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littéraire
Notions, textes et exercices
NOM : ____________________________________
GROUPE : ____________
Cette version du recueil sur la nouvelle littéraire a été possible grâce à de nombreuses collègues qui, avant
moi, avaient déjà créé, composé, retapé une bonne partie du matériel présenté dans ces pages. Je pense
entre autre à Sylvie Edisbury, Trina Mainville, Mélanie Bernier et Nancy Bourdelais à qui nous disons du
fond du cœur…
Mélissa et Stéphanie
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TABLE DES MATIERES
EXPLORATION ……………………............................................................................ 5
Observations des textes d’exploration ……….…….............................................. 8
LES CARACTÉRISTIQUES DE LA NOUVELLE LITTÉRAIRE …………………................. 9
L’UNIVERS NARRATIF........................................................................................ 10
LE SCHÉMA NARRATIF (rappel)......................................................................... 11
LES PERSONNAGES ........................................................................................... 12
LE NARRATEUR ................................................................................................. 13
Exercices - Le narrateur ................................................................................... 14
LE CADRE SPATIO-TEMPOREL .......................................................................... 16
LA CHRONOLOGIE............................................................................................. 17
L’ATMOSPHÈRE ................................................................................................ 18
Exercices - l’atmosphère et les champs lexicaux ............................................. 21
LE TON .............................................................................................................. 23
L’HARMONISATION DES TEMPS VERBAUX ...................................................... 26
Exercices – l’harmonisation des temps verbaux ……………………………………….…. 27
LES FIGURES DE STYLE ...................................................................................... 29
LIRE .................................................................................................................. 33
ANNOTATION DE LA NOUVELLE LITTÉRAIRE ……………………………………………….. 35
LE BINGO .......................................................................................................... 36
MATIN DÉSERT ................................................................................................. 37
LES JOURNÉES PERDUES .................................................................................. 38
LES TRANSPORTS EN COMMUN ....................................................................... 42
ERREUR FATALE ................................................................................................ 44
L’INCONNUE ..................................................................................................... 48
PRISONNIÈRE .................................................................................................... 51
Les 4 critères d’évaluation en lecture .............................................................. 56
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EXPLORATION
RALENTI
Ce n’est pas l’heure où il rentre normalement, alors elle se poste à une fenêtre de l’étage et l’observe
tandis qu’il remonte l’allée mais dépasse un peu l’endroit où ils se garent d’habitude devant le garage et
arrête la voiture dans le fond près de la haie rabougrie à feuillage persistant, et puis il y a autre chose de
bizarre, c’est qu’elle n’entend pas claquer la portière, elle écoute mais elle n’entend pas, alors elle quitte
lentement et pensivement la fenêtre, descend, et à la porte où il serait encore temps pour elle
d’entendre ses pas elle ne les entend pas, alors telle une somnambule elle sort et continue à avancer au
ralenti comme si elle se frayait un chemin à travers un élément dense et résistant mais transparent
comme l’eau, et au bout de l’allée elle voit qu’il est toujours dans la voiture toujours derrière le volant
bien que le moteur soit arrêté et ce qu’il y a aussi d’anormal est bien sûr qu’il soit affalé les bras autour
du volant et la tête sur les bras, il a les épaules qui tressautent et elle voit qu’il pleure...en fait qu’il
sanglote...et à cet instant elle comprend que leur vie va être déchirée bien qu’elle ne sache pas, tandis
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VOUS DEVEZ BEAUCOUP RÊVER
Il m’avait dit, l’air d’y croire accroché à ses yeux blancs : « Vous devez beaucoup rêver. » Je ne m’étais
jamais vraiment posé la question. En y pensant bien, car l’autre de toute évidence attendait une réponse,
je m’étais rendu compte que non, à vrai dire, je ne rêvais pas, enfin, pas beaucoup, du moins je ne croyais
pas, d’ailleurs, j’étais absolument incapable de me rappeler quelque rêve que ce soit. Un peu comme si
Il était déçu, ça se voyait. « Pourtant, j’aurais cru... » Quelle importance cela pouvait-il avoir ? En quoi
cela pouvait-il le décevoir ? Est-ce que je demande aux gens moi de voir des chevaux, la mer, des boites
de calmars géantes, des tresses de téléphone ou des escaliers troués pendant leur sommeil ? Et puis,
- Et ce n’est pas tout, que je lui ai dit, je n’ai pas d’ambition – je me mettais à crier – et je n’élève pas
Je haletais, j’avais le front mouillé. Il n’y avait pas à en douter, j’avais rêvé.
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LE REFUGE
J’avais choisi cet hôtel pour sa tranquillité. Hors saison. Contre un pourboire substantiel, on m’accorda
Le jour, quand je ne demandais pas qu’on monte mes repas à la chambre, je me présentais à la salle à
manger à des heures où les touristes les plus tardifs avaient déjà terminé le café.
Mais une nuit, proche du sommeil, j’entendis qu’on pleurait dans la chambre voisine, un enfant que
Le lendemain, lorsque je m’en plaignis à la direction, on me regarda d’un œil suspect, puis inquiet, me
faisant remarquer que j’étais le seul occupant de l’étage. Comme j’insistais, vexé par l’incrédulité que
Et c’était vrai. À droite, se trouvait un débarras que personne, passé seize heures, ne fréquentait plus.
Sur la gauche, débouchait un corridor qui venait d’on ne sait trop où.
Pourtant, ce soir-là, à la même heure que la veille, un enfant se mit à hurler, un enfant que personne,
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OBSERVATIONS DES TEXTES D’EXPLORATION
PERSONNAGES
LIEUX
TEMPS
NARRATION
• Type de narrateur
• Point de vue présenté
• Action principale de chaque nouvelle
• Fin de l’histoire
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LES CARACTÉRISTIQUES DE LA NOUVELLE LITTÉRAIRE
1- Récit court
2- Peu de personnages et de lieux
3- L’action tourne autour d’un seul élément
4- La fin (nommée « chute ») est inattendue, surprenante
5- L’évolution psychologique et l’atmosphère sont mises en évidence
LA VRAISEMBLANCE DE L’HISTOIRE
La nouvelle littéraire est une histoire brève qui veut donner une impression de vraisemblance. Les
personnages, les lieux, l’époque et les actions sont présentés comme étant réalistes et crédibles.
Le lecteur est parfois confronté à des éléments invraisemblables mais qui sont racontés de manière à
les rendre vraisemblables dans le cadre de cette histoire.
LA NOUVELLE FANTASTIQUE : jongle avec cette notion de vraisemblance. L’auteur ajoute des éléments
insolites ou inexplicables à un univers vraisemblable. Le personnage se questionne sur ces éléments et
bascule parfois dans la folie. Le lecteur est déstabilisé et souvent, la chute de la nouvelle ne lui donne
pas de réponse satisfaisante.
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L’UNIVERS NARRATIF
Monde fictif, vraisemblable ou fantaisiste, où évoluent les personnages créés par l’auteur (e).
UNIVERS NARRATIF
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LE SCHÉMA NARRATIF (RAPPEL)
Situation initiale Elle présente généralement les personnages, les lieux, l’époque. On y
voit la vie habituelle AVANT qu’un événement vienne briser
l’équilibre.
Élément Il s’agit d’un événement qui vient perturber l’état d’équilibre du
déclencheur personnage principal. Il peut s’agir d’une quête à accomplir, d’une
mission à réaliser ou d’un problème à résoudre.
Déroulement C’est une suite d’actions ou de réactions du personnage face à
(péripéties) l’élément déclencheur. Ce sont ces péripéties qui font progresser le
récit.
Dénouement Il présente la dernière action de l’histoire. C’est la réussite ou l’échec
du personnage par rapport à l’élément déclencheur.
**La nouvelle littéraire présente souvent un dénouement « choc »,
surprenant ou brutal.
Situation finale Elle décrit l’état d’équilibre final après les événements vécus.
**Souvent absente dans la nouvelle littéraire.
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LES PERSONNAGES
Contrairement au roman, la nouvelle littéraire présente une histoire courte où les personnages
sont peu nombreux. La description de ceux-ci est donc sommaire et les caractéristiques
présentées sont souvent moins détaillées mais utiles à la compréhension.
Caractéristiques psychologiques : ce que l’on détermine selon les actions, les pensées.
•Qualités / Défauts
•Tics nerveux
•Traits de caractère
•Manies...
Caractéristiques sociales :
•Sexe
•Âge (enfant, vieillard)
•Nationalité
•Profession / Métier
•Famille (état civil : marié, célibataire, avec ou sans enfants)
•Statut social (classe sociale : pauvre, riche, classe moyenne, aristocratie, etc.)
•Antécédents familiaux...
L’intrigue de la nouvelle met surtout l’accent sur l’évolution psychologique du personnage. Son
état final s’est donc amélioré ou dégradé par rapport à son état initial au fil des péripéties et du
dénouement de l’intrigue.
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LE NARRATEUR
NARRATEUR TÉMOIN
• L’histoire est racontée par un personnage secondaire qui relate ce que vit le héros ;
• Elle est écrite à la 1re et à la 3e personne, parfois même à l’aide de la 1re personne du pluriel
(nous) si le témoin vit l’aventure avec le héros ;
• Le narrateur présente ce qu’il voit et entend, sa vision est donc limitée.
LE RELAIS DE NARRATION :
est un procédé d’écriture qui fait alterner différents narrateurs à l’intérieur de la même
histoire.
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EXERCICES – LE NARRATEUR
C’était à la fin du dîner d’ouverture de chasse chez le marquis de Bertrans. Onze chasseurs, huit jeunes
femmes et le médecin du pays étaient assis autour de la grande table illuminée, couverte de fruits et de
fleurs.
On vint à parler d’amour, et une grande discussion s’éleva, l’éternelle discussion, pour savoir si on
pouvait aimer vraiment une fois ou plusieurs fois. On cita des exemples de gens n’ayant jamais eu qu’un
amour sérieux ; on cita aussi d’autres exemples de gens ayant aimé souvent, avec violence, les hommes,
en général, prétendaient que la passion, comme les maladies, peuvent frapper plusieurs fois le même
être, et le frapper à le tuer si quelque obstacle se dresse devant lui. Bien que cette manière de voie ne fût
pas contestable, les femmes, dont l’opinion s’appuyait sur la poésie bien plus que sur l’observation,
affirmaient que l’amour, l’amour vrai, le grand amour, ne pouvait tomber qu’une fois sur un mortel.
- Je vous dis, moi, qu’on peut aimer plusieurs fois avec toutes ses forces et de toute son âme.
On prit pour arbitre le docteur, vieux médecin parisien retiré aux champs :
- J’ai été appelé, il y a trois mois, auprès de cette vieille femme, à son lit de mort. Elle était arrivée,
dans la voiture qui lui servait de maison […].
Son père était rempailleur et sa mère rempailleuse. Elle n’a jamais eu de logis planté en terre.
Toute petite, elle errait, haillonneuse, vermineuse, sordide. On s’arrêtait à l’entrée des villages, le long
des fossés ; on dételait la voiture ; le cheval broutait ; le chien dormait, le museau sur ses pattes ; et la
petite se roulait dans l’herbe pendant que le père et la mère rafistolaient, à l’ombre des ormes du
chemin, tous les vieux sièges de la commune.
Extrait de Guy de Maupassant, « La Rempailleuse », dans Contes de la Bécasse.
Éditions Larousse, 2008.
B) Identifiez le type du ou des narrateurs dans cet extrait. Indiquez le numéro de la ligne où le
changement de narrateur s’effectue, s’il y a lieu.
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2. A) Lisez le texte suivant.
Je me souviens
Était-ce l’été de ses cinq ans ou de ses six ans ? Elle ne s’en souvient plus exactement, mais se
rappelle très bien qu’elle était trop jeune, trop petite. C’était l’âge où sa mère l’obligeait encore
à faire sa sieste quotidienne. Était-ce un samedi ou un dimanche ? Le weekend, certes,
puisqu’ils se trouvaient au chalet de son oncle maternel. Contrairement à ses frères et sœurs,
elle détestait les siestes. Ce dont elle ne se doutait pas encore, c’est qu’elle allait bientôt
également les craindre. Sa mère alla la conduire dans sa chambre. Était-ce parce qu’elle était
l’aînée qu’on lui avait réservé la chambre la plus éloignée du séjour ? Sa mère la borda,
embrassa délicatement son front puis quitta sa chambre. L’enfant qu’elle était encore sombrait
doucement dans le sommeil quand elle entendit la porte de sa chambre couiner. Ouvrant un
œil, elle se réjouit de voir apparaitre son père. Sûrement qu’il venait la délivrer de ce repos forcé
pour l’amener chasser des grenouilles ou des papillons. Mais alors, pourquoi refermait-il la
porte derrière lui ? Pourquoi s’étendant-il sur le lit de sa fille ?
C’est ce jour-là, songea-t-elle, songeai-je, que j’ai basculé dans le monde des adultes. C’est là
que l’enfant que j’étais a été contrainte à laisser sa place à la femme que je suis devenue.
C) Transformez les sept premières phrases de ce récit de manière que l’extrait biographique
devienne autobiographique. Faites les changements nécessaires.
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LE CADRE SPATIO-TEMPOREL
La nouvelle littéraire est particulière, car elle présente souvent un seul lieu et le temps est
parfois imprécis ou peu défini.
Ces deux éléments sont surtout employés pour aider la vraisemblance (p.9) du récit et pour
créer une atmosphère (p.18).
LE TEMPS
§ Identifier l’époque de l’histoire ; il faut observer les indices propres à une période de
temps donnée (moyens de transport, de communication, façon de vivre des
personnages, etc.)
§ Repérer les indices de temps qui révèlent le déroulement du temps à l’intérieur de
l’histoire ;
§ Identifier si le récit est linéaire (*** voir chronologie)
§ Analyser la durée du récit.
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LA CHRONOLOGIE
Une nouvelle en ordre chronologique ou linéaire présente les actions dans l’ordre réel où elles
se sont produites.
S’il y a des retours dans le passé, si on revient sur des éléments qui ont déjà eu lieu, l’ordre
Une ellipse est un saut dans le temps, c’est-à-dire que des évènements sont passés sous
Le sommaire est un événement ou une suite d’actions de longue durée qui est raconté par le
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L’ATMOSPHÈRE
Ce sont les éléments descriptifs d'un texte qui créent l'atmosphère de celui-ci. Ces mots (qui
forment un champ lexical) installent un climat, une ambiance particulière, c'est ce qui donne
d'ailleurs une couleur unique au récit.
Voici comment, par exemple, les mots peuvent créer une atmosphère sombre (observe bien
les mots en gras) :
La nuit était tiède, c’était une superbe nuit d'été, moins la lune et les étoiles. C'est quelque
chose, je l'avoue. Le ciel nuageux nous annonçait une averse, mais nous enveloppait d'ombres.
Un silence profond régnait partout ; personne sur la route ; pas de lumières aux fenêtres des
maisons voisines. Des morts, rien que des morts ! Nous étions dans le cimetière.
D'une manière générale, les descriptions dotent les lieux et personnages du récit d'une plus
grande réalité et contribuent à façonner l'atmosphère du récit.
L’atmosphère de la nouvelle littéraire est très importante. Il s’agit de l’ambiance dégagée par
l’ensemble de l’histoire.
Les lieux, les objets et le temps sont tous des éléments qui caractérisent l’atmosphère. Celle-ci
est directement reliée aux états d’âme du personnage principal.
Cadavre
Voici à quoi pourrait ressembler un champ lexical sur le thème de la mer dans un texte :
Du haut de la falaise, j'admirais les vagues qui se fracassaient contre les rochers. La plage était
déserte à cette heure si matinale. Je pris un coquillage dans mes mains et je le lançai dans
les flots. Celui-ci se perdit dans l'eau salée.
*** Créer un champ lexical AVANT d’écrire un texte est une excellente stratégie pour aider la
rédaction d’une nouvelle littéraire, car il permet d’éviter les répétitions et d’assurer la
cohérence liée à un thème.
*** Un texte peut contenir plusieurs thèmes, donc plusieurs champs lexicaux.
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L’emploi de figures de style est aussi une façon de créer une atmosphère spécifique.
Par exemple,
§ La comparaison ;
§ La métaphore ;
§ La personnification ;
§ L’ellipse ;
§ Etc.
Le ton du récit correspond aux émotions ou aux sentiments exprimés par les
personnages qui prononcent les paroles formant les dialogues. Le ton peut être
dramatique, humoristique, sarcastique, didactique, autoritaire, agressif, etc.
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EXERCICE - LES CHAMPS LEXICAUX ET L’ATMOSPHÈRE
1- Lisez l’extrait suivant, dans lequel les mots du champ lexical de la forêt sont en gras, puis
répondez aux questions qui suivent.
À Londres où vit Gabrielle Roy, la chaleur de juillet est étouffante. Un jour, dans un
moment d’impulsion, elle monte à bord d’un autobus de la Green Line qui l’amène en
périphérie de la ville.
Subitement, nous étions en forêt. Elle s’était tenue pendant quelque temps à petite
distance, invitante, fraîche, quelque peu inaccessible encore. Et soudain, elle s’était
rapprochée. Maintenant, elle nous enserrait de ses hautes branches qui se nouaient
au-dessus de la route et nous faisaient une merveilleuse voûte toute pleine de
l’étincellement, dans l’ombre, des milliers de clins d’œil du soleil. Ces grands arbres, ces
troncs moussus, ce vert si profond me semblèrent venir jusqu’à nous d’une lointaine
époque. Rien n’y avait sans doute beaucoup changé depuis que Robin des bois et sa
bande y surgissaient pour piller les diligences et, ainsi que le relatent les légendes,
détrousser les riches au profit des pauvres.
3- Décrivez les sentiments ou états d’âme de Gabrielle Roy à ce moment précis de sa vie.
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4- Relevez les mots ou expressions qui, associés aux mots en gras dans le texte, créent
l’atmosphère décrite à la question 2.
5- Indiquez la figure de style dans les 2e, 3e et 4e phrases de l’extrait et précisez en quoi elle
contribue à l’atmosphère créée.
6- Indiquez en quoi l’allusion à Robin des Bois contribue également à l’atmosphère créée.
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LE TON
Le TON du récit est un effet produit lors de l’écriture du texte. Si à l’oral, le ton s’entend et se
comprend facilement, il faut utiliser différents procédés à l’écrit pour le faire ressentir au
lecteur. Le ton indique la manière dont l'énonciateur transmet son message, ce qui est
révélateur de son point de vue, de son opinion.
1- Le ton humoristique
2- Le ton ironique
3- Le ton dramatique
4- Le ton polémique
5- Le ton poétique ou lyrique
6- Le ton didactique
7- Le ton neutre
Pour déterminer le ton de l'auteur dans un texte, il faut se questionner sur son intention de
communication. L'auteur veut-il faire rire, rêver, pleurer, réfléchir ? Quelle émotion (s'il y en a
une) veut-il faire naître chez son public lecteur ?
1- Le ton humoristique
Le ton humoristique est employé par l'auteur d'un texte avec l'intention de faire sourire,
de faire rire.
Le ton ironique est employé par l'auteur dans l'intention de créer une complicité
particulière avec son destinataire (il faut un esprit éveillé pour que l'ironie soit décodée)
afin d'en faire son allié. L'ironie est une forme de moquerie (envers quelqu'un ou
quelque chose) qui présente, avec exagération, le contraire de la pensée véritable de
l'auteur (le lecteur doit donc comprendre que l'auteur du texte insinue le contraire de ce
qu'il a écrit).
Différents mécanismes langagiers, souvent très peu subtils, deviennent des repères
importants quand vient le temps de déceler l'ironie dans un texte.
3- Le ton dramatique
Le ton dramatique est employé avec l'intention de susciter des émotions chez le lecteur
comme la douleur, la terreur, la pitié, la colère. Pour ce faire, l'énonciateur fait usage
d'un vocabulaire fortement connoté (chaque mot est en effet bien choisi pour
déclencher l'émotion voulue).
4- Le ton polémique
Le ton polémique est employé avec l'intention de soulever l'indignation chez le public
lecteur, de susciter le débat à propos d'un sujet controversé. L'auteur qui en fait usage
souhaite dresser une critique sévère de son sujet. Pour ce faire, il décrit la situation avec
une véhémence assurée, voire parfois avec une certaine agressivité (décelée dans le
choix des mots).
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Quand on est confronté à un ton polémique, on sent que l'auteur est loin d'être
indifférent par rapport à ce qu'il présente. Bien au contraire, l'auteur qui emprunte le
ton polémique cherche à faire réagir vivement son destinataire afin qu'il soit aussi
touché que lui par le sujet et agisse pour que la situation change.
Le ton poétique est employé avec l'intention d'émouvoir le public lecteur en faisant
appel à la beauté esthétique du langage. L'auteur qui emploie un ton poétique exprime
des sentiments intimes dans une langue soignée, rythmée, imagée.
En plus de jouer sur la sensibilité du lecteur, le ton poétique vise à frapper l'imaginaire
par le biais de différents procédés stylistiques comme :
6- Le ton didactique
Des procédés comme la reformulation, qui permet de préciser le sens d'un mot, et la
comparaison, qui permet le rapprochement entre un élément abstrait et un élément
concret, trouvent tout à fait leur place dans un texte au ton didactique.
7- Le ton neutre
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L’HARMONISATION DES TEMPS VERBAUX
Le choix des temps de verbe doit respecter un système établi.
En effet, « harmoniser les temps
de verbes dans un récit » exige :
Un temps verbal principal : Utilisé pour la narration des actions qui font avancer l’histoire.
Des temps d’accompagnement : Employés pour raconter des actions antérieures ou
postérieures et pour les descriptions, les explications ou les commentaires.
RÉCIT AU PRÉSENT
Temps principal Temps d’accompagnement
§ Présent (principales actions faisant § Présent (descriptions, actions de
avancer l’histoire.) longue durée)
§ Passé composé (actions antérieures)
§ Futur simple (actions futures)
*** HORREUR ! Il n’y a pas de trucs, pas de règles pour savoir si les verbes du 3e groupe
se terminent avec le son I ou U… Il faut vérifier. Et, svp, faites-le !
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EXERCICE - HAROMONISATION DES TEMPS VERBAUX
Ma chère Thérèse,
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D’habitude, je suis polie, mais là je crois que j’(dire – antériorité, événement achevé)
____________________________________ des gros mots quand je me suis aperçue que j’(oublier – antério-
rité) ____________________________________ mes clés à l’intérieur de mon appartement. C’était juste comme
je (mettre – simultanéité, événement présenté dans sa durée) ____________________________________ le
pied sur la première marche. Si j’(avoir – simultanéité) ____________________________________ des
obsessions, comme le prétendent ceux qui ont la poutre, je ne serais pas tombée dans l’escalier. Si j’(avoir –
simultanéité) ____________________________________ des obsessions, je me serais rappelé comme l’escalier
(risquer – simultanéité) ____________________________________ d’être glissant. Au lieu de quoi, je ne pensais
plus qu’à mes clés et je me demandais où je (passer – postériorité) ____________________________________
la nuit.
La nuit, je l’ai passée à l’hôpital et toutes les nuits suivantes. Ça fait trois mois que j’y (être – simultanéité)
____________________________________ et j’espère qu’on me
(trouver – postériorité) ____________________________________ au plus vite un endroit où passer ma
convalescence.
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LES FIGURES DE STYLE
Un texte comportant des figures de style est plus expressif et de nature à émouvoir, à séduire
et à convaincre le lecteur.
On retrouve des figures de style dans tous les types de textes. Elles se retrouveront toutefois
en plus grand nombre dans les textes littéraires, particulièrement les textes poétiques.
Les figures de style font partie des outils liés à la rhétorique. La rhétorique, c’est l’art de
convaincre et de plaire. Les figures de style ont donc cette double fonction : une fonction
argumentative et une fonction d’embellissement.
Les figures de style aident à toucher le lecteur. S’en servir permet d’être plus convaincant et les
analyser permet d’être plus éclairé sur le message transmis par l’auteur d’un texte ou d’un
discours.
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Le parallélisme On utilise une construction Demain, je partirai.
semblable pour deux énoncés Demain, je m'engagerai.
différents.
L'anaphore On répète les mêmes termes Souffrons…Souffrons…
en début et en fin de phrase. (V.Hugo)
Gradation On fait se succéder des termes Je me meurs, je suis mort, je
(= énumération) en croissance ou décroissance. suis enterré.
(Molière)
L'hyperbole C'est une exagération. Je meurs de faim.
La litote Consiste à dire moins pour Va, je ne te hais point.
suggérer plus. (Corneille)
L'euphémisme On atténue une idée brutale ou Il a vécu (= il est mort)
violente.
La comparaison Deux éléments sont Ce jeune garçon est
rapprochés avec un mot outil beau comme un Apollon.
de comparaison.
La métaphore Une comparaison implicite, Les jeunes filles caquettent au
sans outil de comparaison. fond de la classe.
La personnification On prête des comportements Les arbres gémissent au vent.
humains à une chose ou une
animal.
L'allégorie On rend une idée abstraite. La mort -> la faucheuse.
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LES CRITÈRES D’APPRÉCIATION D’UN TEXTE LITTÉRAIRE
Un critère d’appréciation doit
présenter un élément observable
de l’œuvre ainsi que sa qualité ou son défaut.
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La complexité du récit Niveau de difficulté à la lecture (vocabulaire), longueur des
phrases, nombre de personnages, dialogue et narration,
chronologie des événements, etc.
L’originalité du récit En quoi se distingue le récit d’autres œuvres ?
Est-ce que la fin est inattendue ?
L’originalité des thèmes, l’ordre de présentation des
actions, les passages particulièrement marquants, etc.
L’intrigue, le suspense Histoire passionnante, prévisible ?
Actions surprenantes ou banales ?
Un truc : faites-les en premier. Vous êtes plus concentrés au début de l’examen et vous
êtes donc sûrs de ne pas manquer de temps…
32
Lire…
Lire…
* Orsenna *
33
34
ANNOTATION DE LA NOUVELLE LITTÉRAIRE
7. la chute de l’histoire
Situation initiale
Élément déclencheur
Déroulement
Dénouement
Situation finale
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LE BINGO
Elle jouait au bingo presque tous les soirs de la semaine. Cela lui passait le temps. Elle ne
gagnait pas souvent. Mais pour rien au monde, elle ne manquerait son bingo.
Dans cette grande salle, dans cette chaleur étouffante où l’on entendait le claquement
des jetons, madame Gagnon s’animait, les joues toutes rouges. Elle s’absorbait. Elle
étalait ses nombreuses cartes sur la table, fumait une cigarette après l’autre. Elle
convoitait ce mille dollars. Elle haletait. La sueur coulait sur son front. Parfois, ses mains
moites tremblaient lorsqu’elle allumait une nouvelle cigarette. Les soirées de bingo
étaient l’un des plus beaux moments de sa vie. Elle rêvait. Elle irait aux États-Unis avec
l’argent gagné. Elle séjournerait dans cette Floride chaude, langoureuse, au bord de la
mer. Elle étrennerait un nouveau maillot de bain, un bijou original lors de ses grandes
soirées. Elle essaierait une nouvelle teinte de cheveux : blond platine. Bref, le bonheur
lui montait à la tête.
-B7
Le numéro fatal ! Madame Gagnon avait en main le jeton gagnant. Toute nerveuse,
chancelante, elle enleva la cigarette de sa bouche, l’écrasa sur la table. Et au lieu de
placer le jeton sur le chiffre bienheureux, de crier BINGO, elle mâchouilla le jeton, en
proie à une violente émotion. Il resta pris dans sa gorge.
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MATIN DÉSERT
L’édifice désaffecté a au moins cinq étages et je me demande ce qu’il fait sur le toit à
sept heures du matin. C’est samedi et les rues sont pratiquement désertes encore. De la
rue des Remparts, je suis probablement le seul à le voir s’avancer sur le vieux papier
goudronné, usé, percé, troué. Il n’enfonce pas. Il ne fait pas le poids et il le sait.
Rendu au bord du toit, au bord du vide, bien au bord, il s’arrête sans vaciller. La
démarche dodelinante jusque-là est remplacée par une immobilité incroyable. Le corps
à moitié dans le vide ne bouge absolument pas. Puis il se décide. Il s’abandonne et se
laisse tomber.
Ni les chatons ni la mère n’ont levé la tête. Ni la mère ni les chatons ne l’ont vu basculer.
Les gens non plus apparemment, assez nombreux maintenant, ne trouvent rien de
particulier à voir un pigeon s’envoler.
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LES JOURNÉES PERDUES
Quelques jours après avoir pris possession de sa somptueuse villa, Ernst Kazirra,
rentrant chez lui, aperçut de loin un homme qui sortait, une caisse sur le dos, d’une
porte secondaire du mur d’enceinte, et chargeait la caisse sur un camion.
Il n’eut pas le temps de le rattraper avant son départ. Alors, il le suivit en auto. Et le
camion roula longtemps, jusqu’à l’extrême périphérie de la ville, et s’arrêta au bord d’un
vallon.
Kazirra descendit de voiture et alla voir. L’inconnu déchargea la caisse et, après
quelques pas, la lança dans le ravin, qui était plein de milliers et de milliers d’autres
caisses identiques.
- Quelles journées ?
- Tes journées.
- Mes journées ?
- Tes journées perdues. Les journées que tu as perdues. Tu les attendais, n’est-ce
pas ? Elles sont venues. Qu’en as-tu fait ? Regarde-les, intactes, encore pleines. Et
maintenant... »
Kazirra regarda. Elles formaient un tas énorme. Il descendit la
pente et en ouvrit une.
38
À l’intérieur, il y avait une route d’automne, et au fond Graziella, sa fiancée, qui s’en
allait pour toujours. Et il ne la rappelait même pas.
Il en ouvrit une autre. C’était une chambre d’hôpital, et sur le lit son frère Josué,
malade, qui l’attendait. Mais lui était en voyage d’affaire.
Il en ouvrit une troisième. À la grille de la vieille maison misérable se tenait Duck, son
mâtin fidèle qui l’attendait depuis deux ans, réduit à la peau et aux os. Et il ne songeait
même pas à revenir.
Dino Buzzati, « Solitudes », dans Les nuits difficiles, Le livre de poche, 1975.
Traduit de l’anglais par Michel Sager.
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EXERCICE - Les journées perdues
5. Croyez-vous avoir vous aussi des caisses de journées perdues dans votre passé ?
o OUI o NON
Expliquez :
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LES TRANSPORTS EN COMMUN
Elle a sauté entre les rails, dans un froissement raide de ciré. Elle n’est pas tombée, c’est
surprenant pour un grand corps aussi empêtré que le sien. Et maintenant, elle se tient
tranquille, son sac à main bien amarré sur l’épaule. Elle fait comme les autres, elle attend le
métro, mais pas pour y monter, très manifestement.
Ça se répand comme une grippe intestinale parmi les transportés de l’heure de pointe, la
station Berri au grand complet se masse près de la voie pour mieux reluquer ça : ils se rendent
compte, les gens, que c’est un drame qui est en train de s’embryonner sous leurs yeux, et ça
les laisse tout étourdis, tout excités, ils n’ont pour la plupart jamais vu de suicidée pour de vrai,
en chair et en ciré comme je vous parle.
Il y a Conrad parmi la foule, il est vendeur de souliers chez Pegabo et un peu plus petit que la
moyenne, ce qui le prive du spectacle. Il comprend tout de suite que quelque chose d’insolite
se trame et il s’approche, lui aussi, pour tenter d’attraper des bribes de l’aventure. Les gens
marmottent entre eux comme de vieilles connaissances, « C’est une désespérée ! » clame
devant Conrad un grand type qui voit tout et qui a beaucoup lu, probablement. À force de
jouer des coudes, Conrad se faufile au premier rang et il l’aperçoit. Elle a des lunettes, la
trentaine, un ciré noir qui lui fait une silhouette invraisemblable. Elle tourne le dos à tout le
monde, l’air d’affirmer que cette histoire ne la concerne en rien, elle s’achemine lentement
vers la gueule sombre du tunnel, d’où s’exhalent déjà des grondements de wagons en marche.
À la regarder comme ça, tellement tranquille, on ne comprend pas, ce n’est pas le genre à avoir
connu des peines d’amour-ce n’est pas le genre à avoir connu quoi que ce soit, d’ailleurs, et
sans doute est-ce là une raison suffisante pour se tenir ainsi si résignée face à un métro
homicide qui s’avance.
Quelqu’un près de Conrad hurle : « Il faut faire quelque chose ! » et Conrad, avec un retard un
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peu abasourdi, se rend compte que c’est de lui qu’est sortie cette vocifération farfelue. Les
autres autour marquent leur accord de principe par des hochements de tête vaguement
fatalistes, oui, certes, il faut faire quelque chose, mais quoi, que peut-on contre la mort et
n’est-il pas déjà trop tard, le métro s’en vient, pauvre fille, pauvres enfants, pauvres parents de
cette pauvre fille. Le métro s’en vient, Conrad ne veut pas être celui qui agit, n’a jamais voulu,
le métro s’en vient, son mugissement de mécanique emballée monte comme une fièvre, trop
tard pour prévenir les contrôleurs là-haut, trop tard pour parlementer avec la fille et la
convaincre – de quoi, au fait ? Madame, la vie vaut la peine, restez en vie madame, si personne
ne vous aime, moi je vous aimerai...Comment le croirait-elle, lui qui n’aime que les hommes ?
Et tout à coup, Conrad plonge dans la fosse sans réfléchir, il saute sur la fille, l’assomme à
moitié, il la lance telle une botte de foin sur le quai et s’y projette lui- même, tant l’émotion
décuple les forces.
Et soudain, surgie d’on ne sait où, une équipe de télévision entière se dresse devant Conrad,
les projecteurs l’éblouissent, on le hisse sur des épaules et on l’applaudit. La fille en ciré a
enlevé ses lunettes et son ciré, elle est très belle comme dans les annonces d’esthéticienne
Avant- Après, elle explique à Conrad qu’il s’agit d’un test télévisé en direct sur l’héroïsme
ordinaire, c’est lui qui gagne, est-il content ? Conrad est interviewé au Point et à Rencontres, il
fait la une de toutes les presses du lendemain, Jean Chrétien lui offre une cravate, le pape lui
télécopie des indulgences, il reçoit la légion d’honneur et la croix de Saint-Jean- Baptiste.
Ça l’écoeure, Conrad. Il a dû changer de job parce que les clientes le harcelaient - c’est vous le
héros, est-ce que je peux vous toucher ?... Maintenant, il ne prend plus le métro, il marche. Et
quand il se trouve arrêté à un feu rouge, à côté d’un aveugle, par exemple, il ne l’aide pas à
traverser comme il l’aurait fait auparavant, non monsieur, il le bouscule un peu, en sourdine,
pour qu’il se casse la gueule.
43
ERREUR FATALE
M. Walter Baxter était depuis de longues années grand lecteur de romans policiers :
quand il décida d’assassiner son oncle, il savait donc qu’il ne devrait pas commettre le
moindre impair.
Il savait aussi que pour éviter toute possibilité d’erreur ou d’impair, le mot d’ordre
devait être « simplicité ». Une rigoureuse simplicité. Pas d’alibi préparé à l’avance et qui
risque toujours de ne pas tenir. Pas de modus operandi compliqué. Pas de fausses pistes
manigancées. Si, quand même, une fausse piste, mais petite. Toute simple. Il faudrait
qu’il cambriole la maison de son oncle, et qu’il emporte tout l’argent liquide qu’il y
trouverait, de façon que le meurtre apparaisse comme une conséquence du
cambriolage. Sans cela, unique héritier de son oncle, il se désignerait trop comme
suspect numéro un.
Il prit tout son temps pour faire l’emplette d’une pince-monseigneur dans des
conditions rendant impossible l’identification de l’acquéreur. La pince-monseigneur lui
servirait à la fois d’outil et d’arme.
Il mit soigneusement au point les moindres détails, car il savait que la moindre erreur lui
serait funeste et il était certain de n’en commettre aucune. Avec grand soin, il fixa la
nuit et l’heure de l’opération.
La pince-monseigneur ouvrit une fenêtre sans difficultés et sans bruit. Il entra dans le
salon. La porte donnant sur la chambre à coucher était grande ouverte, mais comme
aucun bruit n’en venait, il décida d’en finir d’abord avec la partie cambriolage de
l’opération.
Il savait où son oncle gardait son argent liquide, mais il tenait à donner l’impression que
le cambrioleur l’avait longuement cherché. Le beau clair de lune lui permettait de bien
voir à l’intérieur de la maison ; il travailla sans bruit...
44
Deux heures plus tard, rentré chez lui, il se déshabilla vite et se mit au lit. La police
n’avait aucune possibilité d’être alertée avant le lendemain, mais il était prêt à recevoir
les policiers si par hasard ils se présentaient avant. L’argent et la pince-monseigneur, il
s’en était débarrassé. Certes, cela lui avait fait mal au cœur de détruire quelques
centaines de dollars en billets de banque, mais c’était une mesure de sécurité
indispensable – et quelques centaines de dollars étaient peu de chose, à côté des
cinquante mille dollars au moins qu’allait représenter l’héritage.
On frappa à la porte. Déjà ? Il se força au calme, alla ouvrir. Le shérif et son adjoint
entrèrent en le bousculant :
La mâchoire de Walter Baxter s’affaissa. Il avait, malgré tout, commis une erreur.
Il avait, certes, conçu le crime parfait ; mais le cambriolage l’avait tellement obnubilé
qu’il en avait oublié de tuer.
Ray Bradbury, Un dimanche tant bien que mal, Éditions Denoël, 1979. Traduit par R. Delouya et H. Robillaud.
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1. A) Lis une première fois le texte.
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6. Quelles sont les deux principales caractéristiques psychologiques du personnage
§ __________________________________________________________________
§ __________________________________________________________________
§ __________________________________________________________________
§ __________________________________________________________________
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47
L’INCONNUE
Il regarda dehors par la fenêtre. Le cœur lui serra. Là, sur le trottoir, par-delà sa
pelouse… Quelle assurance ! Brune et magnifique dans la clarté du soir, l’inconnue avait
une démarche fière et souple, rapide, allègre et délurée. Il sourit aussitôt. Le soleil
couchant l’éblouit, la tête lui tourna. L’herbe tiède embaumait…
C’était la nuit. Impossible ! Il avait encore rêvassé… Mais non ! Là-bas, dans la lueur
d’un lampadaire rétro, la jeune femme montait un escalier. Il courut vers elle, sonna à
la porte qui venait de se fermer. Des fenêtres s’éclairèrent, trouant l’obscurité. Il
entendit bourdonner des accords de danse. Un domestique âgé lui ouvrit. Des parfums
l’accueillirent.
Dans le grand salon tout ébloui de lumière, on dansait un tango. Habits noirs et robes
longues. Une douzaine de couples s’interrompirent pour le dévisager. Ils lui firent des
signes de tête enjoués puis reprirent leur danse. Le cœur lui serra de nouveau : sa belle
inconnue venait de l’inviter à danser ! La fête était pour lui.
Ils dansaient, dansaient, dansaient… Elle avait de longs yeux verts, presque
transparents. Les autres couples s’en allaient tour à tour en les saluant avec malice, elle
et lui, et ils se retrouvèrent seuls. Il la pressa contre lui, la tête lui tournait. Joie du
vertige. Blessure du désir, de l’âge et du cœur… Il s’effondra.
Il gisait sur sa propre pelouse, dans l’obscurité. Des voix bourdonnaient à son oreille, à
la fois claires et lointaines. « Je l’ai vue tomber en sortant de chez lui. Il se pressait la
poitrine. » « Il n’a pas l’air de souffrir. » La terre se creusa sous lui et il se fit un grand
silence.
Alors seulement, il put l’entendre venir. Comme si des pieds nus ne faisaient
qu’effleurer l’herbe avec une infinie délicatesse, déjà.
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1. Dresse le SCHÉMA NARRATIF du texte que tu viens de lire.
Situation initiale
Élément déclencheur
Déroulement
Dénouement
Situation finale
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PRISONNIÈRE
Quel malheur !
Le désespoir m’envahit. Emprisonnée ! Moi ! Moi qui jouissais de ma précieuse liberté, sans me
soucier, sans penser qu’elle pourrait un jour m’être enlevée et ensuite jetée au vent comme ces
feuilles d’automne balayées par la brise.
Quelle misère !
Tout s’est passé si vite ; je me souviens à peine des détails. Il y a un instant, je me promenais, libre
comme je l’ai toujours été, quand, soudain, je me suis rendu compte que des murs s’érigeaient autour
de moi. J’ai paniqué. J’ai contourné les murs à la recherche d’une sortie, mais j’ai enfin compris avec
terreur que j’étais prisonnière.
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J’ignore qui m’a enfermée dans cet enfer. Je sais encore moins qui a le pouvoir de m’en délivrer. Oh !
j’ai essayé de m’enfuir, croyez-moi. J’ai passé ce qui me semble être des heures inter- minables à
tenter de dénicher une issue. Mais mes espoirs d’évasion ont lamentablement échoué. À un moment
donné, j’ai été prise d’une rage folle. J’ai hurlé et je me suis lancée sur les parois en les martelant de
toutes mes forces.
Je ne saurais décrire cet enfer dans lequel on m’a enfermée. C’est tellement froid que je ressens
constamment un courant d’air glacial qui me transperce le corps et l’âme.
Les murs de ma prison sont gigantesques. Ils m’étouffent. Je me sens comme si, d’un instant à l’autre,
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Je vais mourir, je le sens au plus profond de mes tripes. Personne n’est venu me voir, personne ne m’a
expliqué ma présence dans cet endroit, personne ne m’a dit pourquoi on m’a emprisonnée. Mais qu’ai-
je fait de si répréhensible ? Je n’ai jamais causé de tort à quiconque. Comment concevoir qu’il existe un
être capable de tant de méchanceté ?
Je suis si jeune. Il est impensable que des gens me détestent, moi qui ai toujours vécu paisiblement,
honorablement même. J’aimais la vie. Je vivais parfois seule, parfois avec mes amis, parfois avec ma
famille.
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Personne n’appréciait la liberté comme moi. Je me plaisais à gambader innocemment, à goûter la
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douce brise sur mon visage, la chaleur réconfortante du soleil sur mon dos.
Toutes ces beautés m’enivraient. Je n’aurais jamais cru perdre ces grands bonheurs en un rien de
temps.
Ce monde me semblait sans danger. Mais cette illusion est devenue ma défaite. Je suis victime de la
haine et de la cruauté qui empoisonnent notre univers.
Pourtant, on m’a légué ce destin pénible, ce maudit supplice qui peu à peu déchire mon cœur, atrophie
mon corps, vide petit à petit mon âme de toutes ses forces. Je commence à croire que personne ne
mérite ma confiance. J’ignore toujours qui m’a enfermée ici. Si je m’en sors, comment pourrai-je
encore avoir confiance en la vie ? Comment même songer à aimer dans ce monde flétri, blasé, souillé,
qui réserve un sort si cruel à une si pauvre créature ?
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Je faiblis à chaque seconde. L’oxygène se raréfie dans cette prison. Je martèle ses parois et je me jette
telle une enragée contre elles, comme si au fond de moi scintillait toujours l’espoir de briser les murs
qui me retiennent.
Il me semble voir à travers les murs. Je distingue des formes qui bougent, qui dansent, qui font du
bruit. Je me mets à hurler comme une démone, mais personne n’entend mes cris, mes pleurs.
Personne ne veut m’aider ! Je veux fuir ! Exister !
Je respire avec peine. Est-ce que mon bourreau est le moindrement préoccupé par ma survie ?
S’imagine-t-il qu’il va me laisser pourrir dans cette prison ? Mourir seule, sans mes amis, sans ma
famille !
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Je donnerais n’importe quoi pour apercevoir un visage familier. N’importe qui... Juste un visage !
Je ne veux pas mourir seule...
Ah ! si seulement je pouvais espérer un tant soit peu être secourue ! Je pourrais faire preuve de
bravoure et attendre des secours. Mais non ! Comment pourrait-on savoir où je suis ? Il est probable
que personne n’a vu où je suis enfermée. On m’aurait aidée depuis longtemps déjà.
Seule !
Mon géôlier* n’a pas daigné venir me visiter une seule fois. Même pas pour me dévoiler la raison de
mon incarcération. Encore moins pour me donner à manger ou pour m’offrir à boire, ni pour venir
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prendre conscience de ma douleur. Même pas pour rire de moi, pour me regarder de ses yeux
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Le temps s’écoule si lentement... mais aussi à vive allure. Il me semble que chaque seconde dure une
éternité. Tout mon être est en train d’éclater.
Non! Va-t’en! Je ne veux pas de toi! Bien sûr, je sais que tu apaiseras mes souffrances. Je devrais
t’ouvrir grands les bras et te laisser me prendre. À défaut de m’évader de cette prison, je m’éva- derais
de ma prison de chair.
Non ! C’est ridicule ! Je refuse de mourir. Tant que je garde espoir, je peux vaincre mon destin !
Aïe ! Est-ce que je rêve ? Quelqu’un s’approche de moi. Je ne peux pas le voir, mais j’entends ses pas,
comme de la musique à mes oreilles.
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Libre ! Oui ! Ma prison s’ouvre toute grande ! Je ne peux iden- tifier mon libérateur, j’ai à peine le
temps de le remercier. Je m’enfuis aussi rapidement que mon corps me le permet.
Oh ! merci ! merci !
Liberté. Je m’abreuve de ce mot comme si c’était une fontaine d’eau fraîche après la traversée du
désert.
— Ah ! rien de grave. J’ai ouvert la fenêtre. Il y avait une mouche prisonnière entre les deux vitres.
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Le lexique
1. Trouve, entre les lignes 1 à 10, une comparaison pour décrire le sentiment de la prisonnière.
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3. Donne une suite lexicale synonyme de « agonise à petit feu », ligne 55.
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4. Relève, entre les lignes 56 à 63 deux pares de mots ou de suites lexicales ayant une relation
d’antonymie.
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5. Relève, entre les lignes 71 et 76, les mots qui appartiennent à un même champ lexical, puis
précise e champ lexical.
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C) Comment as-tu identifié ces énonciateurs ?
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La séquence dominante narrative
7. A) Trouve, entre les lignes 44 à 72, quatre mots ou groupes de mots qui désignent Jacques et
qui permettent de percevoir que le narrateur modifie sa vision de ce dernier.
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B) Comment se traduit ce changement de perception chez le narrateur ?
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8. Détermine le narrateur du récit et son statut. Justifie ta réponse à l’aide d’éléments du texte.
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Les caractéristiques des quatre dimensions de la lecture
Les conseillères pédagogiques de français de la CSDM, septembre 2010
Document inspiré d’une formation du MELS, février, 2010
Comprendre
• renvoie à la compréhension de base du texte;
• se distingue par son caractère objectif;
• respecte les droits du texte ou les droits de
l’auteur;
• implique un processus permettant d’associer
les éléments du texte pour lui donner un sens.
Apprécier
• renvoie à un jugement porté sur le texte à partir d’un ou de plusieurs critères;
• peut véhiculer une opinion aussi bien négative, positive que nuancée ;
• implique une mise en relation d’un texte avec un ou plusieurs autres textes;
• suppose le contact fréquent avec des oeuvres nombreuses et variées;
• s’actualise dans des contextes d’échange où le partage des appréciations est favorisé.
Réagir
• se distingue par son caractère subjectif;
• renvoie aux effets que le texte produit sur le lecteur;
• respecte les droits du lecteur;
• permet d’exprimer et d’expliciter les émotions,
les sensations et les sentiments suscités par le texte;
• s’actualise dans des contextes où le partage des
diverses façons de voir, de recevoir et de percevoir Interpréter
lle texte est sollicité. • renvoie aux diverses significations que l’on
peut prêter à un texte sans toutefois le contredire;
• révèle un certain équilibre entre les droits du
lecteur et les droits de l’auteur;
• suppose la fréquentation de textes résistants;
• s’actualise dans des contextes d’échanges où le
partage des interprétations est favorisé.
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