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Grossesses adolescentes en milieu scolaire au Togo : déficit de communication entre parents-


enfants ?
Teenage pregnancies in schools in Togo: lack of communication between parents and
children ?
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Ayawavi Sitsopé Toudekaa, David Jean Simonb, Ghislaine Josephc, Digo Enyota Akakpo-
Ahianyoa
a
Unité de Recherche Démographique de l’Université de Lomé (URD/UL), Lomé, Togo
b
Centre de Recherche de l’Institut de Démographie de l’Université de Paris (CRIDUP), 90, rue de Tolbiac,
Paris, France
c
Centre de Recherche Cultures Arts Sociétés (CELAT), Université Laval, Québec (Québec) G1V 0A6,
Canada

© 2022 published by Elsevier. This manuscript is made available under the Elsevier user license
https://www.elsevier.com/open-access/userlicense/1.0/
Résumé

La question des grossesses en milieu scolaire demeure un sujet d’actualité dans plusieurs pays en
développement. Chaque année, des dizaines de cas de grossesses d’adolescentes sont enregistrés
dans les établissements scolaires au Togo. Le présent article s’intéresse à l’environnement familial
des élèves dans l’explication du phénomène de grossesses précoces en questionnant l’effectivité
des discussions parents-enfants sur la sexualité ainsi que leurs effets sur la persistance des
grossesses adolescentes en milieu scolaire. Il se fonde en outre sur les données de l’enquête Les
approches multisectorielles pour prévenir les grossesses précoces dans les collèges au Togo
réalisée par l’Unité de Recherche Démographique de l’Université de Lomé en 2018. Les résultats
révèlent que, - étant socialisés dans un contexte où la sexualité est un sujet tabou -, les parents
discutent peu des sujets relatifs à la sexualité avec leurs adolescent.e.s. Ce silence qui, selon les
parents, vise à préserver le plus possible les adolescent.e.s de la pratique de sexualité comporte
cependant un revers pour ceux-ci, car au lieu d’être informés au sein de l’unité familiale avec
toutes les explications possibles, ils/elles le découvrent plutôt via des canaux incontrôlés (médias,
réseaux sociaux) ou des tiers qui ne sont pas nécessairement les meilleurs canaux d’apprentissage
sur la vie sexuelle, d’où la recrudescence des grossesses d’adolescentes en milieu scolaire au
Togo.

Mots clés : communication parents-enfants, sexualité, grossesse précoce, adolescence, santé


reproductive

Abstract

The issue of school pregnancies remains a hot topic in many developing countries. Every year,
dozens of cases of teenage pregnancy are recorded in schools in Togo. This paper focuses on the
family environment of students in the explanation of the phenomenon of early pregnancies by
questioning the effectiveness of parent-child discussions on sexuality as well as their effects on
the teenage pregnancies persistence in school. It is further based on data from the survey
“Multisectoral approaches to prevent teenage pregnancies in secondary schools in Togo”
conducted by the Demographic Research Unit of Lomé University in 2018. The results revealed
that, - being socialized in a context where sexuality is a taboo subject - parents rarely discuss
subjects relating to sexuality with teenagers. This silence which, according to parents, aims to
preserve adolescents as much as possible from the practice of sexuality, however, has a setback
for them, because instead of being informed within the family unit with all the possible
explanations, they rather discover it via uncontrolled channels (media, social networks) or third
parties which are not necessarily the best channels for learning about sex life, hence the
resurgence of teenage pregnancies in schools in Togo.

Keywords: parent-child communication, sexuality, early pregnancy, adolescence, reproductive


health

Introduction

1
Aujourd’hui, les grossesses adolescentes constituent une préoccupation à l’échelle mondiale
(United Nations Population Fund, 2013). Selon les données du Ministère de l’Enseignement
Primaire et Secondaire, le nombre de grossesses d’élèves adolescentes au Togo est passé de 3036
à 3343 entre l’année académique 2015-2016 et 2017-2018 (MEPS, 2019). Une récente étude
réalisée par le Ministère des Enseignement Primaire, Secondaire, Technique et de l’Artisanat avec
l’appui de la Banque Mondiale et l’UNICEF révèle pour sa part que, plus de 1200 cas de
grossesses non désirées ont été enregistrés dans les établissements secondaires publics entre
septembre 2020 et mars 2021 au Togo (santé, sciences et développement, 2021). Notons que le
Togo n’est pas le pays le plus touché par ce phénomène. Durant l’année académique 2020-2021,
5000 cas de grossesses en milieu scolaire ont été recensés en Côte d’Ivoire (Gonli, 2021) contre
2300 au Bénin (Constant et Bastide, 2021).

Les grossesses précoces non prévues entraînent des conséquences néfastes (Jean Simon et al.,
2021 ; United Nations Population Fund, 2013). Elles génèrent le plus souvent par des abandons
scolaires, des problèmes relatifs à la maternité précoce ou des pertes en vies humaines souvent
causées par des avortements clandestins effectués dans des conditions d’hygiènes parfois
insalubres (N’bouké et al, 2012 ; Akakpo-Ahianyo, 2019). Outre cela, elles limitent les
possibilités pour les adolescentes de s’épanouir, de réussir dans leurs études/formations et de
contribuer de par leurs activités ou fonctions au développement de leur communauté (Dadoorian
2007 ; Wendland et Levandowski, 2014).

Si dans la littérature existante, il ressort que le faible niveau d’instruction, la précarité


économique, le manque d’accès aux méthodes contraceptives, le fait de résider en milieu rural
sont les principaux facteurs explicatifs des grossesses adolescentes en milieu scolaire au Togo,
Billy (2014) affirme que l’on doit aussi tenir compte de l’insuffisance de la communication entre
parents et adolescentes pour expliquer ce phénomène. En effet, dans la société togolaise, la
sexualité demeure taboue (Darré et al., 2018). Le rôle, en particulier celui des parents, d’informer
les adolescents, est considéré comme insuffisant (Kane et al. 2018). Cependant, un niveau élevé
de communication entre parents et adolescent-e-s sur les risques sexuels permet généralement un
retardement du premier rapport sexuel et une prévention des rapports non protégés (Kane et al.,
2018 ; Hutchinson et al., 2003).

Pour mieux comprendre le phénomène de grossesse adolescente en milieu scolaire, il importe de


mettre en avant tous les facteurs susceptibles de l’influencer (Sidibé et al. 2021). Ainsi, cet article
tente de montrer clairement que la problématique des discussions entre les parents et les
adolescent-e-s sur les sujets relatifs à la sexualité est d’actualité. L’analyse est focalisée sur le lien
entre la probabilité de la survenue des grossesses précoces et non désirées chez les adolescentes et
la qualité des discussions entre les parents et les adolescents ; cette question reste préoccupante
pour les jeunes, leurs parents, les autorités étatiques, locales et religieuses.

1. Méthodologie
1.1. Sources de données
Cet article s’appuie sur les données de l’enquête Prévenir les Grossesses Précoces au sein des
Collèges réalisée en 2018, dans le cadre du projet de recherche-action dénommé « Les approches
multisectorielles pour prévenir les grossesses précoces dans les collèges au Togo ». L’objectif
général du projet était de réduire la prévalence des grossesses adolescentes en milieu scolaire au
Togo, à travers une synergie d’actions. Sur la base d’une approche à la fois quantitative et
qualitative, l’enquête de base a permis de recueillir des données sur les thématiques suivantes : le

2
niveau de connaissance des adolescents sur la sexualité, les déterminants des grossesses précoces,
les conséquences de ces grossesses sur leur santé, leur cursus scolaire, les incidences des
grossesses d’adolescentes sur le tissu familial et national, ainsi que l’appréciation des
contributions des différents acteurs notamment les enseignants, les parents, les leaders
communautaires et religieux à la lutte contre les grossesses précoces en milieu scolaire.

La collecte de données s’est déroulée dans quinze localités (Carte 1) disposant de Collèges
d’Enseignement Général publics et répartis dans quatre (4) régions du pays : Maritime (3
collèges : CEG Aképé-Noepé_CEG Zébévi_CEG Gboto Vodoupé) ; Plateaux (4 collèges : CEG
Gléi_CEG Danyi-Elavagnon_CEG Okou_CEG Kpélé Elé) ; Kara (4 collèges : CEG Kétao_CEG
Soumdina Haut_CEG Nadoba_CEG Bitchabé) ; Savanes (4 collèges : CEG Mango_CEG Naki
Est _CEG Cinkassé_CEG Tandjoaré). Les quinze localités ont été retenues selon un choix
raisonné sur la base des normes favorables aux grossesses et sur leur prévalence dans les localités.

3
Carte situationnelle des localités de l'étude

Notes : Le projet étant une recherche-action, la démarche méthodologique adoptée repose sur la
comparaison des données de l’étude de base et de celles de l’étude finale. De ce fait, les « CEG zone
d’intervention » sont les collèges qui bénéficieront d’une intervention future et les « CEG zone de
contrôle » sont des collèges « témoins » qui ne bénéficieront d’aucune intervention. Ceci permettra
d’évaluer les effets de l’intervention dans la réduction des grossesses précoces en milieu scolaire.

4
L’approche quantitative a touché un échantillon aléatoire de 1500 élèves âgés de 10 à 19 ans à
raison de 100 élèves par établissement. Dans chacun de ces collèges, une liste des élèves par
classe a été constituée. Sur la base de cette liste, des élèves (filles et garçons) ont été sélectionnés
aléatoirement pour la collecte des données. Au Togo, étant donné que les grossesses précoces
affectent plus les filles que les garçons (Billy, 2014), il a été décidé d'interviewer plus de filles que
de garçons. Ainsi, dans chaque classe, 1/3 de garçons et 2/3 de filles ont été interrogés. Au total,
996 filles et 504 garçons ont participé à l’enquête quantitative.

L’approche qualitative pour sa part, a permis de recueillir les données au travers d’entretiens
individuels semi-directifs et des focus-groups auprès des groupes sociaux suivants : élèves de 10 à
19 ans, parents d’élèves, enseignants, agents de justice, prestataires de services de planning
familial (PF), leaders communautaires et religieux. Au total, 23 focus-groups et 49 entretiens
individuels ont été réalisés.

1.2. Outils de collecte et thèmes explorés


La recherche a été réalisée au moyen d’un questionnaire et de guides de discussion. Le
questionnaire a été subdivisé en cinq sous-sections : (i) caractéristiques individuelles,
sociodémographiques et environnement familial, (ii) connaissances relatives à la sexualité des
adolescents, (iii) connaissances sur les grossesses adolescentes, leurs déterminants et leurs
conséquences, (iv) approche multisectorielle de la prévention des grossesses précoces (v) cadre
familial et modalités de discussion de certains sujets.

Pour ce qui est des guides de discussion, ils se composaient de thèmes comprenant des questions
spécifiques sur les : (i) connaissances générales dans le domaine de la SDSR des adolescents, (ii)
perceptions des grossesses précoces en milieu scolaire avec des sous thématiques relatives aux
causes des grossesses, à leurs conséquences et aux responsabilités liées au phénomène au niveau
de la fille, au niveau de l’auteur de la grossesse et au niveau des familles des adolescents. C’est
justement au niveau de la collecte des données relativement aux responsabilités liées au
phénomène que les interviews ont fait ressorti la problématique de l’insuffisance de discussions
dans le cadre familial en ce qui concerne la sexualité. Ensuite, se suivent les thématiques : (iii)
contributions actuelles des différentes institutions à la lutte contre les grossesses précoces en
milieu scolaire, (iv) insuffisances des services judiciaires dans la lutte contre les grossesses
précoces, (v) suggestions pour réduire la fréquence des grossesses précoces en milieu scolaire,
(vi) approche multi-sectorielle de lutte contre les grossesses précoces. Sur chaque site, ces outils
ont été pré-testés par les agents de collecte auprès d’une population qui présente les mêmes
caractéristiques que celle de la présente étude.

1.3. Techniques d’analyse des données

Pour analyser les données quantitatives, on s’est intéressé aux aspects descriptifs en produisant
des tableaux univariés et bivariés. Quant aux données qualitatives, elles ont fait l’objet d’une
analyse de contenu thématique (Wanlin, 2007).
1.4. Considérations éthiques
Le protocole de l’enquête a fait l’objet d’un examen par le Comité Bioéthique de Recherche en
Santé (CBRS) du Togo avant sa mise en œuvre. Nous avons obtenu l’accord des institutions en
charge de ce projet, à savoir l’Unité de Recherche Démographique de l’Université de Lomé
(URD/UL) et l’Association Togolaise pour le Bien–Être Familial (ATBEF), afin d’utiliser les
données d’enquête à des fins de publication. L’enquête a garanti un consentement libre et éclairé
des participants et la protection de leur identité par l’anonymisation des données des entretiens et
une publication des données, avec une garantie de confidentialité. Un consentement éclairé par

5
voie orale a été également préalablement obtenu auprès de chaque participant, avant sa
participation à la collecte de données.

2. Résultats
2.1. Les adolescent-e-s enquêté-e-s en milieu scolaire togolais : des profils hétérogènes
On a pu observer que 80% des enquêté-e-s étaient issus des régions Plateaux, Kara et Savanes à
raison de 400 enquêtées par région. En revanche, dans la région Maritime, le nombre
d’interviewés était d’environ 300.

L’échantillon était composé de 66.4% de filles et de 33.6% de garçons. Concernant l’appartenance


religieuse, près de 70% (69.7%) d’entre eux étaient de confession catholique ; 16.5% étaient
musulmans et moins de 15% (13.8%) pratiquaient une religion traditionnelle (Vodou, Mami,
Dan). Le territoire togolais est partagé par plusieurs ethnies. En effet, parmi les élèves interrogés,
28% appartenaient aux groupes des "Adja/Ewé/Mina/Ouatchi" ; 30.5% étaient des
"Kabyè/Tem/Kotokoli” et 28.9% des "Para-Gourma ou Akan".

Près d’un élève sur deux (47.3%) vivait avec leurs deux parents biologiques et environ 15%
provenaient d’une famille monoparentale. La proportion d’élèves cohabitant avec un membre de
la famille autre que les parents biologiques était assez importante (28.3%). Dans un contexte où la
pauvreté, la mortalité et les mouvements migratoires sont notables, ces adolescents dont les
tuteurs ne sont pas les parents géniteurs seraient des enfants confiés, donnés ou adoptés (Tetou et
al. 2017).

Au cours de l’année scolaire 2016-2017, 109 grossesses adolescentes ont été enregistrées pour
l’ensemble des 15 établissements visités contre 161 en 2017-2018, soit une hausse de 48%
(Tableau 1). Autres faits marquants, au CEG de Noépé et au Lycée Naki-Est, le nombre de
grossesses adolescentes a plus que doublé entre 2016 et 2018.

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Tableau 1 : Nombre de grossesses précoces dans les collèges au cours des années scolaires 2016-2017 et 2017-
2018
Année scolaire
Nom des établissements scolaires
2016-2017 2017-2018 Évolution
CEG de Gboto (Maritime) 4 6 2
CEG Aképé Noépé (Maritime) 6 17 11
CEG Zébévi(Maritime) 5 7 2
Lycée de Gléi(Plateau) 10 12 2
Lycée de Danyi-Elavagnon(Plateau) 12 14 2
Lycée de Okou (Plateau) 3 3 0
Lycée de Kpélé-Elè (Plateau) 6 8 2
Lycée de Nadoba (Kara) 5 9 4
CEG Somdina Haut (Kara) 7 13 6
CEG Bitchabé (Kara) 6 7 1
CEG Kétao (Kara) 10 12 2
Lycée de Tandjouaré (Savanes) 15 18 3
CEG Mango Ville 1 (Savanes) 4 7 3
Lycée Naki-Est (Savanes) 5 12 7
Lycée de Cinkassé (Savanes) 11 16 5
Total 109 161 52
Source : Enquête Les approches multisectorielles pour prévenir les grossesses précoces dans les collèges au
Togo, 2018

2.2. Communication entre parents et adolescentes : un grand défi de notre temps


Les sujets relatifs à la sexualité sont tabous au Togo. En effet, moins de quatre (4) adolescentes
sur 10 (33.7.5%) entretenaient des échanges avec leurs parents autour de la thématique de la
grossesse précoce et moins de 2 sur 10 (11.8%) avaient déjà fait l’expérience de converser avec
leurs parents sur les violences sexuelles et leurs préventions (Tableau 2).
Tableau 2 : Proportion d’élèves ayant discuté avec leurs parents sur les thèmes « Comment éviter une
grossesse/Violences sexuelles et préventions » selon le sexe
Discussion Comment éviter une grossesse ? Les violences sexuelles et leurs préventions
avec l'un des
parents Garçons Filles Total Garçons Filles Total
Mère 13.7 32.6 26.3 6.5 11.1 9.6
Père 7.3 1.1 3.2 3.2 0.7 1.5
Source : Enquête Les approches multisectorielles pour prévenir les grossesses précoces dans les collèges au
Togo, 2018

Les informations consignées dans le Tableau 2 montrent également que les discussions se font
plus avec les mères qu’avec les pères.
Afin de renforcer ce résultat obtenu au niveau quantitatif, les données du volet qualitatif révèlent
que l’éducation des enfants est encore considérée dans certaines localités comme une tâche quasi
féminine. Dans les propos recueillis, les parents (pères) n’ont pas manqué de souligner la
difficulté pour eux de discuter de la sexualité avec leurs enfants.

« Pour dire vrai, je ne discute pas de la sexualité avec mes enfants. Pour nous, parler
du sexe à son enfant est une profanation des mœurs. Chez moi, tant que tu es sous
ma responsabilité, c’est l’abstinence sexuelle ou rien. Par chance, aucun de mes
enfants n’a désobéi au point de me présenter un partenaire en étant sur les bancs

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d’école. Je sais qu’ils reçoivent l’éducation sexuelle à l’école ; quelquefois, j’en
parle mais de façon brève sans rentrer en profondeur » (Rolland, 45 ans, parents
d’élèves, Région des Plateaux).
« Je discute rarement avec mes filles de la sexualité, c'est leur mère qui prend
souvent l'initiative de le faire. C'est un peu difficile pour un père de discuter avec ses
filles sur les sujets relatifs à la sexualité. Souvent, je les menace de les tuer si elles
tombent enceintes. Ce qui m’importe le plus c'est leurs bulletins de notes. Le reste se
fait avec leur mère ; elle est instruite et donc elle le fait bien. Si elle me fait part
d'une situation particulière, alors j'interviens pour leur donner des conseils. Selon
leur mère, leurs discussions portent le plus souvent sur les grossesses, comment faire
pour les éviter, comment maîtriser le cycle menstruel, (comment compter les jours,
les périodes fécondes de la femme » (Gauthier, 42 ans, parents d’élèves, région
Maritime).

Les élèves pour leur part mettent en avant les sentiments de peur et de honte comme principaux
obstacles pour initier des discussions sur la sexualité avec leurs parents. Il y a donc manifestement
une difficulté pour les adolescents de discuter en toute quiétude avec leurs parents sur les sujets
relatifs à la sexualité.

« …J’ai honte de parler de sujets liés à la sexualité avec ma mère. Si je devais en


parler avec elle, je ne serais pas à l’aise pour lui poser des questions pour mieux
comprendre ce qu’elle me dit, j’aurais honte. Je me dirais qu’en lui posant des
questions, elle pourrait me juger et avoir des arrière-pensées sur moi. D’ailleurs, ma
mère ne m’a jamais posé des questions ou enseigné des choses sur la sexualité. Elle-
même sera gênée de le faire ; elle se dira que me parler de la sexualité me poussera à
faire la compagnie des hommes… » (Pélagie, 14 ans, élève en classe de 5ème, région
de la Kara).

Les propos ci-dessus traduisent la difficulté des échanges sur les questions de sexualité entre
parents et enfants. Ces rapports parents-enfants sont caractérisés par la honte, les hésitations, entre
autres. Dans cet environnement, les adolescents ne sont pas incités à initier des discussions
relatives à la sexualité avec leurs parents. Ils s’orientent vers leurs pairs ou les médias dans le
souci de s’informer sur la sexualité. En effet, il ressort que 68.5% des adolescentes sondées
déclarent discuter de la sexualité et de la planification familiale avec leurs camarades filles contre
17.9% avec leurs camarades garçons. Du côté des élèves-garçons, ces proportions sont 22% et
69.8% respectivement.

Cette préférence des élèves d’avoir des discussions relatives à la sexualité avec leurs camarades
de même sexe a été également confirmée lors des discussions de groupes.
« …Par rapport au calcul du cycle menstruel et ce qu’on peut utiliser pour éviter les
grossesses et autres questions sur la sexualité, je m’informerai auprès de mes
amies parce que je serai plus à l’aise de discuter de ces sujets avec elles. Nous
vivons les mêmes problèmes en ce qui concerne la sexualité. C’est facile pour nous
filles de nous comprendre… » (Odette, 16 ans, élève en classe de 4ème, région de la
Kara).

Même dans le cas où certains parents tentent d’échanger avec leurs enfants sur la sexualité, ils
adopteraient le plus souvent, des attitudes trop moralisantes. Comme le souligne Kpakpo-Lodonou
(2007), les parents adopteraient un comportement trop moralisant compromettant la convivialité,
élément important pour une meilleure communication interpersonnelle. Ainsi, la prégnance de la
moralisation dans les échanges sur la sexualité entre les parents et leurs enfants est réellement
soulignée lors du recueil des données qualitatives de cette étude. Les parents ne manquent pas de
souligner eux-mêmes, la complexité d’engager et de nouer des discussions sur des questions liées à la
sexualité avec leurs enfants, à cause de leur propre éducation axée autour de l’idée selon laquelle le

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sexe est un sujet tabou. L’analyse des entretiens avec les parents montre aussi que la question des
discussions entre parents et adolescents sur la sexualité est une question assez délicate dont la
résolution ne pourrait se faire que sur le long terme. Pour eux, étant donné qu’ils perçoivent la
sexualité comme un sujet tabou, il leur faudra une adaptation aux nouvelles thématiques de
discussions sur la question.
Les déclarations suivantes de parents attestent de leurs difficultés d’entretenir des discussions sur
la sexualité avec leurs enfants :
« La question de la sexualité n'est pas une question facile à aborder. Si vous ne savez
pas l'aborder, vous allez passer à côté. Cela peut vous séparer de votre enfant. Si
vous ne savez pas l'aborder, il vous classe. Tout ce que vous allez lui dire, c'est autre
chose. Nous avons été éduquées dans un certain environnement, les parents ne
parlent pas du sexe mais ils te diront, ne fais pas ceci, ne fais pas cela. Moi je suis
catholique. Dans les homélies par exemple, on ne va pas parler de la sexualité en
utilisant les termes appropriés. Ce qu'on dit, on écoute, on accepte mais on ne le fait
pas. C'est l'environnement, le contexte social. Ce n'est pas une question d'un jour, de
deux ans. C'est une certaine évolution » (Propos d’un homme âgé de 50 ans,
universitaire et enseignant, Chrétien/Catholique, marié et père d’un enfant au CEG
Bitchabé. Propos recueillis durant un focus group dans la communauté).

« Par rapport à la sexualité, souvent tel qu’on le dit, pour bien mener cette activité
avec les enfants, il faudrait que le papa collabore bien, puisqu’il y a certains parents
que les enfants fuient. Tel que mon prédécesseur l’a dit, avant qu’un enfant vienne te
poser certaines questions sur la sexualité, il faudrait qu’il sache que quand il
s’approche de toi, tu ne vas pas le renvoyer. Donc il faut amadouer nos enfants et
c’est par là qu’on peut leur parler de la sexualité. Nous guettons les occasions pour
parler à nos enfants de la sexualité sinon il n’y a pas de fréquence de discussions »
(Propos d’un homme âgé de 55 ans, de niveau d’instruction secondaire II,
Cultivateur, Animiste, Marié Monogame, père de 6 enfants, focus group avec les
membres des communautés à Kpélé, Région des Plateaux).

«……L’éducation sexuelle devrait commencer depuis la maison sauf que c’est très
rare de voir dans nos milieux ici les parents discuter de la sexualité avec leurs
enfants. Cela n’existe même pas ! Si je dis que cela n’existe pas peut-être que
j’exagère!, sauf quelques rares foyers au sein desquels les parents conseillent leurs
enfants sur la sexualité. Moi, je trouve qu’il y a une insuffisance d’éducation
sexuelle à la maison » (Entretien individuel avec Claude, 43 ans, Enseignant, marié
et père de 2 enfants).

De plus, la déclaration suivante d’un adolescent conforte le résultat selon lequel les tentatives de
discussions engagées par les parents dans le but de parler de sexualité avec leurs enfants, sont,
pour la plupart du temps des conseils.
«… À la maison, nos parents nous donnent plus de conseils sur les relations
sexuelles qu’aux garçons. Ils nous disent de bien nous comporter et de prendre soin
de nous, d’éviter de demander de l’argent aux garçons de peur que ces derniers nous
forcent à avoir des relations intimes avec eux et puis, ils nous recommandent
vivement de pratiquer l’abstinence sexuelle » (Discussion de groupe avec les élèves
filles et garçons à Danyi-Elavagnon, Région des plateaux).

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2.3. Grossesses d’adolescentes : insuffisance de communication entre parents et
adolescents ?
La communication parents-enfants s’avère un instrument privilégié dans l’éducation sexuelle des
adolescents. Indispensable dans les relations sociales, la communication permet non seulement
aux parents de transmettre des normes de comportements à leurs enfants, mais aussi aux enfants
d’exprimer leurs opinions sur toutes les questions les préoccupant (Unicef, 2003). Il ressort des
données de l’étude que plusieurs adolescents interrogés discutent peu des questions de sexualité
avec les parents. Cette carence de communication parents-enfants sur la sexualité constituerait
un risque de grossesse à l’adolescence.

L’adolescence constitue une période de transition, de maturation physique, de formation de


l’identité et d’acquisition des rôles sociaux qui est associée à l’émergence d’une conscience de la
sexualité et du désir de l’expérimenter (Stef, 2011 ; Discour, 2011). À cette période de leur vie,
les jeunes sont particulièrement sensibles à la pression des pairs et peuvent, en jugeant de façon
irrationnelle les avantages et les inconvénients de certains comportements, prendre des décisions
mettant leur vie en danger (Dehne et Riedner, 2001). Il naît en effet au cours de cette période un
besoin de connaissance ou d’information autour de la sexualité, incitant alors les adolescent.e.s à
se tourner vers d’autres sources d’informations notamment les pairs.

Il est ressorti de l’analyse des discours recueillis que les discussions relatives à la sexualité entre
pairs constituent parfois la cause des grossesses adolescentes. En effet, étant donné qu’à cette
période, l’amitié revêt une grande importance, marquée par un soutien moral plus grand, un
partage d’expériences et une confiance mutuelle, les amis dans certains cas, constitueraient une
source importante d’informations pour l’adolescent au point de l’amener à modifier son
comportement social et sexuel (Cloutier et Drapeau, 2008 ; Allen, 2008). Les relations amicales
sont importantes au cours de cette période de la vie, mais pour autant, tous les adolescents ne
détiennent pas les informations correctes sur la sexualité pour éviter les grossesses précoces.

Par ailleurs, suite aux conseils de leurs pairs et après avoir subi des moqueries et stigmatisations
de la part de leurs amis, certains adolescents, par effet d’imitation, par curiosité, ou pour montrer
leur égo, tentent de faire des expériences sexuelles. Ce faisant, il arrive que certaines
adolescentes tombent précocement enceintes comme l’attestent les propos ci-après :

« L’une des causes de ces grossesses précoces en milieu scolaire est l’influence des
pairs. Il y a des filles qui imitent le comportement de leurs amies. Certaines filles
sortent avec plusieurs garçons comme elles veulent et conseillent leurs amies de
faire pareil pour être à la page. À force de côtoyer ce genre de personnes, elles
finissent par suivre leurs conseils. Et souvent, ce sont celles qui copient qui
tombent dans ces situations de grossesses précoces. Elles sont victimes parce
qu’elles ne sont pas expérimentées et sont souvent mal informées » (Honorée, 15
ans, élève en classe de troisième, région des Plateaux).

« Dans l’établissement et même dans notre classe, il y a des filles de 3ème qui font
amitié avec les petites de 6ème et de 5ème, et elles leur donnent de mauvais conseils,
du genre qu’elles peuvent aussi sortir avec des garçons pour avoir de l’argent. Et
comme ces jeunes sont naïves, elles ne prennent aucune précaution et elles
tombent précocement enceintes. » (Fabrice, 18 ans, élève en classe de 3ème, région
des Plateaux).

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2.4. Ccompréhension de la précocité de la grossesse chez les adolescentes en
milieu scolaire : de l’incidence des médias ?

D’autre part, les médias ont été également cités par les adolescents comme une source
d’informations sexuelles pour palier le constat initial de l’insuffisance de discussions parents-
enfants autour des questions relatives à la sexualité. Ainsi, plusieurs adolescents-es ont reconnu
avoir recours aux nouvelles technologies de l’information et de la communication pour recevoir
des contenus pornographiques. Ces derniers les rendraient vulnérables en engendrant une
excitation pour vivre précocement leur sexualité :

« De nos jours, les films et les images pornographiques circulent sur les médias,
exposant les rapports sexuels précoces. Un exemple palpable s'est produit la semaine
passée dans notre CEG. Un professeur a surpris un de nos camarades en train de
regarder une vidéo pornographique sur son téléphone Android en plein cours. Son
attention y était au point qu’il a éjaculé. L’ayant constaté, le professeur lui a retiré le
portable puis l’a envoyé auprès du Directeur afin qu’il puisse répondre de son acte.
Les élèves qui suivent régulièrement ces films reproduisent ce qu’ils voient. Certains
d’entre eux connaissent une paternité et une maternité précoce » (Robert, 15 ans,
élève de 4ème, région Maritime).

Les informations relatives à la sexualité sont diffusées à travers les médias pour le grand public.
Les smartphones Android sont devenus l’un des supports de communication fréquemment utilisés
aujourd’hui pour diffuser des contenus pornographiques et sexuels. Les adolescents qui visionnent
ces contenus s’exposent à des comportements sexuels précoces, parce que, la plupart du temps,
ces contenus pornographiques sont de nature sexuellement excitante. Les adolescentes qui se
focalisent sur les médias comme principales sources d’information courent le risque de grossesses
précoces.

Le recours de certains adolescents aux conseils de leurs pairs et aux contenus sexuels diffusés
dans les médias constituerait pour eux une alternative pour combler l’insuffisance d’informations
sur la sexualité que le cadre familial n’a pas su leur fournir.

3. Discussion
L’analyse des données a mis en évidence un (e) manque/insuffisance de communication entre les
parents et leurs enfants sur la sexualité au Togo. Ce résultat est similaire aux travaux de Sikounmo
(1995, p. 64) qui souligne que :

« Dans la majorité des familles, il n’y a presque jamais de conversation directe et


sérieuse entre parents et enfants. On dirait que les enfants sont soumis. Ils ne
dévoilent jamais leurs petits secrets aux parents, de peur d’être blâmés ».

De l’avis de l’auteur, l’attitude des parents à l’égard des adolescent-e-s n’est pas sans fondement.
Éviter les discussions sur des sujets relatifs à la sexualité avec les adolescentes est synonyme de
bonne éducation et est une forme d’éducation sexuelle (Sikounmo, 1995). Dans ce même ordre
d’idée, Beninguisse (2007) souligne qu’en Afrique, l’adolescente évoquant la sexualité dans le
cercle familial pourrait être réprimandée par ses parents. Souvent en Afrique et particulièrement
au Togo, certaines normes traditionnelles fondent le caractère inopportun et anormal des
discussions entre les parents et leurs enfants sur la sexualité. « L’enfant considéré comme
« respectueux » doit écouter ses parents et obéir. Un enfant ne parle que si l’adulte l’y invite ».
(Odimegwu et al, 2002 ; Glover et al, 2003). Dans le même sens que les précédents auteurs,
Akakpo-Ahianyo et ses collaborateurs (2021 : 611) soutiennent que :

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« s’il est aujourd’hui pertinent de penser que la socialisation s’opère à travers un
processus de communication et de dialogue continus et féconds entre les parents et
leurs enfants/adolescents, les sujets sur lesquels ce dialogue pourrait porter varient,
d’un milieu à un autre, d’une culture à une autre et ne sont la plupart du temps
engagés que par les parents. L’inverse est rare dans les rapports entre les enfants et
leurs parents dans le contexte africain caractérisé par la prégnance du respect à
l‘autorité ».

Par ailleurs, le comportement des parents à fuir les questions sur la sexualité préoccupe les
psychologues Mazoyer et al. (2011a ; 2011b). D’après ces chercheurs, la curiosité de la part des
adolescents/jeunes est tout à fait légitime et elle ne s’oppose pas au respect et à la décence. Mieux
vaut que les parents répondent avec des mots adéquats aux préoccupations relatives à la sexualité
conformément à l’âge de leurs enfants que de les laisser s’exposer à de telles informations via les
médias, les pairs, entre autres.
Les résultats de cette recherche révèlent que les discussions sur les questions de sexualité se font
beaucoup moins avec les pères. Une explication plausible à ce constat est que les adolescentes
seraient plus à l’aise avec leurs mères qu’avec leurs pères qui s’absentent fréquemment du foyer
en raison des séparations ou des divorces (URD et ATBEF, 2019). Ce constat pose également la
problématique des inégalités de genre en ce qui concerne l’éducation sexuelle des adolescents
dans le cercle familial en Afrique (Loua, 2018 ; Gastineau et al., 2015).
Par ailleurs, l’analyse des discours révèle que, lorsque les mères sont questionnées par rapport aux
discussions sur la sexualité avec les adolescentes, elles utilisent souvent le terme « conseiller », ce
qui sous-entend, qu’il n’y aurait pas une véritable communication entre ces deux parties. Le
fondement d’une bonne stratégie de communication consiste avant tout en la capacité d’écoute de
l’autre. Avoir une position d’écoute c’est être disponible, être capable de s’ouvrir à l’autre,
l’accepter et par-dessus tout, s’intéresser à ce que l’autre dit (Bartanusz, 2003). Dès lors, la
disponibilité des parents à écouter leurs enfants, constitue une des raisons fondamentales qui
incite ces derniers à communiquer avec leurs parents.
À cause de l’insuffisance de discussion avec leurs parents, les adolescentes affirment avoir
tendance à se confier à leurs camarades de classe pour pouvoir s’informer sur la sexualité. Or, ces
derniers ne leur prodiguent pas toujours de bons conseils sur la sexualité. Toudeka (2008) fait
remarquer que les adolescents se sentent souvent déçus et abandonnés par leurs amis alors qu’ils
s’attendent à trouver auprès de ces derniers, une sécurité et une intégration. Abondant dans le
même sens, Kane et al. (2018) soulignent que ces situations entraîneraient des grossesses précoces
et une parentalité non préparée.
Les adolescent-e-s s’intéressent aussi aux médias et aux réseaux sociaux, qui présentent le plus
souvent une vision erronée de la sexualité. En se référant aux travaux de Le Gall et Le Van
(2011), il ressort que dans les médias, on associe peu la sexualité à la procréation mais de
préférence à un outil pour évaluer la performance sexuelle et éprouver la masculinité/féminité
alors que les maladies sexuellement transmissibles et les grossesses non désirées y sont rarement
abordées. Abondant dans le même sens, Mercier (2016 : 312) affirme que la pornographie, au
croisement des nouvelles technologies de l’information et de la communication, « s’introduit dans
le monde des adolescents tout en échappant au regard et au contrôle parental ». Dans son analyse de
l’influence des médias sur la sexualité des adolescents, elle évoque diverses mesures de contrôle
et de surveillance, à commencer par le renforcement de l’autorité parentale. Ainsi, dans les
familles où il y a une véritable communication entre parents et enfants, les premiers surveillent et
contrôlent consciemment ou inconsciemment les habitudes médiatiques des seconds. Les parents
et leurs enfants explorent ensemble les médias et discutent de leurs valeurs éducatives. Les
enfants critiquent et analysent les émissions diffusées à travers les médias et leurs parents les
aident à distinguer l’imaginaire de la réalité, surtout en ce qui concerne la sexualité (Toudeka,

12
2008). De ce fait, il est à retenir que les médias influencent la communication parents-enfants.
Mais, l’effet de cette influence reste soumis à la nature des rapports parents-enfants.
En somme, le silence des parents qui vise à préserver le plus possible les adolescent-e-s de la
sexualité comporte cependant un revers pour ceux-ci, au lieu d’en être informés au sein de l’unité
familiale avec toutes les explications possibles, ils se tournent vers des canaux incontrôlés
(médias, réseaux sociaux, tiers) qui ne sont pas nécessairement les meilleurs canaux
d’apprentissage sur les sujets relatifs à la sexualité (Mercier, 2016).

Conclusion
Le présent article apporte un éclairage sur le les incidences du manque de communication parents-
enfants sur la sexualité dans la compréhension de la survenue des grossesses adolescentes en
milieu scolaire au Togo. À la lumière des résultats, l’on se rend compte que la communication
parents-enfants sur la sexualité est difficile à s’instaurer en raison du poids de la tradition
caractérisée par un mutisme sociétal et familial dont la sexualité a longtemps fait l’objet. Le
monde adulte estime que les adolescents n’ont pas encore le droit de vivre une vie sexuelle ou
même de recevoir les informations nécessaires sur la sexualité. Si les adolescents souhaitent des
échanges « horizontaux » et sans tabous sur la question, leurs parents semblent embarrassés, gênés
par pudeur et par peur que leur ouverture aux discussions sur le sujet conduise complètement et
précocement leurs enfants aux expériences sexuelles pouvant les conduire à des grossesses
précoces et non désirées. Par ailleurs, l’insuffisance de communication parents-enfants sur la
sexualité conduirait ces derniers à combler ce manque à travers le recours aux conseils auprès des
pairs et via les médias sociaux. Sur ce dernier point, le comportement sexuel et reproductif des
adolescent-e-s seraient dictées par les images idéalisées véhiculées dans les médias.
Au Togo, en dépit des efforts du Ministère de la Santé Publique et des institutions internationales
telles que le Centre de Recherche pour le Développement International, l’UNFPA, des
adolescents, les adolescents-e-s demeurent vulnérables aux grossesses précoces et non désirées.
La prégnance des normes socio-culturelles dans les rapports parents-enfants rend le chemin à
parcourir long pour parvenir à une véritable communication parents-enfants sur la sexualité. Du
fait que chaque élève est issu d’une famille et donc un « produit » de son éducation familiale, il
s’avère nécessaire que des réflexions soient menées de façon à trouver des mécanismes adéquats
pour favoriser l’instauration d’un climat de discussion entre les parents et les adolescents en ce
qui concerne leur sexualité ; ceci pour une lutte efficace contre le phénomène des grossesses
adolescentes en milieu scolaire au Togo.

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