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SITAS
HARVARD
COLLEGE
LIBRARY
:
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MONSIEUR LECOQ
11
L'HONNEUR DU NOM
OUVRAGES DU MEME AUTEUR
LE COQ
DAR
ÉMILE GABORIAU
LHONNEUR DU NOM
DOUZIÈME ÉDITION
PARIS
E. DENTU , ÉDITEUR
LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ DES GENS DE LETTRE:
PALAIS -ROYAL, 15-17-19, GALERIE D'ORLÉANS
1882
Tous droits réservés
KD 200
425171132.4 ( 2)
HARVARD
UNIVERSITY
LIBRARY
44864
MONSIEUR LECOQ
SECONDE PARTIE
L'HONNEUR DU NOM
11
L'DONNEUR DU NOM 25
néte
eau,
lace
ame
cuil
voir
de
Peu de gens à Sairmeuse connaissaient autrement que
de nom ce terrible duc dont l'arrivée mettait le village
en émoi .
C'est à peine si quelques anciens du pays se rappelaiem
an m'avoir entrevu, autrefois, avant 89 , lorsqu'il venait, à
de longs intervalles, rendre visite à sa tante, la vieille
demoiselle Armande .
11 .
26 MONSIEUR LECOQ
IV
veux morts sur la tête... Enfin l ... ils riaient tous deux,
ils se moquaient des paysans... On dit qu'ils vont se ma.
rier. Et même, ce soir, on donne un grand diner au
château de Courtomieu en l'honneur du duc...
Il avait conté tout ce qu'il savait, il s'arrêla.
-Tu n'as oublié qu'une chose, fit M. Lacheneur, c'est
de nous dire pourquoi tes habits sont, Jéchirés comme si
tu t'étais battu ? ...
Le robuste gars hésita un moment, puis brusque
ment :
Je puis bien vous le dire tout de même , répondit-il.
Pendant que Chupin prêchait, je prêchais aussi, et pas
pour le même saint... Encore un peu, et je faisais man
quer son coup . Le coquin a couru tout rapporter. Aussi,
en traversant la place, le duc s'est arrêté devant moi :
« Tu es donc une mauvaise tête ? » m'a-t -il dit . J'ai ré
pondu que non , mais que je connaissais mes droits. Alors
il m'a pris par ma cravate , et il m'a secoué en me di
sant qu'il me corrigerait et qu'il me reprendrait ses vi
gnes ... Saint bon Dieu l ... Quand j'ai senti la main de
ce vieux, tout mon sang n'a fait qu'un tour... Je l'ai em
poigné à bras le corps .... Heureusement on s'est jeté à
six sur moi et j'ai été obligé de lâcher prise... Mais qu'il
ne s'avise jamais de venir rôder autour de mes vignes ....
Ses poings se crispaient, toute sa personne ménaçait ;
le feu des révoltes flambait dans ses yeux .
Et M. d'Escorval se taisait, épouvanté de ces baines
si imprudemment allumées, et dont l'explosion , pensait
il, serait terrible...
Mais M. Lacheneur s'était redressé .
Il faut que je regagne ma masure , dit -il à Chan
louineau , tu vas m'accompagner, j'ai un marché à te
proposer ...
M. et Mee d’Escorval, stup faits, essayèrent de le ree
enir ; mais il ne se laissa pas fléchir , et il sortit entraî
iant sa fille .
Porrtant Maurice ne désespérait pas encore.
Marie - Anne lui avait promis qu'elle l'attendrait le len
L'HONNEUR DU NOM 59
C
Que me chantiez - vous donc, curé ? disait-il à l'abbé
Midon . Comment avez- vous pu me peindre vos popula
tionscomme mal disposées pour nous? Ce serait à croire,
jarniblev ! que les mauvaises dispositions n'existent que
dans votre esprit et votre cour.
L'abbé Midon se taisait. Qu'eût- il pu répondrel ...
Il ne concevait rien à ce revirement brusque de l'opi.
nion, à cette allégresse soudaine, succédant au plus som
bre mécontentement.
- Il y a quelqu'un sous tout cecil... pensait- il.
Ce quelqu'un ne tarda pas à se révéler. '
Enhardi par son succès, Chupin osa se présenter au
presbytère .
Il s'avança dans le salor, !'échine arrondie en cerceau,
humble, rampant, ' æil prein des plus viles soumissions,
un sourire obséquieus aux lèvres .
Et, par l'entre-bàillement de la porta. ot apercevait
dans l'ombre du corridor le profil peu rassurant de ses
deux fils.
Il venait en ambassadeur, il le déclara après une in
terminable litanie de protestations. Il venait conjurer
« monseigneur de se montrer sur la place.
Eh bien l... Oui ! s'écria le duc en se levant, oui,
je veux me rendre aux désirs de ces bonnes gens ....
Suivez-moi, marquis !
Il parut sur le seuil de la porte de la cure , et aussitôt
un immense hurrah s'éleva,tous les fusils des pompiers
furent déchargés en l'air, les pierriers firent feu ... Ja
mais Sairmeuse n'avait ouï pareil fracas d'artillerie . Il y
eut trois vitres de cassées au Beuf couronné.
Véritable grand seigneur , M. le duc de Sairmeuse
sut garder sa froideur hautaine et indifférente, -- s'é
mouvoir est du commun mais en réalité il était ravi,
Transporte.
Si ravi qu'il chercha vite comment récompenser cet
Occueil.
Un simple coup d'oeil jeté sur les titres remis nar La
II.
62 MONSIEUR LECOQ
VIII
1
L'HONNEUR DU NOM
II .
74 MONSIEUR LECOQ
XI
X11
XIN
XV
XVI
XVII
XVIII
XIX
XXI
XXII
II . 40
170 MONSIEUR LECOQ
Le baron d'Escorval lui avait fait perdre vingt minutes
il en avait perdu quatre fois autant à Sairmeuse.
Là, deux communes avaient opéré leur jonction, et
les paysans s'étaient aussitôt répandus dans les cabarets
du village pour boire au succès de l'entreprise.
Les arracher à leurs bouteilles avait été long et diffi
cile ...
Et pour comble, une fois qu'on les eut remis en mar
che, il fut impossible de les décider à éteindre des bran
ches de pin qu'ils avaient allumées en guise de torches.
Prières, menaces , tout échoua contre une incompré
hensible obstination . Ils voulaient y voir clair, disaient
ils ...
Pauvres gens .... Ils n'avaient certeę conscience ni des
difficultés, ni des périls de l'entreprise.
On leur avait fait de si belles promesses, quand on les
avait enrôlés, on les avait grisés de tant d'espérances ! ..
Ils s'en allaient à la conquète d'une place de guerre, dé.
fendue par une nombreuse garnison, comme à une partie
de plaisir ...
Et gais, insouciants, animés de l'imperturbable con
fiance de l'enfant, ils marchaient bras dessus bras des
sous , en chantant des chansons patriotiques.
A cheval , au milieu de la troupe , M. Lacheneur sed
tait ses cheveux blanchi d'angoisse.
Ce retard de deux heures n'allait- il pas tout perdre ?...
Que devaient penser les autres, à la Croix - d'Arcy ?...
Que faisaient-ils en ce moment? ...
Avançons ! ... répétait-il , avançons ....
Seuls les chefs, Maurice, Chanlouineau , Jean, Marie
Anne et une vingtaine du vieux soldats de l'Empire,
comprenaient et partageaient le désespoir de Lacheneur.
Ils savaient, eux, ce qu'ils risquaient au terrible jeu qu'ils
jouaient. Et eux aussi, ils répétaient:
Plus vite , marchons plus vite l ...
Exportations stériles l ... Il plaisait à ces gens de mar
cher ainsi. lentement.
Et même, tout à coup , la bande entière s'arrêta . Quel
L'HONNEUR DU NOM
ques -uns, en tournant la tête, avaient vu briller les lan
Jernes de la voiture de Mlle de Courtomieu ...
Elle arrivait au grand trot, elle rejoignit la colonne,
on reconnut la livrée, une immense clameur la salua.
M. de Courtomieu, par son aprèté au gain , s'était fait
plus d'ennemis que le duc de Sairmeuse. Tous ces paysans
qui, plus ou moins, croyaient avoir à se plaindre de sa
cupidité, étaient ravis de cette occasion qui se présen
tait de lui faire une peur épouvantable.
Car, en vérité, ils ne songeaient qu'à cette vengeance :
le procès devait le prouver.
Grande fut donc la déception quand, la portière ou
verte, on n'aperçut à l'intérieur que Me Blanche et tante
Jlédie qui poussait des cris perçants.
Mlle de Courtomieu était brave.
Qui êtes-vous ? demanda -t - elle hardiment, et que
voulez - vous ? ...
Demain vous le saurez , répondit Chanlouineau
qui s'était avancé. Pour ce soir, vous êtes notre prison
nière .
Vous ignorez qui je suis, mon garçon , je le vois
bien ...
- Pardonnez-moi, et c'est pour cela que je vous prie
de descendre... Il faut qu'elle descende, n'est- ce pas,
M. d'Escorval ?
Eh bien l... Moi je déclare que je ne descendrai
pas , dit Me Blanche ; arrachez -moi d'ici, si vous l'o
sez l ...
On eût osé, certainement, sans Marie -Anne qui arrête.
plusieurs paysans prêts à s'élancer.
Laissez passer librement Mlle de Courtomieu, dit
elle.
Mais cela pouvait avoir de telles conséquences, que
Chanlouineau eut le courage de résister .
- Cela ne se peut, Marie - Anne, dit-il , elle irait pré
venir sou père... Il faut la garder en otage, sa vie peut
répondre de la vie de nos amis.
Mile Blanche n'avait pas plus reconnu le déguisement
172 MONSIEUR LECOQ
XXIII
XXIV
mon père... Elle serait ta fille alors, elle que j'ai tans
aimée, tu reporterais sur elle tes tendresses divines...
Marie -Anne resta.
XXV
XXVI
XXVII
ment ces deux soldats, rien qu'en les serrant entre ses
bras de fer.
On l'eût dit furieux; intérieurement il était ravi. Le
but qu'il se proposait,il l'avait atteint . Ses yeux avaient
rencontré les yeux de l'abbé Midon , et dans un rapide
regard , inaperçu de tous, il avait pu lui dire :
Quoi qu'il advienne, veillez sur Maurice, contenez
le... qu'il ne compromette pas, par quelque éclat , le
dessein que je poursuis !...
La recommandation n'était pas inutile .
La figure de Maurice était bouleversée comme son
âme ; il étouffait, il n'y voyait plus, il sentait s'égarer sa
raison .
-
Oui ! ... mais non avec le dessein que dit cet homme.
Dans quel but alors ?...
Le baron garda le silence. N'était - ce pas sur les
instances de Maurice que le canot avait été remis en
état !
- Enfin, continua Chupin, quand Lacheneur a mis le
feu à sa maison pour donner le signal du soulèvement,
l'accusé était près de lui...
Pour le coup , s'écria le duc , voilà qui est con .
cluant...
232 MONSIEUR LECOQ
XXVIII
père qui m'a rendu fou , oui, fou comme il l'était lui.
même ...
Après les insultes des Sairmeuse , résolu à se venger
de ces nobles si orgueilleux et si durs , votre père vit en
moi un complice. I m'avait deviné. C'est en surtant de
chez le baron d’Escorval, il doit vous en souvenir, un
dimanche soir, que fut conclu le pacte qui me liait aux
projets de votre père.
« Tu aimes ma fille, mon garçon , me dit-il, eh bien !
« aide- moi , et je te promets que le lendemain du succès,
a elle sera ta femme... Seulement, ajouta -t-il, je dois te
« prévenir que tu joues ta tète ? »
Mais qu'était la vie comparée à l'espérance dont il ve
nait de m'éblouir ! De ce soir-là , je me donnai corps,
âme et biens à la conspiration . D'autres s'y sont jetés par
haine, pour satisfaire d'anciennes rancunes, ou par am
bition, pour reconquérir des positions perdues : moi je
n'avais ni ambitions ni haines !
Que m'importaient les querelles des grands, à moi,
ouvrier de la terrel ... Je savais bien qu'il était hors du
pouvoir du plus puissant de tons, de donner à mes ré.
coltes une goutte d'eau pendant la sécheresse, un rayon
de soleil pendant les pluies ...
J'ai conspiré parce que je vous aimais...
Ahl vous êtes cruel l ... s'écria Marie -Anne, vous.
êtes impitoyable !...
Pauvre fille ! ses yeux, qui avaient tant pleuré, avaient
encore des larmes qui roulaient brûlantes le long de ses
joues.
Il lui était donné de juger par le dénoûment l'horreur
du rôle que son père luiavait imposé et qu'elle n'avait
pas eu l'énergie de repousser.
Mais (alianlouineau n'entendit seulement pas l'excla
mation de Marie -Anne. Toutes les amertumes du passé
montant à son cerveau comme les fumées de l'alcool, il
perdait conscience de ses paroles.
- Le jour vint vite , cependant, poursuivit- il, où tou
tes les illusious de ma fulie s'envolèrent... Vous ne pou
L'HONNEUR DO NOM 243
XXIX
Marie- Anne, que vous vous êtes laissé engluer par votre
naitresse ...
Mais cette injure, Martial ne voulut pas la tolérer.
M'le Lacheneur n'est pas ma maîtresse, déclara-t-il
d'un ton impérieux jusqu'à la menace. Il est vrai qu'il
ne tient qu'à elle d'être demain la marquise de Sair
meuse l ... Laissons les récriminations, elles n'avanceront
en rien nos affaires.
Une lueur de raison qui éclairait encore le cerveau de
M. de Sairmeuse arrêta sur ses ièvres la plus outrageante
réplique .
Tout frémissant de rage contenue, il arpenta trois ou
quatre fois le salon ; puis revenant à Marie-Anne, qui
restait à la même place, roide comme une statue :
Voyons, la belle, commanda - t-il, donnez-moi ce
brouillon .
- Je ne l'ai pas, monsieur.
Où est-il ?
Entre les mains d'une personne qui ne vous le ren.
dra que sous certaines conditions.
.
Quelle est cette personne ?
C'est ce qu'il m'est défendu de vous dire.
Il y avait de l'admiration et de la jalousie, dans le re
gard que Martial attachait sur Marie -Anne.
Il était ebahi de son sang-froid et de sa présence d'es
prit. Où donc puisait-elle cette audace virile, elle autre
fois si craintive et qui pour un rien rougissait... Ah! elle
devait être bien puissante, la passion qui donnait à sa
voix cette sonorité, cette flamme à ses yeux, tant de pré
cision à ses i !ponses.
- Et si je n'acceptais pas les... conditions qu'on pré
tend m'imposer ? interrogea M. de Sairmeuse.
On utiliserait le brouillon de la circulaire ...
Qu'entendez -vous par là ? ...
Je veux dire, monsieur, que demain, de bon ma
tin , partirait pour Paris un homme de confiance, chargé
de mettre ce document sous les yeux de divers person
pages, connus pour n'être pas précisément de vos amis.
15.
262 MONSIEUR LECOQ
C
Il est sûr du succès, pensa Marie -Anne.
Mou plan, disait Martial, est la simplicité même...
Soixante et quarante font cent... Il s'agit de se procurer
cent pieds de boune corde... Cela fera un volume énorme
je le sais bien , mais peu importe l ... Je roule tout ce
chanvre autour de moi , je m'envelopped'un large man
teau et je vous accompagne à la citadelle ... Vous de
mandez le caporal Bavois, vous me laissez seul avec lui
dans un endroit obscur, je lui expose nos intentions...
M. de Sairmeuse haussait les épaules.
Et comment vous procurerez - vous cent pieds de
corde, dit-il , à cette heure, à Montaignac ?... Allez-vous
courir de boutique en boutique ? Autant publier votre
projet à son de trompe.
- Ce que je ne puis faire, monsieur, les amis de la
famille d'Escorval le feront...
Le ducallaitélever de nouvelles objections, il l'inter
rompit.
- De grâce , monsieur, fit- il avec vivacité, n'oubliez
pas quel danger nous menace et combien peu de temps
nous avons... J'ai commis la faute, laissez-moi la ré
parer ...
Et se retournant vers Marie -Anne :
Vous pouvez considérer le baron comme sauve,
poursuivit-il, mais il faut que je m'entende avec un de
vos amis... Retournez vite à l'hôtel de France et envoyez
le curé de Sairmeuse me rejoindre sur la place d'Armes,
où je vais l'attendre ...
..
L'HONNEUR DU NOM 269
XXX
XXXI
II .
200 MONSIEUR LECOQ
Balstain .
Oui, Balstain, et il vous cherche... Ce n'est pas
tout. Comme je traversai. Saint- Pavin, remontant ici,
j'ai vu arriver huit soldats à cheval, guidés par un paysan
à cheval comme eux... Ils ont déclaré qu'ils vous savaient
caché dans le village et ils se sont mis à visiter toutes les
maisons ...
Ces soldats n'étaient autres que les chasseurs de Mon
taignac confiés à Chupin par le duc de Sairmeuse.
Et, en effet, ils faisaient bien ce que disait Antoine.
Cette besogne n'était certes pas de leur goût , mais ils
étaient surveillés de près par le sous-officier qui les com
mandait.
Ce sous- officier n'était pas un méchant homme , mais
il avait été, le long de la route, endoctriné par Chupin ,
lequel avait poussé l'impudence jusqu'à lui promettre
l'épaulette, au nom de M. de Sairmeuse, si les investiga
tions étaient couronnées de succès .
Antoine, cependant, exposait à M. Lacheneur ses espé .
rances et ses craintes.
Epuisé et blessé comme vous l'êtes, lui disait-il ,
vous ne serez pas en état d'entreprendre une longue
marche avant quinze jours... Jusque -là il faut vous ca
cher ... Je connais, par bonheur, une retraite sure, à
deux portées de fusil dans la montagne... Je vous y con
duirai, de nuit, avec des provisions pour une semaine ...
Un cri étouffé de sa femme l'interrompit.
Il se retourna, et l'aperçut toute défaillante, appuyée
au montant de la porte , plus blanche que ses coiffes, le
bras roidi vers le sentier qui de Saint- Pavin conduisait à
la cabane ,
Elle disait :
· Les soldats 1... ils viennent!
Plus prompts que la pensée , Lacheneur et l'honnête
montagnard se précipitèrent vers la porte, allongeant la
tête pour voir sans se montrer.
La jeune femme n'avait dit que trop vrai.
Les chasseurs de Montaignac gravissaient le sentier
MONSIEUR LECOQ
XXXII
XXXIV
XXXV
vcyait que tout son corps n'était pour ainsi dire qu'une
effroyable plaie .
Agenouillé près du blessé, l'abbé Midon, avec une
dextérité admirable , étanchait le sang et fixait des ban
des qui provenaient du linge de toutes les personnes
présentes.
Maurice et un officier à la demi- solde l'aidaiect.
Ahl si je tenais le gredin qui a coupé la corde,
murmurait le caporal violemment ému ; mais patience,
je le retrouverai...
- Vous le connaissez ? ...
Que trop !
Il se tut ; l'abbé Midon venait de terminer tout ce qu'v
était possible de faire là, et il haussait un peu le blesst
sur les genoux de Mme d’Escorval.
Ce mouvement arracha au malheureux un gémisse
ment qui trahissait des souffrances atroces. Il ouvrit les
yeux et balbutia quelques paroles... c'étaient les pre
mières .
- Firmin l ... murmura -t-il, Firmin ....
C'était le nom d'un secrétaire qu'avait eu le baron au
trefois, qui lui avait été absolument dévoué, mais qui
était mort depuis plusieurs années.
Le baron n'avait donc pas sa raison, qu'il appelait ce
mort ....
Il avait du moins un sentiment vague de son horrible
situation, car il ajouta d'une voix étouffée, à peine dis
tincte :
- Ah ! ... que je souffrel... Firmin, je ne veux pas
tomber vivant entre les mains du marquis de Courto
mieu ... Tu m'achèveras plutôt... tu entends, je te l'or
donne ...
Et ce fut tout: ses yeux se refermèrent, et sa tête qu'i
avait soulevée retomba inerte. On put croire qu'il ve
nait de rendre le dernier soupir.
Les officiers le crurent, et c'est avec une poignante
anxiété qu'ils entrainèrent l'abbé Midon à quelques pas
de M * : d’Escorval.
L'DONNEUR DU NOM 337
XXXVI
était digne des plus nobles et des plus fiers, des plus
hauts selon le monde .
Voici ce qu'avait écrit Chanlouineau, la veille, très .
probablement, du soulèvement :
Marie - Anne,
chelle trois cent vingt- sept louis d'or et cent quarante écus de
six livres...
« Si vous refusiez celte donalion, c'est que vous voudriez me
désespérer jusque dans la terre... Acceptez, sinon pour vous, du
moins pour... je n'ose pas écrire cela, mais vous ne me compre
bez que trop.
« Si Maurice n'est pas tué, et je tâcherai d'être toujours entre
les balles et lui , il vous épousera... Alors, il vous faudra peut
être son consentement pour accepter ma donation. J'espère qu'il
ne le refusera pas. On n'est pas jaloux de ceux qui sont morts !
« Il sait bien d'ailleurs que jamais vous n'avez eu un regard
pour le pauvre paysan qui vous a lant aimée ...
« Ne vous offensez pas de tout ce que je vous marque ; je suis
comme si j'étais à l’agonie, n'est-ce pas, et je n'en réchapperai
pas, bien sûr...
« Allons... adieu, Marie-Anne.
CHANLOUINEAU. >
XXXVII
Non , dit-il, pas celal ... Ils sont làches, ils vous fe
raient arrêter. Il faut écrire , je porterai la lettre.
Le caporal Bavois les entendait, il eût pu s'opposer à
leur folie ...
Mais non... il trouvait toute naturelle et on ne peut
lus logique leur fureur de vengeance , et jugeant qu'ils
n'avaient pas froid aux yeux » il les estimait davan
age...
A tous risques, ils entrèrent donc dans le premier box
chon qu'ils rencontrèrent sur leur route , et la provoca
sion fut écrite et confiée à Jean Lacheneur...
L'HONNEUR DU NOM 363
XXXYUI
XXXIX
XL
quand je vous aurai exposé les raisons qui les ont dic .
tées .
a Venez donc à Montaignac, le plus tôt sera le mieux,
je vous attends. D
S'il n'eût écouté que les suggestions de son impatience
le duc de Sairmeuse eût fait atteler à l'instant même, et
se fût mis en route .
Mais pouvait-il, décemment, abandonner ainsi brus
quement le marquis de Courtomieu , qui avait accepté
son hospitalité, et Mme Blanche, la femme de son fils, en
définitive .
S'il eût pu les voir encore, leur parler, les prévenir...
Il l'essaya en vain ... Mme Blanche s'était enfermée et
refusait d'ouvrir ; le marquis s'était mis au lit, avait en
voyé chercher un médecin qui l'avait saigné, et il se dé
clarait à la mort.
Le duc de Sairmeuse se résigna donc à une nuit en
core d'incertitudes, vraiment intolérables, pour un ca
ractère comme le sien .
- Attendons, se disait-il, demain à l'issue du déjeu
ner, je saurai bien trouver un prétexte pour m'esquiver
quelques heures sans dire que je vais rejoindre Mar
tial ...
Il n'eut pas cette peine...
Le lendemain, sur les neuf heures du matin , comme
il finissait de s'habiller, on vint lui annoncer que M. de
Courtomieu et sa fille l'attendaient au salon.
Surpris, il se hâta de descendre
Quand il entra , le marquis de Courtomieu, qui était
assis dans un fanteuil, se dressa tout d'une pièce, s'ap
puyant sur l'épaule de tante Médie ...
Et Mme Blanche s'avança d'un pas raide, påle et de
faite, autant que si on lui eût tiré des veines la dernière
goutte de sang .
- Nous partons, monsieur le duc, dit- elle froidement,
et nous venons vous faire nos adieux.
Comment, vous partez, vous ne voulez pas...
D'un geste doux la jeune femme l'interrompit, et tie
L'HONNEUR DU NOM 383
D.
386 MONSIEUR LECOO
XLI
XLII
XLIII
XLIV
blanc, qui est gros comme mon pouce, se met aux raci.
nes d’un chêne l'arbre immense meurt ...
Marie - Anne ne comprenait que trop l'inanité de ses
larmes et de ses prières...
Et cependant elle ne pouvait pas, elle ne devait pas
laisser son frère s'éloigner ainsi.
Elle se laissa glisser à genoux, et les mains jointes,
d'une voix suppliante :
- Jean , dit -elle, je t'en conjure, renonce à tes projets
impies... Au nom de notre mère, reviens à toi : ce sont
des crimes que tu médites ....
Il l'écrasa d'un regard plein de mépris pour ce qu'il
jugeait une faiblesse indigne ; mais , presqu'aussitôt,
haussant les épaules :
- Laissons cela , fit- il, j'ai eu tort de te confier mes
espérances... Ne me fais pas regretter d'être venu !...
Alors Marie -Anne essaya autre chose, elle se redressa,
contraignant ses lèvres à sourire, et, comme si rien ne se
fût passé, elle pria Jean de lui donner au moins la soi
rée et de partager son modeste souper.
Reste , lui disait-elle, qu'est-ce que cela peut te
faire ? ... rien, n'est-ce pas ? Tu me rendras si heureuse !
Puisque c'est la dernière fois que nous nous voyons d'ici
des années , accorde -moi quelques heures , tu seras libre
après . Il y a si longtemps que nous ne nous sommes vus,
j'ai tant souffert, j'ai tant de choses à te dire ! Jean, mon
rère aîné, ne m'aimes-tu donc plus l ...
Il eût fallu être de bronze pour rester insensible à de
telles prières ; le cœur de Jean Lacheneur se gonflait
d'attendrissement; ses traits contractés se détendaient,
une larme tremblait entre ses cils ...
Cette larme, Marie-Anne la vit, elle crut qu'elle l'em
portait, et battant des mains :
Ahl... tu restes , s'écria -t-elle , tu restes , c'est
dit ....
Non. Jean se roidit, en un effort suprême, contre l'é .
motion qui le pénétrait, et d'une voix rauque :
- Impossible, répéta -t-il, impossible.
L'HONNEUR DU NOM 431
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XLVI
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XLVIII
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XLIX
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1
L'HONNEUR DI NOM 529
LIII
LIV
et les martyrs .
Et il n'était pas même ambitieux .
Tous ceux qui l'approchaient, lorsqu'il était aux af
faires, témoins de ses luttes passionnées et de sa dévo
rante activité, le croyaient ivre du pouvoir...
Il s'en souciait aussi peu que possible. Il jugeait les
charges lourdes et les compensations médiocres. Son or
L'HONNEUR DU NON 539
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L'HONNEUR DU NOM 553
LY
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L'IONNEUR DU NON 559
EPILOGUE
B PREMIBR SUCCES
Marie:1:04
Je vous ai sauvé, Monsieur le duc, en de reconnaissant pas le
prévenu Mai A votre tour, aidez-moi l... Il me faut pour après
e ma par demain , avant midi, 260,000 francs.
J'ai assez confiance en votre honneur pour vous écrire cech,
moil...
willore do MAURICE D'ESCORVAL
li 32
SSC MONSIEUR LECOQ
Monsieur,
Non pas après-demain , mais ce soir. Ma forlune et ma vie soni
à vous. Je vous dois cela pour la générosité que vous avez eue de
vous retirer quand, sous les haillons de Mai, vous avez reconnu
votre ancien ennemi, maintenant volre dévoué
VARTIAL DE SAIRMEUSE .
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VIGILA
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