres elles et des sociétés humaines.

III.1.2 – Médias sociaux et citoyenneté

Aujourd’hui se retrouvant au cœur d’une nébuleuse d’informations généré par


l’ère numérique, le citoyen a à sa disposition des interfaces, qui lui permettent
de se libérer d’un nombre de contraintes et d’être permanemment sollicité non
plus seulement mors d’échéances électorales. Ces mêmes contraintes qui
opéraient autrefois comme des sélecteurs naturels et procédaient à une
catégorisation sociale selon des facteurs de capacité de communication, de
mobilité, d’accès à l’information, de possibilités d’instruction ou de formation
semblent de venir caduques devant la liberté et l’anonymat que confèrent les
médias sociaux (Rodotà, 1999). Dès à présent, qu’un individu, pour autant qu’il
dispose d’un peu de bon sens et d’une forte motivation, peut accomplir un
nombre d’actions citoyennes (signer une pétition, protester, revendiquer écrire
aux autorités, discuter avec eux, donner son point de vue. Il peut rester informé
de l’ensemble de l’actualité mondiale, disposer d’une foule d’outils de sélection,
de lecture, d’analyse et d’aide à la décision pour presque toutes les activités
politiques. Ses limites ne sont pas celles de ses parents et encore moins celles de
ses grands-parents (Al Gore, 2000).

En opposition à l’idée selon laquelle la citoyenneté est foncièrement liée à


l’appartenance ou à la reconnaissance d’un Etat-Nation, la culture numérique
promeut une citoyenneté élargie qui se libère de l’Etat géographique, qui ne se
limiterait pas seulement à une participation du citoyen aux questions relevant de
son milieu d’origine, mais à l’univers tout entier. Ainsi naquit les expressions

31
de "Citoyen du monde" (largement utilisé par les altermondialistes) ou
« citoyen numérique » qui refusant les frontières entre les nations, proclame
l’ouverture et l’attachement de tous à l'ensemble de l'humanité : l’avènement
d’une agora à l’accès libre et gratuit.

Les médias sociaux s'ajoutent à la configuration existante de la communication


et des médias, pour faciliter les rapports sociaux courants et les contacts suivis
d'engagement civique et de socialisation et pour renforcer et même élargir les
contacts sociaux et l'engagement civique déjà existants (Quan-Haase &
Wellman, 2002).

La citoyenneté active et participative requiert des ressources cognitives,


culturelles et sociales qui, pour partie, peuvent être fournies aujourd’hui par les
médias sociaux. La culture numérique partagée par l’Etat et le citoyen permet à
cet effet, une individualisation de leur relation où l’Etat peut prendre en compte
les particularismes et les besoins du citoyen et où ce dernier peut mieux intégrer
et participer aux mécanismes citoyenne. Autrement dit, c’est la relation entre
l’Etat et le citoyen qui se transformerait et la participation citoyenne qui
prendrait une nouvelle dimension, au-delà des formes classiques d’engagement
du citoyen. Cette nouvelle dimension, c’est celle de la prise de parole dans un
contexte sociotechnique et médiatique plus large, mieux globalisé.

Wellman et Hogan (2006) argumentent qu'Internet contribuerait à toutes les


formes de contact: interpersonnel, intra- et inter-organisationnel. Loin d'éloigner
les personnes, Internet favoriserait leur proximité. Ainsi, des communications
médiatisées augmenteraient le réseau de rapports (Matos, 2009). Pour eux,
l'individualisme sur Internet aurait des effets profonds sur la cohésion sociale.
Plutôt que de faire partie d'une hiérarchie de groupes chaque fois plus intégrés,
l'individu maintenant fait partie de communautés multiples et partielles. Malgré
les réseaux sociaux moins denses, les liens sociaux paraissent avoir augmenté.

32
Ceci aurait pour conséquence des contacts interpersonnels plus nombreux et plus
fréquents qu'auparavant. Liée à ce changement en direction de l'individualisme
du réseau, c'est la nature même de la citoyenneté qui change.

La corrosion du caractère citoyen (donc du déclin du capital social) remarqué


dans les sociétés contemporaines auraient pour responsable la télévision et
Internet (Putnam, cité par Uslaner, 2000).

Du fait que la culture numérique soit essentiellement une culture participative, il


ressort du point de vue du courant culturaliste des media studies, qu’elle instaure
une hyper-sociabilité entre les individus connectés. C’est donc cette hyper
sociabilité qui entraine comme conséquence logique, l’émergence d’une
citoyenneté numérique et donc l’avènement de formes numériques de
participation politique.

III.1.3 – Médias sociaux, participation politique

Selon les cultural et media studies, on ne peut parler aujourd’hui de participation


politique, sans prendre en compte l’explosion des mouvements de contestation
transnationaux, qui utilisant les réseaux numérique, se structurent de façon
inédite et prennent la configuration d’une nouvelle forme internationalisée de
militantisme. C’est dire qu’il y a un tournant numérique aujourd’hui dans la
participation politique grâce aux médias sociaux. Alors que les instances
traditionnelles de participation citoyenne (les agoras, les médias traditionnels)
privilégient la logique d’émetteur et de récepteur, où le citoyen est confiné dans
un rôle plus passif, les réseaux sociaux numériques instaure une logique
interactive au sein de laquelle les récepteurs sont également producteurs de
contenus. L’activation de réseaux sociaux dans lesquelles se réalisent des
conversations quotidiennes et le perfectionnement d’habilités expressives et
communicatives, contribuent à la constitution du capital social, base d’un
engagement civique et politique (Matos, op cité).

33
Dans un ouvrage collectif publié sous sa direction, Norris P. (1999) note que,
quoique les taux de participation électorale diminuent dans la plupart des pays,
l’activisme politique n’a pas pour autant baissé d’intensité. Car, avec la
technologie numérique, « les canaux de la participation politique sont davantage
en train d’évoluer que de décliner […] et les gens deviennent plus actifs d’autres
façons » (Norris, idem). Par exemple, les représentants syndicaux consultent en
direct, sur Internet, leur base afin de déterminer les modalités d’action les plus
adaptées à l’état d’esprit général et au rapport de force. Le printemps arabe, ou
en France, par exemple, le mouvement social du printemps 2003 et celui des
chercheurs en 2004 ont montré la grande capacité de mobilisation que les
réseaux numériques en l’occurrence Internet peut conférer à l’action militante.
De même, cela est très connu, diverses campagnes internationales d’opinion ou
de pression se développent aujourd’hui à travers les réseaux numériques. La
culture numérique par les médias sociaux fournit :

« Un ensemble de dispositifs pour partager les créations de chacun, et


des formes d’accompagnements informels grâce auxquels les novices
peuvent apprendre des plus expérimentés […]. Une culture dans la
quelle chacun croit que sa contribution importe et entretient plus ou
moins des liens sociaux avec les autres. La culture participative
valorise davantage l’engagement communautaire que l’expression
individuelle » (Jenkins, 2006 : 55).

Dominique Cardon (2008) voit dans les discussions en ligne, la manifestation


d'une liberté des acteurs du réseau et un encouragement pour l'acceptation de la
masse et donc d’une plus grande participation. Loin de croire que 100% des
internautes contribuent à égalité aux contenus et à la vitalité du réseau, il
rappelle la règle des 1/10/100 : une fraction de contributeurs est très active, une
petite minorité participe régulièrement et la masse n'apporte pas de contribution
décisive. Il souligne que les « participations minimes, comme la correction des
fautes d'orthographe sur Wikipédia, la notation de la qualité des articles, voire la
présence silencieuse d'utilisateurs inactifs, sont indispensables à la motivation
des plus actifs » (Cardon, op.cit.). C'est pourquoi il ne faut pas négliger ou

34
mépriser les coopérations faibles. Il propose de considérer que le bouton
“j’aime” est une des adaptations à la massification des usages, et qu'il
contribuera, à sa mesure, au sein d'un dispositif contributif aux multiples formes,
à l'organisation du grand “bazar” qu'est le web.

Les médias sociaux peuvent minorer les contraintes des dispositifs participatifs
en face-à-face, comme l’éloignement géographique, le manque de temps, et
pourraient permettre à ceux qui n’osent s’exprimer en public, en face-à-face, de
prendre la parole (Gastil, 2000 ; Witschge, 2004), et ce d’autant plus lorsque,
dans le cas par exemple des réunions publiques, les assemblées sont « mixtes »
c’est-à-dire composées de personnes à statut hiérarchique différent ou dont les
positions d’autorité sont clairement établies (Monnoyer-Smith, 2007). Mais
faudrait il que l’accès et l’usage des médias sociaux ne soient pas enrayés par la
fracture numérique. Arnaud Mercier, universitaire spécialisé des médias
analysant l’inscription de Christine Lagarde sur Twitter à l'occasion de sa
campagne pour la direction du FMI trouve l’utilisation à des fins politiques des
médias sociaux, une anecdote utopique qui n'aura aucun impact sur ladite
campagne. Mercier écrit à cet effet :

« Les citoyens ne sont pas dupes. Ce sont souvent les attachés


parlementaires, les assistants de cabinet ou les communicants qui
alimentent les comptes. Il y a donc une trahison du pacte entre homme
politique et internautes : le premier tente de faire croire aux seconds
qu'il se met à leur hauteur, mais ça ne marche pas » (Mercier 2012, in
Huggfingtonpost2012 :3) .

Les balbutiements du vote en ligne démontrent que même si le citoyen


numérique est plus sollicité et participe plus aux discussions qu’il y a de cela un
siècle, il reste foncièrement attaché aux modes traditionnelles de gouvernance et
de participation démocratique (Wojcik, 2001). La participation en tant que pairs
à l’interaction politique attendue et exigée suppose des ressources économiques
minima et certaines pré-conditions sociales ainsi qu’une reconnaissance de statut
par les autres participants (Lafaye, 2009) que de toute évidence, les médias

35
sociaux ne peuvent à eux seuls relever, le défi d’une parité de participation car
les institutions publiques et privées, les valeurs et les modes de vie dominants
constituent, à bien des égards, des obstacles à cette parité. C’est pourquoi Lafaye
(op.cit.) met l’accent sur une éducation à la citoyenneté par l’école en vue de
mettre tous les citoyens à égalité devant la politique. La capacité d'une personne
à exercer sa citoyenneté dépend de la « démocraticité » du système politique et
social dans lequel elle se trouve.

Il faut toutefois remarquer cet activisme numérique du citoyen ne se développe


pas dans un seul sens, il rencontre, surtout dans les pays développés, une
volonté de démocratie numérique de la part des gouvernants. En effet, l’apathie
politique (faiblesse des taux de participation électorale) qui tend à se généraliser
trouve aujourd’hui sa solution dans l’implantation du gouvernement en ligne
dans le sens d’un exercice plus démocratique, libéral et participatif du pouvoir
politique, en vue d’améliorer la relative citoyenneté à l’Etat (Vedel, 2008).
Ainsi, plusieurs autorités ou entités politiques font de l’e-gouvernance, un fer de
lance de leur démocratie.

III.1.4 – Médias sociaux et démocratie

L’avènement de l’Internet comme celui de tout média, dans une logique


lasswellien, a fait l’objet d’espérances ou de craintes quant à son aptitude à
revitaliser la démocratie, et confinant les études dans une approche
dichotomique. D’un côté, les cyber-optimistes valorisant l'apport d'Internet, en
matière de démocratie électronique (Rodotà, 1999 ; Lévy, 2000) son érection en
tant que nouvel espace public, caractérisé par l'ouverture, la liberté d'expression,
et qui stimulerait la discussion entre les citoyens et le débat avec les hommes
politiques (Vedel, 2003). De l’autre, les cybers pessimistes regroupant des
discours plus critiques à l'égard de l’Internet et mettant l’accent sur les inégalités

36
d'accès et d'usage, et à l'absence d'une réelle interaction entre gouvernants et
gouvernés (Loiseau, 2003).

La dynamique numérique actuelle se traduit par la création de sites web, profils


sociaux (facebook, twitter) ou de service en ligne, par les gouvernements,
collectivités territoriales, partis politiques, syndicats, entreprises, hommes
politiques, associations, ONG, en vue de raviver et d’atteindre le maximum de
citoyens (Goupil, 2007) Les médias en ligne en suscitant ainsi davantage
l’expression démocratique du citoyen, sont censés favoriser la démocratie. Mais
dans la réalité, ces initiatives numériques de démocratisation se révèlent des
outils d’e-administration (Wojcik, 2001), générant plus de frustration que de
réponses ou dans le pire de cas servent plus à l’hégémonie de quelques
groupuscules qui dominent ainsi par leurs idées. Dominique Wolton, le souligne:

« The challenge of democracy is to help people live together in peace,


and communication isn’t always successfully », he said. « If you put
500,000 computers between Israël and Palestine, you won’t get peace
because peace results from political will... It isn’t about sending
information quickly; it is more about building communication between
people and across languages, and managing the speed of
communication against the slowness of people» (Wolton, lectures at
University of Melbourne, 2009).

La surabondance d’informations n’aurait pas une fonction revitalisante pour la


démocratie mais la communication compris au sens de lien social. Pour Sunstein
(2007), les médias en ligne créent la polarisation de l’opinion publique ce qui a
deux effets préjudiciables au bon fonctionnement de la démocratie :

« Le premier est de réduire la part des rencontres inattendues, des


effets de surprise cognitive créés par la découverte de sujets jusqu'ici
ignorés et d'opinions déroutantes. Le second est de diminuer la part
des expériences civiques partagées par le plus grand nombre »
(Sunstein, Republic.com 2.0, 2007 : 36).

37
Le fossé entre ceux qui détiennent l'information et les autres risque de devenir, à
l'ère digitale, un facteur important de déstabilisation de la vie démocratique
(Loader, cité par Dahlgren & Peter, 2000).

Mais l’influence des médias sur la vie démocratique, qu’elle soit néfaste ou
bonne, il faut reconnaître est dorénavant incontournable et essentielle.
Dominique Wolton, rappelle à cet effet que « la communication n’est pas la
perversion de la démocratie, elle en est plutôt la condition de fonctionnement »
(Wolton, 1997 :59) Les médias de communication fournissent le principal lieu
commun de représentation et de débats des sociétés développées actuelles.
(Mestral, 2011). Que ces échanges soient contradictoires et souvent confus ne
fait que souligner l’importance fondamentale de l’espace virtuel de
représentation de notre réalité collective politique qui pour le meilleur ou pour
le pire se trouve bien plus dans les médias qu'au sein des parlements, (Breton &
Proulx, 1996, 2002)

Les médias sociaux permettent « d’augmenter » la démocratie, c'est-à-dire


permettent à tous les membres de la société de pouvoir agir en sujets politiques.
Ils permettent d’ouvrir à tous la possibilité concrète de discuter et de décider les
règles de l’organisation sociale et imposer la confrontation permanente entre ce
qui est et ce qui pourrait ou devrait être (Rodota, 2000). Si la démocratie doit
offrir la liberté de réaliser avec les personnes de son choix, des actions visant à
permettre l’épanouissement de chacun, à commencer l’assouvissement des
besoins élémentaires individuels et collectifs, ainsi que de pouvoir donner un
sens à l’existence, les laudatifs des médias sociaux pensent l’avoir accompli.

Dominique Cardon (cité par Martin Dacos, 2010), s’interrogeant sur la


dimension politique de l’Internet, soutient la thèse selon laquelle Internet est une
opportunité pour la démocratie, grâce aux fondements égalitaires qui ont présidé
à sa naissance et à son développement. Cette assertion est partagée par d’autres

38
auteurs comme Rodota (op.cit), Lévy(1999). Toutefois, Cardon (op.cit.) nuance
en disant que vu la massification de la fréquentation de l’Internet, qui impose
d'élargir le panel des interventions collaboratives du peuple du réseau, et le
développement de stratégies marchandes sous couvert d’une logique d’audience,
l’outil risque de devenir un média de masse vertical rendant passifs et donc de
simples consommateurs les utilisateurs. Le foisonnement d’information peut
aussi devenir un danger pour la démocratie vu le fait que beaucoup
d’informations circulent sans qu’on puisse en vérifier les sources (Martin, 2006).

A la réunion d'examen du Sommet Mondial de la Société de l’Information


(SMSI +10) tenue du 25 au 27 février 2013, l’UNESCO, l’une des organisations
internationales qui croit et lutte pour l’e-gouvernement considéré comme gage
de transparence et de démocratie et donc de paix, les experts en sont arriver à la
conclusion en se basant sur les récents mouvements sociaux (du printemps arabe
et le mouvement des anonymous9) que les réseaux sociaux sont devenus des
outils de communication de masse et des vecteurs de la mobilisation.
L’appropriation sociale d’Internet deviendrait une part importante des processus
de démocratisation. L’utilisation massif des médias sociaux comme Facebook et
Twitter par des militants et des citoyens pour relayer l’information qui n’est pas
toujours accessible par les médias traditionnels, ainsi que pour contourner la
censure ; ce qui selon les experts de l’UNESCO démontre que l’émergence des
technologies nouvelles offre une nouvelle tribune au débat public un moyen
nouveau et original de tirer parti des talents, d’unir les aspirations, d’encourager
une mobilisation immédiate des masses, et d’engager un changement à grande
échelle. Le communiqué final disait d’ailleurs que « le renforcement du lien
entre l’Internet et la participation sociale semble une condition de plus en plus
essentielle à l’instauration d’une démocratie dynamique» (UNESCO, 2013).

9
Les anonymous, sont un mouvement social de hackers (pirates informatiques) apparu dans les années 2003.Ils
sont connu pour le piratages de centre de données très sensibles (gouvernement institutions...)

39
Noiriel-Cursus (2006) observant l’avènement des médias sociaux dira que nous
assistons à un passage de la démocratie de partis à la démocratie du public et
que pour comprendre les enjeux démocratiques de l’Internet, il faut se rappeler
de ses origines, ses tenants.

Il reste que les producteurs de contenus collaboratifs sont devenus de puissants


acteurs industriels, qui traitent des données issues de centaines de millions
d'individus, où les fondateurs d'Internet pourraient voir avec déception des
“bavardages” remplacer la conversation et des interactions rudimentaires
remplacer l'argumentaire et la régulation procédurale. Nombreux sont les
pionniers du réseau qui considèrent le bouton “J’aime” de Facebook comme le
degré zéro de l'argumentation, signant la fin d'une aventure démocratique.

Les dernières développements du web représentent certes un progrès


médiatique, culturel et politique de par les interactions proposées, mais ne résout
pas l’équation fondamentale de la démocratie qu’est la question du lien entre
des individus que tout oppose (Wolton, 2010). La massification du public
d'Internet va-t-elle les faire retourner à leur condition de foule ou de public
exclusivement nourri par les gate keepers traditionnels ? Ce serait compter sans
“la force des coopérations faibles” qui à travers les mécanismes de réseautage,
permet à l’individu d’être actif ne serait que dans un cercle restreint Cardon (op
cité). Ces mouvements de coopération faibles inspirent la démocratie
participative que les politiques ont bien du mal à mettre au service de leurs
candidatures.

Les médias sociaux constituent une opportunité démocratique qui doit


aujourd'hui négocier le virage de la massification générée par leur usage
croissante, sans changer de nature, c'est-à-dire évoluer sans perdre ses qualités
créatives et ses principes égalitaires initiaux.

40
Les travaux sur la participation en ligne mettent en évidence que des motivations
de tous ordres peuvent se traduire avec d’autres types de sociabilités par une
forme de participation politique dans les espaces virtuels.

III.1.5 – Médias sociaux, médias de masse

Les médias sociaux bousculent le journalisme traditionnel, au moins en


interrogeant les fonctions qui lui sont idéalement dévolues. Surtout dans un
contexte ou de nombreuses critiques sont portés à l’encontre de ce dernier
comme favorisant l’expertise et l’emprise de quelques-uns, mais aussi des
connivences des journalistes, des éditorialistes avec des responsables politiques
ou des techniciens de l’action publique. Ces pratiques font des médias sociaux,
un terrain expérimental sur lequel peuvent s’édifier des dispositifs de publication
cherchant des alternatives aux pratiques médiatiques les plus critiquées (Cardon
et Granjon, 2010).

Contrairement aux récepteurs des médias traditionnels, les médias sociaux


mettent l’accent sur le caractère actif de l’internaute qui peut interagir sur les
informations reçues et même en produire. Les médias sociaux regorgent
d’espaces pour des prises de parole, ponctuelles ou pérennes, qui peuvent
emprunter des formats variés (textes, vidéos, son, montage, mixage, etc.), et
dont une partie peut consister à réagir, commenter, analyser, critiquer, évaluer
les choix, les décisions ou les comportements des pouvoirs publics ; ce que les
médias de masse sont de plus en plus critiqué de ne plus faire (Putnam, 2005 cité
par Wojcik, op.cit). Et cela, avec une ampleur inégalée par rapport aux
possibilités offertes par les médias diffusés, dont certaines émissions – celles
rassemblant professionnels de la politique et « anonymes » - contribuent déjà à
«un élargissement de la définition du politique au-delà des catégories, statuts et
processus ayant cours dans la sphère institutionnelle » (Lefebvre, 2008).

41
Mais pour Dominique Wolton (2012), l’arrivée des réseaux sociaux ne
transforme en rien les statuts des médias établis, en particulier pour ce qui est de
la télévision. Pour le sociologue, Internet est moins bon, que la télévision et la
radio qui ont ainsi en commun le fait de pouvoir toucher des publics
incroyablement hétérogènes à un moment donné au travers d’une grille de
programme, et permettant ainsi de réunir des publics différents. Quand les autres
sont des médias de l’offre, les médias sociaux se comportent comme un média
de la demande et ne peut améliorer le dialogue et la communication qu’à
l’intérieur d’une communauté bien identifiée alors qu’il lui sera beaucoup plus
complexe de gérer l’hétérogénéité sociale et culturelle.

A l’étape actuelle, Wolton (op.cit.) considère que les médias de masse restent
plus forts et ambitieux ; il met l’accent sur la complémentarité et non
l’opposition de ces deux types de communication et d’information. De
nombreux médias de masse se retrouvent aujourd’hui en ligne ; l’information
portée en ligne revenant au même que ceux diffusées traditionnellement. D’une
part, se nouent de nouvelles formes de collaboration entre les traditionnels et les
tenants du « data-journalisme10 », et les individus ou des collectifs
originellement formés en ligne, soit en vue de fournir plusieurs analyses et
informations - autre que celle promue par les médias dominants- soit en mettant
à la disposition des populations non internautes, les informations en ligne. Le
plus qu’il faut noter est la possibilité de publicité que les médias sociaux offrent
aux interprétations multiples et diverses des récepteurs.

La plupart des questions posées par l'analyse des médias traditionnels (comme,
par exemple, le problème du caractère fidèle ou non de la représentation de la
réalité offerte par les médias) s'appliquent à l’Internet en tant que nouveau mass-
média. La problématique des sources d’informations est d’ailleurs plus élevée
avec les médias sociaux.
10
Les tenants du data- journalisme comme Média part et Wikileaks.

42
De plus, les pratiques informationnelles en ligne flouent le jeu journalistique,
dans la définition de ce qui mérite d’être porté à l’attention du public, et les
savoirs « profanes » de la multitude.

Mais, l’appropriation croissante des différentes modalités de communication


qu’il autorise et supporte (réseaux sociaux etc.), parmi la population, conduit
nombre de sociologues et politistes à s’interroger plus largement sur le rôle de
l’Internet dans les processus de politisation des individus.

III.1.6 – Médias sociaux et politisation

Depuis les célèbres travaux de Lazarsfeld sur l'influence qu'exercent les médias
sur la décision des électeurs, et qui lui permit de développer sa célèbre « Two
step flow theory » (Lazarsfeld & Elihu 1955 (2008)) ; l’intérêt de la sociologie
qu’elle soit électorale, politique ou de médias pour les effets des médias et leur
influence croissante sur notre existence. La thèse principale de Lazarsfeld se
distingue vivement des théories marxistes de l'École de Francfort. En effet,
Lazarsfeld pense que l'influence des médias dépend des opinions préexistantes et
du réseau de relations interpersonnelles du récepteur, ainsi que de son champ
social. Le récepteur est donc davantage sensible aux opinions qui lui sont
proches. Ainsi, un émetteur ne réussirait pas à changer l'opinion politique de son
récepteur si celle-ci est déjà opposée Après avoir étudié de nombreux cas, les
auteurs décrivent les individus comme peu perméables aux messages des
médias, du moins de façon directe.

En effet, les électeurs, en grande partie, choisissent de voter pour un candidat


donné en fonction de leur entourage. Parmi leurs proches, certains sont plus
influents : ce sont des « leaders d'opinion » (aussi appelés « relais d'opinion » ou
« guides d'opinion »). Or, ceux-ci ont comme particularité d'être à l'écoute des
médias et de définir leur position politique selon les messages qu'ils diffusent.

43
L'influence politique des médias sur l'ensemble de la population se fait donc en
deux temps d'abord le message délivré par les médias, ou un média en
particulier, est reçu et plus ou moins assimilé par un leader d’opinion, ensuite,
celui-ci fait partager son choix de vote aux personnes qu’il connaît. Cette théorie
met une limite forte à une influence verticale exercée par les médias de masse
mais n’explique pas le cas des médias sociaux. Aujourd’hui, face aux mutations
des médias, les sociologues parlent plus de l’influence multiple ou la « Multiple
step flow theory ».

Daniel Gaxie (1978, in Réseaux 1987), dans la lignée déterministe affirme que
la politisation est intrinsèquement liée à la compétence politique. Cette
affirmation se base sur le constat fait autour du vote et qui démontre que : les
citoyens en général, s’intéressent peu à la politique.

Il met en doute les thèses selon lesquelles « l'exposition à des stimuli


politiques accroît la quantité et la finesse des connaissances politiques et
favorise l'intérêt » (Milbrath, cité par Gaxie, 1987: 12), ou « l'électeur qui est
exposé de façon conséquente aux informations concernant les partis politiques
formera avec le temps un circuit complexe lui permettant de recevoir et
d'interpréter des messages additionnels de cette sorte » (David Butler, cité par
Gaxie, op.cit.). Plus le niveau de classe sociale est basse, plus l’intérêt et la
compétence politique est faible et même si les classes populaires « les
dépossédés » sans avoir de discours politique (professionnels), parlent politique
et votent, elles sont à la merci des porte-parole et professionnels politiques
auxquels ils sont obligé d’emprunter les discours et les symboles d’où le titre de
son ouvrage c'est-à-dire cens caché. En d’autres termes, le rapport
qu'entretiennent les citoyens ordinaires à la politique, se forge au travers
d'interactions entre les professionnels de la politique, les médias et notamment
les commentateurs de la vie politique, ainsi que certains politologues (Tekenela,
2010).

44
Pour Daniel Martin (2006), les médias dont l’Internet, loin de permettre une «
bonne » politisation des citoyens, s’avèrent en fait, « le degré zéro de la
communication politique» voire un facteur de dépolitisation. Partant d’exemples
concrets, il met en exergue une relation de cause à effet entre la gouvernance
politique en France et la qualité des médias et des journalistes : si la France est
mal gouvernée depuis des années et que l’on assiste à la montée des
mouvements populistes dirigées par des gens « politiquement incapables », c’est
parce que les citoyens auraient mal voté et s’ils l’ont fait, c’est qu’ils ont été mal
informés par les médias et principalement par les journalistes. Pour lui, nous
sommes rentrés dans une ère où le citoyen compte sur les médias comme repère
dans le jeu économique ou politique. Dans ce cas, il faut remarquer que l’auteur
ne renie pas le fait que les médias politisent, mais pour lui ce serait plutôt en
mal. Son analyse, va au-delà d’un simple déterminisme technologique, les
médias de masse ne peuvent à eux seuls créer l’apathie politique ou la
dépolitisation, il doute des effets probables des médias d’ailleurs car il existe
d’autres filtres de l’auditoire dont le fait que :

« La plupart des gens ne s’intéressent pas assez à la politique pour


prendre le temps de s’informer ; la plupart des gens ne veulent
recevoir et ne recevront que des informations qui confortent leur
points de vues … » (Martin Daniel, 2011)

Dahlgen et Relieu (2000) abondent dans le même sens. Même si les réseaux
sociaux permettent aux gens d’entrer en contact non plus seulement pour parler
mais faire des choses ensemble, dont poursuivre des buts politiques ; « peu
nombreux sont les utilisateurs qui deviennent des drogués de l'information
politique » (Dahlgen & Relieu, 2000). Les réseaux sociaux n’ont ainsi tendance
qu’à accroitre l’engagement et l’information politique de ceux qui l’étaient déjà.

Raphaël N’tambwe Tshimbulu (2006), analysant l’usage spécifiquement des


médias sociaux comme moyen de communication politique en Afrique révèle
que depuis 2001, le phénomène gagne progressivement le terrain : que ce soit

45
par des espaces de dialogue avec la population (Sénégal) ou la mise à
disposition d’informations générales relativement stables Congo) ou pour faire
leurs campagnes électorale (R.D. Congo) fora et espaces numériques dédiés à la
politique ont un seul mot d’ordre l’interactivité, même s’ils restent peu
interactifs. Dans l’entre-temps, des réseaux humains se constituent sous forme
de liste de discussion où s’échangent des informations et se débattent divers
sujets politiques, du plus frivole au plus républicain.

« Et malgré les injures, les partis pris et les fanatismes qui s’y
expriment, cette liste devient un lieu public, certes encore élitiste, qui
non seulement répercute, dans des langages simples, les opinions
politiques…, mais surtout concourt à l’édification d’une certaine
conscience… On y apprend, certes, à dénigrer les opinions politiques
des autres, mais aussi à élaborer un raisonnement politique fondé sur
les faits ou l’histoire politique du pays. Les opinions des
politicologues africanistes (comme celles de la belge Colette
Braeckman) n’y ont plus la valeur des versets de la bible et y sont fort
controversées… » (Tshimbulu, Communication et changement social
en Afrique et dans les Caraïbes : bilan et perspectives, 2006 :70)

Stromer-Galley (cité par Matos, 2009) a trouvé des indices du rapport existant
entre la familiarité à l'utilisation d'Internet et la propension à voter on-line: d'un
côté, plus il y a de gens qui utilisent Internet, plus il y a de gens disposer à voter
on-line; d'un autre côté, la familiarité avec la technologie paraît avoir peu de
rapports avec le sens du devoir et l'intérêt politique des personnes. Par
conséquent, l'utilisation des médias et la motivation pour participer
politiquement paraissent être déconnectées; ainsi, la technologie paraît-elle plus
disposer les personnes à accepter un processus on-line de votation que de
provoquer spécifiquement un sentiment de devoir de participer en votant.

Une étude à NetVille aux Etats Unis d’Amérique, a montré que l'utilisation
d'Internet a promu plus et mieux les rapports sociaux et la participation réelle
autant dans la communauté locale que dans celle on-line (Hampton et Welmann,
1999). Rice et Katz (Howard et Jones, op.cit.) montrent comment les personnes
utilisent Internet pour enrichir leur vie politique en participant à des groupes de

46
discussion on-line, en faisant des recherches sur des candidats et des options
politiques, et même en suivant les nouvelles de la politique.

Norris (2003) a observé pour les États-Unis et l'Europe, qu’Internet n'a pas
mobilisé des groupes qui étaient antérieurement inactifs (à l'exception partielle
des jeunes), mais, au contraire, a renforcé les tendances déjà existantes en
participation politique.

Les politiques utilisent les médias sociaux comme un outil de « marketing


viral » : profiter des rapports établis par le moyen des réseaux sociaux en
utilisant le capital social construit dans le contexte de formation d’une
sociabilité et inviter les gens à agir. Les médias sociaux serviraient ainsi à
mobiliser les gens non pas en termes d’accroitre leurs connaissances politiques
mais à des fins politiciennes précises et l’exemple le plus récent est la campagne
de Barack Obama en 2008. Les médias sociaux ayant été utilisés dans cette
campagne avant tout pour recruter et organiser massivement les sympathisants
surtout les jeunes, mais paradoxalement moins pour communiquer aux électeurs.
Ces derniers ont diffusé leurs idées entre les participants de leurs réseaux
particuliers à travers des textes, photos, fragments audiovisuels, etc. (Esperidião
et Renó, 2008).

Mais la politisation ne peut se réduire à la mobilisation électorale ou au


rassemblement des individus dans des groupes organisés. Dans le cas des Etats
Unis, la majorité des électeurs se sont démobilisés après les élections. Pour une
politisation, il faut la communication au sens woltonien du terme.

Cette revue de littérature nous a permis de circonscrire notre objet d’étude et de


spécifier notre problématique même si elle nous a encore montré la difficulté de
la sociologie des médias dans l’analyse de l’Internet à se départir des théories
pro ou contre. Nous terminons avec cette réflexion d’Eric Neveu (1999 : 64) :

47
« Le livre qui déconstruira les discours enchantés et les faux débats
tout en prenant en compte la réalité et les potentiels de changement
des espaces publics auxquels participent les nouveaux réseaux de
communication reste assurément à écrire ».

III.2 – Définition des concepts

Durkheim (1985) recommande d’élaborer, au début de toute recherche, une


définition provisoire de l’objet (Combessie, 2007). La présente étude s’est
attelée à respecter cette rigueur méthodologique ; ainsi les concepts utilisés sont
clarifies dans cette partie afin d’en assurer une meilleure compréhension
(Boutillier & al, 2005).

III.2.1 – La politisation

Notion complexe à appréhender et à mesurer avec précision, la politisation


renvoie ici à la propension des individus à « entretenir un intérêt pratique pour la
participation épisodique à des activités réputées spécifiquement politiques »
(Lagroye, François et Sawicki, 2002 : 311), ces dernières n’étant pas cantonnées
aux activités formellement liées à la sphère institutionnelle ou partisane (vote,
adhésion à un parti).

La politisation est un processus de socialisation par lequel un individu ou un


groupe est incité à s'intéresser à la politique et à développer des réflexions et des
pratiques qui en relèvent. La politisation d'un groupe ou d'une société est le
mouvement sociohistorique par lequel les questions politiques les pénètrent ainsi
que le quotidien de leurs membres. Par extension, la politisation peut amener des
domaines, événements, problèmes à devenir politiques.

Dans la tradition néo-kantienne, la politisation peut être définie comme


l’attention accordée au fonctionnement du champ politique ; elle dépend d’un
ensemble de conditions sociales dont la durée de la scolarisation est le principal
élément.

48
La politisation est une dimension de la citoyenneté et requiert un type spécifique
de socialisation (primaire ou secondaire), un travail de diffusion d'instruments
cognitifs et de schèmes d'évaluation de l'espace politique et de ses logiques qui
sont autant de conditions préalables pour un usage autonome et actif des
possibilités incontestables offertes par les nouveaux réseaux (Gaxie, 1978,
2000). La politisation est tributaire du sentiment de la compétence politique et
de la compétence politique de l’individu.

III.2.2 – La compétence politique

Elle est la capacité à opérer une construction proprement politique de l'espace


politique et varie par conséquent en fonction de la possibilité de donner sens à
des faits politiques.

Bourdieu (1976) définit la compétence politique comme cette capacité grande ou


infime de reconnaître les questions politiques comme politique et de les traiter
comme telles en y répondant politiquement, c'est à dire à partir de principes
proprement politiques (et non éthiques par exemple), capacité qui est
inséparable d'un sentiment plus ou moins vif d'être compétent au sens plein du
mot, c'est à dire socialement reconnu comme habilité à s'occuper des affaires
politiques, à donner son opinion à leur propos ou même à en modifier le cours .

La compétence politique est peut être conférée (cas des élus ou des autorités
politiques ou des journalistes) ou acquis (par l’éducation, les études
spécialisées). La compétence politique dépend fortement des conditions sociales
de l’individu c'est-à-dire du sentiment de compétence politique qui est le degré
auquel les agents sociaux ont le sentiment de se retrouver dans le déroulement
des événements politiques, donc de leur trouver un sens (Gaxie, op.cit.).

49
III.2.3 – Les médias sociaux

Andreas Kaplan et Michael Haenlein (2010 : 4) définissent les médias sociaux


comme « un groupe d’applications en ligne qui se fondent sur l’idéologie et la
technologie du Web 2.0 et permettent la création et l’échange du contenu généré
par les utilisateurs ». Les médias sociaux utilisent l'intelligence collective dans
un esprit de collaboration en ligne. Par le biais de ces moyens de communication
sociale, des individus ou des groupes d'individus qui collaborent créent
ensemble du contenu web, organisent le contenu, l’indexent, le modifient ou
font des commentaires, le combinent avec des créations personnelles.

Les médias sociaux utilisent beaucoup de techniques, telles que les flux RSS et
autres flux de syndication Web, les blogues, les wikis, le partage de photos
(Flickr), le vidéo-partage (You Tube), des podcasts, les réseaux sociaux
(Facebook), le book marking collaboratif (Wiki), les mondes virtuels, les micro
blogs (Twitter), et plus encore.

III.2.4 – Les réseaux sociaux

Le réseau social sociologiquement est une structure définie par des relations
entre les individus. Mais aujourd’hui, est plus largement connu comme réseau
social, les communautés virtuelles et interactives formées en ligne par des
individus ou des organisations et sur lesquelles, ils échangent informations,
photo, vidéo, texte...Deux types de réseaux sociaux : les réseaux sociaux de
contact (skype, facebook, messenger...) et les réseaux sociaux de contenu (wiki,
twitter, youtube…).

Certains « réseaux sociaux » sur Internet combine les deux types et permettent
regroupent des amis de la vie réelle tout en produisant du contenu. D'autres
aident à se créer un cercle d'amis, à trouver des partenaires commerciaux, un
emploi ou autres. L’on peut citer entre autres réseaux sociaux en ligne :

50
Facebook, MySpace, Mupiz, Viadeo, Youtube, Wikipédia, Wikimédia, Twitter,
Linkeldln, Messenger.

Ils sont en quelque sorte des clubs « privés » souvent sélectionnés par centres
d'intérêts personnels partant du principe de l'homophilie. Ainsi, certains partis
politiques et hauts dirigeants créent leur propre réseau social. Des réseaux
sociaux à volonté culturelle, ou spécialisées dans l’économie solidaire émergent
également. Chaque réseau se spécialise et occupent des niches spécifiques.

III.2.5 – Le champ politique

Pour Bourdieu (1981), le champ politique est « le lieu où s'engendrent, dans la


concurrence entre les agents qui s'y trouvent engagés, des produits politiques,
problèmes, programmes, analyses, commentaires, concepts, évènements, entre
lesquels les citoyens ordinaires, réduits au statut de "consommateurs", doivent
choisir ».

Un champ est avant tout un microcosme social, qui fonctionne selon des règles
du jeu strictes, qui lui sont propres. Chaque participant se doit d'avoir le sens du
jeu. Chaque champ est structuré par des rapports de force, et en ce sens chaque
champ est un espace de lutte entre dominants et dominés. Chaque participant
occupe une position qui n'est pas fixe et évolue dans le temps en fonction des
dispositions constitutives de leur habitus et de la structuration présente du
champ. Ces positions des agents définissent leur trajectoire individuelle.

III.2.6 – La délibération

La définition de la délibération n'est autre que la formation discursive, via la


confrontation des arguments, de la volonté des individus : « la tradition
philosophique suivant un usage qui remonte à l'aristotélisme, désigne en général,
par le terme de délibération, le processus de formation de la volonté, ce moment
qui précède le choix et dans lequel l'individu s'interroge sur différentes

51
solutions, avant de se déterminer pour l'une d'entre elles. » (Bernard Manin,
1985 : 78).

III.2.7 – L’espace public

Arendt (1983) définit l’espace public comme « l’organisation du peuple qui


vient de ce que l’on agit et parle ensemble, et son espace véritable s’étend entre
les hommes qui vivent ensemble dans ce but, en quelque lieu qu’ils trouvent ».

Pour Habermas (1999), on peut parler d’espace public lorsque le public


constitué d'individus fait usage de la raison et s'approprie la sphère publique
contrôlée par l'autorité et la transforme en une sphère où la critique s'exerce
contre le pouvoir de l'État.Il s’agit d’un espace symbolique où s’opposent et se
répondent les discours, la plupart contradictoires, tenus par les différents acteurs
politiques, sociaux, religieux, culturels, intellectuels, composant une société.

C’est donc avant tout un espace symbolique, qui requiert du temps pour se
former, un vocabulaire et des valeurs communes, une reconnaissance mutuelle
des légitimités ; une vision suffisamment proche des choses pour discuter,
s’opposer, délibérer. L’espace public ne relève pas de l’ordre de la volonté, on
en constate l’existence. Il symbolisé simplement la réalité d’une démocratie en
action, ou l’expression contradictoire des informations, des opinions, des intérêts
et des idéologies. Il constitue le lien politique reliant des millions de citoyens
anonymes, en leur donnant le sentiment de participer effectivement à la
politique. Si l’on peut volontairement instituer la liberté d’opinion, la liberté de
la presse, la publicité des décisions politiques, cela ne suffit pas à créer un
espace public.

L’espace public suppose l’existence d’individus plus ou moins autonomes,


capables de se faire leur opinion, non « aliénés aux discours dominants »,
croyant aux idées et à l’argumentation, c'est-à-dire à la construction des opinions

52
par l’intermédiaire des informations et des valeurs, puis de leurs discussions.
C’est l’idée d’une argumentation possible contre le règne de la violence
libératrice, l’idée d’une reconnaissance de l’autre. L’espace public est aussi
l’aboutissement du mouvement d’émancipation qui a consisté à valoriser la
liberté individuelle, et tout ce qui est public, contre ce qui était « privé ». Il s’est
ainsi opéré une rencontre entre deux mouvements relativement différents : celui
en faveur de la liberté individuelle, donc d’une certaine capacité à afficher
publiquement ce que l’on est, et le mouvement démocratique, qui lui aussi
favorisait l’idée de publicité contre celle de secret et d’interdit. Des deux côtés,
ce qui était « public » fut valorisé.

Dans sa réflexion, Habermas (op cité) concevait l’espace public rationaliste de la


démocratie libérale du 18e siècle et proposa la notion d’un espace
communicationnel où les citoyens discutent et règlent des questions d’intérêt
commun. Au fil des années, il a renoncé aux aspects trop rationalistes de cette
conception. Le modèle de Hannah Arendt (1972) aux aspects plus « esthétiques
» que purement rationnels, semble plus près de la réalité, avec les dangers qui y
sont inhérents, notamment au plan de la circulation de l’information d’intérêt
public.

Dans l’espace public, les éléments d’information (personnages, politiques,


événements, etc.) sont « mis en scène » devant la collectivité. Les citoyens sont
conviés à formuler leur appréciation sur des bases qui ne sont plus
exclusivement rationnelles. Malheureusement, le commun des mortels n’a ni le
temps ni les moyens de se renseigner sur une base scientifique et se fait
influencer par des moyens autant émotifs que rationnels.

L’espace public s’est médiatisé et diversifié. Les médias constituent, pour le


meilleur ou pour le pire, le lieu concret où idées et images se véhiculent.

53
III.2.8 – L’espace commun

L’espace commun est physique; c’est la rue, la place publique, du commerce et


des échanges. Il est souvent confondu avec l’espace public.

Le mot public, du latin publicus (ce qui concerne tout le monde), renvoie à
« rendre public », à publier, du latin publicare. Cela suppose un élargissement
de l’espace commun et l’attribution d’une valeur normative à ce qui est
accessible à tous. Dans le passage du commun au public, l’accent est mis sur la
valorisation du nombre et le principe de liberté se lit ; ce qui deviendra par la
suite la caractéristique de la démocratie.

III.2.9 – L’espace politique

Dans cet espace il ne s’agit ni de discuter ni de délibérer, mais de décider et


d’agir. L’espace politique nait d’un espace public. Aujourd’hui, la spécificité de
la politique moderne démocratique réside dans l’élargissement de l’espace
politique, au fur et à mesure du mouvement de démocratisation.

Pour simplifier, l’espace commun concerne la circulation et l’expression ;


l’espace public, la discussion ; l’espace politique, la décision.

III.2.10 – L’engagement politique

L’engagement politique est le résultat des relations établies entre les individus
dans leurs réseaux quotidiens de solidarité et coopération. Aujourd’hui on
considère deux façons de s’engager dans des mobilisations politiques :
l’engagement formel dans des associations ou mouvements sociaux
institutionnalisés, et aussi celui lié aux conversations quotidiennes qui invitent le
citoyen à prendre la parole devant les autres en s’exprimant et en définissant
collectivement une question publique. Dans ces deux dynamiques d’interaction
entre les individus – formelles et informelles – des réseaux sociaux sont crées en
même temps que le capital social (Matos, 2009).

54
III.2.11 – La participation politique

Selon Jan Teorell et al. (cité par Neveu, 2006), la participation politique permet
aux citoyens d’exprimer leurs doléances par le biais de nombreux moyens et de
se faire entendre par ceux qui sont en position d’autorité. Parmi ces différents
moyens figurent le vote, les lettres adressées aux élus, les campagnes en faveur
d’un parti politique, la signature d’une pétition et la participation à une marche
de protestation. Face au désenchantement croissant des citoyens face aux
résultats de la démocratie représentative, la participation politique des citoyens à
travers des cadres de médiation comme les assemblées populaires, les conseils
de quartier est de plus en plus promue : c’est la démocratie participative.

III.2.12 – La socialisation

La socialisation est au fondement de l’effort entrepris par la sociologie pour


apporter des réponses rationnelles, scientifiques aux vieilles questions du
déterminisme et d’identité de l’individu. La socialisation -politique- est un
processus continu à l'articulation des socialisations primaires et secondaires
(Darmon, 2006) ou plurielle au sens de la diversité des contextes de socialisation
que traversent un individu dans le cadre d'une société hautement diversifiée
(Lahire, 2012 ; 2002).

III.2.13 – Le capital social

Pierre Bourdieu définit le capital social comme « l'ensemble de ressources


actuelles et potentielles qui sont liées à la détention d'un réseau durable de
rapports plus ou moins institutionnalisés de connaissance et reconnaissance
mutuelle » (Bourdieu, 1980 : 2) ; autrement dit, le capital social serait un attribut
de l'individu dans un contexte social.

55
III.2.14 – La démocratie

Définit populairement comme « gouvernement du peuple par le peuple », la


démocratie est un idéal, celui de l’égalité et de l’autonomie, et où chacun peut
exercer le pouvoir sans condition de classe, de race, de religion ou de savoir,
(Rancière, 2005) et cet idéal, aucune société humaine ne l’a pas encore atteint.
Dans la réalité, par le double jeu d’institutions et de règles concrètes : élection
de représentants, séparation des pouvoirs, vote à la majorité, État de droit, sa
version représentative, permet aux les gouvernés de gouverner, de désigner et de
sanctionner les gouvernants (Leca, 2004).

III.2.15 – Démocratie électronique

Le gouvernement en ligne ou la démocratie en ligne par l’Internet


vise l’établissement d’une meilleure communication entre les gouvernants et la
population, entre les leaders politiques et les citoyens, afin de mieux intéresser
et éventuellement d’intégrer davantage ces derniers à la vie démocratique d’une
société donnée (S. Goupil, op.cit.).

La notion de « démocratie électronique » renvoie à l’idée de développer la


participation politique à travers les réseaux électroniques, qu’il s’agisse pour les
citoyens d’échanger entre eux ou avec leurs représentants. Sont dès lors
regroupées sous cette dénomination une variété d’initiatives, de dispositifs, de
pratiques, reposant pour tout ou partie sur les technologies de l’information et
de la communication au travers desquelles responsables politiques et institutions
publiques affirment vouloir favoriser les différentes dimensions (information –
discussion – vote - contrôle) du processus démocratique en régime représentatif
(Hacker & Van Dijk, 2000) mais aussi, l’ensemble des expériences politiques
mobilisant les TIC, à travers les prises de parole, individuelles ou collectives,
des citoyens non contraintes par les pouvoirs publics, et concourant de ce fait à
reconfigurer l’espace public traditionnel (Cardon, 2010).

56
III.2.16 – e- gouvernance

L’expression « e-gouvernance » est le plus souvent retenue pour désigner


l’ensemble des processus par lesquels les Etats procèdent à l’implantation des
réseaux informatiques pour contribuer à résoudre des problèmes de gouvernance
(Goupil, 2007).

III.2.17 – La citoyenneté

Elle est l'ensemble des conditions permettant à l'individu de jouir pleinement des
droits fondamentaux et de participer au fonctionnement du système politique.
Selon Marc Foglia, la citoyenneté impose des prises de parti claires, des options
qui sont prises et qui ne se valent pas. Elle implique nécessairement le choix,
mais un choix raisonné (Rochefort, 2007).

III.2.18 – Le citoyen numérique

Elle peut être désignée alors comme tout citoyen relevant de la société
numérique et qui utilise les outils numérique (Internet, la téléphonie
cellulaire…) pour participer et contribuer à la construction de son monde. Cette
façon de concevoir la citoyenneté numérique s’explique avant tout par le fait que
la culture numérique est comme le dit H. Jenkins(2006), une culture
participative. Et cela apparait clairement avec le développement des réseaux
sociaux numériques (Facebook, twitter…) que l’on soit majeur ou privé de ses
droits civiques, l’on peut facilement et derrière un outil numérique, discuter avec
un président ou un élu local d’enjeux locaux ou internationaux. L’on peut
décréter des pétitions pour des questions qui tiennent à cœur et y faire adhérer le
monde.

57
CHAPITRE DEUXIEME

CHAMP d’ÉTUDE ET METHODOLOGIE

I – CHAMP D’ÉTUDE

I.1 – Présentation du Togo

Le Togo, un des Etats d’Afrique francophone couvre une superficie de 56.600


km² en une sorte de couloir de 600 km du Nord au Sud, entre le Ghana à
l’Ouest, le Bénin à l’Est, le Burkina Faso au Nord et une ouverture maritime de
55 km au Sud sur le Golfe de Guinée. Le pays se situe dans l’hémisphère nord
de l’Afrique occidentale. L’économie est essentiellement agricole (près de 70%
du PIB) avec une part non négligeable du secteur tertiaire ; le secteur secondaire
est à l’état embryonnaire.

A partir de 1955, l’évolution politique du Togo est incontestable même si elle a


connu des soubresauts. Obtention de l’indépendance le 27 avril 1960, mais aussi
théâtre du premier coup d’Etat militaire africain, le 13 janvier 1963. Deuxième
coup d’Etat militaire en 1967, prise de pouvoir par les militaires et dissolution
des partis en mai 1967. C’est la naissance du système de parti unique qui dura
jusqu’au 12 août 1991, date à laquelle le multipartisme est restauré sous la
pression populaire. Ceci grâce au processus de démocratisation engagé début
des années 1990 et marqué par des troubles sociopolitiques : une grève générale
de neuf (09) mois en 1992-1993.

Au Togo, la politique rythme la vie socio-économique du pays. Depuis les 1990,


le pays semble condamné à de récurrentes crises politiques : une lutte incessante

58
entre le pouvoir en place et l’opposition sur des réformes constitutionnelles et
démocratiques à mettre en place et sur l’organisation des élections transparentes
et équitables.
La remise en cause de l’ordre constitutionnelle suite au décès du président
Eyadema et l’élection de Faure Gnassingbé en 2005 entraina des
bouleversements violents dans la vie sociopolitique du pays. Seules deux
élections (législative de 2007 et présidentielle de 2010) ont pu se dérouler sans
être émaillé de violences Aujourd’hui moins délétère, le climat politique n’en est
pas moins apaisé.

Administrativement, le pays est divisé en cinq régions économiques : la région


des Savanes, la région de la Kara, la région Centrale, la région des Plateaux et la
région Maritime. Depuis 1897, le Togo a pour capitale la ville de Lomé, site de
la présente étude.

I.2 – Présentation de Lomé, la zone d’étude

I.2.1 – Historique de la ville de Lomé

La ville de Lomé est fondée par les Ewé au 18e siècle. Etymologiquement, Lomé
vient du mot éwé « Alotimé » qui signifie « au milieu des plantes d’Alo » (Alo
est un arbre source de cure-dent).

Petit bourg commercial de 2000 habitants, son évolution s’amorça dès 1897 où
l’administration allemande décida du transfert de la capitale du Togoland
d’Aného à Baguida puis à Lomé. Après, la première guerre mondiale, les
Allemands abandonnèrent le pays et sa capitale aux mains des vainqueurs. En
1920, l’administration de tutelle anglaise devint francophone. Depuis son
érection en capitale économique et politique, la ville de Lomé a été témoin
privilégié de toutes les crises politiques jusqu’à ce jour.

59
I.2.2 – Situation géographique

Sise entre le 6°10’ Nord et 1°15’ Est, la ville de Lomé est une ville côtière. A sa
création, la commune de Lomé était coincée entre la lagune au Nord, l’Océan
Atlantique au Sud, le village de Bè à l’Est et la frontière d’Aflao à l’Ouest.
Depuis lors, l’agglomération n’a cessé de s’étendre en raison de l’explosion
démographique (Marguerat, 1993) et de l’étalement spatial exponentiel. Son aire
géographique se confond pratiquement avec l’aire urbaine de la Préfecture du
Golfe (voir annexe 1 pour carte détaillé). La macrocéphalie de l’agglomération
loméenne en fait un point identitaire du pays.

I.2.3 – Organisation socio-administrative

La ville de Lomé se situe dans la Préfecture du Golfe. Cinq (5) arrondissements


sont administrativement reconnus à la ville de Lomé, toutefois avec l’extension
spatiale actuelle l’agglomération s’est étendue et se confond pratiquement avec
toute la préfecture du Golfe (Mairie de Lomé, 2012). En prenant en compte
l’aire urbaine de la Préfecture du Golfe, onze (11) entités territoriales composent
de fait l’agglomération loméenne : les cinq (5) arrondissements de la commune,
et les cantons de Togblekopé, Sanguéra, Aflao Sagbado, Baguida, Lêgbassito,
Agoenyivé.

Chaque arrondissement a à sa tête un maire. Par disposition spéciale de la loi N°


2007, la commune de Lomé est dirigée par une délégation spéciale nommée par
décret présidentiel.

I.2.4. – Démographie

Selon les résultats du recensement général de novembre 2010, la population


résidente dans la commune de Lomé est évaluée à 837 437 habitants, avec un
taux de croissance annuel moyen de 2,39%. Le taux d’urbanisation de la
commune de Lomé est de 100% pour une densité de 8342 habitants/km².La

60
population de la commune de Lomé et celle de la partie urbaine de la Préfecture
du Golfe qu’on désigne par « le Grand Lomé » compte 1 477 660 habitants ; six
citadins sur dix vivent dans cette agglomération et la pyramide des âges
démontre une population extrêmement jeune (RGPH, 2010). Lomé est une
capitale cosmopolite où plusieurs ethnies et nationalités se retrouvent.

I.2.5 – Armature médiatique et numérique de la ville de Lomé

A l’instar de toutes les capitales africaines, Lomé concentre la majorité des


infrastructures économiques et technologique du pays. L’on y compte près d’une
centaine de médias privés (tv, radio, site internet, presse) en plus des médias
officiels. L’occupation des espaces publics médiatiques reste toutefois
inégalitaire. L’aménagement numérique est relativement bonne comparée à
l’arrière pays. Les quatre opérateurs de l’Internet ont leur siège à Lomé et la
ville est reconnue dans la sous région pour le nombre de ses centres internet ou
cybercafés. Selon l’Art&P (2010), on les estime à un millier.

Il faut le rappeler, le territoire virtuel dépasse souvent largement les frontières


du territoire physique. Par rapport à la couverture numérique et surtout pour son
histoire politique (la majorité des partis politiques y ont leurs sièges), il ne fait
aucun doute que le choix de ce cadre d’étude nous permettra d’atteindre nos
objectifs.

II – CADRE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE

Afin de recueillir des données utiles, toute recherche scientifique implique le


recours à une méthodologie rigoureuse. Pour cette raison, cette partie de l’étude
sera consacrée à l’exposé de la démarche méthodologique utilisée pour l’analyse
de la politisation des Loméens à travers les médias sociaux. Trois étapes
constituent notre démarche méthodologique : la phase théorique de l’étude qui a
consisté en une recherche documentaire, la phase pratique menée sur le terrain à

61
travers une observation minutieuse de la population enquêtée et la phase de
traitement et d’analyse des données.

II.1 – La recherche documentaire

Cette phase a permis une connaissance des réflexions et études antérieures, d’en
relever les informations utiles mais surtout la clarification conceptuelle. Au
cours de cette étape, nous avons consulté et analysé de nombreux ouvrages
généraux et spécifiques, des thèses, des mémoires, des rapports d’études et des
articles. De par les mutations sociale et technique indéniables introduites par
l’Internet, nombre de chercheurs ont réfléchi et écrit sur ce média et ses derniers
développements pris sous l’angle de la communication, de l’économie, de la
gouvernance, de la politique ou du droit. L’exploitation, l’entrecroisement et
l’interprétation de toute cette bibliographie a permis de cerner les contours du
sujet et de réajuster la problématique. Il importe de souligner que la majorité de
la recherche documentaire a été effectuée sur Internet.

II.2 – L’enquête de terrain

II.2.1 – Les groupes cibles prioritaires

La population cible est constituée des Loméens (jeunes et adultes), utilisant les
réseaux sociaux. Selon Dominique Wolton (2009), trois acteurs ont la légitimité
à s’exprimer publiquement sur la politique : les hommes politiques, les
journalistes et l’opinion publique. Même s’ils n’ont ni le même statut ni la même
légitimité, l’interaction de discours tenus par ces acteurs, selon lui, et de par
leurs positions respectives dans l’espace public, constituent la condition de
fonctionnement de la démocratie de masse. Dès lors, l’étude a ciblé les
responsables politiques, les journalistes et bloggueurs en ligne et tous ceux qui
ont un intérêt pour la politique.

62
II.2.2 – L’échantillonnage

Compte tenu de l’absence de statistiques sur les populations internautes à Lomé


ou sur les utilisateurs de tous les médias sociaux, mais aussi et surtout aux
réalités sociales locales, nous avons procédé à un échantillonnage probabiliste
de 50 écrans de pages tous profils confondus (homme ou femme, journalistes,
organisation ou hommes politiques).

II.2.3 – La technique de collectes de données

La recherche documentaire a été complétée par une observation in situ sur les
réseaux sociaux (facebook, youtube et twitter). Les données collectées sont des
verbatim (propos et expressions écrites ou publiés).

II.2.3.1 – L’observation participante

Observer, c’est vivre avec ou du moins, être proche, à portée ; c’est regarder de
près (Combessie, 2007). Pendant plus de cinq (5) ans (durée de notre utilisation
des médias sociaux jusqu’à ce jour), il nous a été possible d’observer non pas
seulement en tant qu’utilisateur mais aussi en tant que sociologue, les évolutions
intervenues dans l’univers en ligne au Togo: l’engouement à partir de 2010,
l’arrivée de politiques ou de contenus politiques consacrés au Togo, etc.
Mais l’analyse qualitative des écrans de pages est une méthode rigoureuse; ainsi
notre observation n’a pas été juste empirique mais s’est basée sur des consignes
en lien avec l’étude (Alami et al, 2009). Nous nous sommes inscrites à des
espaces sociaux numériques, avons « like » ou « followed » des pages et liens:
forum, page facebook ou youtube, twitter, initiés par des organisations ou des
individus qu’il soit de caractère politique ou social.

Dans chaque situation, nous avons relevé les propos échangés, les sujets de
débats qui interpellent plus, les différents degrés de participation active ou
passive.

63
II.2.3.2 – Identification et justification des variables

Etape importante dans toute recherche en sciences sociales, la sélection des


variables contribuent à rendre compte et ou à expliquer les faits observés. Une
variable est un facteur pouvant être mesuré et qui peut prendre une ou plusieurs
propriétés ou valeurs différentes. On distingue deux variables dans la présente
étude :

- la variable dépendante est l’élément ou le phénomène qui varie en


fonction d’un autre ou de plusieurs, c’est la variable à expliquer.
- les variables indépendantes ou variables explicatives sont la cause qui
conditionne l’existence du fait observé.

II.2.3.4 – Variable dépendante

Dans le cas de la présente étude, la variable que l’on cherche à expliquer est : la
participation politique des internautes Loméens, à travers les médias sociaux.

II.2.3.5 – Les variables indépendantes

2.2.3.5.1. Variables indépendantes démographiques

- Age : caractéristique essentielle dans l’étude des pratiques numériques, elle


permettra de mesurer les relations entre l’âge et l’utilisation des médias
sociaux et un intérêt quelconque pour la politique.

- Sexe : il est unanimement admis que selon le genre, l’intérêt pour les médias
sociaux11 et pour la politique diffère ((Danioué, 2007). La variable sexe
permet de mettre en exergue les informations provenant des deux sexes et de
comprendre parmi les deux sexes, ceux qui s’activent le plus sur les médias
sociaux en s’intéressant ou non à la politique.

11
_Notre recherche pour l’obtention de la maitrise portait sur la « fracture numérique de genre au Togo, étude
de cas à l’Université de Lomé » sous la direction de Danioué Tamasse Roger.

64
- Statut matrimonial : l’engagement politique est tributaire du statut
matrimonial et du soutien du partenaire (Kaufmann, 1993).
- Statut professionnel : Il est démontré que certaines professions prédisposent
à l’entrée en politique notamment les professions de haut niveau
(enseignants, avocats, médecins …) (Danioué, 2010) tributaires d’un niveau
d’instruction élevé.
- Religion : certaines confessions religieuses interdisent l’engagement
politique de leurs membres alors que certains comme l’église catholique
encourage l’engagement civique de leurs ouailles.
- Le niveau d’instruction : le niveau d’instruction déterminerait à certains
égards l’utilisation des réseaux sociaux et un intérêt pour la politique
(Bourdieu, 2000) (Danioué, 2001).

2.2.3.5.2 Variables indépendantes contextuelles

- L’utilisation des réseaux sociaux : cette variable est importante car elle
permet d’expliquer le lien de cause à effet entre politisation et média sociaux.
- La durée d’utilisation des réseaux sociaux : toute insertion dans un espace
s’inscrit dans le temps, lorsque la durée d’utilisation est plus grande, plus
l’internaute, s’intéresserait à d’autres domaines que ses premiers loisirs.
- Intérêt personnel ou familiale pour les questions politiques : pour
Bourdieu (2000) la compétence politique est tributaire du capital social, de
l’habitus.
- Réseaux politico-sociaux en ligne : les relations qu’établissent les
internautes en ligne détermineraient à certains égards leur engagement
politique.
- Engagement politique conventionnelle ou en ligne : la politisation
débouche nécessairement sur un engagement politique, qu’elle soit
conventionnelle (à travers les cadres traditionnelles) ou non.

65
II.2.3.5 – Identification des indicateurs

- Production de contenus politiques


- Le niveau de connaissances politiques.
- l’intérêt pour les posts politiques (Consultation de pages consacrés aux
questions politiques, Fréquence d’utilisation des médias sociaux pour des
actions politiques…)
- Engagement politique (Participation aux réunions politiques …)
- Abonnements à des liens politiques en ligne

II.3 – Dépouillement et traitement des données

Les données recueillies ont été manuellement traitées de façon minutieuse.


D’abord s’est effectuée la transcription littérale des entretiens. Ensuite, le
découpage thématique : il s’est agit de dégager les grands thèmes à partir du
grille d’entretien et de découper les données selon les thèmes et ceci d’un écran
de page à un autre. Un recoupement des différents points de vue issus des
observations a été ensuite effectué avec les données recueillies par
documentation, puis s’en est suivi l’analyse et l’interprétation.

II.4 – Difficultés rencontrées

Bien de difficultés ont jalonné le cheminement de cette étude et n’ont pas permis
d’étancher notre soif sociologique. Nous eûmes des difficultés à trouver une
riche et pertinente documentation sur les enjeux politiques des médias sociaux
en Afrique en général et plus particulièrement sur la ville de Lomé: il apparait
que le continent et les chercheurs africains semblent subir passivement les
transformations et dynamiques générées par l’Internet. Toute recherche dépend
effectivement de son contexte ; ainsi le délai imparti, le faible débit de la
connexion Internet et la frilosité des internautes ne nous ont pas permis
d’approfondir certaines questions. Nous n’avons pas pu ainsi circonscrire tous

66
les éléments et aurions aimé mener des entretiens qu’ils soient individuels ou
collectifs. Il est à signaler aussi, que les pages sont pour plus de la moitié
faiblement actualisées et beaucoup d’internautes utilisent des pseudos et ne
fournissent que partiellement des données sur leur profil.

De plus, en raison d’une condition physique liée à notre féminité, il a été


particulièrement difficile de faire ces recherches dans des conditions optimales.
Malgré ces difficultés, l’entrecroisement des écrans de pages observés avec la
documentation, ont permis de premiers résultats très intéressants que nous
espérons approfondir dans le cadre d’une thèse.

67
DEUXIEME PARTIE

PRESENTATION ET COMMENTAIRE
DES RESULTATS PROVISOIRES
DE LA RECHERCHE

68
CHAPITRE TROISIEME
PRESENTATION DU PLAN PROVISOIRE DE LA
THESE

I – PLAN PROVISOIRE DE LA THESE

THEME : MEDIAS SOCIAUX ET DEMOCRATIE EN AFRIQUE. ETUDE DE


L’INCIDENCE DES RESEAUX SOCIAUX SUR LA VIE POLITIQUE AU TOGO

I – STRUCTURE PROVISOIRE DE LA THESE


Ce plan provisoire se structure en seize chapitres organisés autour de cinq
grandes parties. Dans chaque chapitre, seront abordés des aspects spécifiques
relatifs aux objectifs de la recherche.
Introduction générale
Première partie : La sphère socio-économique, médiatique et
politique du Togo
Introduction de partie
Chapitre premier : Environnement géographique et culturel
Section 1 : Cadre physique
Section 2 : Démographie et histoire
2.1 : Histoire du Togo
2.2 : Eléments démographiques
2.3 : Répartition géographique de la population
Section 3 : Environnement culturel
3.1 : Les différents regroupements socioculturels
3.2 : Les formes d’expression au Togo
Chapitre deuxième : Environnement socio-économique et éducatif
Section 1 : Activités et infrastructure socio-économiques
Section 2 : Situation économique générale du Togo

69
Section 3 : Environnement éducatif
3.1 : Aperçu sur les différents systèmes éducatifs du Togo
3.2 : Le système éducatif et ses effets sur les apprenants
Chapitre troisième : Aperçu général de l’évolution de la vie politique
Section 1 : De la colonisation à l’indépendance
1.1 : Période de 1946-1956 : Quelle genèse de la participation
politique ?
1.2 : Période d’autonomie de 1956-1960
1.2.1 : Evénements de 1956-1958
1.2.2 : Evénements de 1958-1960
Section 2 : De l’indépendance à nos jours
2.1 : La première République et sa division politico-identitaire
2.2 : Echec de l’expérience de restructuration du multipartisme
sous la deuxième République : 1963-1967
2.3 : Etat d’exception politique et la troisième République :
1967-1990
2.3.1 : Etat d’exception politique : 1967-1980
2.3.1.1 : Vide politico-juridique : 1967-1969
2.3.1.2 : Vide juridique : 1969-1980
2.3.2 : Le Togo sous la troisième république
2.3.2.1 : Période poste démocratique : 1980-1991
2.3.2.2 : Période transitoire à la démocratie :
1991-1993
2.3.2.3 : La quatrième République et l’exercice
démocratique
Chapitre quatrième : Environnement socio-médiatique
Section 1 : Les médias traditionnels
1.1 : Genèse et évolution des médias au Togo
1.2: Synopsis des médias traditionnels
1.3 : Les médias traditionnels et la politique au Togo
Section 2 : Les médias en ligne
2.1: Genèse et évolution des médias en ligne au Togo
2.2 : Synopsis des médias en ligne
2.3 : Bref aperçu de la blogosphère
Conclusion de partie

70
Deuxième partie : Internet au Togo
Introduction de partie
Chapitre cinquième : L’économie politique de l’Internet au Togo
Section 1 : Historique de l’Internet au Togo
Section 2 : Aménagement numérique du territoire
Section 3 : Les acteurs
Section 3 : Les politiques nationales en rapport aux textes régionaux en
Afrique
Chapitre sixième : Appropriation sociale de l’Internet
Section 1 : Les usages
Section 2 : Dynamique d’usages au niveau local rural et urbain
Chapitre septième : Facteurs explicatifs des usages de l’internet au Togo
Section 1 : Facteurs historiques
Section 2 : Facteurs sociaux
Section 3 : Facteurs économiques
Section 4 : Facteurs géographico-structurels
Section 5 : Enjeux électoral
Chapitre huitième : Appropriation politique de l’Internet
Section 1 : Les partis politiques et le parlement
Section 2 : les journalistes et les bloggeurs
Section 3 : la société civile et les citoyens
Conclusion de partie
Troisième partie : Sémantique de la participation politique en ligne
Introduction de partie
Chapitre neuvième : Les contours de la participation politique en ligne
Section 1 : Généralités sur la participation politique
1.1 : Définition de la participation politique
1.2 : Importance de la participation politique
1.3 : Potentiel de base à la participation politique en ligne
Section 2 : Extensions de la participation politique
2.1 : Formes de participation politique
2.2 : Champ de la participation politique
2.3 : Formes de démocratie
2.4 : Participation et démocratie
Section 3 : L’Occident et l’Afrique sur le chemin de la participation

71
politique en ligne
3.1 : L’internet et la participation politique en Occident
3.2 : Participation politique en Afrique en ligne
Chapitre dixième : Structure et comportements politiques de la population
Section 1 : Variables et indicateurs biologiques face à la participation et
l’orientation politique
1.1 : Question d’âge
1.2 : Question de sexe et genre
Section 2 : Variables et indicateurs socio-économiques face à la
participation et l’orientation politique
2.1 : Occupation professionnelle
2.2 : Ressources économiques
2.3 : Ressources éducatives
2.4 : Idéologie et religion
2.5 : Origine ethnique
2.6 : Situation familiale
Section 3 : Variables et indicateurs géographiques face à la participation
et l’orientation politique
3.1 : Milieu de vie sociale
3.2 : Milieu de vie spatiale
3.2.1 : espace rural
3.2.2 : espace urbain
Chapitre onzième : Acteurs de la participation politique au Togo
Section 1 : Partis politiques
1.1: Genèse et base identitaire des partis politiques au Togo
1.2 : Synopsie et rôle des partis politiques
1.3 : Représentativité numérique des partis politiques par choix
électoral au Togo
1.3.1 : Election présidentielle
1.3.2: Exploit des partis politiques aux différentes élections
législatives
Section 2 : OSC et groupes de pression dans leur rôle pour la
démocratisation du Togo
Section 3 : L’armée et la politique
Section 4 : Communauté internationale et la vie politique au Togo

72
Section 5 : Les journalistes et les bloggeurs dans leur rôle pour la
démocratisation du Togo
Chapitre douzième : Partis politiques, groupes de pression et gestion
du pouvoir
Section 1: Représentation des partis politiques dans les différentes
institutions de l’ère démocratique
Section 2 : Représentation des OSC et groupes de pression dans les
différentes institutions de l’ère démocratique
Section 3 : Représentation des médias dans les différentes
institutions de l’ère démocratique
Conclusion de partie
Quatrième partie : Ultime aboutissement de la participation
Politique en ligne au Togo : le débat politique
Introduction de partie
Chapitre treizième : Acteurs de la participation politique en ligne au Togo
Section 1 : Partis politiques
Section 2 : OSC et groupes de pression dans leur rôle pour la
libéralisation de l’espace public du Togo
Section 3 : L’armée et la politique
Section 4 : Communauté internationale et la vie politique au Togo
Section 5 : Les journalistes et les bloggeurs dans leur rôle pour la
libéralisation de l’espace public du Togo
Chapitre quartozième : Type d’espaces discursives en ligne et composition
identitaire des participants
Section 1 : les médias traditionnels en ligne et les participants
Section 2 : les réseaux sociaux de contenu et les participants
Section 3 : les réseaux sociaux de contact et les participants
Chapitre quinzième : Appartenance identitaire en ligne et orientation
politique
Section 1 : Identité individuelle et orientation politique
Section 2 : Identité collective et orientation politique
Section 3 : Raisons de la mobilisation politique en ligne des citoyens
Chapitre seizième : Structure et comportements politiques de la population
internaute
Section 1 : Variables et indicateurs biologiques face à la participation et

73
l’orientation politique
1.1 : Question d’âge
1.2 : Question de sexe et genre
Section 2 : Variables et indicateurs socio-économiques face à la
participation et l’orientation politique
2.1 : Occupation professionnelle
2.2 : Ressources économiques
2.3 : Ressources éducatives
2.4 : Idéologie et religion
2.5 : Origine ethnique
2.6 : Situation familiale
Section 3 : Variables et indicateurs géographiques face à la participation
et l’orientation politique
3.1 : Milieu de vie sociale
3.2 : Milieu de vie spatiale
3.2.1 : espace rural
3.2.2 : espace urbain
Conclusion partielle
Conclusion générale
Bibliographie
Annexes

74
CHAPITRE QUATRIEME
PRESENTATION ET COMMENTAIRE DES RESULTATS
PROVISOIRES DE LA RECHERCHE

Toute recherche est tributaire de son contexte. La collecte de données n’ayant


permis de recueillir que des données qualitatives issues de l’observation directe
des écrans de pages ; ce chapitre sera mis à profit, pour réunir, résumer, sous
forme narrative ces données afin de comprendre le phénomène à l’étude. Les
données seront analysées par rapport aux hypothèses de recherche. Dans un
premier temps, il a été question de faire un état des lieux. A partir de ces
résultats, sera présentée la production de contenus politiques en ligne puis les
dynamiques de participation et de mobilisation politique des citoyens. Et enfin
les enjeux politiques et identitaires des réseaux sociaux.

I – Etat des lieux de l’appropriation politique des réseaux sociaux

Jacques Lagroye définit les processus de politisation, comme la « requalification


des activités sociales les plus diverses, requalification qui résulte d’un accord
pratique entre des agents sociaux enclins, pour de multiples raisons, à
transgresser ou à remettre en cause la différenciation des espaces d’activités »
(Lagroye, 2003)

Comme relevé dans la problématique, l’appropriation politique des médias


sociaux est sans cesse croissante. Que ce soit les institutions de l’administration
publique (politique, économique, culturelle, juridique), les médias (presse écrite,
radio, tv), partis politiques, hommes politiques, mouvements politiques, ou de

75
simples citoyens, tous ont un site web avec un espace de discussion ou un lien
facebook, youtube ou twitter.

I.1 – Politiciens et Partis politiques

Au Togo, l’utilisation massive de l’Internet à des visées politiques a été amorcée


à partir des élections présidentielles de 2010 où de nombreuses associations
affiliées au partis politiques, mais aussi majoritairement au président sortant, ont
investi la toile afin d’attirer un public autre. La majorité des politiques, ont
commencé à véritablement investir la toile et les réseaux à partir de 2011.

I.1.1 – Les partis politiques parlementaires

Tous les quatre (4) grands partis politiques parlementaires, ont au moins un
compte par réseau social : facebook majoritairement, mais aussi sur twitter. Pour
certains partis, le premeir pas sur la toile commence par les réseaux sociaux,
pour ceux qui ont des sites web, ces sites sont souvent dotés d’espaces forums,
mais proposent toujours des liens avec les comptes sociaux.

12
L’Alliance Nationale pour le Changement (ANC) : depuis sa création,
l’ANC a fait de l’occupation de l’espace public virtuel ou physique, son mode
de mobilisation. Le site officiel du parti ANC (www.anctogo.com), comprend
un lien vers les comptes officiels du parti sur twitter et facebook. De plus, le site
est également relié avec des blogs rédigés par des partisans du parti. Les blogs
ne sont pas officiellement affiliés au parti. L’ANC est très active sur les réseaux
sociaux : un nombre d’activistes du Togo et de la diaspora (anctogo-accra ;
anctogo-Allemagne ; anctogo-hong kong ; jcd patriotes anc, etc...), s’activent à
promouvoir le parti et ses actions. Communiqués officiels, déclarations, post

12
_« La création de l’ANC met ainsi fin à la lutte de leadership engagée au sein de l’UFC suite à la décision unilatérale de
Gilchrist Olympio, le 27 mai 2010 de rentrer dans le gouvernement du RPT contre l’avis du Bureau National du Parti »
(Source :www.anctogo.com). Depuis les élections de 2010, l’ANC, mobilisé au sein de pluesieurs corporations organise
chaque samedi, ses militants et sympathisants, dans les rues de Lomé, pour protester contre les résultats des dits élections et
pour dénoncer un certain nombre de forfaits politiques et démocratiques.

76
vidéo ou texte, etc. Tout autant, que dans l’espace public traditionnel, la
mobilisation en ligne, se fait en même temps, mais la panacée avec les médias
sociaux est que le débat se poursuit après les activités.
En termes de statistiques, l’ANC se présente ainsi :
- Facebook (page officiel) : 108 abonnés, 10 partages ;
- Twitter (page officiel) : 444 followers, 8 following, 1,102 tweets13.
- You tube : Le parti ne dispose pas de chaine télé sur youtube, mais les
comptes togovi, togovision, et autres bloggeurs, journalistes « affiliés » etc.,
comblent par leurs post vidéo sur youtube, ce vide.
Depuis, juin 2012, le compte facebook du parti, n’a plus généré de posts, le parti
travaille davantage à son compte twitter et son site web. La mobilisation en ligne
sur facebook se fait à travers le compte du responsable à la communication du
parti.
Le Président du parti, dispose d’un compte officiel sur facebook et d’autres
comptes, crées en son nom. Son compte twitter qu’il avait depuis 2010, avec son
ancien parti UFC, demeure le seul qu’il a et n’a plus été actualisé depuis, mai
2010. Les autres membres du bureau, ont également des comptes sur les réseaux
sociaux, mais uniquement sur facebook. Le verbatim en accueil sur la page
facebook, du président du parti ANC se présente ainsi :
« Mon ambition est de Réaliser les aspirations profondes du Peuple
Togolais, cristallisées Autour d'une quête permanente de solidarité et
de justice, de démocratie et de liberté, de développement économique
et progrès de social" Jean-Pierre
Activités : PRESIDENT DE L'ANC Député à l'Assemblée nationale
Musique préférée : Musiq Africaine, Jazz, Blues, Musique classique »

13
- Followers : vos abonnés (personne ou compte qui suivent ou sont vos activités sur twitter) ; following : vos
abonnements, (vos centres d’intérêts, ou comptes twitter dont vous suivez les informations) ; tweets : vos post ou vos écrits.

77
L’Union pour la République (UNIR) 14 : Dernier né des partis parlementaires,
le parti de la mouvance présidentielle actuelle, a une faible utilisation du web
2.0. Il ne dispose ni de site web officiel, ni de compte twitter, mais est très actif
sur facebook : un compte officiel (www.facebook/unir/page) une page facebook
tv, et des pages facebook de démembrements de la diaspora (unir isere-
grenoble ; unir suisse ; unir Allemagne…) et des communautés de pages crées
(unir amessiame togo...). La page facebook officiel, renvoie un lien avec le site
officiel de la présidence et reprend les articles des sites officiels du
gouvernement. Le parti a tenté d’organiser un congrès virtuel (le 27 avril) qui
n’a pas généré de post. En termes de statistiques, UNIR se présente ainsi : page
tv (1426 j’aime, 2 partages) ; page officiel : 2622, j’aime, 14 partage.
Mot d’accueil : « Bienvenu sur la page de UNIR. Ensemble, main dans la main,
bâtissons notre pays cher à nos cœurs. ».
Le Président du parti, (président actuel de la république) dispose de comptes en
tant que politicien, mais aussi comme Président de la République. Seuls deux
autres hauts responsables du parti ont des comptes facebook, mais pas en tant
que politicien.
L’Union des Forces du Changement (UFC): le site web, du parti est très
développé et très fréquemment actualisées: web radio, vidéo en streaming,
bulletin d’information, dépêche, lien vers des sites du Togo et d’ailleurs…Mais
il n’y a pas de lien vers des réseaux sociaux. Le compte facebook du parti a été
généré automatiquement par facebook, de par l’intérêt des internautes, mais n’a
pas été depuis lors crée. Le Président du parti dispose d’un compte officiel
facebook et de plusieurs autres en son nom. Le compte twitter @GilOlympio
n’a plus été actualisé depuis avril 2010 ; son profil se présente ainsi :
« Politicien Togolais, Président de l'Union des Forces pour le
Changement (UFC), opposant historique au régime dictatorial du
Président Gnassingbé. Lomé, TOGO · gilolympio.com »

14
_ UNIR a été crée le 14 avril 2012 à Atakpamé par Faure Essozimna Gnassingbe, après dissolution du Rassemblemnt du
Peuple Togolais (RPT) dont il était le président en exercice, le même jour.

78
Le Comité d’Action pour le Renouveau (CAR) : est quasi inexistant sur les
réseaux sociaux. Pas de site web, de compte twitter officiel, ni pour le parti et les
responsables du parti. Le compte facebook du parti compte quinze(15) j’aime et
n’est pas été actualisé depuis 2011.

1.1.2 Les partis extra parlementaires

La vie politique togolais est très florissant, on estime dans le registre du


Ministère de l’Administration territoriale, à près d’une centaine les organisations
et associations, enregistrés en tant que parti politique. Nous nous sommes
intéressés à quatre d’entre eux, hors hémicycle.

L’Organisation pour Bâtir dans l’Union, un Togo Solidaire (OBUTS) : Crée


en 2011, le compte facebook du parti comporte 8 j’aime et n’a jamais généré de
post. Paradoxalement le compte des structures délocalisées comme OBUTS
ATAKPAME et OBUTS COTE D’IVOIRE sont très développés,
perpétuellement actualisées. De même, le Président du parti est très actif sur les
réseaux sociaux : un compte officiel facebook (3822 j’aime), un compte twitter
(1052 followers) et d’autres comptes non officiels sur facebook. Le parti dispose
d’un site web : www.obutsonline.org.

La Convention des Peuples Démocratiques Africains (CDPA) : le compte


facebook du parti compte 11 j’aime et n’a plus été actualisé depuis 2012. Le
parti n’a ni de compte twitter, ni de site web. La secrétaire générale actuelle du
parti par contre a une page facebook ; 124 abonnes et 75 amis. Cette page sert en
somme de page officiel et reprend les informations d’organisations partenaires
(ANC, CST, Arc en Ciel…).

Le Parti Socialiste pour le Renouveau (PSR) : le parti a un compte twitter et


un compte facebook, très actif. Les responsables du parti sont présents de

79
« nom » sur les réseaux sociaux. Le compte twitter@psr_togo détient 278
followers, 15 followings et 220 tweets. Texte d’accueil se présente ainsi :

« REBATIR L'ESPOIR. POURQUOI vs vs laissez exclure?


La DEMOCRACIE est le respect 2 votre CONSTITUTION
& la POLITIQUE est la gestion des affaires 2 votre cite ».

Le Nouvel Engagement Togolais (NET) : Parti du statut de bloggeur, le


président du parti politique le NET (Nouvel Engagement Togolais), affichait
fièrement en 2012, son entrée dans le Wikipédia et moins d’un an plus tard, ces
dix mille (10.000) abonnés et plus de 500 partages de sa page facebook. Des
réseaux sociaux, il a réussi à fédérer un certains nombre d’internautes autour de
lui avant d’annoncer son entrée en politique. Page facebook, twitter, wiki, blog,
les médias sociaux sont intrinsèques à la communication du Président du NET.
Un groupe fermé a été crée en vue de définir un cadre de discussion en ligne
avec les membres du parti. La page facebook du NET, détient 814 membres ; le
texte d’accueil traduit le caractère fermé et privé : « ce groupe est destiné aux
membres et sympathisants du NET afin d’être informé des activités du NET ».

Les femmes politiques ont très faiblement présentes ; sur les six (6) présentes
sur la toile, seule une (1) d’entre elles, est très active sur les médias sociaux en
l’occurrence twitter. Elle ne participe pas au débat politique (ne génère pas des
posts politiques ou contribue) mais est abonnée à toutes les pages et comptes de
son bord politique et des bords opposés.

On en a recensé près d’une dizaine de comptes pour un seul homme politique,


aussi des comptes de politiciens diffusant seulement des images
pornographiques: surement, des comptes piratés à moins que la non maitrise soit
si poussée chez les community manager des politiques

80
I.2 – Parlement et gouvernement

Nombre de gouvernements et de parlements surtout en Occident, ont


aujourd’hui leurs comptes Facebook, Twitter, et leur chaine youtube. Au Togo,
la politique d’e-administration engagée depuis 2011, a permis à tous les
ministères d’être dotés un site web. Mais seules deux ministères disposent d’un
lien facebook et quelques directions techniques de ministère ont leur compte
twitter.

Les députés, représentants du peuple occultent les opportunités des réseaux


sociaux pour communiquer avec leurs élus, ils y sont quasi-inexistants. Le site
web du parlement ne dispose pas d’espace forum.

Le site web de la présidence dispose d’un espace forum et le compte twitter


affilié n’a jamais généré de tweet, ni de followers ; il n’y a pas de compte
facebook.

Le Président de la République en plus des multiples comptes Facebook créés


par ses partisans (Faure must stay, convergence faure …) et ses détracteurs
(faure must go, togo libre, faure dégage…), dispose d’un compte twitter officiel
et d’un compte facebook, relié entre eux. Il semble que le premier responsable
semble privilégier la communication par les réseaux sociaux15. Le compte
@FGNASSINGBE du Président de la République a son actif « 481 Tweets 6
Following 1,738 Followers »

Une forte proportion de comptes blancs aux noms des membres du


gouvernement. Seuls deux (2) ministres disposent d’un compte facebook et
twitter mais qui n’ont jamais été utilisés.

15
- Pour exemple, des incendies qui ont ravagé les grands centres commerciaux du pays, le président de la
république a twitté sa compassion à ses 512 followers, au lieu de faire un communiqué ou un message de
compassion par les médias traditionnels.

81
La ville de Lomé dispose quant à elle d’un compte facebook et d’un site web et
plusieurs comptes privés affiliés (ici Lomé, Lomévi, …). Les premiers
responsables de la ville ou de la préfecture du Golfe n’existent pas sur les
réseaux sociaux.

I.3 – Journalistes et bloggeurs

Les journalistes traditionnels, majoritairement de la presse écrite (forum de la


semaine, focus info, liberté,..) et quelques rares de la radio (radio-gameli),
investissent les réseaux sociaux. Si indépendamment, les journalistes sont
présents eux même sur la toile, leurs organes d’origine sont peu présents et
essentiellement les organes de presse. A part les sites web, les médias officiels
(togopresse, radiolomé, tvt) n’interagissent pas en ligne ; toutefois,
republicoftogo site web officiel reprend le journal des deux télés officielles.

Il faut signaler près d’une dizaine de médias en ligne, qui sont principalement
tournés vers l’information tous azimuts, mais et surtout vers le débat politique :
icilomé, savoirnews, togocity, liberté, avenue 228, (…)

La blogosphère togolaise est très peu animée mais en croissante progression ;


elle est animée par des journalistes de formation mais aussi des simples
activistes ou blogguers. Près d’une vingtaine de journalistes à majorité free
lance, outre leurs blogs, ont trouvé en les réseaux sociaux, une plateforme
d’expression. Qu’ils soient proche de l’opposition ou du parti au pouvoir,
administrés par des résidents ou des togolais de la diaspora plus de la moitié des
sites web et de blogs et de mini-blogs (sur twitter) à majorité sont politiquement
engagées. Il est vrai que l’actualité au Togo est dominée par la politique.
D’une façon générale, cet engagement citoyen des blogueurs togolais est
explicite, à l’image de Philip Atale qui introduit son blog Philoticus, alias «
Citoyen du monde, le Togo est ma patrie », comme suit :

82
« J’écris sur ce blog mes états d’âme sur ce qui se passe au Togo et en
Afrique en général, sans autre ambition que de dénoncer la forfaiture
et d’encourager l’excellence, le tout dans l’affection (…) pour ce petit
pays riche de ses hommes et de la variété de son paysage. »

Plus explicite encore, Wolali Ahlijah énonce:

« Le droit à l’expression, la liberté de pensée sont mis en orbite sur la


planète blog. Mais pour moi, écrire mon blog, c’est partager mes
idées avec le monde, c’est faire l’exercice de la démocratie et
construire l’expérience de la citoyenneté. »

Grâce à youtube, un support vidéo accompagne les post, mais là encore avec une
forte présence de l’opposition. On peut citer entre autres bloggeurs sur youtube :
le Togovi, Togovision, Togovox, MarcusDG100, raoulgbédji, (…) ; sur
facebook : rumeurs du Togo, avenue 228, rue 228 (…) ; ou sur twitter:
@philoticus, @togocouleurs,@africainlive, @Togo que faire, @radiogameli
(...).
Il est à signaler une notable présence féminine parmi les journalistes mais elles
sont faiblement actives. L’analyse de la blogosphère révèle une forte
prépondérance politique.

I.4 – La société civile et les citoyens

L’analyse de la société civile est assez délicate, autant la frontière avec le


politique est très flouée (mais là n’est pas notre intérêt) ; notons simplement que
plusieurs associations et collectifs politiques et de défenses des droits de
l’homme investissent les réseaux sociaux. Ces groupes sont soit des groupes
ouverts ou fermés (il faut s’identifier nommément et attendre un accord
d’adhésion). Parfois le message d’accueil est assez explicite :
« Tous les Togolais désireux de sortir leur patrie de la dictature
militaro-gangster du régime RPT sont appelés à s'unir derrière le
Collectif "Sauvons le Togo".
www.facebook/collectifsauvonsletogo.com.

83
A part les associations et regroupements politiques, la majorité des associations
de la société civile sont timides à utiliser les réseaux sociaux. Toutefois, on peut
citer amesty togo, qui mobilise sur facebook.

Les citoyens se servent des médias sociaux pour communiquer entre eux (se
faire des amis, partager des intérêts, photos, vidéo). Certes au Togo, on est loin
des groupes comme « They work for you » au Royaume-Uni qui permet aux
internautes de se tenir au courant des discours et travaux des décideurs et de leur
demander des comptes ; mais une avancée notable a été engagée, depuis en
termes de communauté politique en ligne. Qu’ils soient fermés ou ouverts, ces
groupes, majoritairement de facebook, servent à discuter politique. Souvent c’est
le ou les initiateurs du groupe ou de la page qui alimentent le débat avec des
sujets d’actualité d’ici ou d’ailleurs. Parmi les groupes à connotation politique,
on peut citer : fan gilbert bawara ; kabyè révolté ; diaspora togolaise pour
l’alternance avec jean pierre fabre ; convergence faure ; f.a.u.r.e doit partir ;
étiamé, élections transparentes au Togo, comment faire pour y parvenir ; ceux
qui disent non à l’ombre….
Les communautés créées sont parfois ponctuelles (boycott de la chanteuse aicha
koné) ou pérennes. Dans certains cas, les groupes n’ont pas d’objectifs
politiques premiers, mais faute d’administration, ils se font "infiltrer " par des
membres politiquement engagés et par surcroit très actifs. C’est le cas entre
autres de la page facebook « plumes fraiches », communauté d’information et de
posts culturels d’écrivains et de poètes mais devenue une tribune de groupes
politiques.

II– Participation politique

II.1. Un nouvel espace public togolais

L’occupation de l’espace commun, comme moyen d’expression politique est


inhérente à la vie politique togolaise depuis la colonisation (Gayibor, dir, 2005).

84
Certains politiques togolaises semblent ignorer les médias sociaux, par contre
d’autres regroupements politiques préfèrent les utilisent du fait qu’ils sont une
arène médiatique, moins chère plus libre, plus rapide et directe pour toucher
l’électorat. De véritables joutes s’organisent parfois sur certains forums; comme
si chaque camp est à l’affût des posts de l’autre bord pour y répondre. Un
internaute disait à cet effet à la suite d’un échange de commentaires facebook :
« Tout acte de violence est condamnable Je vous invite à être plus objectif et impartial dans
vos prises de positions »

Parmi, la population d’internaute, un engouement notable se lit à l’analyse des


posts politiques. Un chef de parti disait à cet effet dans une de ses publications :

« Hier, j'ai publié deux actualités sur cette page, qui ont généré
environ 15 000 lectures, sans compter les reprises de cette actualité
dans des médias plus traditionnels. A l'échelle d'internet togolais, c'est
énorme, et confirme ce que nous savions déjà, les médias sociaux
démocratisent l'accès au public. Plusieurs analystes pensent
réellement que les médias sociaux ont réellement joué à l'élections de
Barack Obama pour son premier mandat. Malheureusement au Togo,
nous les leaders nous n'en utilisons pas encore efficacement ces voies
de dérivation. Merci à vous, qui avez partagé, commenté et aimé ces
actualités, qui concernent ce que nous avons de plus précieux: la
dignité ».

D’autres Loméens se connectent pour avoir ou compléter des informations


citoyennes auxquelles, ils ne trouvent pas de répondant dans la vie active:

 Pourrez-vous suggérer au gouvernement les voies et moyens pour ne


plus tomber dans ce chaos de grève sur le Campus?
 Quelqu'un peut me dire à quand l'ouverture de nos écoles???on est
impatient nous les élèves...
Les contributions ou réponses aux posts dépassent rarement le 1/3 des lecteurs ;
la majorité des internautes préfèrent " liker" (facebook) ou "retweeeter" (twitter)
au lieu d’argumenter.

Un nouveau type de militantisme également se profile :

 « J'aimerais être informé et participer aux activités. Informez


moi.Merci »

85
 Ce serai simple et intéressant si on pouvait avoir vos formulaires
d'adhésions en ligne sur le net.
 j souhaite devenir un membre actif du parti
 je souhaite êtres un membre actif dans le parti;si vous avez besoin de
moi;contacter moi:
 pourriez vous nous donner les modalités d'adhésion s'il vous plait.
 quel son les condition pour etre menbre
 j'aimerais savoir vs possèdez des cellules dans les quartiers afin que les
puissent s'inscrire ?

Ces posts collectés proviennent d’internautes de moins de 35 ans. Il semble


qu’une certaine frange (jeune) de la population internaute, est plus encline au
militantisme non-conventionnel.
Le débat généré que ce soit pour informer, recueillir des informations ou
simplement échanger aboutit rarement au consensus. Chaque interlocuteur
campe sur ses positions en enfumant ou en dénigrant l’autre souvent par la
répétition d’un même post lors d’une discussion.

 Des exemples pour eclairer tour le monde Sur la consitution


du fichier électoral votre gymnastique ne tient pas la route
 La construction #Togo n'est pas l'affaire d'un seul homme mais
de tous ses fils Et cela est possible malgré les coups
 toujours le même discours
 Dans kel pays 1 partie 2 la population ne connaît
malheureusement pas 2 difficulté? #Togo les choses
s'améliorent #FEG
 tu insinue que la démocratie n est pas bonne pour les USA car
le congret est républicain ?

A chaque post, l’on peut être amené à discuter politique. Ainsi, dans l’exemple
de X qui posta une photo de formation des agents de protection des eaux et
forets ; voici le débat qui s’en suivi :
A : eh! c'est Djindjawid ou quoi?
B : Tu serais très utile au Mali
C : je ne te souhaite pas cette guerre unitile! le terrosisme ne se
combat pas comme xa! un énémi presqu'invisible, idéologiquement
bien batis! viable dans le temps et très mobile dans l'espace! je t'aime
trop pour te souhaité cela! les mm erreur qu'en afganistan et irak!!!
D : C'est ki cet abogo sodja?lol
B : mais si nous ne le faisons pas qui le fera, vous croyez qu’en restant
indifférents les gens là ne vont pas venir chez nous ? C’est typiquement
togolais, alors qu’on est tous dans la même merde !

86
Ces échanges illustrent à quel point à chaque détour de conversation la politique
s’infiltre dans le débat : en quelques lignes, on vient de parler de la guerre au
Mali, de la guerre en Irak, mais aussi des ablodésodja (les soldats de
l’indépendance, qui semblait-il, semaient la terreur); une permanente perfusion
à la politique. Ce dernier y répond ou prend peur et se met à l’écart. Une
internaute répondant à son « ami facebook » Matthieu Ciscoskwy à propos de
ses publications de « peuples observateurs16 » « Arrete 2 ma envoye si dèsoleè je
ne ve plu. Ok »

2.2. La politisation des citoyens ordinaires

Il est difficile de tirer des conclusions d’une politisation à partir de l’analyse des
écrans de pages, car la socialisation est un processus pluriel et linéaire et la
détermination des causalités ne peuvent se faire à partir des informations
collectés sur la page d’un internaute sans les relier à un certain nombre
d’informations, pas souvent disponibles sur les comptes comme le niveau
d’instruction, le contexte d’études, le réseau familial, … Quelques données
collectées sur des écrans de pages peuvent à priori traduire une modification des
opinions :

 « il reste encore et je voterai peut être pour toi lol »


 Je commence par avoir de l'affection pour Faure Gnassingbe17. Ceci
traduit justement sa volonte d'asseoir la democratie au Togo. Bodjona,
Kpatcha, Agba Sow et consorts sont les obstacles a la democratie.

 Felicitation a Faure. Pour la premiere fois je vous apprecie. J'espere que cela ira
jusqu'au bout et atteindre d'autres caciques qui font la honte du Togo et qui
empechent le pays d'avancer vers le developpement.
personne n'est au-dessus de la loi, pourquoi Bodjona doit y etre?
 Les biens ke vs fait a la pop é a nos victimes maman je vs donne ma voie !
 J ve etr membr actif mai j su a Accra

16
_ www.peuplesobservateurs.com Blog, engagé auprès de l’opposition togolaise, qualifié par certains
d’extrémiste qui « infiltre les groupes » et les communautés pour diffuser des post anti-pouvoir :
17
_ Faure Gnassingbe, président actuel du Togo (2005-2010 ; 2010- à nos jours)

87
II – DISCUSSIONS ET LIMITES DE L’ETUDE

L’utilisation politique des médias sociaux est le terrain où sciences de


l’information et sociologie politique s’entrecroisent pour s’interroger sur les
nouveaux espaces de socialisation généré par le web 2. 0. Le questionnement de
la thématique, s’est appuyé sur une observation des écrans de pages et l’analyse
qualitative des post et échanges à caractère politique, étudiés à la lueur des
travaux sociologiques antérieurs.

Ainsi, cette étude sur l’analyse de la participation politique à travers les médias
sociaux, a permis de comprendre que ce médium, par la publicisation des
convictions individuelles ou d’organisations politiques, devient pas à pas une
arène politique et revitalise le débat public togolais. Empiriquement, l’analyse
causale du phénomène de politisation à travers les réseaux sociaux à Lomé, n’a
pas pu être mise en exergue, même si de nombreuses études l’ont relevé sous
d’autres cieux. Les constructions identitaires politiques à travers les médias
sociaux ne sont pas en soi, immédiatement apparentes aux yeux des internautes ;
elles sont simplement vécues ou adoptés par les internautes. Pour ceux qui sont
déjà engagés ou intéressés à la politique dans la vie active, les réseaux sociaux
constituent un moyen de plus d’atteindre un auditoire ou s’affirmer. Les
politiciens togolais, dans un souci de transparence et de rapprochement, se sont
mis aux réseaux sociaux pour mobiliser, convaincre les électeurs. Ils, croient et
estiment, que cette perfusion par réseautage est une aubaine de politisation
électorale. Mais devenu un champ politique, il importe de ne pas laisser
l’adversaire politique gagner du terrain. Parfois sur des pages, des liens vers des
sites des blogs où des pages entières sont consacrées au dénigrement de tel
acteur politique …

L’étude a pu relever les dynamiques et les interactions politiques que suscite le


web 2.0 togolais. Il est apparu que les espaces de discussion sur les médias

88
sociaux constituent des espaces publics et suscitent un engouement auprès de la
population internaute, majoritairement les jeunes. C’est ce que, Pasek et al.
(2009, cité par Wojcik, op.cit), affirme : « que les jeunes tirent davantage profit
que les autres catégories de la population des informations politiques recueillies
à travers la fréquentation de certains réseaux sociaux (Facebook plutôt que
MySpace), laquelle apparaît corrélée à un engagement civique plus fort que chez
les non utilisateurs ».

L’activisme sur les médias sociaux ne garantit pas forcément une adhésion
forte : en exemple, l’ANC dont le nombre d’abonnés au compte officiel
facebook est très faible (moins d’un millier) alors que facebook- UNIR crée mi
2012 récolte près de trois mille (3000) abonnés. Trois thèses peuvent être
présentés : la réglementation des télécommunications ou la crainte de
l’encardisation prévient, les internautes à afficher leur intérêt politique ; les
internautes ne s’intéressent que très peu à la politique ; le débat politique sur les
réseaux sociaux n’intéressent que peu les internautes togolais ; les profils
n’utilisant pas de pseudo hésitent à s’afficher dans l’espace public car, facebook
étant un cadre de socialité, la révélation des connotations politiques pouvant
crisper les relations, beaucoup d’internautes s’abstiennent.

Il est à noter que les partis essaient d’ouvrir des débats par des questions de
sociétés : « Qu’aimeriez-vous changer dans votre quartier et les mesures à
prendre ? » pour l’ANC ou pour l’UNIR : « que ferez-vous si vous étiez
président de la république ? ». Ces questions ne génèrent quasiment pas de
débat et les post sur les pages facebook sont majoritairement laudatifs du genre :

- « on vous soutient président, la lutte continue » ;


- « en avant nous allons construire le pays », etc.

La « réussite » du NET ouvre une entrée heuristique sur la problématique de


déterritorialisation des partis politiques et de la participation politique à Lomé.

89
Dans un contexte où le choix politique est dichotomique, ce parti a réussi à
imposer son statut de libre penseur sur l’échiquier politique sans que l’on affile à
un camp.

L’analyse du quota hommes versus femmes politiques démontre une faible


présence de femmes politiciennes sur les réseaux sociaux, ce qui pourrait se
comprendre puisque dans vie politique hors réseaux, les politiciennes togolaises
peinent à prendre la parole (Danioué, 2006).

L’utilisation tatillonne ainsi que le fait que des politiciens se retrouvent avec
plusieurs comptes rarement administrés et piratés (comptes pléthoriques,
comptes avec des publications pornographiques ou avec des posts
d’autodénigrement), s’explique par le fait que le web.2.0 demeure une
nouveauté et un luxe à Lomé qu’une seule frange de la population maitrise..

Les réseaux sociaux n’occupent pas encore une place aussi prépondérante dans
la politique togolaise, mais on a beaucoup progressé depuis 2010 dans
l’utilisation d’outils web et du média enrichi. Les réseaux sociaux sont utilisés
plus pour paraitre, informer mais aussi dans de rares cas pour véritablement
communiquer et mobiliser. Il y a une différence fondamentale entre les cas de
réussite (USA, Canada..) et l’utilisation et l’appropriation des médias sociaux en
politique au Togo. Ceci se situe par rapports aux objectifs poursuivis : alors que
majoritairement on se sert des réseaux sociaux pour fédérer en politique ( 35000
groupes de volontaires pro-Obama ont été crées dans sa campagne de 2008), les
Togolais eux utilisent les réseaux sociaux plus pour dénigrer la politique de
l’autre bord. Pour Pierre Rosanvallon (2006), ce n’est plus une dichotomie
démocratie électronique, démocratie représentative, mais une« contre-
démocratie », où les citoyens prennent véritablement les rênes.

C’est avant tout une question de mentalité, de « capabilité » numérique et


politique, la politique irrigue la vie des Togolais, mais la fracture numérique et

90
civique les prévient de s’impliquer en nombre. Pour preuve, le twitter, Blaise
Compaoré, 2883 alors que celui de Faure Gnassingbé peine aux mille abonnés.
De plus, en ces temps de crise, les politiques sont les premières victimes de la
protestation ambiante. Et les médias sociaux, de par leurs aspects viraux, sont
des médias choyés pour exprimer son mécontentement (l’autre média, 2012).

Certes l’analyse pourrait être approfondie pour déterminer si les réseaux sociaux
détrônent dans la société Loméenne, les cadres de participation traditionnelles?
Ou plus encore, les échanges par médias sociaux respectent ils l’éthique de la
discussion devant permettre une juste délibération ou l’agir communicationnel,
ou favorise t-il un agir instrumental ? En fragmentant davantage, l’espace public
togolais, les médias sociaux concourent ils à la démocratisation ?

Indéniablement ils servent potentiellement de forum public où les informations


peuvent être partagées, les questions discutées et où les internautes peuvent
s’engager dans l’action politique. Ces espaces permettent, aux autrefois
« apolitiques » ou trop « isolés », vu le climat politique délétère à s’intéresser et
à s’engager sur le débat politique. Des groupes se forment sur facebook et
relaient leurs messages sur twitter ou par youtube. On devient ami d’un tel ou on
participe à un groupe de discussion et puis on reçoit un post ou un lien et on se
retrouve des l’instant ou du jour au lendemain à aimer discuter politique. De
nouveaux acteurs du journalisme émergent, de nouvelles arènes de joutes
politiques, de nouveaux hommes politiques, de nouvelles organisations
politiques déterritorialisés et/ou plus virtuels.

La revue de littérature mobilisée dans le cadre de cette étude quoique non


exhaustive révèle que la politique est aussi une question d’esthétique (Arendt,
1988), les possibilités offertes par les médias sociaux mais aussi les nouvelles
formes de prises de « parole politique » (humour, modalités rédactionnelles et
visuelles plus créatives…), constituent des voies d’accès à un univers politique

91
à davantage de profanes. Bien que toute interaction discursive ait des limites
structurelles et contextuelles, les caractéristiques discursives des médias sociaux
permettent de discuter continuellement de questions politiques.

L’internaute pouvant produire des contre-discours, assistons nous à un meilleur


empowerment des citoyens, voire à des contre-publics que les structures
traditionnelles n’attirent plus? Quel discours politique et pour quels publics de
citoyens? Le web est-il devenu une source cruciale d’information politique pour
les citoyens? Quel est le rôle des internautes dans la recomposition des pratiques
de participation et d’information?

Les débats publics importants ou canalisant véritablement l’opinion publique se


tiennent hors les réseaux sociaux (Dahlgren & Peter, op.cit.). Et ceci est du à
l’aménagement numérique embryonnaire du territoire - créant une fracture
numérique et civique entre les citoyens - mais aussi à la faible légitimité des
médias sociaux comme espace public. Comment élargir cette agora à davantage
des togolais, dont la grande majorité vit encore à l’écart et dans l’ignorance de
l’Internet ?

Partant du constat que les hommes politiques y tiennent davantage pignon, et


que l’engagement civique ou la participation politique que favorisent les médias
sociaux peut être gage d’une paisible démocratie délibérative et donc de
croissance économique, quelle est l’économie politique de l’Internet au Togo ?
Pourquoi tous les politiques investissent les médias sociaux alors que leur
politique de développement n’insère pas l’importance de l’aménagement
numérique comme composante primordiale de l’aménagement du territoire ?
Dans un contexte de globalisation où les conflits ont tendance à vite se
régionaliser, c’est là un défi qu’au niveau local (Lomé) et national (Togo) et
aussi régional (CEDEAO ou l’UEMOA), le politique doit relever.

92
En prenant appui sur les travaux antérieurs et par une méthodologie rigoureuse,
cette étude sur l’analyse la participation politique à travers les médias sociaux a
permis d’évaluer l’appropriation politique des médias sociaux au Togo, mais
plus encore les dynamiques de socialisation qu’ils génèrent. Ce qui a permis de
tracer quelques pistes de réflexion autour de l’e-politisation ; mais il apparait
que la plupart, ne sont que des ébauches et l’on ne peut affirmer d’avoir épuisé
ne serait ce qu’une infime partie de la problématique. La politisation par les
médias sociaux constitue ainsi une entrée euristique pour étendre la
connaissance des processus de socialisation politique et des liens entre
socialisations primaires et médiatiques, et plus encore.

93
CONCLUSION

Il existe entre les médias et la politique un rapport étroit. Il n'y a pas de vie
politique sans opinion publique et pas d'opinion publique sans communication.
Pendant longtemps, le rapport entre homme politique et citoyens se sont résumés
à des rencontres, discussions, et meetings… dans un schéma vertical.
Aujourd'hui, il s'agit d’aller au-delà, d’atteindre des cibles « apolitiques » telles
que les jeunes ou les personnes intellectuelles avec une esthétique efficace, une
interaction permanente. Les révolutions arabes, les Indignés espagnols, la
campagne Obama for america ou de GoodLuck Jonathan, sont illustratifs de
cette mobilisation politique à travers les médias sociaux.
Tous ces mouvements ont su amplifier leurs revendications, diffuser leurs
messages et au final grossir puis se structurer, grâce aux réseaux sociaux, en
particulier Facebook et Twitter. C’est dire que les réseaux sociaux permettent à
chaque individu - autrefois trop isolé ou exclu - de connaitre les idées et
opinions multiples existantes mais aussi de « reconnaître » ceux qui partagent
les mêmes idées que lui. La connexion entre ces liens invisibles est spontanée,
instantanée et multiple. Des groupes politiques se forment sur Facebook et
relaient leurs messages sur Twitter ; des hommes politiques s’emparent des
chaines interactives youtube, mais aussi facebook, twitter, la course au fast–
journalisme est lancée entre les journalistes et les bloggeurs, les cyber-partis
volent le débat aux partis traditionnels ; des réseaux sociaux font partie
désormais des agendas des politiques et de leurs communicants. Si cette
dynamique politique sur les médias sociaux a suscité des intérêts scientifiques
sous d’autres cieux (Québec, Londres, France), le terrain était encore non
exploré en Afrique et plus particulièrement au Togo.

94
Il était donc question d’analyser dans cette recherche : « l’appropriation
politique des médias sociaux et ses effets sur la participation politique des
Loméens ». Notre analyse était structurée autour des médias sociaux comme
schème structural et causal de la participation politique, voire de la construction
identitaire politique chez les internautes à Lomé. Pour y arriver, nous sommes
partis de l’hypothèse que : les médias sociaux sont un nouvel espace
d’interaction et de mobilisation politique des Loméens ». Cette hypothèse se
base sur l’analyse de Serge Proulx :

« L’un des rôles les plus importants confié aux médias est celui de relais de
l'action politique. Les médias informent les citoyens des différentes options
politiques, ils véhiculent les valeurs, les référents, les programmes que le
personnel politique cherche à promouvoir. Ils tissent des liens entre une
population et un gouvernement afin d'entretenir la croyance en une
association des citoyens aux décisions collectives, ils participent grandement
à la construction et à la diffusion de normes individuelles et collectives. »
Serge Proulx, & al (2005)

Au terme de la recherche, il ressort que les réseaux sociaux font partie des outils
usuels de sociabilité dans le quotidien de bien d’internautes loméens ; il revêt
pour les acteurs politiques, une fonction supplémentaire : un champ politique à
investir. Journalistes, hommes politiques, institutions politiques, s’approprient
les arènes de débat du web 2.0.

L’étude nous a permis de montrer que cette appropriation suscite de nombreuses


dynamiques discursives, confirmant l’analyse des médias sociaux comme espace
public, même si le phénomène est encore minime. Des groupes se forment
majoritairement par homophilie confirmant la thèse de la polarisation des
opinions et on retrouve à quelques exceptions près, les mêmes acteurs de la vie
politique togolaise (normalisation). Toutefois, l’on ne peut omettre le fait que
l’information éduque et que les échanges altèrent les opinions. En effet, la
richesse des faits alimente la connaissance, la pertinence des analyses, guide la

95
réflexion, la diversité des commentaires permet son approfondissement.
Aujourd'hui plus qu'hier, les moyens d'information ont un impact sur les esprits.

Les réseaux sociaux ont-ils pour autant un rôle socialisateur? La mobilisation


cognitive et informationnelle des internautes Loméens favorise t- il leur intérêt
politique et une amélioration de leur compétence politique ? Renforcent-ils la
compétence politique des internautes ou concourent-ils à les brouiller voire à les
manipuler ? Comment, les constructions identitaires politiques en ligne
évoluent- elles?
Assistons-nous à la déterritorialisation de la politique, voire à la constitution de
nouveaux publics en ligne ? Quels en sont les acteurs? Et quels sont les jeux et
les rapports qu’entretiennent ces acteurs ? L’économie politique de l’Internet a-
t-il un impact sur la participation politique en ligne ?

Telles sont encore les interrogations et hypothèses auxquels n’a pu répondre


cette étude. Pour son intérêt heuristique, mais aussi parce qu’il constitue un
enjeu, dans une société en crise, pour la communication politique, les aspects
non approfondis et les insuffisances du présent mémoire doivent être envisagées
dans les perspectives d’une thèse.

96
BIBLIOGRAPHIE

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100
ANNEXE

101
ANNEXE : Carte de l’agglomération loméenne

Grand
Lomé
Limites de la ville

Source : Mairie de Lomé, 2012

102
Table des matières

DEDICACE _____________________________________________________________________ 2
REMERCIEMENTS ______________________________________________________________ 3
LISTE DES ACRONYMES ________________________________________________________ 4
SOMMAIRE ____________________________________________________________________ 5
INTRODUCTION ________________________________________________________________ 6
PREMIERE PARTIE _________________________________________________________ 11
CADRES THEORIQUE ET CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE, METHODOLOGIE ET CHAMP
D’ETUDE _______________________________________________________________________ 11

Chapitre Premier: Cadres théoriques et conceptuel _______________________ 11


I CADRE THEORIQUE _________________________________________________________ 11
I.1 Analyse de la situation et problématique __________________________________________ 11
I.2 – Objectifs de la recherche _______________________________________________________ 19
I.2.1 – Objectif général ___________________________________________________________ 19
I.2.2 – Objectifs spécifiques _______________________________________________________ 19
I.3 – Hypothèses de la recherche _____________________________________________________ 19
I.3.1 – Hypothèse principale_______________________________________________________ 19
I.3.2 – Hypothèses sous-jacentes ___________________________________________________ 19
II - CADRE DE REFERENCE THEORIQUE ________________________________________ 20
II.1 – La théorie de l’agir communicationnel ____________________________________________ 20
II.2 – La politique délibérative ______________________________________________________ 21
II.3 – La notion de compétence politique et la délibération par Bourdieu ___________________ 23
III CADRE CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE ___________________________________ 25
III.1 – L’état de la question ________________________________________________________ 25
III.1.1 – Médias sociaux et espace public _____________________________________________ 26
III.1.2 – Médias sociaux et citoyenneté ______________________________________________ 31
III.1.3 – Médias sociaux, participation politique _______________________________________ 33
III.1.5 – Médias sociaux, médias de masse ___________________________________________ 41
III.1.6 – Médias sociaux et politisation _______________________________________________ 43
III.2 – Définition des concepts _______________________________________________________ 48
III.2.1 – La politisation ___________________________________________________________ 48
III.2.2 – La compétence politique ___________________________________________________ 49
III.2.3 – Les médias sociaux _______________________________________________________ 50
III.2.4 – Les réseaux sociaux _______________________________________________________ 50
III.2.5 – Le champ politique _______________________________________________________ 51
III.2.6 – La délibération __________________________________________________________ 51
III.2.7 – L’espace public _________________________________________________________ 52
III.2.8 – L’espace commun ________________________________________________________ 54
III.2.9 – L’espace politique ________________________________________________________ 54
III.2.10 – L’engagement politique __________________________________________________ 54
III.2.11 – La participation politique _________________________________________________ 55
III.2.12 – La socialisation _________________________________________________________ 55
III.2.13 – Le capital social ________________________________________________________ 55
III.2.14 – La démocratie __________________________________________________________ 56
III.2.15 – Démocratie électronique _________________________________________________ 56

Chapitre Deuxième: METHODOLOGIE ET CHAMP D’ETUDE _______________________ 58


I – CHAMP D’ÉTUDE ____________________________________________________________ 58
I.1 – Présentation du Togo _______________________________________________________ 58
I.2 – Présentation de Lomé, la zone d’étude __________________________________________ 59
I.2.1 – Historique de la ville de Lomé _______________________________________________ 59
I.2.2 – Situation géographique _____________________________________________________ 60
I.2.3 – Organisation socio-administrative ____________________________________________ 60
I.2.4. – Démographie ____________________________________________________________ 60
I.2.5 – Armature Numérique de la ville de Lomé ______________________________________ 61
II – CADRE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE _______________________________ 61
II.1 – La recherche documentaire __________________________________________________ 62
II.2 – L’enquête de terrain ________________________________________________________ 62
II.2.1 – Les groupes cibles prioritaires _______________________________________________ 62
II.2.2 – L’échantillonnage _________________________________________________________ 63
II.2.3 – La technique de collectes de données _________________________________________ 63
II.2.3.1 – L’observation participante ________________________________________________ 63
II.2.3.2 – Identification et justification des variables ____________________________________ 64
II.2.3.4 – Variable dépendante _____________________________________________________ 64
II.2.3.5 – Les variables indépendantes _______________________________________________ 64
2.2.3.5.1. Variables indépendantes démographiques ___________________________________ 64
2.2.3.5.2 Variables indépendantes contextuelles ______________________________________ 65
II.2.3.5 – Identification des indicateurs ______________________________________________ 66
II.3 – Dépouillement et traitement des données _______________________________________ 66
II.4 – Difficultés rencontrées ________________________________________________________ 66
DEUXIEME PARTIE _________________________________________________________ 68
PRESENTATION ET COMMENTAIRE DES RESULTATS PROVISOIRES DE LA RECHERCHE __ 68
I – STRUCTURE PROVISOIRE DE LA THESE ________________________________________ 69
Chapitre deuxième : Environnement socio-économique et éducatif _______________________ 69
I – Etat des lieux de l’appropriation politique des réseaux sociaux _________________________ 75
I.1 – Politiciens et Partis politiques _________________________________________________ 76
I.1.1 – Les partis politiques parlementaires ___________________________________________ 76
I.1.2 Les partis extra parlementaires __________________________________________________ 79
I.2 – Parlement et gouvernement ___________________________________________________ 81
I.3 – Journalistes et bloggeurs _____________________________________________________ 82
I.4 – La société civile et les citoyens ________________________________________________ 83
II– Participation politique des citoyens ordinaires ______________________________________ 84
II.1. Un nouvel espace public togolais _______________________________________________ 84
II.2. La politisation des citoyens ordinaires ___________________________________________ 87
II – DISCUSSIONS ET LIMITES DE L’ETUDE ___________________________________ 87
CONCLUSION __________________________________________________________________ 94
BIBLIOGRAPHIE ______________________________________________________________ 96
ANNEXE ______________________________________________________________________ 101
ANNEXE : Carte de l’agglomération loméenne ________________________________________ 102
TABLE DES MATIERES _________________________________________________________ 101

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