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LES STRATÉGIES
DE PUBLICATION DES FRANCS-MAÇONS AU XVIIIe SIÈCLE
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Le registre de sa correspondance, sa correspondance active et passive, les annotations
qu’il porte sur les nouvelles à la main qu’il collectionne, sa fréquentation pionnière des
temples fraternels, en font une des sources les plus précieuses sur les premiers temps de
la Franc-maçonnerie en France. Sur nos conseils, l’historien américain Kenneth Loiselle
vient de se pencher sur ses amitiés dans son excellente thèse présentée à Yale : “New but
True Friends”: Freemasonry and the Culture of Male Friendship in Eighteenth-Century France.
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Jacques-Charles Lemaire, Les origines françaises de l’antimaçonnisme (1744-1797),
Bruxelles, Éd. de l’Université de Bruxelles, « Études sur le xviiie siècle. Volume hors
série », n° 2, 134 p. Inconnu de Jacques Lemaire, Philipp Friedrich Steinheil, secrétaire
de légation de Saxe, tente de réagir en publiant Le Franc-maçon dans la République ou
Rélexions apologiques sur les persécutions des francs-maçons (Francfort et Leipzig, 1746) qui
aura beaucoup d’inluence sur d’autres apologistes comme Joseph Uriot.
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Les religions et l’information (XVIe-XXIe siècles)
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« Imitons la nature, cette artiicieuse architecture de l’univers, de laquelle nous sommes et
les élèves et les spectateurs. Imitons-la, dis-je, dans la conduite de ses opérations : l’œil le
plus attentif et le plus perçant ne peut distinguer les mystères qui s’opèrent par elle dans la
naissance et dans l’accroissement d’une leur ou d’un fruit dont on admire la formation,
sans voir jouer les secrets ressorts qui l’ont fait sortir de ses trésors cachés. Qu’il en soit de
même à jamais parmi nous. Conduisons-nous de telle sorte que l’univers contemple avec
étonnement les vertus des maçons, et qu’il ignore toujours les mystérieux agents qui les
font germer » : L’École des francs-maçons, 1748.
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Il est gouverneur du ils aîné du comte Gram, Grand veneur et favori du roi de Danemark.
Il a obtenu un certiicat de la loge genevoise des Trois Mortiers où il a été initié le 14 mars
1747.
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Informer sans profaner. Les stratégies de publication des francs-maçons au XVIIIe siècle
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Les Constitutions de 1723 et de 1738.
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S’agit-il de la première traduction de Kuenen ou de celle de La Tierce publiée à Francfort
en 1742 puis à Paris en 1747 ?
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Archives privées de la famille Angliviel de La Beaumelle, document communiqué par
Hubert Bost qui a entrepris avec Claude Lauriol l’édition de la correspondance de La
Beaumelle à la Voltaire Foundation d’Oxford.
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Les religions et l’information (XVIe-XXIe siècles)
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Les processus de communication sont au cœur d’un récent appel à projets thématiques
SHS de l’Agence Nationale de la Recherche : « Formes et mutations de la communi-
cation : processus, compétences, usages », dans le cadre duquel nous développons
le programme CITERE : Circulations, territoires et réseaux en Europe de l’âge
classique aux Lumières/ Communicating Europe: Early Modern Circulations, Territories
and Networks. La Franc-maçonnerie y fait igure d’interface entre des espaces d’infor-
mation qu’elle contribue à polariser et à intégrer en un espace européen des Lumières :
espace de l’information périodique – le siècle des gazettes et des journaux – espace
réticulaire du Refuge huguenot, espace des circulations savantes et érudites, espaces
de l’information diplomatique et consulaire.
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Pierre-Yves Beaurepaire, L’Europe des francs-maçons (XVIIIe-XXIe siècle), Paris, Belin, Europe
& Histoire, 2002, 325 p. ; L’espace des francs-maçons. Une sociabilité européenne au
XVIIIe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, Histoire, 2003, 231 p. ; Le mythe de
l’Europe française. Diplomatie, culture et sociabilités au temps des Lumières, Paris, Autrement,
coll. « Mémoires », 2007, 304 p.
10
Pierre-Yves Beaurepaire, « Sociabilité maçonnique et réseaux intellectuels autour d’Ignaz
von Born, igure centrale de l’Aufklärung autrichienne », Wladimir Berelowitch et Michel
Porret (éd.), Réseaux intellectuels et sociabilité culturelle en Europe de 1760 à la Restauration,
actes du colloque de Genève-Coppet, 4-6 décembre 2003, Réseaux de l’esprit en Europe –
Des Lumières au xixe siècle – Actes du colloque international de Coppet (décembre 2003),
Genève, Droz, Collection « Recherches et rencontres », p. 31-40.
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Né en 1732, Joseph von Sonnenfels est professeur de sciences politiques à Vienne en 1763.
Sa carrière s’inscrit dans le sillage des réformes entreprises par Marie-hérèse et Gerhard
van Swieten dont il est très proche. En 1772, il devient censeur, puis en 1779 assesseur de
la Commission de censure et d’éducation. À partir de 1777, il est rédacteur en chef de l’un
des principaux organes des Lumières autrichiennes, le Wiener Realzeitung. Comme son
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Informer sans profaner. Les stratégies de publication des francs-maçons au XVIIIe siècle
également fortement investi dans cette initiative qui rencontre un réel écho
dont témoignent les lettres que reçoit de tout l’Empire Born. Lui-même fait
paraître la planche inaugurale des loges d’exercice qu’il consacre aux Mystères
des Égyptiens, saisissant l’opportunité d’un thème attractif pour combattre
mythes et charlatans. Le Journal informe également ses lecteurs de l’actualité
maçonnique des États des Habsbourg et de l’étranger. Largement difusé dans
les loges, il est complété par des recueils de travaux scientiiques menés par des
francs-maçons – qui se recrutent très largement au sein des Universités et des
Lumières administratives et techniciennes – et destinés à compenser l’absence
d’académie des sciences à Vienne. Ils paraissent sous le titre Physikalischen
Arbeiten der Einträchtigen Freunde in Wien – qui, sans faire référence à la
Franc-maçonnerie ne dissimule pas le lien avec la loge de Born, Zur wahren
Eintracht (À la véritable Harmonie) –, Travaux des amis de l’harmonie à Vienne,
trimestriel en deux volumes. Les contributions traitent aussi bien de botanique
que d’astronomie. On relève des descriptions géographiques, notamment de
la Sibérie, des travaux sur l’industrie du verre, sur le colibri, ou les fossiles.
Born cherche clairement à réunir des collaborateurs issus de tous horizons,
bien au-delà de ses propres sujets de prédilection. Avec ce double projet
éditorial, interne mais élargi à l’ensemble de l’espace maçonnique germano-
phone, externe en direction du monde académique et amateur, Ignaz von Born
articule étroitement espace maçonnique et espace public savant sans profaner la
sphère maçonnique. Il répond au projet d’un « Dictionnaire universel de tous
les arts libéraux et de toutes les sciences utiles » développé par Andrew Michael
Ramsay (1646-1743), disciple de Fénelon et continuateur du Télémaque avec
Les Voyages de Cyrus, promis à un beau succès, dans son célèbre Discours de
1737 et concrétisé par la Cyclopedia de Chambers, clairement soutenue par la
Royal Society et la Grande Loge de Londres dont le noyau dirigeant est peuplé
maître Gerhard van Swieten, Sonnenfels favorise à son tour la carrière dans les adminis-
trations d’État et notamment au sein de la Censure de jeunes intellectuels francs-maçons
– et bientôt membre des Illuminaten – issus de l’Université de Vienne et arrachés à l’orbite
jésuite : c’est le cas de l’ex-jésuite Aloys Blumauer igure marquante des lettres et des
Lumières autrichiennes. Il adhère à Zur Wahren Eintracht dès 1782, dont il devient l’année
suivante le député maître. Il préside ainsi à la destinée de l’atelier aux côtés de Born,
association que l’on retrouve aussi au sein des Illuminaten. En 1797, Sonnenfels est élevé
au titre de baron d’empire ; il devient en 1810 Président de l’Académie des Beaux-Arts.
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Les religions et l’information (XVIe-XXIe siècles)
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Comme on le sait l’Encyclopédie de Diderot – et de d’Alembert pour les premiers volumes –
est initialement conçue comme une traduction du succès éditorial de Chambers. En
revanche, malgré la légende, elle n’a pas d’origine ou de références maçonniques.
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Georg Forster, Werke, Band 14, Berlin, 1978, p. 163.
14
Georg Simmel, Sociologie et épistémologie, trad. de l’allemand par L. Gasparini, introduction
de J. Freund, Paris, PUF, 1991 ; Sociologie. Études sur les formes de la socialisation, traduction
de l’allemand par Lilyane Deroche-Gurcel, Paris, PUF, 1999 (1re éd. allemande 1908).
Lilyane Deroche-Gurcel, « La sociabilité : variations sur un thème de Simmel », in L’Année
sociologique, 1993, vol. 43, p. 159-188 ; Lilyane Deroche-Gurcel et Patrick Watier (dir.),
La Sociologie de Georg Simmel, Paris, PUF, 2002.
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Informer sans profaner. Les stratégies de publication des francs-maçons au XVIIIe siècle
l’initiation ne fait sens que pour celui qui a été reçu dans l’ordre. En réponse,
le livre maçonnique est un enjeu essentiel. D’une mémoire orale de l’ordre,
transmise d’initié à initié, on est passé à des rituels et des catéchismes écrits,
recopiés puis imprimés avec l’explosion numérique des efectifs et du nombre
de loges. La demande est très forte, au point que certaines loges comme à
Marseille dans les années 1750 ofrent aux nouveaux membres des exemplaires
de quelques-uns des écrits de divulgation les plus lus par le public profane,
où ils comprendront que « la franc-maçonnerie est une école de vertu et de
perfection morale », ce qui n’est pas sans poser un problème de fond. Le livre
maçonnique permet de formaliser les mythes et récits de fondation de l’ordre
et de difuser une mémoire commune de la Franc-maçonnerie : Discours de
Ramsay, histoire de la confraternité des francs-maçons intégrée par James
Anderson aux Constitutions de la Grande Loge dans l’édition de 1738, largement
difusées par Louis-François de La Tierce (1699-1782), intermédiaire culturel
franco-allemand majeur et pourtant somme toute méconnu, dans son Histoire,
Obligations et Statuts de la Très Vénérable Confraternité des Francs-Maçons
publiée en français à Francfort-sur-le-Main chez François Varentrapp en 1742,
rééditée, contrefaite et largement traduite. La production d’un large corpus
iconographique, essentiel dans l’information des travaux de loge puisqu’il
décrit l’ordonnancement du temple nécessaire à une tenue maçonnique
régulière, les mots de semestre et de reconnaissance, complète le dispositif. À
cette information interne, s’articule une information externe en direction du
public. Les apologies de l’ordre se multiplient, écrites par quelques-unes des
meilleures plumes maçonniques comme Joseph Uriot, qui protestent de l’inno-
cence de l’ordre, non sans résultat – dans les années 1780, le lieutenant général
de police Lenoir en est convaincu à Paris, tout comme Marie Antoinette et
sa sœur Marie Caroline reine de Naples. Les francs-maçons n’hésitent pas à
publier des relations des fêtes qu’ils donnent à l’occasion de la naissance du
Dauphin, de la conclusion de traités de paix, ou de l’inauguration des hôpitaux,
hospices et fondations charitables qu’ils ont inancés à Stockholm et Londres.
Cette politique de publication témoigne de leur quête de légitimité, complétée
par l’agrégation à l’ordre de protecteurs princiers et aristocratiques, et de leur
volonté d’aicher leur utilité publique. Après la défaite de l’amiral de Grasse
à la bataille des Saintes face à la Royal Navy, la levée de fonds que les francs-
maçons français de la loge parisienne de la Candeur projettent pour armer un
navire de ligne, Le Franc-maçon qui aurait été ofert à la Marine royale au même
titre que ceux inancés par exemple par les États de Bourgogne, ou suite aux
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Dans les fantasmes largement répandus sur les réseaux maçonniques, la fascination
qu’exercent les tuyaux et circuits occulte la réalité des échanges qui s’y insère vraiment.
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Ces derniers se considérant le plus souvent comme patriotes. Voir en dernier lieu, Philippe
Bourdin, L’Europe des « patriotes » des années 1770 à la Révolution française, Paris, PUF,
2010, 247 p.
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Jean-Pierre-Louis de Luchet, Essai sur la secte des Illuminés, Paris, 1789, p. 42-43.
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Pierre-Yves Beaurepaire
Université de Nice-Sophia Antipolis & IUF
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John Robison (1739-1805), ancien franc-maçon, Professeur d’histoire naturelle à
l’Université d’Édimbourg, secrétaire-général de la Royal Society, auteur des fameuses Proofs
of a Conspiracy against all the religions and governments of Europe, Carried on in the secret
meetings of Freemasons, Illuminati and Reading societies, collected from good authorities
(Preuves d’une conspiration contre toutes les religions et les gouvernements d’Europe fomentée
dans les assemblées secrètes des francs-maçons, illuminés et les sociétés de lecture, obtenues de
bonnes sources) en 1797.
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Adam Weishaupt, professeur à Ingolstadt, fait igure de fondateur de l’ordre des Illuminaten.
20
Jean-Joseph Mounier, De l’inluence attribuée aux philosophes, aux francs-maçons et aux
illuminés, sur la Révolution de France, Tübingen, Cotta, 1801, p. 226.