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Emmanuel GILBERT

La rédemption sacrificielle

« Avant tout, je vous ai transmis ceci, que j’ai moi-même reçu : le Christ est mort pour nos
péchés conformément aux Écritures, et il fut mis au tombeau ; il est ressuscité le troisième jour
conformément aux Écritures » (1 Co 15, 3-4). Voici comment l’apôtre saint Paul, dans sa première
épître au corinthiens, résume le kerygme de notre foi en Jésus Christ. Il s’agit, selon le Pape
François, du « cœur de l’Évangile », ce « cœur fondamental [où] resplendit la beauté de l’amour
salvifique de Dieu manifesté en Jésus Christ mort et ressuscité »1. Or, bien que ce message soit au
cœur de notre foi chrétienne, il laisse la place à une vraie question, à laquelle nous devons sans
cesse nous confronter afin qu’elle nous introduise toujours plus profondément dans le mystère du
Salut : pourquoi pouvons-nous affirmer que le sacrifice du Christ nous a-t-il sauvé ? Afin d’obtenir
quelques éléments de réponse à cette question, nous allons nous pencher sur « l’enquête
exégétique » menée par Léopold Sabourin, un père jésuite qui a écrit en 1961 un livre sur la
Rédemption sacrificielle2.

Les deux premiers chapitres du livre du P. Sabourin se concentrent sur l’exégèse grecque et
latine de deux expressions pauliniennes un peu particulières : le Christ fait « péché » (2 Co 5, 21) et
« malédiction » (Ga 3, 13)3. L’interprétation de ces expressions, bien que pouvant paraître un
« objectif […] limité »4, permet au P. Sabourin de pouvoir « apercevoir les convergences ou les
divergences entre les auteurs [les Pères grecs et les Pères latins], ainsi que les liens de dépendance
les rattachant les uns aux autres »5. De plus, comme le souligne le P. Sabourin dans son introduction
(p. 13), l’insistance sur tel ou tel aspect des moyens et des effets du Salut dépend du contexte dans
lequel se trouvaient les auteurs. Nous allons donc tâcher de relever quels sont ces différents aspects
afin d’essayer de mieux comprendre le Salut apporté par Jésus Christ à travers son Incarnation, sa
mort et sa Résurrection. Nous verrons pour commencer quelles sont les éléments de réponses
apportés par les auteurs grecs des premiers siècles, puis nous verrons ensuite la continuité de cette
réflexion et son développement à travers les auteurs latins des premiers siècles et du moyen-âge.

1 Pape François, Evangelii Gaudium, Salvator, 2014, p. 33.


2 Léopold SABOURIN, Rédemption sacrificielle : Une enquête exégétique, Bruges, Desclée de Brouwer, 1961.
3 L. SABOURIN, Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 13-79.
4 Ibid., p. 14.
5 Id.

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L’exégèse grecque

Dans un premier temps, le P. Sabourin s’intéresse à l’exégèse grecque de ces deux


expressions pauliniennes dans toute la période qui s’étend entre saint Justin (2ème siècle) et saint
Jean Damascène (676-749)6. Chez les Pères grecs, nous pouvons retrouver deux tendances
interprétatives générales du sacrifice du Christ sur la croix et de son efficacité, à savoir une
tendance juridique et une tendance de solidarité.
Tout d’abord, la tendance interprétative juridique traduit l’idée que le péché est un tort causé
par l’Homme à Dieu et qu’il doit donc être réparé, réparation actualisée dans la mort du Christ, à
notre place, sur la croix. L’Épître à Diognète (lettre d’un chrétien anonyme datée du IIe siècle)
insiste sur la miséricorde de Dieu qui a « livré lui-même son propre Fils en rançon »7 dans l’intérêt
de l’Homme, à qui était réservé « le supplice et la mort »8. Pour Origène († 253), les suites du péché
exigent une expiation, c’est pourquoi le Christ a pris le fardeau de nos iniquités et est devenu
« victime pour le péché, instrument de réconciliation »9. Eusèbe de Césarée († 339) utilise lui aussi
le terme de rançon pour parler du Christ, l’Agneau de Dieu, victime immolée à notre place pour le
genre humain tout entier10 ; cet auteur laisse beaucoup de place à l’interprétation du sacrifice du
Christ comme substitution pénale. Saint Athanase († 373), bien que la solidarité sacrificielle occupe
une place centrale dans sa conception, explique que le Verbe paye pour notre dette : « Il est juste
que le Verbe de Dieu, qui est supérieur à tous, en offrant son temple et l’instrument de son corps en
rançon pour tous, paie notre dette en sa mort »11. Il faut bien prendre en compte ici que la dette
« n’est pas payée au démon, comme l’ont voulu plusieurs auteurs anciens, mais à la mort, que Dieu
avait décrétée »12. De plus, il paraît important de souligner à ce stade que l’idée de substitution
pénale est influencée et soutenue par l’interprétation du Lévitique par les Pères grecs, en particulier
Lv 17, 11 : « Oui, la vie de la chair est dans le sang. Ce sang, je vous l'ai donné, moi, pour faire sur
l'autel le rite d'expiation pour vos vies ; car c'est le sang qui expie pour une vie » (Bible de
Jérusalem). La tendance interprétative grecque est de conclure que le sang, en tant que vie, expie à
la place de l’âme humaine, interprétation qui, selon le P. Sabourin, est discutable 13. Enfin, saint Jean

6 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 15-43.


7 Lettre à Diognète, 9, trad. H.-I. Marrou, « Sources chrétiennes », n°33, p. 73-75 . Cité dans Rédemption
sacrificielle…, op. cit., p. 17.
8 Id.
9 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 20.
10 Ibid., p. 22-26.
11 De Incarnatione Verbi, 8 : PG 25, 112 ; trad. Camelot, p. 223. Cité dans Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 28.
12 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 28.
13 Voir Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 78, ainsi que le chapitre VI, partie B, p. 173-184.

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Damascène († 749), bien qu’il « ne voulait pas entendre parler de prix de notre rançon versé au
démon », « admet toutefois l’existence des droits du démon ‘qui aurait eu raison de se plaindre, si,
après avoir vaincu l’homme, il était violemment dépouillé par Dieu du fruit de sa victoire’ »14. Nous
verrons plus loin que le rapport au démon est assez présent dans l’exégèse latine.
D’autre part, le Père Sabourin souligne une autre tendance interprétative chez les Pères
grecs, impliquant le principe de solidarité. Cette tendance veut plutôt mettre en avant que le Salut
nous est apporté par la restauration surnaturelle de notre humanité (dans l’Incarnation) et dans
l’inclusion de l’Homme en Christ dans sa Passion. Pour saint Justin († vers 165), le Christ guérit
nos fautes en prenant part à notre humanité et en recevant volontairement en Lui la malédiction de
tous : Il est celui en qui nous accomplissons le retour au Père. C’est ce même mouvement de retour
au Père, rendu possible par la solidarité entre l’Humanité et le Christ, qu’exprime saint Irénée (†
vers 200). Saint Athanase permet de mieux comprendre le processus de la solidarité sacrificielle : il
s’agit de la « rénovation, […] impossible sans cette solidarité avec le genre humain, acquise à
l’Incarnation […], continuée dans la mort (‘tous meurent en lui’) et dans la résurrection »15. Il faut
que l’Homme s’unisse au Christ dans sa mort, Lui la victime sans tâche, qui par sa mort a « fait
disparaître la mort en tous ses semblables »16. Saint Grégoire de Nazianze († 390) affirme que
« s’est appelé malédiction (Ga 3, 13) celui qui me délivre de la malédiction, et péché (2 Co 5, 21)
celui qui enlève le péché du monde, aussi un nouvel Adam a succédé à l’ancien »17. Le Christ s’est
donc approprié notre péché et notre malédiction (par son Incarnation) pour les détruire (par sa
Passion) et renouveler (par sa Résurrection) le vieil Adam : « la justification s’opère par la
transformation de l’homme, grâce à notre insertion en Celui qui combat et maîtrise en lui-même la
puissance du péché, dont il a accepté pour un temps de subir tous les effet, compatibles avec
l’innocence »18. Saint Grégoire précise ici que l’assomption des conséquences du péché par le Christ
n’est pas incompatible avec sa propre innocence ; mais, plus intéressant encore pour nous, il indique
que l’Homme doit « s’insérer » en Lui pour être transformé et ainsi justifié. Nous pouvons retrouver
ces notions de transformation et de justification chez saint Cyrille d’Alexandrie († 444) : « De
même que le Fils unique de Dieu, devenu semblable à la chair de péché, se nomme ‘péché’, ainsi de
nous-mêmes, transformés en lui par la foi, on peut dire que nous sommes devenus ‘justice de Dieu’,

14 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 42 (la citation en italique est de De fide orthodoxa, III, 18 : PG, c. 1072).
15 Ibid., p. 28-29 (la citation en italique est de De Incarnatione Verbi, 8 : PG 25, 109).
16 De Incarnatione Verbi, 8, trad. Camelot, p. 223. Cité dans Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 30.
17 Orat. 37, in Mt 18, 1 : PG 36, c. 284. Cité dans Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 32.
18 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 32.

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ce qu’est proprement le Fils »19. La justification dont parle saint Cyrille consiste donc à cette
inclusion au Christ dans sa mort (par la foi) qui nous permet de devenir ce qu’Il est : « justice de
Dieu ».
Ainsi, si l’Incarnation permet de « ramener la nature humaine sur le champ de bataille »20, la
Passion du Christ est le « point culminant de l’œuvre rédemptrice »21. Les « catégories juridiques de
substitution et de rançon […] doivent être interprétées à la lumière du principe de solidarité ; […]
l’homme n’est pas un témoin passif de la lutte que le Christ a livré au péché, à Satan, à la mort. Il y
participe ; avec le Christ il meurt, avec lui il ressuscitera »22. Comme nous l’avons vu, l’Homme, en
participant par la foi pleinement à la mort et à la résurrection du Christ, devient justice de Dieu.

L’exégèse latine

Dans le deuxième chapitre de son livre, le P. Sabourin traite de l’exégèse latine des
expressions pauliniennes mentionnées (2 Co 5, 21 et Ga 3, 13) sur toute la période de la patristique
et du moyen-âge allant de Tertullien († vers 220) à saint Thomas d’Aquin († 1274)23. Nous verrons
pour commencer la question des « droits » du démon, puis la tendance juridique propre aux auteurs
latins et enfin le développement du principe de solidarité, en particulier chez saint Augustin.
Tout d’abord, l’Ambrosiaster (IVème siècle) met en avant les deux étapes de l’œuvre
salvifique du Christ : son « office de médiateur », par lequel il nous remet nos péchés et nous
réconcilie avec Dieu (à travers son Incarnation et son enseignement) ainsi que sa « mort
sanglante », qui nous délivre du pouvoir diabolique et nous accorde la justification 24. La question du
démon est assez présente dans la pensée des auteurs que nous étudions, aussi il semble intéressant
de nous arrêter dessus quelques instants. De manière très juridique, l’Ambrosiaster fait valoir que la
faut commise par le diable, à savoir le meurtre du parfait innocent (Jésus Christ), lui fait perdre
toute légitimité sur les âmes25. Pour saint Hilaire († 367), le Christ, par sa chair offerte
volontairement, a vaincu le démon en dissolvant la malédiction de la Loi 26. Saint Ambroise († 397)
précise que « personne ne tombe sans le vouloir sous la servitude du démon ; celui-ci achète avec la

19 Cyrille d’Alexandrie, Thesaurus de sancta et consubstantiale Trintate, assert. 32 : PG 75, 1264 s. Cité dans
Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 34.
20 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 43.
21 J. SCHWANE, Histoire des dogmes, (Paris, 1903), vol. II, p. 628. Cité dans Rédemption…, op. cit., p. 43.
22 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 43.
23 Ibid., p. 44-79.
24 Ibid., p. 47.
25 Id.
26 Ibid., p. 46.

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monnaie des péchés . Le prix du rachat, à payer au démon, c’est le prix du sang »27. C’est pourquoi
saint Paulin de Nole († 431) affirme que, l’Homme vendu au péché ayant besoin de rachat, le Christ
cloue sur la croix l’acte rédigé contre nous 28. Ainsi, l’étude de la patristique grecque nous avait
amené à affirmer que la rançon ne doit pas être perçue comme étant payée au démon, affirmation
qui semble contradictoire avec celle de saint Ambroise. Chez saint Ambroise et l’Ambrosiaster, on
retrouve l’idée que le rachat de l’Homme doit être payé par le sang versé ; or dans le chapitre VI de
son livre29, le P. Sabourin souligne que la signification biblique du sang dans le sacrifice sanglant est
la purification (le sang, « en tant que vie » [Lv 17, 11], est l’élément divin qui permet cette
purification). Le sang, s’il a effectivement ce rôle, ne peut donc pas être versé au démon ; nous nous
rattacherons donc plus à l’interprétation de St Jean Damascène, pour qui il est, à strictement parler,
impropre de se référer à une rançon payée au démon. La mort du Christ a plutôt pour effet de nous
délivrer de la mort, conséquence du péché de l’Homme. On peut noter que certains auteurs latins se
sont opposés à la sotériologie basée sur les « droits » du démon, tel que Abélard († 1142), qui en
revanche insistait trop sur la croix comme œuvre d’amour à l’exclusion de l’aspect expiatoire30
Les auteurs latins insistent par ailleurs sur d’autres thèmes qui leur sont chers, avec une
tendance juridique prononcée. D’une part, saint Ambroise affirme que la mort du Christ sur la croix
« a mis fin au décret divin qui l’avait rendue nécessaire » (à cause de la condamnation capitale de
l’humanité après le péché d’Adam)31. D’autre part, comme le souligne le P. Sabourin, saint
Ambroise anticipe le concept anselmien de la satisfaction : la « satisfaction que le chrétien doit
offrir à Dieu pour ses péchés, le Christ l’a offert pour les péchés d’autrui »32. L’utilisation du terme
satisfaction pour se référer à l’œuvre rédemptrice du Christ est alors une « expression nouvelle »33.
Saint Anselme de Cantorbery († 1109) développera ensuite le concept de satisfactio vicaria, pour
lequel la satisfaction rendue nécessaire par le péché de l’Homme doit être accomplie par un Homme
(celui qui est en faute) et par quelqu’un qui soit l’égal de Dieu (à cause de la limitation de
l’Homme) ; le Christ, vrai Homme et vrai Dieu, était donc le vicaire nécessaire d’une telle
satisfaction. Il s’agit ici de « rétablir l’honneur ravi à Dieu », formulation qui « s’inspire des idées
de chevalerie féodale et des notions juridiques de l’époque »34, telle que « la notion du droit

27 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 50-51.


28 Ibid., p. 65.
29 Ibid., p. 165-191 (en particulier partie B, numéro 3, p. 178-180).
30 Ibid., p. 73.
31 Ibid., p. 51-52 (citation p. 51).
32 Ibid., p. 52.
33 J. RIVIÈRE, De la Satisfaction du Christ chez saint Ambroise, dans BLE 28 (1927), p. 163. Cité dans Rédemption
sacrificielle…, op. cit., p. 52.
34 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 68.

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germanique de l’honneur du roi »35. Pour bien interpréter le concept anselmien de la satisfaction, il
faut prendre en compte que « l’homme a déshonoré Dieu en acceptant le joug du démon » (« rejeter
ce joug sera rendre à Dieu ce qui lui à été enlevé, c’est-à-dire ses plans salvifique sur l’Homme »),
et la « nécessité » de la satisfaction n’enlève rien à la liberté de l’intervention divine et « au
caractère miséricordieux du salut »36. Beaucoup d’autres auteurs latins utilisent des formulations
juridiques pour parler de l’œuvre rédemptrice, tels que Victorinus Afer, Grégoire d’Elvire (IV e
siècle, « Dans le Christ […] nos péchés ont été punis »37) ou encore Rupert de Deutz († 1129).
Enfin, la patristique et le moyen-âge latins sont très marqués par la pensée d’une autorité,
que nous n’avons pas encore citée, à savoir saint Augustin d’Hippone († 430). Chez saint Augustin,
le principe de solidarité est essentiel. Le Christ, en se faisant « sacrifice pour le péché » par
solidarité avec les Hommes et par miséricorde, a détruit le péché par la mort de sa chair sur la croix.
Le Christ est mort au péché pour nous, afin que nous devenions en Lui justice de Dieu : voici
l’échange fondamental, totalement gratuit, impliqué par le principe de solidarité, l’attribution de la
justice de Dieu à l’Homme et de notre péché au Christ. Cela est rendu possible en vertu de la
solidarité entre la Tête et les membres dans l’unité du Corps qu’est l’Église ; en cela saint Augustin
retrouve une vraie intelligence du sens paulinien authentique38.

Conclusion

Pour conclure, la compréhension du mystère du Salut et en particulier du sacrifice du Christ


est beaucoup influencée, dès les premiers siècles, par le contexte culturel dans lequel sont insérés
les chrétiens. Comme nous avons pu le voir, il y a plusieurs tendances interprétatives ; il ne faut
cependant les considérer comme opposées les unes aux autres, mais essayer de voir en quoi elles
sont complémentaires et nous permettent de mieux appréhender comment le Christ nous a sauvé sur
la croix. Premièrement, la réponse qu’apporte à cette question la tendance juridique est que
l’Homme est profondément pécheur, péché qui l’éloigne inexorablement de Dieu et qui l’amène à
se soumettre, volontairement, au pouvoir du diable et de la mort. Dans sa miséricorde, le Verbe de
Dieu s’est fait homme et a vaincu la mort sur la croix, en tant qu’Il était innocent, que son sang a
purifié l’Homme de ses péchés et que le Père l’a ressuscité d’entre les morts. On peut donc dire
qu’Il est mort à notre place, car c’était bien l’Homme qui était coupable et qui avait fait le choix de

35 T. PREISS, Le Fils de l’homme, (Montpellier, 1955), p. 60. Cité dans Rédemption…, op. cit., p. 68, note 2.
36 Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 69-70.
37 Ibid., p. 54.
38 Ibid., p. 54-64.

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la mort, par son péché. Deuxièmement, la tendance qui se réfère au principe de solidarité permet de
mieux comprendre deux aspects du Salut apporté par Jésus Christ. Le premier aspect, c’est que
l’Incarnation a pour effet de relever et restaurer la nature Humaine de manière surnaturelle (ce que
saint Thomas appelle la grâce d’union) : en s’incarnant, le Fils de Dieu assume notre condition
humaine (en se faisant « malédiction » [Ga 3, 13] et « péché » [2 Co 5, 21], c’est-à-dire en en
assumant les conséquences39). Le deuxième aspect, c’est le fait que l’Homme doit s’associer à la
mort du Christ, par inclusion : de la même manière que le Christ a participé à notre nature, il nous
faut participer à son sacrifice pour vaincre, avec Lui, la mort et communier à sa Résurrection
(inclusion qui est vécue dans son Corps qu’est l’Église, en particulier à travers les sacrements).
C’est ainsi que le Christ rend aux pécheurs la justice perdue, afin qu’ils deviennent en Lui justice de
Dieu.

39 Le P. SABOURIN explique, à travers les auteurs grecs et latins, que ces expressions pauliniennes sont comprises
comme le fait que le Christ a reçu en Lui la malédiction de tous et a pris le fardeau de nos iniquités (St Justin,
Origène, St Athanase, Grégoire d’Elvire, St Augustin), afin de les détruire (St Grégoire de Nazianze, St Hilaire, St
Augustin) car il était lui-même « sacrifice pour le péché » (St Cyrille d’Alexandrie, Ambrosiaster, St Augustin, St
Fulgence de Ruspe, Cassiodore, St Isidore). Le « péché » est donc sa qualité et non son état (St Jean Chrysostome).
Voir Rédemption sacrificielle…, op. cit., p. 13-79.

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