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Manuscrit soumis le 09/07/2012 Ann. Méd. Vét.

, 2012, 156, 109- 123

Résistances bactériennes aux antibiotiques :


les mécanismes et leur « contagiosité »

MUYLAERT A., MAINIL J.G.

Service de Bactériologie, Département des Maladies infectieuses et parasitaires, Faculté de Médecine vétérinaire, Université de Liège, 20 Boulevard de
Colonster, bâtiment 43a, 4000 Liège.
Correspondance : docteur Adeline Muylaert Email : amuylaert@ulg.ac.be.

RÉSUMÉ : Au terme de six décennies d’utilisation des antimicrobiens, les bactéries pathogènes
humaines et animales ont atteint des niveaux alarmants de résistance vis-à-vis de nombreux
antibiotiques. Cette revue de la littérature présentera une description des principaux mécanismes
de résistance aux antibiotiques rapportés à ce jour. Ainsi, les mécanismes de résistance les plus
fréquents tels que l’inactivation enzymatique de l’antibiotique, la modification ou le remplacement
de la cible de celui-ci, l’efflux actif ou la réduction de la perméabilité à l’agent antimicrobien,
seront abordés. Nous exposerons ensuite quelques notions relatives à l’épidémiologie de ce
phénomène, et notamment les voies d’acquisition des gènes responsables des résistances
telles que les plasmides conjugatifs, les éléments transposables et le système des intégrons
qui permettent le déplacement de gènes non seulement entre les différentes parties du génome
bactérien mais également entre différentes bactéries.

1. Introduction l’usage des antimicrobiens en méde- des plasmides ou des transposons,


cine vétérinaire ont, sans nul doute, pour être transmis verticalement et
Depuis l’introduction de la pénicilline contribué à l’amélioration de la pro- horizontalement. La facilité avec
au cours des années quarante du siècle ductivité et de la santé animale au laquelle les populations bactériennes
passé, un grand nombre d’agents anti- cours des dernières décennies (Pid- s’adaptent à un environnement hos-
bactériens ont été développés et com- dock, 1996 ; Johnston, 1998). Cepen- tile, associée à leur grande capacité
mercialisés à des fins thérapeutiques, dant, leur utilisation dans l’alimenta- d’échange de matériel génétique, sou-
réduisant ainsi la morbidité et la morta- tion animale en tant que promoteur de ligne le caractère inévitable du phé-
lité humaine importantes associées aux croissance (usage interdit depuis le 1er nomène biologique des résistances
infections bactériennes observées avant janvier 2006 dans l’Union européenne aux antibiotiques, auquel nous faisons
« l’ère des antibiotiques ». Pourtant, (Union européenne, 2005)) ou pour face aujourd’hui et qui sera probable-
l’optimisme initial, fondé sur l’intime la prévention et le traitement de dif- ment un problème récurrent de santé
conviction que toute infection bacté- férentes maladies infectieuses, a éga- publique pour les décennies à venir
rienne pouvait être traitée avec ces com- lement, progressivement, contribué à (Harbottle et al., 2006).
posés, fut rapidement renversé quand les une sélection de résistances vis-à-vis Actuellement, environ 25.000 per-
premiers rapports d’émergence de résis- de différentes familles d’antibiotiques sonnes décèdent chaque année, dans
tances aux antibiotiques virent le jour parmi les microorganismes patho- l’Union européenne, des suites d’une
peu après leur introduction en clinique gènes et commensaux rencontrés au infection à bactérie résistante (Codex
(Boerlin et White, 2006 ; Harbottle et niveau des différentes flores de l’orga- alimentarius commission, 2010). En
al., 2006). En réalité, ce phénomène nisme des individus traités (Harbottle effet, comparativement aux patholo-
était tout à fait prévisible, et en 1945, et al., 2006). gies à bactéries sensibles aux antibio-
Alexander Fleming, lors de la confé-
Malgré l’abondance de phénotypes de tiques, les infections causées par des
rence qu’il donna au cours de la cérémo- résistance aux antibiotiques observés germes résistants sont associées à une
nie de remise du Prix Nobel, mettait déjà au sein des bactéries, seul un nombre morbidité et une mortalité plus élevées
en garde la communauté scientifique du limité de mécanismes par lesquels (Boerlin et White, 2006). Et les consé-
danger encouru lors d’un usage inappro- ces résistances sont acquises ont été quences économiques n’en demeurent
prié, tel qu’un sous-dosage, des pénicil- décrits. Ainsi, les gènes codant pour pas moins importantes, avec un allon-
lines et des conséquences d’un tel acte in les déterminants des résistances aux gement des séjours hospitaliers et
vitro et in vivo (Fleming, 1945). antibactériens sont localisés, soit sur une augmentation des coûts liés aux
En plus des bénéfices évidents pour le chromosome bactérien, soit sur des soins de santé, dans un contexte où
la santé humaine, l’introduction et éléments génétiques mobiles tels que les alternatives antibiotiques en cas de

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résistance aux molécules de première de détruire d’autres microorganismes. ministration de l’antibiotique, et l’état
voire de deuxième intention, sont Les composés utilisés à des fins thé- du système immunitaire de l’individu
généralement plus toxiques, moins rapeutiques lors de maladies bacté- traité. Et nombreuses sont les situa-
efficaces, plus coûteuses et nécessitent riennes chez l’homme et les animaux tions où le composé ne pourra pénétrer
des traitements plus longs, pour être sont fréquemment appelés, par les pro- ou agir au niveau du site infectieux,
confronté, dans les cas les plus ex- fessionnels de la santé ainsi que par les créant de la sorte un état de résistance
trêmes à des atteintes incurables bien profanes, antibiotiques. Pourtant, ce clinique : citons pour exemples les
souvent de pronostic sombre (Codex terme est bien souvent utilisé de façon abcès fibrotiques ou les conditions de
alimentarius commission, 2010). erronée et subit régulièrement un élar- pH ou de pression partielle en oxygène
Dans cette course effrénée pour la gissement de son sens. En effet, la trop faibles (Guardabassi et Courva-
lutte contre les bactéries résistantes, définition du mot antibiotique réfère lin, 2006).
l’introduction de nouvelles familles strictement aux substances antimicro-
d’antibiotiques ainsi que la modifi- biennes d’origine naturelle, et selon
cette notion, ce terme ne devraient 2.3. Détermination de la sensibi-
cation et l’amélioration des classes lité d’une bactérie à un anti-
existantes, au cours des six décennies donc pas être employé pour qualifier
des substances synthétiques telles que biotique
écoulées, n’a pas suffi. Actuellement,
des mécanismes de résistance sont rap- les sulfamidés et les quinolones, ou
semi-synthétiques telles que l’amoxi- 2.3.1. Concentration minimale inhibitrice
portés pour tous les antibiotiques dis-
ponibles pour un usage clinique dans cilline et l’amikacine (Guardabassi et La concentration minimale inhibitrice
les domaines de la médecine humaine Courvalin, 2006). Par souci de faci- (CMI) d’un antibiotique correspond
et de la médecine vétérinaire. C’est lité dans la suite de cet article, le terme à la plus faible concentration capable
pourquoi une gestion efficace des mo- antibiotique fera néanmoins référence
d’inhiber toute croissance visible des
lécules disponibles, de même que la à ces trois catégories de composés.
bactéries d’un inoculum dont la taille
recherche et le développement de nou- est prédéfinie (104 à 105 bactéries) dans
veaux composés, sont indispensables 2.2. Résistance aux antibiotiques un milieu de croissance spécifique et
afin de préserver la santé humaine et en conditions de culture standardisées
animale, des maladies infectieuses de La résistance aux antimicrobiens est (18 à 24 heures d’incubation, à pres-
plus en plus agressives en termes de un terme tout à fait relatif. En effet, sion atmosphérique et à une tempéra-
traitements requis (Boerlin et White, il existe un grand nombre de défini- ture comprise entre 35 et 37°C pour les
2006 ; Harbottle et al., 2006). tions pour l’expression « résistance bactéries aérobies et aéro-anaérobies
bactérienne aux antibiotiques», qui selon les conditions standardisées de
Cette revue de la littérature présen- sont basées sur différents critères
tera une description des principaux l’EUCAST (European Committee on
(génétiques, biochimiques, micro- Antimicrobial Susceptibility Testing)
mécanismes de résistances aux anti- biologiques et cliniques) et qui ne se
biotiques rapportés aujourd’hui, et (Andrews, 2001). En outre, on défi-
recoupent pas forcément. Les défini- nit deux paramètres supplémentaires,
abordera les supports génétiques ainsi tions les plus fréquemment employées
que l’épidémiologie de ce phéno- lorsqu’au cours d’une épreuve de
se fondent sur les critères micro- sensibilité à un antibiotique, un grand
mène. Alors qu’un second article sui- biologiques (résistance in vitro) et
vra et sera consacrée à la description nombre de bactéries d’une même es-
sur les critères cliniques (résistance pèce sont testées. Ainsi, la CMI50, mé-
et l’épidémiologie des mécanismes
in vivo). Selon la définition micro- diane d’une distribution des valeurs de
chromosomiques et plasmidiques
biologique du terme, une souche est la CMI, correspond à la concentration
de résistance aux fluoroquinolones,
dite résistante lorsqu’elle se cultive en
antibiotiques très souvent de dernier la plus faible qui inhibe la croissance
présence de concentration plus élevée
recours tant en médecine humaine que d’au moins 50 % des souches de l’es-
en antibiotique comparativement à
vétérinaire. pèce bactérienne testée. Alors que la
d’autres souches qui lui sont phylo-
CMI90, 90e percentile d’une distribu-
génétiquement liées. Par conséquent,
2. Définitions tion des valeurs de la CMI, correspond
la résistance est une propriété qui ne
à la concentration la plus faible qui
2.1 Antimicrobiens et antibiotiques peut être étudiée que par comparaison
inhibe la croissance d’au moins 90 %
d’au moins deux souches, dont l’une
des souches de l’espèce bactérienne
Sur base de l’étymologie du mot « an- de référence souvent appelée souche
testée (Schwarz et al., 2010).
timicrobien » (du grec anti : contre, sauvage et développée en laboratoire
mikros : petit et bios : vie), on définit à partir d’individus prélevés dans la 2.3.2. Catégorisation clinique d’une
un composé de ce type comme toute nature, d’une même espèce ou d’un souche ou « comment interpréter les ré-
substance capable d’agir contre la vie même genre, cultivées dans les mêmes sultats des tests de sensibilité ? »
des microorganismes. L’adjectif anti- conditions. Selon la définition cli-
biotique (du grec anti : contre, bioti- nique, une souche est qualifiée de ré- La catégorisation clinique d’une
kos : concernant la vie) utilisé pour la sistante lorsqu’elle survit à la thérapie souche bactérienne au sein du système
première fois en 1889, en référence antibiotique mise en place. En outre, SIR pour « Sensible, Intermédiaire,
à une substance synthétisée par un il est important de signaler, qu’en Résistante » vis-à-vis d’un antibio-
organisme pour en détruire un autre, conditions in vivo, la capacité de résis- tique repose sur, d’une part, la déter-
se précisera plus tard, comme une tance ou de sensibilité de la souche à mination in vitro de sa CMI, et d’autre
substance chimique produite par un la thérapie antimicrobienne mise en part, la confrontation de la valeur de
microorganisme et disposant en solu- place sera dépendante de différents la CMI mesurée à deux valeurs de
tion diluée de la capacité d’inhiber paramètres, tels que la localisation de concentrations critiques proposées
sélectivement la croissance voir même la bactérie, le dosage et le mode d’ad- par des comités d’experts nationaux et

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internationaux. On établit une concen- l’animal traité sur la pharmacociné- à un environnement hostile tel qu’en
tration critique inférieure « c » et une tique de l’antibiotique, la métabolisa- présence d’antibiotiques (Boerlin et
concentration critique supérieure tion de la molécule et sa disponibilité Reid-Smith, 2008).
« C » à partir de différentes données sous forme active (chélation, fixation
dont: les critères pharmacocinétiques sur des débris organiques, conditions 2.3.4.2. Fenêtre de sélection des mutants
et pharmacodynamiques spécifiques de pH défavorables), l’état métabo-
Le phénomène de résistance aux
de chaque antibiotique utilisé aux lique de la bactérie au sein du foyer
antibiotiques est un problème com-
doses recommandées et aux doses infectieux (les bactéries au repos et les
plexe qui nécessite une attention tout
maximales autorisées, la réparti- formes L sont insensibles aux antibio-
à fait particulière. Dans ce contexte,
tion des valeurs des CMI de souches tiques actifs sur la synthèse de la paroi
de nombreuses études ont focalisé
sauvages de la même espèce et une de peptidoglycane), les résistances
leur attention sur des schémas poso-
confrontation des résultats obtenus induites au cours du traitement…
logiques particuliers pour réduire la
lors d’essais cliniques in vivo et in vi- En conclusion, il est indispensable sélection des bactéries résistantes. De
tro. Une souche sera déclarée sensible qu’un dialogue s’installe entre le la- ces travaux, une hypothèse est née,
à l’antibiotique lorsque sa CMI est in- boratoire et le clinicien. En effet, le « la fenêtre de sélection de mutants ».
férieure à c, résistante si la CMI est su- laboratoire doit rendre rapidement un Selon cette théorie, une sous-popula-
périeure ou égale à C et intermédiaire résultat explicite et sélectif, c’est-à-
si elle est comprise entre ces deux tion de bactéries mutantes résistantes
dire adapté au cas clinique et à l’es- à un antibiotique défini et présente
valeurs (mais supérieure ou égale à c). pèce animale envisagée. Alors que de
Ainsi, le groupe des souches dites sen- avant l’initiation du traitement, serait
son côté, le praticien devra analyser enrichie et amplifiée au cours de la
sibles se compose de bactéries pour judicieusement le résultat rendu pour
lesquelles la probabilité d’un succès thérapie, lorsque les concentrations en
faire un choix raisonné et raisonnable. antimicrobien chutent dans un inter-
thérapeutique est élevée lors d’un trai- Ainsi, une indication de résistance doit
tement systémique à une posologie ha- valle particulier, nommé fenêtre de
aboutir à une non-utilisation du com- sélection des mutants (FSM). La li-
bituelle recommandée dans le résumé posé alors qu’une mention de sensibi-
des caractéristiques du produit (RCP), mite supérieure de la FSM, la concen-
lité doit conduire immanquablement tration de prévention des mutants
alors que le groupe des souches dites à la réflexion : « l’antibiotique actif
résistantes se compose de bactéries (CPM), se définit comme la CMI d’un
in vitro sera-t-il actif in vivo compte inoculum de 1010 bactéries (la grande
pour lesquelles la probabilité de suc- tenu du contexte clinique ? ».
cès thérapeutique est nulle quel que taille de l’inoculum assure la présence
soient le mode d’administration et le 2.3.3. Concentration minimale bactéricide de sous-populations résistantes) de
schéma posologique utilisé. Enfin, la sous-population la moins sensible
le groupe des souches dites intermé- La concentration minimale bactéricide à l’antibiotique. La limite inférieure
diaires, situé entre les deux catégories (CMB) d’un antibiotique correspond à de cette fenêtre est, quant à elle, la
précédemment décrites, se compose la plus faible concentration capable de concentration la plus faible exerçant
des bactéries pour lesquelles le succès tuer 99,99 % des bactéries d’un inocu- une pression de sélection, à savoir
thérapeutique est imprévisible. Ces lum prédéfini dans un milieu de crois- la CMI d’une population sauvage de
souches forment un groupe hétéro- sance spécifique et en conditions de bactéries de la même espèce. La fi-
gène pour lequel les résultats obtenus culture standardisées (18 à 20 heures gure 1 présente une illustration de la
in vitro ne seront pas prédictifs des ré- d’incubation, à pression atmosphé- fenêtre de sélection des mutants avec
sultats in vivo. On retrouve dans cette rique et à une température comprise ces limites inférieures et supérieures.
catégorie des souches présentant une entre 35 et 37°C pour les bactéries aé- En outre, deux principes fondamen-
sensibilité plus faible par adaptation robies et aéro-anaérobies) (Andrews, taux découlent de cette hypothèse. Le
phénotypique ou une résistance à bas 2001). premier, les schémas posologiques
niveau naturelle ou acquise. L’éta- conventionnels, fondés sur les ap-
2.3.4. Concentration de prévention de proches traditionnelles pharmacoci-
blissement d’un traitement antibio- mutant résistant
tique face à une bactérie de ce groupe nétique/pharmacodynamie et dont le
nécessitera l’emploi d’une posologie but est d’empêcher l’émergence de
2.3.4.1. Mutant bactéries résistantes en tuant la popu-
plus élevée et/ou d’une molécule dont
la diffusion locale au niveau du site Les mutations, conséquence d’altéra- lation sensible, permettent un enri-
infectieux est importante (Cavallo et tions au niveau de l’ADN existant ou chissement en pathogènes résistants
Mérens, 2008). En outre, on observe d’erreurs survenant au cours du pro- à l’antibiotique utilisé par le main-
parfois une absence de parallélisme cessus de réplication, se produisent tien de concentration généralement à
entre les résultats de laboratoire et naturellement au sein de tout orga- l’intérieur de la FSM. Le second, le
l’efficacité clinique de l’antibiotique nisme vivant. Face à ces mutations, maintien des concentrations au-delà
choisi. Cette discordance entre la aux effets souvent délétères sur la sur- de la CPM tout au long du traitement,
situation observée in vitro et in vivo vie d’une cellule individuelle, les bac- permet une réduction importante de
s’explique par une multitude de fac- téries ont été contraintes de dévelop- l’acquisition de bactéries mutantes ré-
teurs dont les plus importants sont: per des mécanismes de correction et sistantes en empêchant leur amplifica-
le choix du schéma posologique et de réparation de l’ADN. Cependant, tion. Il est indispensable d’intégrer ces
d’administration, la pénétration intra- ces systèmes ne sont pas non plus à deux concepts lors de la mise au point
cellulaire pour les pathologies à bac- l’abri des mutations, créant ainsi des de stratégies de dosage visant à se pré-
téries intracellulaires ainsi que la dif- bactéries dites « super mutantes », munir de l’émergence de sous-popula-
fusion au niveau du site infecté, l’état dotées de capacité d’adaptation plus tion bactériennes résistantes. Sur ces
physiologique ou pathologique de élevées lorsqu’elles sont confrontées fondements, Zhao et Drlica (2008),

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Figure 1 : Représentation de la fenêtre de sélection des mutants avec ces limites ont suggéré le remplacement des para-
inférieure et supérieure, à savoir, la concentration minimale inhibitrice (CMI) mètres AUC24/CMI (le rapport entre
et la concentration de prévention des mutants (CPM), adapté de Drlica et Zhao l’aire sous la courbe d’évolution de la
(2007) et Martinez et Silley (2010). concentration plasmatique en fonction
du temps pour une durée de 24 heures
(AUC24) et la CMI) et T > CMI (durée
pendant laquelle la concentration plas-
matique en antibiotique est supérieure
à la CMI) habituellement utilisés dans
la conception des plans de dosage
des antibiotiques par les paramètres
AUC24/CPM et T > CPM. Si la com-
préhension de cette théorie est simple,
son application en thérapeutique l’est
moins. En effet, les doses requises
prévenant l’émergence de germes
mutants résistants étant supérieures
aux doses habituellement utilisées lors
d’un traitement, les patients seront, à
l’avenir, confronté à un risque accru
d’effets secondaires toxiques pour
assurer un ralentissement de l’acqui-
sition de résistances aux antibiotiques
au sein de la communauté (Drlica et
Zhao, 2007 ; Zhao et Drlica, 2008 ;
Martinez et Silley, 2010).

3. Mécanismes de résistance
Cmax : pic de concentration plasmatique.
3.1. 
Résistances intrinsèques et
acquises
Une résistance intrinsèque se définit
comme une caractéristique fonction-
Figure 2 : différents mécanismes de résistance aux antibiotiques dans une bacté- nelle ou structurelle conférant une cer-
rie Gram négative, adapté de Guardabassi et Courvalin (2006) taine tolérance, voir une insensibilité
totale, à tous les membres d’un groupe
de bactéries (une espèce, un genre ou
parfois un groupe plus grand), vis-à-
vis d’une molécule particulière ou vis-
à-vis d’une classe d’antimicrobiens.
L’absence ou la réduction de sensi-
bilité à un antibiotique peut être due
à : (i) un manque d’affinité du com-
posé pour la cible bactérienne (par
exemple, la faible affinité de l’acide
nalidixique pour la gyrase des entéro-
coques), (ii) une inaccessibilité de la
molécule à la cellule bactérienne (im-
perméabilité de la membrane externe
des bactéries Gram négatives aux gly-
copeptides comme la vancomycine),
(iii) une expulsion de l’antibiotique
par des pompes à efflux chromoso-
miques (résistance aux tétracyclines,
au chloramphénicol et aux quinolones
chez Pseudomonas aeruginosa, ou en-
core (iv) une inactivation enzymatique
innée de l’antibiotique (la production
d’une bêta-lactamase AmpC chez cer-
tains membres de la famille Entero-
1 : inactivation enzymatique de l’antibiotique, 2 : modification de la cible de
bacteriaceae).
l’antibiotique, 3 : efflux actif de l’antibiotique, 4 : perméabilité réduite, 5 : protec-
tion de la cible de l’antibiotique, 6 : piégeage de l’antibiotique. Contrairement à la résistance intrin-
sèque, la résistance acquise se définit
ARNm : acide ribonucléique messager
comme une caractéristique propre à

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quelques souches bactériennes d’un les réactions biochimiques catalysées taines d’entre elles confèrent une résis-
genre ou d’une espèce particulière, par ces enzymes bactériennes, on peut tance aux antibiotiques. La résistance
provoquant l’émergence et la diffusion citer des hydrolyses, des acétylations, provient de la réduction de concen-
de résistances au sein de populations des phosphorylations, des nucléotidy- tration en antimicrobien dans le cyto-
de germes normalement sensibles. On lations, des estérifications, des réduc- plasme de la bactérie, ce qui prévient
décrit deux phénomènes majeures à la tions et des réactions d’addition d’un et limite l’accès de l’antibiotique à sa
base de l’acquisition de résistances par glutathion. Ces enzymes sont généra- cible. On classe ces pompes à efflux
modifications du génome bactérien, à lement associées à des éléments géné- sur base notamment de leur spécificité
savoir, les mutations responsables des tiques mobiles (Guardabassi et Cour- de substrats et de la source d’énergie
résistances endogènes, et l’acquisi- valin, 2006 ; Alekshun et Levy, 2007 ; employée. Certains de ces transpor-
tion horizontale de matériel génétique Nikaido, 2009). teurs sont très spécifiques et on les
étranger responsable des résistances appelle pompes SDR (pour specific-
exogènes. En outre, certaines résis- 3.2.2. Modification ou remplacement drug-resistance), alors que d’autres
tances résultent de l’association d’une de la cible de l’antibiotique agissent sur une multitude de molé-
mutation et d’un transfert horizontal cules et on les nomme pompes MDR
La cible de l’antibiotique peut être
de gène, comme par exemple les évé- (pour multiple-drug-resistance).
structurellement modifiée ou rem-
nements conduisant à l’élargissement placée, de telle sorte que le composé Les pompes SDR, généralement res-
du spectre des bêta-lactamases ou qui antibactérien ne puisse plus se lier ponsables de hauts niveaux de résis-
leur confèrent une résistance aux inhi- et exercer son activité au niveau de tance et dont les gènes sont portés
biteurs de bêta-lactamases (Guarda- la bactérie. La modification de la par des éléments génétiques mobiles,
bassi et Courvalin, 2006). cible, mécanisme de résistance décrit représentent un important mécanisme
pour presque tous les antibiotiques, de résistance aux tétracyclines essen-
3.2. Types de mécanismes de ré- est particulièrement importante pour tiellement parmi les bactéries Gram
sistances les résistances aux pénicillines, aux négatives, aux composés du groupe
glycopeptides et aux molécules du MLS et aux phénicolés.
Les bactéries ont développé diffé- groupe MLS chez les bactéries Gram Les pompes MDR (dont notamment
rents mécanismes afin de neutraliser positives, et pour les résistances aux MexAB-OprM chez P. aeruginosa,
l’action des agents antibactériens, quinolones chez les bactéries Gram AcrAB-TolC chez Escherichia coli,
les plus répandus étant l’inactiva- positives et Gram négatives. Ce type QacA chez S. aureus, VceAB chez
tion enzymatique de l’antibiotique, la de résistance peut être la conséquence Vibrio cholerae, MdrL chez Liste-
modification ou le remplacement de la de l’acquisition de matériel génétique ria monocytogenes et MreA chez
cible de l’antimicrobien, l’efflux actif mobile codant pour une enzyme modi- Streptococcus agalactiae) (Poole,
ou encore la pénétration réduite de la fiant la cible de l’antibiotique, ou peut 2001 ; Li et Nikaido, 2004 ; Kumar
molécule. D’autres mécanismes tels résulter d’une mutation au niveau de la et Schweizer, 2005), généralement
que la protection ou la sur-production séquence nucléotidique de la cible. Le responsables de bas niveaux de résis-
de la cible de l’antibiotique sont égale- remplacement de la cible de l’antibio- tance et dont les gènes sont fréquem-
ment décrits. Ils sont, cependant, plus tique est, quant à lui, un mécanisme ment chromosomiques, sont classées
rares et surtout associés à certaines décrit pour les sulfamidés, les diami- en deux groupes sur base de la source
classes de composés (Guardabassi et nopyrimidines (triméthoprime) et les d’énergie utilisée : les transporteurs
Courvalin, 2006). La figure 2 pré- bêta-lactames dont les Staphylococ- ABC (pour ATP-binding cassette)
sente une illustration de ces différents cus aureus résistants à la méthicilline utilisant l’hydrolyse de l’ATP et plu-
mécanismes de résistance au sein des (SARM) ainsi qu’à toutes les bêta- tôt spécifiques de certains composés
bactéries Gram négatives. lactames d’usage vétérinaire sont un comme le groupe MLS, et les trans-
exemple remarquable par la synthèse porteurs secondaires exploitant le gra-
3.2.1. Inactivation enzymatique de d’une nouvelle PBP (Penicillin Bin- dient électrochimique transmembra-
l’antibiotique ding Protein) possédant une affinité naire de protons et d’ions sodium pour
L’inactivation enzymatique de l’anti- moindre pour la méthicilline (Guarda- expulser la molécule à l’extérieur de la
biotique représente le principal méca- bassi et Courvalin, 2006 ; Alekshun et cellule et responsables de résistances
nisme de résistance des bêta-lactames, Levy, 2007 ; Nikaido, 2009). multiples aux antibiotiques (Guarda-
des aminoglycosides et des phéni- bassi et Courvalin, 2006 ; Alekshun et
3.2.3. Pompes à efflux Levy, 2007 ; Nikaido, 2009).
colés. On décrit également ce type
de résistance pour le groupe MLS L’efflux actif, médié par des protéines 3.2.4. Perméabilité réduite
(macrolides, lincosamides, streptogra- transmembranaires connues sous le
mines), pour les tétracyclines, pour la terme de pompes à efflux ou transpor- Contrairement aux bactéries Gram po-
fosfomycine et plus récemment pour teurs actifs, est un mécanisme néces- sitives, dont la structure enveloppante
les fluoroquinolones, bien que cette sitant de l’énergie et utilisé par les est assez simple, composée d’une pa-
inactivation ne représente pas le méca- bactéries, par les cellules eucaryotes roi externe épaisse de peptidoglycanes
nisme de résistance qui prévaut pour dont notamment les protozoaires, pour que les antibiotiques traversent par
ces molécules. L’enzyme en modi- expulser à l’extérieur des métabolites simple diffusion, les bactéries Gram
fiant le noyau actif de l’antibiotique et des composés toxiques étrangers négatives jouissent quant à elles d’une
par clivage ou par addition d’un grou- tels que des antibiotiques et d’autres enveloppe plus complexe et plus diffi-
pement chimique, empêche la fixa- médicaments. Ces pompes à efflux cilement franchissable. Les figures 3a
tion de l’antimicrobien sur sa cible et ont généralement une spécificité de et 3b présentent la structure des bacté-
provoque une perte d’activité. Parmi substrats assez large, et seulement cer- ries Gram négatives et Gram positives.

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Figure 3a : Structure de la paroi des bactéries Gram négatives. intrinsèque à bas niveau) observé vis-à-
vis de cette famille de composés parmi
les bactéries anaérobies facultatives
telles que les entérocoques et les
streptocoques. En effet, cette famille
d’antibiotiques pénètre à l’intérieur des
cellules bactériennes via un mécanisme
de transport dépendant d’un métabo-
lisme aérobie (Guardabassi et Cour-
valin, 2006 ; Alekshun et Levy, 2007 ;
Nikaido, 2009).
3.2.5. Protection de la cible de l’anti-
biotique
La protection de la cible de l’antibio-
tique est un mode de résistance bien
connu pour la famille des tétracy-
clines et plus récemment décrit pour
les quinolones et les fluoroquinolones.
Ainsi, on ne dénombre pas moins de
huit protéines de protection riboso-
miale qui confèrent une résistance aux
tétracyclines en les déplaçant de leur
Figure 3b : Structure de la paroi des bactéries Gram positives. site de fixation par la création d’un
encombrement stérique au niveau du
ribosome. Depuis quelques années,
des souches présentant des résistances
sub-cliniques dites à bas niveau aux
fluoroquinolones ont été observées.
Ces résistances sont notamment dues
à la présence de gènes plasmidiques
qnr (pour quinolone resistance) dont 5
groupes existent. Ce mécanisme a été
rapporté parmi différentes bactéries
Gram négatives à travers le monde, et
des analogues de ces gènes ont éga-
lement été décrits chez des bactéries
Gram positives (Rodriguez-Martinez
et al., 2008). Les protéines qnr en se
fixant sur les topoïsomérases, cibles
des fluoroquinolones, réduisent l’affi-
nité de la famille d’antibiotiques pour
leurs cibles (Robiczek et al., 2006a ;
Cavaco et al., 2009 ; Wang et al.,
2009).
3.2.6. Piégeage de l’antibiotique
Ainsi, au sein des bactéries Gram né- de résistance vis-à-vis de nombreux
gatives, les antibiotiques hydrophiles antibiotiques. Citons comme exemple, Les bactéries sont capables de piéger
pénètrent dans la bactérie via des pro- la réduction de l’expression de la porine un antibiotique en augmentant la pro-
téines transmembranaires nommées OmpF chez E. coli qui entraîne une duction de sa cible ou en produisant
porines, alors que les molécules hy- réduction de sensibilité aux quinolones, une autre molécule possédant une affi-
drophobes diffusent simplement à tra- aux bêta-lactames, aux tétracyclines et nité pour ce dernier. Il en résulte une
vers la couche phospholipidique. La au chloramphénicol. La diminution de diminution de l’antibiotique à l’état
membrane externe de certaines bacté- la perméabilité est donc un mécanisme libre au niveau de la cible. Ainsi des
ries telles que P. aeruginosa est moins de résistance cliniquement très impor- mutations chromosomiques respon-
perméable que celle d’autres espèces, tant chez les bactéries Gram négatives sables d’une surproduction des cibles
ce qui lui confère un niveau moins éle- et plus précisément chez P. aeruginosa des sulfamidés et dutriméthoprime ont
vé de sensibilité aux antimicrobiens. et les Enterobacteriaceae, étant donné été décrites chez de nombreuses es-
En outre, des mutations au niveau le large spectre d’antibiotiques qu’elle pèces bactériennes. Ce mécanisme est
des gènes qui codent pour les porines cible. En outre, on décrit également ce également impliqué dans des bas ni-
et qui conduisent à leur perte, ou à la type de phénomène pour expliquer la veaux de résistance aux glycopeptides
réduction de leur taille ou encore à une résistance aux aminoglycosides parmi chez certaines souches de S. aureus, et
diminution de leur expression, se tra- les germes anaérobies ainsi que le faible à la tobramycine chez E. coli (Guarda-
duiront par l’acquisition de bas niveaux niveau de sensibilité clinique (résistance bassi et Courvalin, 2006).

114
4. Génétique des antimicrobiennes. Selon eux, certaines connus aujourd’hui. Cependant, pour
résistances aux préparations antibiotiques à usage des substances synthétiques telles que
antibiotiques humain et animal représentaient donc les sulfamidés et le triméthoprime, il ap-
4.1. Origine et évolution des une source de gènes de résistance tout paraît probable que l’évolution de gènes
en constituant un environnement sélec- préexistants non liés à une quelconque
gènes de résistance aux anti-
tif en permettant le développement des résistance, à travers des mutations adap-
biotiques tatives et des recombinaisons, soit res-
bactéries réceptrices de ces fragments
Les bactéries ont acquis des résistances génétiques. Par conséquent, parmi les ponsable de l’acquisition de résistance
aux antibiotiques par mutations au bactéries environnementales, l’évo- vis-à-vis de ces composés. Enfin, divers
sein de leur ADN modifiant la cible de lution sélective par mutations et par gènes intrinsèques, tels que les gènes
l’antimicrobien, par hyperproduction de recombinaisons et la dissémination des codant pour des pompes à efflux, sont
gènes initialement présents ou encore, gènes de résistance se sont opérées pen- également une source primaire de nom-
par acquisition de gènes de résistance dant des centaines de milliers d’années breux déterminants de résistance (Aa-
hétérologues. Les gènes de résistance pour donner un avantage aux bactéries restrup, 2006 ; Boerlin et White, 2006).
aux antimicrobiens et les mécanismes nouvelles face à leurs ancêtres, alors
de transfert qui y sont associés existent que l’usage intensif des préparations 4.2. Mouvements
probablement depuis bien avant l’intro- antibiotiques contenant parfois les gènes
duction des antibiotiques en médecine de résistance associés, a contribué, en Les mouvements des gènes de résistance
humaine et vétérinaire. En effet, des seulement une cinquantaine d’années, aux antibiotiques peuvent se produire à
bactéries résistantes âgées de plus de à l’accélération de l’émergence et de la deux niveaux distincts, à savoir intra- et
deux milles ans ont été isolées d’un dispersion des phénotypes de résistance intercellulaire, impliquant chacun des
glacier canadien des régions arctiques
hautes. De même, des microorganismes
résistants ont également été identifiés Figure 4 : Voies d’acquisition de résistance aux antibiotiques, d’après Alekshun
au sein de collections historiques de et Levy (2007).
souches réalisées avant l’ère moderne
des antibiotiques. Actuellement, il
semble probable que l’origine de nom-
breux mécanismes de résistance aux
antibiotiques proviennent de germes
environnementaux producteurs naturels
de substances antimicrobiennes leur
assurant une protection contre les subs-
tances toxiques qu’ils produisent. En
outre, selon cette hypothèse, les bacté-
ries proches de ces microorganismes,
par l’acquisition de leurs gènes de
résistance, ont obtenu une capacité de
survie et de développement dans ce mi-
lieu hostile. Cette théorie est d’ailleurs
renforcée par l’existence de nombreuses
similarités génétiques et biochimiques
entre les déterminants de résistance
provenant des bactéries produisant des
antibiotiques et les gènes de résistance
les plus importants et les plus large-
ment répandus, identifiés actuellement
au sein des bactéries Gram négatives et
Gram positives. Prenons pour exemple,
l’homologie remarquable existant entre
les enzymes de modification des ami-
noglycosides des microorganismes
producteurs de ces antibiotiques et les
enzymes identifiées parmi les bactéries
résistantes à ces composés. Une autre Une bactérie peut devenir résistante à un antibiotique par mutation survenant au
théorie complète l’hypothèse précé- niveau du gène codant pour la cible de l’antibiotique au sein du chromosome.
dente grâce aux travaux de Webb et Une bactérie peut également acquérir du matériel génétique étranger par incor-
Davies qui ont montré en 1993 qu’un poration de segments d’ADN libre dans leur chromosome (transformation). Des
grand nombre de médicaments antibio- gènes de résistance peuvent aussi être transférés lors d’une infection par un bac-
tiques étaient initialement contaminés tériophage (transduction) et lors de phénomène de conjugaison de transposons
par de l’ADN chromosomique de bac- conjugatifs et de plasmides. Le terme général élément transposable désigne une
téries productrices d’antibiotiques, dont séquence d’insertion, ou un transposon qu’il soit composite, complexe ou conju-
notamment des séquences codantes gatif, ou un bactériophage transposant, ou encore un intégron. ABR : gène de
de gènes de résistance à des molécules résistance à un antibiotique.

115
éléments de mobilité différents. Au génétiques impliqués dans la dispersion lesquelles les intégrons de classe 1
niveau intracellulaire, les gènes de résis- des gènes de résistance. semblent être les plus largement ré-
tance aux antibiotiques se déplacent à pandus. L’extrémité 5’ conservée des
l’intérieur du génome bactérien composé 4.2.1. Les intégrons et l’intégration éléments de cette classe comporte un
du chromosome et des éléments réplica- gène codant pour une intégrase, suivi
Les intégrons sont des systèmes géné-
tifs tels que les plasmides et les phages, d’un site d’attachement primaire, dit
tiques de capture, d’incorporation et
via des recombinaisons homologues attI. L’intégrase catalyse une réaction
(homologie de séquences) ou non (site de transformation en gènes fonction- de recombinaison entre le site attI et
spécifique) des transposons et des inté- nels, de fenêtres de lecture ouverte. une cible secondaire attC d’une cas-
grons. Quant aux mouvements intercel- Ils ne sont pas mobiles à eux-seuls, sette de gène. Les cassettes de gènes
lulaires (transmission horizontale), trois mais ils sont souvent localisés sur des sont des éléments génétiques circu-
mécanismes en sont potentiellement res- éléments génétiques conjugatifs tels laires et libres d’environ 500 à 1000
ponsables, à savoir, les transformations que les plasmides et les transposons. paires de bases qui ne possèdent pas
(acquisition de segments d’ADN libre), Ils sont dotés d’une structure spéci- de région promotrice et qui ne peuvent
les transductions (transfert via des bacté- fique, composée de deux segments donc pas être exprimées seules. Un
riophages) et les conjugaisons (transfert conservés encadrant une région cen- élément de cette cassette, de 59 paires
par des plasmides ou d’autres éléments trale dans laquelle peuvent s’insérer de bases, dit site attC, et localisé en
conjugatifs) (Boerlin et Reid-Smith, les « cassettes » de gène de résistance aval d’une fenêtre de lecture ouverte
2008). La figure 4 illustre différentes aux antimicrobiens (figure 5). Actuel- sert de site de recombinaison. La re-
voies d’acquisition de résistance aux lement, quatre classes d’intégrons ont combinaison conduit à l’insertion de
antibiotiques et le tableau I résume les été identifiées sur base de la structure la fenêtre de lecture ouverte en aval
caractéristiques des différents éléments du gène codant pour l’intégrase, parmi d’un promoteur résidant localisé dans

Tableau I : Caractéristiques de différents éléments génétiques impliqués dans la dispersion des gènes de résistance
Elément génétique Caractéristiques Rôles
Plasmide conjugatif - Circulaire - Transfert de gènes de résistance
- Elément de réplication autonome -Mobilisation d’autres éléments portant
- Présence des gènes nécessaires au trans- des gènes de résistance
fert par conjugaison
Plasmide mobilisable - Circulaire Transfert de gènes de résistance
- Elément de réplication autonome
- Présence des gènes permettant d’utiliser
l’appareil de conjugaison d’un plasmide
conjugatif
Transposon et ISCR Capacité de déplacement depuis un seg- Transport de gènes de résistance du chro-
ment d’ADN vers un autre à l’intérieur mosome vers un plasmide et vice versa
d’une bactérie
Transposon conjugatif - Elément intégré pouvant s’exciser pour - Transfert de gènes de résistance
former un intermédiaire de transfert non -Mobilisation d’autres éléments portant
réplicatif des gènes de résistance
- Présence des gènes nécessaires au trans-
fert par conjugaison
Cassette de gène - Circulaire Porte des gènes de résistance
- Segment d’ADN non réplicatif
- Présence seulement d’une fenêtre de lec-
ture ouverte
- Intégration dans les intégrons
Intégron - Segment d’ADN intégré Groupe de gènes de résistance dont l’ex-
- Présence d’une intégrase, d’un promoteur, pression est sous le contrôle du promoteur
et d’un site d’intégration pour la cassette de l’intégron
de gène
Ilot génomique et EIC - Segment d’ADN chromosomique - Transfert de gènes de résistance
- Présence des gènes nécessaires aux dépla- -Mobilisation d’autres éléments portant
cements et au transfert par conjugaison des gènes de résistance
Bactériophage - Virus de bactérie - Transfert de gènes de résistance
- Circulaire ou non -Mobilisation d’autres éléments portant
- Elément de réplication autonome des gènes de résistance
Fragment d’ADN Transféré par transformation d’une Porte des gènes de résistance
isolé dans le milieu bactérie compétente

116
Figure 5 : Structure d’un intégron de classe 1 et représentation du mécanisme réplication sont incompatibles, et par
de capture et d’expression d’une cassette de gène, d’après Harbottle et collabo- conséquent, incapables de résider en-
rateurs (2006). semble pendant une période prolongée
dans la même bactérie (Caratolli et al.,
2005 ; 2006 ; Harbottle et al., 2006).
Les plasmides ne sont pas essentiels
à la survie de la bactérie. Cependant
ils sont porteurs de gènes conférant un
avantage sélectif à la cellule qui les
possède. En effet, les fonctions co-
dées par les plasmides se répartissent
en fonctions de base qui leur sont
essentielles, telles que la réplication,
la partition, la conjugaison et autres
modes de transfert, et en fonctions
non essentielles, conférant un phé-
notype particulier à la bactérie hôte,
La structure se compose du gène intI codant pour l’intégrase à l’extrémité 3’ telles que des résistances à des anti-
de laquelle se trouve un promoteur suivi d’un site d’insertion attI. L’intégrase biotiques, à des métaux lourds ou aux
catalyse une recombinaison entre le site attC d’une cassette de gène circulaire ultra-violets, des facteurs de virulence
et le site d’attachement de l’intégron. Il en résulte une transcription du gène de (adhésines, toxines), des propriétés de
résistance présent au niveau de la cassette par le promoteur de l’intégron. fermentation, des propriétés de dégra-
qac∆E1 : gène de résistance aux amoniums quaternaires, sul1 : gène de résistance dation, des propriétés métaboliques,
aux sulfamidés. des bactériocines, ou encore la capa-
cité de fixer l’azote atmosphérique.
Des plasmides de résistance sont
identifiés à la fois parmi des bactéries
l’intégron. L’extrémité 3’ conservée des somique capables d’une réplication pathogènes et commensales, Gram
intégrons de classe 1 se compose quant autonome régulée par eux-mêmes, positives et Gram négatives. Ils sont
à elle, des gènes sul1 et qacEΔ1 codant et d’échanges (réplication du plas- porteurs de gènes de résistance vis-
respectivement pour une résistance aux mide suivie de son transfert) au sein à-vis de la majorité des antibiotiques
sulfamidés et aux ammoniums quater- de populations bactériennes grâce au disponibles pour un usage clinique
naires. Les fenêtres de lecture ouverte phénomène de conjugaison via un actuellement, y compris les fluoroqui-
codant pour des résistances aux antibio- appendice de transfert, le pilus, codé nolones (Li, 2005 ; Gay et al., 2006 ;
tiques sont les plus fréquentes, et plus de par le plasmide et localisé en surface Jacoby et al., 2006), et il n’est pas rare
100 gènes de résistances différents cou- de la bactérie (Frost et al., 2005 ; qu’un seul plasmide soit simultané-
vrant la plupart des classes d’antimicro- Harbottle et al., 2006). Certains plas- ment porteur de gènes de résistances
biens ont été identifiés sous la forme de mides dits mobilisables ne sont pas vis-à-vis de plusieurs antibiotiques de
cassettes de gène (Recchia et Hall, 1995). autotransférables car ils ne possèdent familles différentes, et qu’il soit porté
Un intégron peut incorporer successive- pas les gènes requis pour la synthèse par des genres bactériens différents
ment plusieurs cassettes. Les intégrons du pilus, et ils utilisent donc, au cours (Sherley et al., 2004 ; Harbottle et al.,
sont aussi bien répartis parmi les bacté- du transfert, le pilus d’un plasmide 2006). Par conséquent, les plasmides
ries Gram négatives que Gram positives, autotransférable présent dans la bac- offrent, aux cellules hôtes, la capa-
et semblent d’ailleurs impliqués parmi térie. De nombreux plasmides repré- cité d’occuper une grande variété de
ces dernières dans la dissémination de sentent une mosaïque de séquences niches écologiques, et contribuent dès
gènes de résistance autrefois supposés d’ADN provenant de l’association lors à l’évolution, non seulement des
restreints aux germes Gram négatifs. Des de structures génétiques elles-mêmes espèces bactériennes, mais également
études, réalisées sur des populations de issues d’autres plasmides, de transpo- des plasmides au sein de ces espèces.
bactéries collectées au niveau d’hôpitaux sons et de phages à ADN. On classe
et de différents site agricoles, ont révélé 4.2.3. Les transposons, les séquences
les plasmides en groupes d’incompa-
la présence de nombreux intégrons com- d’insertion et la transposition
tibilité (Inc) sur base de leur mode de
plets, disposant de cassettes de gènes de réplication et de maintien à l’intérieur La transposition consiste en l’inser-
résistance, ce qui souligne l’importance de la bactérie (Couturier et al., 1988) tion, en un site du génome de la bac-
du processus de capture de gènes médié grâce au typage du réplicon par PCR térie (le chromosome ou un plasmide),
par ces éléments particuliers au cours de pour les méthodes actuelles (Caratolli d’une unité discrète d’ADN (un seg-
l’évolution des résistances aux antibio- et al., 2005). L’incompatibilité est ment), appelé transposon ou séquence
tiques (Aarestrup, 2006 ; Harbottle et une manifestation de la parenté exis- d’insertion. Le mouvement effectué
al., 2006 ; Boerlin et Reid-Smith, 2008 ; tant entre des plasmides et basée sur par le transposon est appelé transpo-
Davies et Davies, 2010). une machinerie de réplication com- sition et les enzymes qui en sont res-
4.2.2. Les plasmides, la conjugaison et mune. Ainsi, des plasmides exploitant ponsables sont nommées transposases.
la mobilisation plasmidique des modes de réplication différents Le transposon, également surnommé
peuvent coexister au sein d’une seule jumping gene, code pour ses propres
Les plasmides conjugatifs sont des cellule, alors que des plasmides diffé- transposases et conserve sa capacité
molécules d’ADN extra-chromo- rents utilisant le même mécanisme de à « sauter » d’une région à l’autre du

117
génome lorsqu’il se déplace. Tous les posites complexes ne sont pas asso- est scindé en deux, une structure
transposons bactériens sont consti- ciés à des séquences d’insertion, et se simple brin maintenue dans la bactérie
tués au niveau de leurs extrémités, composent quant à eux, de courtes sé- donneuse et l’autre fournie à la bacté-
de séquences d’ADN inversées et quences répétées inversées encadrant rie receveuse, qui doivent encore être
répétées, cibles des transposases et de une région centrale composée notam- dupliquées pour former à nouveau une
courtes séquences répétées de l’ADN ment des gènes nécessaires à la trans- structure double-brin essentielle à l’in-
cible qui encadrent le transposon. Les position et des gènes de résistance, qui tégration ultérieure au chromosome
plus petits transposons bactériens, ne représentent qu’une petite partie ou dans un plasmide. Les transposons
nommés séquences d’insertion (SI), de l’unité transposable. Les transpo- conjugatifs ont été identifiés parmi
contiennent très peu d’informations sons conjugatifs diffèrent des autres les bactéries Gram négatives et Gram
génétiques outre les gènes codant pour transposons car, d’une part, ils pos- positives (Salyers et al., 1995 ; Salyers
les transposases. Ces séquences d’in- sèdent des fonctions de transfert, fai- et Amabile-Cuevas, 1997 ; Frost et al.,
sertion ne codent d’ailleurs pas pour sant d’eux une sorte d’hybride entre 2005 ; Harbottle et al., 2006). Enfin,
des gènes sélectifs, et leur découverte le transposon et le plasmide, et par, un dernier type d’élément génétique
tient, dès lors, de l’inactivation des d’autre part, l’absence de séquences mobile aux caractéristiques proches
gènes qu’elles produisent lorsqu’elles répétées inversées. Le transposon de certaines séquences d’insertion a
s’intègrent dans ceux-ci et des modi- conjugatif est capable de promouvoir été découvert récemment. Ces struc-
fications phénotypiques qu’elles son excision du génome de la cellule tures particulières, nommées ISCR (IS
causent. Lorsque deux séquences hôte, pour former une structure inter- pour insertion sequence soulignant
d’insertion de séquences similaires, médiaire circulaire d’ADN bicaté- l’étroite relation entre ces éléments
généralement en orientation inversée, naire, suivie ensuite d’une étape de et les séquences d’insertion, et CR
encadrent d’autres gènes que ceux re- conjugaison à une bactérie voisine. pour common region soulignant la
quis pour la transposition, comme par Cette étape de conjugaison peut, en présence de séquences conservées de
exemple des gènes de résistance aux fait, être vue comme une forme de recombinases), réalisent une trans-
antibiotiques, on parle de transposon réplication. En effet, au cours de ce position réplicative, et se composent
composite. Les transposons non com- processus, l’intermédiaire circulaire d’un gène codant pour une enzyme
analogue des transposases, non flan-
qué des séquences répétées inversées
Figure 6 : Représentation simplifiée d’une séquence d’insertion, d’un transposon habituellement présentes dans les
composite et d’un transposon complexe. SI, mais délimité par des séquences
d’initiation et de terminaison de répli-
cation. Ces éléments s’insèrent de
façon aléatoire dans le génome bac-
térien, et disposent d’un mécanisme
de réplication imprécis se poursuivant
généralement au-delà du site de termi-
naison, et permettant ainsi une mobi-
lisation des séquences adjacentes aux
ISCR (Toleman et al., 2006 ; Bennett,
2008 ; Boerlin et Reid-Smith, 2008).
La figure 6 propose une représentation
simplifiée des séquences d’insertion,
des transposons composites et des
transposons complexes.
4.2.4. Les éléments intégratifs conju-
gatifs et les îlots génomiques
Un îlot génomique se définit comme
une région d’ADN chromosomique
de grande taille, généralement com-
La séquence d’insertion se compose de deux courtes séquences directes d’ADN prise entre 10 et 200 kilo bases, iden-
cible et de deux séquences d’ADN répétées inversées, cibles des transposases, tifiée par sa présence dans le génome
encadrant une partie centrale formée par le gène codant pour la transposase. Le d’une espèce mais absente du génome
transposon composite se compose de deux séquences d’insertion généralement d’autres souches de la même espèce
orientées de façon opposée, encadrant une partie centrale comprenant un (des) ou d’espèces proches. On distingue
gène(s) de résistance à un (des) antibiotique(s). Le transposon complexe se les îlots génomiques par le contenu
compose de deux courtes séquences directes d’ADN cible et de deux séquences en GC, les biais en GC, et l’usage de
d’ADN répétées inversées encadrant une partie centrale comprenant notamment codons différents du reste du chro-
le gène codant pour la transposase (et des gènes codant pour d’autres enzymes mosome de la bactérie dans laquelle
non illustrés sur cette représentation) et un (des) gène(s) de résistance à un (des) ils se sont intégrés. Ces structures
antibiotique(s). tnp : gène codant pour la transposase, ABR : gène codant pour une sont souvent insérées au niveau de
résistance à un antibiotique, RI : séquence répétée inversée, RD : séquence répétée l’extrémité 3’ d’un ARN de transfert,
directe, SI-G : séquence d’insertion copie gauche, SI-D : séquence d’insertion site de reconnaissance spécifique de
copie droite. certains types d’intégrase, on les ap-

118
pelle dans ce cas, éléments intégratifs productif aboutit ou non à la lyse bac- 4.2.6. La transformation
conjugatifs (EIC). Ils sont habituel- térienne ; enfin, (iii) le phage ou seule-
lement flanqués de courtes séquences La transformation, premier mécanisme
ment son acide nucléique est introduit
répétées directes qui représentent, de transfert d’ADN découvert chez
dans la bactérie et s’intègre au génome les procaryotes, est impliquée dans
en fait, le site spécifique d’intégra- bactérien à l’état latent sous la forme
tion de l’îlot génomique dans l’ADN l’acquisition de l’ADN d’une bacté-
d’un prophage, on parle dans ce cas de rie morte en cours de dégradation par
cible et qui peuvent également servir phage tempéré et le cycle est qualifié
de séquence de reconnaissance pour une bactérie compétente se trouvant à
de lysogénique (Euzéby, sans date). proximité de cette dernière (Snyder et
leur excision enzymatique. Les îlots
Les bactériophages ne sont pas seule- Champness, 1997). En effet, lors de
génomiques contiennent fréquemment
ment responsables de l’infection des la mort d’une bactérie, l’ADN altéré,
des gènes de mobilité impliqués dans
bactéries, ils sont parfois également fragmenté et libéré, et qui contient
leur transfert, comme des gènes cryp-
impliqués dans le transfert de maté- éventuellement des gènes de résistance
tiques ou fonctionnels codant pour des
riel génétique entre bactéries au cours vis-à-vis de différents antibiotiques,
intégrases, ou des gènes codant pour
d’un procédé nommé transduction. Il peut être récupéré par transformation
des facteurs impliqués dans des méca- et incorporé par recombinaison dans
nismes de conjugaison, ou encore des existe deux types de transduction chez
les bactéries : la transduction généra- le génome des bactéries compétentes
phages. Les îlots génomiques sont gé- présentes dans le milieu (figure 4).
néralement porteurs d’éléments d’in- lisée au cours de laquelle n’importe
La compétence des bactéries est un
sertion ou de transposons, impliqués quelle région du génome de la cellule phénomène lié à la perméabilité de la
dans l’introduction, la mobilisation hôte peut être transférée à une autre, et membrane qui peut être induit in vivo
ou la délétion de matériel génétique à la transduction spécialisée, au cours de ou in vitro (via des chocs électriques ou
l’intérieur de ceux-ci. Enfin, les îlots laquelle seuls certains gènes proches des agents chimiques) ou se retrouver
génomiques sont souvent porteurs de du site d’attachement dans le chromo- naturellement chez certains genres voir
gènes conférant un avantage sélectif à some du phage lysogénique peuvent certaines espèces parmi les Gram posi-
la bactérie hôte qu’elle soit pathogène être transférés (Snyder et Champ- tives (Bacillus et Streptococcus) et les
ou environnementale, et jouent par ness, 1997). Est ainsi envisageable, Gram négatives (Campylobacter, Hae-
conséquent un rôle crucial dans l’évo- la transduction de matériel chromo- mophilus, Helicobacter, Neisseria et
lution de ces dernières en permettant Vibrio) (Harbottle et al., 2006 ; Aleks-
somique pouvant pour se perpétuer
la dissémination de nombreux gènes hun et Levy, 2007 ; Boerlin et Reid-
recombiner avec le chromosome de
tels que des gènes de résistance aux Smith, 2008 ; Kovacs et al., 2009).
antibiotiques, des gènes de virulence, la cellule réceptrice lors d’homologie
de séquence. On observe également Certains microorganismes tels que les
ou encore des gènes codant pour di- streptocoques sont naturellement com-
verses voies métaboliques (Juhas et la transduction de plasmide pouvant
pétents à certains stades de leur déve-
al., 2009). En outre, on définit les élé- ainsi se maintenir dans la bactérie loppement alors que d’autres germes
ments intégratifs conjugatifs comme receveuse par réplication. Enfin, ne possèdent aucune fenêtre de com-
une catégorie de structures capable de lorsque le matériel génétique transféré pétence (van Hoek et al., 2011). Cer-
s’exciser par des recombinaisons site- contient un transposon, celui-ci peut taines entérobactéries dont notamment
spécifique sous une forme circulaire « sauter » et s’insérer au niveau d’un E. coli sont ainsi difficilement naturel-
auto-transférable par conjugaison, et plasmide ou du chromosome de l’hôte lement transformables, du fait d’un très
de s’intégrer dans le génome d’une (Snyder et Champness, 1997). Les faible taux de pénétration de l’ADN et
bactérie hôte, quelle que soit la spé- échanges génétiques par transduction de mécanismes de recombinaison peu
cificité du mécanisme d’intégration et impliquent l’infection d’une bactérie efficaces (Sinha et Redfield, 2012). Sur
de conjugaison utilisé. Ces éléments par un bactériophage, la réplication base de ces considérations, la contribu-
sont également capables de se répli- de celui-ci, l’incorporation d’ADN tion du phénomène de transformation
quer au cours du processus de conju- bactérien (contenant éventuellement dans l’évolution des résistances aux
gaison, cependant ce phénomène n’est des gènes de résistance) à l’ADN du antibiotiques reste difficile à évaluer
pas impliqué dans leur maintien (Bur- bien que théoriquement envisageable.
phage, la lyse de la cellule hôte et
rus et al., 2002). (Blahova et al., 2000 ; Del Grosso et
l’infection d’une nouvelle bactérie al., 2011 ; van Hoek et al., 2011).
4.2.5. Les bactériophages et la trans- à qui les déterminants de résistance
duction peuvent alors être transmis, intégrés
ou non au chromosome (figure 4) 5. Epidémiologie des
Les bactériophages ou phages sont des (Harbottle et al., 2006 ; Alekshun et résistances aux
virus infectant les bactéries. Comme antibiotiques
Levy, 2007 ; Boerlin et Reid-Smith,
tous les virus, ils se caractérisent par 5.1. Résistances croisées,
2008). La contribution du phénomène
la possession d’une seule molécule
de transduction dans l’évolution des co-résistances et sélection
d’acide nucléique et par un parasi-
tisme intracellulaire obligatoire. Lors résistances multiples aux antibiotiques
On parle de résistance croisée,
de contact entre une bactérie et un est difficile à évaluer. Cependant, des lorsqu’une résistance à un antibiotique
phage, trois situations sont envisa- expériences de laboratoire ainsi que engendre une résistance à un autre
geables : (i) la bactérie résiste à l’in- des souches sauvages attestent le rôle composé par un seul et même méca-
fection ; (ii) le phage ou seulement du processus dans le développement nisme biochimique. Le phénomène de
son acide nucléique pénètre dans la des résistances aux antimicrobiens résistance croisée peut survenir parmi
bactérie, s’y multiplie, on parle dans (Blahova et al., 2000 ; Del Grosso et tous les membres d’une classe d’anti-
ce cas de phage virulent et son cycle al., 2011 ; van Hoek et al., 2011). biotiques, comme c’est le cas pour les

119
sulfamidés, ou être limité à quelques favorisent le transfert conjugatif de ou qui ont perdu cette caractéristique)
membres d’un groupe, comme pour plasmides entre différentes espèces de sont éliminés, laissant une popula-
les aminoglycosides, ou encore impli- bactéries, en augmentant la perméabi- tion résiduelle de germes résistants.
quer des antimicrobiens appartenant à lité cellulaire et en facilitant le rappro- L’usage, à long terme, des antibio-
des classes différentes. Une résistance chement bactérien. De faibles concen- tiques contribue à modifier fortement
croisée est aussi observée, lorsque trations en tétracycline augmentent la l’écologie microbiologique d’un envi-
plusieurs antibiotiques utilisent la fréquence de transfert de transposons ronnement donné, en permettant aux
même cible, comme par exemple, les conjugatifs porteurs de résistances éléments les moins sensibles de la po-
macrolides, les lincosamides et les aux tétracyclines ainsi qu’à d’autres pulation microbienne de devenir pré-
streptogramines B qui agissent tous antibiotiques au sein des coques Gram dominants (Marshall et al., 1990 ; Sa-
sur le ribosome. En effet, une seule positifs et chez Bacteroides spp. En lyers et Amabile-Cuevas, 1997 ; Levy,
mutation au niveau de la sous-unité outre, l’exposition aux antibiotiques 1998 ; Boerlin et White, 2006). De
50S de l’ARNr provoque une résis- exerce une pression de sélection, en cette façon, les bactéries commensales
tance à haut niveau aux trois antimi- favorisant les mutations et les trans- et opportunistes résistantes deviennent
crobiens, en dépit des différences de ferts de gènes, et en permettant aux rapidement les composants essentiels
structure existant parmi ceux-ci. Ce génotypes résistants devenus prédo- des flores normales de nombreuses
phénomène est également observé minants de s’installer au sein de la espèces hôtes en déplaçant progres-
en présence de pompes à efflux non population bactérienne (Courvalin et sivement le niveau de sensibilité des
spécifiques qui exportent activement Trieu-Cuot, 2001 ; Aarestrup, 2006). populations. De plus, le regroupement
en dehors de la bactérie une grande de multiples gènes de résistance sur
variété de substrats aux structures 5.2. Persistance dans l’environ- des plasmides, des transposons et des
chimiques souvent très différentes. intégrons rend le problème d’autant
nement
Citons encore certaines inactivations plus préoccupant, du fait notamment,
enzymatiques efficaces sur différentes L’augmentation de la prévalence et des phénomènes de co-sélection de
classes d’antibiotiques, comme par la dissémination des résistances était résistances. Ajoutons à cela une com-
exemple l’acétylation de certains ami- une issue prévisible du recours crois- plication supplémentaire, lorsqu’une
noglycosides et de certaines fluoroqui- sant à l’antibiothérapie, un exemple co-sélection peut également s’exercer
nolones par l’enzyme Aac(6’)-Ib-cr du principe darwinien de la survie du sur des gènes de résistance aux anti-
(Robicsek et al., 2006a ; 2006b). La plus adapté. Dans toute grande popu- biotiques liés physiquement à d’autres
co-résistance se définit, quant à elle, lation bactérienne, quelques individus gènes sélectivement avantageux dans
comme l’existence au sein d’une bac- possèdent des caractéristiques qui leur certaines circonstances, tels que des
térie de plusieurs mécanismes confé- permettent de survivre en présence caractères de virulence (Boerlin et
rant chacun une résistance à diverses d’une substance toxique, alors que les al., 2005) ou encore une résistance à
familles d’antibiotiques. Les gènes organismes sensibles (qui n’ont pas des antiseptiques, des métaux lourds,
correspondants sont souvent adjacents
(physiquement liés) et exprimés d’une
façon coordonnée comme dans les
intégrons. La co-sélection, c’est-à-
dire la sélection d’un microorganisme
résistant à un antibiotique lors d’une
exposition à un autre agent antimi-
crobien, résulte des phénomènes de
résistance croisée et de co-résistance.
Pour illustrer ce propos, un exemple
remarquable de co-sélection est décrit
dans des élevages de porcs et de vo-
laille, où on observe une persistance
de souches d’entérocoques résistantes
aux glycopeptides malgré l’interdic-
tion d’usage de ces derniers. En fait,
l’opéron responsable de la résistance à
la vancomycine est lié génétiquement,
sur un plasmide conjugatif, à un gène
de résistance aux macrolides, dont il
résulte une co-sélection de résistance
aux glycopeptides lors de l’utilisation
de macrolides dans ce type d’élevage
(Aarestrup, 2000 ; 2006). Figure 7 : Vue simplifiée de l’épidémiologie des résistances aux antibiotiques,
La présence de certains antibiotiques d’après Boerlin et White (2006).
dans l’environnement peut parfois Les bactéries peuvent être transférées (flèches blanches) entre les animaux et
faciliter le transfert de gènes de résis- les hommes par l’intermédiaire de l’eau et de l’alimentation, par contact directe
tance, en agissant comme de véritables ou encore via l’environnement. Les résistances aux antibiotiques, quant à elles,
phéromones. Ainsi, des concentra- s’échangent via le transfert de matériel génétique s’opérant entre les bactéries d’un
tions sub-inhibitrices de pénicilline compartiment mais également entre les bactéries de différents compartiments.

120
et des désinfectants (Salyers et Ama- gènes et commensaux (D’Costa et al., Abstract
bile-Cuevas, 1997 ; Boerlin et White, 2007). L’ère moderne d’utilisation
2006). des antibiotiques, telle que nous la Bacterial antimicrobial
Porter et répliquer des gènes de résis- connaissons aujourd’hui, représente resistances: the mechanisms
tance lorsqu’ils ne sont plus néces- en quelque sorte, une pression de and their contagiousness
saires représente, par contre, un far- sélection artificielle s’opérant sur les
deau pour une bactérie. Ainsi, en After six decades of antimicro-
transferts naturels. En outre, l’usage bial use, pathogenic bacteria of
absence de pression de sélection exer-
cée par un antibiotique, les bactéries intensif actuel des antibiotiques occa- human and animal origin have rea-
sensibles possèdent un avantage sélec- sionne d’importantes perturbations ched alarming levels of antibiotics
tif et assurent lentement un retour de la des écosystèmes microbiens environ- resistances. This literature review
population à un niveau de sensibilité nementaux via les nombreux résidus will present a description of the
global (Aarestrup et al., 2001 ; Boerlin rencontrés dans les eaux usées, les main mechanisms of antimicro-
et al., 2001). Cependant, des travaux fermes et les effluents d’aquaculture bial resistance reported today, of
récents montrent que les bactéries sont pour ne citer qu’eux (Kostich et La- which enzymatic antibiotic inac-
également capables de conserver les
zorchak, 2008). La figure 7 propose tivation, modification or replace-
traits de résistance à un antibiotique ment of drug target, efflux pumps,
en l’absence de pression de sélection une vue simplifiée de l’épidémiologie
or reduced drug uptake are the
exercée par ce dernier, notamment des résistances aux antibiotiques.
most common. We will then dis-
par les événements de co-sélection cuss some concepts related to
décrits plus haut. Les mécanismes qui the epidemiology of this pheno-
6. Conclusion
sous-tendent ce phénomène ne sont
menon, including the acquisition
pas élucidés. Ils semblent multifac- Une meilleure compréhension de routes of the genes responsible
toriels et font probablement intervenir
des mécanismes de compensation de
l’émergence des résistances aux anti- for resistance such as conjugative
la charge métabolique imposée à la microbiens ainsi que de leurs transferts plasmids, transposable elements
bactérie par la présence des gènes de nous aidera, à termes, à développer and the integron system that
résistance, ou encore une régulation des stratégies de contrôle et de lutte ef- move genes between different
de l’expression des gènes en présence ficaces vis-à-vis de ce fléau. En outre, parts of the bacterial genome and
ou non de l’antibiotique (Boerlin et les progrès permanents, dans le do- between different bacteria.
White, 2006). maine de la biologie moléculaire per-
Enfin, le réservoir des gènes de résis- mettant notamment un traçage de plus
tance aux antibiotiques a deux locali- en plus performant des gènes de résis-
sations principales, à savoir les micro- tance et des souches porteuses, contri-
flores commensales des organismes
buent également à la mise en place et
vivants et les bactéries environnemen-
tales. En effet, les flores commensales à l’amélioration des plans de contrôle
gastro-intestinales et de toute autre et de surveillance de cette probléma-
zone non stérile du corps des hommes tique. Cependant, face à la complexité
et des animaux sont le siège de trans- des mécanismes de transmission et à
ferts permanents de gènes de résis- la multitude de réservoirs environne-
tance entre les bactéries résidentes et mentaux, parfois encore inexploités,
les germes pathogènes (Salyers et al.,
de nouveaux gènes de résistance aux
2004). D’ailleurs, il semblerait que
ces échanges constants représentent antibiotiques ainsi que d’éléments
plus un danger pour la santé publique génétiques mobiles susceptibles de les
que la pression de sélection exercée véhiculer, il paraît improbable qu’un
directement sur les agents pathogènes « remède miracle » assure un aboutis-
lors des traitements. En fait, le déve- sement, dans un avenir proche, à notre
loppement occasionnel de novo d’une combat contre les antibio-résistances.
résistance au sein d’un microorga-
Ainsi, un usage des antibiotiques pru-
nisme pathogène est moins fréquent et
a moins d’impact que le trafic inces- dent, raisonné et raisonnable dont la
sant organisé depuis le vaste réservoir finalité devra sans cesse être affinée
commensal vers le pool relativement sur base des nouvelles informations
limité constitué des bactéries patho- et outils mis à notre disposition grâce
gènes (Boerlin et Reid-Smith, 2008). aux nombreuses recherches qu’il ap-
Le second réservoir majeur des gènes paraît actuellement indispensable de
de résistance aux antimicrobiens est
soutenir et d’encourager, doit rester la
composé des microbiotes environ-
nementaux, où la plupart des gènes pierre angulaire de notre stratégie de
transférables de résistance aux anti- protection de l’efficacité des nouveaux
biotiques sont apparus pour ensuite mais également des anciens composés
être acquis par les germes patho- antibactériens.

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