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Sylvie Batlle
Boostezvotre créativité…
… et libérez votre artiste intérieur
Avant-propos
1. Corne d’abondance
Créativité artistique et histoire de l’humanité
Créativité et nature humaine
Une créativité accessible à tous
Créativité et bien-être
2. Le processus créatif
« L’espace-temps » du processus créatif
1. L’espace
2. Le temps
Le processus créatif en plusieurs phases
1. Les phases primordiales
2. Les phases optionnelles
3. Les blocages
4. Les principaux poisons
1. Le perfectionnisme
2. Le manque de confiance en soi
3. Les mots assassins
4. Le snobisme
5. Les échecs
6. Les succès
7. L’impatience
8. La peur de prendre desrisques
Lespoisons masqués
1. La paresse apparente
2. Rebellions franches et larvées
5. Pistes de solutions
Soutenir l’expression créative
Se former à bonne école
Environnementinterne et externe bénéfique à l’artiste
1. L’Enfant Libre
2. Le Parent Nourricier
Lesassociations d’artistes
1. Être vigilant dans le choix d’une association
2. Repères pour un groupe au cadre clair et sain
3. Pourquoi se tourner vers un groupe plutôt que vers une seule personne ?
Contrainte et liberté
Lesattitudes constructives
1. Quatre règlesd’or pour une attitude constructive
2. Attention à l’attitude répandue « Oui, mais »
3. Encouragez l’attitude « Pourquoi pas ? »
4. Jeu et créativité
5. Antenne paraboliqueet transmetteur
Enguise de conclusion
Notes et références
Remerciements
L’auteur
Avant-propos
O n
trouve
de la
dit parfois «
créativité :
l’inspirationexiste mais il
déjà en train de travailler». La
plus on crée, plus on est
vaut
créativité
mieux
se nourrit
créatif.
qu’elle nous
en effet
Plus on laisse
son potentiel créatif s’exprimer librement, plus il se libère, car la
créativité est par excellence l’expression d’une liberté de penser et de
faire. Une attitude qui donne des ailes, permet la libre expression de
richesses intérieures qu’onne soupçonne pas, une mise en actes,en productions
qui nous surprennent, semblent nous dépasser, venir d’ailleurs…
Pour développer sa
créativité, il n’y a qu’une
solution : créer. Mettre
la main à la pâte.
L a créativité est le
comme
faculté
le monde
d’adaptation
propre de la
végétal, se
vie. Le monde animal,
montre extrêmement créatif
aux conditions changeantes. La
tout
dans sa
créativité n’est donc
pas un don que seuls quelques élus auraient reçu à la naissance, mais bien
une composante naturelle à toute vie sur Terre.
Bernie Warren 1
estime que l’acte de création, le fait d’exprimer son soi
par le biais d’une activité créative, fait partiede notre héritage et de notre
droit fondamental dès notre naissance. Pour elle, chacun de nous peut créer
quelque chosed’unique et porteur de sens pour soi ; elle s’oppose
avec passion à la conception élitiste qu’il faut être spécial et
presque parfait pour prendre part à un acte de création.
C’est un cri du cœur qui m’a fait prendre la plume : plus
j’anime d’ateliers, plus je constate que la plupart des gens manquent de
confiance en leur potentiel créatif. Or, dès qu’unclimat de confiance
est instauré, dès que quelques stimuli sont proposés, un torrent de
créativité coule à flots ! J’aimerais, par le biais de ce livre, donner
au plus grandnombre l’envie de dégripper la serrure qui verrouille
le portail du jardin de leur créativité et transmettrequelques outils pour
le cultiver. Car il s’agit bien d’un jardin intérieur niché en chacun de
nous, dans notre propre inconscient, dans l’inconscient collectif, dans
l’écrin du « mystère » comme je me plais à l’appeler. Un
espace riche de senteurs, de couleurs, de textures et de saveurs qui
n’attendent qu’à prendre forme. Des fruits impatients d’offrir leur nectar
sous le soleil de votre inspiration. Devenez donc l’abeille qui va butiner
ce potentiel gorgé de vos talents cachés.
Les formes de créativité sont innombrables. Cet ouvrage va se limiter à
la créativité artistique, mais la plupart des principes que nous
explorerons s’appliquent à d’autres formes de créativité.
Pat B. Allen
L’être humain est créatif par nature. Par exemple, des jeunes
enfants n’ayant aucune langue en commun vont créer spontanément
une nouvelle langue. Ainsi, les enfants d’esclaves exposés à différentes
formes de langages chaotiques (appelés pidgin), ont spontanément créé une
langue à la grammaire complexe, le créole . 5
Notes
1. Les notes figurent en fin d’ouvrage, pp. 89-91.
2. Le processus créatif
L es pagesqui suivent
afin de cerner
survenir
détaillent les différentes phases
les stratégies d’évitement et
au sein de chaque phase.
les
Une fois
du processus créatif
difficultés qui peuvent
vos propres
fonctionnements identifiés, il vous sera plus facile de les gérer pour vivre et
développer votre créativité sans entraves.
1. L’espace
2. Le temps
je n’érige pas cette liste en dogme. Beaucoup ont proposé des phases
différentes, tout aussi intéressantes.
J’ai décritces phases séparément mais les frontières en sont souvent
floues, fluctuantes et fluides. Leur ordre d’apparition n’est pas
systématique et leur duréetrès variable ; pour une même création,
certaines phases ne durent que quelques secondes alors que d’autres
durent plusieurs semaines. Ce n’est donc pas une description rigide du
processus créatif mais une proposition de découpage pour explorer plus
facilement ce qui risque d’interférer à chaque étape et empêcher une
créativité fructueuse.
Si vous souhaitez développer votre créativité pour votre plaisirou dans un désir de
développement personnel, vous pouvez vous en tenir aux deux premières
phases que je nomme « primordiales ». Je propose les quatre
phases suivantes, « optionnelles », au cas où vous auriez une
quêteprofessionnelle ou le souhait de produire des œuvres plus « finies
».
Tout peut constituer une source d’inspiration. Ayez toujours sur vous un
carnet sur lequel vous pourrez prendre des notes, collecter (des
coupures de journaux, des photos, des publicités), croquer un paysage
ou décrire une situation en quelques mots, vous constituer votre recueil
d’idées.
2. Phase de création spontanée, improvisation
Cette phaseest la plus spectaculaire, c’est la fougue printanière : les
petites et les grandes fleurs, les bonnes et les mauvaises herbes,
la poussée de sève, cette fulgurante énergie de vie qui anime les
végétaux, les animaux et les insectes, qui arrivent dans le jardinen
désordre.
Durant cette phase, l’important est de se laisser aller à la création
spontanée, libre, exploratoire. C’est le moment de passer à l’acte
créatif. Ne vous censurez pas, interférez le moins possible avec votre
capacité de jeu. Il est important, lors de cette phase, de lâcher prise,
de donner sa place à toute possibilité, tout incident, toute création
spontanée, désordonnée.
Enprincipe, c’est une phasefacile,puisque non encombrée de souci de format,
de consignes, de conventions. Pourtant, le manque de structure peut
générer une impression de chaos et de fragmentation intérieure. Certaines
personnalités s’y abandonnent plus facilement que d’autres car le
désordre est tolérable pour certains et déstabilisant pour d’autres.
Enart-thérapie, cette phaseest essentielle. L’accompagnement du thérapeute
rassure celui qui s’exprime et l’aide à supporter le désordre et
l’inconnu. Si vous avez tendance à sauter cette phase, inscrivez-vous à
un atelier d’art-thérapie ou d’art libre, où l’accent est mis sur la
spontanéitéet le jeu.
Si vous êtes dans une quêtede créativité artistique, cette phaseest incontournable.
Ne serait-ce que parce que c’est souvent celle qui apporte le plus de
plaisiret de plénitude. C’est en effet la phasequi permet de se surprendre,
de se découvrir et de se surpasser.
4. Phase de la séparation
Le jardinier ouvrele portail de son jardinpour laisser le monde le
découvrir. L’objet de création est terminé, retouché, prêt à être
présenté, parfois vendu. C’est une phaseà laquelle on penserarement,
car elle n’intervient qu’une fois l’œuvre terminée. Elle n’arrive que si
vous souhaitez offrir votre travail ou si vous vivez de votre art. Si c’est votre
cas, il est crucial de l’explorer car elle peut être insupportable et
faire l’objet d’auto-sabotages.Jacob Zelliger 11
explique qu’unsculpteur cassait,
toujours par accident, une partiede ses statues prêtes à la
vente, à cause de la disparition d’un être cher survenue pendant son
enfance. Se séparer de ses statues lui faisait revivre ce
traumatisme. D’où le sabotage inconscient de ses œuvres,pour être sûr de
ne pas avoir à s’en séparer.
3. Les blocages
L
Ces périodes difficiles
es artistes
peuvent
les plus établis connaissentdes moments de vide, de
fragmentation intérieure, de chaos.
être passagères ou s’installer pour plusieurs mois,
voire plusieurs années, parfois une vraie entrave au bonheur. Une crise n’est
jamais anodine. Il y a toujours une cause, aussiobscure soit-elle,
donc toujours une solution dès que la cause est identifiée. Explorons…
1. Le perfectionnisme
Les attentes perfectionnistes sont les griffes d’une main de fer qui
transpercent la verve créative et la vident de son nectar productif.
Soyez donc vigilant avec les manifestations de votre perfectionnisme (ou de
celui de quiconque – « toi qui as des doigts en or, fais-nous
un truc super pour notre mariage ! »). Pour que la créativité coule à
flot, ouvrez les vannes de l’indulgence, de la bienveillance
envers vousmême, de l’exploration ludique sans pression. Levez les règles
et laissez-vousaller au mouvement naturel de votre véritéen constante
mouvance.
Natalie Goldberg explique que dans ses ateliers
12
d’écriture, les participants
parviennent à écrirede vrais petits chefs-d’œuvre jusqu’au jour où un
participant décide d’écrire un roman : il n’écrit plus une ligne.
La créativité a cela de paradoxal que plus nous souhaitons produire un
chef-d’œuvre, moins nous en sommes capables.
Nous sommes créatifs et originaux lorsque nous parvenons à dépasser les
obligations, les règles, les attentes.
Surveillez de près vos formulations intérieures.
Bannissez Préférez-leur:
«Jedois/jenedoispas» «Sij’essayais?»
«Jedevrais/jenedevraispas» «Pourquoipas?»
«Ilfaut/ilnefautpas»! «Chiche!»
Nous avonsbesoin, pour être libres, d’accepter l’imperfection. C’est en
acceptant de laisser sortir spontanément, sans attente, votre véritéà nu,
que votre originalité s’exprimera. Si vous vous « voulez » original, vous
ne faites que travailler quelque chosed’artificiel, de surfait. La personne
que vous êtes est forcément originale, puisque nul autre être au monde
n’a votre vécu ni vos traits de personnalité. C’est dans l’ordinaire et le
vrai que se niche l’originalité de chacun.
Il est d’autant plus regrettable de s’emprisonner dans des attentes
perfectionnistes que c’est parfois au sein de nos erreurs que se
cachent les plus précieux trésors.
La première fois que j’ai essayé de faire un chapeau en laine
cardée, j’ai oublié d’insérer la décoration sur tout un côté du chapeau.
Cela m’a forcée à le travailler à l’enverset à y apporter des
pliures qui n’étaient pas du tout celles que je souhaitais au départ. Le
chapeau qui est né de ces rattrapages s’est révélé bien plus à
mon goût que le modèle initial. Je porte désormais sur ma tête la
preuve que les erreurs peuvent être de vrais cadeaux !
4. Le snobisme
Dans le film d’Agnès Jaoui Le goût des autres (1998), les différences
de perception et de goût sont évoquées avec une finesse et un
humour grinçants. Le film souligne à merveille le snob potentiel en
chacun de nous… Méfiez-vous des snobsqui s’ignorent dans votre entourage
et de votre snobisme intérieur ! Si vous cherchez à conformer vos
créations au goût présumé des gens d’un milieu donné, vous sera-t-il
possible d’être pleinement vous-mêmeet de vous laisser aller ? La
définition du Robert limite le snob à « celui qui essaie d’être
assimilé aux gens distingués de la hautesociété ». Ce que j’appelle
snobisme se manifeste dans tous les milieux culturels et sociaux. Moins
on a confiance en soi et en son jugement, plus on court le
risque de se laisser emprisonner par un snobisme inavoué. La
vigilance est donc de mise. D’autant que le snobisme se manifeste bien
souvent de façon sournoise et sophistiquée. Une exclamation de type «
Qu’estce qu’il est sucré,ce paysage ! » peut être une forme de
snobisme, quels qu’en soient l’auteur et le milieu dont il vient.
5. Les échecs
Les échecs du passé peuvent hanter une vie tout entière. Si,
comme dans la chanson d’Aznavour,vous vous êtes vu en haut de
l’affiche, si vous y avez cru et que vous avez essuyé un échec
cuisant (ou du moins si telle en a été votre perception), cela peut
bloquer votre capacité à vous lancer dans quelque activité créative que
ce soit. Si vous pensez avoir dépassé un échecmais que vous vous
abstenez de créer dans le même domaine, ayez le courage de revenir
sur cet échec. Les blessures agissent bien souvent en sourdine, au
niveau inconscient. Elles ne s’exprimentparfois qu’au hasard d’une
remarque anodine qui vous met dans une fureur inexplicableou par le
biais d’une irritation exagérée envers certains artistes qui réussissent, une
jalousie non assumée…
6. Les succès
7. L’impatience
« Il faut avoir du
chaosen soi pour
pouvoir donner
naissance à une étoile
dansante. »
(Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra)
Il n’est pas facile d’endurer la sensation de chaos. L’imprécis et le
confus peuvent être terrifiants. L’impatienceà aller vers l’ordre est donc
compréhensible. Le désordre des idées peut donner l’impression que l’on va
se perdre et pourtant, c’est un passage obligé à la réelle
créativité. Si l’on adopte une attitude d’explorateur, d’enfant qui part à
l’aventure, le chaos est un royaume fascinant. Si l’on souhaite, en
revanche, obtenir immédiatement un jardinà la française aux allées
nettes et aux buis bien taillés, on brûle une étape importante,celle de
l’ordre naturel des choses, de la création spontanée.
1. La paresse apparente
Ces phrases, ces mots sont souvent pleinsde bon sens et dissimulent à
merveille la tyrannie qu’ils exercent. En voici quelques exemples courants
: « Bonne idée de faire cette aquarelle mais j’appelle X avant, puis
j’envoie ce mail d’encouragement à mon collègue et je n’oublie pas
la carte d’anniversaire de Y. Je fais mon aquarelle tout de suite après.
» « Le directeur ne va pas apprécier que je tarde à écrirecet
article qu’il m’a demandé de lui offrir vu mes talents d’écriture, donc je
joins l’utile à l’agréable et crée en rendant service au directeur plutôt
qu’en faisant une aquarelle qui ne sert à rien. » « Je prendrai
tellement de plaisirà peindre cette aquarelle dans une pièce rangée et qui
sent le propre ! Allez, un petit coup de ménage avant de m’y
mettre. »
Aucune de ces pensées n’est dénuée de bon sens et si vous peignez
l’aquarelle après l’appel, le mail et le ménage, parfait ! Mais
combien sont capables de se tenir au minimum ? Une tâche en
appelle une autre ; l’appel dure plus longtemps que prévuet vous invite
à mille autres petites corvées. Dix années peuvent ainsi passer sans
que cette aquarelle soit jamais peinte.
Si des centaines d’aquarelles sont restées à ce stade de gestation, peut-
être à la longue avez-vous capitulé devant votre tyran intérieur. Car il
s’agit bien de votre tyran intérieur ! La Terre auraitcontinué detourner si
vous aviez mis votre créativité tout en haut de votre liste de priorités. Pour
modifier des habitudes tenaces qui opèrent souvent à un niveau
inconscient, il faudra sans doutevous engager envers vous-même à
donner plus de force à votre Parent Nourricier intérieur, pour ne pas
laisser un sentiment de culpabilité injustifié interférer avec vos bonnes
intentions (voir chapitre 4, paragraphe « Environnement interne et externe
bénéfique à l’artiste »).
D e
propre,
même
d’apprendre
que chaque
chaque
à
blocage
personne est unique
est unique, complexeet
jouer du piano peut stimuler
et porte son histoire
obscur.
une personne et
Le conseil
en
bloquer une autre.Il en va de même pour les plaiesencore ouvertes.
Certaines vont devenir des moteurs pour la créativité, d’autres vont
l’entraver. Il est donc important d’identifier ses propres schémas et blocages,
ce qui nécessite souvent davantage que la lecture d’un ouvrage. Il
existetoutefois des principes de base qui peuvent vous ouvrirdes pistes.
Soutenirl’expression créative
Nous avonstous besoin de limites et de contenants.Pour reprendre un
terme cher à Winnicott , nous avons 16
besoin de « holding » («
être tenu »). Il n’est en effet pas rare de voir des personnes très
productives pendant leur formation artistique ne plus toucher à un pinceau
ou à une partition quelques années plus tard. Le talentne s’évapore pas
au moment où ils passent la porte de sortie mais ce qui disparaît,
c’est la structure qui les soutenait dans leur démarche. Il peut être très
salvateur de trouver une source de soutien à la sortie, de
différentes manières.
En louant un atelier, un lieu dans lequel vous pourrezrencontrer d’autres
artistes.
En formant votre propre troupe ou en vous engageant dans une troupe
existante.
En participant régulièrement à des cours de soutien, qui vous
permettent de continuer à rencontrer d’autres artistes.
En créant ou en participant à un lieu d’échanges sur Internet.
En définissant clairement votre lieu de travail créatif et en organisant vos
journées avec précision dans ce lieu.
1. L’Enfant Libre
Nous sommes en État du Moi Enfant Libre lorsque nous nous exprimons
et agissons sans ressentir de contrainte, laissant libre cours à notre imagination,
à notre créativité, à notre spontanéité. Par nature joueur, rieur, parfois
capricieux, l’État du Moi Enfant Libre est réceptif à ses sensations physiques,
à ses envies, à ses besoins. C’est en nous trouvant dans notre Enfant
Libre que nous laissons émerger et exprimons nos sentiments et nos émotions,
aussi bien agréables que désagréables : joie et chagrin, attirances et aversions,
peur et colère…
2. Le Parent Nourricier
Erving Polster 18
était psychothérapeute depuis quarante ans au moment
où il écrivit cette phrase. Selon lui, certains sont de véritables
experts en camouflage quand il s’agit d’honorer leur propre vivacité,
leur spontanéité ou leur richesse intérieure. Ils ne sont pas en contact
avec leurs qualités, n’y croient pas et ne lesdévoilent jamais ou
presque. Pourtant, sous des apparences parfois incolores et inodores, il
suffit d’insister pour que la saveur propre de la personne finisse
par faire surface au hasard d’un moment de grâce, d’une rencontre
profonde, d’un souvenir poignant. Je trouve ce rappel primordial
lorsque l’on entreprend de développer et de booster sa créativité :
insistez avec foi pour que votre saveur propre finisse par s’exprimer dans
votre créativité. Pour cela, il est utile d’adopter une attitude d’accompagnant
bienveillant envers soi-même (ouvert d’esprit et confiant) pour que les
nœuds se dénouent.
4. Jeu et créativité
« Ce n’est qu’en s’amusant
qu’on peut être pleinement créatif. ».
D.W. Winnicott 20
Notes
2. (Voir à ce sujet le film Oui, mais…, de Yves Lavandier, 2001).
N ous avonsexploré
proposé diverses
tout ce qui peut bloquer
pistesde solutions
pour vous de vous élancer.
pour y
votre créativité
pallier. Il
et
est
avons
temps
1. S’ancrer
Endanseou en sport,tout le monde sait qu’il faut échauffer son corps avant
de faire des pirouettes. En théâtre et en chant, la pratique est
également courante. En revanche, dans beaucoup d’autres formes artistiques,
l’échauffement est oublié. Pourtant, une mise en condition physique et
mentale est extrêmement facilitatrice.Assurez-vous que vous trouvez des
rituels de mise en train adaptés au langage artistiquede votre choix.
Donnez-vous la possibilité de faire appel à d’autres formes artistiques
pour cette mise en train si cela vous aide.
J’ai eu la chance d’animer une série d’ateliers d’écriture créative
avec un groupe très enthousiaste et dynamique. J’ai pu me permettre de
proposer des mises en train désinhibantes qui ont généré des écrits
extraordinaires. Ainsi, j’ai commencé un atelier avec un échauffement de théâtre :
quelques mouvements ludiques au degré d’exposition progressif suivis d’une
préparation par petits groupes d’un mini-spectacle. L’écriture individuelle des
scénarios inspiréspar cet échauffement a été très inspirée. J’ai commencé un
autre atelier avec une courte
activité danse/ déguisements sur des airs de « fiesta ». Cet échauffement a
généré une euphorie joyeuseet aidé les participants à lâcher prise pour l’activité
d’écriture prévue ensuite. Les écrits ont été très imaginatifs. Une
participante quiavait eu des blocages lors d’un atelier précédent s’est surpassée.
5. Jouer le jeu
Ne vous donnez pas le temps de réfléchir. C’est dans l’action que l’on
parvient à court-circuiter le cerveau gauche et tous ses messages
inhibiteurs du type « tu n’y arriveras jamais ». Commencez à
faire avant même de pouvoir penser et l’action gagnera sur
l’inhibition.
7. Laisser venir
8. Lâcher prise
10. S’amuser
Vous avez produit une création qui ne demande qu’à être complétée ou
non, imitée ou non, peaufinée ou non, au choix,en toute liberté.
2. Le dessin facile
EXPLORATION
Prenez deux feuilles de papier de taille quelconque et de quoi élaborer un
tracé (crayon, stylo, feutre ou tout ce qui vous inspire).
1. Avec votre main préférée (gauche si vous êtes gaucher), faites des lignes
ininterrompues de la gauche vers la droite. Peu importesi elles sont droites, ondulées,
régulières ou non. Dessinez un minimum de trois lignes de gauche à droiteen
vous concentrant sur la pression du crayon sur le papier, les sensations
dans votre main, votre position, vos muscles, etc.
2. Lorsquevous en avez assez, tournez votre feuille et recommencez l’exercice, toujours
avec la même main mais cette fois, faites les lignes de droite à gauche et
notez la différence. Est-ce plus facile ainsi ou alors inconfortable, ennuyeux ?
3. Prenez la seconde feuille de papier et faites des lignes de gauche à droite
avec votre autre main (main droite si vous êtes gaucher), puis des lignes de
droite à gauche.Concentrez-vous sur l’action, sur l’acte plus que sur le
résultat. Comment vous sentezvous en tenant un crayon avec votre autre main, préférez-
vous faire vos lignes de droite à gauche ou de gauche à droite ?
4. Tournez cette seconde feuille de papier et cette fois, tenez votre crayon avec les
deux mains. Encore une fois, concentrez-vous sur les différences de sensation.
4. Mise en corps
Susan R. Makin 25
propose de tenir un journal créatif comme lieu
de véritéintime avec soi. Elle est thérapeute et elle suggère cette
activité pour aider son public à aller mieux. On s’approche donc, avec
le journal créatif, des principes de l’art-thérapie, tellement libérateurs de
l’énergie créatrice, bien au-delà du domaine purement thérapeutique ! Le
principe est le même qu’unjournal intime traditionnel basé sur l’écrit
avec l’ajout de dessins, peintures, objets, mini-jouets,coupures de
presse, collages, photos, gribouillis, etc. Je vous conseille vivement de
vous y essayer.
EXPLORATION
Prenez une feuille et posez votre stylo, votre feutre ou votre pastel sur la
feuille. Lâchez prise et autorisez votre main à écrire ou à dessiner. Laissez-vous
appeler par ce qui vous vient à l’esprit ou mieux encore, « ce qui vient à
la main ». Peut-être voulez-vous ajouter un chiffon, des mini-jouets, une photo ?
Faites-le sans vous juger. N’essayez pas de faire beau ou logique, faites
simplement vrai.
N ous venons
temps
de
de créer
attire,simplementpour
découvrir quelques exercices
un petit quelque chose sans
vous amuser et vous faire
d’échauffement, il est
importance dans l’art qui vous
plaisir. Si vous manquez
d’inspiration, voici quelques pistesà explorer et transformer sans
modération.
Ici et maintenant
Passez à l’action ici et maintenant, coûte que coûte. Ne réfléchissez
pas, faites le premier pas, là, tout de suite. Faitesce saut dans l’inconnu,
cet acte de foi en la vie. Accueillez vite ce grain de folie qui peut
saupoudrer le quotidien de fantaisie et vous embarquer enfin sur ses ailes de
liberté… Allez-y !
2. Lieu ou décor
Évoquez une sensation (un son, un goût, une chosevue ou touchée, une
odeur) par un médiateur artistique. Si cela s’y prête, faites appel à
plusieurs sens. En écriture ou en improvisation théâtrale par exemple,
créer un passage où différents sens sont stimulés est très agréable à
produire et à recevoir.
5. Photo
7. Actualités
Choisissez une nouvelle qui vous touche, un fait divers, une situation,
comme point de départ à une création.
8. Dialogues
Faites dialoguer des personnages inspirés d’une comptine, d’une chanson, d’un
roman, d’une carte postale, par la forme artistique qui vous attire.
Variante: reprenez un travail effectué (exemple : faites dialoguer
l’animal que vous avez choisi avec le personnage que vous avez créé). Mêlez
le fictif avec des aspects de votre vie passée :
– le personnage fictif frappe chez un de vos anciens voisins
;
– il lui fait visiter le lieu que vous avez créé ; – il
lui présente l’animal ;– etc.
Puisez dans tout ce qui vous passe par la tête et sous les yeux. TOUT est
utilisable comme point de départ, du moment que cela vous stimule.
Alors n’hésitez plus. Lancez-vous, foncez et osez briller!
En guise de conclusion
« La créativité
est une célébration de sa
propre grandeur, de la
sensation de pouvoir tout
rendre possible.
La créativité est une célébration de la vie
– ma célébration de la vie. »
Joseph Zinker 27
T ransformer l’ordinaire en extraordinaire n’est pas aussi difficile que cela peut paraître.
L’extraordinaire est souvent juste là, derrière ce buisson que vous ne
remarquez plus sur votre chemin quotidien. Il n’attend que votre signal pour
sortir de sa cachette et venir brillerau grandjour. Une belle au bois
dormant pour laquelle vous êtes le prince salvateur, une citrouille qui
n’attend que votre baguette magique pour se transformer en carrosse.
Pour activer la baguette magique, c’est très simple : il suffit
d’adopter un état d’esprit adéquat. La baguette fera le reste.
Je suis intimement persuadée que la créativité artistique fait partieintrinsèque de
l’être humain et qu’elle n’est pas le privilège de quelques élus. La
musicalité intérieure, la capacité à bouger, danser, chanter, dessiner,
peindre, sculpter, écrire, jouer la comédie, simplementcréer,se trouve
en chacun de nous. Il nous appartient de nous donner le droit de
nous ouvrirà ces richesses qui sont en nous.
Faites-vous pleinement honneur. Ne vous laissez pas piéger par les
pressions qui vous retiennent, qu’elles soient psychologiques, sociales,
professionnelles ou familiales. Osez vous dégager du temps pour laisser votre
spontanéitéet votre véritéprofonde s’exprimer.
Donnez-vous le droit de vous amuser avec tous les langages artistiques qu’il
vous prendl’envie d’essayer et apportez vos propres saveurs au monde.
Donneznous et donnez-vous la joie d’être visible, de manifester par
les arts votre palette de richesses intérieures : nous le méritons, vous
le méritez !
Notes et références
1. Bernie Warren, Using the Creative Arts in Therapy, a practical introduction,
Routledge, 1993 : 6.
2. Edith Kramer, Art as Therapy, Collected Papers, Jessica Kingsley Publishers,
Londres, 2000.
3. Ernst Fischer, The Necessity of the Art, Peregrine Books, Middlesex, 1986 : 8.
4. Pat B. Allen, Art is a Way of Knowing, Random House Inc., 1995. Texte original
: “The gift of creativity is within each of us waiting to unfold.”
5. Le linguiste Noam Chomsky s’en est inspiré pour ses théories de l’inné comme
expliqué dans le passage : Observations that supportthe Chomskyian view of
language, de l’article Tool Module : Chomsky’s Universal Grammar, disponible sur
http://thebrain.mcgill.ca/flash/capsules/outil_rouge06.html.
6. Pour le détail de ces ateliers, voir le site www.creatis.weebly.com.
7. Si c’est cet aspect de la créativité qui vous intéresse le plus, mon ouvrage
L’art-thérapie au quotidien (Jouvence, 2007) propose des pistes d’exploration variées.
8. Voir documentaire « Rolling Stones, la french connection », diffusé sur France 5 (juin-
juillet 2010).
9. Notamment l’apport des cours de Jacob Zellinger au IATE (The Institute for
Arts in Therapy and Education).
10. Pour une liste de stimuli de ce type, voir la 3e partie de mon ouvrage
L’art-thérapie au quotidien, op. cit.
11. Jacob Zellinger, lors d’un cours au IATE (The Institute for Arts in Therapy
and Education).
12. Nathalie Goldberg, Writing down the bones, Shambhala, Boston & Londres, 1986.
13. Joseph Campbell, Reflections on the Art of Living – A Joseph Campbell
Companion, New York, 1991, textes sélectionnés et publiés par Diane K. Osbon. Citation
originale : “If you want omelets, you must be willing to break some eggs.”
14. Une théorie de la personnalité et de la communication fondée par le psychanalyste
et psychiatre Eric Berne, dans les années 1950-1970.
15. Synthèse de divers descriptifs disponibles dans les ouvrages se référant à
l’Analyse Transactionnelle tels que : Eric Berne, What Do You SayAfter You Say
Hello ? Ed. Mass Market Paperback, Oct. 1, 1984 ; Christine Chevalier et
Martine Walter, Découvrir l’Analyse Transactionnelle, InterEditions/Dunod, Paris 2008 ; Christel
Petitcollin, S’affirmer et oser dire non, Jouvence, 2003.
16. D. W. Winnicott, Jeu et réalité, Folio Essais, 1975.
17. Erving Polster, Every Person’s life is worth a novel, New York, Norton,1987. Texte original
: “No one can escape being interesting.”
18. Un des pionniers de la Gestalt (approche thérapeutique humaniste) plusieurs années après
son émergence par les fondateurs Fritz et LauraPerls, et Paul Goodman.
19. Carole Watanabe, The Ecstatic Marriage of Life and Art, Live ArtEditions, Sebastopol,
CA, 2008.
20. D.W. Winnicott, Jeu et réalité, op. cit. Texte original : “Only in play one can
be fully creative.”
21. Concepts jungien de puer et senex.
22. Carole Watanabe, The Ecstatic Marriage of Life and Art, op. cit.
23. Joseph Zinker, Creative Process in Gestalt Therapy, the creative leap : 9, Barnes
& Nobles, 1977.
24. Julia Cameron, The Artist Way, Pan Books, Londres, 1996.
25. Susan R. Makin, Therapeutic Art Directives and Resources, Jessica Kingsley Publishers,
Londres, 2000.
26. Marianne Williamson, A Return To Love : Reflections on the Principles of A
Course in Miracles, Harper Collins Publishers, 1992. Texte original : “Our deepestfear is
not that we are inadequate. Our deepestfear is that we are powerful beyond
measure. It is our light, not our darkness that most frightens us. We
ask ourselves, Who am I to be brilliant, gorgeous, talented, fabulous
? Actually, who are you not to be ?”
27. Joseph Zinker, Creative Process in Gestalt Therapy, op. cit.
Remerciements
J’aimerais remercier ici mon compagnon, Serge de Lussy et mes parents,
Josette et Robert Batlle, pour leurs contributions diverses et leur
soutien précieux et constant.
Je souhaite également remercier pour leur amitié, leur confiance et leurs
encouragements : Nieves del Amo, Mireille Michel, Nadège et Zoé
Barrault Lovett, Rosie Harness, Erica Cleverly, CécileAlais, Anne-Laure Boulard,
Caroline Nottelet-Solignac,Isabelle Desmoulins, Sandrine Maurer, Anne
Berthier, Annelie Akesson, Jay Kanabar, Paula Collens, Régine Coq, Laurence
de Lussy Kubisa, Rémy Bertrand, Patrick Auguy, Richard Rubioet le
souvenir de Philippe Gouraud. Et pour leur aide : PierreTruant et
Cédric Hadjaj.
Merci à mes formateurs et initiateurs pour leurs précieux enseignements. Un
merci tout particulier à IATE (the Institute for Arts in Therapy and
Education) à Londres.
Un grandmerci enfin, et non des moindres, aux participantsà mes ateliers
pour leur enthousiasme à développer leur créativité.
L’auteur
Suite à un parcours de comédienne, de plasticienneet de professeur
de langue, Sylvie Batlle, titulaire d’un master en art-psychothérapie
intégrative (Londres) s’est spécialisée dans l’utilisation des arts à des fins
récréatives et thérapeutiques (art-thérapie, développement personnel, formation
professionnelle, etc.). Elle est l’auteur des Compulsions alimentaires et
de L’art-thérapie au quotidien, publiés aux éditions Jouvence.
L’auteur propose :
– des formations professionnelles pour l’apprentissage de
l’animation d’ateliers ; – des ateliers variésde développement
de la créativité.
www.editions-jouvence.com