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Ndougmo, I. et Mgbwa, V. (2022). Chapitre 3.

Covid-19 et ajustement
des rythmes : rythme scolaire, rythme de vie et temps socio-professionnel
des parents. In Edongo Ntede, P.F. (Dir.). Covid 19 et numérique
éducatif : la mise à jour de la culture. Histoire des peuples et culture,
Série Education.
Auteurs :
1-MGBWA Vandelin, Ph.D. en Psychologie, Spécialité :
psychopathologie, Maître de conférences, Université de Yaoundé I,
Enseignant à L’École Normale Supérieure de Yaoundé, DAARS à la
FALSH.
2. NDOUNGMO Irène, Doctorante en Sciences de l’Éducation,
Spécialité : Enseignements Fondamentaux en Éducation, option
Psychologie de l’Education.
Titre article : Covid et ajustement des rythmes : rythme scolaire,
rythme de vie et temps socio-professionnel des parents.
MgbwaVandelin
Psycho-pathologue clinicien, enseignant à l’université de Yaoundé I
E-mail : mgbwavandelin@yahoo.fr

Ndoungmo Irène
Psychologue de l’Éducation, Université de Yaoundé I,
E-mail : irenendoungmo@gmail.com
Résumé :
L’irruption de la Covid 19 a bouleversé les rythmes de vie en général
et les rythmes scolaires en particulier qui intègrent la communauté éducative
dans son ensemble. Dans le sillage du respect des mesures barrières induites
par cette crise sanitaire, le gouvernement camerounais a introduit le système
de mi-temps dans les établissements de l’enseignement secondaire qui
implique tant les élèves que les parents. L’objectif de ce travail est de rendre
compte des niveaux d’ajustements induits par la situation de la crise sanitaire
aussi bien chez les élèves qu’au niveau socio-professionnel des parents.
Cette étude qualitative, s’appuyant sur un devis compréhensif, s'est penchée
sur l’analyse thématique séquencée à travers les contenus d’entretiens
individuels de trois parents d’élèves et de leurs enfants respectifs inscrits au
Lycée D’Ekorezock. Il en ressort que les élèves et leurs parents vivent une
véritable perturbation d’horloge. Autrement dit, les temporalités
occasionnées par les pandémies sont contraignantes et difficiles à maitriser.
A cet effet, le gouvernement doit repenser le système de mi-temps en
formant les parents sur l’environnement numérique d’apprentissage.
Concepts-clés : Covid-19, rythmes scolaires, mesures barrières,
enseignement secondaire, difficultés d’apprentissage, désynchronie.

Abstract :
The outbreak of Covid 19 has disrupted the rhythms of life in
general and school rhythms in particular, which involve the entire
educational community. In the wake of the respect of barrier measures
induced by this health crisis, the Cameroonian government introduced
the half-time system in secondary schools which involves both students
and parents. The objective of this work is to report on the levels of
adjustment induced by the health crisis situation both among students
and at the socio-professional level of parents. This qualitative study,
based on a comprehensive design, focused on a thematic analysis of the
content of individual interviews with three parents of students and their
respective children enrolled at the Lycée d'Ekorezock. The results show
that the students and their parents are experiencing a real clock
disruption. In other words, the temporalities induced by pandemics are
constraining and difficult to master. To this end, the government must
rethink the half-time system by training parents on the digital learning
environment.
Key concepts : Covid-19, school rhythms, barrier measures, secondary
education, learning difficulties, desynchrony.
INTRODUCTION
La Covid- 19 induisant de nouvelles réalités a bouleversé le village
planétaire depuis le 31 décembre 2019. La maladie est causée par le
syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS). La propagation du virus Covid-
19 a des conséquences sanitaires et humaines tant sur le plan physique,
économique que socioprofessionnel. Du 17 avril 2020 dans le monde, 2 160
207 cas confirmés et 146 088 décès ; en Afrique 13 104 cas confirmés et 616
décès (OMS, 2020). Le premier cas de Covid-19 au Cameroun est annoncé
le 06 mars 2020 et six semaines après, le pays a enregistré le grand nombre
de cas soit 1.163 cas confirmés et 42 décès en Afrique au Sud du Sahara
(MINSANTE, 2020).
Pour le PNUD (2020), la pandémie pourrait accentuer les inégalités
déjà importantes au sein de la population. Elle pourra éventuellement
conduire certains ménages, les plus vulnérables, au désinvestissement pour
faire face aux dépenses occasionnées par la pandémie. Vu que la plupart de
la population n’a pas accès à un système de protection sociale. Au-delà du
fait qu’une partie de la population ne bénéficie pas de l’accès à l’éducation
(taux d’alphabétisation à 75 % seulement), les risques de déscolarisation
pourraient s’amplifier après la crise avec la difficulté chez certains parents
qui auront perdu leur revenu. La situation sanitaire induit le strict respect des
mesures barrières, les établissements d’enseignement d’un certain standing
(encadrant les enfants de parents à revenus moyens et élevés) ont opté pour
les cours en ligne. D’où la mise en exergue des inégalités scolaires.
Dans la même perspective, l’UNICEF (2020) dans un rapport sur la
protection des enfants et des établissements d’enseignement, insiste sur la
prise des précautions pour éviter la propagation éventuelle de la Covid-19 en
milieu scolaire. Au-delà, les établissements scolaires doivent rester
accueillants, respectueux, inclusifs et solidaires envers tous. Les mesures
adoptées par les écoles peuvent prévenir l’introduction et la propagation de
la Covid-19 par les élèves et les personnels enseignant et/ou administratif qui
auraient été exposés au virus tout en réduisant au minimum les perturbations
et en évitant la stigmatisation des personnes concernées.
De plus, les établissements scolaires doivent se préparer dans la
continuité de l’encadrement pédagogique. Elle préconise la mise en œuvre
des stratégies d’apprentissage en ligne, les nouvelles stratégies
d’apprentissage axées sur la lecture intégrant la classe inversée,
l’instauration des émissions de radio, des podcasts ou des programmes
télévisés à visée pédagogique, un suivi quotidien ou hebdomadaire à distance
auprès des élèves par les enseignants, l’élaboration et l’accélération des
stratégies d’enseignement accéléré. Il faut éviter de déscolariser les élèves, il
faut les y maintenir en leur proposant les bonnes pratiques à adopter à l’école
et ailleurs en matière d’hygiène des mains et d’hygiène respiratoire, comme :
se laver fréquemment les mains, se couvrir le nez et la bouche, avec le pli du
coude ou un mouchoir en cas de toux ou d’éternuement, puis jeter le
mouchoir dans une poubelle fermée, et ne pas se toucher les yeux, la bouche
ou le nez sans s’être correctement lavé les mains.
La rentrée scolaire 2020/2021 a commencé non seulement avec un
retard d’un mois, mais aussi, les autorités camerounaises en charge de
l’éducation ont réaménagé les emplois du temps. Du fait de la pandémie, les
autorités ont introduit des mesures barrières qui ont bouleversé des
aménagements de l’espace et du temps (espace, nombres restreints des
élèves dans la salle de classe et dans le temps, introduction de la mi-temps).
La nécessité de ces remaniements, voire de cette représentation des rythmes
scolaires est à rapporter à l’ampleur de l’incapacité qu’a eu sur les acteurs du
système éducatif, la Covid-19. L’impact immédiat de la pandémie brutale et
progressive constitue un traumatisme d’une intensité incroyable. Le
réaménagement dans ce contexte a pu conduire à des souffrances psychiques
chez les apprenants et même chez les parents à la déperdition, aux difficultés
d’apprentissages.

PROBLEME
L’ajustement des temps scolaires par l’école peut créer et sceller des
liens nouveaux et apaiser les difficultés des élèves et des parents dans le
contexte de la pandémie de corona virus. L’école se doit de considérer les
besoins des élèves et des parents dans une réorganisation des activités
pédagogiques, afin d’assurer le plein épanouissement de ces derniers. C’est
dans ce sens que Montagner (2012)insiste sur l’urgence de tracer les voies
nécessaires pour que l’école soit un creuset de l’épanouissement affectif,
cognitif, intellectuel, social, civique, imaginatif, créatif (créateur),
humaniste... pour tous les élèves, quelles que soient leurs particularités, y
compris quand ils sont porteurs d’un handicap, quelles que soient les
particularités de leur(s) famille(s) et celles de leur milieu social, culturel et
ethnique.
Bien avant, Fraisse (1980) a montré l’importance de la chronopsychologie.
Celle-ci permet d’étudier les changements du comportement pour eux-
mêmes. Aussi, a-t-il revendiqué sa place en tant que discipline de recherche
scientifique et montrer la nécessité d’intégrer le facteur temps dans l’étude
des comportements humains pour les parents comme pour l’élève Selon
Testu (2008), l’expression « rythmes scolaires » est comprise de plusieurs
manières. Pour certains il s’agit de la progression des élèves dans leurs
apprentissages. Pour d’autres, il faut les assimiler aux rythmes de
l’environnement, c’est-à-dire à l’alternance des moments de repos et
d’activités imposés par l’école. Il s’agit là des emplois du temps journaliers
et hebdomadaires, des vacances, du calendrier scolaire. D’autres encore,
définissent les rythmes scolaires comme des rythmes propres aux enfants, en
situation scolaire. Ce sont alors des variations périodiques des processus
physiologiques, physiques et psychologiques propres aux individus. L’on
comprend que les rythmes et emplois du temps ne sont pas confondus, car
toute variation périodique décelée chez l’élève est biologique ; l’élève vit
selon ses rythmes biologiques et/ou psychologiques dans un environnement
rythme naturellement ou socio-culturellement.
La Covid-19 a induit des temporalités contraignantes déclenchées
dans l’urgence (l’impréparation) un ensemble de mesures gouvernementales
dont certaines ne semblent pas toujours satisfaire la communauté éducative.
Pour y faire face, l’État a pris des mesures assurant tant bien que mal la
continuité de l’école qui passe par la continuité pédagogique et a évité de
justesse une année blanche. La continuité de l’école doit résulter de la
continuité pédagogique, qui est destinée à s’assurer que les élèves
poursuivent des activités scolaires, leur permettant de progresser dans leurs
apprentissages. Parmi ces mesures, le gouvernement a procédé au
réaménagement scolaire en introduisant de nouvelles temporalités dans les
établissements scolaires, dans le but de gérer les effectifs et de respecter la
distanciation sociale. Toutefois, ces nouvelles temporalités n’intègrent pas
les rythmes de vie de l’enfant, les rythmes scolaires et le temps socio-
professionnel des parents. (Ministère de l’Éducation Nationale, 2020).
Au niveau des activités d’apprentissage, l’on assiste à des faiblesses
de concentration, à des difficultés d’attention. Au niveau du régime de
fréquentation on observe les retards, les absences, la fugue, la fatigue, la
somnolence lors du processus enseignement/apprentissage. Le déni de
responsabilités parentales résultant d’un clivage entre une partie d’eux-
mêmes qui admet le vide d’informations des rythmes scolaires et un autre
qui met en avant une représentation de celui qui n’en tient pas compte. Cette
situation ne semble pas avoir de contours précis, mais elle est celle d’un
système éducatif en décalage des régulations habituelles.
2. MÉTHODE
2.1. Participants et site de l’étude
Pour recruter les participants à la recherche, nous avons appliqué la
technique d’échantillonnage aléatoire à choix raisonné typique encore appelé
technique d’échantillonnage intentionnel (Fortin & Gagnon, 2016) qui
consiste à sélectionner les individus dont on pense être détenteurs
d’informations cruciales pour l’étude et très souvent des personnes
disponibles et disposées à participer à la recherche.Nous avons pu retenir
dans le cadre de l’étude, des critères spécifiques devant être remplis par ces
participants. Le choix raisonné visait à faire une sélection préalable au sein
d’un groupe qui est bien connu. En effet, ce mode s’est fait sur la base d’une
ou de plusieurs caractéristiques fixées à l’avance. L’objet en est de recueillir
des renseignements sur les membres de la population ayant ces
caractéristiques.
L’étude à choix raisonnée typique, cherche à comprendre l’impact
de la crise sanitaire (COVID 19) à travers le système de mi-temps sur
l’ajustement des rythmes de vie, des rythmes scolaires et le temps socio-
professionnel des parents. Cette étude s’est adressée à trois parents et trois
élèves enfants biologiques de ces parents, régulièrement inscrits au lycée
bilingue d’Ékorezock dans la ville de Yaoundé, région du centre du
Cameroun. Le lycée bilingue d’Ékorezock est choisi parce qu’il fait partie
des établissements qui ont introduit de nouvelles temporalités. La sélection
des participants a été faite en fonction de la disponibilité et des critères
d’inclusion suivants :
-être parmi les parents qui se sont plains pour l’introduction des
nouvelles temporalités,
-être parent depuis au moins trois ans,
- participer régulièrement aux réunions organisées par la hiérarchie,
-parent engagé dans le suivi des activités de son enfant. De ce fait,
six participants ont été recrutés à savoir trois parents et trois élèves de ces
parents selon le tableau suivant :
Parents Fonction Élèves Classe Âge

Parent 1 Employé de Élève Classe de 15ans


laboratoire privé Charly seconde

Parent 2 Commerçant au Élève Quatrième 14 ans


marché Mokolo Audrey

Parent 3 Enseignant au Élève Éric Première 16 ans


lycée
Tableau 1 : échantillon
2.2. Outil de collecte
La technique utilisée pour collecter les données est l’entretien
individuel semi-directif qui a permis de dégager une compréhension
riche du phénomène à l’étude (Savoie-Zajc, 2011).La collecte des
données s’est faite à base d’un guide d’entretien thématique permettant de
retracer les modalités d’ajustements des rythmes de vie, des rythmes
scolaires et du temps socio-professionnel des parents. Aussi, cette posture a-
t-elle donné aux participants la possibilité de s’exprimer de manière libre et
sans contrainte. Les entretiens ont eu lieu dans la salle de service des
conseillers d’orientation du lycée Bilingue d’Ékorezock.
2.3. Procédure
Les entretiens ont eu lieu dans le bureau de l’un des censeurs du
lycée bilingue d’Ékorezock. Chaque entretien durait en moyenne 45 minutes
et se faisait le mercredi dans l’après-midi. Pour les parents, leur disponibilité
était prise en compte. Chaque participant était informé du but de l’étude
(contribuer la gestion des rythmes scolaires, les rythmes et du temps
socioprofessionnel). Les entretiens étaient transcrits sur papier et enregistrés
grâce au dictaphone et son utilisation était signalée à l’avance tant aux
parents qu’aux élèves. La recherche avait pour outil de collecte des données
un guide d’entretien semi-structuré. Le déroulement des entretiens semi-
directif était axé sur les thèmes de la recherche à savoir :
-thème 1 : ajustement des rythmes de vie
-thème 2 : ajustement des rythmes scolaires
-thème 3 : ajustement du temps socio-professionnel des parents
Il faut noter que le guide définissait la stratégie que nous avions
adoptée. Il déterminait également la façon dont il convenait la directivité et
la non directivité faisant percevoir davantage la flexibilité.
2.4. Technique d’analyse
Les données collectées ont été analysées à travers la technique
d’analyse thématique de contenu séquencée (Muchielli&Paille, 2012).
L’analyse de contenu séquencée permet de recueillir les informations à
travers les messages émis par les interviewés et de développer de manière
approfondie les dysfonctionnements introduits par des nouvelles
temporalités dans les établissements d’enseignement secondaire.
Thème Code Sous-thèmes Code Observations

+ - ±
Dysfonctionnement A Dysfonctionnement a1
des Rythmes de vie dans les dépenses
familiales
Dysfonctionnement a2
dans les activités
personnelles ou
familiales
Dysfonctionnemen B Inhibition scolaire b1
t des Rythmes
Absence de repères b2
scolaire
dans l’organisation
des tâches scolaires
Dysfonctionnement C Dysfonctionnement a1
du Temps socio- dans la gestion de
professionnel l’emploi et des
enfants
Peur de perdre son b2
emploi
(+) : effectif ; (-) : pas effectif ; (±) : plus ou moins effectif.
Tableau 2 : Grille d’analyse
3. RÉSULTATS
L’analyse des données collectées auprès des six participants à partir
des entretiens individuels a permis d’organiser les résultats en fonction de
trois objectifs visés par cette article à savoir : Covid-19 via l’introduction
des nouvelles temporalités est un élément perturbateur des rythmes de vie ;
les conséquences du Covid-19 via l’introduction des nouvelles temporalités
rythmes scolaires chez les élèves ; l’impact de la Covid -19 via
l’introduction des nouvelles temporalités sur le temps socio-professionnel
des parents.
3.1. COVID-19 via l’introduction des nouvelles temporalités : un
élément perturbateur des rythmes de vie.
L’analyse des données recueillies révèle que les rythmes de vie sont
bouleversés, perturbés à tous les niveaux sociaux. Tant chez les élèves que
chez les parents, le mal être est profond. Divers éléments le prouvent ; les
parents expliquent par exemple qu’il leur est extrêmement pénible de
coordonner les emplois du temps. Écoutons les propos d’un parent : « la
Covid 19, a bouleversé tous les programmes de vie. La réduction des lieux
de fréquentation a diminué la fréquence des rituels cultuels chez les enfants
et du coup, je ne parviens plus à maitriser leurs comportement »(Aa1+) +
(Aa2+). Comme d’habitude, les rythmes scolaires revêtent un certain
caractère ritualisé concernant le vécu de l’enfant, les attentes des parents et
les possibilités d’accompagnement et de suivi proposés par les
professionnels. Avec la pandémie tout a volé en éclat.
Un parent explique : « A cause de la corona, j’ai revu le rythme de
vie chez moi, car comme je suis commerçant, je ne m’en sortais plus, j’ai
beaucoup perdu depuis que la Covid a commencé, et chez ma femme je ne
me comprends. Elle n’arrive pas à s’adapter et nous avons les problèmes
tous les jours »(Aa1+) + (Aa2+). En expliquant cela, ce parent confirme que
les familles ont reçu un choc. La Covid-19 est venue cristalliser l’ensemble
de leurs appréhensions dans un après coup-coups, traumatisme à partir
duquel s’est engagé un travail psychique semblable à celui du deuil
d’acceptation de la réalité.
C’est dans le même sens que l’élève Audrey affirme : « la corona a
fait que mon père a diminué l’argent des beignets, et l’argent de poche
n’existe plus ». Aussi un autre élève affirme : « j’ai arrêté les activités de
l’église à cause de la corona, pour tant ça me permettait de m’épanouir,
mais, je suis là comme ça »(Bb1+) + (Bb2+). En même temps, à cause de la
pandémie, certains ménages engagent des dépenses supplémentaires en
matière de santé (pour des mesures de protection) ou en éducation pour
occuper les enfants confinés à la maison. Par ailleurs, cette situation
poussera les ménages à opérer des ajustements au niveau des dépenses pour
assurer les charges et dépenses incompressibles. Généralement, les ménages
privilégient dans ce cas les dépenses de consommation immédiates pour la
survie au détriment des dépenses de santé et de sécurité ou des dépenses.
Un autre parent dit :
 Moi je me suis épuisé sur le plan professionnel car à cause du
Covid-19, on a licencié beaucoup de personnes dans notre entreprise et du
coup il faut redoubler des efforts car la tâche est immense. Or, je ne
travaille plus on me licencie je trouverais encore l’autre où ? (Aa1+) +
(Aa2+)
Avec l’évolution de la pandémie et l’intensification de ses effets
économiques, certains secteurs ont subi des perturbations importantes. La
contraction de ces secteurs a entraîné d’importantes pertes d'emplois, tant
dans le secteur formel que dans l’informel. Ce qui a constitué un coup dur
dans la mesure où le secteur des services est le premier pôle de concentration
des emplois avec 73,8% des 635 969 travailleurs permanents et représente en
moyenne 49,9% du PIB. Les pertes massives d’emplois et de revenus
constituent une menace pour la sécurité car elles pourraient favoriser le
décrochage scolaire.
3.2. Conséquences du Covid-19 via l’introduction des nouvelles
temporalités sur les rythmes scolaires des élèves
Les modalités d'éducation inhabituelles introduites par la Covid-19
se prolongent pendant des mois et ont eu un impact négatif considérable sur
les compétences individuelles et collectives des élèves. L’introduction des
nouvelles temporalités semblent avoir des conséquences sur le
comportement scolaire des élèves. En dépit des défis majeurs que pose la
Covid-19, la crise est une occasion de transformer et de réimaginer les
systèmes éducatifs et de commencer à concrétiser une nouvelle vision
pour l'avenir des apprentissages, pour que chaque enfant étudie avec plaisir,
rigueur et détermination, en classe et hors des murs de l'école. Il s'agit là
d'une véritable chance de redessiner les contours de l'école du futur, un futur
devenu une réalité aujourd'hui. L’élève Éric affirme ce qui suit :
 Je suis élève en classe de première, mais c’est que je ne comprends rien
cette année, car je ne parviens pas à m’organiser pour apprendre, car
parfois je dors jusqu’à oublier l’heure de l’école et aussi, quand j’ai cours
dans l’après -midi, je rentre, je dors, car je suis fatigué et je me réveille
jusqu’au matin, avant de repartir à l’école je ne sais pas ce que j’ai appris.
(Bb1+) +(Bb2+)
Au bout de quelques semaines, les enfants ont changé et les symptômes de
ces changements sont perceptibles, notamment l’inhibition scolaire et sa
progression subjective et sensible. L’anxiété a augmenté et très peu d’enfants
manifestent l’envie de travailler, grandir à travers l’implication dans les
tâches scolaires. De même, l’implication parentale est devenue aléatoire,
confuse dans ces transformations induites par la pandémie.
L’élève Charly affirme : « moi je suis là je pense que les enseignants ne
nous aident plus à apprendre, ils nous donnent souvent les exposés à
chercher et n’expliquent pas, car il n’y a pas assez de temps et je suis perdu,
tous mes camarades ont échoué, pourtant depuis la sixième nous étions
toujours les meilleurs dans la salle de classe.(Bb1+) +(Bb2).
Allant dans le même sens l’élève Audrey raconte : 
J’ai perdu tous les repères, mon groupe d’études a été dissociés du fait du
respect des mesures barrières et mon père dit qu’il n’a pas d’argents pour
payer le répétiteur, que la pandémie exige une alimentation saine, des thés
et autres, ainsi, il préfère s’occuper de la santé. Moi je sais que j’ai déjà
échoué à mon examen.(Bb1+) + (Bb2+).
La pandémie a un impact brutal et progressif sur l’adaptation
scolaire des élèves si bien qu’ils ne parviennent plus à développer les
aptitudes positives, parce qu’ayant perdu les repères à l’égard des
apprentissages, des enseignants et des camardes. L’impact va plus loin
lorsqu’il met en exergue l’incertitude, l’angoisse.
3.3. Dissonance cognitive entre Covid-19 via l’introduction des
nouvelles temporalités et le temps socio-professionnel des parents.
L’introduction des nouvelles temporalités dans les établissements
d’enseignement général a créé des perturbations dans la gestion
professionnelle des parents. Les parents doivent préserver leurs emplois qui
leur permettent de subvenir aux besoins de leurs enfants. Aussi doivent-ils
gérer les aller et les retours des élèves qui varient au fil des semaines. De ce
fait, les parents semblent clivés, faut-il laisser le travail et s’occuper des
enfants ou bien faut-il continuer le travail et passer à côté de l’éducation des
enfants ? Cette question laisse entrevoir la souffrance psychique des parents
qui n’ayant plus de repères, ne parviennent plus à maitriser les différents
rythmes de vie et leur temps socioprofessionnel. Le parent de Charly
affirme :
 Moi je suis dépassé par le système de mi-temps que le gouvernement a
introduit dans les établissements. Je ne parviens plus à gérer ni mon travail,
ni les enfants, je suis commerçante et je me bats seul pour subvenir aux
besoins de mes enfants. J’ai deux enfants au lycée et ils n’ont pas le même
emploi du temps. Je suis perdu. Et là je ne sais plus à quelle l’heure ils
rentrent à l’école, car parfois 19h, parfois 15h, parfois 13h.(Cc1+) +
(Cc2+).  
Le père d’Éric ajoute :
 Le gouvernement a bien voulu bien gérer les effectifs en respectant la
distanciation sociale suite à la Covid-19, mais je pense que cela n’a pas été
bien pense en gérant ce problème. Mon enfant par exemple s’est fait
nouveau groupe d’amis et ils vont dans les salles de jeux avant le retour à la
maison, tout est perturbé à notre niveau et moi je travaille chez quelqu’un,
j’ai déjà trop demandé les permissions pour essayer de contrôler mon
enfant.(Cc1+) + (Cc2+).
Le changement de mode de vie et de comportement qui s'est opéré
chez les personnes suite à la survenue de la Covid-19 permet de comprendre
leur vécu subjectif dans un contexte de crise sanitaire. Le père d’Audrey
exprime : ma fille est adolescente en classe de seconde. Vraiment je ne sais
quoi faire. Elle rentre parfois à 16heures et je ne suis pas toujours là pour
régulariser ses horaires, le gouvernement doit trouver autres alternatives et
non que cette éducation devient vaine » (Cc1+) + (Cc2+). De ce fait les
parents semblent clivés ; faut-il laisser le travail et s’occuper des enfants ?
DISCUSION ET CONCLUSION
Les bouleversements sociaux, quelle que soit l’ampleur, font partie
des phénomènes émergents parce que subis, inattendus. Toute chose qui va
donc remettre en cause les traditions, les habitudes. Les temporalités comme
régulations font partie des habitudes et constituent des repères. Testu (2008)
et Montagner (2009) dans leurs analyses ont démontré qu’il y a des jours
propices pour un certain type d’enseignement et d’autres pas. Le lundi a été
identifié comme étant le mauvais jour de la semaine ; du fait de la
désynchronisation, du déphasage des rythmes biologiques et de mauvais
scores aux épreuves proposées. Le mardi et le jeudi sont plutôt des jours
comparables, marqués par de bons résultats et un comportement équilibré.
Le mercredi est un jour bénéfique où les enfants présentent une régularité
dans les rythmes biologiques et dans le comportement de communication. Le
vendredi est variable selon les enfants, les plus grands peuvent réaliser de
meilleurs scores et les plus petits les mauvais scores.
Selon Testu (2008) le choix du moment de la journée, de la semaine
est non seulement important pour l’apprentissage d’une tâche, mais
également pour l’utilisation de ce qui a été appris. Certains auteurs
(Montagner&Testu : 1996.) précisent que s’il est possible de constater que la
rythmicité scolaire se module avec l’âge, il faut également savoir que
d’autres facteurs, soit de différenciation interindividuelle, soit de situation,
influent sur les variations périodiques de performances. Ce qui revient à dire
comme le souligne Montagner (2012) que les humains disposent d’une
horloge (rythme de vie), le temps scolaire et le temps socio-professionnel y
sont bouleversés du fait des représentations. Ces bouleversements entrainent
des peurs, des craintes, bref un certain mal être. Dans le support, lorsque le
diagnostic est confus, incertain, les représentations vont s’appuyer sur un
clivage, sur un passé vécu comme normal et l’état actuel considéré comme
incertain.
Les changements des rythmes scolaires induits par la brutalité de la
pandémie ont introduit de nouvelles régulations au sein du système éducatif
camerounais. Les régulations touchent autant aussi bien les rythmes de vie
de l’enfant, le temps scolaire que le temps socio-professionnel des parents.
Elles concernent aussi les apprentissages scolaires par la mise en place d’un
système hybride marqué par la bimodalité (combinaison classe ordinaire,
classe inversée). Mais se pose un problème, celui de l’auto-régulation,
autonomie des acteurs (élèves, parents et équipe pédagogique). L’étude
qualitativo-compréhensive menée auprès de six participants dont 3 parents et
3 élèves des parents respectifs permet de comprendre ce qu’ils vivent,
subissent au regard de l’introduction de la mi-temps.
SelonPaillé &Mucchielli (2012) l’analyse thématique de contenu
séquencée a permis de comprendre les contraintes et les difficultés que les
parents rencontrent. Les parents d’élèves ne parviennent à s’arrimer à ce
nouvel emploi de temps, car il y a désynchronie avec leur emploi de temps
socio-professionnel. Aussi les parents sont encore plus perturbés car, ne
maitrisent plus les horaires de leurs enfants, ni les horaires du début, ni les
horaires de la fin. Ces derniers expriment les sentiments de peur, d’échecs,
de libertinage. Les élèves quant à eux ne parviennent pas déjà à s’adapter à
ce nouveau rythme, car le temps a été réduit pour plusieurs disciplines et ces
derniers sont renvoyés par les enseignants à gérer les cours en ligne. Les
retards sont de plus en plus récurrents.
La recherche laisse apparaitre que les parents ne sont plus à même
de maîtriser le travail de leurs enfants, ni leurs comportements sociaux. Cette
situation caractérisée par la désynchronie laisse entrevoir des sentiments
d’échecs scolaires, de déperditions scolaires et de fugue, voire de
délinquance juvénile. Par conséquent, il y a nécessité déjà de former les
parents sur l’environnement d’apprentissage numérique, si la construction
des salles de classe et le recrutement des nouveaux enseignants s’avère être
une solution de longue durée. La classe virtuelle permettra à ces derniers
d’être au même niveau d’enseignements et de respecter aussi les mesures de
distanciation, qui sur le plan psychologique met en branle le système de
méfiance et de rupture des liens sociaux.
On s’aperçoit que la pandémie n’a pas seulement bouleversé les rituels, mais
aussi les représentations de ces rituels. Ces représentations d’après l’analyse
ne perpétuent pas les régulations rêvées, même si on sait qu’elle vise une
normalité en rapport avec l’effraction subie par les membres de la
communauté éducative. Celle-ci a impacté, d’après les résultats, les registres
dans lesquels s’expriment les enfants, les enseignants et les parents. La
pandémie avec sa brutalité a renforcé l’attention entre les familles et le
système éducatif a trouvé ses propositions d’ajustements. Il importe de
considérer une autre étude qui pourrait évaluer l’impact de l’environnement
d’apprentissage en contexte de Covid-19 sur la ZDP des élèves de lycées
d’enseignement secondaire général.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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