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Pourquoi les humains se sont-ils

installés, ont-ils construit des villes

et établi des États ?

Les êtres humains modernes ont franchi ce qui semble avoir été rétrospectivement trois

étapes majeures qui ont profondément transformé la vie de leurs descendants : certains

d'entre eux se sont installés au même endroit pendant de longues périodes ; certains

d'entre eux ont commencé plus tard à intervenir dans le cycle de reproduction des plantes

et des animaux, tandis que l'habitat dans lequel ils vivaient produisait la domestication et

l'agriculture ; et peut-être il y a environ 7 500 ans, quelques peuples dans le monde ont

développé indépendamment des systèmes sociaux caractérisés par une complexité

structurelle et une inégalité de statut. Dans ce chapitre, nous examinons ce que la

recherche anthropologique peut nous dire sur les causes et les conséquences de ces

développements.

SOMMAIRE
Comment est l'humain Social Natoufien Qu'est-ce que l'archéologique
L'imagination enchevêtrée dans Organisation Preuve pour le social
le monde matériel ? Subsistance natoufienne Complexité?
La culture des plantes est-elle une forme de Domestication Ailleurs en Pourquoi la stratification a-t-elle commencé ?

Création de niche ? le monde Comment les anthropologues peuvent-ils

Comment les anthropologues Quelles ont été les conséquences Expliquer l'essor des sociétés
Expliquer les origines de la de domestication et complexes ?
domestication animale ? Sédentisme ? civilisation andine
N'y avait-il qu'un seul moteur de Comment les anthropologues Résumé du chapitre
Domestication? Définir la complexité sociale ?
Pour évaluation
Comment la domestication, Pourquoi est-il incorrect de
Mots clés
La culture et le sédentisme Décrire les sociétés de recherche de nourriture

comme « simples » ?
Lectures suggérées
commencent-ils en Asie du Sud-Ouest ?

Le musée de l'Acropole à Athènes, en Grèce, est construit sur un site archéologique. 201
 202 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
T Aujourd'hui, beaucoup d'entre nous tiennent pour acquis la vie
sédentaire et la dépendance à l'agriculture, mais les
anthropologues soutiennent que ce n'était ni un résultat facile ni
inévitable de l'histoire humaine. Dans ce chapitre, nous donnons un
aperçu de ce que les anthropologues sont capables de dire sur les
changements dans les modes de subsistance humains, en particulier
les facteurs responsables de la domestication des plantes et des
animaux. Nous considérons ensuite l'impact de la dépendance
humaine sur les niches agricoles culturellement construites pour les
développements ultérieurs de la préhistoire humaine.
Comment l'imagination
humaine est-elle enchevêtrée
avec le Monde Matériel ?
La dépendance humaine à l'égard de la culture est
autant une exigence de survie qu'une source de
liberté. L'imagination humaine et l'expérimentation
culturelle peuvent suggérer les aspects du monde
matériel auxquels prêter attention, et ces suggestions
peuvent faire partie d'une tradition culturelle. En
même temps, une fois qu'un groupe s'engage à prêter
attention à certaines parties du monde matériel plutôt
qu'à d'autres, il s'empêtre dans un ensemble de
relations qu'il ne pourra peut-être pas abandonner
librement. Ces relations s'enracinent : elles exercent
une pression déterminante sur les choix futurs.
Comme nous le verrons, lorsque les gens ont
commencé à dépendre des plantes cultivées et des
animaux domestiques, non seulement leur utilisation
du même paysage a changé,
Un bon endroit pour commencer à étudier la relation entre
l'imagination humaine et le monde matériel est de considérer
comment le besoin de gagner sa vie a conduit les êtres humains à
développer différentes formes d'organisation sociale dans différents
environnements naturels. Il s'avère, cependant, que les gens peuvent
gagner leur vie de la même manière dans différents environnements
ou de différentes manières dans le même environnement. Les gens
travaillent dans des usines sur les côtes tropicales du Nigeria et dans
le froid glacial de la Sibérie en Russie ; en Papouasie-Nouvelle-Guinée,
des environnements similaires sont utilisés pour le jardinage par
certaines personnes, tandis que d'autres
domestication Interférence humaine avec la reproduction d'une autre espèce, avec
pour résultat que des plantes et des animaux spécifiques deviennent plus utiles aux
humains et dépendent d'eux.
niche écologique Le mode de vie de toute espèce : ce qu'elle mange et comment elle
trouve des partenaires, élève ses petits, se relie aux compagnons et se protège des
prédateurs.
niche évolutive Somme de toutes les pressions de sélection naturelle auxquelles une
population est exposée.
ont établi d'immenses plantations. Notre étude nous oblige donc
à prêter attention à des facteurs qui ne dépendent pas
uniquement du milieu naturel : caractéristiques de la tradition
culturelle d'un groupe, par exemple, ou influences extérieures
résultant de rencontres historiques imprévisibles avec d'autres
groupes humains. En somme, la documentation et la prise en
compte des transformations majeures dans les adaptations
matérielles humaines nécessitent une attention aux facteurs
écologiques, économiques et socioculturels.
Comme nous l'avons vu, les paléoanthropologues et les archéologues
combinent leurs connaissances avec celles d'autres spécialistes
scientifiques pour reconstituer des modes de vie humains antérieurs. Sur la
base de ces reconstitutions, nous savons que nos ancêtres ont vécu de la
cueillette et de la chasse, au niveau de l'organisation sociale des bandes,
pendant la majeure partie de la préhistoire humaine. Mais il y a environ 10
000 ans, à la fin du Pléistocène, les dernières calottes glaciaires se sont
retirées, le niveau de la mer a augmenté, les vents ont changé et les
environnements ont changé. Les êtres humains ont réagi à ces
changements en interférant systématiquement avec la reproduction
d'autres espèces pour mieux les adapter aux objectifs humains. Ce
processus est appelédomestication, et il s'est produit indépendamment
dans sept régions différentes du monde il y a entre 10 000 et 4 000 ans
(Smith 1995a, 12-13).
Pour apprécier la manière dont les êtres humains ont réagi à ces
changements environnementaux et écologiques, les anthropologues
ont dû s'appuyer sur des concepts tirés de la discipline de l'écologie.
Pour commencer, les écologistes ne se contentent pas de parler
vaguement de « l'environnement » lorsqu'ils évoquent les relations
que les espèces développent entre elles et avec le monde matériel
dans lequel elles vivent. Au contraire, ils recherchent des modèles
dans ces relations dans des contextes géographiques spécifiques.
Traditionnellement, on dit qu'une population d'une espèce s'est
adaptée à un environnement physique local particulier, ouhabitat,
quand il a trouvé une place, ou niche, pour lui-même dans la
communauté locale d'organismes au sein de cet habitat. Unniche
écologique comprend l'espace occupé par la population et ce qu'elle
mange. Des définitions plus larges incluent également les relations
entre les différentes populations et l'impact de leurs activités sur la
communauté (figure 7.2). De nombreux écologistes contemporains
soutiendraient que les niches sont mieux définies en termes
d'activités d'une espèce particulière, y compris l'espace, le temps et
les ressources qu'une population utilise sur une base quotidienne ou
saisonnière (Odling-Smee et al. 2003, 39).
Les études écologiques traditionnelles des populations animales
dans des habitats particuliers ont expliqué l'organisation sociale des
membres de cette population - une troupe de babouins, par exemple -
en concevant l'espace, le temps et les ressources comme des facteurs
limitants auxquels cette population doit s'adapter pour survivre. et se
reproduire avec succès. Les biologistes qui étudient les adaptations
changeantes au fil du temps transforment ce concept de niche
écologique en unniche évolutive concept en traitant « la niche de
toute population
 Comment l'imagination humaine est-elle intriquée avec le monde matériel ?
Hohokam
Vallée de
Mexique
Tikal, GUATEMALA
Chan Chan
AN
Moché
DE
Andes péruviennes
Cusco
S
Tiwanaku
Pachacamac
MOUNATje
Chavin de Huantar
Wari
NS
FIGURE 7.1 Principaux emplacements abordés au chapitre 7.
comme la somme de toutes les pressions de sélection naturelle
auxquelles la population est exposée. . . la partie de sa niche dont il
gagne réellement sa vie, dont il n'est pas exclu par d'autres
organismes, et dans laquelle il est soit capable d'exclure d'autres
organismes, soit de rivaliser avec des organismes coexistants
» (Odling-Smee et al. 2003 , 40). Deux autres concepts écologiques
sont nécessaires pour décrire la dynamique reliant les organismes à
leurs niches : morphologiquecaractéristiques, un terme que les
écologistes appliquent aux traits ou caractéristiques phénotypiques
des organismes, et à l'environnement les facteurs, un terme qui fait
référence aux sous-systèmes de l'environnement de l'organisme. «
Ainsi, la sélection naturelle peut être décrite comme favorisant une
correspondance de caractéristiques et de facteurs » (Odling-Smee et
al. 2003, 41).
D'ordinaire, les écologistes et les biologistes de l'évolution supposent
que les facteurs environnementaux sont plus puissants que les
caractéristiques morphologiques des organismes : c'est-à-dire que la
sélection naturelle implique l'adaptation d'un organisme. à
l'environnement. Depuis Darwin, il est clair que ce processus d'adaptation a
joué un rôle puissant dans l'évolution de la vie sur Terre. Cependant,
comme nous l'avons noté dans les chapitres précédents et comme
l'implique la notion de niche écologique, les organismes ne sont pas des
occupants passifs de créneaux environnementaux rigides. Leurs activités
modifient régulièrement les facteurs de leurs habitats, comme lorsque les
oiseaux construisent des nids, les spermophiles creusent des terriers ou les
castors construisent des barrages. De plus, ces modifications
environnementales peuvent être transmises à leurs descendants (ou à
d'autres organismes vivant dans leurs communautés locales). Comme nous
l'avons vu au chapitre 2, ce processus est appeléconstruction de niche.
Pour être qualifiées de construction de niche, les modifications apportées
par les organismes à leur environnement doivent
203
Çatalhöyük Qal'at Jarmo
Jéricho
CHINE
Uruk
EGYPTE Vallée de l'Indus
'Aïn Ghazal
(Amman, Jordanie)
persistent et/ou s'accumulent au fil du temps pour affecter les
pressions de sélection. L'héritage des environnements altérés avec
des pressions de sélection modifiées est ce que Odling-Smee et al.
(2003) appellent un « héritage écologique » (42).
Dans quelle mesure le processus de construction de niche peut être
appliqué avec succès dans le monde vivant est controversé. Mais cela
donne un excellent sens à l'histoire des adaptations humaines. Par
exemple, Odling-Smee et al. soutiennent que les effets de la construction
de niches (ou de son absence) devraient être visibles lorsque l'on considère
les morphologies des organismes vivant dans des habitats particuliers. Si la
construction de niche est absente, nous devrions nous attendre à découvrir
que les organismes qui réussissent se sont adaptés à leur environnement
grâce à des modifications de leurs phénotypes. Cependant, si la
construction de niches a été présente au cours de l'évolution, les
organismes devraient montrer moins de changements phénotypiques en
réponse aux changements environnementaux. C'est-à-dire que les
organismes modifient leurs environnements sélectifs de manière à les
protéger contre la sélection des changements morphologiques. Et ils
soutiennent que c'est exactement ce que nous semblons trouver dans
l'histoire de l'évolution des hominidés (Odling-Smee et al. 2003, 348-50). Les
personnes qui vivent dans des climats extrêmement froids ne s'adaptent
pas en faisant pousser de la fourrure - elles modifient leur environnement
en fabriquant des vêtements, en construisant des abris et en les chauffant.
Comme nous l'avons vu dans le chapitre précédent, les archives
archéologiques documentent un héritage changeant de l'humanité.
construction de niche Lorsqu'un organisme perturbe activement l'environnement ou
lorsqu'il se déplace activement dans un environnement différent, modifiant ainsi les
pressions de sélection auxquelles il est soumis.
204 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
FIGURE 7.2 Les définitions plus larges
des niches écologiques incluent les
interactions de différentes espèces
partageant le même habitat.
des modifications d'environnements qui, à certains moments, ont
également permis à nos ancêtres de réussir leur vie dans des régions
géographiques du monde qui leur étaient auparavant impénétrables.
En particulier au cours des 200 000 dernières années, nous assistons
à des changements morphologiques mineurs dans la lignée des
hominidés accompagnés d'une élaboration spectaculaire de moyens
humains de modification de l'environnement. C'est dans ce contexte
que les questions sur les transitions dans les schémas adaptatifs
humains sont abordées de la manière la plus fructueuse.
La culture des plantes est-elle une
forme de construction de niche ?
Pendant de nombreuses années, les chercheurs ont
discuté de la mesure dans laquelle la domestication
des plantes était accidentelle ou intentionnelle. Le
biologiste David Rindos, par exemple, suggère que la
domestication aurait pu se produire sans que les gens
soient pleinement conscients de ce qu'ils faisaient.
Nous rappelant que les êtres humains ne sont qu'une
autre espèce animale qui mange des plantes, Rindos
soutient que la relation entre les humains et les
plantes n'est pas différente en principe de la relation
entre une espèce de fourmi et une espèce d'acacia.
Les fourmis vivent dans les épines agrandies des
acacias. Ils consomment une substance sucrée
produite à la base des feuilles d'acacia et nourrissent
leurs larves de bouts de feuilles modifiés. Mais les
fourmis mangent aussi d'autres insectes qui,
autrement, attaqueraient les feuilles d'acacia.
Les effets involontaires et mutuellement bénéfiques des acacias
et des fourmis les uns sur les autres modifient la sélection naturelle
les pressions subies par chaque espèce ; c'est ce que les biologistes
appellentmutualisme. Des exemples de mutualisme multispécifique
illustrent le fait important que les espèces n'ont pas besoin d'être
liées les unes aux autres uniquement en tant que prédateurs et
proies. En effet, les espèces mutualistes atteignent ensemble des
fitness biologiques plus élevés que l'une ou l'autre n'aurait pu
atteindre seule. Dans le même temps, se concentrer étroitement sur
le mutualismeespèce négligent eux-mêmes le contexte
environnemental plus large dans lequel les deux espèces doivent
gagner leur vie. L'exemple de Rindos doit invoquer ce contexte pour
expliquer pourquoi les acacias ont si mal fait lorsque les fourmis ont
été enlevées. Ce n'est pas simplement que ces deux espèces vivaient
ensemble d'une manière non prédatrice ; au contraire, chaque espèce
a servi à modifier de manière significative la niche écologique de
l'autre espèce, la tamponnant des pressions sélectives auxquelles elle
aurait autrement été exposée.
De toute évidence, les fourmis et les acacias ont pu
développer cette relation sans planification consciente. Mais
cela signifie-t-il, comme le plaisantait Robert Wenke (1999),
que « les hommes se sont révélés être d'excellents
instruments pour que les céréales conquièrent le monde
» (271) ? Certaines archéologues féministes se méfiaient de
cette manière d'aborder la domestication des plantes par
l'homme. Premièrement, affirmer que la domestication était
un processus inconscient néglige le fait que les êtres
humains de la fin du Pléistocène étaient suffisamment
modernes et suffisamment intelligents pour comprendre les
causes et les effets concernant leur mode de vie. Ainsi, ils ont
sûrement sélectionné délibérément les plantes les plus
faciles à récolter, les plus nourrissantes et les plus
savoureuses. Dans cette optique, les humains intervenaient
activement dans le pool génétique des plantes sauvages ; la
domestication était consciente et non inconsciente. Seconde,

candidats pour les premiers ancêtres humains à avoir expérimenté la
domestication des plantes. Par conséquent, supposer que la
domestication des plantes était un processus passif et inconscient
ressemble à l'imposition d'un stéréotype sexiste grossier sur les
comportements de subsistance de nos ancêtres. Troisièmement, ne
prêter attention qu'aux plantes et aux gens ignore les types de
modifications environnementales nécessaires pour réussir la
domestication des plantes, qui dépendait clairement d'une
intervention humaine consciente et active.
Certains archéologues ont tenté de combler cette lacune.
T. Douglas Price et Anne Birgitte Gebauer, par exemple,
distinguent domestication et culture. Domestication est
l'interférence humaine avec la reproduction d'une autre espèce,
avec pour résultat que des plantes et des animaux spécifiques
deviennent à la fois plus utiles aux humains et dépendants d'eux.
Il modifie les génotypes et les phénotypes des plantes et des
animaux au fur et à mesure qu'ils deviennent dépendants de
l'homme.Cultivation, en revanche, est un processus culturel
délibéré impliquant les activités de préparation des champs, de
semis, de désherbage, de récolte et de stockage et qui nécessite
une nouvelle façon de penser la subsistance et une nouvelle
technologie pour y parvenir (Price et Gebauer 1995, 6). C'est-à-
dire que les habitats adaptés aux espèces domestiquées doivent
être soigneusement construits et entretenus pour que les
espèces domestiquées parviennent à maturité et soient récoltées
avec succès. En effet, le même processus est requis pour une
domestication animale réussie.
De cette perspective, agriculture est mieux comprise
comme la modification systématique des « environnements
des plantes et des animaux pour augmenter leur productivité
et leur utilité » (Wenke 1999, 270). Price et Gebauer appellent
cet environnement systématiquement modifié (ou niche
construite) leagroécologie, qui devient le seul
La culture des plantes est-elle une forme de construction de niche ? 205
FIGURE 7.3 L'agriculture industrielle
convertit des hectares d'habitat en une
agroécologie uniforme pour la culture de
cultures commerciales comme le blé.
environnement dans lequel les plantes (ou les animaux) peuvent
s'épanouir (figure 7.3). Bruce Smith (1995a) souligne que les activités
qui ont conduit à la domestication étaient des tentatives conscientes,
délibérées et actives des peuples en quête de nourriture pour
« augmenter à la fois la contribution économique et la fiabilité d'une
ou plusieurs des espèces sauvages dont elles dépendaient pour leur
survie, et ainsi réduire les risques. et l'incertitude » (16). Ces activités
comprennent le brûlage de la végétation pour encourager les plantes
préférées qui prospèrent dans les paysages brûlés ou pour attirer les
animaux sauvages qui se nourrissent de ces plantes (figure 7.4). Ce
sont des exemples clairs de construction de niche. Les ancêtres des
plantes à graines domestiquées comme le blé étaient des adventices
généralistes qui, en plus de leur attrait alimentaire, prospéraient dans
des environnements perturbés. De tels attributs en faisaient des
candidats de choix pour la domestication.
Plus récemment, certains anthropologues ont soutenu que la
théorie de la construction de niches peut clarifier les relations entre
les personnes, les plantes et les animaux qui émergent dans les
processus de domestication. Melinda Zeder, par exemple, suggère
que de telles relations sont mieux comprises commecoévolutionnaire
et que « la construction de niches joue un rôle dans chacune des trois
voies distinctes que les humains, les plantes et les animaux suivent
pour se domestiquer » (2016, 328). Premièrement, les humains
s'engagent dans l'ingénierie des écosystèmes pour modifier les
conditions de croissance des plantes. Deuxièmement, les plantes et
les animaux entrent en relation avec les humains afin de profiter des
opportunités offertes par
agriculture La modification systématique des environnements des plantes et
des animaux pour augmenter leur productivité et leur utilité.
agroécologie L'environnement systématiquement modifié (ou niche construite) qui
devient le seul environnement dans lequel les plantes domestiquées peuvent
s'épanouir.
 206 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
FIGURE 7.4 En Australie, les chasseurs-
cueilleurs brûlent la végétation pour
favoriser la croissance des plantes.
environnements créés par l'homme. Troisièmement,
les humains peuvent commencer à interférer avec la
reproduction des plantes et des animaux pour mieux
les adapter aux objectifs humains (Zeder 2016, 328).
La troisième étape est ce que l'on a traditionnellement
compris par « domestication », mais le degré de
contrôle que les humains exercent dans ce réseau
coévolutif de relations peut varier. Zeder mentionne
des recherches suggérant que « les espèces
présentant des degrés élevés de variation génétique,
en particulier celles qui présentent une plasticité dans
l'expression des traits phénotypiques, sont plus
susceptibles de réagir aux changements
d'environnements sélectifs causés par la construction
de niches » (2016, 329) . Zeder conclut que l'étude de
la domestication promet de clarifier les problèmes de
la théorie évolutionniste contemporaine,
Pour mieux comprendre comment la domestication et
l'agriculture se sont développées, il faut les distinguer toutes
deux dessédentisme, qui est le processus d'habitation humaine
de plus en plus permanente dans un endroit et contraste avec les
modèles d'habitation moins permanents et plus nomades vécus
par les premiers hominidés. Mais les gens n'ont pas besoin de
devenir agriculteurs pour devenir sédentaires. Les adaptations
sédentaires des peuples autochtones de la côte nord-ouest de
l'Amérique du Nord ne dépendaient pas de l'agriculture, mais des
montaisons saisonnières abondantes de saumons, qui pouvaient
être « récoltés » aussi régulièrement que les cultures mais
impliquaient une interférence écologique minimale et aucun
processus de domestication.
sédentisme Le processus d'habitation humaine de plus en plus permanente en un seul
endroit.
Le sédentisme est probablement plus utilement compris comme une
conséquence du choix des humains de dépendre des ressources dans des
types particuliers de niches construites. Le sédentisme est un élément clé
qui modifie les pressions de sélection de ceux qui en viennent à dépendre
des ressources de subsistance en un lieu fixe, qu'il s'agisse d'une berge ou
d'un champ cultivé ou d'un pâturage. Les êtres humains qui cultivent pour
gagner leur vie peuvent se protéger des famines périodiques et être en
mesure de subvenir aux besoins de populations plus importantes. Dans le
même temps, ils se rendent vulnérables à une variété de nouvelles
pressions de sélection provoquées par la vie sédentaire : exposition aux
menaces des ravageurs agricoles et des voleurs, ainsi qu'aux organismes
pathogènes qui se reproduisent et se propagent avec plus de succès parmi
les populations sédentaires que parmi les nomades. . Comme nous l'avons
vu, le défrichement des forêts par les premiers agriculteurs d'Afrique de
l'Ouest a apparemment créé des conditions écologiques favorisant de plus
grandes mares d'eau stagnante, qui étaient des terrains de reproduction
idéaux pour les moustiques vecteurs du paludisme. Ceci, à son tour, a créé
une nouvelle pression de sélection en faveur de l'allèle drépanocytaire, qui
offre aux porteurs hétérozygotes une certaine protection contre le
paludisme (Odling-Smee et al. 2003, 251).
Quels obstacles ont rencontré ceux qui ont d'abord interféré
dans le cycle de vie des plantes sauvages ? Si la plante était une herbe,
comme le blé, ils devaient faire face au modèle de reproduction de
cette plante. Le grain de blé, aussi bien domestiqué que sauvage, est
attaché à la tige de la céréale par un épillet appelé « rachis » (Figure
7.5). Dans le blé sauvage, le rachis devient extrêmement cassant à
mesure que le grain mûrit, et les grains de n'importe quelle tige
mûrissent de bas en haut en une semaine ou deux. Au fur et à mesure
que chaque grain mûrit, le rachis peut être brisé par un animal
marchant dans le peuplement de blé ou même par une rafale de vent,
dispersant le grain dans l'air et éventuellement sur le sol. Le blé
sauvage a deux rangées de grains sur chaque tige. Parce que les
grains mûrissent à différents
 Comment les anthropologues expliquent-ils les origines de la domestication animale ?
FIGURE 7.5 Les grains de blé se forment à l'intérieur d'épillets qui
attacher à la plante par une structure appelée « rachis ». Le
rachis du blé sauvage est cassant, ce qui facilite la dispersion
des graines dans la nature. Le rachis du blé domestiqué n'est
pas cassant et les épillets restent attachés à l'épi pendant la
récolte. (B. Smith 1995, 73)
207
Mes, les graines ont plus de chance de se disperser dans
des directions différentes et de ne pas toutes atterrir au
pied de la plante mère en touffe. Le grain de blé sauvage
enfermé dans une enveloppe extérieure dure appelée
«glume», qui protège le noyau du gel et de la déshydratation
nd lui permet de rester viable jusqu'à 20 ans dans le
sol.
Pour être utilisé avec succès par les êtres humains, le blé
aurait besoin d'un rachis beaucoup moins cassant, d'épis qui
mûrissent en même temps et d'une glume plus molle. ce serait
Ils nécessitent également une tête de graine plus grande et plus
facilement visible (en termes à la fois de la taille du grain et du nombre de
rangs de grain et de tige). Les plantes avec ces variations auraient eu un
avantage sélectif une fois que les êtres humains ont commencé à
manger de l'ourlet. Au fur et à mesure que les gènes responsables de ces
traits augmentaient dans la population de plants de blé - des
changements qui, étant donné la génétique des plantes, auraient pu
prendre très peu de générations, les plantes auraient contribué de plus en
plus à l'alimentation humaine. Les premiers blés domestiqués montrent
précisément ces tendances évolutives, avec notamment six rangs d'épis
sur une tige plutôt que deux.
Les niches construites favorables à l'agriculture ont
également varié dans le temps et dans l'espace de plusieurs
manières importantes, et elles ne sont pas apparues du jour au
lendemain. David Harris (1989, 17) donne un aperçu utile de ces
établit et classe les relations entre les plantes et les hommes en
quatre grands systèmes de production alimentaire : 1)
l'approvisionnement en aliments végétaux sauvages, (2) la
production d'aliments végétaux sauvages, (3) la culture et (4)
l'agriculture (Figure . 6). Harris note qu'il y a trois points auxquels la
quantité d'énergie que les gens mettent dans les activités d'aliments
végétaux augmente fortement : (1) où commence la producon
d'aliments végétaux sauvages, (2) où commence la culture et (3) où
commence l'agriculture.
Comment les anthropologues
Expliquer les origines de la
domestication animale ?
domestication animale peut être défini comme « la capture et
l'apprivoisement par des êtres humains d'animaux d'une espèce
ayant des caractéristiques comportementales particulières, leur
retrait de leur zone de vie naturelle et de leur communauté de
reproduction, et leur maintien dans des conditions de reproduction
contrôlées pour des avantages mutuels » (Bökönyi 1989, 22) . Cette
définition considère la domestication des animaux comme une
conséquence des tentatives des gens de contrôler les animaux qu'ils
chassaient, ce qui suppose une intervention humaine active dans la
sélection des animaux à domestiquer et comment les domestiquer.
Les animaux sont plus mobiles que les plantes, et bien que l'abattage
des troupeaux sauvages puisse induire certains changements dans
208 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?

Plante-exploitatrice Effets écologiques Rendement alimentaire Socio-économique

activité (exemples sélectionnés) système les tendances Temps

Végétation en feu Réduction de la concurrence ; recyclage accéléré NOURRITURE-SAUVETAGE

des nutriments minéraux; stimulation de la APPROVISIONNEMENT
reproduction asexuée; sélection pour un port (Fourrager)
annuel ou éphémère;

constitution de l'État)
synchronisation de la fructification
Augmentation de l'apport d'énergie humaine par unité de surface de terre exploitée

Cueillette/collecte Dispersion occasionnelle de propagules

Sédentisme croissant (taille de l'établissement, densité et durée d'occupation)

Tendance protectrice Réduction de la concurrence ; perturbation
locale du sol
je
Plantation de remplacement/ Maintien de la population végétale à l'état sauvage

Densité croissante de la population (locale, régionale et continentale)

semis
Transplantation/semis Dispersion des propagules vers de nouveaux habitats NOURRITURE-SAUVETAGE

stratification
Désherbage Réduction de la compétition : modification du sol
PRODUCTION
avec un minimum de travail du sol
Récolte Sélection pour les mécanismes de dispersion :
positif et négatif

PRODUCTION VÉGÉTALE
Espace de rangement Sélection et redistribution des propagules
Drainage/irrigation Amélioration de la productivité ;
modification du sol

II

Complexité sociale croissante (classement

Dépollution des terres
Transformation de la composition et de la structure
de la végétation CULTIVATION
avec systématique
Travail du sol systématique Modification de la texture, de la structure et de la fertilité labour
III du sol

Propagation des variants génotypiques et phénotypiques : DOMESTICATION

Culture de plantes domestiquées Mise en place de cultures agro-
AGRICULTURE
écosystémiques (cultivars) (Agriculture)

Évolutionniste
différenciation de
systèmes agricoles

FIGURE 7.6 Les quatre principaux systèmes de production alimentaire selon David Harris. Les ratios énergie-entrée/énergie-sortie augmentent
fortement là où commence la production d'aliments végétaux sauvages, où commence la culture et où commence l'agriculture. (Lespropagules dans la
deuxième colonne se réfèrent les formes par lesquelles les plantes sont reproduites - graines, pousses, etc.) (Harris 1989, 17)

le pool génétique, ce n'est qu'en confinant les animaux ou en les Ainsi, la phrase de Bökönyi « les maintenir en captivité » n'est
maintenant en captivité que les êtres humains peuvent intervenir pas une phrase innocente. Comme le suggèrent les travaux en
directement dans leurs modes de reproduction. Comme nous zooarchéologie sociale, les humains ont conçu une gamme
l'avons vu précédemment, cependant, Zeder et d'autres ont d'environnements différents pour attirer des animaux sensibles de
commencé à attirer l'attention sur les formes de mutualisme différentes espèces, avec différents degrés de succès. Ces
entre les humains et les animaux qui sont au cœur de la modifications environnementales peuvent aller de la protection
domestication (Zeder 2016, 328), contribuant à un champ d'animaux sélectionnés contre d'autres prédateurs à leur
émergent dezooarchéologie sociale qui attire l'attention sur le approvisionnement en nourriture et en eau, en passant par une
côté animal du mutualisme humain-animal (Honeychurch et surveillance étroite de leur cycle de vie, de la naissance à l'abattage,
Makarewicz, 2016, 350). Les travaux de l'archéologue Kristin dans des conditions hautement artificielles. Et là encore,
Armstrong Oma (2010) illustrent cette approche. Elle soutient l'engagement humain dans la construction de niches favorables aux
que la conception des maisons longues scandinaves de l'âge du animaux domestiques modifie simultanément les pressions de
bronze suggère que les humains et les animaux pouvaient vivre sélection que subissent les humains : la dépendance à l'égard d'un
ensemble dans l'intimité parce que les animaux du troupeau approvisionnement fiable en viande et en peaux peut signifier qu'un
étaient des êtres sensibles prêts à étendre aux êtres humains les groupe humain est obligé de suivre un troupeau partout où il choisit
formes de confiance sociale qu'ils accordaient déjà aux autres d'aller ou de modifier ses propres adaptations selon les saisons pour
membres de leur troupeau. Même si ce type de mutualisme liait déplacer les troupeaux vers des approvisionnements fiables en eau et
étroitement les humains et les animaux, cependant, la relation en fourrage. De tels mouvements rendront les humains vulnérables
n'était pas égale, car les humains pouvaient toujours choisir aux rencontres négatives aussi bien que positives avec d'autres
d'agir de manière à favoriser leurs intérêts par rapport à ceux de habitats et d'autres espèces, y compris d'autres êtres humains, avec
leurs animaux. lesquels ils devront composer si leur
 Comment les anthropologues expliquent-ils les origines de la domestication animale ?
NORD
AMÉRIQUE
Tournesol,
chiens
Haricots, courges, maïs,
amarante, courge
Pacifique
océan
SUD
AMÉRIQUE
atlantique
océan
Lamas, coton,
courges, courges, haricots, alpagas,
maïs, pommes de terre, cobayes
FIGURE 7.7 Une carte des emplacements probables où diverses plantes et animaux ont été domestiqués.
s'adapter, c'est réussir. Tout le monde n'est pas content lorsque
les bergers font paître leurs animaux dans des zones où
poussent des plantes cultivées.
La domestication des animaux est difficile à mesurer avec
précision dans les archives archéologiques. Wenke (1999) identifie
quatre classes principales de preuves utilisées par les archéologues
pour évaluer la domestication des animaux. Premièrement, la
présence d'une espèce animale en dehors de son aire de répartition
naturelle peut indiquer un troupeau. Par exemple, parce que le
Levant méridional (la zone côtière à l'extrémité orientale de la mer
Méditerranée ; voir la figure 7.7) est en dehors de la zone dans
laquelle les moutons sauvages ont évolué, les chercheurs disent que
les restes de moutons trouvés là-bas constituaient une preuve
d'élevage : les moutons doivent avoir été amenés dans la région par
des personnes. Pour qu'un tel argument soit efficace, nous devons
être sûrs de connaître précisément l'aire de répartition naturelle des
espèces sauvages.
Deuxièmement, des changements morphologiques se produisent dans la
plupart des populations animales au fur et à mesure que la domestication
progresse. Wenke et Olszewski (2007, 253) soulignent que la forme et la taille des
cornes de mouton reflètent le processus de domestication. Les moutons
sauvages ont des cornes plus grosses et plus solides que les moutons
domestiques. Chez les moutons sauvages, les grandes cornes sont liées aux
hiérarchies de reproduction que les mâles établissent en se battant. La pression
sélective exercée sur ces cornes s'est relâchée au fur et à mesure que les
moutons étaient domestiqués, la taille et la forme des cornes ont donc changé.
209
Chèvres, chiens, bovins, Chiens, millet, poulets,
blé, mouton, orge bétail, riz, porcs
L'EUROPE  
ASIE
chat Pacifique
océan
AFRIQUE
Palmier à huile, millet,
Indien
igname, sorgho
océan
AUSTRALIE
Moutons, blé, porcs,
orge, chèvres
Troisièmement, l'augmentation brutale de la population de
certaines espèces par rapport à d'autres sur un site est souvent
considérée comme une preuve de domestication. Il y a environ 9 000
ans, dans le sud-ouest de l'Asie, la composition des assemblages d'os
d'animaux change. La domination presque totale des os de gazelle
cède et le pourcentage d'os de mouton et de chèvre augmente
considérablement.
Quatrièmement, l'âge et le sexe des animaux dont les os
sont fossilisés sont utilisés pour déduire l'existence d'une
domestication animale. Les chercheurs supposent que de
nombreux restes d'animaux immatures ou juvéniles, en
particulier les mâles, représentent l'implication humaine dans le
troupeau. Pourquoi? Dans la nature, les animaux tués pour la
viande proviennent d'une tranche d'âge beaucoup plus large ;
l'accent n'est pas mis sur les animaux plus jeunes, en particulier
les jeunes mâles. De plus, les êtres humains qui gèrent les
troupeaux tuent plus facilement les mâles immatures que les
femelles, car seul un petit nombre de mâles sont nécessaires à la
reproduction, alors qu'un plus grand nombre de femelles fournit
plus de progéniture, plus de lait et d'autres produits tels que le
fumier, la laine et les cheveux. Les analyses de la structure par
âge et sexe des restes d'animaux aident à établir la fonction d'un
troupeau domestiqué : un troupeau de viande contient beaucoup
d'animaux adolescents et jeunes adultes,
Comment a commencé la domestication des animaux ? Le
plus ancien animal domestique connu était le chien, pour lequel
210 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?

Années
Nord Sud Du sud Sud-ouest Est
avant
Amérique Mésoamérique Amérique Afrique L'Europe   Asie Asie
présent

1 000

2 000 blanche
pommes de terre

3 000 Agneau Chats (Egypte)

quarts,
tournesols,
aîné des marais,
4 000 écraser ignames,

Maïs, lamas, huile de palme

Poulets
alpagas, (Sud central
Maïs, haricots, coton (blanc Asie)
5 000 poivrons, pommes de terre?) Millet, Chevaux (Eurasie) Chameaux
gourdes, sorgho
écraser

6 000
Bovins, porcs,
Millet

7 000 Gourdes, Moutons, chèvres

écraser,
Haricots de Lima,

commun
8 000 des haricots,
Orge de blé, Figues Riz
Cochons d'Inde
lentilles, mouton,
chèvres, chiens

9 000 Haricots Bovins Chiens

Chiens

Chèvres, bovins
10 000 Orge
Blé
Mouton

11 000 Chiens Chiens

FIGURE 7.8 Une chronologie des dates probables où diverses plantes et animaux ont été domestiqués dans différentes régions.

il existe des preuves de l'Ancien Monde d'un site de grottes
magdaléniennes dans le nord de l'Espagne vieux de 16 000 ans.
De toute évidence, il y avait des avantages mutuels importants
pour les chiens et les êtres humains à faire équipe dans la chasse.
Les premiers loups à peine domestiqués ont dû être des
compagnons redoutables pour les chasseurs paléolithiques, mais
finalement la relation homme-chien est devenue très étroite. La
première preuve incontestée de domestication de chien a été
trouvée sur un site vieux de 14 700 ans en Allemagne, dans une
tombe contenant deux squelettes humains et la mâchoire d'un
chien. L'analyse de l'ADN mitochondrial a identifié les restes de
chien comme appartenant à un ancêtre de chiens contemporains
(Morey 2010 ; Thalmann 2013 ; Giemsch et Feine 2015 ; Figure
7.8).
Il semble que d'autres animaux aient été domestiqués pour fournir de la
nourriture plutôt que pour aider à obtenir de la nourriture. Franck Trou
soutient que les gens dans différentes régions ont expérimenté avec des
animaux trouvés autour d'eux pour déterminer ceux qui étaient à la fois
désirables comme nourriture et susceptibles d'être contrôlés par l'homme.
Les moutons et les chèvres étaient des animaux grégaires relativement
inoffensifs qui avaient de multiples usages pour les êtres humains et qui se
trouvaient de façon saisonnière dans les mêmes endroits que les plantes
mûrissantes que les gens voulaient récolter.
Cependant, les preuves, telles que résumées par Hole, placent les
moutons et les chèvres dans différentes zones écologiques du nord de la
Mésopotamie, et il est probable que leur répartition ne se chevauche pas
beaucoup, voire pas du tout (figures 7.7 et 7.8). En d'autres termes, les
moutons et les chèvres ont été domestiqués séparément et à des moments
différents. Les premières preuves de l'élevage de chèvres remontent à
environ 11 000 à 10 000 ans avant le présent, dans une zone étroite le long
du front des monts Zagros. Les premiers sites pour les moutons
domestiqués étaient peut-être dans le centre

Anatolie (la partie asiatique de la Turquie moderne). Les preuves de
deux autres animaux domestiques majeurs de l'Ancien Monde, les
bovins et les porcs, sont beaucoup plus difficiles à trouver, mais
semblent indiquer de multiples sites de domestication pour les bovins
de la Chine vers l'Europe occidentale commençant quelque temps
après il y a 11 000 ans. Des os de porc domestiqués ont été trouvés
dans tout le sud-ouest de l'Asie il y a 8 000 ans.
Comme mentionné ci-dessus, les animaux chassés à l'état sauvage et
domestiqués par des troupeaux ne sont que les extrémités d'un continuum
de relations animal-humain-environnement. Jarman et ses associés (1982,
51-54) décrivent six étapes de ces relations. Le premier estchasse au hasard
, dans lequel les chasseurs ne tentent pas de contrôler les troupeaux mais
chassent les animaux au fur et à mesure qu'ils les trouvent. La deuxième
étape,chasse contrôlée, implique la chasse sélective des troupeaux, tuant
les jeunes mâles, par exemple. C'est le début d'une intervention humaine
régulière dans le pool génétique des espèces du troupeau. Dans la
troisième étape,troupeau suivant, des troupeaux spécifiques et des
groupes de personnes spécifiques commencent à interagir régulièrement ;
au fur et à mesure que le troupeau se déplace d'un endroit à l'autre, les
gens se déplacent également. La quatrième étape,troupeau en vrac, c'est
quand les gens commencent à contrôler les mouvements du troupeau. Ils
déplacent le troupeau à différents moments de l'année, s'assurant que tous
les animaux se déplacent en toute sécurité en même temps. Ils
interviennent également activement dans le patrimoine génétique du
troupeau par le biais de l'élevage sélectif et de l'abattage. La cinquième
étape,fermer l'élevage, est la pratique la plus courante dans une grande
partie des États-Unis et de l'Europe occidentale. La mobilité des animaux
est limitée et leur patrimoine génétique est activement géré. Dans la
sixième étape,l'élevage industriel, il y a une intervention humaine très
active dans tous les aspects de la vie des animaux. Dans certains cas, les
animaux ne quittent jamais le bâtiment ou le parc d'engraissement dans
lequel ils sont élevés.
Tous les animaux chassés, même de manière contrôlée, n'ont
pas été domestiqués. La gazelle est un bon exemple : il existe des
preuves que la chasse contrôlée il y a environ 9 500 ans dans le sud-
ouest de l'Asie a entraîné des changements importants dans le pool
génétique de la gazelle, mais il n'y a aucune preuve de domestication.
Il est clair que l'abattage de troupeaux de certains types d'animaux
(mâles plutôt que femelles, moins laineux que plus laineux, plus
minces que plus gros) affecte le patrimoine génétique d'une manière
qui démontre que les humains ont une influence sur les animaux
même si les animaux ne sont pas entièrement domestiqués. . Ainsi, le
troupeau suit les ombres presque imperceptiblement en troupeau
lâche.
Richard Meadow (1989, 81), en revanche, soutient que
l'élevage représente un changement complet dans les attitudes
humaines et les relations avec les animaux. À tout le moins,
l'attention humaine passe de l'animal chassé au produit principal
de l'animal vivant, sa progéniture. Ce changement, suggère-t-il,
est lié à un changement majeur dans la vision du monde qui a
été impliqué dans les autres processus culturels sédentisme et
culture végétale - de l'Asie du sud-ouest post-pléistocène : le
développement d'une préoccupation pour
N'y avait-il qu'un seul moteur de domestication ? 211
propriété et son entretien dans le temps. Meadow soutient que ce
changement d'orientation était essentiel pour le développement de
l'élevage en tant que phénomène social et culturel et pour le
développement de la complexité sociale. Mais l'élevage lui-même a dû
subir des changements avant que cela puisse se produire, comme le
montre Adam Allentuck (2015) pour la côte orientale de la mer
Méditerranée (appelée le Levant). Entre 4500 et 3100AEC., un
changement majeur s'est produit dans cette région, de l'exploitation
des troupeaux pour produits primaires comme la viande, les os et la
peau, à un accent sur les énergies renouvelables produits secondaires
comme le lait ou les fibres (pour les textiles), ou la force musculaire
(pour tirer des charrues ou porter des charges). « Les gens auraient
noué des relations distinctes avec des animaux d'élevage spécialisés,
car chacun des produits secondaires s'est développé
indépendamment à différents endroits et à différents moments
» (2015, 99). Ces changements ont à la fois prolongé la vie des
animaux du troupeau et accru les dépendances mutuelles reliant les
troupeaux et les éleveurs, libérant « le travail humain pour l'expansion
agricole, la spécialisation artisanale et les projets de construction à
grande échelle » (2015, 99). Des développements tels que ceux-ci ont
fourni un riche échafaudage pour le développement ultérieur de la
complexité sociale au Levant.
N'y avait-il qu'un seul moteur
de domestication ?
Il y a environ 10 000 ans, après près de 4 millions d'années d'évolution
des hominidés et plus de 100 000 ans de recherche de nourriture
réussie par H. sapiens, les êtres humains vivant dans des régions
éloignées et non connectées du monde ont développé presque
simultanément des stratégies de subsistance qui impliquaient des
plantes et des animaux domestiqués. Pourquoi? Certains chercheurs
ont cherché une explication unique et universelle qui expliquerait
tous les cas originaux de domestication. Ainsi, il a été avancé que la
domestication est le résultat de la pression démographique, car la
population humaine croissante de chasse et de cueillette a dépassé
les ressources alimentaires existantes. D'autres évoquent le
changement climatique ou la famine alors que le climat postglaciaire
est devenu plus sec. Cependant, l'augmentation des recherches
archéologiques a clairement montré que les preuves en faveur d'une
explication à cause unique et universellement applicables sont faibles.
Certains chercheurs ont proposé des explications universellement
applicables qui prennent en compte plusieurs phénomènes différents. Une
telle explication, appeléerecherche de nourriture à large spectre, repose
sur une reconstitution de la situation environnementale qui a suivi le recul
des glaciers les plus récents. Les très gros animaux de l'ère glaciaire ont
commencé à disparaître et ont été remplacés par un nombre croissant
d'animaux plus petits. Au fur et à mesure que le niveau de la mer s'est
élevé pour couvrir la
recherche de nourriture à large spectre Une stratégie de subsistance basée sur la collecte
d'un large éventail de plantes et d'animaux par la chasse, la pêche et la cueillette.
Traduit de Anglais vers Français - www.onlinedoctranslator.com
212 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
les plateaux continentaux, les poissons et les crustacés sont devenus plus
abondants dans les eaux plus chaudes et moins profondes.
Les effets sur les plantes ont été tout aussi dramatiques à
mesure que les forêts et les terres boisées se sont étendues à de
nouvelles zones. Par conséquent, selon ces érudits, les gens ont dû
changer leur régime alimentaire, passant de la chasse au gros gibier à
la recherche de nourriture à large spectre pour les plantes et les
animaux par la chasse, la pêche et la cueillette. Cet élargissement de
l'économie aurait conduit à une base de subsistance plus sûre, à
l'émergence de communautés sédentaires et à une croissance de la
population. À son tour, la croissance démographique a exercé une
pression sur la base de ressources de la région et les gens ont été
contraints de manger des aliments de «troisième choix», en particulier
des céréales sauvages, difficiles à récolter et à transformer, mais qui
répondaient aux efforts humains pour augmenter les rendements.
Bien que l'argument de la recherche de nourriture à large spectre
semble expliquer la domestication des plantes dans le Nouveau
Monde, les preuves les plus récentes de l'ancienne Asie du Sud-Ouest
ne le soutiennent pas. Il existe également des preuves du
développement de la collecte à large spectre en Europe, mais la
domestication n'a pas suivi. Au contraire, les cultures domestiquées
ont été introduites en Europe par des personnes du sud-ouest de
l'Asie, où une révolution à large spectre n'avait pas eu lieu.
Un type d'argument très différent est venu de Barbara Bender
(1977), qui a suggéré qu'avant le début de l'agriculture, il y avait une
compétition entre les groupes locaux pour obtenir la domination les
uns sur les autres par le biais de festins et de la dépense de
ressources sur le rituel et l'échange, s'engageant dans une sorte de
préhistoire "course aux armements." Pour répondre à la demande
croissante de nourriture et d'autres ressources, l'utilisation des terres
a été intensifiée et le développement de la production alimentaire a
suivi. Cet argument met l'accent sur les facteurs sociaux, plutôt que
sur les facteurs environnementaux ou techniques, et adopte une
approche locale et régionale. Elle est étayée par des récits
ethnographiques concernant des activités d'échange concurrentiel,
telles que lapotlatch des habitants autochtones de la côte nord-ouest
de l'Amérique du Nord. Ces gens étaient des fourrageurs dans un
environnement riche qui leur a permis de s'installer dans des villages
relativement permanents sans agriculture ni élevage. La concurrence
entre les groupes voisins a conduit à des formes d'échange
concurrentiel de plus en plus élaborées, des quantités de plus en plus
importantes de nourriture et d'autres biens étant distribuées à
chaque potlatch suivant. Aussi suggestif que soit l'argument de
Bender, cependant, il est difficile de trouver des preuves d'un festin
compétitif dans les vestiges archéologiques.
Récemment, les archéologues ont évité les grandes théories
affirmant qu'un processus unique et universel était responsable de la
domestication où qu'elle se produise. Beaucoup préfèrent adopter
une approche régionale, en recherchant des causes particulières à
une région qui peuvent ou non s'appliquer à d'autres régions.
Actuellement, les explications les plus puissantes semblent être
théories à plusieurs brins qui tiennent compte de l'effet local combiné
du climat, de l'environnement, de la population, de la technologie,
l'organisation sociale et l'alimentation sur l'émergence de la
domestication. L'approche à volets multiples est bien illustrée
dans un article de McCorriston et Hole (1991), et leurs
travaux constituent la base de l'étude de cas suivante sur la
domestication dans l'ancienne Asie du sud-ouest.
Comment la domestication,
La culture et le sédentisme
commencent-ils en Asie du Sud-Ouest ?
On pense que la domestication de l'Asie du Sud-Ouest a commencé il
y a environ 12 500 ans avec les butineurs natoufiens, qui dépendaient
de l'exploitation intensive des céréales sauvages (notamment le blé et
l'orge sauvages), les noix (en particulier les glands, les pistaches et les
amandes) et le gibier sauvage (en particulier gazelle et cerf élaphe)
(Belfer-Cohen 1991, 167; figures 7.7 et 7.8). En raison des
changements climatiques et écologiques dans le monde qui ont suivi
le recul des glaciers, les Natoufiens ont pu exploiter ce qui était, au
départ, des réserves de plus en plus riches de céréales sauvages et de
grands troupeaux de gazelles, ce qui a rendu possible la sédentarité.
Bien que de nombreux sites natoufiens soient de petits camps de
chasse, les chercheurs ont découvert au moins deux douzaines de
villages natoufiens, ou camps de base, qui ont atteint une taille de 1
000 m2
(environ un quart d'acre) et au-delà (Belfer-Cohen 1991,
176-77). Henry (1989, 218) estime que les hameaux
natoufiens comptaient de 40 à 150 personnes ; ils étaient
cinq à dix fois plus grands que les camps mobiles
d'alimentation des peuples qui les ont précédés.
Que ces premiers villages natoufiens étaient plus
que de simples campements est révélé dans leur
architecture (figure 7.9). Les maisons natoufiennes
étaient partiellement creusées dans le sol et avaient
des murs de pierre et de boue avec quelques poteaux
en bois et probablement des poutres de toit. Sur le
site de Mallaha, les archéologues ont trouvé des
fosses de stockage doublées de plâtre dans les
maisons. Les archéologues en déduisent que de tels
bâtiments, qui ont nécessité une quantité
considérable de main-d'œuvre et de matériaux pour
être construits, n'ont pas été construits uniquement
pour une brève résidence. Les archéologues ont
également trouvé des mortiers de pierre massifs
utilisés pour broyer les graines. L'implication est que
les gens n'auraient pas pu transporter des ustensiles
aussi lourds, ni n'auraient-ils investi le temps et les
efforts pour les fabriquer s'ils allaient les abandonner
après une saison d'utilisation. En outre,
Enfin, la production artistique chez les Natoufiens était élevée.
Anna Belfer-Cohen et d'autres suggèrent que l'activité artistique peut
être considérée comme une preuve indirecte d'une
 Comment la domestication, la culture et le sédentisme ont-ils commencé en Asie du Sud-Ouest ? 213

Chypre
Beyrouth

Damas
mer Méditerranée

Mallaha
Grotte de Hayonim

Tel Aviv Amman ('Ain Ghazal)

Jérusalem Jéricho

Caire
Contemporain
Emplacements

Major Natoufien
gv
il
le N

ojFeuo

des sites
sFS
voe
zus

FIGURE 7.10 Un collier natoufien d'El Wad avec 25 fragments

0 300 km mer Rouge
de dentale séparant un type de bourrelet osseux. Ce collier a été trouvé
dans une sépulture masculine.

FIGURE 7.9 Principaux sites natoufiens du Levant sud par

rapport à d'autres éléments contemporains.
mode de vie sédentaire qui oblige les gens à interagir
régulièrement avec des personnes qui ne leur sont pas
étroitement liées. Dans ces situations, la production d'objets tels
que des ornements personnels contribue à créer un sentiment
d'identité parmi les petits groupes tout en leur permettant de
participer à une société plus large (Belfer-Cohen 1988, 1991;
Lewis-Williams 1984). Des activités rituelles et cérémonielles
élaborées auraient également apaisé les interactions et réduit les
tensions dans des communautés de plus en plus nombreuses où
la coopération était essentielle (Henry 1989, 206).
Organisation Sociale Natoufienne
Les informations sur l'organisation sociale provenant des archives
archéologiques sont indirectes, mais Donald Henry (1989) pense
qu'au fil du temps, la société natoufienne a développé des divisions
sociales avec un accès inégal à la richesse, au pouvoir et au prestige.
C'est-à-dire que la société natoufienne a montréstratification sociale
, un signe important de complexité sociale. Ses preuves proviennent
récupérés du site de la grotte Hayonim ont montré des
preuves du trait génétiquement récessif, agénésie de la
troisième molaire (échec des troisièmes molaires, ou
dents de sagesse, à se développer). Ce trait se produit à
des fréquences beaucoup plus faibles, de l'ordre de 0 à
20 %, dans d'autres populations humaines. Des preuves
provenant de six autres sites natoufiens ont révélé la
fréquence normale de l'agénésie de la troisième molaire,
suggérant que le groupe qui vivait dans la grotte de
Hayonim s'est accouplé avec d'autres membres de leur
propre groupe plutôt qu'avec des étrangers. Il semble
que ce modèle d'accouplement se soit poursuivi à
Hayonim Cave pendant environ 1 000 ans (Henry 1989,
208). Ces sépultures de groupe comprenaient parfois des
coiffes en coquille de dentale, qui étaient des objets
décoratifs et précieux sans usage pratique identifiable
(figure 7.10). Dans d'autres cas, des objets funéraires
élaborés ont été enterrés avec des enfants. Ces deux
pratiques funéraires indiquent la différenciation des sous-
groupes et les différences de statut héritées.
À la fin de l'époque natoufienne, il existait encore des différences dans les

de sépultures natoufiennes. objets funéraires d'une sépulture à l'autre, mais les morts étaient enterrés

Au début de l'époque natoufienne, les morts étaient enterrés individuellement dans des cimetières. Le nouveau modèle suggère que les

ensemble en petits groupes, qui, selon Henry, correspondaient à des anciennes limites autour des groupes de descendance avaient

sous-groupes d'une communauté plus large. Il est prouvé que des

parents ont vécu dans la même région pendant plusieurs générations. stratification sociale Une forme d'organisation sociale dans laquelle les gens ont un
Par exemple, près de la moitié des squelettes accès inégal à la richesse, au pouvoir et au prestige.
ANTHROPOLOGIE dans la vie de tous les jours
Çatalhöyük au XXIe siècle
L'archéologie a commencé comme une quête antiquaire en
Europe et aux États-Unis et ce n'est qu'au cours du siècle dernier
qu'elle s'est transformée en une discipline savante
professionnalisée. Aujourd'hui, l'archéologie professionnelle
évolue à nouveau, de manière à la présenter au public de
manières sans précédent. Beaucoup de ces changements sont
liés à la propagation du capitalisme néolibéral après la fin de la
guerre froide. Comme le décrit Demoule (Dans leurs propres
mots, page 188), ces changements ont conduit à des pressions
sur les gouvernements nationaux pour réduire les budgets, de
sorte que les archéologues ont dû obtenir des financements de
nouvelles manières, souvent auprès d'entreprises privées. Dans
le même temps, une législation comme la NAGPRA oblige
désormais les archéologues à prendre en considération les
préoccupations des descendants des peuples autochtones dont
le patrimoine est affecté par les recherches archéologiques.
Finalement,
Ces préoccupations sont toutes amplifiées lorsque le site en
question a une grande visibilité, comme le site néolithique de
Çatalhöyük, vieux de 9 000 ans, dans le centre-sud de la Turquie.
L'archéologue Ian Hodder de l'Université de Stanford est l'actuel
directeur d'un projet de recherche en cours à Çatalhöyük qui a
commencé en 1993, environ trois décennies après que le site ait été
découvert et fouillé pour la première fois par James Mellaart. DansLe
conte du léopard(2006), Hodder décrit le projet, qui est plus ambitieux
que la plupart des recherches archéologiques précédentes, en
Turquie et ailleurs.
Lorsque Hodder a cherché à rouvrir les fouilles de Çatalhöyük, le
ministère turc de la Culture et du Tourisme était chargé de protéger
et de préserver le site. « L'un des objectifs centraux du projet,
développé en consultation avec des responsables turcs, est de fournir
au ministère turc de la Culture et du Tourisme un site patrimonial
bien planifié. C'est certainement l'une des principales raisons qui ont
conduit à la décision d'autoriser la reprise des travaux sur le site dans
les années 1990 » (Hodder 2006, 37). Les sites du patrimoine sont
conçus pour attirer les touristes, mais un site du patrimoine bien
planifié prend en considération les préoccupations d'un éventail
d'autres parties prenantes. Comme Hodder (2006) l'a écrit, « nous
devons regarder la découverte du site et des différentes
communautés pour lesquelles il est devenu important » (13). Hodder
décrit ces communautés comme des « compagnons de voyage ».
ont été détruits et remplacés par un nouveau modèle dans lequel les
ressources étaient contrôlées par une communauté entière et la
stratification était à l'échelle de la communauté. Certaines personnes
coordonnaient désormais les activités du groupe dans son ensemble et en
étaient venues à occuper des postes de haut niveau qui traversaient les
frontières des sous-groupes. Pour ces raisons, Henry suggère que
214
Certains compagnons de voyage sont des archéologues : Mellaart et
son équipe des années 1960 (et les résultats qu'ils ont produits), des
archéologues turcs (et leurs universités), des équipes de fouilles de
plusieurs pays différents qui creusent sur le site aujourd'hui, et de
nombreux chercheurs spécialisés qui analysent les restes humains , des
restes d'animaux et des restes de plantes, des outils en pierre et de la
poterie qui ont été récupérés lors des fouilles. Hodder inclut comme
compagnons de voyage d'autres anthropologues dont la recherche
ethnographique fournit des indices ethnoarchéologiques pour interpréter
les vestiges du site, en particulier son art. En effet, les artistes sont des
compagnons de route à Çatalhöyük, y compris certains qui contribuent à
de nouvelles approches de l'illustration scientifique, dont un certain
nombre d'exemples sont publiés dansLe conte du léopard.
Certains compagnons de voyage sont des citoyens turcs, des
résidents des communautés locales aux représentants du
gouvernement régional et national ; d'autres visitent des
diplomates et des dignitaires internationaux comme le prince de
Galles. Parmi les compagnons de voyage figurent des
représentants de la presse nationale et internationale, qui
visitent régulièrement le site. « À la base de tout cela pour la
Turquie se trouve la réputation du site comme origine de la
civilisation anatolienne, clairement exprimée dans le principal
musée de Turquie à Ankara, et dans de nombreuses publications
» (Hodder 2006, 32). Hodder (2006) insiste sur le fait qu'il est de
son devoir éthique de répondre aux préoccupations des
politiciens locaux « non seulement en raison de la responsabilité
envers ses hôtes, mais aussi parce que les politiciens utilisent le
passé lointain pour revendiquer des origines et des identités. . . .
Un autre groupe de compagnons de voyage sont les résidents à faible revenu
des communautés voisines, dont beaucoup espèrent que le site et ses visiteurs
pourront apporter des avantages économiques. Certains membres de la
communauté locale sont employés sur le site, l'un d'eux a ouvert un café près du
site et les femmes locales sont autorisées à y vendre des tissus brodés. « Nous
avons commencé, en consultation avec des groupes locaux, à développer une
marque Çatalhöyük et à entreprendre une production et une formation
artisanales sur le site. . . . Le projet a également contribué au creusement d'un
nouveau puits et à la fourniture d'un nouvel approvisionnement en eau. Il a aidé
à persuader les responsables régionaux de construire une nouvelle école dans le
village et a contribué à
L'organisation sociale natoufienne en était venue à ressembler à ce
qu'on appelle une « chefferie » dans la littérature anthropologique.
Chefferies, vous vous en souviendrez, sont des sociétés dans
lesquelles un leader (le chef) et des parents proches sont séparés du
reste de la société et ont un accès privilégié à la richesse, au pouvoir
et au prestige.
bibliothèque au village » (Hodder 2006, 37). Les agriculteurs locaux ont
apporté leur connaissance du paysage local. « Ils n'ont pas de
connaissances privilégiées fondées sur la continuité culturelle. Prétendre
cela reviendrait à « muséifier » les communautés locales. Ils sont fortement
impliqués dans les processus mondiaux (et certains ont vécu en tant que
travailleurs invités en Allemagne) » (Hodder 2006, 39).
Çatalhöyük a été déclaré site du patrimoine mondial par
l'UNESCO en 2012 (http://whc.unesco.org/fr/list/1405), un statut
qui atteste de son importance dans le monde et suscite l'intérêt
des entreprises privées, des compagnons de voyage désireux de
financer les recherches en cours. De nombreux autres
compagnons de voyage sont des touristes de l'intérieur et de
l'extérieur de la Turquie, y compris certains qui considèrent le site
comme le centre d'un culte de la déesse néolithique. Comme
Hodder (2006) l'observe, « Il n'est pas possible pour les
archéologues de contribuer au point de vue religieux selon lequel
la Déesse est présente à Çatalhöyük. Mais il est possible
d'essayer de répondre aux groupes de femmes qui veulent
connaître le rôle des femmes sur le site. . . . De nombreux
adeptes de la Déesse se sont engagés dans un dialogue et ont pu
voir que de nouvelles preuves peuvent être incorporées dans une
perspective révisée. . .
Hodder pense que négocier avec tous ces différents types de
compagnons de voyage est inévitable dans un monde globalisé.
«Parfois, les interactions peuvent être difficiles et les voyageurs
peuvent ressentir le besoin de se séparer. Je suis très conscient à
Çatalhöyük qu'il y a beaucoup de tensions. . . . Ces interactions
peuvent toutes être difficiles, mais en fin de compte, la responsabilité
éthique est d'utiliser les connaissances spécialisées en archéologie et
en conservation pour répondre aux intérêts de ses compagnons de
voyage » (Hodder 2006, 42).
Comment ces négociations affectent-elles le travail
scientifique d'archéologie effectué sur le site ? Pouvoir mobiliser
autant d'alliés divers pour financer la recherche a permis aux
archéologues et autres spécialistes scientifiques d'utiliser les
techniques les plus modernes d'enquête, de fouille et d'analyse,
dont une grande partie est réalisée dans des laboratoires
construits sur le site. Il a permis la construction d'abris pour
protéger et préserver les parties ouvertes du site, tant pour les
archéologues que pour les visiteurs.
Mais le projet a également été innovant sur le plan théorique, en
particulier dans la manière dont il a répondu à une série de questions
soulevées par des chercheurs en sciences-études préoccupés par la
Subsistance natoufienne
Les Natoufiens obtenaient 98 % de leurs protéines de viande à partir
de cerfs élaphes, de moutons sauvages et de chèvres sauvages, mais
surtout de gazelles, dont les os représentent 40 à 80 % de tous les
ossements d'animaux récupérés sur les sites natoufiens. Henri
pratique de la recherche scientifique. Un problème a à voir avecréflexivité :
le besoin des chercheurs de prendre du recul et de réfléchir sur leurs
propres recherches et le contexte dans lequel elles sont menées (voir
module 3). Le projet Çatalhöyük dispose d'une équipe dédiée à la «
méthodologie réflexive », qui implique des recherches ethnographiques à
la fois dans les communautés locales (pour répondre aux intérêts et aux
préoccupations des populations locales) et dans les tranchées elles-mêmes
(pour se concentrer sur la pratique scientifique de l'archéologie). Un
deuxième problème qui préoccupe les chercheurs en sciences est la
séparation traditionnelle entre fouille et analyse (ce que les philosophes
des sciences appellent le « contexte de la découverte » et le « contexte de la
justification »). Hodder et ses collègues se sont efforcés de combler cette
lacune en construisant leurs propres laboratoires sur le site et en amenant
des théoriciens à s'engager avec des excavateurs au travail dans les
tranchées, une pratique que Hodder appelle "interprétation au fil de la
truelle» (voir pages 170-171). Hodder (2010) estime que « le dialogue entre
différents spécialistes de la religion dans le cadre de la lutte avec les
données d'un site archéologique particulier a ouvert de nouvelles pistes
d'enquête et de nouvelles perspectives sur la religion et ses origines. Les
données du site ont agi comme un acteur du dialogue, rassemblant
différentes perspectives et forçant l'engagement entre elles. Le résultat
final est une vue d'ensemble cohérente intégrant de nouvelles perspectives
sur le rôle de la religion dans le développement précoce des sociétés
complexes » (27).
Enfin, Hodder et ses collègues sont particulièrement attentifs aux
opportunités et aux défis de vivre dans un monde numérisé. Les
technologies numériques pour le stockage, la publication et la
communication des données sont au cœur du fonctionnement du
projet Çatalhöyük et ont donné lieu à un site Web à la pointe de la
technologie (http://www.catalhoyuk.com/). La majorité des vidéos,
images et textes accessibles via ce site Web sont sous licence Creative
Commons, qui permet la distribution gratuite de matériel protégé par
le droit d'auteur. La réflexivité sur l'utilisation des médias numériques
a également fait partie du projet, ce qui en fait une étude de cas des
types de connexions homme-machine au cœur de l'anthropologie
cyborg.
Une visite sur le site Web de Çatalhöyük peut être l'illustration
idéale de l'anthropologie du XXIe siècle - ou de l'archéologie
anthropologique - dans la vie de tous les jours car elle permet,
entre autres, de faire une visite virtuelle de la butte Est. Vous
trouverez également des liens vers des documents concernant le
site sur Facebook, Twitter, YouTube, Vimeo et Tumblr.
(1989, 91) pense que des troupeaux entiers de gazelles ont été
chassés en commun lors de safaris. Les bois ont été brûlés pour
favoriser la croissance de jeunes plantes, attrayantes pour les gazelles
et les cerfs. Henry souligne que l'attention accrue portée aux gazelles,
aux céréales sauvages et aux noix représentait également une
spécialisation des activités de subsistance des butineurs natoufiens.
215
 216 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?

Ils étaient butineuses complexes, qui vivaient dans des zones de

ressources abondantes qui pouvaient paraître inépuisables (Price
et Gebauer 1995, 7), les rendant différentes des butineuses
généralisées, qui vivent dans des environnements moins
généreux et font face aux pénuries en diversifiant leurs activités
de subsistance.
Malheureusement pour les Natoufiens, les choix
qu'ils ont faits ont été déstabilisants à la longue. Ils ont
nourri une population de plus en plus nombreuse en
exploitant intensivement de petites surfaces. En
s'installant, ils ont renoncé à la mobilité, clé de la réussite
à long terme d'une vie de fourrager. La stabilité et la
sécurité à court terme du sédentisme et de la collecte
intensive ont accru la rigidité de leur société, la rendant
vulnérable aux changements environnementaux
perturbateurs. Et des changements sont survenus il y a
environ 10 500 ans : les lacs intérieurs peu profonds du
sud du Levant s'asséchaient et les forêts
méditerranéennes dont ils dépendaient avaient réduit de
moitié la superficie qu'ils couvraient 2 000 ans plus tôt.
Les Natoufiens de la partie sud de la région ont
abandonné leurs colonies et sont revenus à une simple
recherche de nourriture, développant ce que les
archéologues appellent la « culture harifienne ».
La première preuve de céréales domestiquées dans cette
zone centrale du Natoufien remonte à environ 10 300 ans. Du blé
et de l'orge ont été trouvés à Jéricho et de l'orge seule sur
d'autres sites. Pour les archéologues, les plantes domestiquées
signalent la fin du Paléolithique et le début duNéolithique. Cette
transition de la culture natoufienne est marquée dans le Levant
méridional par l'apparition d'une culture dite « Prépoterie
Néolithique A » (PPNA), dans laquelle la culture était pratiquée
mais la poterie n'avait pas encore été inventée. Le PPNA Jéricho
était beaucoup plus vaste que la colonie natoufienne précédente,
avec une superficie d'environ 2,5 hectares (environ 6 acres) et
peut-être 300 habitants ou plus (Smith 1995a, 3). Henry (1989)
suggère que cela était le résultat de la concentration de
populations de hameaux plus petits et plus nombreux dans un
cadre où « de grandes étendues de terres arables, propices à la
culture à la houe, jouxtaient des sources d'eau toute l'année
» (53-54).
Jéricho était situé au bord d'un cône alluvial(accumulation en forme
d'éventail de sédiments provenant de l'eau qui coule à l'embouchure d'un
ravin) sur un ruisseau permanent, à proximité de collines riches en
gazelles, céréales sauvages et noix. Le ruisseau fournissait de l'eau potable
claire, tandis que le cône alluvial fournissait de la boue pour les briques et
ses crues régulières fournissaient un sol riche pour les plantes. Il y a
environ 9 300 ans, les habitants de Jéricho avaient construit un mur de
pierre de 3 mètres d'épaisseur,
Néolithique Le « nouvel âge de pierre », qui a commencé avec la domestication des
plantes il y a 10 300 ans.
ILLUSTRATION 7.11 Il y a environ 9 300 ans, les habitants de
Jéricho avait construit un mur de pierre, probablement pour protéger la
colonie des inondations annuelles.
4 mètres de haut et peut-être 700 mètres de circonférence
(Figure 7.11). Le mur, pense-t-on maintenant, a été érigé pour se
protéger des inondations ; des protections similaires contre les
inondations existent sur d'autres sites du PPNA, bien qu'aucune
ne soit aussi élaborée que le mur de Jéricho (Bar-Yosef et Kislev
1989, 635).
Le commerce était également important dans la PPNA Jéricho.
L'obsidienne est un verre volcanique extrêmement tranchant et très prisé
que l'on trouve dans relativement peu d'endroits dans le monde (figure
7.12). L'Anatolie, dans la Turquie moderne, contenait les principaux sites
d'obsidienne en Asie du sud-ouest néolithique. Les archéologues ont
trouvé de l'obsidienne anatolienne à Jéricho, à quelque 700 kilomètres (430
miles) de l'Anatolie ; il est peu probable que les résidents aient parcouru
cette distance pour l'obtenir eux-mêmes. Jéricho contenait également des
coquillages marins de la mer Méditerranée et de la mer Noire ainsi que des
amulettes (charmes contre le mal ou les blessures) et des perles de pierre
verte. Ces objets suggèrent non seulement le commerce de village en
village, mais aussi le commerce entre les agriculteurs sédentaires et les
peuples butineurs vivant dans les régions semi-arides ou les zones plus
élevées.
Commençant il y a environ 9 500 ans, la culture PPNA a été
remplacée par la culture néolithique prépoterie B (PPNB), qui
représente l'expansion rapide de l'agriculture. Bien qu'il n'y ait
qu'une poignée de sites PPNA, tous dans une petite zone autour
de Jéricho, il existe plus de 140 sites PPNB, dont beaucoup sont
très grands et dont certains se trouvent en Anatolie et dans les
montagnes du Zagros. Au fur et à mesure que la nouvelle
technologie agricole se déplaçait vers le nord et l'est, elle
s'adaptait aux circonstances locales. À un moment donné, les
agriculteurs ont rencontré des éleveurs des monts Zagros et
 Comment la domestication, la culture et le sédentisme ont-ils commencé en Asie du Sud-Ouest ?
Mer Noire
Çatalhöyük
méditerranéen
Mer
Jéricho
Arménie
Anatolie
Obsidienne
sources
rouge
Mer
Néolithique
des sites
nord de la Mésopotamie qui avait domestiqué des
moutons et des chèvres, animaux bien connus à l'état
sauvage dans toute la région. Les agriculteurs adoptent
ces techniques d'élevage qui se répandent rapidement et
s'intègrent à la vie agricole de toute la région. Il y a 8 000
ans, les agriculteurs du sud-ouest de l'Asie pratiquaient
une stratégie agricole mixte, incorporant céréales et
bétail.
La domestication ailleurs dans le monde
Les conditions dans lesquelles la domestication a commencé variaient à
travers le monde. Dans les hautes terres du Mexique, par exemple, la
population de prédomestication était relativement stable et le sédentisme
n'avait pas encore eu lieu. Il n'y a aucune indication des types de
changements à long terme dans la densité des ressources au Mexique qui
étaient caractéristiques de la Méditerranée orientale. Comme indiqué
précédemment, de nombreux chercheurs s'accordent à dire que la
recherche de nourriture à large spectre était pratiquée avant la transition
vers la domestication dans les hautes terres du Mexique et ailleurs dans le
Nouveau Monde. Le mélange de cultures caractéristiques de la
domestication du Nouveau Monde était également différent. En Méso-
Amérique, le maïs et la courge apparaissent il y a entre 5 000 et 4 000 ans,
tandis que les haricots sont apparus il y a environ 2 000 ans (Smith 1995a).
En Amérique du Sud, le maïs apparaît il y a entre 4 000 et 3 000 ans, mais
n'était qu'un des nombreux produits domestiqués. Dans d'autres régions
d'Amérique du Sud, les conditions du sol, l'altitude et le climat favorisaient
les plantes-racines - manioc ou pommes de terre - ainsi que les haricots et
le quinoa (une céréale de haute altitude), qui étaient d'une plus grande
importance. La domestication des animaux était beaucoup moins
importante dans les Amériques que dans l'Ancien Monde, en grande partie
à cause de l'absence
217
FIGURE 7.12 La distribution de
l'obsidienne en Asie du sud-ouest
néolithique à partir de sources en Anatolie
(ouest) et en Arménie (est). L'obsidienne
est un verre volcanique extrêmement
tranchant et très prisé. L'obsidienne a été
largement commercialisée et a été
Caspienne
trouvée jusqu'à 500 miles de sa source.
Mer
persan
Golfe
de grands animaux domestiques. Le lama andin est le plus grand
animal domestiqué dans le Nouveau Monde.
Certaines plantes et certains animaux ont également été
domestiqués sur d'autres continents. Le chénopode blanc, le sureau des
marais, le tournesol et la courge ont tous été domestiqués dans l'est de
l'Amérique du Nord (Smith 1995a, 189-90). Une variété de cultures, dont le
café, le millet, le gombo et le sorgho, ont été domestiquées dans
différentes régions d'Afrique. Un grand nombre de plantes domestiquées
importantes provenaient d'Asie orientale, notamment le riz, l'igname, le
thé, la canne à sucre, l'ail, l'oignon, la pomme et la carotte. Les
archéologues en viennent à s'accorder sur le fait que les butineuses
complexes vivant dans des zones de ressources relativement abondantes
étaient probablement responsables de la domestication partout où elle
s'est développée (Price et Gebauer 1995, 7; Smith 1995a, 213). Des preuves
archéologiques et génétiques riches et complexes provenant de régions
spécifiques du monde minimisent les explications à cause unique de la
domestication et soulignent la nécessité de considérer chaque événement
de domestication dans ses propres termes. Melinda A. Zeder et Bruce D.
Smith (2009) sont impressionnés par les données abondantes et variées
provenant de l'Asie du Sud-Ouest montrant que pendant plusieurs milliers
d'années avant l'apparition de l'agriculture, « les gens semblent avoir
auditionné une grande variété de plantes spécifiques à la région. et les
animaux pour des rôles de premier plan en tant que ressources
domestiquées en l'absence d'augmentation de la population ou de
déséquilibre des ressources » (683). Dans l'est de l'Amérique du Nord, les
preuves sont similaires : le changement climatique à la fin du Pléistocène
s'est produit 5 000 ans avant la domestication initiale des plantes, 6 200 ans
avant le développement d'un complexe de cultures domestiquées, et 8, 500
ans avant le changement clé vers l'agriculture du maïs. Ainsi, le
changement climatique est « une condition préalable nécessaire plutôt
qu'une variable causale centrale », et
218 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?

il n'y a aucune preuve d'une pression démographique au cours des 2000

ans environ, lorsque les plantes ont été domestiquées pour la première fois
et que le complexe de cultures a été organisé pour la première fois (Zeder
et Smith 2009, 686).
Zeder et Smith insistent sur le fait que cette preuve est mieux
comprise en termes de construction de niche : les humains « étaient
activement et avec une intention délibérée à façonner des niches
adaptatives dans le but conscient d'améliorer la densité et la
productivité des ressources souhaitées » (688). Des préoccupations
connexes apparaissent dans le travail des archéologues qui ont
adopté de l'anthropologie culturellethéories de la pratiquequi, comme
la construction de niches, « examinent comment les humains créent
des caractéristiques à grande échelle telles que les traditions ou les
institutions sociopolitiques (structures) à travers leurs propres actions
quotidiennes » (Bruno 2009, 703). Bruno souligne également
l'importance pour les archéologues deécologie historique, qui « se
concentre également sur la façon dont les activités humaines
cumulatives à long terme provoquent des changements observables
FIGURE 7.13 Ju/'hoansi mères et enfants. Jusque récemment,
dans l'environnement naturel, créant ainsi un « paysage » » (704).
Les femmes ju/'hoansi marchaient plus de 1 500 miles par an avec
Dans la mesure où le processus de construction de niches est compris des enfants et d'autres fardeaux sur le dos. Enfants allaités
comme une forme d'activité pratique et que les environnements pendant plusieurs années.
aménagés/paysages façonnés par l'homme sont compris comme les
résultats d'une telle activité pratique, les deux approches pointent les grossesses ont tendance à être espacées de 3 à 4 ans en
dans la même direction (Schultz 2009). Leur incorporation dans les raison d'une longue période d'allaitement. C'est-à-dire que les
théories anthropologiques des transitions culturelles telles que les enfants des sociétés de recherche de nourriture sont sevrés à
origines de l'agriculture ou la complexité sociale promet d'apporter l'âge de 3 ou 4 ans mais tètent quand ils en ont envie, jusqu'à
un éclairage nouveau important sur ces évolutions. plusieurs fois par heure (Shostak 1981, 67; Figure 7.13). Ce
stimulus infirmier déclenche la sécrétion d'une hormone qui
supprime l'ovulation (Henry 1989, 41). Henry résume les effets de
la recherche de nourriture sur la fertilité des femelles :

Quelles ont été les conséquences Il semblerait alors qu'un certain nombre de facteurs interdépendants

de la domestication et associés à une stratégie de recherche de nourriture mobile sont

Sédentisme ?
Les niches agricoles construites, au sein desquelles les plantes et les
animaux domestiqués pouvaient prospérer, ont favorisé le sédentisme et
transformé la vie humaine d'une manière qui a encore des répercussions
aujourd'hui. Premièrement, la terre n'était plus un bien gratuit, accessible à
tous ; il s'est transformé en territoires particuliers, possédés collectivement
ou individuellement, sur lesquels les gens élevaient des récoltes et des
troupeaux. Ainsi, le sédentisme et un niveau élevé d'extraction des
ressources (que ce soit par des fourrages complexes ou par l'élevage) ont
conduit à des concepts de propriété qui étaient rares dans les sociétés
fourragères précédentes. Les tombes, les objets funéraires, les logements
permanents, les équipements de transformation des céréales, les champs
et les troupeaux reliaient les gens aux lieux. L'empreinte humaine sur
l'environnement a été plus importante et plus évidente suite à la
sédentarisation et à l'essor de l'agriculture : les gens ont construit des
terrasses ou des murs pour contenir les inondations, transformer le
paysage de manière plus dramatique. Deuxièmement, la sédentarisation a
affecté la fécondité féminine et contribué à l'augmentation de la
population. Dans les sociétés de recherche de nourriture, la femme
susceptibles d'avoir fourni des contrôles naturels sur la fertilité et
peut-être d'expliquer les faibles densités de population du
Paléolithique. Dans les sociétés de recherche de nourriture mobiles,
les femmes sont susceptibles d'avoir connu à la fois de longs
intervalles d'allaitement par les enfants portés ainsi que la forte
consommation d'énergie associée aux activités de subsistance et aux
déplacements périodiques des camps. De plus, leur régime
alimentaire, relativement riche en protéines, aurait contribué à
maintenir de faibles niveaux de graisses, freinant ainsi davantage la
fécondité. (43)
Avec une recherche de nourriture complexe et un sédentisme
croissant, ces freins à la fécondité féminine auraient été atténués.
Cela ne veut pas dire qu'une vie sédentaire est physiquement peu
exigeante. L'agriculture exige son propre travail lourd, tant de la part
des hommes que des femmes. La différence semble être dans le type
d'activité physique impliquée. Marcher sur de longues distances en
transportant de lourdes charges et des enfants a été remplacé par les
semailles, le binage, la récolte, le stockage et la transformation des
céréales. Une alimentation de plus en plus riche en céréales aurait
considérablement modifié le rapport protéines/
 Quelles ont été les conséquences de la domestication et du sédentisme ?
glucides dans l'alimentation. Cela aurait modifié les niveaux de
prolactine, augmenté le bilan énergétique positif et conduit à une
croissance plus rapide chez les jeunes et à un âge plus précoce
pour les premières menstruations. La disponibilité immédiate de
céréales moulues aurait permis aux mères de nourrir leurs
nourrissons avec des bouillies et des bouillies molles et riches en
glucides. L'analyse des matières fécales infantiles récupérées sur
le site de Wadi Kubbaniya en Égypte semble démontrer qu'une
pratique similaire était utilisée avec les plantes-racines le long du
Nil sur ce qui aurait pu être un site toute l'année 19 000 ans avant
aujourd'hui (Hillman 1989, 230).
L'influence des céréales sur la fertilité a été observée par
Richard Lee (1992) chez des Ju/'hoansi sédentaires, qui avaient
récemment commencé à manger des céréales et avaient connu
une nette augmentation de la fertilité (voir EthnoProfile 11.4).
Renee Pennington (1992) note que l'augmentation du succès
reproducteur des Ju/'hoansi semble également être liée à une
réduction des taux de mortalité infantile et juvénile. Mais les
régimes à base de céréales riches en glucides sont, peut-être
étonnamment, moins nutritifs que les régimes des chasseurs et
des cueilleurs. Les squelettes de Grèce et de Turquie à la fin du
Paléolithique indiquent une hauteur moyenne de 5 pieds 9
pouces pour les hommes et de 5 pieds 5 pouces pour les
femmes. Avec l'adoption de l'agriculture, la taille moyenne a
fortement diminué; il y a environ 5 000 ans, l'homme moyen
mesurait environ 5 pieds 3 pouces et la femme moyenne environ
5 pieds. Même les Grecs et les Turcs modernes ne le sont
toujours pas,
À court terme, l'agriculture s'est probablement développée
dans l'ancienne Asie du sud-ouest, et peut-être ailleurs, pour
augmenter les approvisionnements alimentaires afin de soutenir
une population croissante à une époque de grave pénurie de
ressources. Parce que l'agroécologie a créé un environnement
favorable t
vicieux
FIGURE 7.14 (La gauche) Du maïs à perte de vue : la monoculture peut
fournir des rendements énormes mais expose le champ à des risques. (
Droit) Un homme rwandais s'occupant de sa plantation intercalaire de
bananes et de café, où les plantes se nourrissent les unes les autres et
réduisent le risque de pertes catastrophiques.
219
l'eau pourrait être apportée à la terre entre le Tigre et l'Euphrate en
Mésopotamie, par exemple, les terres sur lesquelles le blé et l'orge
n'étaient pas indigènes pourraient supporter des peuplements
denses de céréales domestiquées. Le rendement plus élevé de plantes
domestiquées par unité de sol a également conduit à une plus grande
proportion de plantes cultivées dans l'alimentation, même lorsque les
plantes sauvages étaient encore consommées et étaient aussi
abondantes qu'avant. Mais à mesure que les plantes cultivées
jouaient un rôle de plus en plus important dans les régimes
alimentaires préhistoriques, les hommes sont devenus dépendants
des plantes et les plantes à leur tour sont devenues complètement
dépendantes de l'agroécologie créée par les hommes (Figure 7.14).
Selon Richard Lee (1992, 48), les Ju/'hoansi, qui vivent dans le désert
du Kalahari, utilisent plus de 100 plantes (14 fruits et noix, 15 baies, 18
espèces de gomme comestible, 41 racines et bulbes comestibles, et
17 légumes-feuilles, haricots, melons et autres aliments). En revanche,
les agriculteurs modernes ne dépendent que de 20 plantes, et parmi
celles-ci, 3 (blé, maïs et riz) nourrissent la plupart des habitants du
monde. Historiquement, seules une ou deux cultures céréalières
étaient des aliments de base pour un groupe spécifique de
personnes. Si la grêle, les inondations, les sécheresses, les
infestations, le gel, la chaleur, les mauvaises herbes, l'érosion ou
d'autres facteurs ont détruit la récolte ou réduit la récolte, le risque
d'étoile
flux
220 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
DANS LEURS PROPRES MOTS
La révolution alimentaire
Bien que la qualité de l'alimentation ait diminué pour les premiers
agriculteurs à temps plein, les contacts et les échanges ultérieurs entre
les différentes sociétés agricoles ont enrichi les régimes alimentaires
partout. Au cours des 500 dernières années, comme le souligne Jack
Weatherford, les aliments domestiqués dans le Nouveau Monde ont
joué un rôle particulièrement important dans la « révolution
alimentaire ».
Le jour de Thanksgiving, les Nord-Américains se souviennent parfois
des Indiens qui leur ont donné leur cuisine en mangeant de la dinde
avec de la farce au pain de maïs, de la sauce aux canneberges, de la
succotash, du maïs en épi, une casserole de patates douces, une
compote de courge et des tomates, des fèves au lard avec du sirop
d'érable et une tarte aux pacanes . Cependant, peu de cuisiniers ou de
gourmets reconnaissent à quel point la cuisine amérindienne a
radicalement changé la cuisine et la restauration dans toutes les
régions du monde, de Tombouctou au Tibet. Boeuf du Sichuan aux
piments, gâteau au chocolat allemand, curry
FIGURE 7.15 La basse vallée du Tigre-Euphrate ; irrigation
l'eau utilisée par les premiers agriculteurs contenait des niveaux élevés de sels
solubles, empoisonnant le sol et le rendant inutilisable à ce jour.
les pommes de terre, la glace à la vanille, le goulasch hongrois, les
croustillants aux arachides et la pizza doivent tous leurs arômes primaires
aux Indiens d'Amérique.
La découverte de l'Amérique a déclenché une révolution dans
l'alimentation et la cuisine qui n'a encore montré aucun signe de
ralentissement. Les tomates, les piments et les poivrons verts ont
formé la première vague d'arômes américains à faire le tour du
monde, mais le jardin des Indiens d'Amérique cultive toujours une
multitude de plantes que le monde peut encore apprendre à
utiliser et à apprécier. Ces plantes peuvent avoir des usages
pratiques, comme fournir de la nourriture sur des terres
autrement inutilisables ou produire plus de nourriture sur des
terres sous-exploitées. Ils font également varier l'alimentation
quotidienne des personnes à travers le monde et augmentent
ainsi la nutrition. Même à l'ère de la haute technologie, la plante
low-tech continue d'être la clé de la nutrition et de la santé. Malgré
toutes les améliorations apportées aux plantes par la science
moderne,
La source: Weatherford 1988, 115.
omestication. Dans la basse vallée du Tigre et de l'Euphrate, l'eau
d'irrigation utilisée par les premiers agriculteurs contenait des
niveaux élevés de sels solubles, empoisonnant le sol et le rendant
inutilisable à ce jour (Figure 7.15).
De nouvelles caractéristiques de l'agroécologie ont également créé
de nouvelles opportunités de propagation de maladies. Comme nous
l'avons vu précédemment, en Afrique sub-saharienne, le défrichement des
terres pour l'agriculture a créé de l'eau stagnante, ce qui a fourni un
excellent enironnement pour les moustiques vecteurs du paludisme.
Alors qu'un nombre croissant de personnes commençait à vivre les unes à
côté des autres dans des établissements relativement permanents,
l'élimination des déchets humains et éventuellement animaux est
également devenue de plus en plus problématique. Le stockage des
aliments était un élément clé dans les niches groécologiques, mais les
grains stockés attiraient les parasites, les rats et les souris, qui
coévoluaient avec les cultures domestiquées qui les attiraient. Certains de
ces parasites sont également à l'origine de micro-organismes pathogènes
qui prospéraient dans les déchets humains, animaux et végétaux. Plus le
nombre de personnes vivant très près les unes des autres est élevé, plus la
probabilité de transmission de maladies transmissibles est élevée : au
moment où une personne se remet de la maladie, une autre atteint le
stade infectieux et peut réinfecter la première; en conséquence, la maladie
ne quitte jamais la population. Enfin, les carences nutritionnelles d'un
régime agricole peuvent avoir réduit la résistance des personnes aux
maladies.
 Quelles ont été les conséquences de la domestication et du sédentisme ?
Les butineuses pourraient simplement s'éloigner de la maladie,
réduisant ainsi la probabilité qu'elle se propage, mais cette option est
fermée pour les personnes sédentaires. Ainsi, l'exposition accrue aux
maladies épidémiques était une conséquence majeure des pressions
de sélection modifiées auxquelles les populations humaines sont
devenues vulnérables en raison de la construction de niches
agroécologiques par leurs ancêtres.
Le maintien d'une agroécologie qui soutiendra les plantes et les
animaux domestiqués nécessite beaucoup plus de travail que la
recherche de nourriture. Les gens doivent défricher la terre, planter
les graines, soigner les jeunes plants, les protéger des prédateurs, les
récolter, traiter les graines, les stocker et sélectionner les graines pour
les planter l'année suivante ; de même, les hommes doivent soigner
et protéger les animaux domestiques, abattre les troupeaux, tondre
les moutons, traire les chèvres, etc. Cette lourde charge de travail
n'est pas répartie au hasard entre les membres de la population. La
dépendance croissante vis-à-vis de l'agriculture due à un nombre
croissant de personnes a produit une division du travail de plus en
plus complexe, qui a ouvert la voie à l'émergence de sociétés
hiérarchiques complexes avec différentes formes d'inégalité sociale.
L'anthropologue économique Rhoda Halperin (1994) offre
un aperçu des processus produisant ces changements.
Empruntant des concepts à l'historien économique Karl Polanyi,
Halperin soutient que tout système économique peut être
analysé en termes de deux types de mouvements :mouvements
de localisation, ou « changements de lieu », et mouvements
d'appropriation, ou « changements de mains ». À son avis, les
relations écologiques qui affectent l'économie sont correctement
comprises comme des changements de lieu, comme lorsque les
gens doivent se déplacer dans les prairies, cueillir des noix de
mongongo et les ramener au camp. Les relations économiques,
en revanche, sont plus proprement comprises comme des
changements de mains, comme lorsque les noix de mongongo
sont distribuées à tous les membres du camp, qu'ils aient ou non
aidé à les ramasser. Ainsi, les mouvements écologiques (localisés)
impliquent des transferts d'énergie ; les mouvements
économiques (d'appropriation), en revanche, impliquent des
transferts de droits (Halperin 1994, 59). Ainsi analysés, les droits
des gens à consommer les noix de mongongo ne peuvent pas
être dérivés du travail qu'ils ont dépensé pour les cueillir.
Une autre façon de voir la différence est de prêter attention
au lien entre le stockage des aliments et le partage des aliments.
Un écologiste pourrait argumenter que ceux qui ramassent les
noix de mongongo n'ont pas d'autre choix que de les partager et
de les consommer immédiatement car ils n'ont aucun moyen de
stocker cette nourriture si elle n'est pas consommée.
L'anthropologue Tim Ingold (1983) a convenu que l'obligation de
partager rendrait le stockage inutile, mais il a également souligné
que partager avec d'autres aujourd'hui les oblige généralement à
partager avec vous demain. En d'autres termes, partager de la
nourriture peut être considéré non seulement comme un
221
3
2
1
1. Fourrageuse : 10 km2 (3,86 km2)
2. Fermier sec : 0,5 km2 (0,19 km2)
3. Agriculteur irrigué : 0,1 km2 (0,04 km2)
FIGURE 7.16 Chaque carré indique le montant proportionnel
de terre nécessaire pour nourrir un seul individu en utilisant trois stratégies
différentes pour obtenir de la nourriture.
moyen d'éviter la détérioration, mais aussi comme moyen de stocker des
reconnaissances de dette pour l'avenir.
Une fois que les sociétés développent des moyens de
conserver et de stocker la nourriture et d'autres biens matériels,
de nouvelles possibilités s'ouvrent. Des preuves archéologiques
indiquent que plus il y a de nourriture à stocker, plus les gens
investissent dans des installations de stockage (par exemple, des
fosses, des récipients en poterie) et plus ils deviennent
rapidement sédentaires. Les techniques de stockage des
aliments à grande échelle impliquent une série de
« changements de lieu » qui protègent une population des
fluctuations écologiques pendant de longues périodes. Mais les
techniques de stockage des aliments à elles seules ne prédisent
rien sur les «changements de mains» que subiront les aliments
une fois stockés. Les techniques de stockage des aliments ont été
associées à toutes les stratégies de subsistance, y compris celle
des collecteurs d'aliments complexes. Cela suggère que les
relations économiques de consommation, impliquant le transfert
de droits sur les aliments stockés,
Lorsque les gens ont commencé à semer des céréales,
ils n'auraient pas pu prévoir tous les problèmes à venir.
Initialement, l'agriculture présentait plusieurs avantages
apparents, le principal étant que les agriculteurs pouvaient
extraire beaucoup plus de nourriture du même territoire que
les cueilleurs. En d'autres termes, pour nourrir le même
nombre de personnes, un agriculteur sec a besoin de 20 fois
moins de terre qu'un fourrager et un agriculteur irrigué a
besoin de 100 fois moins de terre (Figure 7.16). Les butineurs
savent qu'ils trouveront assez de nourriture à manger, mais
ils ne savent jamais quelle quantité d'une ressource
alimentaire donnée ils trouveront ou exactement quand et
où ils la trouveront. En revanche, les agriculteurs peuvent
prédire, avec une quantité donnée de semences et des
conditions favorables, la taille approximative d'une récolte.
Les éleveurs peuvent prédire combien d'agneaux ils auront
au printemps en fonction du nombre de béliers et de brebis
dans leurs troupeaux.
 222 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?

Comment les anthropologues effectuer de nombreuses nouvelles tâches. En conséquence, les

anthropologues les désignent comme les premierssociétés complexes
Définir la complexité sociale ? figurer dans les archives archéologiques.

Les sociétés agricoles et d'élevage du Néolithique ancien différaient

peu des sociétés de recherche de nourriture qu'elles remplaçaient. Pourquoi est-il incorrect de décrire les sociétés de
Pour les Natoufiens, la recherche de nourriture a continué d'être recherche de nourriture comme « simples » ?
importante aux côtés de la culture pendant de nombreuses
Bien que le concept de société complexe semble assez simple, les
générations. De même, l'organisation sociale de ces sociétés différait
anthropologues doivent définir cette expression avec soin pour
peu de celle des sociétés de fourrage ; bien que les gens aient
éviter tout malentendu. Il est courant de supposer que l'opposé
commencé à s'installer dans des villages permanents, les preuves
du complexe est simple, mais les sociétés d'alimentation et
archéologiques suggèrent qu'aucune grande différence de richesse,
d'agriculture ne sont pas des sociétés « simples ». Comme nous
de pouvoir ou de prestige n'a divisé les villageois au départ. En
l'avons vu, même tous les butineurs ne se ressemblaient pas ; et
d'autres termes, ces premiers villages agricoles ont continué à
de toute façon, les cueilleurs devaient ranger dans leur esprit une
pratiquerrelations sociales égalitaires. Les choses ont commencé à
quantité extrêmement complexe d'informations sur les
changer, cependant, il y a environ 5 000 ans en Asie du Sud-Ouest et
différentes variétés de plantes, les habitudes saisonnières des
peu de temps après en Égypte, dans la vallée de l'Indus (Inde), en
animaux, les détails de la parenté et les nuances de leur religion
Chine, en Méso-Amérique (vallée du Mexique) et dans les Andes
et de leur art. C'était la technologie relativement simple des
(Pérou, voir Figure 7.1, p. 203). ). Ces six régions du globe ont été les
fourrageurs - basée sur des outils en bois, en pierre et en os qui
premières à inventer, essentiellement indépendamment, une nouvelle
pouvaient être facilement fabriqués par tout le monde - qui était
façon d'organiser la société appelée stratification sociale, qui, comme
très différente de la technologie plus complexe qui devait être
nous l'avons vu plus haut, était fondée sur l'hypothèse que différents
développée et maîtrisée pour construire des pyramides massives,
groupes de la société avaient droit à des quantités différentes de
tisser des tissus, ou fondre et mouler des métaux tels que le
richesse, pouvoir et prestige.
cuivre, l'étain, et fer. Ces activités exigeaient non seulement des
Le passage des formes égalitaires d'organisation sociale à la
connaissances hautement spécialisées en architecture, en textile
stratification sociale implique le développement de la complexité sociale. La
et en métallurgie, mais présupposaient également une forme
stratification sociale a été rendue possible lorsque les sociétés produisaient
d'organisation sociale qui permettait à certains membres de la
des quantités de nourriture qui dépassaient les besoins de subsistance de
société de se spécialiser dans certaines activités tandis que
base de la population. Stockage desurplus de production et le contrôle de
d'autres exécutaient des tâches différentes.
sa distribution a permis à certains membres d'une société d'arrêter
Les différences de technologie et d'organisation sociale ne
complètement de produire de la nourriture et de se spécialiser dans
disent rien de la complexité de l'esprit des personnes impliquées.
diverses professions (par exemple, le tissage, la poterie) ou dans de
Cependant, de telles différences ont fortement façonné l'échelle
nouveaux rôles sociaux (par exemple, roi, prêtre). Dans certains cas,
et la texture de la vie dans les deux types de société. L'installation
spécialisation professionnelle a également créé un large fossé entre la
d'un campement temporaire dans une société de fourrage
plupart des membres de la société et un nouveau classer des dirigeants
impliquait moins d'options et moins de décisions, en termes de
qui ont réclamé avec succès la majeure partie de cette nouvelle richesse
technologie et d'organisation sociale, que la construction d'une
comme leur dû. Les sociétés mises en place de cette manière pouvaient
pyramide. La construction de pyramides nécessitait plus que des
faire vivre beaucoup plus de personnes que les sociétés villageoises qui les
compétences architecturales ; des matériaux appropriés devaient
ont précédées, non seulement parce qu'elles ont réussi à produire, stocker
être trouvés, extraits ou produits et transportés sur le site. De
et distribuer plus de nourriture, mais aussi parce qu'elles ont inventé de
plus, des travailleurs appropriés devaient être trouvés, formés,
nouvelles façons d'organiser les gens pour
supervisés, nourris et logés pendant toute la durée de la
construction, qui a pu prendre des décennies. Enfin, toutes ces
activités spécialisées devaient se dérouler dans le bon ordre pour
relations sociales égalitaires Des relations sociales dans lesquelles aucune grande différence que le projet soit mené à bien. Non seulement une bande de
de richesse, de pouvoir ou de prestige ne sépare les membres les uns des autres.
butinage – une cinquantaine d'individus de tous âges – aurait été
surplus de production La production de quantités de nourriture qui dépassent les
besoins de subsistance de base de la population.
trop petite pour mener à bien un tel projet, mais en plus leurs

spécialisation professionnelle Spécialisation dans diverses professions (par exemple, le tissage ou la

relations sociales égalitaires traditionnelles auraient rendu
fabrication de pots) ou dans de nouveaux rôles sociaux (par exemple, roi ou prêtre) que l'on retrouve dans les impossible la prise et la commande des ordres. En effet, l'idée
sociétés socialement complexes.
même de construire des pyramides massives leur aurait
classer Un groupe classé au sein d'une société stratifiée hiérarchiquement dont l'appartenance
probablement semblé inutile.
est définie principalement en termes de richesse, de profession ou d'autres critères
économiques.
Une société qui non seulement veut construire des pyramides

sociétés complexes Sociétés avec de grandes populations, une division étendue du mais qui a aussi les moyens matériels, politiques et sociaux de le faire
travail et une spécialisation professionnelle. est clairement différente d'une bande de butinage ou d'un
 Quelles sont les preuves archéologiques de la complexité sociale ? 223

Village agricole néolithique. Pour l'archéologue T. Douglas Price

(1995), une société complexe a « plus de parties et plus de
connexions entre les parties » (140). L'anthropologue Leslie White
(1949) a parlé d'un changement majeur dans la quantité
d'énergie qu'une société peut capter de la nature et utiliser pour
remodeler le monde naturel à ses propres fins. Les membres des
bandes de recherche de nourriture dépendaient également de
l'énergie captée dans le monde naturel, mais à une échelle
considérablement plus petite que celle requise pour construire
des pyramides. L'archéologue Robert Wenke (1999) souligne que,
dans les sociétés complexes, « l'important est que la capacité et
l'incitation à faire ces investissements soient radicalement
différentes des capacités des bandes pléistocènes, en ce qu'elles
impliquent la capacité de certains membres de la société à FIGURE 7.18 Parmi les indicateurs les plus répandus de
contrôler et organiser les autres » (348). complexité sociale sont les vestiges d'une architecture
monumentale, comme le Temple du Grand Jaguar sur le site maya de
Tikal, au Guatemala.

Quelles sont les preuves

les indicateurs les plus répandus de la complexité sociale sont les
archéologiques de la restes de architecture monumentale. L'architecture monumentale

Complexité? contemporaine comprend des structures telles que la Tour Eiffel à

Paris, France; le Mall of America à Bloomington, Minnesota ; et les
Comment les archéologues reconnaissent-ils la complexité sociale et tours Petronas à Kuala Lumpur, en Malaisie (figure 7.17).
culturelle lorsqu'ils la voient ? Les indices importants sont de certains L'architecture monumentale ancienne comprenait des bâtiments
types publics, des résidences privées, des tombes, des murs de peuplement,
logique des canaux d'irrigation, etc. Avec l'architecture monumentale,
cependant, les archéologues trouvent généralement des preuves de
constructions technologiquement plus simples. Les assemblages qui
témoignent d'une telle variabilité architecturale contrastent avec
ceux des périodes antérieures, lorsque les habitations étaient plus
simples et plus uniformes et que les structures monumentales
étaient absentes.
Partout où elle se trouve, la première architecture monumentale
se compose de plates-formes surélevées, de temples, de pyramides
ou de structures pyramidales (figure 7.18). Différentes techniques de
construction ont été utilisées pour construire ces monuments dans
différentes zones, et les structures n'ont pas toutes
servir le même but. Par conséquent, les archéologues ont
longtemps rejeté l'idée que toutes les sociétés de construction
de pyramides provenaient de l'Égypte ancienne. Au contraire,
les similitudes interculturelles de ces structures semblent avoir
une explication plus pratique. Aucun des architectes du
Les sociétés les plus complexes savaient construire des arcs et des voûtes
en berceau. De plus, dans des endroits comme les basses terres mayas de
l'Amérique centrale moderne, les constructeurs devaient travailler sans
métal, sans treuils, ni palans ni chariots à roues. Dans ces circonstances, les
seules structures hautes qu'ils auraient pu construire étaient des formes
géométriques de base telles que des carrés, des rectangles et des
pyramides (Wenke 1999, 577).

FIGURE 7.17 Architecture moderne monumentale : les tours

Petronas éclipsent la ville environnante de Kuala Lumpur, en architecture monumentale Constructions architecturales d'une échelle supérieure
Malaisie. à l'humain, telles que des pyramides, des temples et des tombes.
 224 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
Parmi les structures monumentales construites dans les premières
sociétés complexes se trouvaient des tombes. Les différences dans la taille
et la construction des sépultures sont parallèles aux différences dans la
taille et la construction des résidences, et les deux suggèrent l'émergence
d'une société stratifiée. Les tombes plus grandes et construites avec des
matériaux plus coûteux contiennent souvent une variété d'objets, appelés
objets funéraires, qui ont été enterrés avec le cadavre. Des tombes plus
petites et modestes se produisant dans le même assemblage et contenant
peu ou pas d'objets funéraires fournissent des preuves de stratification
sociale. Le nombre et la qualité des objets funéraires trouvés avec un
cadavre donnent des indices sur le degré de stratification d'une société. De
nombreux objets funéraires récupérés dans de riches tombes sont des
chefs-d'œuvre de la céramique, de la métallurgie, du tissage et d'autres
métiers, indiquant que la société avait atteint un haut degré de
compétence technologique et, par conséquent, une division complexe du
travail.
Les archéologues récupèrent souvent des preuves d'une
spécialisation professionnelle complexe directement à partir d'un site.
Ils recherchentconcentrations d'artefacts particuliers qui peuvent
indiquer quel type d'activité a été menée dans chaque zone. Les
archéologues peuvent distinguer les décharges d'ordures, par
exemple, des zones où vivaient les gens, qui auraient été exemptes de
déchets. De même, des pots cassés ou des fours trouvés
uniformément répartis dans une colonie pourraient suggérer que la
poterie a été fabriquée par des familles individuelles. Cependant, des
preuves considérables de la fabrication de la poterie concentrée dans
une zone particulière suggèrent fortement l'existence d'un atelier de
potier et, par conséquent, une spécialisation professionnelle. Les
vestiges des outils utilisés pour fabriquer des artefacts (tours de
potier, fusées ou scories, par exemple) fournissent souvent des
informations importantes sur le degré auquel la technologie
artisanale s'est développée à un moment et à un endroit particuliers.
L'émergence de sociétés complexes semble liée un peu partout
à une explosion phénoménale de la créativité architecturale et
artistique. Bien que les anthropologues admirent les réalisations
matérielles de ces sociétés anciennes, beaucoup sont frappés par le «
gaspillage » de ressources par une petite élite dirigeante. Pourquoi,
par exemple, pratiquement toutes les sociétés complexes originales
ont-elles construit une architecture monumentale ? Pourquoi n'ont-ils
pas investi leur puissance technologique et organisationnelle
croissante dans des projets moins élaborés qui auraient pu bénéficier
aux membres ordinaires de la société ? Pourquoi les chefs-d'œuvre de
la poterie, de la métallurgie et du tissage étaient-ils souvent amassés
et enterrés dans les tombes des dirigeants décédés au lieu d'être plus
largement disponibles ? Ces excès n'ont apparemment
objets funéraires Objets enterrés avec un cadavre.
concentrations d'artefacts particuliers Ensembles d'artefacts indiquant que
des activités sociales particulières ont eu lieu dans une zone particulière d'un site
archéologique lorsque ce site était habité dans le passé.
tessons Des morceaux de pots cassés.
ne se développent pas au début de la civilisation harappéenne de
la vallée de l'Indus, mais ils sont si répandus ailleurs que les
questions restent importantes.
L'archéologue Michael Hoffman, spécialiste de l'Égypte
préhistorique, a suggéré que la clé de la compréhension des
premières sociétés complexes réside dans leur organisation
sociale. Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, des
sociétés s'étaient formées dans lesquelles un pouvoir énorme
était concentré entre les mains d'une petite élite – qui a sans
aucun doute vu ses privilèges remis en cause par ses nouveaux
sujets. Dans de telles circonstances, la production d'une
architecture monumentale et des quantités de produits de luxe
ont servi de preuve de l'aptitude de l'élite à régner. Hoffman
préfère appeler ces objets « powerfacts » plutôt que « artefacts »
parce que leur rôle était de démontrer le pouvoir supérieur des
dirigeants (Hoffman 1991, 294 ; Hayden 1995, 67 ; figure 7.19).
Jusqu'à présent, nous avons décrit les types de vestiges
archéologiques qui suggèrent qu'un site faisait autrefois partie d'une
société complexe. Mais les sociétés complexes consistaient
ordinairement en un certain nombre d'établissements organisés en
hiérarchie. Par conséquent, les archéologues étudient la région pour
déterminer comment un site donné se compare à d'autres
établissements occupés simultanément dans la même zone. (Voir le
chapitre 6 pour une discussion sur les techniques d'enquête.) Les
artefacts de surface les plus courants et les plus utiles récupérés lors
de ces enquêtes sont souvent des morceaux de pots cassés appelés
tessons. Différents types de tessons retrouvés à la surface d'un site
permettent de dresser un inventaire approximatif des différentes
traditions culturelles suivies par les habitants au fil du temps. Lorsque
l'enquête est compl
âges o
e
FIGURE 7.19 Un « powerfact » de la tombe de Toutankhamon. Un
collier trouvé autour du cou est composé d'or, de verre coloré et
d'obsidienne. Il y a 250 segments incrustés, et chaque griffe saisit un
shen, symbole de totalité.
 Quelles sont les preuves archéologiques de la complexité sociale ?
illustre à quel point la taille des établissements et la population
ont changé au fil du temps. Lorsque les chercheurs sont en
mesure d'associer avec précision les différents types de poteries
à la stratigraphie des sites bien fouillés de la région, ils peuvent
dresser un portrait des modèles de peuplement au fil du temps.
Des études systématiques et des travaux de cartographie dans le
sud de l'Irak ont permis à Robert Adams et Hans Nissen de
montrer comment les petits établissements dispersés qui
prévalaient dans la campagne de l'ancienne Mésopotamie il y a
environ 8 000 ans ont été progressivement abandonnés au fil des
siècles, de sorte qu'il y a environ 5 200 ans, pratiquement tout le
monde vivait dans une poignée de grandes colonies, qu'Adams et
Nissen (1972) appellent « villes ».
Pourquoi la stratification a-t-elle commencé ?
Comme nous l'avons vu au chapitre 6, les archéologues organisent
généralement leurs découvertes en utilisant un ensemble de quatre
catégories qui servent de repères dans l'histoire de l'organisation
sociale humaine. Ces catégories—bandes, tribus, chefferies, États—
ont été développées en collaboration avec des anthropologues
culturels et reposent sur des idées dérivées de l'étude de sociétés
vivantes et historiquement documentées de différents types ainsi que
des restes matériels qu'elles ont toutes tendance à laisser derrière
elles (Wenke 1999, 340 –44).
Comme nous l'avons vu, nos ancêtres vivaient apparemment
dans la recherche de nourriture bandes jusqu'à il y a environ 10 000
ans, lorsque les dernières calottes glaciaires ont fondu, après quoi ils
ont commencé à expérimenter de nouvelles stratégies de subsistance
et de nouvelles formes d'organisation sociale. Ceux qui sont venus
cultiver ou élever des troupeaux pour gagner leur vie ont pu subvenir
aux besoins de populations plus importantes et sont classés comme
tribus. Les sociétés classées en tribus sont extrêmement variées.
Morton Fried (1967) a préféré appeler une société de ce genre une
société « de rang ». Elman Service (1962), qui tentait d'identifier les
points tournants clés au cours de la préhistoire humaine, considérait
les tribus comme une forme de transition plutôt que comme un type
de société bien défini. L'ambiguïté de termes commesociété de rang
ou tribu a conduit certains archéologues à substituer le terme société
transégalitaire pour décrire toutes les sociétés qui ne sont ni
égalitaires ni socialement stratifiées (Hayden 1995, 18). En apparence
entre égalité et hiérarchie, les sociétés transégalitaires ont prospéré à
des époques et des lieux divers jusqu'à nos jours, et elles
n'apparaissent pas forcément en passe de devenir autre chose en
particulier.
Contrairement à une société transégalitaire, la chefferie est un
exemple — en fait, le plus ancien exemple clair — d'une société
socialement stratifiée, comme nous l'avons vu chez les Natoufiens du
sud. D'ordinaire, seuls le chef et les proches parents sont mis à part et
ont un accès privilégié à la richesse, au pouvoir et au prestige ; les
autres membres de la société continuent de partager un statut social
à peu près similaire. Les chefferies sont généralement plus grandes
que les tribus et présentent un degré plus élevé
225
de la production artisanale, bien que cette production ne soit pas
encore entre les mains de spécialistes à plein temps. Les
chefferies présentent également un plus grand degré de contrôle
politique hiérarchique, centré sur le chef, les proches du chef et
leurs grandes actions. D'un point de vue archéologique, les
chefferies sont intéressantes car certaines, comme les Natoufiens
méridionaux, sont apparemment restées telles quelles puis ont
disparu, tandis que d'autres se sont développées en États.
Les Etat est une société stratifiée qui possède un territoire qui est
défendu des ennemis extérieurs avec une armée et du désordre intérieur
avec la police. Les États, qui disposent d'institutions gouvernementales
distinctes pour faire appliquer les lois et percevoir les impôts et les tributs,
sont dirigés par une élite qui détient le monopole de l'usage de la force.
Dans les premiers États, le gouvernement et la religion se renforçaient
mutuellement : les dirigeants étaient souvent des prêtres ou étaient
considérés comme des dieux eux-mêmes. Les sociétés d'État sont
soutenues par des techniques sophistiquées de production et de stockage
des aliments. La production artisanale est normalement spécialisée et
produit une variété éblouissante de produits, dont beaucoup sont des
articles de spécialité raffinés destinés à l'élite dirigeante. L'art et
l'architecture fleurissent également, et l'écriture s'est fréquemment
développée dans les sociétés étatiques. Peu de temps après l'apparition du
premier état dans une zone, d'autres états se développent généralement à
proximité. De temps en temps, on peut conquérir ses voisins, les organiser
en un réseau politique plus vaste appelé unEmpire.
Les édifices publics monumentaux de nature
religieuse ou gouvernementale, l'artisanat hautement
développé (p. Un conflit interétatique est suspecté
lorsque les villes sont entourées de hauts murs et
confirmées par des artefacts qui ont servi d'armes, par
des œuvres d'art représentant la bataille et par des
documents écrits qui enregistrent les triomphes
militaires. Parce que l'écriture s'est développée dans la
plupart des premiers états, diverses inscriptions
fournissent souvent des informations précieuses sur
l'organisation sociale qui complètent les
reconstitutions de l'archéologue.
Les archéologues supposent l'intégration régionale lorsqu'ils
trouvent des styles uniques dans l'architecture, la poterie, les textiles et
d'autres artefacts répartis uniformément sur une vaste zone ; une telle
preuve est appelée unhorizon culturel. Pour les archéologues, le terme
civilisation fait généralement référence à l'épanouissement de la créativité
culturelle qui accompagne l'essor des sociétés étatiques et persiste
pendant longtemps. Cependant, l'uniformité généralisée de la culture
matérielle n'implique pas nécessairement un ensemble unique
d'institutions politiques. Les archéologues qui souhaitent parler d'un État
ou d'un empire ont donc besoin de preuves supplémentaires, telles qu'une
hiérarchie des modèles de peuplement ou des documents écrits décrivant
les politiques gouvernementales centralisées. Le changement culturel dans
toutes les premières sociétés complexes avait tendance à alterner entre
des périodes de relative
226 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
l'uniformité culturelle et l'unité politique et les périodes de
différenciation régionale et de manque d'intégration politique.
Notons que les catégories précédentes et le cadre
de comparaison interculturel qu'elles fournissent ont
été critiqués ces dernières années. Des archéologues
post-processus comme Shanks et Tilley (1987), par
exemple, soutiennent que les comparaisons
traditionnelles des anciennes sociétés « étatiques »
accordent trop d'attention aux similitudes
environnementales et technologiques tout en
ignorant ou en rejetant l'importance des modèles
culturels distincts de significations et de valeurs qui
ont fait de chacune de ces anciennes civilisations
uniques. D'autres archéologues, cependant,
soutiennent que les similitudes entre les civilisations
anciennes sont tout aussi frappantes que leurs
différences culturelles et nécessitent une explication
(Trigger 1993). Bien que ce débat continue, de
nombreux archéologues ont tenté de trouver un
équilibre,
Comment les anthropologues peuvent-ils
expliquer l'augmentation
des sociétés complexes ?
Étant donné que les humains ont vécu en bandes d'alimentation pendant la
majeure partie de leur histoire et que, dans certaines parties du monde,
l'agriculture villageoise est restée une activité stable et viable
des centaines ou des milliers d'années, ce n'est pas
FIGURE 7.20 La civilisation de l'Égypte
ancienne était soutenue par des
pratiques agricoles qui reposaient sur le
régime des crues régulières du Nil. Sur
cette photographie prise depuis la
navette spatiale, la large bande sombre
traversant la région du désert clair est la
plaine inondable cultivée du Nil. La rivière
elle-même est la ligne très sombre et
étroite qui serpente à travers cette zone
cultivée.
des sociétés complexes n'auraient jamais dû se développer. Au fil des ans,
les anthropologues ont proposé un certain nombre d'explications.
Certaines de leurs hypothèses (comme certaines conçues pour expliquer le
virage de nos ancêtres vers la domestication ou le sédentisme) plaident en
faveur d'une cause unique et uniforme, ou moteur principal, qui a
déclenché l'évolution d'une société complexe dans le monde entier. En
effet, comme nous le verrons, bon nombre de ces moteurs sont les mêmes
facteurs suggérés pour expliquer le développement de la domestication et
du sédentisme.
Pendant longtemps, les savants ont pensé que la
domestication des plantes et la sédentarité dans les villages
agricoles offraient aux gens le loisir d'inventer la complexité
sociale et technologique. Cette explication est cependant
discutable, car de nombreuses sociétés paysannes ne se sont
jamais développées au-delà du niveau d'organisation villageoise.
De plus, la complexité sociale peut apparemment se développer
sans le soutien d'une économie pleinement agricole, comme chez
les Natoufiens. Enfin, des recherches ethnographiques ont
montré que les cueilleurs ont en réalité plus de temps libre que la
plupart des agriculteurs du village.
D'autres chercheurs suggèrent que la complexité sociale
dépendait des environnements arides ou semi-arides (Figure 7.20).
Les premières sociétés complexes d'Égypte, de Mésopotamie et de la
vallée de l'Indus étaient situées dans des régions sèches traversées
par un grand fleuve, qui fournissait de l'eau pour l'intensification de la
production agricole suite à la construction de canaux d'irrigation. Le
lien apparent entre l'agriculture dans un environnement aride, le
besoin d'eau d'irrigation et l'émergence de sociétés complexes a
conduit Karl Wittfogel (1957) à émettre l'hypothèse que les sociétés
complexes se développent d'abord.
 Comment les anthropologues peuvent-ils expliquer l'essor des sociétés complexes ?
ont fonctionné sans une élite dirigeante pour diriger les
opérations. Ainsi, il voit se développer ce qu'il appelleagriculture
hydraulique comme la clé de l'évolution d'une société complexe.
Cette hypothèse, bien que suggestive, a également été remise en
question. Premièrement, des sociétés telles que les Hohokam du
sud-ouest américain exploitaient apparemment un vaste système
d'irrigation sans développer de stratification sociale ou de
complexité culturelle (Wenke 1999, 356). Deuxièmement, les
types de systèmes d'irrigation complexes que Wittfogel avait à
l'esprit - ceux nécessitant une bureaucratie - apparaissent
tardivement dans les archives archéologiques de plusieurs
civilisations anciennes, longtemps après la première apparition
de l'architecture monumentale, des villes et d'autres signes de
complexité sociale (voir, par exemple, , Adams 1981, 53).
L'irrigation a peut-être joué un rôle dans le développement de
sociétés complexes, mais ce n'était apparemment pas le seul
moteur qui les a fait naître.
Parce que de nombreux premiers groupes d'agriculteurs villageois n'ont jamais développé un degré élevé de
complexité sociale, les archéologues considèrent son apparence plus comme l'exception que comme la règle. Certains
suggèrent que la pression démographique était la force décisive : si l'approvisionnement alimentaire ne pouvait pas suivre
une population croissante, le chaos social aurait résulté à moins que quelqu'un ne soit capable d'exercer le pouvoir
d'allouer des ressources et de maintenir la paix. Ce scénario est toutefois rejeté par ceux qui soutiennent que l'inégalité
sociale s'est développée dans des sociétés où les ressources étaient abondantes et où les individus opportunistes
pouvaient gagner du pouvoir en utilisant les surplus pour s'endetter à autrui par le biais de festins compétitifs ou de
contrôle du travail (Arnold 1995; Hayden 1995). Aussi, des preuves archéologiques provenant de plus d'une partie du
monde montrent que la pression démographique n'était pas un problème lorsque la complexité sociale est apparue pour
la première fois. Certains archéologues suggèrent maintenant que les sociétés humaines étaient capables de limiter la
croissance démographique si elles le choisissaient, que ce soit par la migration, l'infanticide, l'avortement, la contraception
ou le mariage tardif. Enfin, la plus grande baisse de la fécondité dans le monde occidental moderne ne s'est pas produite
chez les affamés, ni n'a été déclenchée par l'invention d'une nouvelle technologie de contrôle des naissances : ce sont les
familles bien nourries de la classe moyenne des sociétés capitalistes qui ont commencé à ont moins d'enfants, pas les
travailleurs pauvres. Les forces qui modifient les taux de reproduction sont bien plus complexes qu'un simple modèle de
pression démographique ne le permettrait. Certains archéologues suggèrent maintenant que les sociétés humaines
étaient capables de limiter la croissance démographique si elles le choisissaient, que ce soit par la migration, l'infanticide,
l'avortement, la contraception ou le mariage tardif. Enfin, la plus grande baisse de la fécondité dans le monde occidental
moderne ne s'est pas produite chez les affamés, ni n'a été déclenchée par l'invention d'une nouvelle technologie de
contrôle des naissances : ce sont les familles bien nourries de la classe moyenne des sociétés capitalistes qui ont
commencé à ont moins d'enfants, pas les travailleurs pauvres. Les forces qui modifient les taux de reproduction sont bien
plus complexes qu'un simple modèle de pression démographique ne le permettrait. Certains archéologues suggèrent
maintenant que les sociétés humaines étaient capables de limiter la croissance démographique si elles le choisissaient,
que ce soit par la migration, l'infanticide, l'avortement, la contraception ou le mariage tardif. Enfin, la plus grande baisse
de la fécondité dans le monde occidental moderne ne s'est pas produite chez les affamés, ni n'a été déclenchée par
l'invention d'une nouvelle technologie de contrôle des naissances : ce sont les familles bien nourries de la classe moyenne
des sociétés capitalistes qui ont commencé à ont moins d'enfants, pas les travailleurs pauvres. Les forces qui modifient les
taux de reproduction sont bien plus complexes qu'un simple modèle de pression démographique ne le permettrait. elle n'a pas non plus été déclenchée par l'invention d'une nouvelle technologie de contrôle des naissances : ce sont les familles bien nourries de la classe moyenne dans les société
Si la pression démographique n'a pas miné les relations sociales
égalitaires des agriculteurs du village, peut-être que le conflit avec
d'autres villageois était à blâmer. Si toutes les terres agricoles
disponibles étaient occupées, par exemple, rendant impossible le
déplacement des populations en période de conflit, la seule solution,
en dehors du chaos, aurait été d'établir des règles pour résoudre les
conflits, conduisant ainsi au développement de politiques politiques
plus complexes. structures (Nissen
227
1988, 60-61). Tôt ou tard, cependant, si le chaos ne pouvait être
contenu, la guerre aurait pu éclater entre les villages voisins. En effet,
Brian Hayden suggère que des individus en quête de pouvoir
pourraient bien avoir manipulé de telles tensions, en utilisant des
surplus économiques pour régler des conflits et en amassant ainsi
richesse et pouvoir personnels. Cela ne pouvait pas se produire, selon
lui, tant que les gens ne seraient pas disposés à accepter la richesse
du sang, une innovation cruciale que l'on ne trouve pas dans les
sociétés égalitaires (Hayden 1995, 32).Richesse du sang est un
surplus économique, payé par les auteurs pour indemniser leurs
victimes de leur perte. Si les paiements de la richesse du sang
favorisaient de manière disproportionnée certains individus ou
groupes par rapport à d'autres, leurs relations sociales ne seraient
plus égalitaires.
La guerre, la pression démographique et les environnements
arides jouent tous un rôle dans la théorie de Robert Carneiro (1970)
de la montée des premiers États au Pérou, en Mésopotamie et en
Égypte et des États secondaires plus tard ailleurs. Dans le schéma de
Carneiro, la pression démographique aurait conduit à une
augmentation des conflits entre les villages voisins une fois qu'il
n'était plus possible pour les villageois de cultiver de nouvelles terres.
Cette situation, qu'il appellecirconscription environnementale,
pourrait avoir été particulièrement probable dans les premières
sociétés agricoles qui ont grandi le long des vallées fluviales
traversant des déserts, comme celles de la Mésopotamie, de l'Égypte
et de la côte péruvienne. Lorsque la barrière du désert a stoppé
l'expansion des villages, de nouvelles terres agricoles ne pouvaient
être obtenues qu'en les enlevant par la force aux autres villages. La
théorie de Carneiro a suscité de nombreuses discussions. Cependant,
le rôle qu'il attribue à la pression démographique est ouvert aux
critiques soulevées plus tôt, et de nombreux archéologues n'ont
toujours pas trouvé de preuves qui confirmeraient ou réfuteraient les
hypothèses de Carneiro.
De toute évidence, toute force qui pourrait détruire les relations
égalitaires qui ont prévalu dans les sociétés agricoles pendant des
centaines ou des milliers d'années aurait dû être très puissante. A ce
propos, David Webster (1975) a suggéré que le tournant se produisait
dans les sociétés paysannes qui étaient des chefferies. Vous vous
souviendrez que les chefferies possèdent une forme limitée de
stratification sociale qui place la ligne principale au-dessus des autres
membres de la société, qui continuent de jouir d'une égalité sociale
renforcée par la parenté. Si la guerre dans une telle société sapait les
anciennes relations de parenté, les gens pourraient éventuellement
être désespérés pour l'ordre social et accepter la stratification sociale
si cela rétablissait la stabilité.
Tous les principaux moteurs discutés jusqu'à présent impliquent
des facteurs technologiques, économiques, environnementaux ou
biologiques qui auraient contraint les sociétés à la complexité, quelles
que soient leurs traditions culturelles antérieures. Se rendre compte
que ces facteurs externes étaient moins
la richesse du sang Biens matériels payés par les auteurs pour indemniser leurs
victimes de leur perte.
228 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
DANS LEURS PROPRES MOTS
Les conséquences écologiques de la complexité sociale
De nombreuses personnes ont tenté d'attribuer à la fois l'essor
et le déclin des premières sociétés complexes
à des facteurs enracinés dans l'environnement naturel.
Dan et Prudence Rice soutiennent que
un examen plus approfondi de la Méso-Amérique suggère que
les choses n'ont jamais été aussi simples.
Il est évident que les Mayas ont initié des pratiques pour réduire les
processus régionaux de perte de nutriments, de détérioration de la
structure du sol, de déstabilisation des flux d'eau, d'érosion des sols et
de perte de composants productifs de leur environnement. Les
résultats de « l'expérience » maya démontrent que les forêts tropicales
ne sont ni des zones de fertilité illimitée ni des zones homogènes dans
lesquelles la redondance des cultures est de mise. Il s'agissait d'un
système multihabitat et multitechnologique à forte intensité de main-
d'œuvre, un système qui reposait sur une motivation principale pour
une production accrue – une population croissante – comme source
d'énergie pour faire fonctionner le système. Relativement parlant, il
s'agissait d'un régime écologiquement efficace qui répondait à une
demande accrue de production grâce à une intensité de main-d'œuvre
accrue et à une base de terres agricoles accrue.
Les Mayas se sont adaptés à l'environnement de la forêt tropicale
sur une longue période, et l'une des clés de leur succès a sans aucun
doute été l'opportunité d'une expérimentation et d'une évaluation
soutenues. Dans les bassins de Yaxha-Sacnab, les contraintes
environnementales causées par l'épuisement des sols et l'altération de
l'écosystème lacustre se sont développées lentement, en tandem avec
de faibles taux de croissance démographique, trop lentement
puissant qu'on ne le croyait auparavant, de nombreux
anthropologues ont porté leur attention sur des facteurs
socioculturels internes qui auraient pu conduire à la montée de la
complexité sociale : rappelez-vous la théorie de Barbara Bender sur
l'origine de la domestication, qui a inspiré Brian Hayden, entre autres.
Au cours des années 1960 et 1970, certains anthropologues ont été
influencés par les travaux de Karl Marx et de ses disciples, qui ont
soutenu que les tentatives de résoudre les contradictions qui se
développent au sein d'une forme particulière d'organisation sociale
peuvent conduire à un changement social profond. L'analyse marxiste
pourrait suggérer, par exemple, que le commerce extérieur d'articles
de luxe par les dirigeants des premières chefferies peut avoir généré
des conflits entre la famille du chef (dont les intérêts étaient servis par
le commerce) et les gens du commun (dont les
agir comme un mécanisme pour réduire l'augmentation globale de la
population jusqu'à au moins l'époque classique tardive. Cette
déclaration ne vise pas à suggérer que les Mayas n'ont pas subi de
contraintes. Leur croissance, leur expansion et leur intensification ont
forcé les Mayas à considérer de plus près les processus de dégradation.
Aucune donnée n'existe à l'heure actuelle, cependant, indiquant que le
système agricole maya avait atteint ses limites productives ou qu'une
productivité réduite a causé « l'effondrement » de la civilisation. Certes,
certains habitats ou technologies étaient plus vulnérables aux
contraintes que d'autres, et la juxtaposition circonstancielle de la
dégradation et du déclin culturel dans les bassins de Yaxha-Sacnab est
théoriquement séduisante. Mais les réponses mayas aux problèmes de
production n'étaient pas seulement technologiques, mais sociales,
religieuses et politiques, et l'entretien efficace d'une infrastructure
agro-économique dépendait de forces culturelles en plus de celles
environnementales. Les deux nécessitent une enquête plus
approfondie.
La question non résolue de « l'effondrement » maya et le succès à
long terme de la civilisation maya peuvent favoriser une complaisance
fallacieuse – et dangereuse – envers le développement économique
futur des tropiques si les taux relatifs de changement ne sont pas mis
en perspective. Les tendances démographiques actuelles dans les
zones tropicales engendrent un réel sentiment d'urgence quant au
travail à venir. Les environnements tropicaux tels que le Petén doivent
être évalués avant que les populations modernes n'obscurcissent les
détails de l'histoire de l'écosystème afin que des informations
pertinentes sur les stratégies d'adaptation réussies à long terme
puissent être mises à disposition alors qu'elles pourraient encore avoir
un impact sur l'utilisation future des terres.
La source: Riz et riz 1993.
les intérêts en ont été minés) (Kipp et Schortman
1989). Un tel conflit d'intérêts pourrait éventuellement
avoir complètement déséquilibré une chefferie,
conduisant au type de transformation sociale suggéré
par Webster (1975).
Les documents écrits, lorsqu'ils sont disponibles, peuvent
parfois fournir un aperçu suffisamment détaillé de l'organisation
sociale pour identifier les hiérarchies sociales et retracer leur
évolution dans le temps. Mais pour les anciennes sociétés
complexes qui manquaient d'écriture – et cela inclut les six
premières de ces sociétés – l'approche marxienne est
extrêmement difficile à appliquer aux matériaux archéologiques.
De nombreux vestiges des premières sociétés complexes sont
incomplets et pourraient être compatibles avec plus d'une forme
 Comment les anthropologues peuvent-ils expliquer l'essor des sociétés complexes ?
d'organisation sociale. En effet, toute théorie, marxiste ou non, qui
cherche à expliquer l'émergence d'une société complexe en termes
de relations sociales, de culture politique ou de croyances religieuses
est confrontée au même problème. Quelle que soit leur importance,
de tels phénomènes ne se fossilisent pas et ne peuvent être inférés de
manière fiable sur la base des seules données archéologiques, un fait
inconfortable qui continue de frustrer les archéologues qui tentent de
reconstituer la préhistoire.
Les anthropologues ne peuvent offrir une explication
unique et radicale de l'évolution culturelle, bien que ce fût leur
espoir à la fin du XIXe siècle. Mais leurs tentatives pour tester
diverses hypothèses qui promettent de telles explications ont
conduit à une appréciation beaucoup plus riche des complexités
du changement social et culturel. L'archéologue Robert Wenke
(1999) observe que « l'évolution culturelle n'est pas un
changement continu, cumulatif et graduel dans la plupart des
endroits. 'Comme ça marche' le décrit mieux » (336). Il met en
outre l'accent sur la remarquable adaptabilité des systèmes
culturels, notant dans une discussion sur la Méso-Amérique que
les analyses environnementales et écologiques ne peuvent pas
expliquer tant de choses : « une fois que nous avons dépassé ce
simple niveau d'analyse écologique, nous histoires, modèles de
peuplement, et les autres élaborations de ces sociétés complexes
» (609). Le reste de ce chapitre offre un échantillon d'une partie
de cette variabilité, en examinant les preuves portant sur l'essor
des premières sociétés complexes en Amérique du Sud.
TABLEAU 7.1 Périodes culturelles de la civilisation andine
ÉCHELLE DE TEMPS CULTURE SÉLECTIONNÉE
1500 Inca
1250 Chimú
1000
Wari
750
500
Moché
CE
AEC
500
Chavin
1000
2000
4000
Paijan
6000
8000
Luz
10 000
229
civilisation andine
La région andine d'Amérique du Sud a donné naissance à une
civilisation riche, complexe et variée qui a abouti à l'empire Inka,
le plus grand système politique à se développer dans le Nouveau
Monde avant l'arrivée des Européens. Cependant, la richesse et la
complexité même de cette civilisation, associées à un
financement insuffisant pour la recherche archéologique, ont fait
que seules les contours les plus nus de son développement
peuvent être tracés (tableau 7.1).
La géographie des Andes est particulière et a eu une influence
importante sur le développement des sociétés complexes locales.
C'est une région de jeunes montagnes escarpées et de volcans. Le
long du Pacifique se trouvent des déserts sur lesquels la pluie n'est
pas tombée depuis des siècles, ainsi qu'une étroite bande côtière de
plaine couverte d'une végétation luxuriante qui n'est pas soutenue
par la pluie mais par le brouillard s'élevant de l'océan. C'est la zone de
lalomas, ou prairies brumeuses, qui sont traversées par plus de deux
douzaines de petites rivières qui coulent des hautes terres. Le bord
ouest des basses terres de Loma s'élève brusquement à travers
plusieurs zones climatiques jusqu'aux hautes terres, ousierra, des
montagnes des Andes. Les prairies vallonnées entre 3 900 et 5 000
mètres forment une zone appelée lapuna, le niveau le plus élevé
adapté à l'habitation humaine. Enfin, les pentes orientales des Andes
descendent dans les forêts tropicales humides des sources
amazoniennes, une zone appelée laselva. Au cours des dernières
PÉRIODE/HORIZON
Horizon tardif
Période intermédiaire tardive
Tiwanaku Horizon moyen
Début de la période intermédiaire
Horizon précoce
Période initiale
Période précéramique
Période lithique
230 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?

années, de plus en plus de preuves suggèrent que les cultures

agricoles dans la forêt tropicale ont contribué à bon nombre des
plantes domestiquées qui sont devenues plus tard indispensables à
l'agriculture andine (Chauchat 1988; Raymond 1988; Rick 1988).
La présence de l'homme en Amérique du Sud avant
Il y a 15 000 ans est encore débattu, mais des bandes de
butineuses vivaient définitivement le long de la côte
péruvienne il y a entre 14 000 et 8 000 ans et dans la sierra il
y a entre 11 000 et 10 000 ans. Les groupes des basses terres
ont profité de la remontée unique du courant côtier froid -
qui a gardé les nutriments pour les organismes vivant dans
l'océan près de la surface - pour exploiter une abondance de
ressources alimentaires marines. Il y a environ 5 000 à 4 000
ans, le quinoa, les cobayes, les pommes de terre et les
camélidés (lamas et alpagas) étaient domestiqués dans les
hautes terres. Cependant, ni les cueilleurs côtiers ni les
premiers agriculteurs des hautes terres ne fabriquaient de la
poterie. Il y a 3 200 ans, le premier maïs apparaît sur la côte
équatorienne (Smith 1995a, 157, 181).
Sur la côte péruvienne, il y a entre 5 000 et 4 500 ans, les
villageois ont commencé à construire des bâtiments à plusieurs
pièces, qui ont ensuite été remplis pour former des monticules en
forme de pyramide. Des complexes de plates-formes, de pyramides et
d'enceintes surélevées sont apparus pour la première fois il y a 4 000
ans sur des sites comme El Paraíso sur la côte et Kotosh dans les
hautes terres. Il est prouvé que les premiers constructeurs de
monticules côtiers n'étaient pas des agriculteurs, mais des villageois
qui dépendaient de la nourriture de la mer. Peut-être que les
FIGURE 7.21 La culture Chavín s'est largement répandue au début
premiers constructeurs de monticules dans les hautes terres n'étaient Horizon au Pérou (900-200 AEC.). La sculpture monumentale
pas non plus des agriculteurs, mais les établissements des hautes illustrée ici est le Lanzón dans le vieux temple du complexe
terres sont rapidement devenus dépendants de la culture du maïs et cérémoniel de Chavín de Huantar.

d'autres cultures. Entre 3 800 et 2 900 ans, le nombre de sites à

l'architecture monumentale a augmenté dans les vallées côtières, de
même que la proportion de plantes cultivées dans l'alimentation
côtière, ce qui suggère que l'agriculture irriguée était devenue
importante dans les économies côtières. Il existe également des
preuves au cours de cette période de contacts croissants entre les
établissements côtiers et montagnards : le plan en forme de « U » des
sites cérémoniels côtiers a commencé à apparaître dans les hauts
plateaux, tandis que les lamas sont devenus importants,
économiquement et rituellement, sur la côte (Pineda 1988) .
Ces premiers développements vers la complexité sociale
sont apparus chez des peuples aux traditions culturelles
distinctes. Cependant, entre 2 900 et 2 200 ans, une seule
tradition culturelle avec ses propres styles d'art, d'architecture et
de poterie s'est rapidement répandue dans le centre et le nord
du Pérou. Ce phénomène est appelé l'Horizon de Chavín, et la
période au cours de laquelle il s'est produit est généralement
appelée l'Horizon ancien car c'était la première fois dans l'histoire
andine qu'autant de communautés locales adoptaient une seule
tradition culturelle (Figure 7.21). Beaucoup de choses sont
obscures sur la période Chavín. Il ne semble pas que la culture
chavín se soit propagée par conquête, ni qu'elle n'ait totalement
remplacé les traditions locales de ceux qui ont adopté
ce; mais son apparition s'est accompagnée d'un nouveau niveau
d'interaction sociale et économique entre des sociétés locales
auparavant isolées.
La plupart des experts s'accordent à dire que la propagation
de la culture Chavín était liée à la propagation d'une idéologie
religieuse, parfois appelée culte Chavín. Richard Berger (1988)
suggère qu'il s'agit peut-être d'un culte régional qui a été
volontairement adopté par un certain nombre de groupes
ethniques différents, peut-être un précurseur du culte de
Pachacamac qui a prospéré au Pérou du XVIe siècle. Le culte de
Chavín tire son nom du centre cérémoniel montagnard Chavín de
Huantar, qui était important vers la fin de l'Horizon Ancien. La
floraison de la poterie, de la métallurgie et de la production
textile qui marque l'horizon de Chavín a peut-être été
encouragée par une élite religieuse désireuse d'améliorer son
statut parmi ses nouveaux adeptes.
Le culte de Chavín et l'intégration régionale qui
l'accompagnait se sont effondrés il y a 2 200 ans. Bien que cette
évolution ait conduit à la résurgence de la vie villageoise dans
certaines régions, la société complexe ne s'est pas effondrée
partout. Au cours de la période intermédiaire précoce (200AEC–
600 CE), des groupes culturels distincts ont suivi leur propre
 Comment les anthropologues peuvent-ils expliquer l'essor des sociétés complexes ? 231

chemins. Sur la côte, plus d'une douzaine de nouveaux états

régionaux sont apparus, mais seuls quelques-uns sont bien connus
archéologiquement. L'État Moche, par exemple, englobait plusieurs
vallées fluviales sur la côte nord et continuait le modèle antérieur
reliant la religion, l'architecture monumentale et les riches objets
funéraires. Les plus grandes structures de l'ancien Pérou qui ont été
construites en briques séchées au soleil (ou en adobe) ont été
construites dans la vallée de Moche pendant la période intermédiaire
précoce, tout comme un système élaboré de distribution d'eau. Les
Moche ont également développé un style artistique distinctif qui est
apparu dans la céramique, les textiles et les peintures murales (figure
7.22).
Sur la côte sud, une société complexe centrée dans la vallée de Nazca
a produit des pyramides monumentales, des collines en terrasses, des lieux
de sépulture et des enceintes fortifiées, ainsi que des poteries et des
textiles élaborés. Il a également produit les célèbres lignes de Nazca, des
marques monumentales qui ont été faites en balayant la couche supérieure
sombre de la surface du désert pour exposer le sol plus clair en dessous
(Figure 7.23). Les premiers marquages sont des dessins d'animaux et de
figures surnaturelles, également trouvés sur les textiles, tandis que les
marquages ultérieurs sont principalement des lignes droites. La
signification exacte des lignes de Nazca n'est pas claire. Des structures
similaires sont connues ailleurs au Pérou, et de nombreux experts
soupçonnent que les lignes pourraient avoir été des marqueurs
commémoratifs ou faire partie d'un système calendaire. Il n'y a aucune
preuve qu'ils aient été construits comme pistes d'atterrissage pour des
extraterrestres venus de l'espace.
Dans les hauts plateaux andins, de nombreuses petites sociétés
indépendantes se sont développées au cours de la période
intermédiaire précoce. Parmi celles-ci, la plus importante est peut-être
la tradition qui s'est développée dans le bassin du lac Titicaca dans les FIGURE 7.22 Les céramiques ont été développées à un niveau élevé de so-
phistication dans les premiers États, comme le montre ce pot portrait à
hautes terres du sud. La culture du bassin du Titicaca possédait des
étrier-bec produit par la civilisation Moche, qui a prospéré dans le nord du
traditions distinctives dans l'architecture, les textiles et l'art religieux Pérou entre 250 et 500 de notre ère. Il est important de noter que la
qui ont fortement influencé les sociétés complexes ultérieures de la poterie était également fabriquée et utilisée par des personnes non

région (Conklin et Moseley 1988). -temps agriculteurs.

Après 600 de notre ère, la fragmentation culturelle de la

période intermédiaire précoce s'est inversée dans deux régions
du Pérou. Une société complexe appelée Tiwanaku (parfois
orthographiéTiahuanaco) a commencé à répandre la culture du
bassin du Titicaca dans les hautes terres du sud des Andes. Dans
les hautes terres centrales et la côte centrale, une deuxième
société complexe connue sous le nom de Wari (parfois
orthographiéHuari) a étendu son influence. Ces deux puissances
régionales ont été nommées d'après de grandes villes
préhistoriques qui ont probablement servi de capitales. La
période au cours de laquelle ces deux États ont étendu leur
influence culturelle et politique (600 à 1000 de notre ère) est
appelée l'horizon moyen de l'évolution culturelle andine.
Wari et Tiwanaku partagent certains attributs
culturels communs, mais les archéologues ont du mal à
déchiffrer la nature de leur relation. Tiwanaku avait une
hiérarchie dirigeante à orientation religieuse ; Wari ne l'a
pas fait. L'architecture des centres administratifs Wari
manque de résidences, d'entrepôts et de communauté
cuisines, qui ont été construites dans les colonies de la province
de Tiwanaku pour les membres de la bureaucratie religieuse.
William Isbell (1988) relie la structure administrative de Wari à
une forme d'organisation sociale antérieure et non hiérarchique
qui avait prospéré dans la vallée d'Ayacucho au cours de la
période intermédiaire précoce. Dans ce système, les
communautés des hautes terres ont fondé des colonies dans les
différentes zones écologiques qui s'étendaient entre les hautes
terres et la côte, fournissant ainsi aux communautés des hautes
terres et à leurs différentes colonies une gamme complète de
produits de chaque zone. Ce modèle andin distinct de
construction de niche, qui intègre les ressources économiques
d'une variété d'environnements, est appelé lesystème d'archipel
vertical.
Isbell pense que les dirigeants de Wari ont adopté la forme
de gouvernement centralisé et hiérarchique de Tiwanaku mais
pas les idées religieuses qui l'accompagnaient. Wari a ensuite
utilisé ces structures politiques centralisées pour
232 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
FIGURE 7.23 Photographie aérienne
d'un singe dans la vallée de Nazca au
Pérou.
transformer le système d'archipel vertical égalitaire de la période
intermédiaire précoce en un système de collecte de richesse
socialement stratifié pour l'État (Isbell 1988, 182). Des preuves
archéologiques de festins parrainés par l'État en échange d'un
travail collectif sur des terres de l'État ont peut-être été trouvées
sur le site Middle Horizon de Jargampata, situé à 20 kilomètres de
Wari. Le système d'archipel vertical et les installations pour les
fêtes patronnées par l'État pour les travailleurs sur les terres de
l'État ont ensuite été incorporés dans la société des Inkas. Isbell
(1988) pense également que le système administratif Inka,
impliquant des capitales régionales reliées par des autoroutes
avec des gares routières pour les coureurs, s'est peut-être
d'abord développé à Wari.
Après environ 1000 CE, Wari et Tiwanaku ont
décliné, inaugurant la période intermédiaire tardive,
qui a duré jusqu'à la montée des Inkas en 1476 CE.
C'est pendant la période intermédiaire tardive que le
centre de pèlerinage de Pachacamac sur la côte
centrale s'est pleinement établi 1988). Des États
régionaux indépendants avec des cultures distinctes
ont émergé dans une demi-douzaine de régions du
Pérou, dont la plus connue est l'État Chimú, Chimor,
sur la côte nord. La capitale de l'état Chimú, Chan
Chan, est située dans la vallée de Moche. Chimú
administrait un système d'irrigation complexe dans un
certain nombre de vallées fluviales adjacentes. La
plupart des agriculteurs de l'État Chimú semblent
avoir vécu dans les villes. Bien que le lien entre
l'agriculture hydraulique et le pouvoir d'État semble
clair dans le cas de Chimú,
Chan Chan, la capitale Chimú, et Cuzco, la capitale Inka,
étaient toutes deux situées dans des zones frontalières
entre les sphères d'influence culturelle et politique pendant
l'Horizon Moyen. L'essor de Cuzco a commencé à l'époque
intermédiaire tardive, lorsque les royaumes descendants de
Tiwanaku et de Wari ont commencé à se battre les uns contre les
autres. La guerre s'est poursuivie jusqu'aux années 1460, lorsque
les Inkas, dont l'empire n'avait commencé que 20 ans plus tôt,
ont soumis les États voisins et les ont amenés dans leur empire
en expansion (Parsons et Hastings 1988). En 1476, les Inkas
réprimèrent la dernière d'une série de rébellions internes,
établissant fermement leur empire de Tawantinsuyu, qui signifie
« monde des quatre quartiers ». Lorsque les Espagnols sont
arrivés en 1525, l'empire Inka s'étendait de la Colombie actuelle
au centre du Chili, de la côte Pacifique aux forêts tropicales
humides des pentes andines orientales (Wenke 1999, 640).
Pendant la période de domination des Incas de 1476 à 1525,
connue sous le nom d'Horizon tardif, les Incas se sont appuyés sur les
réalisations de centaines d'années de civilisation andine. Ils ont
développé le système d'archipel vertical, élargi le réseau routier et
construit de nouveaux palais monumentaux, des temples, des
installations de stockage, des casernes et des relais routiers sur les
autoroutes. Ils ont maintenu le contrôle de leur vaste empire par la
force militaire en déplaçant de grandes sections de la population
d'une région à l'autre pour des raisons politiques et en continuant à
recruter de la main-d'œuvre pour des projets d'État en échange de
festins parrainés par l'État. Contrairement à Chimú, qui était en
grande partie urbain, l'empire Inka était basé dans des villages
ruraux. La société était organisée en grands groupes familiaux
appelésayllu, qui ont ensuite été regroupés en unités de niveau
supérieur. Mais le système administratif n'était pas identique dans
toutes les régions de l'empire : dans des endroits comme Chan Chan,
les Inkas utilisaient des structures administratives préexistantes, mais
dans des zones où l'administration centralisée n'existait pas, comme
Huánuco Pampa.

FIGURE 7.24 Les civilisations indigènes des Andes n'ont jamais
développé des systèmes d'écriture mais ont pu enregistrer des informations
importantes en utilisant le quipu, un système de cordes nouées. Sur la base
d'un système décimal, les nœuds quipu ont été codés par taille, emplacement,
séquence relative et couleur.
dans les hauts plateaux du centre, ils ont construit de nouveaux
centres administratifs à partir de zéro (Morris 1988).
Les Andes sont si diverses sur le plan écologique et tant de
données restent non récupérées qu'il peut sembler dangereux de
spéculer sur la montée d'une société complexe ici. Si les premières
sociétés complexes de la côte péruvienne étaient fondées
Résumé du chapitre
1. Il y a environ 10 000 ans, le recul des derniers glaciers marqua la
fin du Pléistocène. Le climat de la Terre a considérablement
changé, affectant la répartition des plantes et des animaux et
transformant les cadres écologiques dans lesquels les êtres
humains vivaient. Peu de temps après, les êtres humains ont
commencé à développer de nouvelles façons de s'adapter en
intervenant dans ces environnements environnementaux
modifiés pour créer de nouvelles niches pour eux-mêmes.
2. La domestication des plantes et des animaux est utilement
comprise comme des formes de construction de niches. Non
seulement les êtres humains ont interféré avec la reproduction
des espèces locales, pour les rendre plus utiles à des fins
humaines, mais ils ont également remodelé les cadres
environnementaux dans lesquels les plantes étaient cultivées ou
les animaux étaient nourris et abreuvés. Lorsque l'invention de
l'agriculture est considérée comme une construction de niche, il
ne fait aucun doute qu'elle impliquait un choix humain conscient.
Les êtres humains intelligents ont consciemment choisi de
domestiquer des plantes sauvages faciles à récolter,
nourrissantes et savoureuses ; mais ils devaient également créer
consciemment les outils et planifier les activités qui rendraient la
culture d'une culture domestique possible et réussie.
Résumé du chapitre 233
sur un approvisionnement régulier en nourriture de la mer, plutôt que
l'agriculture, l'idée que l'agriculture villageoise doit anticiper la
montée de la complexité sociale est remise en cause. De plus, le
fait que ces premières sociétés côtières complexes étaient
dépourvues de poterie n'était pas plus un obstacle au
développement que ne l'était le fait que les premiers États
andins, jusqu'aux Inkas compris, n'avaient pas de langue écrite
(figure 7.24). L'hypothèse de la circonscription
environnementale de Carneiro semble suggestive lorsque l'on
considère la montée des premiers États à vallées multiples sur la
côte au cours de la période intermédiaire précoce, mais la guerre
constante requise pour son plan ne devient significative que
beaucoup plus tard, longtemps après que des États complexes
aient déjà émergé. L'agriculture hydraulique était clairement
importante pour l'essor de l'État Chimú, mais elle a émergé des
centaines d'années après les premières sociétés complexes sur la
côte. Même si l'agriculture hydraulique avait été importante
pendant la période intermédiaire tardive, comme nous l'avons vu
en comparant les Chimú avec leurs voisins, elle ne peut pas
expliquer pourquoi les personnes vivant dans des
environnements écologiques similaires dans les vallées voisines
n'ont pas produit des états similaires. Beaucoup de travail reste à
faire, mais aucune des lacunes actuelles dans nos connaissances
n'enlève les réalisations fulgurantes de cette civilisation unique.
3. Les niches que l'homme construit pour exploiter les plantes ne sont pas
toutes les mêmes. Les anthropologues ont identifié quatre manières
principales par lesquelles les humains se rapportent aux espèces
végétales : l'approvisionnement en aliments végétaux sauvages, la
production d'aliments végétaux sauvages, la culture et l'agriculture. Dans
chaque forme successive, la quantité d'énergie que les gens appliquent
pour obtenir de la nourriture des plantes augmente, mais l'énergie qu'ils
récupèrent des plantes augmente encore plus.
4. La domestication des animaux s'est apparemment développée alors
que les gens tentaient consciemment de contrôler les animaux qu'ils
chassaient pour intervenir dans leurs schémas de reproduction. Les
preuves archéologiques de la domestication des animaux peuvent
être indiquées de l'une des quatre manières suivantes : lorsqu'une
espèce animale se trouve en dehors de son aire de répartition
naturelle, lorsque les restes d'animaux présentent des changements
morphologiques qui les distinguent des populations sauvages,
lorsque le nombre de certaines espèces sur un site augmente
brusquement par rapport à d'autres espèces, et quand les restes
présentent certaines caractéristiques d'âge et de sexe. Le premier
animal domestiqué, il y a environ 16 000 ans, était le chien. Même si
(Suite à la page suivante)
234 CHAPITRE 7 : POURQUOI LES HUMAINS SE SONT-ILS INSTALLÉS, CONSTRUIRE DES VILLES ET ÉTABLIR DES ÉTATS ?
Résumé du chapitre (a continué)
les archéologues peuvent localiser les régions où les chèvres ont
été domestiquées, les premiers sites pour les moutons
domestiqués ne sont pas clairs. Il semble que les bovins et les
porcs aient été domestiqués sur différents sites de l'Ancien
Monde. La domestication semble avoir été plus lente et moins
importante dans le Nouveau Monde que dans l'Ancien Monde.
5. Les niches que les humains ont construites pour utiliser les
animaux varient. Ils comprennent la chasse aléatoire, la chasse
contrôlée, le suivi du troupeau, l'élevage en liberté, l'élevage
rapproché et l'élevage industriel. Tous les animaux chassés n'ont
pas été domestiqués. Une fois que les humains ont domestiqué
les animaux, leur attention s'est déplacée des animaux morts
vers leur progéniture vivante, ce qui a peut-être suscité des
inquiétudes pour la propriété privée.
6. Les chercheurs ont suggéré différents facteurs
responsables de la domestication des plantes et des
animaux ; aucun seul n'est entièrement satisfaisant.
Aujourd'hui, la plupart des archéologues préfèrent les
théories à plusieurs volets qui se concentrent sur les
ensembles particuliers (et souvent différents) de facteurs
qui étaient responsables de la domestication dans
différents endroits. Un bon exemple d'une approche à
plusieurs volets de la domestication est illustré par des
études récentes sur la tradition culturelle natoufienne en
Asie du Sud-Ouest, qui s'est développée il y a environ 12
500 ans. Les niches humaines post-pléistocène
impliquant le sédentisme et la domestication ont eu des
conséquences à la fois positives et négatives pour les
êtres humains qui en sont venus à en dépendre. Au
moment où les agriculteurs ont pris pleinement
conscience des inconvénients de l'agriculture,
7. Les villages agricoles néolithiques étaient fondamentalement des
sociétés égalitaires, à l'image des sociétés de fourrage qui les avaient
précédés. Cependant, commençant il y a environ 5 000 ans dans le
sud-ouest de l'Asie et peu de temps après en Égypte, dans la vallée
de l'Indus (Inde), en Chine, en Méso-Amérique (vallée du Mexique) et
dans les Andes (Pérou), les humains ont développé indépendamment
une stratification sociale. La stratification sociale s'est produite
lorsque la production alimentaire excédentaire a permis à certains
membres de la société d'arrêter complètement de produire de la
nourriture et de se spécialiser dans diverses professions. Un large
fossé s'est creusé entre la plupart des membres de la société et une
nouvelle classe sociale de dirigeants qui contrôlaient la plupart des
richesses. Il semble que la complexité sociale soit d'abord apparue
chez des butineurs complexes qui vivaient dans des environnements
aux ressources abondantes.
8. Les preuves archéologiques de la complexité sociale
comprennent les vestiges de l'architecture monumentale,
des sépultures élaborées aux côtés de sépultures beaucoup plus
simples, et des concentrations d'artefacts particuliers dans des zones
spécifiques d'un site archéologique qui pourraient indiquer une
spécialisation professionnelle. Les sociétés complexes sont aussi
normalement constituées d'un certain nombre d'établissements
organisés en hiérarchie : l'organisation étatique est suspectée lorsque
les modèles d'établissement régionaux présentent au moins trois
niveaux dans la hiérarchie des établissements. L'art et les inscriptions
écrites peuvent fournir de plus amples informations sur l'organisation
sociale ancienne. Le changement culturel dans toutes les premières
sociétés complexes avait tendance à alterner entre des périodes
d'uniformité culturelle et d'unité politique relatives et des périodes de
différenciation régionale et de manque d'intégration politique.
9. Les anthropologues ont conçu un certain nombre d'hypothèses
différentes pour expliquer pourquoi des sociétés complexes se
sont développées. Fréquemment, l'hypothèse met l'accent sur
une seule cause, ou « principal moteur ». Bien que certaines de
ces causes aient été importantes à certains endroits, elles ne
l'étaient pas toutes partout. Néanmoins, les tentatives pour
tester ces hypothèses sur les principaux moteurs ont conduit à
une appréciation beaucoup plus riche des complexités du
changement social et culturel dans la préhistoire.
dix. La civilisation andine s'est développée dans un cadre
géographique particulier. Les butineuses vivaient sur la côte
et dans la sierra des Andes il y a entre 14 000 et 8 000 ans.
La première architecture monumentale est apparue il y a
4000 ans. L'agriculture irriguée est devenue importante le
long de la côte il y a entre 3 800 et 2 900 ans. De nombreux
États indépendants se sont levés et sont tombés sur la côte
et dans les hautes terres jusqu'à la montée de l'empire Inka
à la fin des années 1400. À l'époque des Incas, les
réalisations des États antérieurs ont été consolidées et
étendues. Lorsque les Espagnols sont arrivés en 1525,
l'empire Inka s'étendait de la Colombie actuelle au centre du
Chili, de la côte Pacifique aux forêts tropicales humides des
pentes andines orientales.
11. Les Andes sont si diverses sur le plan écologique et tant
d'informations restent à découvrir qu'il semble hasardeux de
spéculer sur les causes de l'essor de sociétés complexes là-bas.
L'agriculture villageoise n'est pas responsable de la montée de la
complexité sur la côte péruvienne. La circonscription
environnementale peut expliquer l'essor des premiers États
côtiers au début de la période intermédiaire, mais la guerre et
l'agriculture hydraulique ne sont devenues importantes que
longtemps après l'émergence d'États complexes. La question la
plus déroutante est de savoir pourquoi les personnes vivant dans
des environnements écologiques similaires dans les vallées
voisines n'ont pas produit des états similaires.
 Lectures suggérées 235

Pour évaluation

1. Que sont les niches écologiques et évolutives ? 7. Résumez les principales conséquences de la domestication et

2. Pourquoi la domestication n'est-elle pas la même chose que du sédentisme sur les modes de vie humains.

l'agriculture ? Illustrez votre réponse avec des exemples du 8. Qu'est-ce que la complexité sociale ? Quelles sont les preuves
texte. archéologiques de la complexité sociale ?

3. Expliquer les bases de la domestication animale.
4. Quelles sont les différentes explications proposées par les
archéologues pour la domestication des plantes et des
animaux par l'homme ?
5. Résumez la discussion sur le début de la
domestication en Asie du Sud-Ouest.
6. Qui étaient les Natoufiens ? Que nous apprend la recherche
archéologique sur les processus de domestication des
plantes et des animaux dans la société natoufienne ?
9. Quelles ont été les premières sociétés complexes du monde
et où se trouvaient-elles ?
dix. Quels liens les archéologues voient-ils entre
sédentisme et début de stratification sociale ?
Illustrer avec des exemples.
11. Quelles sont les différentes explications proposées par les
archéologues pour le début des sociétés complexes ?
12. Résumez la discussion dans le texte concernant la
montée de la complexité sociale dans les Andes.

Mots clés
agriculture 205 concentration de niche évolutive 202 professionnel
agroécologie 205 particulier objets funéraires 224 spécialisation 222
artefacts 224 sédentisme 206
la richesse du sang 227 monumental
domestication 202 architecture 223 tessons 224
large spectre
211
recherche de nourriture
niche écologique 202 Néolithique 216 stratification sociale 213
classe 222 social égalitaire construction de niche 203 surplus de production 222
relations 222
sociétés complexes 222

Lectures suggérées
Chang, KC 1986. L'archéologie de la Chine ancienne, 4e éd. Price, T. Douglas et Anne Birgitte Gebauer, éd. 1995.Durer
New Haven, Connecticut : Yale University Press. Un récit chasseurs, premiers agriculteurs. Santa Fe, Nouveau-Mexique : SAR Press. Une

fascinant de la montée de la complexité sociale en Chine par l'un collection d'articles scientifiques explorant, entre autres sujets, l'importance des

des interprètes les plus distingués de la civilisation chinoise aux sociétés de recherche de nourriture complexes dans le processus de

États-Unis. domestication.

Henri, Donald. 1989.De la cueillette à l'agriculture : Le Levant
à la fin de la période glaciaire. Philadelphie : University of
Pennsylvania Press. Une discussion détaillée et bien illustrée de
l'archéologie de l'ancienne Asie du Sud-Ouest à l'époque de
l'émergence de l'agriculture. Particulièrement bon sur la
variation culturelle.
Hoffmann, Michel. 1991.L'Egypte avant les pharaons : La pré-
fondements historiques de la civilisation égyptienne. Austin :
Presse de l'Université du Texas. Un récit très lisible des
développements importants de l'Égypte préhistorique qui ont
rendu possible la civilisation des pharaons.
Price, T. Douglas et Gary M. Feinman, éd. 1995.Trouvé un-
des inégalités sociales. New York : Plénum. Une collection fascinante
d'articles scientifiques explorant les différents facteurs responsables
de l'institutionnalisation des inégalités sociales dans les premières
sociétés complexes.
Smith, Bruce D. 1995. L'émergence de l'agriculture. Nouveau
York : Bibliothèque scientifique américaine. Une discussion accessible
et magnifiquement illustrée sur la domestication à travers le monde.
Soustelle, Jacques. 1961.La vie quotidienne des Aztèques à la veille de
la conquête espagnole. Stanford, Californie : Stanford University Press. Un
texte classique qui tente de reconstituer pour les lecteurs modernes
exactement ce que le titre prétend.
Wenke, Robert et Deborah Olszewski. 2006.Motifs dans
préhistoire : les trois premiers millions d'années de l'humanité, 5e éd.
New York : Oxford University Press.Un excellent compte rendu à jour
et très lisible de la montée de la complexité sociale en Mésopotamie,
en Égypte, dans la vallée de l'Indus, en Chine, en Méso-Amérique et
dans les Andes, ainsi qu'un chapitre sur la complexité culturelle
précoce dans l'Amérique du Nord pré-européenne.