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La nouvelle

littéraire
Notions, textes et exercices

NOM : ____________________________________

GROUPE : ____________
Cette version du recueil sur la nouvelle littéraire a été possible grâce à de nombreuses collègues qui, avant
moi, avaient déjà créé, composé, retapé une bonne partie du matériel présenté dans ces pages. Je pense
entre autre à Sylvie Edisbury, Trina Mainville, Mélanie Bernier et Nancy Bourdelais à qui nous disons du
fond du cœur…

Mélissa et Stéphanie

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TABLE DES MATIERES
EXPLORATION ……………………............................................................................ 5
Observations des textes d’exploration ……….…….............................................. 8
LES CARACTÉRISTIQUES DE LA NOUVELLE LITTÉRAIRE …………………................. 9
L’UNIVERS NARRATIF........................................................................................ 10
LE SCHÉMA NARRATIF (rappel)......................................................................... 11
LES PERSONNAGES ........................................................................................... 12
LE NARRATEUR ................................................................................................. 13
Exercices - Le narrateur ................................................................................... 14
LE CADRE SPATIO-TEMPOREL .......................................................................... 16
LA CHRONOLOGIE............................................................................................. 17
L’ATMOSPHÈRE ................................................................................................ 18
Exercices - l’atmosphère et les champs lexicaux ............................................. 21
LE TON .............................................................................................................. 23
L’HARMONISATION DES TEMPS VERBAUX ...................................................... 26
Exercices – l’harmonisation des temps verbaux ……………………………………….…. 27
LES FIGURES DE STYLE ...................................................................................... 29
LIRE .................................................................................................................. 33
ANNOTATION DE LA NOUVELLE LITTÉRAIRE ……………………………………………….. 35
LE BINGO .......................................................................................................... 36
MATIN DÉSERT ................................................................................................. 37
LES JOURNÉES PERDUES .................................................................................. 38
LES TRANSPORTS EN COMMUN ....................................................................... 42
ERREUR FATALE ................................................................................................ 44
L’INCONNUE ..................................................................................................... 48
PRISONNIÈRE .................................................................................................... 51
Les 4 critères d’évaluation en lecture .............................................................. 56

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EXPLORATION

RALENTI

Ce n’est pas l’heure où il rentre normalement, alors elle se poste à une fenêtre de l’étage et l’observe

tandis qu’il remonte l’allée mais dépasse un peu l’endroit où ils se garent d’habitude devant le garage et

arrête la voiture dans le fond près de la haie rabougrie à feuillage persistant, et puis il y a autre chose de

bizarre, c’est qu’elle n’entend pas claquer la portière, elle écoute mais elle n’entend pas, alors elle quitte

lentement et pensivement la fenêtre, descend, et à la porte où il serait encore temps pour elle

d’entendre ses pas elle ne les entend pas, alors telle une somnambule elle sort et continue à avancer au

ralenti comme si elle se frayait un chemin à travers un élément dense et résistant mais transparent

comme l’eau, et au bout de l’allée elle voit qu’il est toujours dans la voiture toujours derrière le volant

bien que le moteur soit arrêté et ce qu’il y a aussi d’anormal est bien sûr qu’il soit affalé les bras autour

du volant et la tête sur les bras, il a les épaules qui tressautent et elle voit qu’il pleure...en fait qu’il

sanglote...et à cet instant elle comprend que leur vie va être déchirée bien qu’elle ne sache pas, tandis

qu’elle avance vers lui au ralenti, ni comment ni pourquoi.

OATES, Joyce Carol, Paris, 1993

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VOUS DEVEZ BEAUCOUP RÊVER

Il m’avait dit, l’air d’y croire accroché à ses yeux blancs : « Vous devez beaucoup rêver. » Je ne m’étais

jamais vraiment posé la question. En y pensant bien, car l’autre de toute évidence attendait une réponse,

je m’étais rendu compte que non, à vrai dire, je ne rêvais pas, enfin, pas beaucoup, du moins je ne croyais

pas, d’ailleurs, j’étais absolument incapable de me rappeler quelque rêve que ce soit. Un peu comme si

on m’avait demandé si je parlais arawak – tiens, non.

Il était déçu, ça se voyait. « Pourtant, j’aurais cru... » Quelle importance cela pouvait-il avoir ? En quoi

cela pouvait-il le décevoir ? Est-ce que je demande aux gens moi de voir des chevaux, la mer, des boites

de calmars géantes, des tresses de téléphone ou des escaliers troués pendant leur sommeil ? Et puis,

c’est qu’il commençait à m’agacer avec ses manières d’interrogatoire et de désolation.

- Et ce n’est pas tout, que je lui ai dit, je n’ai pas d’ambition – je me mettais à crier – et je n’élève pas

d’écrevisse dans ma baignoire et ne mange pas d’yeux crus !

Je haletais, j’avais le front mouillé. Il n’y avait pas à en douter, j’avais rêvé.

PELLERIN, Gilles, « Ni le lieu, ni l’heure » Québec, Éd. De l’instant même, 1987

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LE REFUGE

J’avais choisi cet hôtel pour sa tranquillité. Hors saison. Contre un pourboire substantiel, on m’accorda

une chambre en retrait, dans une aile quasi déserte.

Le jour, quand je ne demandais pas qu’on monte mes repas à la chambre, je me présentais à la salle à

manger à des heures où les touristes les plus tardifs avaient déjà terminé le café.

Mais une nuit, proche du sommeil, j’entendis qu’on pleurait dans la chambre voisine, un enfant que

personne ne semblait consoler. Cela dura longtemps, plus d’une heure.

Le lendemain, lorsque je m’en plaignis à la direction, on me regarda d’un œil suspect, puis inquiet, me

faisant remarquer que j’étais le seul occupant de l’étage. Comme j’insistais, vexé par l’incrédulité que

suscitait ma démarche, on me rappela que ma chambre n’était voisine d’aucune autre.

Et c’était vrai. À droite, se trouvait un débarras que personne, passé seize heures, ne fréquentait plus.

Sur la gauche, débouchait un corridor qui venait d’on ne sait trop où.

Pourtant, ce soir-là, à la même heure que la veille, un enfant se mit à hurler, un enfant que personne,

apparemment, ne se souciait de consoler.

BERGERON, Bertrand, « Visa pour le réel », Éd. De l’instant même, 1993

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OBSERVATIONS DES TEXTES D’EXPLORATION

PERSONNAGES

• Identité : nom, âge, sexe, origine, etc.


• Traits physiques 

• Traits psychologiques 

• Situation socioéconomique 

• Valeurs

LIEUX

• Où se déroulent ces histoires? 



• Éléments de description des lieux? 

• *** particularité du lieu de la nouvelle « Vous devez beaucoup rêver »

TEMPS 


• Durée de chaque histoire racontée 



• Caractéristiques du moment, de l’époque 


NARRATION 


• Type de narrateur

• Point de vue présenté 

• Action principale de chaque nouvelle 

• Fin de l’histoire
 


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LES CARACTÉRISTIQUES DE LA NOUVELLE LITTÉRAIRE

Ce qui la distingue des autres types de textes narratifs…

1- Récit court
2- Peu de personnages et de lieux

3- L’action tourne autour d’un seul élément

4- La fin (nommée « chute ») est inattendue, surprenante
5- L’évolution psychologique et l’atmosphère sont mises en évidence

LA VRAISEMBLANCE DE L’HISTOIRE

La nouvelle littéraire est une histoire brève qui veut donner une impression de vraisemblance. Les
personnages, les lieux, l’époque et les actions sont présentés comme étant réalistes et crédibles.

Le lecteur est parfois confronté à des éléments invraisemblables mais qui sont racontés de manière à
les rendre vraisemblables dans le cadre de cette histoire.

RÉEL : ce qui est vérifiable, ce qui existe vraiment.

VRAISEMBLANCE : ce qui a les qualités du réel, ce qui semble vrai.

INVRAISEMBLANCE : ce qui ne peut exister dans la réalité, qui ne peut se produire.

LA NOUVELLE FANTASTIQUE : jongle avec cette notion de vraisemblance. L’auteur ajoute des éléments
insolites ou inexplicables à un univers vraisemblable. Le personnage se questionne sur ces éléments et
bascule parfois dans la folie. Le lecteur est déstabilisé et souvent, la chute de la nouvelle ne lui donne
pas de réponse satisfaisante.

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L’UNIVERS NARRATIF

Monde fictif, vraisemblable ou fantaisiste, où évoluent les personnages créés par l’auteur (e).

Époque Personnages Lieux


- Antiquité égyptienne - Héros - Ville / Campagne
- Rome antique - Chefs - Huis clos
- Moyen Âge - Ennemis - Forêt
- Colonisation de la - Amis - Jungle
Nouvelle-France - Traitres - Désert
- Colonisation de l’Ouest - Alliés - Île
américain - Sages - Continent
- Début du XXe siècle - Guerriers - Pays réel ou imaginaire
- Années 1970 - Parents - Planète
- Époque actuelle - Magiciens - Espace
- Futur imaginaire - Fées / Lutins - Édifice
- Etc. - Etc. - Etc.

UNIVERS NARRATIF

-récit policier -récit d’anticipation


-récit historique -récit d’apprentissage
-récit fantastique -récit d’aventures
-récit biographique -récit de voyage
-récit sociologique -récit de science-fiction
-récit psychologique -etc.
-récit d’amour

Thème Contexte social Niveau de réalisme


- amour tragique - guerre - histoire merveilleuse
- quête d’identité - pauvreté/misère - histoire fantastique
- rivalité fraternelle - aristocratie/monarchie - histoire fantaisiste
- enfance - bourgeoisie - histoire réaliste
- solitude - monde du travail - histoire vraie
- abandon - monde scolaire - etc.
- etc. - monde politique
- etc.

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LE SCHÉMA NARRATIF (RAPPEL)

Situation initiale Elle présente généralement les personnages, les lieux, l’époque. On y
voit la vie habituelle AVANT qu’un événement vienne briser
l’équilibre.
Élément Il s’agit d’un événement qui vient perturber l’état d’équilibre du
déclencheur personnage principal. Il peut s’agir d’une quête à accomplir, d’une
mission à réaliser ou d’un problème à résoudre.
Déroulement C’est une suite d’actions ou de réactions du personnage face à
(péripéties) l’élément déclencheur. Ce sont ces péripéties qui font progresser le
récit.
Dénouement Il présente la dernière action de l’histoire. C’est la réussite ou l’échec
du personnage par rapport à l’élément déclencheur.
**La nouvelle littéraire présente souvent un dénouement « choc »,
surprenant ou brutal.
Situation finale Elle décrit l’état d’équilibre final après les événements vécus.
**Souvent absente dans la nouvelle littéraire.

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LES PERSONNAGES

Contrairement au roman, la nouvelle littéraire présente une histoire courte où les personnages
sont peu nombreux. La description de ceux-ci est donc sommaire et les caractéristiques
présentées sont souvent moins détaillées mais utiles à la compréhension.

Caractéristiques physiques : ce que l’on voit.


•Taille / Poids
•Couleur des yeux / des cheveux
•Tatouages, cicatrices
•Style vestimentaire...

Caractéristiques psychologiques : ce que l’on détermine selon les actions, les pensées.
•Qualités / Défauts
•Tics nerveux
•Traits de caractère
•Manies...

Caractéristiques sociales :
•Sexe
•Âge (enfant, vieillard)
•Nationalité
•Profession / Métier
•Famille (état civil : marié, célibataire, avec ou sans enfants)
•Statut social (classe sociale : pauvre, riche, classe moyenne, aristocratie, etc.)
•Antécédents familiaux...

Évolution psychologique du personnage

L’intrigue de la nouvelle met surtout l’accent sur l’évolution psychologique du personnage. Son
état final s’est donc amélioré ou dégradé par rapport à son état initial au fil des péripéties et du
dénouement de l’intrigue.

État psychologique initial à Péripéties à État psychologique final

Il importe donc d’identifier l’état psychologique du personnage principal au début de l’histoire,


ainsi que tout au long de son déroulement. Il faut être en mesure d’associer le changement
d’état psychologique avec une péripétie, pour finalement atteindre l’état psychologique final.

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LE NARRATEUR

Le narrateur est celui qui raconte l’histoire. On distingue 3 types :


NARRATEUR PARTICIPANT (PERSONNAGE)

• L’histoire est racontée par le personnage principal ; 



• Elle est écrite à la 1re personne (je-nous) ; 

• Vision limitée à ce que le personnage vit et ressent. 


NARRATEUR OMNISCIENT (ABSENT / DIEU)

• L’histoire est racontée par quelqu’un d’extérieur qu’on ne connait pas ; 



• Elle est écrite à la 3e personne (il/elle) ; 

• Le narrateur connait et sait tout de tous les personnages, il est partout. Sa vision est illimitée.

NARRATEUR TÉMOIN

• L’histoire est racontée par un personnage secondaire qui relate ce que vit le héros ; 

• Elle est écrite à la 1re et à la 3e personne, parfois même à l’aide de la 1re personne du pluriel
(nous) si le témoin vit l’aventure avec le héros ; 

• Le narrateur présente ce qu’il voit et entend, sa vision est donc limitée. 


LE RELAIS DE NARRATION :
est un procédé d’écriture qui fait alterner différents narrateurs à l’intérieur de la même
histoire.

** Il ne faut pas confondre le narrateur avec l’auteur du texte. Ce


dernier choisit « la voix » qui va émettre l’histoire qu’il a en tête.
Par exemple, un auteur peut décider que son narrateur est un
enfant.

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EXERCICES – LE NARRATEUR

1. A) Lisez cet extrait de la nouvelle La Rempailleuse de Guy de Maupassant.

C’était à la fin du dîner d’ouverture de chasse chez le marquis de Bertrans. Onze chasseurs, huit jeunes
femmes et le médecin du pays étaient assis autour de la grande table illuminée, couverte de fruits et de
fleurs.

On vint à parler d’amour, et une grande discussion s’éleva, l’éternelle discussion, pour savoir si on
pouvait aimer vraiment une fois ou plusieurs fois. On cita des exemples de gens n’ayant jamais eu qu’un
amour sérieux ; on cita aussi d’autres exemples de gens ayant aimé souvent, avec violence, les hommes,
en général, prétendaient que la passion, comme les maladies, peuvent frapper plusieurs fois le même
être, et le frapper à le tuer si quelque obstacle se dresse devant lui. Bien que cette manière de voie ne fût
pas contestable, les femmes, dont l’opinion s’appuyait sur la poésie bien plus que sur l’observation,
affirmaient que l’amour, l’amour vrai, le grand amour, ne pouvait tomber qu’une fois sur un mortel.

Le marquis ayant aimé beaucoup, combattait vivement cette croyance :

- Je vous dis, moi, qu’on peut aimer plusieurs fois avec toutes ses forces et de toute son âme.

On prit pour arbitre le docteur, vieux médecin parisien retiré aux champs :

- J’ai été appelé, il y a trois mois, auprès de cette vieille femme, à son lit de mort. Elle était arrivée,
dans la voiture qui lui servait de maison […].

Son père était rempailleur et sa mère rempailleuse. Elle n’a jamais eu de logis planté en terre.

Toute petite, elle errait, haillonneuse, vermineuse, sordide. On s’arrêtait à l’entrée des villages, le long
des fossés ; on dételait la voiture ; le cheval broutait ; le chien dormait, le museau sur ses pattes ; et la
petite se roulait dans l’herbe pendant que le père et la mère rafistolaient, à l’ombre des ormes du
chemin, tous les vieux sièges de la commune.
Extrait de Guy de Maupassant, « La Rempailleuse », dans Contes de la Bécasse.
Éditions Larousse, 2008.

B) Identifiez le type du ou des narrateurs dans cet extrait. Indiquez le numéro de la ligne où le
changement de narrateur s’effectue, s’il y a lieu.

C) Indiquez l’indice du texte qui révèle la présence du narrateur du récit enchâssé.

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2. A) Lisez le texte suivant.

Je me souviens

Était-ce l’été de ses cinq ans ou de ses six ans ? Elle ne s’en souvient plus exactement, mais se
rappelle très bien qu’elle était trop jeune, trop petite. C’était l’âge où sa mère l’obligeait encore
à faire sa sieste quotidienne. Était-ce un samedi ou un dimanche ? Le weekend, certes,
puisqu’ils se trouvaient au chalet de son oncle maternel. Contrairement à ses frères et sœurs,
elle détestait les siestes. Ce dont elle ne se doutait pas encore, c’est qu’elle allait bientôt
également les craindre. Sa mère alla la conduire dans sa chambre. Était-ce parce qu’elle était
l’aînée qu’on lui avait réservé la chambre la plus éloignée du séjour ? Sa mère la borda,
embrassa délicatement son front puis quitta sa chambre. L’enfant qu’elle était encore sombrait
doucement dans le sommeil quand elle entendit la porte de sa chambre couiner. Ouvrant un
œil, elle se réjouit de voir apparaitre son père. Sûrement qu’il venait la délivrer de ce repos forcé
pour l’amener chasser des grenouilles ou des papillons. Mais alors, pourquoi refermait-il la
porte derrière lui ? Pourquoi s’étendant-il sur le lit de sa fille ?

C’est ce jour-là, songea-t-elle, songeai-je, que j’ai basculé dans le monde des adultes. C’est là
que l’enfant que j’étais a été contrainte à laisser sa place à la femme que je suis devenue.

B) Par quel type de narrateur est racontée :

- la première partie du récit ? ________________________________________________


- la fin du récit ?___________________________________________________________

C) Transformez les sept premières phrases de ce récit de manière que l’extrait biographique
devienne autobiographique. Faites les changements nécessaires.

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LE CADRE SPATIO-TEMPOREL

LES LIEUX ET LE TEMPS

La nouvelle littéraire est particulière, car elle présente souvent un seul lieu et le temps est
parfois imprécis ou peu défini.

Ces deux éléments sont surtout employés pour aider la vraisemblance (p.9) du récit et pour
créer une atmosphère (p.18).

L’ESPACE (LES LIEUX)

§ Identifier où se déroule l’action en relevant les indices de lieux et les descriptions ; 



§ Relever la manière utilisée pour présenter ce lieu : est-ce un endroit lugubre ?
Accueillant ?


(*** voir les notions sur l’atmosphère et sur le champ lexical.) 


LE TEMPS 


§ Identifier l’époque de l’histoire ; il faut observer les indices propres à une période de
temps donnée (moyens de transport, de communication, façon de vivre des
personnages, etc.) 

§ Repérer les indices de temps qui révèlent le déroulement du temps à l’intérieur de
l’histoire ;
§ Identifier si le récit est linéaire (*** voir chronologie) 

§ Analyser la durée du récit. 


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LA CHRONOLOGIE

Une nouvelle en ordre chronologique ou linéaire présente les actions dans l’ordre réel où elles

se sont produites.

S’il y a des retours dans le passé, si on revient sur des éléments qui ont déjà eu lieu, l’ordre

chronologique est alors brisé.

D’AUTRES PROCÉDÉS POUR « JOUER » AVEC LE TEMPS

Une ellipse est un saut dans le temps, c’est-à-dire que des évènements sont passés sous

silence, l’auteur a choisi de ne pas les mentionner.

Le sommaire est un événement ou une suite d’actions de longue durée qui est raconté par le

narrateur de manière brève, en quelques mots.

Des exemples d’INDICES DE TEMPS :

§ Quelques heures plus tard ; 



§ Le lendemain matin ; 

§ À la nuit tombée ; 

§ Deux jours plus tard ; 

§ Quelques mois auparavant ; 

§ L’année précédente ;
§ La veille ; 

§ Etc. 


Ces procédés contribuent


au RYTHME du récit :
Accélère ou allonge les
événements

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L’ATMOSPHÈRE

Ce sont les éléments descriptifs d'un texte qui créent l'atmosphère de celui-ci. Ces mots (qui
forment un champ lexical) installent un climat, une ambiance particulière, c'est ce qui donne
d'ailleurs une couleur unique au récit.

Voici comment, par exemple, les mots peuvent créer une atmosphère sombre (observe bien
les mots en gras) :

La nuit était tiède, c’était une superbe nuit d'été, moins la lune et les étoiles. C'est quelque
chose, je l'avoue. Le ciel nuageux nous annonçait une averse, mais nous enveloppait d'ombres.
Un silence profond régnait partout ; personne sur la route ; pas de lumières aux fenêtres des
maisons voisines. Des morts, rien que des morts ! Nous étions dans le cimetière.

D'une manière générale, les descriptions dotent les lieux et personnages du récit d'une plus
grande réalité et contribuent à façonner l'atmosphère du récit.
L’atmosphère de la nouvelle littéraire est très importante. Il s’agit de l’ambiance dégagée par
l’ensemble de l’histoire.

Les lieux, les objets et le temps sont tous des éléments qui caractérisent l’atmosphère. Celle-ci
est directement reliée aux états d’âme du personnage principal.

POUR DÉVELOPPER UNE ATMOSPHÈRE

§ Évoquer le lieu et le moment précis du déroulement des actions ; 



§ Raconter les circonstances qui ont mené à l’évènement central de l’histoire.
§ Décrire de manière détaillée le décor à l’aide d’un champ lexical, de figures de style
imagées et des cinq sens ; 

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Un champ lexical est un ensemble de mots ou de groupes de mots qui sont liés par un thème. Il
peut être formé de synonymes, de mots de même famille, d'expressions ou de termes ayant un
sens commun.

Exemple du champ lexical de la mort :


Fatalité (fatal/fatidique) Sanglant (sang/sanguinaire)

Médecin légiste MORT Cimetière

Cadavre

Voici à quoi pourrait ressembler un champ lexical sur le thème de la mer dans un texte :

Du haut de la falaise, j'admirais les vagues qui se fracassaient contre les rochers. La plage était
déserte à cette heure si matinale. Je pris un coquillage dans mes mains et je le lançai dans
les flots. Celui-ci se perdit dans l'eau salée.

*** Créer un champ lexical AVANT d’écrire un texte est une excellente stratégie pour aider la
rédaction d’une nouvelle littéraire, car il permet d’éviter les répétitions et d’assurer la
cohérence liée à un thème.

*** Un texte peut contenir plusieurs thèmes, donc plusieurs champs lexicaux.

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L’emploi de figures de style est aussi une façon de créer une atmosphère spécifique.

Par exemple,

§ La comparaison ;
§ La métaphore ;
§ La personnification ;
§ L’ellipse ;
§ Etc.

La référence aux cinq sens contribue également à la création de l’atmosphère et permet


d’établir un lien direct avec le personnage en indiquant...

§ Ce qu’il voit (la VUE) ; 



§ Ce qu’il entend (l’OUÏE) ; 

§ Ce qu’il sent (l’ODORAT) ; 

§ Ce qu’il touche (le TOUCHER) ; 

§ Ce qu’il goute (le GOUTER). 


L’ÉVOCATION DES SENTIMENTS ET DE L’ÉVOLUTION PSYCHOLOGIQUE :

En plus des éléments précédents, on peut...

§ Décrire le ton de voix des personnages ;

Le ton du récit correspond aux émotions ou aux sentiments exprimés par les
personnages qui prononcent les paroles formant les dialogues. Le ton peut être
dramatique, humoristique, sarcastique, didactique, autoritaire, agressif, etc.

§ Décrire l’effet ressenti sur le corps ou l’apparence ; 



§ Décrire la menace environnante ;
§ Décrire les gestes ou le comportement du personnage. 


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EXERCICE - LES CHAMPS LEXICAUX ET L’ATMOSPHÈRE

1- Lisez l’extrait suivant, dans lequel les mots du champ lexical de la forêt sont en gras, puis
répondez aux questions qui suivent.

À Londres où vit Gabrielle Roy, la chaleur de juillet est étouffante. Un jour, dans un
moment d’impulsion, elle monte à bord d’un autobus de la Green Line qui l’amène en
périphérie de la ville.

Subitement, nous étions en forêt. Elle s’était tenue pendant quelque temps à petite
distance, invitante, fraîche, quelque peu inaccessible encore. Et soudain, elle s’était
rapprochée. Maintenant, elle nous enserrait de ses hautes branches qui se nouaient
au-dessus de la route et nous faisaient une merveilleuse voûte toute pleine de
l’étincellement, dans l’ombre, des milliers de clins d’œil du soleil. Ces grands arbres, ces
troncs moussus, ce vert si profond me semblèrent venir jusqu’à nous d’une lointaine
époque. Rien n’y avait sans doute beaucoup changé depuis que Robin des bois et sa
bande y surgissaient pour piller les diligences et, ainsi que le relatent les légendes,
détrousser les riches au profit des pauvres.

Extrait de Gabrielle Roy, la détresse et l’enchantement.


Éditions Boréal, 1996.

2- Décrivez l’atmosphère qui se dégage de cette description.

3- Décrivez les sentiments ou états d’âme de Gabrielle Roy à ce moment précis de sa vie.

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4- Relevez les mots ou expressions qui, associés aux mots en gras dans le texte, créent
l’atmosphère décrite à la question 2.

5- Indiquez la figure de style dans les 2e, 3e et 4e phrases de l’extrait et précisez en quoi elle
contribue à l’atmosphère créée.

6- Indiquez en quoi l’allusion à Robin des Bois contribue également à l’atmosphère créée.

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LE TON

Le TON du récit est un effet produit lors de l’écriture du texte. Si à l’oral, le ton s’entend et se
comprend facilement, il faut utiliser différents procédés à l’écrit pour le faire ressentir au
lecteur. Le ton indique la manière dont l'énonciateur transmet son message, ce qui est
révélateur de son point de vue, de son opinion.

Différents tons sont fréquemment employés pour transmettre un message :

1- Le ton humoristique
2- Le ton ironique
3- Le ton dramatique
4- Le ton polémique
5- Le ton poétique ou lyrique
6- Le ton didactique
7- Le ton neutre

Pour déterminer le ton de l'auteur dans un texte, il faut se questionner sur son intention de
communication. L'auteur veut-il faire rire, rêver, pleurer, réfléchir ? Quelle émotion (s'il y en a
une) veut-il faire naître chez son public lecteur ?

1- Le ton humoristique

Le ton humoristique est employé par l'auteur d'un texte avec l'intention de faire sourire,
de faire rire.

Un texte au ton humoristique peut reposer sur :

§ un contenu comique (saugrenu, absurde, etc.)


§ la déformation volontaire de mots ou d'expressions
§ le recours à des jeux de mots
§ l'emploi de néologismes (des mots inventés par l'auteur)
§ l’emploi de figures de style telles que l'hyperbole (une exagération loufoque), l'antithèse
(un contraste amusant), l’accumulation

Tous ces procédés contribuent à créer un ton fantaisiste, léger.


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2- Le ton ironique

Le ton ironique est employé par l'auteur dans l'intention de créer une complicité
particulière avec son destinataire (il faut un esprit éveillé pour que l'ironie soit décodée)
afin d'en faire son allié. L'ironie est une forme de moquerie (envers quelqu'un ou
quelque chose) qui présente, avec exagération, le contraire de la pensée véritable de
l'auteur (le lecteur doit donc comprendre que l'auteur du texte insinue le contraire de ce
qu'il a écrit).

Différents mécanismes langagiers, souvent très peu subtils, deviennent des repères
importants quand vient le temps de déceler l'ironie dans un texte.

L'ironie est rendue évidente grâce à des procédés stylistiques comme :

§ l'hyperbole (exagération excessive des propos)


§ la litote (forme d'atténuation du propos qui vise en réalité à en démontrer la gravité ou
l'absurdité)
§ l'antiphrase (énonciation du message contraire au message que l'on souhaite livrer afin
de mettre en valeur ce dernier)

3- Le ton dramatique

Le ton dramatique est employé avec l'intention de susciter des émotions chez le lecteur
comme la douleur, la terreur, la pitié, la colère. Pour ce faire, l'énonciateur fait usage
d'un vocabulaire fortement connoté (chaque mot est en effet bien choisi pour
déclencher l'émotion voulue).

D'autres procédés stylistiques servent bien le ton dramatique :

§ l'accumulation de mots liés à un thème (dans le but d'accentuer l'effet dramatique)


§ l'hyperbole (toujours dans le but de dramatiser) pourront, entre autres, aider à créer un
effet tragique.

4- Le ton polémique

Le ton polémique est employé avec l'intention de soulever l'indignation chez le public
lecteur, de susciter le débat à propos d'un sujet controversé. L'auteur qui en fait usage
souhaite dresser une critique sévère de son sujet. Pour ce faire, il décrit la situation avec
une véhémence assurée, voire parfois avec une certaine agressivité (décelée dans le
choix des mots).
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Quand on est confronté à un ton polémique, on sent que l'auteur est loin d'être
indifférent par rapport à ce qu'il présente. Bien au contraire, l'auteur qui emprunte le
ton polémique cherche à faire réagir vivement son destinataire afin qu'il soit aussi
touché que lui par le sujet et agisse pour que la situation change.

5- Le ton poétique ou lyrique

Le ton poétique est employé avec l'intention d'émouvoir le public lecteur en faisant
appel à la beauté esthétique du langage. L'auteur qui emploie un ton poétique exprime
des sentiments intimes dans une langue soignée, rythmée, imagée.

En plus de jouer sur la sensibilité du lecteur, le ton poétique vise à frapper l'imaginaire
par le biais de différents procédés stylistiques comme :

§ l'emploi fréquent de comparaisons,


§ de métaphores,
§ de périphrases, etc.

6- Le ton didactique

Le ton didactique est employé avec l'intention d'instruire, d'informer et d'expliquer.


L'auteur qui emploie ce ton souhaite rendre clair (afin de mieux le faire connaître) un
sujet qu'il maîtrise lui-même très bien. Un texte qui renferme un ton didactique est
souvent parsemé de passages descriptifs et explicatifs.

Des procédés comme la reformulation, qui permet de préciser le sens d'un mot, et la
comparaison, qui permet le rapprochement entre un élément abstrait et un élément
concret, trouvent tout à fait leur place dans un texte au ton didactique.

7- Le ton neutre

Le ton neutre démontre le caractère objectif de l’auteur. Aucune expression, aucun


effet de style ne démontre son opinion. Le vocabulaire utilisé est neutre, dénotatif,
objectif. Rarement utilisé dans les textes narratifs, il convient plutôt aux nouvelles
journalistiques et aux articles encyclopédiques.

25
L’HARMONISATION DES TEMPS VERBAUX
Le choix des temps de verbe doit respecter un système établi.
En effet, « harmoniser les temps
de verbes dans un récit » exige :
Un temps verbal principal : Utilisé pour la narration des actions qui font avancer l’histoire.
Des temps d’accompagnement : Employés pour raconter des actions antérieures ou
postérieures et pour les descriptions, les explications ou les commentaires.

RÉCIT AU PRÉSENT
Temps principal Temps d’accompagnement
§ Présent (principales actions faisant § Présent (descriptions, actions de
avancer l’histoire.) longue durée) 

§ Passé composé (actions antérieures) 

§ Futur simple (actions futures) 


RÉCIT AU PASSÉ SIMPLE


Temps principal Temps d’accompagnement
§ Passé simple (actions de courte durée, § Imparfait (descriptions, actions de
immédiates, servant à faire avancer longue durée) 

l’histoire.) § Plus-que-parfait (actions antérieures)

§ Conditionnel présent (actions futures)

*** HORREUR ! Il n’y a pas de trucs, pas de règles pour savoir si les verbes du 3e groupe
se terminent avec le son I ou U… Il faut vérifier. Et, svp, faites-le !

26
EXERCICE - HAROMONISATION DES TEMPS VERBAUX

Ma chère Thérèse,

Je commençais à descendre l’escalier avec la poubelle. Je me méfiais parce que je


(savoir – simultanéité) ____________________________________ bien que les marches deviendraient
glissantes quand il (neiger – antériorité) ____________________________________. Or il avait neigé, comme je
l’(constater – simultanéité) ____________________________________ en regardant par la fenêtre. Cette
première neige, je l’attendais et je la voyais comme elle (être – postériorité, événe- ment présenté dans sa durée)
____________________________________ : dangereuse. Je me disais que j’(avoir – postériorité, événement
présenté dans sa durée) ________________________________ enfin de vrais motifs pour me plaindre au
propriétaire. J’imaginais souvent comment je lui (parler – postériorité, événement présenté dans sa durée)
____________________________________, et mon discours changeait au fil des jours.

Tu te demanderas sans doute si c’(être – simultanéité) ____________________________________ comme ça


que je passe mes journées et tu penseras que je n’(avoir – simultanéité)
____________________________________ rien d’autre à faire. Certains prétendent que je (être – simultanéité)
____________________________________ méticuleuse jusqu’à l’obsession et ils disent qu’en plus, je (être –
simultanéité) ____________________________________ rancunière. C’est trop. Je dis que c’(être –
simultanéité) ____________________________________ trop de défauts pour une seule femme et que trop,
c’est trop. Ceux qui (dire – postériorité) ____________________________________ cela ne se sont pas regardés
.

Connais-tu l’histoire de la poutre et de la paille ? La voici : il y a des gens qui


(avoir – simultanéité au conditionnel) ____________________________________ une poutre dans l’œil et
d’autres qui (avoir – simultanéité au conditionnel) ____________________________________ une paille. Ceux
qui (avoir – simultanéité au conditionnel) ____________________________________ la poutre accuse- raient
les autres d’avoir la poutre. C’est normal, puisque la poutre leur
(déformer – simultanéité) ____________________________________ trop la vision. Par contre, ceux qui (avoir –
simultanéité) ____________________________________ la paille savent très bien que ce sont les autres qui
(avoir – simultanéité) ____________________________________ la poutre. J’espère que tu (comprendre –
antériorité) ____________________________________ : moi, j’ai la paille.

27
D’habitude, je suis polie, mais là je crois que j’(dire – antériorité, événement achevé)
____________________________________ des gros mots quand je me suis aperçue que j’(oublier – antério-
rité) ____________________________________ mes clés à l’intérieur de mon appartement. C’était juste comme
je (mettre – simultanéité, événement présenté dans sa durée) ____________________________________ le
pied sur la première marche. Si j’(avoir – simultanéité) ____________________________________ des
obsessions, comme le prétendent ceux qui ont la poutre, je ne serais pas tombée dans l’escalier. Si j’(avoir –
simultanéité) ____________________________________ des obsessions, je me serais rappelé comme l’escalier
(risquer – simultanéité) ____________________________________ d’être glissant. Au lieu de quoi, je ne pensais
plus qu’à mes clés et je me demandais où je (passer – postériorité) ____________________________________
la nuit.

La nuit, je l’ai passée à l’hôpital et toutes les nuits suivantes. Ça fait trois mois que j’y (être – simultanéité)
____________________________________ et j’espère qu’on me
(trouver – postériorité) ____________________________________ au plus vite un endroit où passer ma
convalescence.

J’ai la preuve que mon propriétaire est coupable, puisqu’il


(ne pas venir – antériorité) ____________________________________ me voir. En plus, il n’a pas de cœur. S’il
(avoir – simultanéité) ____________________________________ du cœur, il m’apporterait des fleurs ou du
chocolat. Quand j’(recouvrer – antériorité) ____________________________________ mes forces, j’écri- rai une
lettre aux assurances. Mon propriétaire comprendra à qui il
(avoir – simultanéité) ____________________________________ affaire et comme il (devoir – antériorité au
conditionnel) ____________________________________ mettre un tapis dans l’escalier.

Pourrais-tu m’apporter, quand tu (venir – simultanéité) ____________________________________, du papier,


un crayon, des enveloppes, des timbres et du chocolat ?

Merci et à bientôt, Amélie P.

Source : site CCDMD

28
LES FIGURES DE STYLE
Un texte comportant des figures de style est plus expressif et de nature à émouvoir, à séduire
et à convaincre le lecteur.

On retrouve des figures de style dans tous les types de textes. Elles se retrouveront toutefois
en plus grand nombre dans les textes littéraires, particulièrement les textes poétiques.

Les figures de style font partie des outils liés à la rhétorique. La rhétorique, c’est l’art de
convaincre et de plaire. Les figures de style ont donc cette double fonction : une fonction
argumentative et une fonction d’embellissement.

Les figures de style aident à toucher le lecteur. S’en servir permet d’être plus convaincant et les
analyser permet d’être plus éclairé sur le message transmis par l’auteur d’un texte ou d’un
discours.

Source : site AlloProf

Noms des figures Définitions Exemples


de style
La métonymie On représente un objet par un Boire une verre = boire son
autre, le contenu par le contenu
contenant.
La périphrase On remplace un mot par une La capitale de la France = Paris.
phrase.
L'antiphrase On dit le contraire de ce qu'on C'est du joli!
veut faire comprendre.
L'antithèse L'association de deux mots qui Petit par la taille, grand par
sont contraire. l'esprit.
L'oxymore Deux mots de sens contraires Le soleil noir (Baudelaire)
qui sont liés l'un à l'autre.

29
Le parallélisme On utilise une construction Demain, je partirai.
semblable pour deux énoncés Demain, je m'engagerai.
différents.
L'anaphore On répète les mêmes termes Souffrons…Souffrons…
en début et en fin de phrase. (V.Hugo)
Gradation On fait se succéder des termes Je me meurs, je suis mort, je
(= énumération) en croissance ou décroissance. suis enterré.
(Molière)
L'hyperbole C'est une exagération. Je meurs de faim.
La litote Consiste à dire moins pour Va, je ne te hais point.
suggérer plus. (Corneille)
L'euphémisme On atténue une idée brutale ou Il a vécu (= il est mort)
violente.
La comparaison Deux éléments sont Ce jeune garçon est
rapprochés avec un mot outil beau comme un Apollon.
de comparaison.
La métaphore Une comparaison implicite, Les jeunes filles caquettent au
sans outil de comparaison. fond de la classe.
La personnification On prête des comportements Les arbres gémissent au vent.
humains à une chose ou une
animal.
L'allégorie On rend une idée abstraite. La mort -> la faucheuse.

30
LES CRITÈRES D’APPRÉCIATION D’UN TEXTE LITTÉRAIRE
Un critère d’appréciation doit
présenter un élément observable
de l’œuvre ainsi que sa qualité ou son défaut.

Un exemple doit l’accompagner.

EXEMPLES D’ÉLÉMENTS ANGLES POSSIBLES POUR APPRÉCIER


OBSERVABLES
Les personnages Crédibilité, importance, réalisme.
Les thèmes Message de l’auteur, actualité des thèmes, universalité
(amour, guerre, fidélité, famille, amitié, etc.)
Les valeurs Valeurs véhiculées dans le récit.
Le genre littéraire et Le genre littéraire est-il respecté ?
l’univers narratif L’univers créé est-il réaliste, attirant, crédible ?
Les précédés littéraires Séquence des événements (chronologie), rythme de
de l’auteur (procédés l’histoire, manière de raconter, style particulier de l’auteur
d’écriture ou narratifs) (ponctuation précise, ton spécial, formulation particulière),
niveau de langue.
Quel effet cela crée à la lecture ?
Le temps Organisation du temps, description des lieux, manière de
Les lieux créer une ambiance, une atmosphère précise.
L’atmosphère du récit
Le point de vue Position adoptée par le narrateur. Son influence sur le
récit, sur notre perception des actions.

31
La complexité du récit Niveau de difficulté à la lecture (vocabulaire), longueur des
phrases, nombre de personnages, dialogue et narration,
chronologie des événements, etc.
L’originalité du récit En quoi se distingue le récit d’autres œuvres ?
Est-ce que la fin est inattendue ?
L’originalité des thèmes, l’ordre de présentation des
actions, les passages particulièrement marquants, etc.
L’intrigue, le suspense Histoire passionnante, prévisible ?
Actions surprenantes ou banales ?

Développer votre jugement critique exige d’aller au-delà de


l’habituel
« Je n’ai pas aimé parce que c’était plate ! »
Vous devez nommer ce qui vous a déplu
ou ce que vous avez aimé.
Vous devez aussi le prouver par un exemple.

Lors d’évaluations de lecture, les questions d’appréciation valent beaucoup de points,


c’est donc important d’y répondre adéquatement.

Un truc : faites-les en premier. Vous êtes plus concentrés au début de l’examen et vous
êtes donc sûrs de ne pas manquer de temps…

32
Lire…

Est un acte solitaire qui peut aussi se

partager, s’apprendre, se développer.

Lire…

Ressemble à regarder l’horizon.

D’abord on ne voit qu’une ligne noire.

Puis on imagine des mondes.

* Orsenna *
33
34
ANNOTATION DE LA NOUVELLE LITTÉRAIRE

Dans les textes, repère les indices qui te permettent d’identifier:

1. les personnages : identifie leurs caractéristiques psychologiques et sociales (p.12)

2. l’époque et les lieux (p.16)

3. la durée de l’histoire (p.17)

4. le type de narrateur (p.13) :

• présent – témoin – omniscient

5. l’évolution psychologique du personnage (p.12 +19)

6. l’atmosphère instaurée par l’auteur (p.18-19)

7. la chute de l’histoire

Dresse le plan du schéma narratif

Description des parties du récit

Situation initiale
Élément déclencheur
Déroulement

Dénouement
Situation finale

35
LE BINGO

Elle jouait au bingo presque tous les soirs de la semaine. Cela lui passait le temps. Elle ne
gagnait pas souvent. Mais pour rien au monde, elle ne manquerait son bingo.

Dans cette grande salle, dans cette chaleur étouffante où l’on entendait le claquement
des jetons, madame Gagnon s’animait, les joues toutes rouges. Elle s’absorbait. Elle
étalait ses nombreuses cartes sur la table, fumait une cigarette après l’autre. Elle
convoitait ce mille dollars. Elle haletait. La sueur coulait sur son front. Parfois, ses mains
moites tremblaient lorsqu’elle allumait une nouvelle cigarette. Les soirées de bingo
étaient l’un des plus beaux moments de sa vie. Elle rêvait. Elle irait aux États-Unis avec
l’argent gagné. Elle séjournerait dans cette Floride chaude, langoureuse, au bord de la
mer. Elle étrennerait un nouveau maillot de bain, un bijou original lors de ses grandes
soirées. Elle essaierait une nouvelle teinte de cheveux : blond platine. Bref, le bonheur
lui montait à la tête.

-B7

Le numéro fatal ! Madame Gagnon avait en main le jeton gagnant. Toute nerveuse,
chancelante, elle enleva la cigarette de sa bouche, l’écrasa sur la table. Et au lieu de
placer le jeton sur le chiffre bienheureux, de crier BINGO, elle mâchouilla le jeton, en
proie à une violente émotion. Il resta pris dans sa gorge.

Madame Gagnon mourut, coincée par le minuscule objet de ses rêves.

Louise de Gonzague Pelletier, XYZ la revue de la nouvelle, No 11, automne 1987

36
MATIN DÉSERT

L’édifice désaffecté a au moins cinq étages et je me demande ce qu’il fait sur le toit à
sept heures du matin. C’est samedi et les rues sont pratiquement désertes encore. De la
rue des Remparts, je suis probablement le seul à le voir s’avancer sur le vieux papier
goudronné, usé, percé, troué. Il n’enfonce pas. Il ne fait pas le poids et il le sait.

C’est une toiture à gouttière centrale et autour du tuyau de décharge s’accumulent la


terre et les bouteilles brisées, lancées du haut des remparts. Il s’éloigne des tessons et
des canettes sans remarquer que de jeunes chats s’y amusent et font bouger la lumière
dans le tas. La mère sort de l’un des trous du toit et les appelle fort, mais il ne prête
aucune attention ni aux chatons, ni à l’appel, ni aux autres trous autour de lui.

Rendu au bord du toit, au bord du vide, bien au bord, il s’arrête sans vaciller. La
démarche dodelinante jusque-là est remplacée par une immobilité incroyable. Le corps
à moitié dans le vide ne bouge absolument pas. Puis il se décide. Il s’abandonne et se
laisse tomber.

Ni les chatons ni la mère n’ont levé la tête. Ni la mère ni les chatons ne l’ont vu basculer.
Les gens non plus apparemment, assez nombreux maintenant, ne trouvent rien de
particulier à voir un pigeon s’envoler.

Jacques Boulerice, Apparences, Belfond, 1986, p.37-38

37
LES JOURNÉES PERDUES

Quelques jours après avoir pris possession de sa somptueuse villa, Ernst Kazirra,
rentrant chez lui, aperçut de loin un homme qui sortait, une caisse sur le dos, d’une
porte secondaire du mur d’enceinte, et chargeait la caisse sur un camion.

Il n’eut pas le temps de le rattraper avant son départ. Alors, il le suivit en auto. Et le
camion roula longtemps, jusqu’à l’extrême périphérie de la ville, et s’arrêta au bord d’un
vallon.

Kazirra descendit de voiture et alla voir. L’inconnu déchargea la caisse et, après
quelques pas, la lança dans le ravin, qui était plein de milliers et de milliers d’autres
caisses identiques.

Il s’approcha de l’homme et lui demanda : « Je t’ai vu


sortir cette caisse de mon parc. Qu’est-ce qu’il y avait
dedans ? Et que sont toutes ces caisses ? »

L’autre le regarda et sourit : « J’en ai encore d’autres


dans le camion, à jeter. Tu ne sais pas ? Ce sont les journées.

- Quelles journées ? 


- Tes journées. 


- Mes journées ? 


- Tes journées perdues. Les journées que tu as perdues. Tu les attendais, n’est-ce
pas ? Elles sont venues. Qu’en as-tu fait ? Regarde-les, intactes, encore pleines. Et
maintenant... »
Kazirra regarda. Elles formaient un tas énorme. Il descendit la
pente et en ouvrit une. 


38
À l’intérieur, il y avait une route d’automne, et au fond Graziella, sa fiancée, qui s’en
allait pour toujours. Et il ne la rappelait même pas.

Il en ouvrit une autre. C’était une chambre d’hôpital, et sur le lit son frère Josué,
malade, qui l’attendait. Mais lui était en voyage d’affaire.

Il en ouvrit une troisième. À la grille de la vieille maison misérable se tenait Duck, son
mâtin fidèle qui l’attendait depuis deux ans, réduit à la peau et aux os. Et il ne songeait
même pas à revenir.

Il se sentit prendre par quelque chose qui le serrait à l’entrée de l’estomac. Le


manutentionnaire était debout au bord du vallon, immobile comme un justicier.

« Monsieur ! Cria Kazirra. Écoutez-moi. Laissez-moi emporter au moins ces trois


journées. Je vous en supplie. Au moins ces trois. Je suis riche. Je vous donnerai tout ce
que vous voulez. »

Le manutentionnaire eut un geste de la main droite, comme pour indiquer un point


inaccessible, comme pour dire qu’il était trop tard et qu’il n’y avait plus rien à faire. Puis
il s’évanouit dans l’air, et au même instant disparut aussi le gigantesque amas de caisses
mystérieuses. Et l’ombre de la nuit descendait.

Dino Buzzati, « Solitudes », dans Les nuits difficiles, Le livre de poche, 1975.
Traduit de l’anglais par Michel Sager.

39
EXERCICE - Les journées perdues

1. Quel est le thème principal de cette nouvelle ? Justifiez à l’aide d’éléments du


texte. 

§ Thème : ___________________________
§ Éléments du texte :
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
2. Démontrez que le thème de la solitude est également présent en vous appuyant
sur deux extraits. 

§ Extrait 1 :
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
§ Extrait 2 :
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
3. Nommez deux valeurs qui semblent avoir guidé la vie du personnage principal
jusqu’à présent. Justifiez à l’aide d’éléments du texte.
§ Valeur : _____________________
Justification :________________________________________________________
___________________________________________________________________
§ Valeur : _____________________
Justification :________________________________________________________
___________________________________________________________________
40
4. Décrivez la progression de l’évolution psychologique du personnage principal à
travers ce qu’il vit cette journée-là.
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________

5. Croyez-vous avoir vous aussi des caisses de journées perdues dans votre passé ?
o OUI o NON
Expliquez :
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________

41
LES TRANSPORTS EN COMMUN

Elle a sauté entre les rails, dans un froissement raide de ciré. Elle n’est pas tombée, c’est
surprenant pour un grand corps aussi empêtré que le sien. Et maintenant, elle se tient
tranquille, son sac à main bien amarré sur l’épaule. Elle fait comme les autres, elle attend le
métro, mais pas pour y monter, très manifestement.

Ça se répand comme une grippe intestinale parmi les transportés de l’heure de pointe, la
station Berri au grand complet se masse près de la voie pour mieux reluquer ça : ils se rendent
compte, les gens, que c’est un drame qui est en train de s’embryonner sous leurs yeux, et ça
les laisse tout étourdis, tout excités, ils n’ont pour la plupart jamais vu de suicidée pour de vrai,
en chair et en ciré comme je vous parle.

Il y a Conrad parmi la foule, il est vendeur de souliers chez Pegabo et un peu plus petit que la
moyenne, ce qui le prive du spectacle. Il comprend tout de suite que quelque chose d’insolite
se trame et il s’approche, lui aussi, pour tenter d’attraper des bribes de l’aventure. Les gens
marmottent entre eux comme de vieilles connaissances, « C’est une désespérée ! » clame
devant Conrad un grand type qui voit tout et qui a beaucoup lu, probablement. À force de
jouer des coudes, Conrad se faufile au premier rang et il l’aperçoit. Elle a des lunettes, la
trentaine, un ciré noir qui lui fait une silhouette invraisemblable. Elle tourne le dos à tout le
monde, l’air d’affirmer que cette histoire ne la concerne en rien, elle s’achemine lentement
vers la gueule sombre du tunnel, d’où s’exhalent déjà des grondements de wagons en marche.
À la regarder comme ça, tellement tranquille, on ne comprend pas, ce n’est pas le genre à avoir
connu des peines d’amour-ce n’est pas le genre à avoir connu quoi que ce soit, d’ailleurs, et
sans doute est-ce là une raison suffisante pour se tenir ainsi si résignée face à un métro
homicide qui s’avance.

Quelqu’un près de Conrad hurle : « Il faut faire quelque chose ! » et Conrad, avec un retard un

42
peu abasourdi, se rend compte que c’est de lui qu’est sortie cette vocifération farfelue. Les
autres autour marquent leur accord de principe par des hochements de tête vaguement
fatalistes, oui, certes, il faut faire quelque chose, mais quoi, que peut-on contre la mort et
n’est-il pas déjà trop tard, le métro s’en vient, pauvre fille, pauvres enfants, pauvres parents de
cette pauvre fille. Le métro s’en vient, Conrad ne veut pas être celui qui agit, n’a jamais voulu,
le métro s’en vient, son mugissement de mécanique emballée monte comme une fièvre, trop
tard pour prévenir les contrôleurs là-haut, trop tard pour parlementer avec la fille et la
convaincre – de quoi, au fait ? Madame, la vie vaut la peine, restez en vie madame, si personne
ne vous aime, moi je vous aimerai...Comment le croirait-elle, lui qui n’aime que les hommes ?
Et tout à coup, Conrad plonge dans la fosse sans réfléchir, il saute sur la fille, l’assomme à
moitié, il la lance telle une botte de foin sur le quai et s’y projette lui- même, tant l’émotion
décuple les forces.

Et soudain, surgie d’on ne sait où, une équipe de télévision entière se dresse devant Conrad,
les projecteurs l’éblouissent, on le hisse sur des épaules et on l’applaudit. La fille en ciré a
enlevé ses lunettes et son ciré, elle est très belle comme dans les annonces d’esthéticienne
Avant- Après, elle explique à Conrad qu’il s’agit d’un test télévisé en direct sur l’héroïsme
ordinaire, c’est lui qui gagne, est-il content ? Conrad est interviewé au Point et à Rencontres, il
fait la une de toutes les presses du lendemain, Jean Chrétien lui offre une cravate, le pape lui
télécopie des indulgences, il reçoit la légion d’honneur et la croix de Saint-Jean- Baptiste.

Ça l’écoeure, Conrad. Il a dû changer de job parce que les clientes le harcelaient - c’est vous le
héros, est-ce que je peux vous toucher ?... Maintenant, il ne prend plus le métro, il marche. Et
quand il se trouve arrêté à un feu rouge, à côté d’un aveugle, par exemple, il ne l’aide pas à
traverser comme il l’aurait fait auparavant, non monsieur, il le bouscule un peu, en sourdine,
pour qu’il se casse la gueule.

Monique Proulx, tiré du recueil de nouvelles « Les aurores montréales »

43
ERREUR FATALE

M. Walter Baxter était depuis de longues années grand lecteur de romans policiers :
quand il décida d’assassiner son oncle, il savait donc qu’il ne devrait pas commettre le
moindre impair.
Il savait aussi que pour éviter toute possibilité d’erreur ou d’impair, le mot d’ordre
devait être « simplicité ». Une rigoureuse simplicité. Pas d’alibi préparé à l’avance et qui
risque toujours de ne pas tenir. Pas de modus operandi compliqué. Pas de fausses pistes
manigancées. Si, quand même, une fausse piste, mais petite. Toute simple. Il faudrait
qu’il cambriole la maison de son oncle, et qu’il emporte tout l’argent liquide qu’il y
trouverait, de façon que le meurtre apparaisse comme une conséquence du
cambriolage. Sans cela, unique héritier de son oncle, il se désignerait trop comme
suspect numéro un.
Il prit tout son temps pour faire l’emplette d’une pince-monseigneur dans des
conditions rendant impossible l’identification de l’acquéreur. La pince-monseigneur lui
servirait à la fois d’outil et d’arme.
Il mit soigneusement au point les moindres détails, car il savait que la moindre erreur lui
serait funeste et il était certain de n’en commettre aucune. Avec grand soin, il fixa la
nuit et l’heure de l’opération.
La pince-monseigneur ouvrit une fenêtre sans difficultés et sans bruit. Il entra dans le
salon. La porte donnant sur la chambre à coucher était grande ouverte, mais comme
aucun bruit n’en venait, il décida d’en finir d’abord avec la partie cambriolage de
l’opération.
Il savait où son oncle gardait son argent liquide, mais il tenait à donner l’impression que
le cambrioleur l’avait longuement cherché. Le beau clair de lune lui permettait de bien
voir à l’intérieur de la maison ; il travailla sans bruit...
44
Deux heures plus tard, rentré chez lui, il se déshabilla vite et se mit au lit. La police
n’avait aucune possibilité d’être alertée avant le lendemain, mais il était prêt à recevoir
les policiers si par hasard ils se présentaient avant. L’argent et la pince-monseigneur, il
s’en était débarrassé. Certes, cela lui avait fait mal au cœur de détruire quelques
centaines de dollars en billets de banque, mais c’était une mesure de sécurité
indispensable – et quelques centaines de dollars étaient peu de chose, à côté des
cinquante mille dollars au moins qu’allait représenter l’héritage.
On frappa à la porte. Déjà ? Il se força au calme, alla ouvrir. Le shérif et son adjoint
entrèrent en le bousculant :

- Walter Baxter ? Voici le mandat d’amener. Habillez-vous et suivez nous.


- Vous m’arrêtez ? Mais pourquoi ?
- Vol par effraction. Votre oncle vous a vu et reconnu ; il est resté sans faire de bruit à la
porte de sa chambre à coucher ; dès que vous êtes parti, il est venu au poste et a fait sa
déposition sous serment.

La mâchoire de Walter Baxter s’affaissa. Il avait, malgré tout, commis une erreur.
Il avait, certes, conçu le crime parfait ; mais le cambriolage l’avait tellement obnubilé
qu’il en avait oublié de tuer.

Ray Bradbury, Un dimanche tant bien que mal, Éditions Denoël, 1979. Traduit par R. Delouya et H. Robillaud.

45
1. A) Lis une première fois le texte.

B) Relis une deuxième fois en faisant les annotations demandées.

2. En bleu, identifie dans le texte le champ lexical du CRIME.

3. A) Quel est le genre littéraire de cette nouvelle ? ________________________________

B) Prouvez-le à l’aide de deux éléments du texte.


§ ________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
§ ________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
4. A) Cette nouvelle respecte-t-elle l’ordre chronologique ? 

o OUIo NON
B) Justifiez votre réponse.
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________

5. A) Quel type de narrateur raconte cette histoire? _______________________________

B) Explique à l’aide d’un autre élément que les pronoms personnels : 



________________________________________________________________________
________________________________________________________________________

C) Prouve à l’aide d’un exemple du texte :

________________________________________________________________________

________________________________________________________________________

46
6. Quelles sont les deux principales caractéristiques psychologiques du personnage

principal qui sont mises en évidence ?

§ __________________________________________________________________

§ __________________________________________________________________

7. A) Quelle est la durée du crime ?
____________________________________________

B) Relevez trois indices de temps qui justifient cette durée.

§ __________________________________________________________________

§ __________________________________________________________________

§ __________________________________________________________________

8. Voici l’évolution psychologique de M. Baxter au fil de la nouvelle. Repérez dans le texte

les passages (extraits) qui signifient que...

a) En préparant son crime, il agit avec assurance.


________________________________________________________________________
b) En commettant son crime, il garde son sang-froid. 

________________________________________________________________________
c) De retour chez lui, il est persuadé d’avoir réussi.
________________________________________________________________________

d) Il est surpris de la requête des policiers.
________________________________________________________________________

e) En réalisant son erreur, il est anéanti. 

________________________________________________________________________

47
L’INCONNUE
Il regarda dehors par la fenêtre. Le cœur lui serra. Là, sur le trottoir, par-delà sa
pelouse… Quelle assurance ! Brune et magnifique dans la clarté du soir, l’inconnue avait
une démarche fière et souple, rapide, allègre et délurée. Il sourit aussitôt. Le soleil
couchant l’éblouit, la tête lui tourna. L’herbe tiède embaumait…

C’était la nuit. Impossible ! Il avait encore rêvassé… Mais non ! Là-bas, dans la lueur
d’un lampadaire rétro, la jeune femme montait un escalier. Il courut vers elle, sonna à
la porte qui venait de se fermer. Des fenêtres s’éclairèrent, trouant l’obscurité. Il
entendit bourdonner des accords de danse. Un domestique âgé lui ouvrit. Des parfums
l’accueillirent.

Dans le grand salon tout ébloui de lumière, on dansait un tango. Habits noirs et robes
longues. Une douzaine de couples s’interrompirent pour le dévisager. Ils lui firent des
signes de tête enjoués puis reprirent leur danse. Le cœur lui serra de nouveau : sa belle
inconnue venait de l’inviter à danser ! La fête était pour lui.

Ils dansaient, dansaient, dansaient… Elle avait de longs yeux verts, presque
transparents. Les autres couples s’en allaient tour à tour en les saluant avec malice, elle
et lui, et ils se retrouvèrent seuls. Il la pressa contre lui, la tête lui tournait. Joie du
vertige. Blessure du désir, de l’âge et du cœur… Il s’effondra.

Il gisait sur sa propre pelouse, dans l’obscurité. Des voix bourdonnaient à son oreille, à
la fois claires et lointaines. « Je l’ai vue tomber en sortant de chez lui. Il se pressait la
poitrine. » « Il n’a pas l’air de souffrir. » La terre se creusa sous lui et il se fit un grand
silence.

Alors seulement, il put l’entendre venir. Comme si des pieds nus ne faisaient
qu’effleurer l’herbe avec une infinie délicatesse, déjà.

Jacques BROSSARD, L’inconnue, XYZ la revue de la nouvelle,


No 11, automne 1987, p.22.

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1. Dresse le SCHÉMA NARRATIF du texte que tu viens de lire.

Description des parties du récit # des lignes

Situation initiale

Élément déclencheur

Déroulement

Dénouement

Situation finale

2. Qui est l’inconnue à qui le narrateur fait référence ?


________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
3. L’inconnue joue-t-elle un rôle passif ou actif ?
_____________________________________
Justifie ta réponse avec deux éléments du texte :
§ ________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
§ ________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
49
4. Le narrateur a-t-il une vision négative ou positive de ce personnage ?
o positive o négative
Justifiez votre réponse à l’aide d’éléments du texte.
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
5. Relevez les termes que le narrateur utilise pour décrire l’inconnue et expliquez
s’ils traduisent bien la perception qu’il a d’elle.
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
6. Où se déroule l’action du récit ?
___________________________________________________________________
7. Relevez trois indices qui permettent de situer l’action du récit dans le temps.
§ ________________________________________________________________________
§ ________________________________________________________________________
§ ________________________________________________________________________
8. Qui prononce les paroles de la séquence dialogale insérée dans le texte ?
___________________________________________________________________
9. Quel signe de ponctuation l’auteur utilise-t-il pour montrer que deux personnes
différentes parlent ?
___________________________________________________________________
10. Pour quelle raison cette séquence est importante pour la compréhension ?
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________

50
PRISONNIÈRE

Quel malheur !

Le désespoir m’envahit. Emprisonnée ! Moi ! Moi qui jouissais de ma précieuse liberté, sans me
soucier, sans penser qu’elle pourrait un jour m’être enlevée et ensuite jetée au vent comme ces
feuilles d’automne balayées par la brise.

Quelle misère !

Je ne sais plus que faire...

Tout s’est passé si vite ; je me souviens à peine des détails. Il y a un instant, je me promenais, libre
comme je l’ai toujours été, quand, soudain, je me suis rendu compte que des murs s’érigeaient autour
de moi. J’ai paniqué. J’ai contourné les murs à la recherche d’une sortie, mais j’ai enfin compris avec
terreur que j’étais prisonnière.
10

D’une véritable prison !

J’ignore qui m’a enfermée dans cet enfer. Je sais encore moins qui a le pouvoir de m’en délivrer. Oh !
j’ai essayé de m’enfuir, croyez-moi. J’ai passé ce qui me semble être des heures inter- minables à
tenter de dénicher une issue. Mais mes espoirs d’évasion ont lamentablement échoué. À un moment
donné, j’ai été prise d’une rage folle. J’ai hurlé et je me suis lancée sur les parois en les martelant de
toutes mes forces.

Je ne saurais décrire cet enfer dans lequel on m’a enfermée. C’est tellement froid que je ressens
constamment un courant d’air glacial qui me transperce le corps et l’âme.

Les murs de ma prison sont gigantesques. Ils m’étouffent. Je me sens comme si, d’un instant à l’autre,
20

ils allaient s’écrouler et m’écraser.

Ce serait peut-être mieux ainsi.

Je vais mourir, je le sens au plus profond de mes tripes. Personne n’est venu me voir, personne ne m’a
expliqué ma présence dans cet endroit, personne ne m’a dit pourquoi on m’a emprisonnée. Mais qu’ai-
je fait de si répréhensible ? Je n’ai jamais causé de tort à quiconque. Comment concevoir qu’il existe un
être capable de tant de méchanceté ?

Je suis si jeune. Il est impensable que des gens me détestent, moi qui ai toujours vécu paisiblement,
honorablement même. J’aimais la vie. Je vivais parfois seule, parfois avec mes amis, parfois avec ma
famille.

51
Personne n’appréciait la liberté comme moi. Je me plaisais à gambader innocemment, à goûter la
30

douce brise sur mon visage, la chaleur réconfortante du soleil sur mon dos.

Toutes ces beautés m’enivraient. Je n’aurais jamais cru perdre ces grands bonheurs en un rien de
temps.

Ce monde me semblait sans danger. Mais cette illusion est devenue ma défaite. Je suis victime de la
haine et de la cruauté qui empoisonnent notre univers.

Aucun être vivant ne mérite un tel supplice.

Pourtant, on m’a légué ce destin pénible, ce maudit supplice qui peu à peu déchire mon cœur, atrophie
mon corps, vide petit à petit mon âme de toutes ses forces. Je commence à croire que personne ne
mérite ma confiance. J’ignore toujours qui m’a enfermée ici. Si je m’en sors, comment pourrai-je
encore avoir confiance en la vie ? Comment même songer à aimer dans ce monde flétri, blasé, souillé,
qui réserve un sort si cruel à une si pauvre créature ?
40

Je faiblis à chaque seconde. L’oxygène se raréfie dans cette prison. Je martèle ses parois et je me jette
telle une enragée contre elles, comme si au fond de moi scintillait toujours l’espoir de briser les murs
qui me retiennent.

Je n’arrive même plus à me débattre.

Il me semble voir à travers les murs. Je distingue des formes qui bougent, qui dansent, qui font du
bruit. Je me mets à hurler comme une démone, mais personne n’entend mes cris, mes pleurs.
Personne ne veut m’aider ! Je veux fuir ! Exister !

Je respire avec peine. Est-ce que mon bourreau est le moindrement préoccupé par ma survie ?
S’imagine-t-il qu’il va me laisser pourrir dans cette prison ? Mourir seule, sans mes amis, sans ma
famille !
50

Je donnerais n’importe quoi pour apercevoir un visage familier. N’importe qui... Juste un visage !
Je ne veux pas mourir seule...

Ah ! si seulement je pouvais espérer un tant soit peu être secourue ! Je pourrais faire preuve de
bravoure et attendre des secours. Mais non ! Comment pourrait-on savoir où je suis ? Il est probable
que personne n’a vu où je suis enfermée. On m’aurait aidée depuis longtemps déjà.

J’agonise à petit feu.

Seule !

Mon géôlier* n’a pas daigné venir me visiter une seule fois. Même pas pour me dévoiler la raison de
mon incarcération. Encore moins pour me donner à manger ou pour m’offrir à boire, ni pour venir

* Geôlier : gardien de prison.

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prendre conscience de ma douleur. Même pas pour rire de moi, pour me regarder de ses yeux
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moqueurs, remplis de rage et de laideur.

Le temps s’écoule si lentement... mais aussi à vive allure. Il me semble que chaque seconde dure une
éternité. Tout mon être est en train d’éclater.

Serait-ce la folie ou la mort qui s’infiltre en moi ?

Non! Va-t’en! Je ne veux pas de toi! Bien sûr, je sais que tu apaiseras mes souffrances. Je devrais
t’ouvrir grands les bras et te laisser me prendre. À défaut de m’évader de cette prison, je m’éva- derais
de ma prison de chair.

Non ! C’est ridicule ! Je refuse de mourir. Tant que je garde espoir, je peux vaincre mon destin !

Aïe ! Est-ce que je rêve ? Quelqu’un s’approche de moi. Je ne peux pas le voir, mais j’entends ses pas,
comme de la musique à mes oreilles.
70

Enfin ! Je peux respirer. Je sens de la chaleur, je perçois la lumière du jour !

Libre ! Oui ! Ma prison s’ouvre toute grande ! Je ne peux iden- tifier mon libérateur, j’ai à peine le
temps de le remercier. Je m’enfuis aussi rapidement que mon corps me le permet.

Oh ! merci ! merci !

Liberté. Je m’abreuve de ce mot comme si c’était une fontaine d’eau fraîche après la traversée du
désert.

Je suis vivante, je bois la liberté.

Une voix rude s’élève brusquement...

— Tiens, maudite fatigante ! Va-t’en maintenant !

...suivie d’une voix douce :


80

— Jacques ? Qu’est-ce tu fais ?

— Ah ! rien de grave. J’ai ouvert la fenêtre. Il y avait une mouche prisonnière entre les deux vitres.

Marie-Ève OUELLETTE, « Prisonnière », Évasions !, coll. Nouvelles ado,


Hull, Éditions Vents d’Ouest, 2001, p. 31-37.

53
Le lexique

1. Trouve, entre les lignes 1 à 10, une comparaison pour décrire le sentiment de la prisonnière.
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________

2. Que signifie le mot « répréhensible » à la ligne 24 ?


______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________

3. Donne une suite lexicale synonyme de « agonise à petit feu », ligne 55.
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________

4. Relève, entre les lignes 56 à 63 deux pares de mots ou de suites lexicales ayant une relation
d’antonymie.
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______________________________________________________________________________

5. Relève, entre les lignes 71 et 76, les mots qui appartiennent à un même champ lexical, puis
précise e champ lexical.
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______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________

Les séquences textuelles dominantes dans les textes littéraires


6. A) Relève une séquence dialogale dans le texte.
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________
B) Inscris, entre parenthèses, l’énonciateur de chacune des paroles rapportées en A).

54
C) Comment as-tu identifié ces énonciateurs ?
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________
________________________________________________________________________

La séquence dominante narrative

7. A) Trouve, entre les lignes 44 à 72, quatre mots ou groupes de mots qui désignent Jacques et
qui permettent de percevoir que le narrateur modifie sa vision de ce dernier.
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________
B) Comment se traduit ce changement de perception chez le narrateur ?
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________
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______________________________________________________________________________

8. Détermine le narrateur du récit et son statut. Justifie ta réponse à l’aide d’éléments du texte.
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________

9. Le récit progresse-t-il dans le temps d’une façon linéaire ? Précise ta réponse.


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______________________________________________________________________________
______________________________________________________________________________

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Les caractéristiques des quatre dimensions de la lecture
Les conseillères pédagogiques de français de la CSDM, septembre 2010
Document inspiré d’une formation du MELS, février, 2010

Comprendre
• renvoie à la compréhension de base du texte;
• se distingue par son caractère objectif;
• respecte les droits du texte ou les droits de
l’auteur;
• implique un processus permettant d’associer
les éléments du texte pour lui donner un sens.

Apprécier
• renvoie à un jugement porté sur le texte à partir d’un ou de plusieurs critères;
• peut véhiculer une opinion aussi bien négative, positive que nuancée ;
• implique une mise en relation d’un texte avec un ou plusieurs autres textes;
• suppose le contact fréquent avec des oeuvres nombreuses et variées;
• s’actualise dans des contextes d’échange où le partage des appréciations est favorisé.

Réagir
• se distingue par son caractère subjectif;
• renvoie aux effets que le texte produit sur le lecteur;
• respecte les droits du lecteur;
• permet d’exprimer et d’expliciter les émotions,
les sensations et les sentiments suscités par le texte;
• s’actualise dans des contextes où le partage des
diverses façons de voir, de recevoir et de percevoir Interpréter
lle texte est sollicité. • renvoie aux diverses significations que l’on
peut prêter à un texte sans toutefois le contredire;
• révèle un certain équilibre entre les droits du
lecteur et les droits de l’auteur;
• suppose la fréquentation de textes résistants;
• s’actualise dans des contextes d’échanges où le
partage des interprétations est favorisé.

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