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Les langues austronésiennes et la place du malagasy dans leur ensemble

Article  in  Archipel · January 1989


DOI: 10.3406/arch.1989.2588

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Archipel

Les langues austronésiennes et la place du malagasy dans leur


ensemble
K.A. Adelaar

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Adelaar K.A. Les langues austronésiennes et la place du malagasy dans leur ensemble. In: Archipel, volume 38, 1989. pp. 25-
52.

doi : 10.3406/arch.1989.2588

http://www.persee.fr/doc/arch_0044-8613_1989_num_38_1_2588

Document généré le 12/02/2016


ETUDES

K.A. ADELAAR

Les langues austronésiennes et

la place du malagasy dans leur ensemble

1. Introduction : la répartition des langues austronésiennes


Le malagasy, comme le malais, le javanais, les langues polynésiennes
et plus de six cents autres langues de l'Asie du sud-est et du Pacifique,
appartient à la famille linguistique des langues austronésiennes. Les langues
austronésiennes couvrent un terrain extrêmement vaste dont les extrémités
atteignent l'Ile de Pâques à l'est, Hawaï au nord-est, Taiwan au nord,
Madagascar à l'ouest, et la Nouvelle Zélande au sud. Les langues
austronésiennes sont parlées en Indonésie, en Malaysia, à Brunei, à Madagascar, aux
Philippines, dans le Pacifique, et, comme langues minoritaires, à Taiwan,
à Singapour, au Vietnam, au Kampuchea, en Thaïlande et en Birmanie. Elles
sont aussi parlées par des groupes d'immigrants dans quelques autres pays.
En Indonésie, la partie occidentale et centrale est tout à fait austronésienne,
tandis que dans la partie orientale on trouve aussi des langues d'une autre
provenance, comme celles du nord de Halmaheira, celles des îles d'Alor,
et celles de certaines parties de la Nouvelle Guinée (surtout à l'intérieur),
de Timor et de Kisar. La Malaysia est austronésienne sauf quelques
parties de l'intérieur de la péninsule, où l'on trouve encore des langues
résiduelles qui sont liées au khmer. Les langues des Philippines
Note additive. £our des raisons techniques, nous avons utilisé les signes suivants : ey pour
noter le pepet, n pour noter le n vélaire et n pour noter le n palatal. (La Rédaction)
26

et de Brunei, ainsi que le malagasy, appartiennent toutes à la famille aus-


tronésienne. Il en est de même pour une grande partie des langues du
Pacifique, sauf pour la Nouvelle Guinée et les îles limitrophes. A Taiwan, la
population autochtone à l'intérieur du pays maintient encore ses propres
langues, qui sont toutes de souche austronésienne, comme le paiwan, l'atayal
et le tsou ainsi qu'un bon nombre d'autres langues apparentées à celles-ci.
A Singapour et en Thaïlande du Sud (dans la région de Pattani et sur le
littoral occidental) des groupes minoritaires malais ont maintenu leur
langue. Sur le littoral occidental de la Thaïlande du Sud il existe également
quelques locuteurs de deux langues austronésiennes étroitement
apparentées, le moken et le moklen. Des locuteurs moken habitent aussi sur le
littoral de la Birmanie du Sud (Wurm et Hattori 1983 : carte n° 36). Au
Vietnam et au Kampuchea enfin, on trouve encore les langues «camiques» (le
cam, le jarai, le roglai, le rhade, le chru). Dans quelques autres pays, il existe
des groupes minoritaires et non-autochtones qui se servent de langues
austronésiennes : à Sri Lanka (notamment à Colombo, à Hambentota, et
ailleurs) et aux Pays-Bas (*), parsemées dans tout le pays, on rencontre des
poches de langue malaise. Au Suriname (en Amérique du Sud) il existe une
minorité substantielle de locuteurs javanais, et à Mayotte (aux Comores)
un tiers de la population parle des dialectes malgaches (Gueunier 1986 :
4). A Hainan (en Chine Populaire), enfin, il y a une petite minorité de
locuteurs cams (Wurm et Hattori 1983 : carte n° 35).
Les pages suivantes donnent un aperçu de la sous-division, de l'histoire,
et des caractéristiques principales de la famille linguistique austronésienne,
et de la place du malagasy dans l'ensemble de celle-ci. Le paragraphe 2
traite des classifications principales qui ont été faites des langues
austronésiennes; le paragraphe 3 donne une liste de mots en treize langues
austronésiennes qui a pour but de démontrer leur parenté; le paragraphe 4
traite du pays d'origine des locuteurs de l'austronésien commun (4.1) et
de celui des ancêtres des Malgaches (4.2); le paragraphe 5 présente deux
aspects de l'histoire linguistique du malagasy (5.1 : son origine booléenne;
5.2 : l'influence du malais qu'il a subie); le paragraphe 6, enfin, donne
l'exemple du système verbal de topicalisation; ce système se trouve dans le
malagasy et dans une partie des autres langues austronésiennes; il faisait
probablement aussi partie de la grammaire de l'austronésien commun.

2. La classification génétique des langues austronésiennes


Tout comme les langues indo-européennes que l'on classifie en sous-
divisions alors qu'elles sont toutes issues d'une langue ancestrale commune
(p.e. les langues romanes, slaves, celtiques, iraniennes), les langues
austronésiennes dérivent elles aussi d'une seule langue ancestrale commune,
le proto-austronésien ou austronésien commun, pour se regrouper ultérieu-
OCEAN
OCEAN I NDIEN
OCEA
Carte du Monde austronésien
1. Taiwan. 2. Hainan (Chine populaire).3. Philippines. 4. Région camique (Vietnam, Kampuchea). 5. P
Thaïlande). 6. régions moken et moklen (Birmanie du Sud, Thaïlande du Sud). 7. péninsule malaise (Malai
Singapour. 10. Kalimantan (Bornéo indonésienne). 11. Brunei. 12. Sabah (Malaisie). 13. Sarawak (Ma
15. Java (Indonésie). 16. Moluques (Indonésie). 17. Halmaheira (Indonésie). 18. Nouvelle Guinée. 19. Haw
21. Nouvelle Zélande (Polynésie). 22. Sri Lanka. 23. Madagascar. 24. Mayotte (Comores).
28

rement en diverses branches et sous-branches génétiquement proches. Une


différence entre les langues indo-européennes et les langues austronésien-
nes (différence assez pertinente pour l'étude du développement d'une famille
de langues) est que les premières ne sont pas aussi nombreuses, mais ont
souvent une tradition écrite, tandis que les dernières varient en nombre
de six cents à huit cents et n'ont généralement pas de tradition écrite. Il
en résulte qu'au contraire de la linguistique comparée indo-européenne pour
laquelle les chercheurs se servent d'un nombre limité de langues ayant
parfois une philologie qui s'étend sur des millénaires, l'étude de l'évolution des
langues austronésiennes devra s'appuyer sur un nombre exorbitant de
langues vivantes, dont on n'a de témoignage que du stade actuel, à part
quelques exceptions dans la partie occidentale du monde austronésien. Dans
de telles circonstances, cette étude dépend surout du zèle des linguistes
descriptifs, qui essaient de décrire autant de langues que possible avant
qu'elles ne disparaissent définitivement.
Pour la linguistique comparée, plus de langues seront décrites, plus de
données serviront de base à une classification des langues austronésiennes
et à une reconstruction de l'austronésien commun. Comme une grande
partie des langues austronésiennes n'a pas encore été décrite, et comme la
linguistique historique comparée ne s'est occupée que de quelques langues et
de quelques sous-groupes parmi la multitude des langues austronésiennes,
les reconstructions et les classifications dans ce domaine ne peuvent être
considérées au mieux que comme provisoires. Surtout dans le domaine des
classifications, les austronésianistes ne sont qu'au début de leur tâche. Avant
Dempwolff le premier à avoir abordé la reconstruction de l'austronésien
commun d'une façon systématique (1934-7-8), les classifications des langues
austronésiennes étaient extrêmement vagues et basées sur des
considérations plutôt géographiques et raciales que lingusitiques. La division en
groupe indonésien, mélanésien, micronésien et polynésien date de cette
époque. C'est le mérite de Dempwolff (1937) d'avoir placé les rapports entre
les langues austronésiennes du Pacifique et les autres dans une
perspective plus exacte. En faisant une reconstruction de l'austronésien commun,
il démontrait (1937 : 190-4) que les langues océaniques ne formaient qu'une
sous-division parmi les autres langues austronésiennes et que, dans cette
sous-division, il y avait maints groupes différents dont celui des langues
polynésiennes. Les autres groupes (qu'ils fussent «mélanésiens» ou «micro-
nésiens») n'étaient plus différenciés : Dempwolff les appelait tous
mélanésiens. Aujourd'hui la plupart des austronésianistes font une dichotomie
primaire entre les langues taiwanaises et toutes les autres langues
austronésiennes. Comme Dempwolff n'avait pas inclus les langues taiwanaises dans
sa reconstruction, on ne peut que considérer celle-ci comme représentant
la langue ancestrale des langues non-taiwanaises et par conséquent d'un
29

plus bas que l'austronésien commun. Pour cete langue hypothétique d'un
niveau plus bas, on a réintroduit le terme «malayo-polynésien». La
classification des langues austronésiennes proposée par Dempwolff était donc la
suivante :

malàyo-polynésien

autres langues austronésiennes polynésien


(moins celles de Taïwan)

Le point de vue selon lequel les langues polynésiennes feraient partie


de la même sous-division que les langues mélanésiennes et ne formeraient
qu'une des maintes branches dans cette ensemble n'a jusqu'à présent pas
été abandonné par les linguistes océanistes.
Après Dempwolff, c'est certainement la classification de Blust (1979)
qui, loin d'être exhaustive, est la plus raisonnée et la plus détaillée de
toutes les classifications existantes. Elle est basée sur des innovations (5.1)
concernant la phonologie et les pronoms personnels des diverses langues
austronésiennes. Selon Blust, les langues taiwanaises appartiennent à une
branche principale (ou peut-être plusieurs branches principales) de l'arbre
génétique austronésien, tandis que toutes les autres langues
austronésiennes appartiennent à une branche appelée «malayo-polynésienne». La sous-
division des langues malayo-polynésiennes consiste en une branche
occidentale et en une branche centre-orientale qui, à son tour, se divise en un
groupe central et un groupe oriental. Le premier est constitué par les
langues des petites îles de la Sonde, le dernier par les langues de Halmaheira
sud, de la Nouvelle Guinée de l'ouest et de l'Océanie. Le groupe malayo-
polynésien occidental comprend toutes les langues philippines, toutes les
langues austronésiennes de l'Asie du Sud-est continentale, le malagasy, les
30

langues de Guam et Palau (en Micronésie), les langues de Sumatra, Java,


Bornéo, Celebes, Bali, Lombok et de la partie ouest de Sumbawa. Mais il
s'agit ici d'une catégorie résiduelle plutôt que d'une branche génétique :
tandis que les autres branches sont caractérisées par des innovations
linguistiques communes à tous leurs membres, les langues malayo-
polynésiennes occidentales n'ont en réalité pas encore été caractérisées et
manquent d'une telle innovation. Il n'est pas du tout exclu que les langues
qualifiées comme étant malayo-polynésiennes occidentales appartiennent
en réalité à des branches séparées.
La classification de Blust (dont on trouve une représentation grahique
dans Blust 1987 : 31) est en grande partie parallèle à celle faite
antérieurement par Dahl (1977a : 127-8). Dahl divise les langues austronésiennes en
une branche taiwanaise (austronésien du nord) et une branche non-
taiwanaise. La dernière est sous-divisée en une branche océanique
(austronésien de l'est) et en une branche qui comprend toutes les autres langues
(austronésien de l'ouest).

austronésien commun

austronésien du nord langues non-taiwanaises

austronésien de l'ouest austronésien de l'est


(autres langues austronésiennes langues océaniennes

D'autres classifications (comme celle d'Haudricourt 1965 : 15) ne


diffèrent qu'en détail de celle de Blust et de Dahl, excepté pour celle de Dyen
(1965). Dyen se base sur des données purement lexicostatistiques et divise
les langues austronésiennes en 40 sous-divisions : presque toutes les
langues des Philippines, de l'Indonésie, de Madagascar, de Mélanésie
Orientale, de Polynésie et d'Asie du Sud-Est continentale appartiennent à un
seul groupe, tandis que les autres 39 groupes sont l'enggano (de l'île du
même nom sur la côte occidentale de Sumatra), l'atayal et de nombreux
groupes moluquois et ouest-mélanésiens.
31

3. Une comparaison des langues austronésiennes


La ressemblance entre les langues austronésiennes est parfois assez
frappante pour ceux qui ont parcouru le monde austronésien. Néanmoins, les
raisons de cette ressemblance n'ont pas toujours à faire avec la parenté
étroite entre les langues en question. D'abord, les premiers voyageurs
européens ont attribué beaucoup d'attention aux similitudes entre le malais et
les langues polynésiennes, ou entre le malais et des langues qui ont subi
une forte influence malaise, tandis qu'ils ne faisaient guère autant de
comparaisons, disons, entre le cam et une des langues des Nouvelles Hébrides,
ou entre l'atayal et le kisar (aux Moluques). Dans les derniers cas il faut
une étude de linguistique comparée pour voir la relation. La ressemblance
entre le malais et les langues polynésiennes, par exemple, est largement
due au fait que dans certains cas les phonologies de ces langues sont
relativement conservatrices, ce qui fait que les sons et les mots hérités de l'aus-
tronésien commun n'ont parfois pas trop changé. Beaucoup de
ressemblances entre les langues indonésiennes ou philippines et le malais sont dues
à l'influence malaise dans le monde sud-est asiatique, et à l'influence
convergente que le vocabulaire de toutes ces langues a subi du sanskrit, du
tamoul, du javanais, du persan, de l'arabe et des langues européennes
(portugais, espagnol, néerlandais, anglais). Cette influence convergente
passait souvent par l'intermédiaire du malais ou du javanais. Que le malais et
le javanais aient joué le même rôle intermédiaire dans le cas du malagasy
est évident, par exemple, du fait que quasi tous les emprunts sanskrits en
malagasy figurent aussi dans le malais ou le javanais (Dahl 1951 : 98).
Mais quelles que soient les raisons des ressemblances les plus
frappantes entre les langues austronésiennes, il est bien évident de la comparaison
d'une sélection de leur vocabulaire de base que ces langues ont une source
commune. Les listes lexicales comparées présentées dans le tableau
suivant montrent les correspondances phonologiques régulières entre treize
langues (2) qui appartiennent à des sous-divisions diverses de la famille aus-
tronésienne. Notez que la liste paiwanaise ressemble plus à celle de l'aus-
tronésien commun qu'à celles des autre langues : les langues taiwanaises
ont maintenu quelques distinctions phonologiques qui ont disparu ailleurs,
et qui rangent les langues taiwanaises à part des autres langues
austronésiennes (voir § 2). Par exemple, le paiwan réalise le phonème *S de l'aus-
tronésien commun comme s, tandis que les langues hors du Taiwan (les
langues malayo-polynésiennes) le réalisent comme h, ou bien l'ont perdu. Notez
aussi la grande ressemblance entre le maori et le hawaiien, ce qui
s'explique par le fait que ce sont tous deux des langues est-polynésiennes. Enfin,
le malagasy et le maanyan sont issus d'une même sous-division
linguistique, ce qui devient apparent par les développements phonologiques com-
austronésien français malagasy maanyan malais javanais
commun
DuSa deux roa rueh dua
telu
y - telu
V,
ro
trois telo telo
Sepat quatre efatra epat empat pat
lima cinq dimy dime lima lima
Câlina oreille tadiny W - telina -
MaCa œil (maso) (2) mate mata màtà
CuqelaN os taolana Ta'ulan tulan -
Sapuy feu afo apui api api
batu pierre vato watu batu watu
quZaN pluie orana uran hujan udan
baseq humide - - basah wasuh (3)
baqeRu nouveau vao <4> wa?u(4> baharu wau(4)
Zalan chemin lalana lalan jalan dalan
kaSiw bois; arbre hazo kayu kayu kayu
laniC ciel lanitra lanit lanit lanit
ina mère reny (5> ineh - -
ama père - amah _ ràmà(5)
[Su]aji cadet razandry (5> andi adi? <5> ari-ari <6)
CaquN an taona ta?un tahun taun
aku je, moi iz-aho aku aku aku
Notes
1. Tadiny «trou de l'oreille».
2. Maso est emprunté du swahili (comparez swahili macho «yeux»).
3. Javanais wasuh «laver»; toba batak baso «qui sent le renfermé».
4. Malagasy vao, maanyan wa?u, javanais wau «récemment».
5. Les termes de parenté ont souvent un affîxe : en paiwan k-ina et k-ama ont k-. Le malais adi9 a un suffixe
prêtre (catholique)» < +ra-ama ), malagasy reny «mère» < +ra-ine ), razandry «cadet» < +ra-i-andry ) ont
6. Ari-ari «placenta».
7. Forme préfixée.
austronésien français cam bugis tagalog leti sungkun
commun (Moluques) (Nord-ou
de Borné
DuSa deux twa dua dalawâ wo-rua dueh
v
telu trois klow tatlô wo-telu taluh
yeppa?
tellu
Sepat quatre pa? âpat wo-ata empat
lima limu' lima lima lima <3) imeh
cinq
Câlina oreille - talline? W taîna tnina -
maCa oeil muta mata mata mata -
CuqelaN os talan - - - tulakn
Sapuy feu apuy, puy api apôy uai apoy
batu pierre patow batu batô watu batu?
quZaN pluie haçan uren ulân utna ujatn
baqeRu nouveau pirow baru bâgo waruaru ba?oh
Zalan chemin çalan lalen daân talla alatn
kaSiw bois; arbre kayow k-aju kâhoy ai kayuh
laniC ciel lani? lani? lânit lianti -
ina mère inu' ina fna ina sine?
ama père amu' ama amâ ama sama?
[Su]aji cadet atey anri - - siditn
CaquN an thun taun taon - -
aku je, moi kow -ku <2> akô au aku?
Notes
1. Talline?
y «entendre» (ancien bugis).
2. Forme suffixée.
3. Leti lima <<main» (= qui a cinq doigts).
34

muns qu'ils ont subis. La sous-division dont le malagasy et le maanyan font


partie est le groupe sud-est-barito, dont les membres se trouvent dans le
sud de Bornéo, au nord de la ville de Banjarmasin. Pour des exemples de
la parenté étroite du malagasy avec les langues sud-est-barito, voir § 5.1.

4. Le pays d'origine des langues austronésiennes


4.1. Hypothèses sur l'origine de l'austronésien
Bien que la connaissance des langues austronésiennes laisse beaucoup
à désirer, il est néanmoins possible de faire des déductions concernant le
lieu d'origine de leur langue ancestrale sur la base de leur vocabulaire
commun. Le premier à avoir envisagé une telle étude fut l'orientaliste Kern
qui essaya (1889) de présenter une image de la société et de l'habitat des
anciens Austronésiens en comparant des termes concernant l'organisation
sociale, la culture matérielle et spirituelle et le milieu physique. L'étude
de Kern montre que les anciens Austronésiens ont dû connaître des
plantes tropicales typiques comme la canne à sucre, le cocotier, le bananier et
le bambou. Des termes très répandus comme ceux pour le requin, la poulpe,
la tortue de mer et la langouste ou la crevette indiquent que le pays
d'origine des Austronésiens a dû se trouver très proche de la côte. En plus, les
indicateurs de direction communs à une grande partie des langues
austronésiennes sont les termes *laSud «vers la mer» et *Daya «vers l'intérieur»,
ce qui, selon Kern, veut dire que le pays d'origine a dû être une terre ferme
et non pas une île. Le mot pour riz cru, *bëRas, ressemble au tibétain
bras (3) (même signification), ce que Kern interprétait comme une
indication que le pays d'origine se trouvait sur le continent sud-est-asiatique et
touchait au territoire du (pré-)tibétain, d'où l'emprunt de bras dans ce
dernier. Par la combinaison de tous ces facteurs, Kern concluait que le pays
d'origine devait être en Indochine, parce que c'est là qu'on trouve un
terrain continental et tropical avec une côte assez allongée. Kern a effectué
ses recherches à une époque où on n'avait que des idées vagues sur les
interrelations des langues austronésiennes, mais cela ne l'a pas empêché de faire
quelques déductions qui sont restées valables jusqu'à aujourd'hui.
Néanmoins, sa conclusion selon laquelle l'Indochine a dû être le pays
d'origine est dépassée et les austronésianistes actuels préfèrent baser leurs
théories sur la recherche de la région où la diversité linguistique est
relativement la plus grande (tant que ces théories s'accordent avec les données
préhistoriques et archéologiques, bien entendu). Les lieux où cette
diversité est la plus grande sont Taiwan et la Nouvelle Guinée. A Taiwan se
trouvent des langues qui appartiennent aux embranchements les plus anciens
de la famille austronésienne (§ 2), et beaucoup d'austronésianistes
considèrent Taiwan ou la côte du Sud de la Chine comme le pays d'origine de
35

l'austronésien commun. La diversité linguistique critique se trouve à


Taiwan, tandis que des recherches archéologiques indiquent qu'il y avait des
implantations austronésiennes à Hainan (Chang, Grace et Solheim 1964;
Bellwood 1985). A Hainan, enfin, il existe quelques langues (li, kadai) qui
ont peut-être encore un lien lointain avec la famille austronésienne
(Benedict 1975). Un autre point de vue est celui de Dyen, qui conclut sur la base
de ses données lexicostatistiques que le pays d'origine doit être la Nouvelle
Guinée (Dyen 1965). Mais cette conclusion est difficile à maintenir : bien
qu'on trouve en Nouvelle Guinée une diversité de langues qui est presque
unique dans le monde entier, les langues austronésiennes parmi elles
appartiennent toutes à la même sous-division selon les critères qualitatifs
présentés par d'autres austronésianistes (§ 2). La diversité linguistique de la
Nouvelle Guinée s'explique en partie par un contact intensif de locuteurs
de langues austronésiennes avec des locuteurs de langues papoues. Les
langues du littoral de Nouvelle Guinée sont souvent austronésiennes, tandis
que les langues de l'intérieur de l'île appartiennent à la famille papoue (4).
D'autre part, ces langues austronésiennes littorales ont beaucoup en
commun avec les langues papoues. Par conséquent, il est vraisemblable que la
Nouvelle Guinée a été d'abord non-austronésienne, et que les locuteurs de
langues austronésiennes sont venus plus tard; ces derniers ont
probablement diversifié leur(s) parler(s) par un contact intensif avec les habitants
autochtones. Un tel cours d'événements est plus probable et fournit une
meilleure explication de la diversité linguistique de la région que
l'hypothèse de Dyen (Ray 1926; cf. aussi le commentaire de Wurm dans Chang,
Grace et Solheim 1964).

Jf.2 Le pays d'origine du Malagasy


Outre le lieu d'origine de l'austronésien commun, on peut aussi se
demander d'où vient chacune des langues et des sous-divisions austronésiennes
après leur divergence de l'austronésien commun. Sauf pour les migrations
des Polynésiens et le pays d'origine des Malgaches et des Malais, il n'y a
pas de théories concernant les migrations majeures dans la région
austronésienne. Au sujet des migrations polynésiennes il y eut des polémiques
assez vives menées par Sharp (1963), qui supposait que les migrations vers
la Polynésie Orientale (par exemple Hawaï, les Iles marquises, les Iles de
la Société, l'Ile de Pâques, et aussi la Nouvelle Zélande) avaient été le résulat
de pertes de chemin et de navigations déroutées, et (entre autres) par Suggs
(1960), qui croyait que les migrations polynésiennes avaient été en partie
volontaires, attribuant par là plus de valeur aux techniques et
connaissances en navigation des Polynésiens. Une évaluation de tous ces points de
vue et un traitement multidisciplinaire du problème se trouvent dans
Bellwood (1978).
36

Quant au lieu d'origine de la langue malaise, selon Kern (1889), il se


trouverait en Malaisie péninsulaire, mais ces arguments ne s'accordent plus avec
les données linguistiques, qui suggéreraient plutôt le Bornéo Occidental
(Adelaar 1985).
La migration des Malgaches a depuis longtemps occupé l'esprit des
savants. La ressemblance entre le malagasy et les langues de l'Asie du Sud-
est était déjà connue des premiers navigateurs européens qui parcoururent
l'Océan Indien en route vers l'Insulinde : Frederik de Houtman publia en
1603 un vocabulaire malagasy-malais-néerlandais. A mesure qu'on
commençait à plus s'intéresser à l'étude comparée des langues austronésiennes, on
développa aussi des idées sur le malagasy et les langues austronésiennes
avec lesquelles il est le plus étroitement apparenté. Le linguiste van der
Tuuk (1865) croyait que le toba batak était plus proche du malagasy, entre
autres à cause d'un développement phonétique parallèle entre les deux
langues, notamment le changement de l'austronésien commun *k en h (cf. *aku
«je, moi», qui est devenu iz/aho en malagasy, et ahu en toba batak). Mais
en malagasy, le changement de *k à h est dû au substrat bantou et fait
partie d'un changement plus général (voir 5.1), ce qui ne s'applique pas au
cas du toba batak; d'ailleurs, dans le territoire batak il n'a affecté que
quelques dialectes (notamment ceux du sud et de l'est) et il doit être un
développement postérieur à la divergence des dialectes batak. Comme les
dialectes batak sont de loin plus proches l'un de l'autre que l'un d'eux du
malagasy, il est évident que le changement de *k à h s'est effectué
indépendamment dans les deux langues.
Ferrand (1932) voyait beaucoup de parallèles entre les inscriptions en
vieux malais de Sumatra Sud (près de Palembang, provenant du VIIe
siècle) et le malagasy. Il supposait que ce vieux malais était la langue ances-
trale du malagasy, mais ses arguments manquent de systématique et ne
sont pas convaincants. En plus, il a omis de noter que quelques lignes d'une
des inscriptions était dans une autre langue. Cette langue, il est vrai,
semble avoir beaucoup en commun avec le malagasy (pour autant que ces
quelques lignes permettent de le juger) (Dahl 1951 : 158-9), mais cela
n'empêche pas qu'en général les observations de Ferrand soient inexactes. A part
les théories de van der Tuuk et de Ferrand, on peut encore citer celle de
Codrington (1882),. qui croyait en une origine mélanésienne du malagasy.
L'allemand W. Aichele de l'université d'Hambourg fut le premier à
proposer une affinité plus étroite entre le malagasy et le maanyan, une langue
de la région barito à Bornéo méridional (Dahl 1951 : 23). Son idée a été
développée d'une façon convaincante par Dahl dans sa thèse (Dahl 1951).
Dahl estime l'époque où les ancêtres des Malgaches quittèrent Bornéo Sud
37

au cinquième siècle; il arrive à cette estimation de la façon suivante : il y


a quelques mots sanscrits dans le malagasy et les inscriptions sanscrites
les plus anciennes en Indonésie datent du cinquième siècle. Mais les
langues de l'Indonésie ont beaucoup plus de vocabulaire de provenance
sanscrite et Dahl conclut que l'immigration des pré-Malgaches dut avoir eu lieu
après l'introduction du sanscrit en Indonésie, mais avant qu'il ne fût bien
établi, donc pas trop longtemps après son introduction. Dans quelle mesure
il faut attribuer de la valeur à l'influence sanscrite pour dater
l'immigration est difficile à dire : il est, par exemple, très vraisemblable que l'influence
sanscrite dans le malagasy soit entrée par l'intermédiaire du malais (et peut-
être du javanais, voir § 4.2). Il y a donc autant de raison à considérer
l'époque de l'introduction de l'influence malaise comme critère pour dater
l'immigration des (pré-)Malgaches (Adelaar à paraître).
Dans sa thèse et dans ses écrits plus récents, Dahl n'a jamais traité la
possibilité d'une influence des langues indonésiennes sur le malagasy
postérieure à l'immigration. Néanmoins, il est clair que l'influence malaise a
dû continuer au moins jusqu'au douzième siècle. Un des mots dialectaux
empruntés au malais, l'antaimoro sombily «action d'abattre suivant le rite
musulman» (Dahl 1951 : 319), est un terme musulman, ce qui indique que
les contacts entre Madagascar et l'Asie du Sud-est ont dû continuer au moins
jusqu'à l'époque où l'Islam fut introduit en Indonésie (la preuve la plus
ancienne de la présence de l'Islam en Indonésie date de la fin du XIe siècle
(Adelaar à paraître). Une telle continuation de contacts est d'ailleurs très
vraisemblable si l'on se rend compte que les Malais naviguaient
fréquemment en suivant la route commerciale maritime du littoral de l'Océan Indien
et que Madagascar et le Mozambique étaient à l'extrémité occidentale de
cette route. De tels contacts sont d'ailleurs aussi mentionnés dans les
sources arabes et portugaises (Dahl 1951 : 357-66).
En faisant une étude anthropologique des Maanyan, Hudson s'est occupé
des langues de l'amont du Barito et il a donné une classification basée sur
une comparaison phonétique et lexicostatistique de ses données
linguistiques (1967). Dahl (1977) améliore la classification de Hudson et utilise ses
données pour réétudier la position du malagasy. La conclusion de Dahl est
que le malagasy est le plus proche des langues sud-est-barito (dont font
partie, selon Dahl, le maanyan, le samihim, le dusun malang et le dusun witu),
mais qu'il est encore impossible d'établir une apparenté plus étroite entre
le malagasy et un des membres de ce groupe.
A part Dahl, Vérin, Kottack et Gorlin (1969) ont également abordé la
question. Ils se basent sur des données glottochronologiques pour calculer
les dates de la divergence des dialectes malagasy. Selon leur étude, les proto-
Malgaches seraient arrivés à Madagascar vers le début de notre ère et
auraient divergé dès lors en trois groupes, dont les Tankarana et les Tsi-
CARTE DE BORNÉO

Sondokan
MER DE CHINE

Ponhonok

RÉGION
DES PARLERS
VILLE DE BANJARMASIN SUD-EST-BAR ITO
39

mihety d'aujourd'hui représentent deux, et tous les autres dialectes un


troisième. Mais il faut bien se rendre compte de la signification relative de la
glottochronologie (et de la lexicostatistique); les résultats en sont toujours
inférieurs à ceux des méthodes qualitatives et au mieux ne peuvent être
considérés que comme préliminaires.

5. Quelques aspects de l'histoire linguistique du malagasy

5.1 L'origine bornéenne du malagasy


Un coup d'oeil sur le vocabulaire du malagasy et le groupe sud-est-barito
(§ 3) nous donne l'impression que ces langues sont étroitement
apparentées. Cette impression devient encore plus forte si l'on se rend compte que
beaucoup de différences phonologiques entre le malagasy et ce groupe sont
dues au substrat bantou qui a causé la fricativisation de certaines
consonnes (p.e. +w >■ v, +p >•/, +y > z, +k, +g > h) et l'acquisition de voyelles
finales sourdes en malagasy (Dahl 1954). Mais il faut bien noter que ce ne sont
pas les mots en soi présentés dans la liste § 3 qui forment la preuve d'une
parenté plus étroite entre le malagasy et le groupe sud-est-barito, étant
donné que ces mots se trouvent également dans les autres langues de la
liste. Ce sont les développements phonologiques parallèles réalisés
exclusivement dans les mots de ces deux (groupes de) langues qui procurent un
critère. Il est assez important de faire cette remarque, parce qu'il y a eu
beaucoup de théories sur la parenté du malagasy avec d'autres langues aus-
tronésiennes, et que la plupart de ces théories ont été basées sur des
ressemblances superficielles. Ce n'est ni difficile, ni pertinent de trouver des
ressemblances entre le malagasy et une autre langue austronésienne de
n'importe quelle région. S'il existe des ressemblances entre plusieurs
langues qui pourraient indiquer une parenté plus étroite, il faut d'abord
vérifier si ces' ressemblances sont vraiment comparables, c'est-à-dire si elles
ont pour cause les mêmes phénomènes et, par conséquent, si elles
s'appliquent dans les mêmes cas et sous les mêmes conditions. A part cela, il faut
distinguer rétentions et innovations. Une rétention est un trait
linguistique qui est hérité de la langue ancestrale. Elle n'est pas importante pour
la classification, parce qu'elle pourrait en principe être maintenue dans
chaque membre de la famille linguistique. Une innovation est un trait
linguistique qui a été introduit à un moment donné du développement d'une
langue après sa divergence de la langue ancestrale. Si quelques membres d'une
famille linguistique ont une innovation en commun, mais qui n'est pas
partagée par les autres membres (donc, si elle est exclusive), on est en
présence d'un argument en faveur d'une parenté plus étroite entre eux. Dans
le cas du malagasy et des langues sud-est-barito, il y a des changements
phonologiques, lexicaux et sémantiques qui sont bien spécifiques et exclu-
40

sifs. A part des changements phonologiques qui sont très généraux dans
les langues austronésiennes (5) il y a par exemple le changement de *1 à
d et de *t à sud-est-barito s et malagasy ts devant i, le changement de *s
en sud-est-barito h et sa disparition totale en malagasy, ou l'assimilation
régressive à l d'un +r (qui, à son tour, vient de *Z ou *D). Comparez :
austronésien commun *1 devant *i devient malagasy et sud-est-Barito d :

austronésien commun malagasy barito du sud-est (maanyan)

*kulit «peau» hoditra «id.» kudit «id.»


"lima «cinq» dimy «id.» dime «id.»
*bdi «acheter» widi «id.» vidi «id.»
*CaliS «corde» tady «id.» tadi «id.»
*piliq «choisir» jidy «id.» pidi «id.»
*kali «creuser» hady «id.» kadi «id.»

austronésien commun *t devant *i devient malagasy ts, sud-est-Barito s :

austronésien commun malagasy sud-est-barito (maanyan)

*butiR «grain» votsy «verrue» wusi «id.»


*timpun «cueillir» tsimpona «id.» simpon «id.»
*punti «banane» fontsy «espèce de banane»
(ngaju dayak et ailleurs à
Bornéo :) bitik «fourmi» vitsika «id.» wisik «id.»
*t-in-aqi «entrailles» tsinai «id.» sanai ^ «id.»

austronésien commun *s devient souvent h en sud-est-barito, et a souvent


disparu en malagasy :

austronésien commun malagasy sud-est barito (maanyan)

(batak sune, malais sunay


ngaju dayak sunei «fleuve») ony «id.» hunei «id.»
•pusej «nombril» foitra «id.» puhet «id.»
*saluR «eaux» alo «transverser, plonger» haloi «verser»
*qasen «respirations» aina «vie, respiration» ahen «âme»
"besay «pagaie» sakalava ve «pagayer» wehei «pagaie»
*pusuq «coeur» fo «id.» lim/poho «rate»
*lesun «mortier» laona ^ lehun «id.»
*sampay «atteindre» ampy «complet, assez» hampe «arriver, complet,
jusqu'à, pour que»

+r (provenant de *Z ou *D) devient malagasy et sud-est-barito l par une


assimilation régressive, si la consonne suivante est également l; donc,
d'abord *Z et *D devenaient +r, et puis +r est devenu l par le l suivant :
41

austronésien commun malagasy sud-est-barito (maanyan)

•Dalem «dans, profond» > +ralem > lalina«profond» lalem «id.»


•Zalan «chemin, route» > +ralan > lalana «id.» lalan «id.»
*Dilaq «langue» > +rela > lela «id.» lela «id.»

Au niveau lexical, les mots critiques sont ceux qui n'existent que dans
deux langues comparées, et qui ont remplacé ou repoussé un terme
original qui était hérité de l'austronésien commun. Comparez les innovations
suivantes qui ne sont pas attestées hors de Madagascar et la région barito :

austronésien commun malagasy sud-est-barito (maanyan)

*Rebi «soir» hariva «id.» kariwe «id.»


*mi(n)ak «huile» ilo «id.» ilau «id.»
*Zauq «loin» lavitra «id.» lawit «id.»
*Datan «arriver» avy «id.» hawi «id.»
*e(n)bun «nuage» rahona «id.» rakon «id.»
*esa «un» erana «id.» eran «id.»
*takaw «voler» alatra «vol» alap «voler»
*amin, *qabis «tout» tontolo «id.» ka/tantulo @) «tous»
"iSekan «poisson» hena «viande», ancien besti- kenah «poisson»
misaraka :) «poisson»
*qulun/an «oreiller» ondana «id.» ondan «id.»

Quelques innovations lexicales qui sont répandues hors de la région sud-


est-barito, mais qui ne sont pas attestées hors de Bornéo (ces innovations
indiquent au moins que le pays d'origine du malagasy a été à Bornéo) :

austronésien commun malagasy bornéen (maanyan)

*kawil «hameçon» vintana «id.» wintan «id.»


*siDem «fourmi» vitsika «id.» wisik «id.»
*qiDup «vivre» velona «vivant» welum «id.»
•namuk «moustique» mamo (forme dialectal) «id.» mamo «id.»
•tanaq «milieu, mi-» an/ivo «au milieu» ma/iwo «moitié»
*zu(n)kun «barque» lakana «id.» ngaju dayak rankan, iban @\
lankan «pirogue» kapuas,
dohoi, murung, baamang
*Semay «riz cuit» vary «id.» bari? «id.»

N.B. 1. Il y a des formes apparentées à velona/welum hors de Bornéo, mais elles ont un tout
autre sens (cf. malais belum «pas encore», et acihais, au nord de Sumatra, lom «encore»).
2. Il se peut que mamo soit dérivé de * nnamuk par une assimilation régressive de *nà m,
mais dans ce cas il reste à expliquer la chute irrégulière de *k.
3. Le malagasy et les langues sud-est-barito ont aussi une forme de "tenaq, mais elle a changé
de sens, voir ci-dessous.
42

Au niveau sémantique, les mots critiques sont ceux qui, bien que
développés à partir de l'austronésien commun, ont changé de signification dans
les langues comparées. Comparez les innovations sémantiques suivantes,
qui sont typiques pour le malagasy et pour les langues de la région barito :

austronésien commun malagasy sud-est-barito (maanyan)

*bulu «poil, plume» (*buSSc volo «cheveu, poil, plume» wulu «id.»
«cheveu»)
*tenaq «milieu; mi-» tena «corps» tena «id.»
saluR «eaux» alo «transvaser, verser» haloi «verser»
*isi «contenu» man-isi «mettre, placer» isi «mettre»
*baq, *ba[q]baq «en bas» a/va «en aval» halwa «id.»

5.2 L'influence malaise en malagasy


Les ressemblances entre les langues sud-est-barito et le malagasy qui
sont aussi partagées par d'autres langues austronésiennes ne sont pas
pertinentes pour démontrer l'étroitesse de leur parenté. Ces ressemblances
peuvent être héritées de l'austronésien commun, mais elles peuvent aussi
être empruntées. Bien que beaucoup de linguistes comparatifs traitent le
malagasy comme une langue qui a évolué en isolement presque absolu des
autres langues austronésiennes (et qui ont jusqu'à présent hésité à
expliquer certains termes malagasy comme des emprunts), il est évident que
le malagasy a subi l'influence d'autres langues austronésiennes, et ceci
d'ailleurs aussi bien avant qu'après l'immigration de ses locuteurs. Ces autres
langues sont au moins le malais et (directement ou par l'intermédiaire du
malais) le javanais (Adelaar à paraître). Comparez les paires de mots
suivantes, dont le membre malagasy a été emprunté du malais :

malais malagasy

shnbalih «tuer rituellement» sombily «abattre suivant le rite musulman»


(forme taimoro, Dahl 1951 : 319)
tërnak, teranak «bétail; oran - autochtone taranaka «descendants, postérité, race qui
d'une certaine région» vient d'une même souche» (se dit des hommes,
animaux, plantes)
karat besi «rouille» harafesina «rouille»
landas «un bloc solide qu'on utilise pour faire landaizana «enclume»
du travail dur», et landas-an «planche à
découper; enclume»
parapara «rayon, étagère (par-dessus le feu farafara «lit (la boiserie des lits)»
où on garde les casseroles)»
bodoh «stupide» bodo «infantile»
43

cupin «morceau déchiré de quelque chose; sofina «oreille»


lobe de l'oreille»
buah betis «gras du mollet» voavitsy «id.»
timur-laut «Nord-est» tsimilotru vent du Nord» (dialecte betsimisa-
raka, Dalmond)
barat-daya «Sud-ouest» (anghi) varatraza «vent du Sud» (dialecte bet-
simisaraka, Dalmond)
rantaw «rivage, ligne droite d'une rivière; ranto «commercer, trafiquer dans un pays
longer la côte, se rendre à l'étranger (pour lointain, aller chercher quelque chose au loin;
gagner sa vie)» produit de ce commerce»
rusak «détruit» rotsaka «verser de haut en bas, descendre,
dégringoler, glisser sur une pente»
tingi «haut» tsingy «sommets des montagnes, des pics»

II est très invraisemblable que les membres malagasy des paires


lexicales données ci-dessus aient été héritées : leurs développements
phonologiques et sémantiques empêchent cette conclusion. Leur développement
phonologique est différent de ce qu'on trouve dans les racines qui sont
indubitablement héritées et leur sens est souvent assez semblable à celui du malais.
Mais les mots malais consistent parfois en différents morphèmes qui
contribuent tous au sens final du mot, ou font partie d'une taxonomie
sémantique bien définie, ou bien encore ils réfèrent à des notions culturelles
spécifiques au monde malais. Il est donc très probable que les membres
malagasy des paires lexicales ci-dessus soient empruntés du malais. shnbUih
vient de l'arabe Msmi'llahi «au Nom de Dieu» (une formule qui, entre autres,
doit être énoncée quand on abat un animal selon le rite musulman (10). Som-
bily s'explique facilement comme forme malgachisée de shnbUih, avec
lequel il partage le même changement sémantique spécifique vis-à-vis de
la formule originelle, tandis que son emprunt direct de l'arabe est très
invraisemblable. tèr(a)nak est à l'origine une forme passive du verbe tièr-anak
«enfanter, avoir des enfants». Para-para est une reduplication de para
(d'autres dialectes malais ont parfois une forme non-doublée ayant le même
sens), karat bèsi, buah bUis, timur-laut et barat-daya sont des composés :
buah bUis est le dépendant de tulan bUis «tibia», timur «Est» et barat
«Ouest» sont originellement les noms des vents de mousson, tandis que laut
«mer» et -daya (qui ne paraît pas isolé) sont originellement des indicateurs
de direction («vers la mer» et «vers l'intérieur» respectivement), landasan
est une forme dérivée de la base landas et le sens «enclume» n'est qu'une
application spécifique du sens plus général de «base ferme, bloc solide». En
plus, l'agglomérat -nd- en landaizana est irrégulier (on s'attendrait au
malagasy -ndr- correspondant au malais -nd-). Tingi a remplacé l'austronésien
commun *q(ai)(N)baw «haut» et est assez particulier au malais.
44

Tsi-ngy, avec un sens plus spécifique «sommet» montre un changement


phonologique irrégulier : *ng et *nk deviennent régulièrement k en malagasy
(et restent ng, nk en malais). Le b et le d du malais correspondent
régulièrement au malagasy v et rltr respectivement, et le développement
phonologique du malagasy bodo est donc irrégulier. Cupin «lobe de l'oreille» est
un usage elliptique de cupin Mina (Mina «oreille»; comparez cupin hidun
«narine», où hidun veut dire «nez»); sofina a le sens dérivé du malais cupin.
Malais rantaw «rivage, ligne droite d'une rivière» a livré la dérivation mè-
rantaw avec la connotation de «longer la côte, aller à l'étranger, voyager
(pour faire du commerce)», après que longer la côte et émigrer pour gagner
sa vie fut devenu un phénomène socio-culturel à Sumatra (surtout chez les
Minangkabau, Acihais et Malais). Le malagasy ranto n'a que le sens dérivé.
rusak et rotsaka sont ultimement empruntés de l'ancien javanais, où l'on
trouve rug (rug) et sak. Le ts dans rotsaka témoigne encore de
l'agglomérat consonantique du composé originel (c'est-à-dire l'ancien javanais
rug + sak), comme le fait le sundanais avec ks dans ruksak «démoli».
Rotsaka montre que le malagasy a subi l'influence de l'ancien javanais. Cette
influence pourrait provenir directement des contacts entre le javanais et
le malagasy, mais il est aussi possible que le mot ait d'abord été emprunté
par le malais et passé ensuite du malais en malagasy avant que le malais
n'eût simplifié l'agglomérat consonantique de rug + sak en s.

6. Le système de topicalisation dans le malagasy et dans les langues


des Philippines et des régions limitrophes
Certaines langues austronésiennes ont un système verbal où le «thème»,
la partie de la phrase qui est au premier plan dans une conversation ou dans
un texte devient le sujet de la phrase. Ce système est appelé ici le système
de «topicalisation» (n>. Le système de topicalisation se retrouve en partie
dans le choix qu'on a en français de mettre une phrase à la voix active ou
passive : dans l'un des cas l'agent de l'action est au premier plan et devient
sujet, dans l'autre cas c'est celui qui (ou ce qui) subit l'action qui est au
premier plan et devient sujet. Mais en français le choix de topicalisation est
limité à l'agent et au patient (l'objet direct), tandis qu'en malagasy et dans
les langues des Philippines, de Taiwan, de Guam et Palau, de Sabah et de
Celebes Nord, on peut aussi topicaliser d'autres parties de la phrase, soit,
au choix, la partie qui indique la personne pour qui ou contre qui (la chose
pour quoi ou contre quoi) l'action est faite, la partie qui indique le lieu où
l'action est faite, ou la partie qui indique l'instrument avec lequel l'action
est faite. La plupart des langues ont quatre formes différentes du verbe
pour topicaliser les parties de la phrase, bien qu'il y ait des langues (comme
le murut de Sabah) qui en ont cinq (Prentice 1971). Le malagasy en a trois
ou cinq, selon l'analyse linguistique qu'on applique (voir ci-dessous). Il faut
bien noter qu'il y a une différence entre topicalisation et accentuation. Un
45

système de topicalisation n'accentue pas la partie de la phrase qui est «topi-


calisée», tout comme dans la phrase française : «Ce sont les linguistes que
je ne peux pas supporter!», il y a une différence entre les linguistes, qui
est la partie accentuée, et je, qui est le sujet.
Comme il a déjà été dit auparavant, dans le système de topicalisation,
le thème d'une phrase devient sujet. Ce système se trouve dans une forme
très limitée en français, où l'on peut faire sujet deux parties de la phrase.
En anglais la possibilité de topicaliser va parfois plus loin : comparez les
phrases «he planted wheat in the field», «The wheat was planted in the field»
et «The field was planted with wheat», ou «I gave a house to my parents»,
«A house was given (by me) to my parents» et «My parents were given a
house (by me)». Mais en français et en anglais les phrases de base sont
actives, tandis que les phrases passives sont des transformations de celles-ci :
la phrase «La maison a été bâtie par moi» est une transformation de la
phrase de base «J'ai bâti la maison». Dans le système de topicalisation, au
contraire, cette hiérarchie n'existe pas : il y a quatre dérivations verbales
possibles, et l'une est aussi primaire que l'autre. Ci-dessous un exemple
emprunté à Ferrell et Stanley (1980) au sujet du système de topicalisation
en paiwan. Les quatres phrases suivantes ont la même portée : «Dans les
montagnes l'homme chasse le cochon avec une lance». Mais dans chacune
d'elles le thème est différent et devient par conséquent le sujet :

q-m-alùp a caucau tua vavuy î tua gadu tua vuluq


chasser (+ -m-) homme cochon en montagne lance

qalùp-en nua caucau a vavuy i tua gadu tua vuluq


(+ -en)

qalùp-an nua caucau rua vavuy a gadu tua vuluq


chasser (+ -an)

si-qalùp nua caucau tua vavuy i tua gadu a vuluq


chasser (+ si-)

Le verbe qalùp «chasser» est chaque fois marqué par un autre préfixe,
infixe ou suffixe. Chacun de ces affixes «désigne», pour ainsi dire, une autre
partie de la phrase comme le sujet :

-m- indique que l'agent est le sujet de la phrase,


-en indique que le patient en est le sujet,
-an indique que le lieu où l'action est faite en est le sujet,
su- indique que l'instrument avec lequel l'action est faite en est le sujet.
46

Ensuite, le paiwan a comme aide supplémentaire des prépositions


indiquant le rôle de la partie de la phrase qu'elles introduisent : a introduit le
sujet, nua introduit l'agent (à condition que celui-ci ne soit pas le sujet) et
tua introduit les autres parties de la phrase.
Les autres langues austronésiennes qui ont un système de topicalisa-
tion présentent des dérivations verbales équivalentes. Quoiqu'elles
n'emploient peut-être pas, ou pas autant, de prépositions, et quoique leurs
affixes aient peut-être des formes différentes, qu'ils n'aient pas le même
nombre, ou qu'ils indiquent comme sujet des parties de la phrase dont la
catégorie sémantique est différente de celle en paiwan, toutes ces langues
ont en commun le fait que leurs verbes transitifs ont plusieurs (d'habitude
quatre) formes dérivées, à chacune desquelles correspond une autre partie
de la phrase qui devient alors sujet.
Il est vraisemblable que le système de topicalisation a aussi fait partie
de la grammaire de l'austronésien commun, même si on ne retrouve ce
système que dans une partie des langues austronésiennes contemporaines.
En dépit du fait qu'il fait défaut dans toutes les langues exceptées celles
de Taiwan, de Sabah, de Celebes Nord, de Guam, de Palau, ou des
Philippines, les autres langues ont des systèmes qui paraissent avoir été dérivés
du système de topicalisation (Wolff 1973 et 1980, Pawley et Reid 1979).
Le malagasy n'a pas de prépositions pour indiquer les fonctions des
parties de la phrase, mais il place le sujet d'habitude à la fin de la phrase. Les
grammaires malagasy distinguent généralement trois voix (la voix active,
la voix passive et la voix «relative»). La voix relative, ou la voix circonstan-
tielle, comme certains linguistes l'ont rebaptisée (Dahl 1986), a comme sujet
la partie de la phrase qui réfère à la circonstance dans laquelle l'action a
lieu. Cette circonstance peut être le moment, la cause, la manière d'une
action. Mais elle peut aussi référer au lieu ou à l'instrument, ce qui
implique que dans un sens elle double quelques fonctions de la voix passive.
Néanmoins, même si l'on peut mettre une partie de la phrase dans les deux voix,
il y a toujours une différence de sens (Dahl 1986). Selon l'analyse
grammaticale de certains linguistes contemporains, la voix passive consiste en
réalité en trois voix : l'objectif, le locatif/référentiel et l'instrumental, chacun
avec son propre affixe (respectivement -ina, -ana et a-). Quelle que soit
l'analyse de la voix passive en malagasy moderne, il est certain que d'un
point de vue historique -ina, -ana et a- correspondent à trois dérivations
qui régissent des sujets différents dans l'austronésien commun et que la
voix circonstancielle est le résultat d'un développement récent. Comparez
les phrases suivantes (empruntées de Rajaona 1972 : 147-8) où le thème
est chaque fois différent et où il devient sujet :
47

manondraka
maN- + rondraka ny voninkazo amin'ity rano ity aho
«arroser» le(s) fleur(s) avec cette eau cette je
«j'arrose les fleurs avec cet eau»
tondrahana ny voninkazo
tondraka + -ana ny voninkazo
«les fleurs sont arrosées»
atondrako ny voninkazo ity rano ity
a- + tondraka + -ko «moi»
«cette eau est l'instrument avec lequel sont arrosées par moi les fleurs»

Dans la première phrase, le verbe manondraka consiste en maN-, le


préfixe de la voix active, et tondraka (la base verbale). Dans la deuxième phrase,
le verbe tondrahana consiste en tondraka et -ana, le suffixe de la voix
«locative»; -ana désigne que le lieu où (la place ou la chose sur laquelle) l'acte
est accompli est sujet (-ana peut aussi régir un sujet indiquant le «récipient»).
La terminaison -ka devient d'habitude -h- devant un suffixe. Dans la
troisième phrase atondrako consiste en a-, le préfixe de «l'instrumental»,
tondraka et -ko (une forme suffixée de izaho «je, moi»; a- désigne que
l'instrument ou moyen avec lequel l'acte est accompli est le sujet. Le pronom
démonstratif précède et suit le nom.
Comparez aussi les phrases suivantes (empruntées de Dahl 1951 : 222) :

manapaka
MaN- + tapaka «couper» antsy ny tody izy
«couper» couteau la corde il/elle/lui

tapahina antsy ny tody


tapaka + -ina
«la corde est coupée avec un couteau»

mamelatra tsihy ao an-trano izy


déployer natte là dans maison il/elle/lui
«elle déploie une natte dans la maison»

velarana tsihy ny trano


déployé natte la maison
«dans la maison on a déployé une natte» («la maison est l'endroit où on a déployé une natte»)

amelarana tsihy ny trano


déployé natte la maison
«c'est dans la maison qu'on a déployé une natte»

Le malagasy a donc cinq dérivations verbales qui régissent chacune un


autre sujet :
48

man- régit l'agent


-ina régit le patient
-ana régit le lieu/le récipient (celui pour qui ou à cause de qui (ce pour
quoi ou à cause de quoi) une action est faite.
a- régit l'instrument
an- -ana régit la circonstance (si man- est le préfixe qui régit l'agent; si mi-
est le préfixe qui régit l'agent, on emploie i- -ana).

Il est remarquable qu'on ne retrouve pas le système de topicalisation


dans les langues sud-est-barito : celles-ci n'ont qu'un «actif» et un «passif»,
et n'ont pas de moyens aussi directs pour transformer en sujet d'autres
thèmes. Leur système verbal est plutôt semblable à celui du malais, du
javanais et de la plupart des autres langues ouest-indonésiennes, ce qui semble
contredire une parenté étroite avec le malagasy. Mais l'explication de cette
contradiction apparente est que le système de topicalisastion, qui est une
rétention de l'austronésien commun, s'est désagrégé partout en Indonésie
occidentale sous l'influence de certaines tendances linguistiques
régionales, tandis que le malagasy, par l'émigration de ses locuteurs, n'a pas été
exposé à ces tendances, et a pu maintenir le système verbal hérité de
l'austronésien commun. Les langues de l'Indonésie occidentale et d'ailleurs dans
le monde austronésien ont souvent encore des traces (anomalies, formes
pétrifiées) d'un système de topicalisation; dans certains cas (comme celui
de l'ancien javanais par rapport au javanais moderne) on peut encore
suivre en partie les changements d'un système à l'autre (Wolff 1973).

NOTES
1. Il s'agit ici d'une quarantaine de milliers de locuteurs d'origine moluquoise.
2. Les sources utilisées pour les langues respectives sont :Dahl 1951 et Hudson 1967
(malagasy; maanyan et autres langues sud-est-barito), Engelenhoven 1986 (leti), Eringa 1984
(soundanais), Ferrell 1982 (paiwan), Gericke et Roorda 1901 (javanais), Hardeland 1859
(ngaju dayak), Thaib 1935 (minangkabau), Matthes 1874 (bugis), Moussay 1971 (cam), Pan-
ganiban 1966 (tagalog), Pukui et Elbert 1957 (hawaïen), Richards 1981 (iban), Steingass
1930 (persan), Tuuk 1861 et Warneck 1977 (toba batak), Wilkinson 1959 (malais),
Williams 1971 (maori), Zoetmulder 1982 (ancien javanais).
Les etymons de l'austronésien commun ont été empruntés de Dempwolff (1938) et ont
été modifies selon l'orthographe utilisée par Dyen, Blust et autres linguistes. En
linguistique comparée on se sert de la notation suivante : un astérisque (*) superposé à gauche
d'un mot indique que ce mot est hypothétique; » se lit comme «est devenu», et « comme
«provient de»; on emploie parfois des majuscules et des minuscules pour désigner deux
sons de la langue ancestrale assez semblables mais en opposition phonémique.
3. En réalité, le mot tibétain pour «riz» s'écrit hbras, et il est prononcé d'une toute aure façon.
4. Il n'est pas exclu que les langues papoues appartiennent à plusieurs familles linguistiques.
5. Comme ceux où l'austronésien commun *D et *Z deviennent r et *R, *S, et "q
disparaissent.
49

6. En maanyan, le changement d'une voyelle en a est régulier à l'antépénultième (Dahl 1951).


7. Le a en laona est irrégulier : on s'attendrait à un e (comme en sakalava leo même sens).
8. Voir note 6.
9. L'iban est une langue de Bornéo Ouest étroitement apparentée au malais.
10. Cf. aussi persan bismil «sacrifié, abattu», bismilï «à sacrifier , pour l'abattage». Cette
étymologie de sembelih a été proposée par Tendeloo (1901 : 160) et par Dempwolff (1937 :
45). Voir Adelaar (à paraître) pour une justification phonologique et sémantique.
11. Dans la littérature linguistique (anglophone) on emploie souvent «focus» et «focus-system»,
mais ces termes sont ambivalents pour topicalisation et accentuation.

BIBLIOGRAPHIE

Abréviations utilisées dans la liste suivante :


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Post-Scriptum
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documents 5. Paris : Institut des Langues et Civilisations orientales (Association des
Etudes de l'Océan indien).
Je publierai un compte rendu de ces livres dans le Pacific Linguistics (1989-1990).

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