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Boostez votre créativité

Sylvie Batlle

Boostezvotre créativité…
… et libérez votre artiste intérieur

Du même auteur aux Éditions


Jouvence Les compulsions alimentaires,
2004. L’art-thérapie au quotidien, 2007.

Extrait du catalogue Jouvence


Les 7 étapes du lâcher-prise, Colette Portelance, 2010
Voir sa vie autrement, Daniel Stoecklin, 2010
Les clés du respect de soi et des autres,
Agnès Payen de La Garanderie, 2010
Vivre les émotions avec son corps,
Dr Christian Tal Schaller et Johanne Razanamahay, 2010

Catalogue gratuit sur simple demande


ÉDITIONS JOUVENCE
Suisse : CP 184 – 1233 Bernex-Genève
France : BP 90107 – 74161 Saint-Julien-en-Genevois Cedex
Mail : info@editions-jouvence.com
Site internet : www.editions-jouvence.com

© Éditions Jouvence, 2010


ISBN 978-2-88911-181-7

Dessin de couverture : Jean Augagneur


Maquette de couverture : Éditions Jouvence
Suivi éditorial : Fabienne Vaslet
Mise en page et picto peinture : Anne Bordenave
Autres dessins : Sylvie Batlle

Tous droitsde reproduction, traduction et adaptation réservés pour tous pays.


Sommaire

Avant-propos

1. Corne d’abondance
Créativité artistique et histoire de l’humanité
Créativité et nature humaine
Une créativité accessible à tous
Créativité et bien-être

2. Le processus créatif
« L’espace-temps » du processus créatif
1. L’espace
2. Le temps
Le processus créatif en plusieurs phases
1. Les phases primordiales
2. Les phases optionnelles

3. Les blocages
4. Les principaux poisons
1. Le perfectionnisme
2. Le manque de confiance en soi
3. Les mots assassins
4. Le snobisme
5. Les échecs
6. Les succès
7. L’impatience
8. La peur de prendre desrisques
Lespoisons masqués
1. La paresse apparente
2. Rebellions franches et larvées

3. Autres sources de blocage

5. Pistes de solutions
Soutenir l’expression créative
Se former à bonne école
Environnementinterne et externe bénéfique à l’artiste
1. L’Enfant Libre
2. Le Parent Nourricier
Lesassociations d’artistes
1. Être vigilant dans le choix d’une association
2. Repères pour un groupe au cadre clair et sain
3. Pourquoi se tourner vers un groupe plutôt que vers une seule personne ?
Contrainte et liberté
Lesattitudes constructives
1. Quatre règlesd’or pour une attitude constructive
2. Attention à l’attitude répandue « Oui, mais »
3. Encouragez l’attitude « Pourquoi pas ? »
4. Jeu et créativité
5. Antenne paraboliqueet transmetteur

5 S’élancer pour se lancer


Dix coups de pouce pour s’élancer
1. S’ancrer
2. S’échauffer et se mettre en train
3. Protéger son espace/temps créatif
4. Piocher
5. Jouer le jeu
6. Agir plutôt que réfléchir
7. Laisser venir
8. Lâcher prise
9. Prendre des risques
10. S’amuser
Des premiers pas à la portée de tous
1. Un collage simple
2. Le dessin facile
3. La peinture facile
4. Mise en corps
Disciplines quotidiennes favorisant la créativité
1. Les pagesdu matin
2. Le journal créatif

6. Danser sur l’arc-en-ciel de la créativité


Ici et maintenant
Sources d’inspiration pour stimuler votre créativité
1. Personne ou personnage
2. Lieu ou décor
3. Stimulation des sens
4. Diverses représentations d’un même sujet
5. Photo
6. Œuvre célèbre
7. Actualités
8. Dialogues
Oser briller de tout son éclat

Enguise de conclusion
Notes et références
Remerciements
L’auteur
Avant-propos

O n
trouve
de la
dit parfois «

créativité :
l’inspirationexiste mais il
déjà en train de travailler». La
plus on crée, plus on est
vaut
créativité
mieux
se nourrit
créatif.
qu’elle nous
en effet
Plus on laisse
son potentiel créatif s’exprimer librement, plus il se libère, car la
créativité est par excellence l’expression d’une liberté de penser et de
faire. Une attitude qui donne des ailes, permet la libre expression de
richesses intérieures qu’onne soupçonne pas, une mise en actes,en productions
qui nous surprennent, semblent nous dépasser, venir d’ailleurs…

Pour développer sa
créativité, il n’y a qu’une
solution : créer. Mettre
la main à la pâte.

Bien sûr, si c’était si facile,vous ne seriezpas en train de lire ces


lignes ! L’envie de développer sa créativité est une quêteassez commune
mais le premier pas est souvent remis au lendemain. Il peut être
repoussé une vie entière même, avec quelques furtifsmoments volés au
quotidien au hasard d’un échange, d’un dessin griffonné en attendant
un train, histoire de « tuer le temps »… Ce temps pourtant
si limité et si précieux ! Il est temps de se l’accorder, ce
temps ! De le voler au superflu pour l’offrir à la part de
l’être qui le mérite le plus : le soi profond qui ne demande
qu’à s’exprimer.
J’espère que ce livre vous aidera à passer du rêve à la réalité.
Mon souhait est d’ouvrir des fenêtres sur vos blocages potentiels afin
de les désamorcer. J’espère aussi et surtout vous donner des coups
de pouce concrets, simples et ordinaires pour vous aider à accoucher de
choses concrètes et abstraites, simples et sophistiquées, ordinaires et
extraordinaires. Car je crois qu’être en vie, réellement en vie (et non
en modesurvie), c’est créer son chemin de vie à chaque pas, de
façon libre et créative pour manifester son potentiel, être présent à soi-
même et au monde, en accord avec ses valeurs. Créer, c’est
célébrer la vie, l’abondance intérieure, l’unicité de chacun, sa propre
magie, ses propres couleurs.
J’ai l’espoir que ce court écrit offrira un bol d’air frais à la vague
de votre créativité. Libre et unique, à chaque instant réinventée, elle ne
peut naîtreque de vous pour parcourir les océans de vos rêves.
1. Corne d’abondance

L a créativité est le
comme
faculté
le monde
d’adaptation
propre de la
végétal, se
vie. Le monde animal,
montre extrêmement créatif
aux conditions changeantes. La
tout
dans sa
créativité n’est donc
pas un don que seuls quelques élus auraient reçu à la naissance, mais bien
une composante naturelle à toute vie sur Terre.
Bernie Warren 1
estime que l’acte de création, le fait d’exprimer son soi
par le biais d’une activité créative, fait partiede notre héritage et de notre
droit fondamental dès notre naissance. Pour elle, chacun de nous peut créer
quelque chosed’unique et porteur de sens pour soi ; elle s’oppose
avec passion à la conception élitiste qu’il faut être spécial et
presque parfait pour prendre part à un acte de création.
C’est un cri du cœur qui m’a fait prendre la plume : plus
j’anime d’ateliers, plus je constate que la plupart des gens manquent de
confiance en leur potentiel créatif. Or, dès qu’unclimat de confiance
est instauré, dès que quelques stimuli sont proposés, un torrent de
créativité coule à flots ! J’aimerais, par le biais de ce livre, donner
au plus grandnombre l’envie de dégripper la serrure qui verrouille
le portail du jardin de leur créativité et transmettrequelques outils pour
le cultiver. Car il s’agit bien d’un jardin intérieur niché en chacun de
nous, dans notre propre inconscient, dans l’inconscient collectif, dans
l’écrin du « mystère » comme je me plais à l’appeler. Un
espace riche de senteurs, de couleurs, de textures et de saveurs qui
n’attendent qu’à prendre forme. Des fruits impatients d’offrir leur nectar
sous le soleil de votre inspiration. Devenez donc l’abeille qui va butiner
ce potentiel gorgé de vos talents cachés.
Les formes de créativité sont innombrables. Cet ouvrage va se limiter à
la créativité artistique, mais la plupart des principes que nous
explorerons s’appliquent à d’autres formes de créativité.

Créativité artistique et histoire de l’humanité


« L’art est un mensonge qui nous aide à dévoiler la vérité. »
Pablo Picasso

Depuis le paléolithique, les êtres humains créent des formes évoquant


le processus de la vie et que nous appelons œuvres d’art. Edith
Krammer décritce
2
processus artistique comme « opérant dans un monde
de symboles ; un monde artificiel qui a le pouvoir d’évoquer
des émotions sincères ». En effet, contre toute logique rationnelle, en
art, la profondeur de la sensation évoquée n’est pas proportionnelle à la
vraisemblance de l’objet d’art : une peinture cubiste, abstraite ou
surréaliste peut nous toucher davantage que des fleurs artificielles, si «
réalistes » soient-elles. L’actede création permet un accès privilégié
à l’inconscient, à la sagesse intérieure, au profond et à
l’universel. Des dimensions qui traversent les frontières et les siècles.
C’est grâce à cette distance prise avec la réalité que les artistes et
leur public peuvent s’autoriser un accès aux profondeurs sans crainte,
un peu comme dans un rêve ou une psychothérapie. Il s’agit de
communication au niveau du subconscient, de l’inconscient et de
l’inconscient collectif, ce qui explique que cela échappe à toute
explication rationnelle.
Bien que certains aient envisagé la disparition possible de l’art (Mondrian
pensait que l’art n’était qu’un substitut à l’équilibre manquant qui, s’il
s’instaurait, laisserait disparaître le besoin d’art), on pense généralement
que l’art a toujours été et continuera d’être nécessaire. C’est ce que
défend Ernst Fischer3
qui s’extasie devant le phénomène artistique.
Sa fascination vient en partiede sa perplexité face au fait qu’onréagità
l’irréalité artistique comme si c’était non seulement la réalité, mais
de plus une réalité intensifiée. C’est un mystère qui ne cesse de m’intriguer.
Ernst Fischer penseque c’est une recherche de plénitude et de globalité
qui pousse l’être humain vers ce besoin d’enrichir sa vie de
musique, de peinture et de la vie de personnages fictifs. Il
considère l’art comme support de quête personnelle, comme donnant
du sens au monde : « Le précieux moyen de fondre
l’individu au groupe, auxautres, à l’échange d’expériences et d’idées
»…

Créativité et nature humaine


« Le don de créativité se niche en chacun de nous, dans l’attente de
s’exprimer . »
4

Pat B. Allen

L’être humain est créatif par nature. Par exemple, des jeunes
enfants n’ayant aucune langue en commun vont créer spontanément
une nouvelle langue. Ainsi, les enfants d’esclaves exposés à différentes
formes de langages chaotiques (appelés pidgin), ont spontanément créé une
langue à la grammaire complexe, le créole . 5

L’être humain constitue une mine inépuisable de ressources créatives : il


suffit, pour en prendre la mesure (démesure ?), de considérer l’extraordinaire
histoire de l’humanité et les découvertes qui ont ponctué son
évolution.
Ceci dit, mammifère social, l’homme naît avec une spontanéitécréative qu’il
étouffe trop souvent au fil des années de socialisation. Nos systèmes
éducatifs privilégient l’intellect à la spontanéité. Cela nous astreint à
la toute-puissance du cerveau gauche (pensée logique, structurée,
linéaire) et carence l’utilisation du cerveau droit (sensations,intuition,
inconscient). La pression d’obéissance et de conformité vient accentuer
cette répression de notre capacité à jouir pleinement de notre liberté. La
vie en société demande l’acceptation de lignes de conduite mais cela passe
trop souvent par une pluie de messages normatifs qui inhibent la
fougue enfantine et étouffent l’énergie vitale au point de donner
l’impression que toute notre créativité a été tuée. Heureusement, même les
êtres les plus piégés dans le conformisme possèdent leur dragon de
créativité qui sommeille et n’attend qu’à être réveillé.

Même si le feu de votre spontanéitéparaîtéteint, les braises de la


petiteenfance sont vivantes. Il ne tient qu’à vous d’attiser le foyer de
votre vie pour que le feu de la passion créatrice brûle de nouveau en
vous !

Une créativité accessible à tous


Nous avonstous, durant l’enfance, spontanément fait acte de création :
nous avonsvécu dans une cabane faite de draps tendus entre deux chaises, avons
paré une princesse des plus beaux bijoux avec une ficelle et trois
perles. Nous nous sommes engagés librement et sans complexes dans le
processus créatif.
Malheureusement, une fois la fraîcheur de l’enfance disparue, il nous est
plus difficile de créer librement des scénarios qui nous font du bien –
de voir une couronne royale dans une boîte de camembert ! Trop
souvent, notre créativité et notre imaginationse mettent au service des
perceptionsnégatives que nous avonsdu monde et de nous-mêmes. Nous
n’osons plus chanter de joie parce que nous avonspeur de passer pour fous,
nous n’osons plus danser en public parce que notre « critique
intérieur » nous juge avec tyrannie. Il est possible d’y remédier. Une
bonne fiesta ou un cours d’improvisation théâtrale suffisent à faire
revivre le ou la foldingue fantaisiste qui sommeille en nous. Il suffit
de trouver des environnements propices au jeu.
Dans mes ateliers d’écriture créative, le résultat est éloquent. Si
j’invite les participantsà écrire« à froid », le résultat est
incomparable avec ce qui est écrit après s’être adonné à une série
d’activités ludiques et désinhibantes. J’ai pu observer à plusieurs
reprises que des gens qui « ternissaient » devant la page blanche
brillaient de tout leur éclat après avoir été accompagnés dans une mise en
train invitant au jeu. Il en est de même pour les ateliers d’arts
plastiques (et à fortiori pour le théâtre) .
6
Créativité et bien-être
Lorsque l’on est engagé dans un acte créatif, il permet un bien-être
par l’absorption méditative et/ou une communion qui donnent la
sensation de vivre pleinement. Il permet aussi une connexion à soi
et au monde plus vraie, car libérée des automatismes et des habitudes.
En cela, il aide à favoriser un contact intime avec sa véritéintérieure
contre vents de publicités et marées de messages normatifs.
Être en contact avec sa créativité aide à passer les caps difficiles
de l’existence. Le seul fait d’être engagé dans un acte créatif est
thérapeutique, et les enseignements sur soi tout au long du processus
constituent une précieuse source de développement personnel . 7

Les artistes évoquent souvent des sensations de plénitude et de


sérénité provenant de l’acte de créer. Le fait de créer des objets qui
peuvent survivre au temps permet d’accéder à une forme
d’universalité. Participer à des aventures de co-création (théâtre, danse,
chant) permet une communication privilégiée avec les autres, une
dimension transpersonnelle qui passe outre les différences individuelles. Co-créer
est en effet magique. Les Rolling Stones utilisaient beaucoup l’improvisation
de groupe pour laisser émerger leurs chansons . 8

La création artistique sous toutes ses formes peut permettre l’accès à


des moments d’une extrême profondeur. Pour certains, il s’agit d’une expérience
spirituelle, avec des sensations d’hyperconscience et de grande lucidité. Ces
moments sont décrits par ceux qui les vivent comme rares, uniques
et extraordinaires. Maslow les avait appelés les « peak experience »
(littéralement expériencesde sommet). De ces moments qui marquent une
vie à tout jamais.
Mythes et réalité
La créativité est bien souvent glorifiée. La quête de créativité
artistique dissimule parfois des attentes excessives d’épanouissement. Il est
prudent de s’attendre à traverser des passages à vide et des
moments frustrants, car il faudra parfois persister pour dépasser doutes et
réticences. Il est important de savoir garder une distance sereine par
rapport aux périodes arides ou chaotiques. Faites confiance au processus
créatif.

Notes
1. Les notes figurent en fin d’ouvrage, pp. 89-91.

2. Le processus créatif
L es pagesqui suivent
afin de cerner
survenir
détaillent les différentes phases
les stratégies d’évitement et
au sein de chaque phase.
les
Une fois
du processus créatif
difficultés qui peuvent
vos propres
fonctionnements identifiés, il vous sera plus facile de les gérer pour vivre et
développer votre créativité sans entraves.

« L’espace-temps » du processus créatif


Avant toute chose, il est primordial d’explorer l’espace et le temps
que l’on s’accorde pour s’adonner aux activités créatives. Car bien souvent,
ce que nous croyons être déterminé et limité par la réalité extérieure est
le produit de limites intérieures inconscientes, de « croyances
limitantes ».

1. L’espace

Au sein de ses contraintes – sociales, financières, architecturales, spatiales


–, l’individu structure et utilise son environnement en fonction de son
monde intérieur. Il est donc intéressant d’observer sa gestion de l’espace
pour vérifier s’il y a moyen de s’accorder davantage d’espace qu’on
ne croit disponible. Il est en effet courant de penser ne pas disposer
d’un lieu de créativité alors que l’on possède une chambre d’amis, un
grenier ou un débarras qui, en toute objectivité, peuvent aisément être
reconvertis en atelier. Mais dans le monde subjectif et intérieur, il
en va autrement. Beaucoup s’empêchent d’assouvir ce besoin. Ils le
perçoivent probablement comme un luxe ou un privilège qu’ils ne
méritent pas et font d’autres choix, mettant leur propre épanouissement
au second plan. Cette tendance est plus prononcée chez les femmes, qui
se perçoivent souvent comme égoïstes quand elles prennent l’espace
dont elles ont besoin pours’épanouir.
EXPLORATION
Prenez le temps d’explorer la place que vous réservez à un espace de
créativité dans votre vie. Essayez d’observer sans jugement, avec la curiosité
d’un explorateur.
Si vous n’avez pas d’espace de créativité
Êtes-vous de ceux qui créent mieux dans des lieux publics comme les cafés, les
bibliothèques, la campagne, les parcs, les plages ?
Aimeriez-vous disposer de votre propre espace de créativité ?
Seriez-vous obligé de déménager pour avoir ce lieu ? Si oui, en avez-vous
la possibilité ?
Seriez-vous prêt à renoncer à certains luxes (par exemple celui de
vivre en centre ville) pour vivre dans un lieu
plusspacieux et avoir un espace de créativité ?
Êtes-vous plus sensible à l’ambiance qui
vous entourequ’à l’espace physique ? Si
vous avez un espace de créativité L’espace
est-il organisé ou chaotique ?
Est-il comme vous le souhaitez ?
Est-il trop propre et trop rangé ou
pas assez ? Donne-t-il une
sensation de vécu ou de vide
?
Est-il suffisamment grand pour les activités auxquelles vous aimeriez-vous adonner ?
Ce lieu est-il privé ou est-il utilisé par d’autres gens ?
Si le lieu est partagé, êtes-vous tout à fait à l’aise avec les
conditions de partage? Est-ce que ce sont vos conditions ou vous êtes-vous
adapté aux conditions d’un autre ?

Il n’y a pas de règles, bien sûr. Il arrivede mieux écriresur un


coin de table que dans un superbe bureau avec vue. L’inspiration vient
parfois où que l’on se trouve et c’est elle qui mène la danse.
Cependant, si l’écriture peut être pratiquée dans un espace restreint, ce n’est
pas le cas d’autres formes de création (peinture, sculpture…). Si vous
ne pouvez pas avoir d’atelier et n’avez pas les moyens d’investir dans
du matériel artistique, ne renoncez pas ! Informez-vous sur les
formes de land’art qui se créent à l’extérieur avec des matériaux
naturels, donc gratuits !

2. Le temps

L’attitude par rapport au temps est très révélatrice. Nous sommes


souvent pris par des activités professionnelles et familiales qui nous
obligent à limiter le temps consacré aux activités créatives. À
l’inverse, ce n’est pas parce que le temps disponible abonde que l’on se
donne le temps de s’adonner à l’art. L’excès de temps peut
paradoxalement être plus néfaste que son manque. Ainsi, si vous savez que
vous ne pouvez peindre que le lundi, vous vous y tiendrez, alors que si
vous pouvez peindre tous les jours de la semaine, la tentation de
vous disperser sera plus grande.

Il est primordial, si l’on a la chance de disposer de temps, de


ne pas le laisser se dérober par des accumulations de petites
corvées, des coupsde fil tentaculaires, etc.

Tout comme la relation à l’espace, la relation au temps est


empreinte de schémas intérieurs, souvent inconscients. Ces considérations sont
particulièrement pertinentes en cas de blocage créatif. Une personne qui
a du mal à s’avouer ses doutes sur son talentest susceptible
d’occuper son temps avec toutes sortes de « nécessités pratiques ».
La priorité est donnée à des broutilles pour ne pas se libérer
le temps nécessaire pour se « jeter à l’eau ».
EXPLORATION
Prenez le temps d’observer comment vous utilisez votre temps de créativité.
Comme pour la tâche précédente, essayez d’observer sans jugement, avec la
curiosité d’un explorateur.
Combien de temps consacrez-vous à votre ou vos arts ? En êtes-vous
satisfait ?
Vous arrive-t-il de vous surprendre en train de prendrevotre temps pour effectuer
une tâche pratique qui pourrait être terminée plus rapidement ?
Vous arrive-t-il de ne pas répondre au téléphone ou à la porte
d’entrée pour préserver un temps sacré de créativité ?
Privilégiez-vous souventla disponibilité aux autres à la disponibilité à vous-
même ?
Quand vous créez, avez-vous tendance à créer sans interruption ? Combien de
pauses repos vous « autorisez »-vous ?
Vous concentrez-vous facilement ?

Le processus créatif en plusieurs phases


Il est possible d’identifier plusieurs phases dans le processus créatif.
Chacune de ces phases nous engage dans un déroulement
psychologique complexe comportanttout un éventail de blocages possibles
car chaque individu a sa façon propre de s’impliquer ou non au sein
de chaque étape. J’en propose six à partir de mon expérience
personnelle, de mes lectures et des enseignements que j’ai reçus mais 9

je n’érige pas cette liste en dogme. Beaucoup ont proposé des phases
différentes, tout aussi intéressantes.
J’ai décritces phases séparément mais les frontières en sont souvent
floues, fluctuantes et fluides. Leur ordre d’apparition n’est pas
systématique et leur duréetrès variable ; pour une même création,
certaines phases ne durent que quelques secondes alors que d’autres
durent plusieurs semaines. Ce n’est donc pas une description rigide du
processus créatif mais une proposition de découpage pour explorer plus
facilement ce qui risque d’interférer à chaque étape et empêcher une
créativité fructueuse.
Si vous souhaitez développer votre créativité pour votre plaisirou dans un désir de
développement personnel, vous pouvez vous en tenir aux deux premières
phases que je nomme « primordiales ». Je propose les quatre
phases suivantes, « optionnelles », au cas où vous auriez une
quêteprofessionnelle ou le souhait de produire des œuvres plus « finies
».

1. Les phases primordiales


1. Phase d’incubation, de gestation, de toute première inspiration
Si le processus créatif était un jardin, cette phaseserait la période
hivernale, celle où la végétation semble morte alors que sous la terre,
la vie commence à germer. Quelque chosese prépare mais on ne
voit pas encore quoi. On peut regarder le jardinavec foi et plaisir, par
anticipationdu printemps à venir, ou alors y voir plutôt vide et
aridité. Cette phasepeut donc se révéler agréable ou non, selon l’attitude
mentale adoptée. Ceux qui perçoivent la vie comme généreuse et croient
en leur potentiel créatif attendrontsans crainte que l’inspirationse précise.
Ceux qui manquent de confiance en ce qu’ils ont à exprimer peuvent
ressentir une grande appréhension et perdre contact avec les
stimuli.

Sous la neige, les crocus s’apprêtent à éclore mais si l’on n’a


jamais vu de crocus, on ne voit qu’une terre gelée…
EXPLORATION
Voici une liste de stimuli à explorer
en cas de panne d’inspiration. Les
stimuli issus du monde intérieur
Tout ressenti, toute sensation, toute émotion, bases d’inspiration intarissables en
art-thérapie10. Par exemple :
Dessouvenirs qui vous émeuvent, vous font plaisir, vous mettent en colère ou
vous gratifient.
Desvisions d’un futur possible qui vous attire ou vous fait peur.
Le besoin de communiquer ou de transmettre quelque chose à soi, à l’autre ou
au monde.
Les stimuli issus du monde extérieur
Le monde offre de l’inspiration à quiconque se laisse toucheret se donne le
temps d’observer :
La nature, les objets, les animaux, les humains, la vie en milieu rural ou
en milieu urbain.
Ce que vous pouvez vous amuser à imaginer à partir de situations
dans le tramway, le bus, le métro, au café, au restaurant, dans la
rue, sur la place, dans les parcs, les lieux de culte, les boutiques, la
poste, les bureaux de la sécu…
Une scène à laquellevous avez assisté qui vous émeut, vous plaît ou vous
révolte.
Une œuvre d’art : laissez-vous porter par une chanson, une musique,
une peinture, une poésie, un conte, une nouvelle, un article de journal, une
pièce de théâtre, un film, un sketch, un ballet, une exposition, un
message quel qu’il soit, du moment qu’il vous intéresse ou provoque
en vous une émotion.
Un stimulus qui vous secoue, vous « travaille », génère de l’énergie
émotionnelle (une situation dans le monde, un incident qui vous a
agacé, amusé, fasciné, etc.).
Un exercice, une discussion, un échange révélateur. X Un paysage
qui vous séduit ou vous déçoit, vous irrite, vous opprime.
Un processus de vie qui vous intrigue.
Une stimulation sensorielle : un goût (comme la célèbre madeleine
de Proust),un son, une sensation tactile, une senteur, une vision…
Une situation qui vous met en colère, vous ennuie, vous choque.

Tout peut constituer une source d’inspiration. Ayez toujours sur vous un
carnet sur lequel vous pourrez prendre des notes, collecter (des
coupures de journaux, des photos, des publicités), croquer un paysage
ou décrire une situation en quelques mots, vous constituer votre recueil
d’idées.
2. Phase de création spontanée, improvisation
Cette phaseest la plus spectaculaire, c’est la fougue printanière : les
petites et les grandes fleurs, les bonnes et les mauvaises herbes,
la poussée de sève, cette fulgurante énergie de vie qui anime les
végétaux, les animaux et les insectes, qui arrivent dans le jardinen
désordre.
Durant cette phase, l’important est de se laisser aller à la création
spontanée, libre, exploratoire. C’est le moment de passer à l’acte
créatif. Ne vous censurez pas, interférez le moins possible avec votre
capacité de jeu. Il est important, lors de cette phase, de lâcher prise,
de donner sa place à toute possibilité, tout incident, toute création
spontanée, désordonnée.
Enprincipe, c’est une phasefacile,puisque non encombrée de souci de format,
de consignes, de conventions. Pourtant, le manque de structure peut
générer une impression de chaos et de fragmentation intérieure. Certaines
personnalités s’y abandonnent plus facilement que d’autres car le
désordre est tolérable pour certains et déstabilisant pour d’autres.
Enart-thérapie, cette phaseest essentielle. L’accompagnement du thérapeute
rassure celui qui s’exprime et l’aide à supporter le désordre et
l’inconnu. Si vous avez tendance à sauter cette phase, inscrivez-vous à
un atelier d’art-thérapie ou d’art libre, où l’accent est mis sur la
spontanéitéet le jeu.
Si vous êtes dans une quêtede créativité artistique, cette phaseest incontournable.
Ne serait-ce que parce que c’est souvent celle qui apporte le plus de
plaisiret de plénitude. C’est en effet la phasequi permet de se surprendre,
de se découvrir et de se surpasser.

2. Les phases optionnelles


1. Phase de reprises et de corrections
C’est le moment d’intervenir, sécateur en main, si vous voulez un beau
jardinet un potager productif. Lors de cette phase, vous pouvez
revenir sur ce que vous avez créé avec distance émotionnelle,
discernement et critiques constructives. Elle est généralement de mise dans
les productionsécrites destinées à la publication. C’est le moment de
sélectionner ce qui est digne d’être conservé et de rejeter le
superflu.
– Cette phasepeut être si naturelle pour certains qu’elle intervient dès
l’improvisation. C’est souventdommage car elle limite la liberté créative
au moment où il est bon de la laisser à l’état sauvage.
– Elle peut au contraire être insupportable. Devoir rejeter des parties
de création est intolérable pourceux qui souffrent de schémas
d’attachement difficiles.
– C’est aussi un passage douloureux si l’on est excessivement critique de
son travail. Quelqu’un qui atendance à toujours tout rejeter peut
annihiler son œuvre par excès de destruction.
Cette phaseest délicate et il est crucial de trouver un juste
équilibre pour avoir la force de rejeter l’inutile sans tomber dans l’excès.
Il est d’ailleurs tout à fait possible de laisser tel quel le
produit de votre expression spontanée, sans aucune retouche. C’est parfois
plus adapté.

2. Phase de restructuration pour l’intégration


Lors de cette phase, le jardinier prenddu recul pour vérifier que les
végétaux donnent le résultat d’ensemble escompté, et restructure son jardin
si nécessaire. Il espace les bulbes, densifie ici, aère là…
Cette phaseest importante notammentdans la création d’écrits et de
spectacles. S’il s’agit d’un roman, c’est le moment de le relire avec un
œil neuf pour repérer les lourdeurs, répétitions et incohérences. S’il s’agit d’un
spectacle, c’est le moment du « filage », c’est-à-dire d’une révision de
l’ensemble, dans l’ordre, pour en avoir une visionglobale et affiner les
enchaînements, la mise en scène et en lumière, etc.
Cette phaseest proche de la précédente par rapport aux fonctionnements
et dysfonctionnements psychologiques, et des blocages du même type
peuvent survenir.

3. Phase des dernières retouches


C’est le paradis des minutieux, l’enfer des imprécis et une zone de
danger pour tous.
Le jardinier opèreles ultimes changements. Une phasedangereuse s’il se met
à vouloir tout transformer et taillerà outrance car il risque alors
de tuer les végétaux ou de créer un environnement si « propre »
qu’il ne ressemblera plus à un jardin.
Cette phasepeut être très gratifiante. En effet, on est désormais loin de
l’angoisse de la page blanche. Onarriveau point où le travail peut se
déclarer « terminé » à n’importe quel moment. Détendu, premier
spectateur de votre création, vous pouvez désormais vous faire plaisir: un peu
plus de bleu, une métaphore à peaufiner, un trait à épaissir…
Si vous êtes perfectionniste, cette phasepeut être à la fois votre joie et votre
perte. En effet, un romancier trop pointilleux peut tellement corriger son
œuvre qu’il s’y noie, un peintre qui ajoute trop de détails gâche
l’impression d’ensemble par une surcharge.

4. Phase de la séparation
Le jardinier ouvrele portail de son jardinpour laisser le monde le
découvrir. L’objet de création est terminé, retouché, prêt à être
présenté, parfois vendu. C’est une phaseà laquelle on penserarement,
car elle n’intervient qu’une fois l’œuvre terminée. Elle n’arrive que si
vous souhaitez offrir votre travail ou si vous vivez de votre art. Si c’est votre
cas, il est crucial de l’explorer car elle peut être insupportable et
faire l’objet d’auto-sabotages.Jacob Zelliger 11
explique qu’unsculpteur cassait,
toujours par accident, une partiede ses statues prêtes à la
vente, à cause de la disparition d’un être cher survenue pendant son
enfance. Se séparer de ses statues lui faisait revivre ce
traumatisme. D’où le sabotage inconscient de ses œuvres,pour être sûr de
ne pas avoir à s’en séparer.

Comme un jardin soumis aux imprévisibles intempéries, l’acte de création peut


rencontrer des obstacles, des périodes d’hésitation et d’aridité. Comme dans
tout cycle de vie, la « sève créatrice » germe, naît, grandit, s’épanouit
puis faiblit et se retire avant que le cycle recommence. Il est important
d’accepter l’hiver et de faire la distinction entre blocagecréatif et moment
propice au repos. Nul n’est créatif à toute heure ni en toute saison.

3. Les blocages

L
Ces périodes difficiles
es artistes

peuvent
les plus établis connaissentdes moments de vide, de
fragmentation intérieure, de chaos.
être passagères ou s’installer pour plusieurs mois,
voire plusieurs années, parfois une vraie entrave au bonheur. Une crise n’est
jamais anodine. Il y a toujours une cause, aussiobscure soit-elle,
donc toujours une solution dès que la cause est identifiée. Explorons…

Les principaux poisons

1. Le perfectionnisme

Les attentes perfectionnistes sont les griffes d’une main de fer qui
transpercent la verve créative et la vident de son nectar productif.
Soyez donc vigilant avec les manifestations de votre perfectionnisme (ou de
celui de quiconque – « toi qui as des doigts en or, fais-nous
un truc super pour notre mariage ! »). Pour que la créativité coule à
flot, ouvrez les vannes de l’indulgence, de la bienveillance
envers vousmême, de l’exploration ludique sans pression. Levez les règles
et laissez-vousaller au mouvement naturel de votre véritéen constante
mouvance.
Natalie Goldberg explique que dans ses ateliers
12
d’écriture, les participants
parviennent à écrirede vrais petits chefs-d’œuvre jusqu’au jour où un
participant décide d’écrire un roman : il n’écrit plus une ligne.
La créativité a cela de paradoxal que plus nous souhaitons produire un
chef-d’œuvre, moins nous en sommes capables.
Nous sommes créatifs et originaux lorsque nous parvenons à dépasser les
obligations, les règles, les attentes.
Surveillez de près vos formulations intérieures.
Bannissez Préférez-leur:
«Jedois/jenedoispas» «Sij’essayais?»
«Jedevrais/jenedevraispas» «Pourquoipas?»
«Ilfaut/ilnefautpas»! «Chiche!»
Nous avonsbesoin, pour être libres, d’accepter l’imperfection. C’est en
acceptant de laisser sortir spontanément, sans attente, votre véritéà nu,
que votre originalité s’exprimera. Si vous vous « voulez » original, vous
ne faites que travailler quelque chosed’artificiel, de surfait. La personne
que vous êtes est forcément originale, puisque nul autre être au monde
n’a votre vécu ni vos traits de personnalité. C’est dans l’ordinaire et le
vrai que se niche l’originalité de chacun.
Il est d’autant plus regrettable de s’emprisonner dans des attentes
perfectionnistes que c’est parfois au sein de nos erreurs que se
cachent les plus précieux trésors.
La première fois que j’ai essayé de faire un chapeau en laine
cardée, j’ai oublié d’insérer la décoration sur tout un côté du chapeau.
Cela m’a forcée à le travailler à l’enverset à y apporter des
pliures qui n’étaient pas du tout celles que je souhaitais au départ. Le
chapeau qui est né de ces rattrapages s’est révélé bien plus à
mon goût que le modèle initial. Je porte désormais sur ma tête la
preuve que les erreurs peuvent être de vrais cadeaux !

2. Le manque de confiance en soi

Combien de fois ai-je entendu dire : « Je peindrais bien mais je


suis nul », par des gens qui, quelques heures plus tard, au hasard
d’activités ludiques (par exemple avec de la peinture à doigts),
produisent des choses superbes sans même se rendre compte qu’ils
peignent. On pensetrop souvent que peindre, c’est tenir un pinceau et
une palette devant un chevalet. Alors que cela peut être aussi des tas
d’autres choses : expérimenter avec la substance, la couleur, le relief,
les formes ; s’y essayer avec les doigts, les pieds,le nez, le
coude ; remplacer le pinceau par une éponge, un chiffon, un
pistolet à eau, tout ce que l’on veut !
Il est par ailleurs facile de se dévaloriser si son milieu d’origine n’a
pas encouragé la créativité ou si un enseignant peu pédagogue a laissé
entendre un jour qu’il vaudrait mieux faire autre chose.
Chacun d’entre nous peut se donner le droit d’explorer sa créativité et
d’en jouir pleinement pour agrémenter son passage sur cette planète et le
vivre dans sa plus grande richesse. D’autant que nul autre que vous ne
peut offrir au monde ce que vous pouvez lui offrir car vous êtes
unique. Ne nous privez donc pas de vos couleurs par manque de
confiance en vous.

Nous avonstous des choses passionnantes à exprimer si nous nous en


donnons la permission.

3. Les mots assassins

Attention de ne pas intérioriser les mots qui tuent l’élan et l’enthousiasme.


Lorsque vous observez vos créations, bannissez de votre vocabulaire les mots
médiocre, inintéressant, déjà vu, gentil, facile, insipide, raté, nul, etc. Ce
qui est fade pour les uns est passionnant pour les autres. L’art est
par excellence le royaume de la subjectivité. Ceux qui abusent du
rôle de « critique d’art » aiment à croire qu’ils se portent
garants du bon goût. Pourtant, ils font parfois preuve d’une arrogance
et d’une méchanceté choquantes envers les artistes, confondant érudition
et maltraitance morale. La critique est facile, l’art est difficile… Si
quelqu’un a porté un jugement péremptoire et humiliant sur votre
production, rejetez-le car il en dit davantage sur son auteur que sur
votre art.

Accordez votre attention à ceux qui cultivent la fraîcheur du regard, la


sincérité et l’humilité, aux personnes chaleureuses et respectueuses, qui
se laisseront plus facilement emporter dans des univers inconnus avec entrain
et authenticité.

4. Le snobisme

Dans le film d’Agnès Jaoui Le goût des autres (1998), les différences
de perception et de goût sont évoquées avec une finesse et un
humour grinçants. Le film souligne à merveille le snob potentiel en
chacun de nous… Méfiez-vous des snobsqui s’ignorent dans votre entourage
et de votre snobisme intérieur ! Si vous cherchez à conformer vos
créations au goût présumé des gens d’un milieu donné, vous sera-t-il
possible d’être pleinement vous-mêmeet de vous laisser aller ? La
définition du Robert limite le snob à « celui qui essaie d’être
assimilé aux gens distingués de la hautesociété ». Ce que j’appelle
snobisme se manifeste dans tous les milieux culturels et sociaux. Moins
on a confiance en soi et en son jugement, plus on court le
risque de se laisser emprisonner par un snobisme inavoué. La
vigilance est donc de mise. D’autant que le snobisme se manifeste bien
souvent de façon sournoise et sophistiquée. Une exclamation de type «
Qu’estce qu’il est sucré,ce paysage ! » peut être une forme de
snobisme, quels qu’en soient l’auteur et le milieu dont il vient.

5. Les échecs

Les échecs du passé peuvent hanter une vie tout entière. Si,
comme dans la chanson d’Aznavour,vous vous êtes vu en haut de
l’affiche, si vous y avez cru et que vous avez essuyé un échec
cuisant (ou du moins si telle en a été votre perception), cela peut
bloquer votre capacité à vous lancer dans quelque activité créative que
ce soit. Si vous pensez avoir dépassé un échecmais que vous vous
abstenez de créer dans le même domaine, ayez le courage de revenir
sur cet échec. Les blessures agissent bien souvent en sourdine, au
niveau inconscient. Elles ne s’exprimentparfois qu’au hasard d’une
remarque anodine qui vous met dans une fureur inexplicableou par le
biais d’une irritation exagérée envers certains artistes qui réussissent, une
jalousie non assumée…

6. Les succès

À l’inverse, un succès du passé peut paradoxalement être plus paralysant qu’un


échec. Il existedes cas célèbres d’auteurs d’un roman encensé par
la critique ou par le public et qui n’ont ensuite jamais retrouvé
la foi en eux-mêmes pour en écrired’autres. L’artiste devient alors son
propre ennemi. Il entre en compétition avec ce qu’il a été et
croit ne plus être à la hauteur de ce qu’il fut un jour. Quel
dommage ! Travaillez vite sur vous si tel est le cas.

7. L’impatience
« Il faut avoir du
chaosen soi pour
pouvoir donner
naissance à une étoile
dansante. »
(Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra)
Il n’est pas facile d’endurer la sensation de chaos. L’imprécis et le
confus peuvent être terrifiants. L’impatienceà aller vers l’ordre est donc
compréhensible. Le désordre des idées peut donner l’impression que l’on va
se perdre et pourtant, c’est un passage obligé à la réelle
créativité. Si l’on adopte une attitude d’explorateur, d’enfant qui part à
l’aventure, le chaos est un royaume fascinant. Si l’on souhaite, en
revanche, obtenir immédiatement un jardinà la française aux allées
nettes et aux buis bien taillés, on brûle une étape importante,celle de
l’ordre naturel des choses, de la création spontanée.

Un buis ne pousse jamais en forme de statue grecque mais


chaque arbre prendune forme unique et légitime si on le laisse se
développer librement. Cultivez la patience !

8. La peur de prendre des risques

Joseph Campbell écrivait


13
« On ne fait pas d’omelette sans casser des
œufs ». Ayez le courage de casser des œufs pour préparer une savoureuse
omelette maison que vous seul pouvez concocter ainsi. N’ayez pas peur
de vous salir les mains, de briser certaines coquilles qui vous sécurisent.
Explorez, expérimentez,cassez vos habitudes et sortez de votre zone de
confort : dans l’amas chaotique de vos expérimentations, sans doute
trouverez-vous des trésors… Acceptez toutes les huîtres de votre
psyché, y compris celles qui ne sentent pas très bon. C’est ainsi que vous
pourrez trouver des perles rares.

Les poisons masqués

1. La paresse apparente

Je ne crois pas à la paresse. Je crois en revanche au manque de


motivation, aux peurs diffuses, aux formes de paralysie issuesd’appréhensions
inavouées. Les enfants sont-ils souvent paresseux le matinde Noël ?
L’anticipation d’une expérience gratifiante et agréable leur donne des
torrents d’énergie. À l’inverse, un jour pluvieux d’école est bien moins
dynamisant. Si l’expérience de la page/toile blanche est chargée de
jugements négatifs sur soi-même, sur le monde ou sur la vie, rien
d’étonnant à ce que le passage à l’acte créatif soit sans arrêt remis à
plus tard.

Si vous parvenez à vous libérer du poids de l’appréhension, votre prétendue


« paresse » ne fera pas long feu.

2. Rebellions franches et larvées

L’Analyse Transactionnelle offre des outils de lecture


14
de la psyché
humaine très pertinents pour cernerla dynamique de rébellion contre soi-
même et ses effets dévastateurs. Cette approche thérapeutique décritla
personnalité en termes d’« États du Moi » (Parent, Adulte,
Enfant), et étudie les phénomènes intrapsychiques à travers les
échanges relationnelsappelés « Transactions ». Ces « États du Moi
» sont couramment représentéspar des cercles comme ci-dessous :

Ils se subdivisent en deux polarités de l’État du Moi Parent : Parent


Normatif (PNF) et Parent Nourricier (PNR), une forme unique d’Étatdu
Moi Adulte (A) et trois variations de l’État du Moi Enfant : Enfant
Libre (EL), Enfant Adapté Rebelle (EAR) et Enfant Adapté Soumis
(EAS).
Chaque État du Moi comporte des avantages et des inconvénients et fait
que dans la communication avec autrui et avec nous-même, nous
donnons momentanément la parole à l’un de ces trois États. C’est bien
sûr à l’État du Moi Enfant Adapté Rebelle que l’on penseen cas
de rébellion mais il est bon d’examiner l’État du Moi qui l’accompagne
souvent dans la dynamique conflictuelle : l’État du Moi Parent Normatif,
aussi appelé Parent Critique / Tyrannique / Contrôlant. En effet, la
rébellion se manifeste rarement hors tyrannie (réelle ou présumée).
Examinons brièvement ces deux États du Moi . 15

L’Enfant Adapté Rebelle s’oppose systématiquement à toute tentative qui


viserait à lui imposer desrègles, à restreindre ses choix et ses possibilités
d’actions. Cette tendance à l’opposition systématique peut être libératrice mais aussi
empoisonnante puisqu’il suffit qu’on lui propose une chose pour qu’il la refuse
par esprit de contradiction. Il se croit libre mais ne l’est pas réellement.
Le Parent Normatif est avant tout le « garant de l’ordre et de
la loi ». Détenteur des normes et des valeurs de la personne, il
représente l’autorité. Son défaut, c’est l’aspect critique/tyrannique/contrôlant, qui
représente la tendance de chacun à juger, réprimander, menacer, sanctionner
; une utilisation plutôt contraignante de l’autorité, avec ses effets inhibiteurs
et répressifs.
Deux cas de figures peuvent laisser une rébellion inconsciente
inhiber la créativité.
– Un conflit intrapsychique (à l’intérieur même de la personne)
Si l’État du Moi Parent Normatif d’un artiste potentiel est trop critique
envers lui-même (« tu devrais avoir déjà produit un chef d’œuvre,
espèce de nul ! »), il est possible que son pendant, l’État du
Moi Enfant Adapté Rebelle prenne les rênes et s’oppose
systématiquement à toute tentative de création (« Va te faire voir, j’ai
pas envie de faire des chefs d’œuvre ni de rien créer du tout ! »),
à moins que ce ne soit le côté inhibiteur de l’État du Moi
Parent critique qui freinela spontanéitécréatrice à force de critiques et
de réprimandes (« Tu n’as rien à offrir, tu es nul, pour qui tu
te prends ?»).
– Un conflit interrelationnel (une opposition entre deux personnes)
Parfois, ce dialogue n’est pas intérieur, il existebel et bien entre deux
personnes, mais il n’est pas forcément verbal ni issu du présent. Il
peut provenir du regard méprisant de cet oncle face à votre dessin qui
perdure dans votre psyché, de la honteque vous avez ressentie à
l’école un jour et qui continue de vous inhiber, à moins que
ce ne soit la remarque d’une connaissance « Oh mais toi, tu n’es
pas un littéraire ! » ou encore le ton surpris d’un voisin« Ah
bon, toi, tu te mets à la sculpture !? ».
Parfois la source est encore plus diffuse : un nondit familial,
une règle implicite. Par exemple, toute la famille est prolifique et vous vous
efforcez de réussir, hantépar la peur de faire tache…
Toutes ces pressions peuvent être intériorisées et perpétuées à votre insu
par votre État du Moi Parent Normatif/Critique qui vous tyrannise tellement
(inconsciemment) que vous n’avez pas d’autre recours que celui de
vous rebeller en sourdine de façon passive, en refusant de vous
mettre à l’œuvre.

Soyez vigilant avec votre tyran intérieur. Apprenez à le reconnaître et à


le dompter au plus vite pour ne plus le laisser tirer les ficelles
à votre insu.
EXPLORATION
1. Installez-vous confortablement, respirezlentement, prenez conscience de votre corps
en contact avec le sol et concentrez-vous sur les sons ambiants, les
odeurs, les sensations physiques (chaud, froid, tensions).
2. Laissez les parties de votre corps qui sont tendues se détendre, lâchez prise.
3. Laissez venir à vous des souvenirs de moments où vous avez failli vous
amuser, failli vous mettre à peindre ou à danser. Essayez de revivre le
moment qui précède le passage à l’acte.
4. Puis, notez ce qui vous empêche de commencer. Est-ce un excès de
conscience du temps qui passe et que vous « perdriez » ? Est-ce
une personne qui revient à votre esprit et vous « appelle » à faire
ce qu’elle attend de vous ? Interrompez-vous la mobilisation vers l’action de créer
en vous imposant de mieux ranger la pièce avant de continuer ?
Pensezvous aux choses accumulées que vous devez terminer et auxquelles vous
vous attelez au lieu de créer ?
5. Une fois ces interférences identifiées, notez les mots avec lesquels cette
pression intérieure s’exerce sur vous.

Ces phrases, ces mots sont souvent pleinsde bon sens et dissimulent à
merveille la tyrannie qu’ils exercent. En voici quelques exemples courants
: « Bonne idée de faire cette aquarelle mais j’appelle X avant, puis
j’envoie ce mail d’encouragement à mon collègue et je n’oublie pas
la carte d’anniversaire de Y. Je fais mon aquarelle tout de suite après.
» « Le directeur ne va pas apprécier que je tarde à écrirecet
article qu’il m’a demandé de lui offrir vu mes talents d’écriture, donc je
joins l’utile à l’agréable et crée en rendant service au directeur plutôt
qu’en faisant une aquarelle qui ne sert à rien. » « Je prendrai
tellement de plaisirà peindre cette aquarelle dans une pièce rangée et qui
sent le propre ! Allez, un petit coup de ménage avant de m’y
mettre. »
Aucune de ces pensées n’est dénuée de bon sens et si vous peignez
l’aquarelle après l’appel, le mail et le ménage, parfait ! Mais
combien sont capables de se tenir au minimum ? Une tâche en
appelle une autre ; l’appel dure plus longtemps que prévuet vous invite
à mille autres petites corvées. Dix années peuvent ainsi passer sans
que cette aquarelle soit jamais peinte.
Si des centaines d’aquarelles sont restées à ce stade de gestation, peut-
être à la longue avez-vous capitulé devant votre tyran intérieur. Car il
s’agit bien de votre tyran intérieur ! La Terre auraitcontinué detourner si
vous aviez mis votre créativité tout en haut de votre liste de priorités. Pour
modifier des habitudes tenaces qui opèrent souvent à un niveau
inconscient, il faudra sans doutevous engager envers vous-même à
donner plus de force à votre Parent Nourricier intérieur, pour ne pas
laisser un sentiment de culpabilité injustifié interférer avec vos bonnes
intentions (voir chapitre 4, paragraphe « Environnement interne et externe
bénéfique à l’artiste »).

Autres sources de blocage


Le format de cet ouvrage ne permet pas une analyse approfondie
de tous les blocages. Voici toutefois une liste répertoriant ceux qui nous
échappent souvent.
– Nous avonsévoqué le manque d’inspiration mais c’est parfois l’excès
d’idées qui bloque la créativité : l’incapacité de faire son deuil des idées
auxquelles on doit renoncer peut se transformer en blocage.
– Problèmes dans la vie privée : traversée du désert sur le plan
artistique liée à un passage difficile.
– Difficulté ou incapacité à endurer le deuil d’un domaine artistique qui
n’est plus adéquat. Par exemple, quelqu’un qui se serait épanoui en danse
et, suite à un accident, ne parviendrait pas à se résoudre à
s’essayer plutôt à la peinture ou à la photo.
– Manque de valorisation, isolement néfaste, dessèchement par faute
d’entourage nourricier.
– Cerveau gauche (le rationnel) l’emportantsur le cerveau droit (l’intuitif,
le sensoriel), créant uneincapacité à lâcher prise, à se laisser
aller au gré du ressenti.
– Difficulté à tolérer l’incomplet,l’imperfection inhérents au processus
créatif.
4. Pistes de solutions

D e
propre,
même

d’apprendre
que chaque
chaque
à
blocage
personne est unique
est unique, complexeet
jouer du piano peut stimuler
et porte son histoire
obscur.
une personne et
Le conseil
en
bloquer une autre.Il en va de même pour les plaiesencore ouvertes.
Certaines vont devenir des moteurs pour la créativité, d’autres vont
l’entraver. Il est donc important d’identifier ses propres schémas et blocages,
ce qui nécessite souvent davantage que la lecture d’un ouvrage. Il
existetoutefois des principes de base qui peuvent vous ouvrirdes pistes.

Soutenirl’expression créative
Nous avonstous besoin de limites et de contenants.Pour reprendre un
terme cher à Winnicott , nous avons 16
besoin de « holding » («
être tenu »). Il n’est en effet pas rare de voir des personnes très
productives pendant leur formation artistique ne plus toucher à un pinceau
ou à une partition quelques années plus tard. Le talentne s’évapore pas
au moment où ils passent la porte de sortie mais ce qui disparaît,
c’est la structure qui les soutenait dans leur démarche. Il peut être très
salvateur de trouver une source de soutien à la sortie, de
différentes manières.
En louant un atelier, un lieu dans lequel vous pourrezrencontrer d’autres
artistes.
En formant votre propre troupe ou en vous engageant dans une troupe
existante.
En participant régulièrement à des cours de soutien, qui vous
permettent de continuer à rencontrer d’autres artistes.
En créant ou en participant à un lieu d’échanges sur Internet.
En définissant clairement votre lieu de travail créatif et en organisant vos
journées avec précision dans ce lieu.

Si vous avez du mal à vous mettre à l’ouvrage, plusieurs sources


cumulées de soutien vous seront très bénéfiques.
Se former à bonne école
La pression de bien faire dont peuvent souffrir les professionnels de l’art
peut devenir leur pire handicap. Le fait d’être « en formation »
est très libérateur. En effet, c’est un moment où l’on doit expérimenter,
se chercher, explorer des domaines inconnus.

Avoir le « devoir » d’expérimenter en donne


la « permission » et protège de la peur
de s’aventurer en terrain inconnu.

Enrevanche, le fait de devenir un « artiste qualifié » peut être


intimidant du fait de l’arsenal des griffes perfectionnistes décrites plus haut.
L’amateur ou l’étudiant a droit à l’erreur. Cela lui permet de
s’élancer, d’expérimenter, de jouer.Attendre de soi une production « de
niveau professionnel » peut tuer cet élan si fondamental. Trop de
gens ayant suivi une formation artistique se disent, quelques années plus
tard, qu’ils se sont trompés et qu’en fait, ils ne sont pas créatifs. Je pense
que ce qu’ils expriment réellement, c’est qu’ils ne font plus confiance en leur
potentiel. Soit parce qu’ils n’ont pas été formés comme ils auraient dû l’être
(encouragés à être pleinement eux-mêmes), soit parce qu’ils ont perdule
contact avec leur potentiel créatif découvert pendant la formation.
Dans un domaine aussi subjectif que celui des arts, les formations varient
énormément en qualité. J’ai vu des gens irrémédiablement inhibés
à force de commentaires blessants et méprisants entendus dans des
pseudo-cours d’art dispensés par des tyrans qui s’ignorent, dépourvus de toute
pédagogie. Cela me met en colère car je crois que l’artiste intérieur se
niche dans la part la plus vulnérable de l’être,une part de la psyché
délicate et fragile. Les artistes qui pêchent par trop de modestie
et par manque d’estime de soi peuvent perdre toute confiance en leur
potentiel s’ils n’évoluent pas dans un environnement faisant place aux
richesses propres à chacun.
Prenez le temps de choisir un atelier ou un cours qui vous
nourrit et accordez-vous le droit de quitter tout environnement qui
encourage les jugements négatifs. Ils me paraissent néfastes car plutôt
que de valoriser votre liberté et la prise de risque inhérente au
processus créatif, ils peuvent vous brimer.

Les encouragements et la bienveillance sont


aussi nécessaires à l’artiste débutant que
le vent au cerf-volant.
Environnement interne et externe bénéfique à l’artiste
L’environnement a un impact important sur la créativité. Il est
impossible d’être spontané et joueur dansun environnement hostile ou
perçu comme tel. Une ambiance propice au jeu désinhibe la capacité
à improviser et à créer librement. À moins d’avoir bénéficié d’une
éducation très libératrice, il est difficile d’être au contact de son État
du Moi Enfant Libre tel que le définit l’Analyse Transactionnelle (voir
chapitre précédent et note 15) sans la présence d’un (ou de plusieurs)
État(s) du Moi Parent Nourricier pour prodiguer bienveillance et
approbation inconditionnelle. Comme nous l’avons vu, la présence d’un
État du Moi Parent Normatif/Critique/ Tyrannique (externe ou interne) va
plutôt réveiller les dynamiques de l’Enfant Adapté Rebelle ou de
l’Enfant Adapté Soumis. D’où la perte de confiance en soi et les
pannes de créativité qui perdurent lorsque le tyran intérieur tient les rênes
en cachette. Certes, une rébellion peut être porteuse de créativité mais
difficilement si c’est à soi-même que l’on s’oppose. Quant à la
soumission, à dose homéopathique, elle peut être utile pour se tenir à une
discipline (modelage tous les mardis de 14h à 17h !) mais pas pour
prendre un envol créatif. L’État du Moi dans lequel se niche la
créativité, c’est l’État du Moi Enfant Libre. Il est donc primordial de provoquer
des situations où cet État du Moi va être stimulé et encouragé.
Attardonsnous quelques instants sur cet État du Moi puis sur l’État du
Moi Parent Nourricier qui lui est si favorable.

1. L’Enfant Libre

Nous sommes en État du Moi Enfant Libre lorsque nous nous exprimons
et agissons sans ressentir de contrainte, laissant libre cours à notre imagination,
à notre créativité, à notre spontanéité. Par nature joueur, rieur, parfois
capricieux, l’État du Moi Enfant Libre est réceptif à ses sensations physiques,
à ses envies, à ses besoins. C’est en nous trouvant dans notre Enfant
Libre que nous laissons émerger et exprimons nos sentiments et nos émotions,
aussi bien agréables que désagréables : joie et chagrin, attirances et aversions,
peur et colère…

2. Le Parent Nourricier

Il représente la faculté que nous avonsde nous occuper d’autrui et de


nous-même avec bienveillance, de consoler, de rassurer, d’encourager, de
protéger. Il s’agit donc de l’aspect chaleureux des États du Moi Parent, à
la fois paternels et maternels. C’est vers ce Parent Nourricier que nous
pouvons nous tourner pour laisser parleret développer notre bienveillance
envers nousmême et envers les autres, nous ressourcer et trouver du
réconfort. C’est aussi ce Parent Nourricier qui, par sa bienveillance, permet
à chacun de se sentir libre et spontané.
Développer une relation harmonieuse avec soi peut se traduire par une
présence prédominante du Parent Nourricier intérieur qui protège et
encourage avec bienveillance l’Enfant Libre intérieur. Si votre relation
intrapsychique de bienveillance envers vousmême est carencée, elle glisse
peut-être vers un verrouillage Parent Critique-Enfant Adapté Soumis ou
Parent Critique-Enfant Adapté Rebelle. Si tel est le cas, épargnez-vous
des années de frustrations et de blocages. Reconnaissez cette tendance
potentiellement autodestructrice et attelez-vous à développer votre Parent
Nourricier intérieur et à chercher des Parents Nourriciers à l’extérieur de
vous-mêmepour soutenir votre Enfant Libre.
Tout artiste quel qu’il soit a régulièrement besoin de se ressourcer
auprès d’un Parent Nourricier. Que celui-cise matérialise sous la forme
d’un enseignant compétent et bienveillant, d’un collègue artiste qui a la
maturité de concevoir le travail des autres comme complémentaire
au sien et non comme concurrent, d’un conjoint, d’un frère, d’une sœur,d’un
parent, d’un ami, d’un thérapeute,d’outils d’auto-validation. La capacité à
s’entourer de Parents Nourriciers sous des formes multiples fait la
différence la plus tangible entre un artiste épanoui et un artiste
replié sur lui-même, qui produit peu.

Bien plus que le talentinné, c’est la présence interne ou externe d’un ou


de plusieurs Parents Nourriciers qui donne les ailes de l’originalité et
de la réussite artistique.

Les associations d’artistes


Si l’ambiance y est bienveillante, ces associations peuvent constituer une
source irremplaçable d’inspiration, de stimulation et d’encouragements. En
effet, un Enfant Libre joue avec plus d’enthousiasme dans la cour de
recréation que dans l’isolement, du moins à condition que l’ambiance de
jeu soit baséesur l’entraide et la coopération. Dans un groupe d’enfants
qui applique spontanément la « techniquedu oui » (prise en compte
de toutes les propositions sans jugement), les idées créatives se
bousculent et s’enrichissent du groupe. Naissent ainsi des co-créations
spontanées épanouissantes pour tous. À l’âge adulte, on peut retrouver ce
type de co-créations fascinantes dans les cours et spectacles d’improvisation
théâtrale de qualité. Assistez à un tel spectacle si vous en avez
l’occasion. Vous observerez sans douteque la « technique du oui » est
de mise (« oui » à toute proposition, aussi surprenantesoit-elle, sur
laquelle chacun surenchérit), car c’est le seul moyen de réellement
construire un scénario improvisé à plusieurs. Si un membre du groupe
tire au flanc et ridiculise les propositions des autres, il s’attire peut-
être parfois des rires du public mais saccage le processus créatif de
groupe. Les scénarios s’essoufflent alors et tombent dans les histoires
prévisibles et stéréotypées.
Sur le plan relationnel, rencontrer l’autre dans un engagement commun
à un projet créatif permet souvent une profondeur et un
enthousiasme difficiles à trouver dans la vie de tous les jours. Dans
les groupes de création artistique au sein desquels règne une atmosphère
de confiance et d’honnêteté, on sent souvent souffler une brise de
soulagement quand les participantsdécouvrent que les autres membres
du groupe sont eux aussi aux prisesavec leur « critique intérieur », leurs
blocages à la créativité, la sensationque ce qu’ils font n’est pas intéressant
et la myriade de pensées négatives et démotivantes qui les
hantent souvent. En soi, cette découverte vaut son pesant d’or et peut
déverrouiller bien des blocages. Chacun peut se croirefade et inintéressant
lorsqu’il est muré dans son isolement ou qu’il évolue dans des milieux
critiques et hostiles. Par le contact avec les autres, confronté à
la diversité humaine, chacun peut, au contraire, se découvrir unique
et original sans avoir à essayer de l’être,simplementen étant pleinement
soi.
Sil’on demande à un groupe de huit participants de terminer un
roman comme ils l’entendent, on aura systématiquement huit fins de roman
différentes. Ce type d’expérience met en exergue à quel point les
préoccupations de chacun et son expérience de vie lui sont propres. Ce
qui nous paraît banal, « normal », « comme tout le monde » ne
l’est en réalité que pour soi…

1. Être vigilant dans le choixd’une association

Il est recommandé de se montrer vigilant lorsque l’on choisit une


association. La culture du jugement et de la critique est insidieuse.
Nous savons tous ce qu’est un critique d’art mais les professions «
appréciateur d’art », « facilitateur d’art », « encourageur d’art » ne
sont pas répertoriées dans le dictionnaire. La critique peut bien sûr être
constructive mais notre culture nous pousse souvent vers le jugement
négatif. Certaines émissions de téléréalité institutionnalisent le sadisme
et le non-respect de l’autre. Avec ce type d’émissions qui influencent la
mentalité collective, redoublez de vigilance pour chercher des environnements
qui vont encourager le respect de l’autre, son intégration, ainsi que la
spontanéitéet l’unicité de chacun. Vous aurez peut-être à vous armer de
courage pour trouver une association ou un groupe à l’ambiance
propice, mais l’effort vaut vraiment la peine. Et pourquoi ne pas
initierune association, un groupe de soutien créatif qui bannirait la
culture de l’« extraordinaire » dans le mauvais sens du terme (la
course à la célébrité à tout prix par exemple) et encouragerait
l’échange et la coopération ?
2. Repères pour un groupe au cadre clair et sain

L’appartenance à une association (donc à un groupe) au cadre clair peut


limiter les risques de dérives. Il me paraîtsans danger de s’investir
dans une association opérant selon ces bases :
– « je suis ok, tu es ok » ou « position de vie ok/ ok
» d’Analyse Transactionnelle (par opposition auxpositions de vie agressives
« je suis ok, tu n’es pas ok », admiratives « je ne suis pas
ok, tu es ok » et dépressives « je ne suis pas ok, tu n’es
pas ok ») ;– « technique du oui » ;
– valorisation de l’unicité de chacun (et non évaluation quantitative/qualitative
des œuvres produitesou de leurs auteurs).
Enpédagogie, ce sont des techniques de base centrées sur l’apprenant ; elles
fonctionnent à merveille pour favoriser le développement de la
créativité. Ces règlesdésinhibentcar elles calment non seulement la peur de
la hontemais aussi la peur de briller. Enlever la pression de se
révéler sublime et faciliter l’expression du laid, du banal et de
l’imparfait laisse l’Enfant Libre évoluer sans entraves et exprimer ainsi le
vrai, le simple, l’authentique.
Si les membres de l’association échangent parfois verbalement leur
ressenti sur leurs productions artistiques, pour éviterde glisser sur la pente
dangereuse de l’art-thérapie sauvage, il vaut mieux s’assurer que chacun
ne parle que de sa propre production, à moins de limiter les
échanges à des aspects techniques de l’activité artistique et à la
valorisation de ce qui est fait.

3. Pourquoi se tourner vers un groupe plutôt que vers une seule


personne ?

Pour les raisons citéesprécédemment et parce que pour ceux qui se


croient insignifiantsou transparents, la rencontre avec les autres permet
de découvrir que ce que l’on produit a un impact. En retour,
chacun peut goûter à la joie de se reconnaître dans les
préoccupations d’un autre,être inspiré par ce qui est exprimé, s’essayer
à un procédé qu’il voit utiliser.
Créer au sein d’un groupe peut minimiser les blocages à la créativité
car la dynamique crée l’émulation. Un groupe aux dynamiques saines
permet de pleinement sentir que chaque vécu, chaque perception, chaque
subjectivité est source d’enrichissement,d’inspiration, voire de réconfort pour
les autres.
Contrainte et liberté
Dans mes ateliers d’écriture créative, si je propose un thème avec
toute liberté sur le format et un temps d’écriture relativement long,
certains visages se crispent et des stylos se posent. Si en
revanche je distribue des coupures de magazines dans une pochette surprise
(deux photos + une phrase par exemple) en proposant un temps
d’écriture court (20 minutes maximum), chacun produit quelque chose.
Le résultat est généralement fantaisiste et original, car la contrainte aide
paradoxalement à être plus libre dans sa créativité.
Imposez-vous des contraintes pour canaliser votre créativité et un temps limité
pour la faire se décupler. Comme une tomate que l’on presserait très
fort jusqu’à ce que tout le jus en jaillisse, pressez votre créativité
avec des contraintes.Par exemple, piochez trois mots dans n’importe quel livre
et créez coûte que coûte à partir de ce stimulus arbitraire.

Imposez-vous de travailler au sein de limites fixes pour vous protéger de


l’indécision et encourager ainsi la production d’un résultat.

Les attitudes constructives


« Nul ne peut échapper au fait d’êtreintéressant. » Erving Polster 17

Erving Polster 18
était psychothérapeute depuis quarante ans au moment
où il écrivit cette phrase. Selon lui, certains sont de véritables
experts en camouflage quand il s’agit d’honorer leur propre vivacité,
leur spontanéité ou leur richesse intérieure. Ils ne sont pas en contact
avec leurs qualités, n’y croient pas et ne lesdévoilent jamais ou
presque. Pourtant, sous des apparences parfois incolores et inodores, il
suffit d’insister pour que la saveur propre de la personne finisse
par faire surface au hasard d’un moment de grâce, d’une rencontre
profonde, d’un souvenir poignant. Je trouve ce rappel primordial
lorsque l’on entreprend de développer et de booster sa créativité :
insistez avec foi pour que votre saveur propre finisse par s’exprimer dans
votre créativité. Pour cela, il est utile d’adopter une attitude d’accompagnant
bienveillant envers soi-même (ouvert d’esprit et confiant) pour que les
nœuds se dénouent.

Votrerichesse intérieure trouvera le moyen d’émerger si vous lui laissez


suffisamment de temps, et adoptez une attitude de confiance absolue
en sa capacité à s’exprimer.
1. Quatre règles d’or pour une attitude constructive
1. Ne passez pas votre vie à courir derrière des buts idéaux
Ne vivez pas pour un futur lointain, concentrez-vous sur la réalité du
présent : un but à la fois, facile à atteindre dans l’immédiat. Le
meilleur moyen d’atteindre son but est d’oublier les succès hors de
portée et de s’impliquer de tout son cœur dans de « petites »
aventures : laissez votre énergie couler dans le lit de la réalité
qui est disponible ici et maintenant. Les choses les plus
miraculeuses se nichent dans les petits détails du quotidien !

2. Donnez-vous la permission de choisir ce que vous voulez créer


Vous avez le droit d’être davantage ce que vous voulez être, de faire
davantage ce que vous voulez faire et d’aller davantage où vous
souhaitez aller. Une évidence ? Bien sûr, mais si facile à oublier !
Faites honneur à la liberté que vous avez. Si vous avez envie de
prendre des cours de danseà quatre-vingts ans, ne vous empêchez
surtout pas de le faire ! Soyez libre et heureux, vous ferez des
émules. Si vous avez envie de dessiner des fées, ne vous réprimez pas
par peur de paraître immature, faites-vous plaisiret soyez librement la
personne que vous découvrez, peut-être, avec surprise.

3. Acceptez les moments moins inspirés


On espère que le miracle créatif va se produire à chaque
tentative mais on ne peut pas le forcer. On peut donc préparer la
voie et la scène, « s’y mettre », mais en adoptant une
attitude de tolérance envers ce qui vient... ou ne vient pas. Surtout
ne vous jugez pas durement si vous n’êtes pas inspiré. Cela fait partie
du jeu. Il ne peut pas faire soleil 365 jours par an ! Comme nous
l’avons dit, l’hiver de la créativité est aussi important que les
autres saisons. Persistez jusqu’à ce que le printemps apparaisse !

4. Nettoyez votre miroir déformant


Quand vous vous regardez dans un miroir, que voyezvous ? Pour reprendre
une métaphore de Carole
Watanabe ,quels post-it
19
de croyances négatives viennent polluer votre image
? « Je suis ici pour en baver », « je ne suis pas créatif
», « je suis un incapable » ? Essayez d’être honnête avec
vous-mêmeet de laisser vos croyances inconscientes venir à votre conscience.
EXPLORATION
1. Inscrivez vos croyances négatives sur des post-it et collez-les sur un
miroir. Notez l’impact qu’ils ont sur vous quand vous essayez de vous voir
malgré ces post-it qui cachentune partie de votre image.
2. Faites appel à la part de vous la plus nourricière et dirigez-la vers la
part de vous qui se donne du mal, qui a travaillé dur pour arriver où
elle est. Laissez venir à vous vos ressentis.
3. Sentez-vous l’injustice de ces post-it, leur cruauté à votre égard ? S’ils
s’appliquaient à un ami, que ressentiriez-vous ?
4. Décollezles post-it et faites un rituel de mise à l’écart.
5. Prenez de nouveaux post-it (de préférence d’une couleur différente) et inscrivez
une antidote à chaque croyance négative identifiée. Par exemple : «
Je suis ici pour savourer chaque instant de la vie », « Je suis créatif
», « Je suis très capable», « Je mérite de m’épanouir par l’art ».
6. Collez ces nouveaux post-it sur le miroir de manière à en entourer
votre visage quand vous vous regardez.
7. Notez leur impact.
8. Si possible, prenez une photo du tout et gardez cette photo à disposition.
9. Il ne vous reste plus qu’à prendrele risque de vous jeter à l’eau avec foi
et confiance. Mettez immédiatement la main à la pâte avec une activité artistique
courte (15 minutes maximum).

2. Attention à l’attitude répandue « Oui, mais »

Combien d’excuses vous êtes-vous déjà donné au cours de la lecture


de ces pagespour ne pas passer à l’acte ou ne pas vous faire plaisir?
Peut-être aucune (auquel cas, bravo !) mais peut-être plusieurs « oui
mais » ont-ils ponctué votre lecture : oui, je voudrais danser le
flamenco mais je n’ai pas de jupe adaptée . Nous avonsdéjà dit à
2
quel
point nous pouvons être sophistiqués dans notre manière de nous mettre
des barrières :
Parfois, nous déguisons les « oui mais » avec des « si » :
– Si j’avais du temps libre…
– Si j’habitais à la campagne/en ville…
– Si j’avais un groupe d’amis qui…
– Si j’avais un travail moins fatigant…
Ou bien nous les cachons dans les formules « quand / alors »
– Quandj’aurai fini cette tâche, alors…
– Quandj’aurai une pièce à moi, alors…
– Quandles enfants seront grands, alors…
La réalité de la vie d’adulte comporte bien entendu des contraintes et
des limites bien réelles, mais soyez vigilants. C’est souvent au terme
d’une longue série de « oui, mais » légitimes et convaincants que
les gens arrivent dans mes ateliers. Ils sont soulagés d’avoir enfin pu dire
« oui et » : ils se donnent le droit d’entamer la démarche
qui va faire honneur à leur créativité, au sein de leurs contraintes,en
s’adaptant aux limites de leur lieu de vie présent, tout en se tenant
à leurs responsabilités d’adultes, de parents parfois, etc.

3. Encouragez l’attitude « Pourquoi pas ? »

S’il vous prendl’envie de peindre un grandtableau alors que vous


n’avez jamais peint de votre vie ou seulement des petits formats,
attention à ne pas vous en empêcher avec des prétextes fallacieux (oui
mais je n’ai pas de place chez moi, ça coûte trop cher, cela me prendra
trop de temps…). Pourquoi ne pas essayer si vous en avez envie ? Les
« oui mais » sont généralement de piètres excuses : si vous
peignez sur du papier, il peut être enroulé, les gouaches pour enfants
sont très bon marché et peindre en grand format ne prendpas plus
de temps que peindre en petit format. Surveillez les méthodes
répressives sophistiquées de votre tyran intérieur. N’en sous-estimez pas la
poigne ! Ces tyrans intérieurs sont souvent très habiles, d’autant
qu’ils savent chercher secours chez les amis. Combien d’amis repéreront
la voix de votre tyran si vous leur dites : « Tu es bien d’accord
qu’il faudrait que je sois folle pour m’inscrire à cet atelier de
sculpture dans ma situation ! »

4. Jeu et créativité
« Ce n’est qu’en s’amusant
qu’on peut être pleinement créatif. ».
D.W. Winnicott 20

Le psychanalyste Winnicott trouvait le temps de jeu tellement essentiel


dans sa vie qu’il avait décidé de mettre un jour par semaine de côté
pour s’y consacrer pleinement. Ce qu’il appelait jeu englobait au sens
très large tout ce qui était plaisiret spontanéité. Un moment où le
senex (l’énergie d’adulte responsable) pouvait enfin laisser la place à
l’énergie puer de l’enfant intérieur . Certes,
21
ce n’est pas facile si vous
bataillez avec un emploi du temps surchargé mais même si vous
ne pouvez mettre que deux heures de côté par semaine, ne vous
en privez pas. Ces deux heures vous revigoreront tellement que vous
gagnerez en efficacité ce que vous « perdrez » en temps si tel
doit être le calcul.

5. Antenne parabolique et transmetteur

Il peut être séduisant, pour combler les faillesnarcissiques inconscientes, de


se vouloir « Créateur » avec un grandC. Je pensetoutefois que
si c’est une soif de reconnaissance et de renommée qui motive à
développer sa créativité, les risques de déception sont énormes. Non seulement
cette dynamique déborde de blocages potentiels mais en plus, ceux qui ont la
« malchance » de réussir sont parfois, à terme, anéantis par la
pression du succès.
Adopter une attitude d’antenne parabolique qui se met en réceptivité du
mystère de la créativité pour le retransmettre au monde imprégné
de ses propres couleurs me paraîtnon seulement plus prudent mais plus
juste et équilibré. De même que le don de créativité n’est pas
réservé à une élite, la territorialité excessive me paraîtdommage. Nous avons
tout à gagner à ce que le plus grandnombre développe sa créativité
dans un principe de complémentarité.Chacun peut ajouter sa pierre
à l’édifice de l’évolution vers une humanité plus épanouie. Si devenir
créatif s’inscrit dans un esprit de compétition, la situation se détériore
vite. Libérez-vous de la pression du succès pour savourer votre
potentiel créatif en toute sérénité.

Notes
2. (Voir à ce sujet le film Oui, mais…, de Yves Lavandier, 2001).

5. S’élancer pour se lancer

N ous avonsexploré
proposé diverses
tout ce qui peut bloquer
pistesde solutions
pour vous de vous élancer.
pour y
votre créativité
pallier. Il
et
est
avons
temps

Dix coups de pouce pour s’élancer

1. S’ancrer

Ancrez-vous pour aider l’inspiration. Avantde vous mettre à l’ouvrage, faites


un petit ancrage de votre choix.Si vous êtes à court d’idées, voici un
exemple simple et efficace :
1. Portez votre attention sur votre respiration et, si c’est confortable pour vous,
ralentissez-la légèrement en allongeant les expirations.
2. Connectez-vous avec les parties de votre corps en contact avec le sol et
concentrez-vous sur ce sol toujours présent, toujours source de soutien.
3. Faites quelques étirements ou mouvements de mise en train (en silence ou en
musique, au choix).
4. À partir de la source d’inspiration de votre choix (votre propre recueil d’idées, mots
piochés dans le dictionnaire, autres sources mentionnées dans cet ouvrage ou ailleurs),
laissez venir des sensations, des images,des sons avant de vous mettre à l’œuvre.

Si cela vous est agréable et vous aide à vous ancrer : –


mettez de la musique qui vous porte ; – parfumez votre lieu de
créativité ;
– relisez ces pages(ou d’autres) qui vous donnent confiance en vous
et vous encouragent ;
– lisez votre propre page d’affirmations positives vous donnant la
permission nécessaire à votre épanouissement. Par exemple, « c’est mon droit
d’offrir au monde ce que j’ai à lui exprimer », « je mérite
de prendre du bon temps en créant librement », « j’ai des
choses à exprimer que je suis seul/e à pouvoir exprimer ainsi »…

2. S’échauffer et se mettre en train

Endanseou en sport,tout le monde sait qu’il faut échauffer son corps avant
de faire des pirouettes. En théâtre et en chant, la pratique est
également courante. En revanche, dans beaucoup d’autres formes artistiques,
l’échauffement est oublié. Pourtant, une mise en condition physique et
mentale est extrêmement facilitatrice.Assurez-vous que vous trouvez des
rituels de mise en train adaptés au langage artistiquede votre choix.
Donnez-vous la possibilité de faire appel à d’autres formes artistiques
pour cette mise en train si cela vous aide.
J’ai eu la chance d’animer une série d’ateliers d’écriture créative
avec un groupe très enthousiaste et dynamique. J’ai pu me permettre de
proposer des mises en train désinhibantes qui ont généré des écrits
extraordinaires. Ainsi, j’ai commencé un atelier avec un échauffement de théâtre :
quelques mouvements ludiques au degré d’exposition progressif suivis d’une
préparation par petits groupes d’un mini-spectacle. L’écriture individuelle des
scénarios inspiréspar cet échauffement a été très inspirée. J’ai commencé un
autre atelier avec une courte
activité danse/ déguisements sur des airs de « fiesta ». Cet échauffement a
généré une euphorie joyeuseet aidé les participants à lâcher prise pour l’activité
d’écriture prévue ensuite. Les écrits ont été très imaginatifs. Une
participante quiavait eu des blocages lors d’un atelier précédent s’est surpassée.

Bien entendu, des mises en train plus sobres suffisent. Il suffit de


s’entourer de photos qui encouragent. Si vous en avez, entourez-vous de
photos de vous-mêmedans des moments de liberté, de joie,
d’épanouissement, de créativité, de jeu. Si vous préférez, entourez-vous
de photos d’artistes qui vous inspirent. Abreuvez-vous à leur expérience
et rappelez-vous qu’ils ont dû affronter leurs propres affres, leurs propres
doutes, leurs passages à vide, qu’eux non plus ne savaient pas ce
qu’ils allaient produire au moment où ils se mettaient à l’ouvrage.
Rappelez-vous que votre démarche est aussi légitime que la leur. Connectez-
vous au lien qui vous unit à eux, à l’universalité, à la connexion
humaine. Faites-en des alliés et non des icônes intimidantes !

3. Protéger son espace/temps créatif

Assurez-vous que vous débranchez le téléphone et avertissez vos proches que


vous n’allez pas être libre. Donnez-vous des repères en temps précis
et immuables, afin d’être pleinement disponible à l’expérience créative. Si
besoin, délimitez l’espace dans lequel on ne peut venir vous distraire.
4. Piocher

Pour trouver des sources d’inspiration, prenez un livre d’art, un


roman, un livre quelconque, votre propre recueil d’idées, un CD,
un DVD. Ensuite, feuilletez, écoutez, visionnez pour vous laisser appeler par
une idée qui émerge. Si rien ne vous « appelle », piochez un
mot dans le dictionnaireet pliez-vous à la contrainte du hasard. Par
exemple, si votre doigt tombe sur le mot « rue », peignez la
rue, dansez-la, mettez-la en musique, en mots, etc.

5. Jouer le jeu

Ne vous privez pas de l’expérience immédiate en vous disant que


vous savez déjà ce qui se passera si vous mettez la main à la
pâte. Ce qui vient est toujours différent de ce que l’on avait anticipé.
Ne laissez pas vos idées préconçues ni vos a priori vous empêcher de dire
oui à une expérience créative, vivez-la avec enthousiasme et curiosité.

6. Agir plutôt que réfléchir

Ne vous donnez pas le temps de réfléchir. C’est dans l’action que l’on
parvient à court-circuiter le cerveau gauche et tous ses messages
inhibiteurs du type « tu n’y arriveras jamais ». Commencez à
faire avant même de pouvoir penser et l’action gagnera sur
l’inhibition.

7. Laisser venir

Laissez-vous « appeler » par vos idées,vos gestes, vos mouvements,


sans les ordonner. Rappelezvous la citation de Nietzsche sur le
besoin de chaos pour créer une étoile dansante. Ayez le courage d’accepter
la spontanéitédans ce qu’elle peut avoir de fragmenté, de chaotique,
d’avorté et d’incomplet. C’est avec cette matière brute que vous pourrez
créer les meilleures œuvres.

8. Lâcher prise

Ne vous souciez pas du résultat final et respectez ce qui émerge


de vous. Suspendez temporairement toute critique, tout jugement lié au
résultat. Un investissement excessif dans l’œuvre terminée peut freiner le
processus créatif, alors respectez ce que vous produisez. Ne le contrastez
pas, ne le comparez pas comme plus ou moins intéressant que celui d’un
autre.Respectez-le et honorez-le, en toute simplicité.
9. Prendre des risques

Remplacez les « je ne peux pas » et les « je ne sais pas


» avec des « si j’essayais ? ». Carole Watanabe montre22

combien la culture de la prise de risques dans la sécurité de


sa toile est bénéfique. C’est une dimension primordiale à l’acte créatif.
Prenez des petits risques et félicitez-vous en. Ainsi, la confianceen vous
grandira et les pas vers l’inconnu pourront s’amplifier. Si vous prenez
le risque de produire une œuvre dans un style qui ne vous est pas
familier, vous avez plus de chances d’être déçu par le résultat, c’est cela,
« le risque » ! Ne laissez pas ces possibles déceptions vous
décourager. Félicitezvous plutôt d’avoir eu le courage de vous
aventurer en terre inconnue et recommencez ! Persistez jusqu’à ce que
la croyance limitante « je ne peux pas » cède le pas à
l’attitude d’aventurier « si j’essayais ? », d’aventurière « et
pourquoi pas ? ».

10. S’amuser

Laissez-vous aller à expérimenter. Faitesle fou, la folle, amusez-vous,


essayez des outils qui sortent des conventions et des sentiers battus
: lâchez le crayon et la gomme et dessinez avec un fruit
qui perd son jus, les yeux fermés, sur un vieux carton. Expérimentez
avec des vieilles pommes de terre pour créer des tampons originaux,
dansez comme on ne vous l’a jamais appris, chantez comme
un enfant qui s’amuse avec les sons, écrivez avec des mots que vous
inventez (« floc », « grougnouf », « piltil »…), déchirez, salissez,
gribouillez, AMUSEZ-VOUS ! Vous risquez fort d’être surpris. L’être
humain est souvent d’une grande ingéniosité quand il crée sans s’en
rendre compte, naturellement, en s’amusant.

Des premiers pas à la portée de tous


Si vous ne savez pas par quoi commencer, essayezvous à l’un des
exercices suivants (ou à tous !)
1. Un collage simple
EXPLORATION
1. Prenez quelques magazines et piochez toute illustration visuelle ou écrite qui
vous interpelle, soit parce qu’elle vous attire, soit parce qu’elle vous répugne.
2. Découpez, déchirez, arrachez et collectez sans réfléchir.
3. Observez l’ensemble de vos coupures.
4. Sur une feuille de papier ou une surface relativement grande (par exemple, sur
une boîte en carton à recycler, sur du papier d’emballage, sur plusieurs
feuilles blanches scotchées, sur une grande feuille de papier kraft), créez une composition
en collant vos coupures.
5. Ajoutez-y des bouts de ficelle, du journal froissé, des morceaux de tissu, des
brindilles, des feuilles séchées, tout ce qui vous tombe sous la main et qui
vous attire.
6. Si cela vous tente, créez un narratif (verbal ou non verbal). Si vous préférez,
faites simplement au gré de vos envies pour le plaisir de l’expérimentation, de
l’assemblage des formes et des couleurs.
7. Quand vous avez obtenu un petit quelque chose, constatez sans juger, observez
sans critiquer.

Vous avez produit une création qui ne demande qu’à être complétée ou
non, imitée ou non, peaufinée ou non, au choix,en toute liberté.

2. Le dessin facile
EXPLORATION
Prenez deux feuilles de papier de taille quelconque et de quoi élaborer un
tracé (crayon, stylo, feutre ou tout ce qui vous inspire).
1. Avec votre main préférée (gauche si vous êtes gaucher), faites des lignes
ininterrompues de la gauche vers la droite. Peu importesi elles sont droites, ondulées,
régulières ou non. Dessinez un minimum de trois lignes de gauche à droiteen
vous concentrant sur la pression du crayon sur le papier, les sensations
dans votre main, votre position, vos muscles, etc.
2. Lorsquevous en avez assez, tournez votre feuille et recommencez l’exercice, toujours
avec la même main mais cette fois, faites les lignes de droite à gauche et
notez la différence. Est-ce plus facile ainsi ou alors inconfortable, ennuyeux ?
3. Prenez la seconde feuille de papier et faites des lignes de gauche à droite
avec votre autre main (main droite si vous êtes gaucher), puis des lignes de
droite à gauche.Concentrez-vous sur l’action, sur l’acte plus que sur le
résultat. Comment vous sentezvous en tenant un crayon avec votre autre main, préférez-
vous faire vos lignes de droite à gauche ou de gauche à droite ?
4. Tournez cette seconde feuille de papier et cette fois, tenez votre crayon avec les
deux mains. Encore une fois, concentrez-vous sur les différences de sensation.

Cet exercice offre l’avantage de générer de nombreuses sensations


différentes et intéressantes à noter et de vous faire réaliser quatre
dessins faciles.
Pour étendre cette expérience à quelque chosede plus « expressif »,
il suffit de passer à l’étape suivante :
– laisser ces lignes onduler un peu plus ;
– être moins systématique dans la tâche ;
– mettre une intention émotionnelle dans cet exercice technique (par
exemple, faites les traits avecdouceur ou brusquerie selon votre émotion du
moment).
Votre dessin peut être inesthétique ou vous paraître enfantin mais cela
n’a pas la moindre importance. Ce qui compte, c’est que vous ayez
commencé.
Ceux qui aiment dessiner décrivent souvent leur plaisirà s’adonner à
cet acte. Cette sensation que soudain le temps est suspendu, que l’on
est transporté ailleurs, dans un autre temps, une autre dimension. Laissez-vous
aller à ce plaisir, sans attente autre que celle de passer un
moment agréable.
3. La peinture facile
Si vous êtes intimidé par la peinture, suivez un parcours similaire au
dessin avec des peintures. Laissez le pinceau (ou l’éponge, le couteau,
le chiffon, la vieillebrosse à dents) aller de son plein gré, comme
il est suggéré pour le crayon. Vous pouvez par exemple faire des
lignes au pinceau avec de la peinture à l’eau ou bien avec diverses
densités d’encre de Chine.
EXPLORATION
Munissez-vous de papier ordinaire ou d’un carton d’emballage.
1. Faites des traits droits ou courbés, longs ou courts, arrondis ou anguleux.
Remplissez ainsi plusieurs pages avec des traits de votre choix.
2. Faites une forme sans lever le pinceau. Puis remplissez certaines parties de la
forme et laissez d’autres parties vides.
3. Amusez-vous d’abordavec la matière: les pinceaux, l’eau, les couleurs, le
papier. N’essayez pas d’exprimer quelque chose de précis, juste de jouer avec ces
outils. Pour cette activité, mieux vaut ne pas investir dans des peintures chères. Il
est plus libérateur (au départ du moins) d’utiliser des peintures très ordinaires
sur le papier le moins cher que vous puissieztrouver. Ainsi, vous pouvez sans
scrupule remplir des pages et des pages jusqu’à ce que vous vous sentiez
suffisamment désinhibé pour vous essayer à des matériaux plus onéreux.

4. Mise en corps

Mettez les exercices précédents « en corps » ! Levezvous, laissez votre


corps bouger selon ses envies. Respirez, étirez-vous, occupez l’espace. Puis
mettez de la musique et laissez votre corps continuer de faire ce
qu’il a envie de faire. Lâchez prise. Joseph Zinker, célèbre gestaltiste
ayant beaucoup écrit sur la créativité , pensequ’il faut du «
23
jus » pour
créer.Or, si le jus n’est pas dans les émotions ou le langage d’une
personne, il est forcément dans son corps. Mettezvous donc en corps.
Habitez votre corps, faites-lui honneur. Donnez-lui le temps de laisser
le « jus créatif » l’investir.

Disciplines quotidiennes favorisant la créativité

1. Les pages du matin

Julia Cameron propose


24
les pagesdu matincomme outil premier pour
retrouver la créativité et en maintenir l’assise. Commencer la
journée de cette manière permet de se vider la tête de la
négativité qui l’encombre et ainsi de clarifier et d’asseoir les activités
du jour. C’est au hasard de cette écriture automatique que vient l’inspiration
chez certains. C’est une excellente discipline pour ceux qui ont tendance à
remettre le passage à l’acte créatif à plus tard. Une habitude qui
fait de l’acte créatif une routine quotidienne, ordinaire, facile à
s’approprier, comme faisant partiede soi.
2. Le journal créatif

Susan R. Makin 25
propose de tenir un journal créatif comme lieu
de véritéintime avec soi. Elle est thérapeute et elle suggère cette
activité pour aider son public à aller mieux. On s’approche donc, avec
le journal créatif, des principes de l’art-thérapie, tellement libérateurs de
l’énergie créatrice, bien au-delà du domaine purement thérapeutique ! Le
principe est le même qu’unjournal intime traditionnel basé sur l’écrit
avec l’ajout de dessins, peintures, objets, mini-jouets,coupures de
presse, collages, photos, gribouillis, etc. Je vous conseille vivement de
vous y essayer.
EXPLORATION
Prenez une feuille et posez votre stylo, votre feutre ou votre pastel sur la
feuille. Lâchez prise et autorisez votre main à écrire ou à dessiner. Laissez-vous
appeler par ce qui vous vient à l’esprit ou mieux encore, « ce qui vient à
la main ». Peut-être voulez-vous ajouter un chiffon, des mini-jouets, une photo ?
Faites-le sans vous juger. N’essayez pas de faire beau ou logique, faites
simplement vrai.

Non seulement la complémentarité de l’écriture et du visuel apporte de


la clarté à ce que vous relatez mais en plus, cela dynamise l’énergie
créatrice par la participation au processus créatif lui-même. Les écrits
peuvent être variés(prose, poésie, mots, petites histoires, contes) et
l’ajout des autres formes d’art aide à court-circuiter le mental
et à vaincre ainsi les tentatives de mensonges avec les mots.
6. Dansersur l’arc-en-ciel de la créativité

N ous venons
temps
de
de créer
attire,simplementpour
découvrir quelques exercices
un petit quelque chose sans
vous amuser et vous faire
d’échauffement, il est
importance dans l’art qui vous
plaisir. Si vous manquez
d’inspiration, voici quelques pistesà explorer et transformer sans
modération.

À vos marques… débloquez… partez !

Ici et maintenant
Passez à l’action ici et maintenant, coûte que coûte. Ne réfléchissez
pas, faites le premier pas, là, tout de suite. Faitesce saut dans l’inconnu,
cet acte de foi en la vie. Accueillez vite ce grain de folie qui peut
saupoudrer le quotidien de fantaisie et vous embarquer enfin sur ses ailes de
liberté… Allez-y !

Sources d’inspiration pour stimuler votre créativité


Voici une liste d’idées pour vous aider à démarrer. Pour chaque stimulus,
je vous propose de suivre les conseils donnés précédemment (« 10
coupsde pouce pour s’élancer »).
1. Personne ou personnage

Utilisez la forme artistique qui vous attire pour représenterune personne


connue ou imaginaire. Évoquez cette personne sur le plan physique, du
point de vue de sa personnalité, de son histoire, de ses goûts, de
ses rêves ou tout ce qui vous stimule…

2. Lieu ou décor

Décrivezun lieu existant ou imaginaire en lui donnant vie avec quelques


détails bien choisis. Comme pour le personnage, donnez-vous la
marge de le peindre, de le danser, de le chanter, de le
mettre en mots ou en scène, par rapport à ce que ce lieu
évoque pour vous sur le plan concret ou abstrait, son histoire, tout
ce qui vous intéresse…

3. Stimulation des sens

Évoquez une sensation (un son, un goût, une chosevue ou touchée, une
odeur) par un médiateur artistique. Si cela s’y prête, faites appel à
plusieurs sens. En écriture ou en improvisation théâtrale par exemple,
créer un passage où différents sens sont stimulés est très agréable à
produire et à recevoir.

4. Diverses représentations d’un même sujet

Utilisez plusieurs arts pour représenterdivers aspects d’une même chose.


Par exemple, essayez de représenter un animal qui vous émeut par
une peinture abstraite pour en évoquer l’essence. Essayez ensuite de
représenterla sensation qu’il vous donne de façon figurative, puis amusez-
vous à lui écrireune lettre, à mettre en scène ce que cet animal vous
communique habituellement ou ce que vous pensez qu’il veut
communiquer, à mettre en rythme ou en musique ce qu’il
pourrait vouloir exprimer aux autres animaux, etc.

5. Photo

Choisissez une ou plusieurs photos (trois au maximum) comme tremplin


et utilisez la ou les formes artistiques qui vous attirent pour
l’évoquer. La photo d’un être connu ou bien celle d’un inconnu
trouvée dans un magazine ou sur une carte postale, la photo d’un
lieu, d’un spectacle, d’un végétal, etc.
6. Œuvre célèbre

Choisissez une symphonie, une chanson, un film, un roman, une peinture,


etc. comme tremplin à votre créativité. Imprégnez-vous de cette œuvre
et laissez émerger ce qu’elle génère en vous.

7. Actualités

Choisissez une nouvelle qui vous touche, un fait divers, une situation,
comme point de départ à une création.

8. Dialogues

Faites dialoguer des personnages inspirés d’une comptine, d’une chanson, d’un
roman, d’une carte postale, par la forme artistique qui vous attire.
Variante: reprenez un travail effectué (exemple : faites dialoguer
l’animal que vous avez choisi avec le personnage que vous avez créé). Mêlez
le fictif avec des aspects de votre vie passée :
– le personnage fictif frappe chez un de vos anciens voisins
;
– il lui fait visiter le lieu que vous avez créé ; – il
lui présente l’animal ;– etc.

Oser briller de toutson éclat


Nelson Mandela, lors de son discours d’investiture à la présidence de
la République d’Afrique du Sud (1994), avait lu un poème de Marianne
Williamson dont voici un extrait : « Notre peur la plus profonde n’est pas
que nous ne soyons pas à la hauteur, notre peur la plus profonde est
que nous sommes puissants au-delà de toutes limites. C’est notre propre
lumière et non notre obscurité qui nous effraie le plus. Nous nous posons la
question… Qui suis-je, moi, pour être brillant, radieux, talentueux et merveilleux
? En fait, qui êtes-vous pour ne pas l’être 26
? »

Puisez dans tout ce qui vous passe par la tête et sous les yeux. TOUT est
utilisable comme point de départ, du moment que cela vous stimule.
Alors n’hésitez plus. Lancez-vous, foncez et osez briller!
En guise de conclusion

« La créativité
est une célébration de sa
propre grandeur, de la
sensation de pouvoir tout
rendre possible.
La créativité est une célébration de la vie
– ma célébration de la vie. »
Joseph Zinker 27

T ransformer l’ordinaire en extraordinaire n’est pas aussi difficile que cela peut paraître.
L’extraordinaire est souvent juste là, derrière ce buisson que vous ne
remarquez plus sur votre chemin quotidien. Il n’attend que votre signal pour
sortir de sa cachette et venir brillerau grandjour. Une belle au bois
dormant pour laquelle vous êtes le prince salvateur, une citrouille qui
n’attend que votre baguette magique pour se transformer en carrosse.
Pour activer la baguette magique, c’est très simple : il suffit
d’adopter un état d’esprit adéquat. La baguette fera le reste.
Je suis intimement persuadée que la créativité artistique fait partieintrinsèque de
l’être humain et qu’elle n’est pas le privilège de quelques élus. La
musicalité intérieure, la capacité à bouger, danser, chanter, dessiner,
peindre, sculpter, écrire, jouer la comédie, simplementcréer,se trouve
en chacun de nous. Il nous appartient de nous donner le droit de
nous ouvrirà ces richesses qui sont en nous.
Faites-vous pleinement honneur. Ne vous laissez pas piéger par les
pressions qui vous retiennent, qu’elles soient psychologiques, sociales,
professionnelles ou familiales. Osez vous dégager du temps pour laisser votre
spontanéitéet votre véritéprofonde s’exprimer.
Donnez-vous le droit de vous amuser avec tous les langages artistiques qu’il
vous prendl’envie d’essayer et apportez vos propres saveurs au monde.
Donneznous et donnez-vous la joie d’être visible, de manifester par
les arts votre palette de richesses intérieures : nous le méritons, vous
le méritez !
Notes et références
1. Bernie Warren, Using the Creative Arts in Therapy, a practical introduction,
Routledge, 1993 : 6.
2. Edith Kramer, Art as Therapy, Collected Papers, Jessica Kingsley Publishers,
Londres, 2000.
3. Ernst Fischer, The Necessity of the Art, Peregrine Books, Middlesex, 1986 : 8.
4. Pat B. Allen, Art is a Way of Knowing, Random House Inc., 1995. Texte original
: “The gift of creativity is within each of us waiting to unfold.”
5. Le linguiste Noam Chomsky s’en est inspiré pour ses théories de l’inné comme
expliqué dans le passage : Observations that supportthe Chomskyian view of
language, de l’article Tool Module : Chomsky’s Universal Grammar, disponible sur
http://thebrain.mcgill.ca/flash/capsules/outil_rouge06.html.
6. Pour le détail de ces ateliers, voir le site www.creatis.weebly.com.
7. Si c’est cet aspect de la créativité qui vous intéresse le plus, mon ouvrage
L’art-thérapie au quotidien (Jouvence, 2007) propose des pistes d’exploration variées.
8. Voir documentaire « Rolling Stones, la french connection », diffusé sur France 5 (juin-
juillet 2010).
9. Notamment l’apport des cours de Jacob Zellinger au IATE (The Institute for
Arts in Therapy and Education).
10. Pour une liste de stimuli de ce type, voir la 3e partie de mon ouvrage
L’art-thérapie au quotidien, op. cit.
11. Jacob Zellinger, lors d’un cours au IATE (The Institute for Arts in Therapy
and Education).
12. Nathalie Goldberg, Writing down the bones, Shambhala, Boston & Londres, 1986.
13. Joseph Campbell, Reflections on the Art of Living – A Joseph Campbell
Companion, New York, 1991, textes sélectionnés et publiés par Diane K. Osbon. Citation
originale : “If you want omelets, you must be willing to break some eggs.”
14. Une théorie de la personnalité et de la communication fondée par le psychanalyste
et psychiatre Eric Berne, dans les années 1950-1970.
15. Synthèse de divers descriptifs disponibles dans les ouvrages se référant à
l’Analyse Transactionnelle tels que : Eric Berne, What Do You SayAfter You Say
Hello ? Ed. Mass Market Paperback, Oct. 1, 1984 ; Christine Chevalier et
Martine Walter, Découvrir l’Analyse Transactionnelle, InterEditions/Dunod, Paris 2008 ; Christel
Petitcollin, S’affirmer et oser dire non, Jouvence, 2003.
16. D. W. Winnicott, Jeu et réalité, Folio Essais, 1975.
17. Erving Polster, Every Person’s life is worth a novel, New York, Norton,1987. Texte original
: “No one can escape being interesting.”
18. Un des pionniers de la Gestalt (approche thérapeutique humaniste) plusieurs années après
son émergence par les fondateurs Fritz et LauraPerls, et Paul Goodman.
19. Carole Watanabe, The Ecstatic Marriage of Life and Art, Live ArtEditions, Sebastopol,
CA, 2008.
20. D.W. Winnicott, Jeu et réalité, op. cit. Texte original : “Only in play one can
be fully creative.”
21. Concepts jungien de puer et senex.
22. Carole Watanabe, The Ecstatic Marriage of Life and Art, op. cit.
23. Joseph Zinker, Creative Process in Gestalt Therapy, the creative leap : 9, Barnes
& Nobles, 1977.
24. Julia Cameron, The Artist Way, Pan Books, Londres, 1996.
25. Susan R. Makin, Therapeutic Art Directives and Resources, Jessica Kingsley Publishers,
Londres, 2000.
26. Marianne Williamson, A Return To Love : Reflections on the Principles of A
Course in Miracles, Harper Collins Publishers, 1992. Texte original : “Our deepestfear is
not that we are inadequate. Our deepestfear is that we are powerful beyond
measure. It is our light, not our darkness that most frightens us. We
ask ourselves, Who am I to be brilliant, gorgeous, talented, fabulous
? Actually, who are you not to be ?”
27. Joseph Zinker, Creative Process in Gestalt Therapy, op. cit.

Remerciements
J’aimerais remercier ici mon compagnon, Serge de Lussy et mes parents,
Josette et Robert Batlle, pour leurs contributions diverses et leur
soutien précieux et constant.
Je souhaite également remercier pour leur amitié, leur confiance et leurs
encouragements : Nieves del Amo, Mireille Michel, Nadège et Zoé
Barrault Lovett, Rosie Harness, Erica Cleverly, CécileAlais, Anne-Laure Boulard,
Caroline Nottelet-Solignac,Isabelle Desmoulins, Sandrine Maurer, Anne
Berthier, Annelie Akesson, Jay Kanabar, Paula Collens, Régine Coq, Laurence
de Lussy Kubisa, Rémy Bertrand, Patrick Auguy, Richard Rubioet le
souvenir de Philippe Gouraud. Et pour leur aide : PierreTruant et
Cédric Hadjaj.
Merci à mes formateurs et initiateurs pour leurs précieux enseignements. Un
merci tout particulier à IATE (the Institute for Arts in Therapy and
Education) à Londres.
Un grandmerci enfin, et non des moindres, aux participantsà mes ateliers
pour leur enthousiasme à développer leur créativité.
L’auteur
Suite à un parcours de comédienne, de plasticienneet de professeur
de langue, Sylvie Batlle, titulaire d’un master en art-psychothérapie
intégrative (Londres) s’est spécialisée dans l’utilisation des arts à des fins
récréatives et thérapeutiques (art-thérapie, développement personnel, formation
professionnelle, etc.). Elle est l’auteur des Compulsions alimentaires et
de L’art-thérapie au quotidien, publiés aux éditions Jouvence.
L’auteur propose :
– des formations professionnelles pour l’apprentissage de
l’animation d’ateliers ; – des ateliers variésde développement
de la créativité.

Site internet : www.creatis.weebly.com

www.editions-jouvence.com

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