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DOSSIER

Les répertoires
internationaux
de musique
Sources, littérature, iconographie, presse
es trois « R » – qui sont en fait quatre : Répertoire international des sources
L musicales (RISM) ; Répertoire international de littérature musicale (RILM) ;
Répertoire international d’iconographie musicale (RIdIM) ; Répertoire international de la presse
musicale (RIPM) – sont nés à l’initiative de l’AIBM (Association internationale des bibliothèques,
archives et centres de documentation musicaux) et de la Société internationale de musicologie
qui continuent d’assurer une tutelle scientifique sous la forme d’une commission mixte. Leur
vitalité et leur efficacité doivent beaucoup à leurs fondateurs, François Lesure, entouré d’un
groupe de musicologues et de bibliothécaires pour le RISM, Barry S. Brook pour le RILM et le
RIdIM, Robert Cohen pour le RIPM qui ont tracé les contours de chaque projet et lui ont donné
l’impulsion initiale indispensable.
Le propre de ces entreprises bi- leversements de la seconde guerre
bliographiques à très long terme (le mondiale, le Biographisch-bibliogra-
RISM a été fondé en 1952, le RILM en phisches Lexikon der Musiker und
1967) a été de s’appuyer dès que pos- Musikgelehrten (Leipzig, 1900-1904)
sible sur l’apport des nouvelles tech- qui, comme son titre l’indique, as-
Catherine Massip nologies. Dans des domaines très sortissait les biographies de chaque
différents, ils ont produit des outils compositeur d’une liste de leurs
Bibliothèque nationale de France bibliographiques qui peuvent servir œuvres avec leur localisation et la
catherine.massip@bnf.fr prioritairement aux bibliothèques Bibliographie der Musik-Sammel-
musicales, mais aussi à tous les types werke des XVI. und XVII. Jahr-
de bibliothèques de recherche. hunderts (Berlin, 1877) consacrée
aux recueils collectifs.
Lorsque le secrétariat central du
Le Répertoire international RISM fut installé à Paris (jusqu’en
des sources musicales 1970) et confié à François Lesure, il
s’engagea dans la collecte centralisée
Le Répertoire international des – sur fiches – de trois types de publi-
sources musicales (RISM) se propo- cations : les écrits sur la musique ; les
sait au moment de sa création de recueils collectifs de musique ; et les
réactualiser deux outils de travail fon- monographies musicales antérieures
damentaux dus à Robert Eitner, mais à 1800.
rendus obsolètes en raison des bou-

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vor 1800), il n’a pas été retenu pour 1990 à l’environnement PC sous la
Archiviste-paléographe, docteur en lettres et les répertoires de manuscrits médié- forme du logiciel Pikado utilisé par
sciences humaines, Catherine Massip dirige
actuellement le Département de la musique à la vaux. La rédaction de chaque volume un certain nombre d’agences natio-
Bibliothèque nationale de France. Elle a obtenu de cette série est confiée à un musi- nales. Ce logiciel de type documen-
les premiers prix en histoire de la musique et en
musicologie au Conservatoire de Paris. cologue spécialisé dans le domaine taire étant peu compatible avec le
Parmi les ouvrages qu’elle a écrits, citons La vie (exemple Christian Meyer et Michel nouvel environnement des biblio-
des musiciens de Paris au temps de Mazarin
(Picard, 1976), Le chant d’Euterpe : l’aventure de
Huglo pour les écrits théoriques, thèques – formats de type Marc et
la musique (Hervas, 1991) et L’art de bien Michel Huglo pour les manuscrits du dérivés, notamment dans les pays
chanter : Michel Lambert (Société française de processional 3, Israël Adler pour les tels que les États-Unis, la Grande-
musicologie, 1999). Elle a également dirigé
plusieurs ouvrages dans le domaine musical. sources hébraïques, etc.). Bretagne,l’Italie,la France –,un travail
de concordance/conversion a été en-
Les monographies musicales trepris notamment par l’agence nord-
antérieures à 1800 américaine située à l’université de
Écrits et recueils collectifs Harvard qui gère aussi le site web du
Un troisième type de projet de RISM.
Les deux premières bibliographies grande ampleur concerne les manus- À nouvelles technologies,nouveaux
– les écrits sur la musique,les recueils crits musicaux antérieurs à 1800. Ici, produits : le RISM diffusé initialement
collectifs de musique – devaient voir on retrouve le principe d’une orga- sous la forme de publications papier
le jour sous la signature de François nisation collective de la collecte des a opté pour le cédérom pour les ma-
Lesure. Pour les recueils collectifs, il données sous la forme de bureaux ou nuscrits musicaux (320 000 notices
avait choisi deux types de classement d’agences nationales – en France, au de 15 000 compositeurs dans la der-
différents, l’un pour le XVIIe et le Département de la musique, pro- nière version) et pour la consultation
XVIIIe siècles,par date et genre de pu- gramme de recherche conjoint avec en ligne payante. La rétroconversion
blication (musique sacrée, musique le CNRS et la Direction de la musique, du premier catalogue papier Einzel-
vocale profane,musique instrumentale de la danse, du théâtre et des spec- drucke vor 1800 est en projet.
profane), l’autre pour le XVIIIe siècle, tacles dans le cadre de l’Institut de
par ordre alphabétique des titres. recherche sur le patrimoine musical Le recensement
Ces recueils collectifs ne compor- en France (IRPMF). du patrimoine en région
taient pas de dépouillement détaillé, Chaque manuscrit étant, par dé-
mais une note de contenu général finition, unique, une plus grande Cette description générale ne doit
indiquant les noms des compositeurs sophistication est requise dans la des- pas dissimuler des différences no-
présents. L’un des projets ultérieurs cription du document, et surtout tables dans l’avancement du projet
du RISM fut de préparer et de publier dans l’identification de l’œuvre et du selon les pays. Pour la France, le re-
ces dépouillements,projet qui n’abou- compositeur. Pour pouvoir maîtriser censement du patrimoine en région,
tit pas, mais qui a été suppléé par la à terme les deux millions de notices qui a repris à la suite d’une circulaire
publication de bibliographies spécia- envisagées au début du projet en conjointe diffusée en juillet 1989
lisées complémentaires 1 ou par des fonction des estimations fournies par émanant de la Direction de la mu-
catalogues de bibliothèques ou de les principaux pays occidentaux, le sique, de la Direction du livre et de la
fonds particuliers 2. recours à l’automatisation a été de lecture et de la Bibliothèque natio-
Le principe de ces notices corres- règle dès les années 1970. Le secré- nale, suit quelques axes généraux.
pond à une constante du RISM : deux tariat central situé à Kassel, puis à
blocs d’information y sont présents, Francfort avec le soutien de l’univer- Décentralisation
l’un permettant d’identifier la pu- sité, s’est doté des logiciels adaptés
blication, mais sans recherche d’éru- aux caractéristiques du traitement Le premier axe est la décentralisa-
dition pointilleuse (pas de titre à des manuscrits et spécifiquement à tion des chargés de mission et des
coupure de ligne par exemple), celles de la saisie et de la reconnais- équipes en région financée par des
l’autre donnant toutes les localisa- sance comparative des incipits mu- crédits déconcentrés, la coordination
tions connues sous forme de sigles. sicaux. scientifique étant assurée par l’équipe
Si ce principe proche de celui des Cet environnement informatique RISM située à la Bibliothèque natio-
STC (Short Title Catalogues) s’ap- lourd a été adapté dans les années nale de France (BnF).
plique à la série A/I (Einzeldrucke
3. Un processional présente le rituel des Enquêtes
1. Voir, par exemple, pour le madrigal italien, la processions annuelles (comme les Rameaux) ou
bibliographie de Sartori-Lesure. occasionnelles (l’entrée d’un souverain) selon les
2. Voir, pour la Bibliothèque nationale de France, différents itinéraires possibles. Les chants Le second axe fut de commencer
le catalogue de la collection de Brossard, 1994. d’accompagnement sont notés. le travail dans chaque région sous la

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forme de vastes enquêtes dont cer- au fur et à mesure de sa rédaction ; duits bibliographiques demeurent
taines ont été publiées. Elles ont été un premier volume (lettres A et B) a très variés en raison de la situation
l’une des sources d’information du été publié en 1999. technique et économique variable
Répertoire des bibliothèques et insti- des nombreux partenaires : volumes
tutions françaises conservant des papier,consultation en ligne,cédérom
collections musicales en France de Le Répertoire international (à partir de 1969). Le RILM compte
Dominique Hausfater,Marie-Gabrielle de littérature musicale actuellement plus de 260000 notices
Soret et Christiane David qui vient de et s’accroît annuellement de 20000 no-
paraître par les soins du Groupe fran- Le Répertoire international de lit- tices.Tous les types de publications
çais de l’AIBM. térature musicale (RILM), bibliogra- sont retenus, livres sur la musique,
phie courante de littérature musicale, articles de périodiques, thèses, cata-
La collection est né en 1967 d’abord en concur- logues d’expositions, comptes ren-
« Patrimoine musical régional » rence avec la bibliographie allemande dus, mélanges, etc.
Bibliographie des Musikschriftums Un noyau de périodiques détermi-
Le troisième axe fut de concevoir qui a cessé de paraître en 1990. Il nés est systématiquement indexé.
la collection « Patrimoine musical ré- repose sur les mêmes principes géné- L’objet principal est la musique clas-
gional » qui répond à une charte gra- raux que le RISM : un bureau centra- sique occidentale et orientale, mais
phique.Vingt-six catalogues 4 ont été lisé à New York recueille les données une large place est accordée à d’autres
publiés depuis 1989 dont la plupart produites par les agences nationales formes de musiques et aux liens avec
avec l’aide du financement de la Di- d’autres disciplines. La qualité de l’in-
rection du livre et de la lecture 5. dexation fondée sur un thésaurus
Selon l’importance des fonds consi- rend la recherche aisée. Pour pallier
dérés, ces catalogues peuvent être le déficit de délai de parution des
consacrés soit au fonds musical d’une L’objet principal du RILM résumés,le RILM a récemment mis en
bibliothèque ou d’une autre institu- est la musique classique place une base de références biblio-
tion de conservation (conservatoire graphiques sans résumés alimentée
de musique, archives départemen- occidentale et orientale, au jour le jour.
tales, etc.), soit à plusieurs fonds ap-
partenant à plusieurs bibliothèques.
mais une large place
En principe, ils ont prioritairement est accordée Le Répertoire international
pour objet les sources musicales ma- d’iconographie musicale
nuscrites et imprimées antérieures à à d’autres formes
1 800, mais ils peuvent s’écarter sen- de musiques et aux liens Le Répertoire international d’ico-
siblement de cette limite chronolo- nographie musicale (RIdIM) ne s’est
gique dès lors qu’il s’agit de respecter avec d’autres disciplines pas encore développé sous la forme
la cohérence d’un fonds (par exemple, d’un produit bibliographique unique,
un fonds de théâtre) ou bien de mais il a largement contribué au dé-
mieux rendre compte du patrimoine veloppement de la discipline et à la
d’une région ou d’un foyer musical (en France,au Département de la mu- vitalité de la recherche. Un bulletin
(par exemple, le catalogue du fonds sique de la BnF avec la collaboration (RIdIM Newsletter) rend compte de
musical de Vichy). Pour la BnF, le cata- du Département de l’audiovisuel, du l’activité des centres d’iconographie
logue des manuscrits musicaux anté- CRAL-Centre de recherche des arts musicale existant dans différents pays.
rieurs à 1800 est disponible en ligne du langage CNRS, et des auteurs). Sur Pour la France, le Centre d’icono-
dans la base BN-Opaline (Musique) celles-ci repose une grande partie du graphie musicale fondé dans les
travail : collecte des données biblio- années 1970 par Geneviève Thibault
graphiques, choix et définition de de Chambure a réalisé, dans les mu-
4. Des catalogues complets ou partiels sont
disponibles pour les régions suivantes : l’étendue des domaines couverts, ré- sées français et dans certains fonds
l’Alsace, l’Aquitaine, l’Auvergne, la Bretagne, daction des résumés,envoi de ceux-ci de bibliothèques (Département des
la Bourgogne, le Centre, la Champagne-Ardenne,
la Franche-Comté, l’Île-de-France, le Languedoc-
à l’agence de New York qui les tra- estampes et de la photographie à la
Roussillon, la Lorraine, le Midi-Pyrénées, le Nord- duit, les indexe et les diffuse. BnF), un très important travail de
Pas-de-Calais, les Pays de la Loire, la Provence- L’évolution technologique a été recensement et d’indexation des
Alpes-Côte d’Azur et Rhône-Alpes.
5. Voir la liste de ces catalogues sur le site beaucoup plus sensible pour le RILM œuvres (peintures, estampes, sculp-
du ministère de la Culture et de la que pour le RISM : on est passé de la tures) ressortissant à l’iconographie
Communication et sur le site de la BnF :
http://www.bnf.fr rédaction de bordereaux papier à la musicale (scènes avec instruments de
http://www.culture.gouv.fr saisie en ligne sur Internet. Les pro- musique,portraits de musiciens,etc.).

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L’indexation matière doit faire appel à du XIXe siècle parus dans une quin- graphies d’artistes, compositeurs et
des corpus spécifiques : Hornbostel- zaine de pays occidentaux (Italie, interprètes, chroniques de concerts,
Sachs pour les instruments de mu- Allemagne, Espagne, France, Russie, évolution de la facture instrumentale,
sique, Iconclass pour l’iconographie. Grande-Bretagne, Pologne, etc.). vie des institutions. Il est accessible
Ce centre fait actuellement partie de depuis peu sur cédérom et en ligne 7.
l’Institut de recherche sur le patri- En conclusion, la convergence des
moine musical en France 6. besoins entre chercheurs et biblio-
Sur le plan international,un portail La convergence thèques ou centres de ressources a
d’accès aux nombreuses bases déve- des besoins entre permis le développement et la réali-
loppées localement, notamment en sation de ces outils de travail consi-
Allemagne et aux États-Unis, est en chercheurs et bibliothèques dérables sous l’égide de structures
cours de préparation. L’une des ques- ou centres de ressources associatives fortes. On peut trouver
tions non encore résolues que doit plusieurs raisons au succès de ces
affronter le RIdIM est celle des droits a permis le développement projets : large mise en commun des
qui limitent les possibilités d’incrus- efforts et des moyens sur le plan in-
ter l’image dans la notice, puis de dif-
et la réalisation ternational, adaptation rapide aux
fuser largement l’une et l’autre. de ces outils occasions de diffusion offertes par les
nouvelles technologies, adéquation
de travail considérables aux demandes de la recherche.
Le Répertoire international sous l’égide de structures
de la presse musicale Janvier 2002
associatives fortes
Le Répertoire international de la
presse musicale (RIPM), fondé par le
professeur Robert Cohen (université Avec 127 volumes d’index parus 7. À titre d’exemple, voici quelques-uns des titres
indexés : La Gazette musicale de Paris, 1834-1835,
du Maryland), propose l’indexation et 380 000 références, il est certai- La Revue et Gazette musicale de Paris, 1835-1880,
détaillée des périodiques musicaux nement l’outil le plus riche pour la Gazetta musicale di Milano, 1842-1862, La
Zarzuela, 1856-1857, The Harmonicon, 1823-1833.
recherche sur la vie musicale au Pour les références aux différents produits, voir
6. IRPMF, 2 rue de Louvois, 75002 Paris. XIXe siècle sous tous ses aspects : bio- http://www.nisc.com/MUSIC

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