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I.

A de FATICK
Lycée de NIAKHAR
Classe : TL’B

LES GRANDES INTERROGATIONS PHILOSOPHIQUES


(Ce cours doit permettre àl’élève de rendre le sens des différentes questions philosophiques.)

D’après Gabriel Marcel dans L’homme Problématiquedes « questions portants sur son
origine, sa nature et sa destinée » ont toujours préoccupé l’homme. L’angoisse a ainsi très tôt
habité l’humanité. C’est pourquoi Ebenezer Njoh–Mouelle, philosophe camerounais, avait
raison d’écrire dans Jalons : « la philosophie naît (…) d’une conscience angoissée, (…) des
situations troubles ». Cette angoisse se traduit dans la question de Leibniz : « pourquoi y a-t-
il quelque chose plutôt que rien ? » Dès lors, de grandes questions assaillent l’esprit humain.
C’est à travers la philosophie que l’homme tentera de trouver les réponses. La philosophie
devient alors la discipline qui tente de fournir à l’homme les remèdes contre son angoisse.
L’homme, conscient de sa faiblesse est agité par les contradictions et vicissitudes de
l’existence. Outre sa propre nature et son essence, les concepts de Bien, du Mal constituent
des sources d’interrogations.
Dans la Logique, Kant traduit cette angoisse en trois grandes questions : « que puis-je
savoir ? » « Que dois-je faire ? » « Que m’est-il permis d’espérer ? » Selon lui, répondre à ces
trois questions revient à répondre à la question principale « qu’est-ce que l’homme ? » Dès
lors, l’humain est au centre des grandes questions philosophiques d’ordre anthropologique,
axiologique et métaphysique. Il lui faut trouver des réponses à ses problèmes inévitables
pour s’épanouir dans son existence.
I- LA QUESTION METAPHYSIQUE.
(L’élève doit être capable de montrer l’importance de la question métaphysique, ses partisans, ses
détracteurs et son actualité face à l’avancée des sciences.)

Etude de texte :
« Les questions dernières de la métaphysique classique, celles qui concernent le moi, le
monde et Dieu font parties du paysage intellectuel et moral des hommes (…). Chaque fois
qu’on interprète la nature de l’homme et son destin, chaque fois qu’on émet une hypothèse sur
la réalité de l’univers, chaque fois que l’on parie pour Dieu ou contre Lui on dépasse
l’objectivité du savoir, on extrapole, on se prononce sur des fins dernières de l’homme. On
donne un sens à l’existence humaine, en posant la question du pourquoi et non plus celle du
comment. Il ne semble pas que cette question du pourquoi puisse jamais être dépassée. Aussi
bien le temps présent fournit la preuve d’une préoccupation métaphysique particulièrement
vivace. Le souci de la destinée humaine, au lieu de demeurer l’apanage de quelques-
uns,devient la chose de tous. Dégagé des contraintes techniques, il envahit la littérature, le
théâtre, les journaux, l’économie même et la politique. Loin donc d’affirmer la déchéance de
la métaphysique, il faut bien plutôt souligner qu’elle s’est à un certain sens universalité,
qu’elle a acquis une sorte de suprématie ».
Georges Gusdorf, Métaphysique et Anthropologie.
Le terme de métaphysique est d’origine livresque (classification) que de conception. C’est
Andronicos de Rhodes au premier siècle avant J-C qui l’attribut aux traités d’Aristote sans
titres et qui sont hors de la physique. D’où son étymologie grecque «méta phusica »
signifiant « ce qui vient après la physique » ou « ce qui doit être lu après les livres de
physique ». Aristote désignait ce qu’on appelle aujourd’hui métaphysique par les
expressions : philosophie première ou science de l’être en tant qu’être. Sous ce rapport, Il
écrit « Il y a une science qui étudie l’Être en tant qu’être et les attributs qui lui appartiennent
essentiellement » (La Métaphysique). En d’autres termes, la métaphysique étudie ce qui fait
que les choses existantes sont, et sont comme elles sont.
Aussi, Schopenhauer écrit « Par métaphysique, j’entends tout ce qui a la prétention d’être
une connaissance dépassant l’expérience, c’est-à-dire les phénomènes donnés, et qui tend à
expliquer par quoi la nature est conditionnée dans un sens ou dans l’autre, ou, pour parler
vulgairement, à montrer ce qu’il y a derrière la nature et qui la rend possible » (Le Monde
comme volonté et comme représentation). Autrement dit, la métaphysique s’emploie à
montrer ce qui est essentiel et déterminant dans l’existence d’une chose ou d’un être. Elle est
la science des premiers principes, celle des causes premières. Elle étudie les objets hors du
donné, du senti, du perçu, du concret.Elle devient dès lors, le fondement de toutes choses. La
métaphysique est aussi une pensée du suprasensible à travers la théorie des « Idées » de
Platon qui pose un monde sensible et un monde intelligible.
Descartes bien que partageant cette métaphysique comme fondatrice de toutes choses n’en
donne pas moins une autre posture. Pour lui, la métaphysique est la science qui vient avant
l’étude de la nature et supporte toutes les autres. Elle constitue le garant et le fondement de
toutes connaissances scientifiques, comme en atteste son arbre philosophique.
La métaphysique va subir des critiques de la part notamment des empiristes sur les pouvoirs
et les limites de l’esprit humain. Selon Hume, la métaphysique pousse l’esprit à sortir du
cadre de ce qui est expérimentalement contrôlable. Pour les empiristes, la connaissance
découle de l’expérience sensible alors que l’être entendu comme substance est au-delà de ce
que l’être humain peut raisonnablement affirmer. La métaphysique n’est, dès lors,
qu’illusions et sophismes, en tant qu’elle n’offre pas des raisonnements expérimentaux.
Kant va abonder dans le même sens. Aussi confesse-t-il « Hume m’a fait sortir de mon
sommeil dogmatique » (Prolégomènes à toute métaphysique future qui voudra se présenter
comme science). Ainsi, Kant dira que les phénomènes restent le domaine de l’entendement,
tandis que la métaphysique s’occupe des noumènes. Il remet ainsi en cause la prétention de
la raison à répondre aux questions du suprasensible, domaine dans lequel la raison n’est que
le jouet des illusions lorsqu’elle s’aventure loin de l’expérience et prétend connaître la chose
en soi. C’est dans ce sens qu’il définit lamétaphysique comme un « champ de bataille où on
se livre des combats sans fin » (Critique de la raison pure). En d’autres termes, la
métaphysique qui veut conduire la raison hors des limites de l’expérience ne fait que
l’enfermer dans des contradictions insolubles. Chez Comte, la métaphysique est un état
transitoire entre l’étatthéologique et l’état positif. Pour le père du positivisme, la
connaissance ne peut sortir de la sphère des lois scientifiques.
Toutefois, la métaphysique malgré ces critiques, demeure indépassable. Selon Kant
d’ailleurs, il faut seulement y opérer une révolution copernicienne et lui trouver une
méthode adéquate. Elle possède, fait-il savoir, un caractère inévitable car elle exprime le
besoin fondamental de la raison de systématiser ses connaissances. Ainsi que nous l’avons
vu,Gusdorf fait remarquer que « le souci de la destinée humaine, au lieu de demeurer
l’apanage de quelques-uns devient la chose de tous (…). Loin donc d’affirmer la déchéance
de la métaphysique, il faut bien plutôt souligner qu’elle s’est en un certain sens universalisée,
qu’elle a acquis une sorte de suprématie » Pour Sartre, la métaphysique n’est pas une simple
spéculation mais aide l’homme à comprendre son sort existentiel. La métaphysique est selon
lui « un effort vivant pour embrasser du dedans la condition humaine dans sa totalité »
(Situation II). On peut ainsi dire avec Schopenhauerque « L’homme est un animal
métaphysique » (Le Monde comme représentation). Autrement dit, c’est un être capable de
s’étonner devant son existence et le spectacle du monde.
II- LA QUESTION AXIOLOGIQUE.
(L’élève doit être capable de montrer l’importance de la question axiologique, ses partisans et
ses détracteurs.)
L’axiologie est une théorie des valeurs, plus particulièrement des valeurs morales (Bien,
Mal, Juste…), une recherche sur leur nature et la hiérarchie à établir entre elles. Du grec axios
(mérite, de grande valeur) et logos (étude, discours), elle étudie de façon normative la valeur
des conduites et tente de prescrire les règles qu’il convient de respecter. Il s’agit là de la
philosophie morale qui prend en charge l’action humaine dans la société. Elle est à la fois
réflexion sur les valeurs qui doivent guider la vie et la mise en œuvre de ces valeurs dans
des actes quotidiens de vigilance et d’attention à soi et aux autres. Aussi des valeurs comme
le courage, la générosité peuvent être considérées comme des valeurs positives. Les
antivaleurs seront évidemment leur contraire : la trahison, la méchanceté, le mal…C’est
pourquoi la tradition philosophique a toujours compris la sagesse comme synonyme de vérité
et vertu qui s’oppose aux vices.
En fait, l’axiologie cherche à assurer à l’homme une vie paisible dans la société. Le
problème, c’est que chaque doctrine philosophique produit sa propre morale. Par exemple, les
épicuriens considèrent que le plaisir est le souverain bien, que l’homme doit admettre les
plaisirs naturels et nécessaires, tolérer les plaisirs naturels mais non nécessaires et fuir les
plaisirs ni naturels ni nécessaires, s’il veut atteindre la paix de l’âme, c’est-à-dire l’ataraxie
ou apathie qui est une absence de trouble, paix de l’âme. Pour parvenir à ce bonheur, les
stoïciens recommandent à l’homme de se soumettre à l’ordre de la nature. Descartes dans la
définition de sa morale provisoire ou par provision (en attendant, faute de mieux) préconise
d’ailleurs de « changer nos désirs plutôt que l’ordre du monde. » (Discours de la méthode).
Chez Platon, toute la philosophie est orientée vers la recherche du bien ou de la vertu ; mais
le bien en tant qu’il est d’abord, est avant tout dans le monde intelligible. Kant suggère «
qu’on doit toujours traiter l’autre comme une fin et jamais comme un moyen» (Fondements
de la métaphysique des mœurs). Il affirme d’ailleurs en substance que la loi morale est
inscrite dans la raison de chaque être humain. Cela veut dire qu’il développe une morale
universelle. Il semble même que les organisations internationales en charge de la protection
des droits de l’homme (Amnesty International, Radho, Fidh, human RightWatch.) s’inspirent
de cette conception.
Seulement, il faut reconnaître que même si chaque peuple sait faire la distinction entre le bien
et le mal, le contenu qu’on en donne varie d’une contrée à une autre. Ainsi, les valeurs sont
socialement orientées et culturellement marquées. Le sociologue français Emile Durkheim le
rappelle ainsi « chaque peuple a sa morale qui est déterminée par ses conditions de vie. On ne
peut donc lui en inculquer une autre, si élevée qu’elle soit, sans la désorganiser » (Sociologie
et philosophie).
Nietzsche va théoriser, le perspectivisme en matière de morale. Il s’agit là de dire que chacun
doit éviter d’être un suiviste, de devenir un être du troupeau ou de la plèbe. En effet,
l’archéologie des valeurs morales dominantes (valeurs juive, chrétienne et islamique) montre
que celles-ci émanent du « ressentiment des faibles » qui n’osent pas affronter la vie telle
qu’elle est. Ainsi pour lui, chaque homme doit définir ce qu’il entend par le bien et par le
mal. Sartre précise qu’en matière de morale c’est comme en matière d’art : un domaine de
création et d’invention.
III- LA QUESTION ANTHROPOLOGIQUE.
(L’élève doit être capable de montrer l’importance de la question anthropologique, et les
obstaclesà sa constitution comme science.)
L’anthropologie (du grec anthrôpos : homme et logos : étude ou science) signifie la science
de l’homme. Elle est très proche de la philosophie puisque toutes deux s’emploient à
connaître l’homme. On pourrait ainsi penser à une anthropologie philosophique et une
anthropologie scientifique selon Kant. Mais, l’anthropologie scientifique n’envisage pas
l’homme comme un pur être, mais elle l’étudie tel qu’il apparaît dans l’expérience et dans
l’histoire. Elle analyse l’homme concret dans son milieu concret donc a pour cadre la
nature. Son objet est l’homme empirique alors que la philosophie a pour objet l’homme
abstrait c’est-à-dire saisit dans la pensée comme une idée.
Cependant, l’anthropologie n’est pas la seule science qui prétend investir l’homme. Elle
partage ce champ avec d’autres sciences telles, la sociologie, la linguistique, l’histoire, la
psychologie… qui se présentent aussi comme des sciences humaines. Mais par rapport à ces
dernières, l’anthropologie se démarque en se posant comme la science par excellence de
l’homme en tant qu’elle s’occupe de l’humain sous toutes les attitudes et dans tous les temps.
C’est le rapport de l’homme au monde que l’anthropologie interpelle. D’après Lévi-
Strauss « elle vise à une connaissance globale de l’homme embrassant son sujet dans toute
son extension historique et géographique ; aspirant à une connaissance applicable à
l’ensemble du développement humain ; et tendant à des conclusions, positives ou négatives,
mais valables pour toutes les sociétés humaines, depuis la grande ville moderne jusqu’à la
plus petite tribu mélanésienne. » Anthropologie structurale. En somme, son souci, nous dit
Topinard, est « de nous montrer l’homme dans toute sa nudité, de nous livrer le secret de ses
actes, de ses passions et de ses besoins, dans le passé et peut-être dans l’avenir »
(L’anthropologie).
Toutefois, l’homme peut se présenter sous une infinité d’aspects de par sa liberté et sa
sensibilité. Il reste donc un objet inassignable ce qui rend son étude problématique. Aussi,
apparaît en filigrane le risque d’une subjectivité dans la mesure où le savant et l’objet de la
recherche relève du même cadre humain. Ainsi, l’anthropologie va s’intéresser à l’homme
sur les plans physiologique et culturel. Du point de vue physiologique, l’anthropologie va
étudier les variations des caractères biologiques nées de la confrontation de l’homme avec
son milieu ambiant. Il s’agit d’étudier l’action de l’homme dans son environnement et ses
efforts dans l’accomplissement de sa destinée morale et pour améliorer son existence. Du
point de vue culturel ou social, elle interprète l’homme dans sa diversité, dans toutes les
sociétés et à toutes les époques. Sur ce plan, des ethnologues occidentaux, au nom d’un
ethnocentrisme vont juger de primitives certaines sociétés. De l’avis de Lévi-Strauss, il faut
plutôt penser à une relativité voire une diversité des cultures car il ne peut y avoir de
hiérarchie entre elles ; les cultures sont toutes équivalentes.

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