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Gestion de portefeuille

Partie I: Les fondements théoriques et leurs applications

Chapitre 4:
Les modèles d'évaluation
d'actifs
4.1. Introduction

La théorie financière propose différents modèles d'évaluation

Ces modèles sont indispensables car ils fournissent une rentabilité


d'équilibre, une rentabilité normale pour un actif financier en fonction de son
risque.

Ces modèles permettent notamment de :


Sélectionner des titres
Etre capable de calculer une rentabilité anormale (utile pour les études
d'événement, performance de la gestion de fonds).
Estimer le coût du capital lors d'un projet d'investissement

Ce chapitre rappelle les principaux modèles existants et fait également le


point sur leur utilisation en pratique.

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Un exemple de l'importance des MEA (modèles d'évaluation d'actifs):

Une illustration de l'importance des MEA pour le calcul du coût du capital en


pratique est donné par Graham et Harvey (2001).

Ils effectuent un sondage auprès de CFO de 392 firmes américaines. Entre


autres, ils ont demandé sur quelle base ces directeurs financiers calculent
leur coût du capital. Résultats:
sur la base du CAPM 73.49%
rentabilité historique du titre 39.41%
Sur la base d'un modèle de type APT
(avec plusieurs facteurs) 34.29%
à partir d'un modèle de type Gordon-Shapiro 15.74%
(par ex: p=div/(r-g) )
sur la base des anticipations des investisseurs 13.93%
sur la base de décision de régulation 7.04%

Source: J. Graham et C. Harvey, 2001, The theory and practice of corporate finance, Journal of
Financial Economics 60, 187-243.

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4.1. Introduction

4.2. Les modèles théoriques


4.2.1. Le CAPM
4.2.2. L'APT

4.3. Les tests empiriques des modèles


4.3.1. Tests du CAPM dans les années 70-80
4.3.2. Tests de l'APT
4.3.3. Tests récents du CAPM et de ses anomalies

4.4. Les conséquences des résultats en termes d'évaluation

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4.2. Les modèles théoriques

a) Le Capital Asset Pricing model (CAPM)

Le CAPM suppose que les marchés financiers sont en équilibre, que les
agents ont des anticipations homogènes, qu'ils se comportent
conformément à la théorie du portefeuille. Si tout cela est vrai, alors on a :

cov(Ri , Rm )
(
E Ri ) = Rf + ⎡⎣E (R ) − R ⎤⎦
var (Rm )
m f

E (Ri )β= Rf + i
⎡⎣E (R ) − R ⎤⎦
m f

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Cette relation peut être représentée graphiquement, elle est appelée
droite des actifs financiers (ou Security Market Line-SML):

SML
E(R)

E(Rβ>1)

M
E(RM)

E(Rβ<1)

Rf

β
β<1 β=1 β>1

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Il y a eu de nombreuses extensions théoriques du CAPM:

Lintner (1969) anticipations non homogènes


Brennan (1970) effets de la fiscalité
Black (1972) pas de taux hors-risque -> version zero beta
Mayers (1972) inclut des actifs non échangés sur des marchés
Merton (1973) version intertemporelle
Kraus & Litzenberger (1976) prise en compte de la skewness
Levy (1978) prise en compte des coûts de transaction
Breeden (1979) CAPM basé sur la consommation
Adler and Dumas (1983) CAPM international
Amihud and Mendelsom (1986) introduction de la liquidité dans le CAPM
Merton (1987) CAPM avec segmentation du marché

Elles sont toutes plus difficiles à implémenter que le modèle original du fait
de la présence d'un ou plusieurs éléments non observables.

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b) L'Arbitrage Pricing Theory (APT)

L'APT suppose que les rentabilités des titres sont générées par un modèle
à k facteurs et qu'il n'y a pas d'opportunités d'arbitrage. Si cela est vrai, on
a:

E (Ri ) = Rf + bi 1 ⎡⎣E (f1 ) − Rf ⎤⎦ + bi 2 ⎡⎣E (f2 ) − Rf ⎤⎦ + + b ⎡⎣E (f ) − R ⎤⎦


ik k f

Par sa structure ce modèle ressemble au CAPM avec différentes primes de


risques

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Illustration graphique du plan d'évaluation de l'APT à 2 facteurs
avec λ0=0.02, λ1=0.025, λ2=0.03

A et B sont deux exemples de titres mal évalués qui seront ramenés vers le
plan par arbitrage.

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4.3. Les tests empiriques des modèles

Le CAPM et l'APT sont dérivés dans un environnement uni-périodique.

Les anticipations des agents en termes d'espérances, de covariances et de


variances ne sont pas observables. Elles doivent être estimées.

Pour tester les modèles des hypothèses supplémentaires sont néécessaires:


Rentabilités sont normalment et indépendemment distribuées
Distributions (et leurs moments) sont stables dans le temps
On ne doit pas spécifier leur dynamiques ni un ensemble d'info conditionnelles

C'est pour cette raison qu'on appelle cette version des modèles, des MEA
inconditonnels.

Les tests empiriques des modèles et leurs résultats font l'objet d'une
description beaucou plus approfondie dans le cours de Master "Finance
Empirique".

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Un test "ideal" du CAPM

Il consisterait à estimer la régression suivante:


⎛ E (R ) ⎞ β ⎛ ε⎞ ⎛ ⎞
1 1 1
⎜ ⎟ ⎜ ⎟ ⎜ ⎟
(
⎜ E R2 ⎟ ) β ε
⎜ 2⎟ ⎜ 2⎟
γ γ ⎜ ⎟ = + ⎜ ⎟+ ⎜ ⎟
0 1
⎜ ⎟ ⎜ ⎟ 1⎜ ⎟
⎜ ⎟ ⎜ ⎟ ⎜ ⎟
⎜ ( )⎟ β ⎜ ε⎟ ⎜ ⎟
⎝ E Rn ⎠ ⎝ n⎠ ⎝ n

Et faire les tests suivants:


? ?
γ ˆ0 = Rf γ ˆ1 = E (Rm ) − Rf

MAIS ces variables ne sont pas directement observables -> soulève de


nombreux problèmes pour les tests empiriques!

Problèmes communs à tous les tests: anticipations inobservables, horizon


temporel inconnu, tests effectués avec des données multi-périodiques,
critique de Roll (1977)
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4.3.1. Tests du CAPM dans les années 70-80

γγR =ε ˆ + ˆ ˆ +
Tests en coupe transversale de Miller, Scholes (1972) β i 0 1 i

Ri
Graphiquement:

γ ˆ1

γ ˆ0
β ˆ

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Le modèle théorique est: E (Ri )β= Rf + i
(E (R ) − R )
m f

Fama-McBeth (1973):

γβ γR ε= ˆ + ˆ ˆ +
Tests en coupe transversale: it 0t 1t it it

Résultat: γ1 positif

Estiment également une spécification alternative:γβ γR γ= ˆ + εˆ ˆ + ˆ Z +


it 0t 1t it 2 t it it

Z: risque spécifique, β2, γ2 ne sont pas significatifs

Conclusion: CAPM validé !!

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Les anomalies

Banz (1981), Basu (1983)

γβ γR γ= ˆ + εˆ ˆ + ˆ Z +
Estiment des régressions à la Fama-McBeth: it 0t 1t it 2t it it

et trouvent:

Z avec log capitalisation boursière négatif et significatif,


P/E négatif et significatif.

Le CAPM ne prévoit pas la présence de ces variables -> CAPM est rejeté!

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4.3.2. Tests de l'APT

Il y a k facteurs qui déterminent les rentabilités des titres

E (Ri ) = Rf + bi 1 ⎡⎣E (f1 ) − Rf ⎤⎦ + bi 2 ⎡⎣E (f2 ) − Rf ⎤⎦ + + b ⎡⎣E (f ) − R ⎤⎦


ik k f

Comment fait-on ? Il y a 2 possibilités:

Extraction statistique des facteurs

Pré-spécification des facteurs

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Méthodes statistiques pour extraire des facteurs:

Analyse factorielle, on dégage des facteurs synthétiques orthogonaux. On


essaie de voir ensuite s'ils correspondent à des variables observées, pas
beaucoup de succès (Roll et Ross (1980)).

Analyse en composantes principales,cherche à répliquer la matrice de


variances-covariances des rentabilités. On essaie de voir ensuite s'ils
correspondent à des variables observées, pas beaucoup de succès (Connr
et Korajczyk (1986)).

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Facteurs préspécifiés. L'étude la plus connue et la plus ancienne est celle
de Chen, Roll et Ross (1986).

Ils font une analyse à la Fama-Macbeth et trouvent des primes de risque


significatives pour
Variation non-anticipées de l'inflation, prime de risque, variations de la production
industrielle, varaition de la pente des taux
Des primes de risques non significatives pour :
Rentabilités du marché, prix du pétrole, variations anticipées de l'inflation

Donne une description des rentabilités, mais ne valide pas, ni n'invalide pas
l'APT!

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4.3.3. Tests récents du CAPM et de ses anomalies (Fama et French (1992))

FF 92 reprennent la méthodologie de Fama et MacBeth (1973)

Font des tests pour déterminer de toutes les anomalies, lesquelles sont les
plus importantes.

Reprennent: taille, P/E, endettement et book-to-market

Book-to-market : Valeur comptable des titres/valeur de marché des titres

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Ils estiment le modèle suivant en coupe transversale sur la période 1963-
1990:

γβ γR γ= ˆ + ˆ ˆ +γ ˆ ln (MV ) + εˆ ln (B / M ) + avec i = 1,…, N


it 0t 1t i 2t i 3t i i

Leur résultats indiquent que:

Les bêtas ont une relation très faible avec les rentabilités (γ1=0)

Taille (-) et B/M (+) dominent tous les autres effets

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Illustration graphique des résultats de FF-1992

E(R)

SML empirique

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4.4. Les conséquences des résultats en termes d'évaluation

Leurs travaux engendrent un grand débat. Une partie de la communauté


scientifique accepte que book et taille sont des variables qui influencent les
rentabilités, mais qui représentent autre chose, autre facteur de risque.

Ces résultats permettent de justifier certains style d'investissement

Value stocks : titres pas chers, titres qui ont un book-value, earnings,
dividende élevés relativement à leur prix

Growth stocks (glamour stocks): titres qui ont de bonnes perspectives de


croissance (donc prix élevé car valeur actualisée des flux futurs). Titres qui
ont un prix élevé par rapport à leur earnings, dividend, book-to-market.

On trouve que au-delà du risque (bêta) R(value) > R (growth).

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Fama et French (1993) proposent un modèle multi-facteurs fondé sur ces
résultats. Ils construisent deux facteurs artificiels représentant les deux
effets:

Taille: SMB, small minus big, portefeuille représentant la différence entre


les rentabilités des plus petits titres et des plus grands
SMBt = R(Small Caps)t - R(Large caps)t

Book-to-market: HML, High minus low book-to-market, portefeuille


représentant la différence entre les rentabilités des titres à grand B/M et des
titres à faible B/M.
HMLt = R(High B/M stocks)t - R(Low B/M stocks )t

Le modèle multifacteur proposé est :


(Rit − Rft ) = a0 + a1 (Rmt − Rft ) + a2SMBt + a3HMLt + uit

Ils proposent de l'utiliser comme modèle de détermination de la rentabilité


normale.

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Une quatrième anomalie majeur est venue s'ajouter à celles trouvées par
Fama et French (1992). Il s'agit de l'effet dit "momentum"

En effet depuis Jegadeesh et Titman (1993), on a constaté que les titres


présentaient une certaine "inertie" et qu'un portefeuille de gagnants
performait significativement mieux qu'un portefeuille de perdants

On créée un 4e facteur pour tenir compte de cette anomalie:

Momentum: WML, winners minus losers, portefeuille représentant la


différence entre les rentabilités des titres gagnants et des titres perdants
WMLt = R(Winner stocks)t - R(Loser stocks )t

On a le modèle à 4 facteurs de Carhart (1997):


(Rit − Rft ) = a0 + a1 (Rmt − Rft ) + a2SMBt + a3HMLt + a4WMLt + uit

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Depuis lors on utilise ces deux modèles dans la pratique et dans les études
académiques.

On n'a pas trouvé mieux et surtout pas trouvé de justifications théoriques à


ces résultats.

On est toujours à la recherche d'un "bon" modèle (avec des justifications


théoriques) pour expliquer les rentabilités boursières et pour déterminer des
rentabilités "normales"

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