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Piche - Les Fondements Des Theories Migratoires Contemporaines - 2013
Piche - Les Fondements Des Theories Migratoires Contemporaines - 2013
Les fondements
des théories migratoires contemporaines (1)
Victor Piché
(1) Je remercie Olivia Samuel et Martine Rousso-Rossmann pour les commentaires sur la première
version de ce chapitre.
(2) La migration forcée appartient à un autre paradigme que celui qui domine le champ migratoire
et qui repose sur la notion de prise de décision rationnelle. Nous y reviendrons.
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CHAPITRE I LES FONDEMENTS DES THÉORIES MIGRATOIRES CONTEMPORAINES
dont nous parlerons plus loin. En outre, le texte fait le lien entre les causes (les
coûts et bénéfices) et les effets (retour sur investissement). En effet, l’auteur
considère la migration comme un « investissement qui augmente la productivité
des ressources humaines », investissement qui comporte des coûts et rapporte
également des bénéfices. Les coûts ne sont pas que monétaires et il suggère
de considérer les coûts non monétaires (coûts d’opportunité, i.e. le manque à
gagner accumulé pendant le voyage et durant la recherche et l’apprentissage
d’un nouveau travail ; coût « psychique »). Malheureusement, l’idée d’exami-
ner à la fois les causes et les effets sera largement ignorée dans les recherches
qui suivront et le champ migratoire restera divisé entre la recherche des
causes et celle des effets des migrations.
Une autre proposition de l’auteur, elle aussi largement ignorée du fait de
cette division, concerne la distinction entre les taux bruts et les taux nets
de migration, distinction qui aboutit à un paradoxe. Comme il l’affirme, « si
l’on considère le départ de 62 500 personnes comme étant la preuve que le
Mississippi est une zone à faibles revenus, nous devons accepter, de la même
manière, que l’arrivée de 51 900 personnes prouve inversement qu’il s’agit
effectivement d’un bon endroit où gagner sa vie ». En fait, Sjaastad introduit
ici la notion de migration sélective : si l’émigration concerne surtout des per-
sonnes peu qualifiées alors que l’immigration est davantage qualifiée, le ré-
sultat net peut produire une augmentation du revenu par habitant dans la
localité en question. Il conclut alors qu’il « est possible d’envisager des condi-
tions qui causeraient une augmentation d’autant plus rapide des revenus que
le solde migratoire serait faible ».
L’apport le plus significatif de Sjaastad est certainement l’introduction de la
notion de capital humain dans la théorie migratoire afin de contourner la diffi-
culté liée à l’estimation des bénéfices. Ainsi, dit-il, « il est particulièrement utile
d’employer le concept de capital humain et d’envisager les migrations, la forma-
tion et l’expérience comme des investissements dans le facteur humain ». L’approche
de Sjaastad est explicite sur le postulat de base, à savoir que l’analyse des coûts
et bénéfices individuels n’est valable que dans le cas de migrations volontaires
qui, dans une économie concurrentielle, vise une répartition « optimale » des
ressources. Il conclut que « les migrations ne peuvent être étudiées isolément ;
les investissements complémentaires dans le facteur humain sont probablement
aussi, sinon plus, importants que le processus de migration lui-même ».
Le texte de Sjaastad, tout comme le texte de Stouffer (1940) sur les op-
portunités intermédiaires ou les facteurs médiateurs (« intervening opportu-
nities ») ont ouvert la voie au cadre général présenté par Everett Lee en 1966
(chapitre 4). La théorie de Lee se fonde sur les caractéristiques individuelles
pour expliquer le volume de même que les courants et contre-courants mi-
gratoires. Partant également du postulat que la migration est le résultat d’un
calcul individuel fondé sur les facteurs d’attraction (lieu de destination) et
les facteurs de répulsion (lieu d’origine), cette évaluation des facteurs s’ap-
parente grandement à l’analyse coût-bénéfice suggérée par Sjaastad (1962),
même si lui-même n’utilise pas ce vocable (5).
(5) Lee fait allusion dans son texte au fait que la décision de migrer n’est pas tout à fait rationnelle,
mais cet aspect sera complètement évacué dans la suite de son argumentation.
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CHAPITRE I LES FONDEMENTS DES THÉORIES MIGRATOIRES CONTEMPORAINES
(6) Pour qui s’intéresse à l’histoire des idées, les références bibliographiques données par Zelinsky,
dont la plupart sont aujourd’hui oubliées, constituent un bon point de départ.
(7) En ce qui concerne l’exemple africain, on peut consulter l’excellent ouvrage d’Ittmann, Cordell
et Maddox, 2010.
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salaire vers les régions développées, ne s’est pas réalisée. La pénurie de main-
d’œuvre peu qualifiée dans certains secteurs des économies développées s’est
certes avérée réelle, mais Zelinski n’a pas prévu que les États du Nord élabo-
reraient des programmes de travailleurs migrants temporaires pour combler
ces besoins. Nous reviendrons sur ce point dans la prochaine section.
Malgré le vocabulaire ancien et dépassé de l’article de Zelinski, sa contri-
bution est significative à deux niveaux. Dans un premier temps, il propose
d’intégrer la migration au sein de la théorie de la transition démographique
prise dans son ensemble. Il se réfère d’ailleurs à la théorie de la réponse mul-
tiphase (« multiphasic response ») de Davis (1963) qui relie l’ensemble des com-
portements démographiques (fécondité, mortalité, migration) aux contextes
historiques de chaque société.
D’une part, cette hypothèse permet de dépasser la fragmentation du
champ démographique en faisant appel à la notion de régime démographique.
Selon les époques, chaque société développe des stratégies de reproduction
démographique en combinant les mécanismes reproductifs que sont la fécon-
dité, la mortalité et la migration. Ainsi, la migration n’est pas une stratégie
isolée : elle est articulée aux autres comportements. Les régimes démogra-
phiques constituent le résultat de l’ensemble des stratégies : par exemple, dans
une société non marchande où le travail domestique prédomine, les enfants
sont des atouts (d’où une fécondité élevée), et tout est fait pour éviter la mort
selon les connaissances en cours. Avec la monétarisation de l’économie, la mi-
gration des membres de la famille viendra compléter les besoins monétaires
(Gregory et Piché, 1985).
D’autre part, l’intuition initiale de Zelinski a été suivie, quoique de façon
fort limitée, par des travaux tentant d’établir une théorie plus générale de la
transition démographique. On pense ici aux réflexions théoriques de Walter
Mertens (1995) qui tente d’étendre la notion de transition démographique à
l’ensemble des composantes démographiques. Il parle alors de trois transi-
tions fondamentales : (1) la transition démographique au sens strict, incluant
la transition de la fécondité (transition familiale, transition dans le rôle des
femmes), la transition de la mortalité (transition de santé, transition épidémio-
logique) et la transition des âges ; (2) la transition de la population active ; (3) la
transition urbaine (transition migratoire). Outre l’identification des diverses
transitions, l’important est de montrer que ces transitions interagissent, pro-
duisant ainsi une théorie globale du changement démographique.
Enfin, même si sa présentation de la théorie de la transition démogra-
phique (vitale) est aujourd’hui largement dépassée, celle de la transition de la
mobilité est intéressante, surtout dans sa phase avancée. Malheureusement,
peu de travaux ont suivi cette voie. Les travaux d’Alan Simmons constituent
une exception. Dans un texte publié en 1995, Simmons adopte une approche
historique faisant le lien entre les diverses phases du développement du capi-
talisme. Il affirme que si l’objectif est d’analyser la migration internationale
et le rôle de l’État sur une longue période, l’utilité de la théorie du système
monde ne fait pas de doute. En revanche, la théorie de la nouvelle division
du travail, bien développée par Cohen (1987), apporte un éclairage plus
concret pour comprendre le statut des migrants, leur place dans la structure
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(9) Voir à se sujet l’échange entre Sanders et Nee (1992) et Portes et Jansen (1992).
(10) Cette revue de littérature sera reprise et élargie dans un ouvrage incontournable, à savoir
Massey et al., 1998.
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(11) Bourdieu aborde la question de capital social dans ses nombreux travaux qu’il serait trop long
de citer ici. Parmi ses premières ébauches, voir Bourdieu (1980).
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(12) Pour un tour d’horizon sur l’état du trafic des êtres humains dans le monde, voir Laczko et
Gozdziak, 2005.
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(13) Les 102 chapitres présentés dans les quatre volumes colligés par Zimmermann et Bauer en
2002 illustrent l’état du débat et surtout la divergence dans les appréciations des effets
économiques.
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2. Migration et développement :
le cas des pays en développement
Dans les pays en développement, les débats sur les effets économiques de
la migration ont pris une tournure radicalement différente. Ce n’est plus la
situation des régions d’immigration qui préoccupe les chercheurs, mais plutôt
les liens entre l’émigration et le développement dans les régions d’émigra-
tion. Cela n’a pas toujours été le cas, comme en témoigne le texte d’Oberai et
Manmohan (1980, chapitre 14). Comme ils l’affirment :
Jusqu’à présent, les recherches consacrées aux migrations des
campagnes vers les villes dans les pays en développement ont sur-
tout visé les effets de ces mouvements sur les régions de destinations,
en particulier les économies urbaines.
Ainsi, on a accordé beaucoup moins d’attention aux effets qu’ils produi-
saient dans les zones rurales. Le grand mérite de ce texte est justement de
renverser la problématique en considérant les liens entre les émigrants et les
zones de départ à travers la notion de transferts monétaires qui constituent,
selon eux, l’un des vecteurs clé de l’impact de l’émigration dans les pays en dé-
veloppement. On doit donc aux auteurs le mérite d’avoir initier les premières
réflexions à ce sujet. L’effet précis de ces envois de fonds sur l’économie rurale
est difficile à déterminer a priori. Ils peuvent s’ajouter à des investissements
productifs visant à développer et à diversifier l’agriculture ou à des activités
non agricoles dans les zones rurales, être consacrés au logement ou à l’éduca-
tion ou, tout simplement, servir à soulager la misère de ceux qui restent dans
les villages. Ainsi, les transferts peuvent aussi être utilisés de façon improduc-
tive, et ce sera l’un des leitmotivs des recherches à venir, à savoir comment
rendre plus productifs les transferts monétaires.
Les auteurs mentionnent que le migrant saisonnier ou « à objectif limité »
peut commencer à envoyer des fonds assez rapidement, idée qui sera reprise
par plusieurs auteurs dont Portes (2009) qui, dans son bilan de la recherche,
conclut que la migration temporaire est celle qui produit le plus d’effets po-
sitifs. Oberai et Manmohan mentionnent également que l’effet relatif des en-
vois de fonds est plus grand sur les ménages les plus pauvres ; il y aurait donc
une amélioration visible de la répartition du revenu à l’intérieur de la catégo-
rie des ménages d’émigrants.
À quoi servent les transferts de fonds ? Selon les données présentées par
les auteurs, plus des trois quarts des ménages dépensent les fonds qu’ils ont
reçus en nourriture et en vêtements et plus d’un quart en articles ménagers,
la seule autre rubrique d’une certaine importance étant les « cérémonies et
mariages ». Seule une faible proportion des ménages (6,1 %) les consacre à
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(14) Pour une revue plus ancienne étendue à l’ensemble des régions du monde, voir Massey et al.,
1988, chapitres 8 et 9.
(15) Pour une excellente synthèse critique de cette littérature, voir Héran, 2002.
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CHAPITRE I LES FONDEMENTS DES THÉORIES MIGRATOIRES CONTEMPORAINES
natif type sont à peine affectés par l’entrée d’immigrants sur le marché du
travail local. Cette découverte inattendue soulève une question importante :
pourquoi les preuves empiriques et les idées répandues dans le débat politique
divergent-elles à ce point ? Toujours selon Borjas, l’absence de tout effet négatif
substantiel s’explique peut-être, de la manière la plus plausible, par le fait que
l’immigration aux États-Unis au cours des deux dernières décennies, bien
qu’importante et croissante en taille, a constitué une composante relative-
ment modeste des changements démographiques, particulièrement en termes
de contribution de l’immigration à la croissance de la population active.
En revanche, les immigrants sont susceptibles d’avoir un effet négatif,
quoique faible, sur leurs propres revenus. En d’autres termes, les immigrants
sont plus substituables à eux-mêmes qu’à des natifs. Plusieurs travaux ont éga-
lement montré que l’impact de l’immigration peut avoir un effet dépressif sur
les revenus des travailleurs natifs moins qualifiés, mais encore une fois, les
effets demeurent minimes, voire même négligeables (Card, 2009).
Il faut reconnaître que Borjas a quelque peu changé d’idée depuis cette pu-
blication (Héran, 2002, p. 55). Dans son livre publié en 1999, intitulé Heaven’s
Door, Borjas est devenu plus négatif face à l’immigration, réclamant une im-
migration davantage sélective en faveur des plus qualifiés. Malgré le caractère
très scientifique, et parfois très économétrique des études, les points de vue
sur les effets de l’immigration sont devenus parfois virulents. Entre autres,
on a pu constater l’affrontement entre deux économistes réputés, Borjas d’un
côté, et Card de l’autre (16). Bref, le débat n’est pas clos. Si Borjas reste la réfé-
rence dans ce domaine, la littérature économique sur les différences de reve-
nus entre natifs et immigrants demeure contradictoire.
Dans les pays en développement, la problématique de l’impact de la mi-
gration au niveau individuel a pris une orientation un peu différente. D’une
certaine façon, le débat se ressemble dans la mesure où s’affrontent les points
de vue négatifs et positifs. Mais il diverge en ce qu’il se concentre sur le sort
des populations migrantes dans les marchés de travail des grandes villes. La
perception principale concernant les liens entre migration et emploi dans
les pays moins développés a longtemps été le faible potentiel d’insertion des
migrants et des migrantes dans un marché de travail déjà limité, voire sa-
turé. Dans cette approche, l’exode rural participe à la création d’un chômage
urbain massif et à la marginalisation d’une portion importante des popula-
tions urbaines (17). Cette conception de la « non-insertion » pose néanmoins
un dilemme important : comment expliquer l’afflux constant de populations
migrantes dans les villes des pays pauvres si la seule perspective est la pau-
vreté extrême ? Depuis le milieu des années 1980, de nombreuses recherches
ont montré la façon dont les migrants développent leur capacité d’insertion
en milieu urbain par la prolifération des petites entreprises informelles
(Portes et Benton, 1984 ; Portes et Schauffler, 1993)(18). Un deuxième courant
(16) Voir Card, 2005 ; voir également le compte rendu de ce débat dans Lowenstein, 2006.
(17) Cette perspective est partagée autant par les théories néoclassiques de l’hyperurbanisation
(e.g. Bairoch, 1973) que par les théories marxistes présentant les populations migrantes comme
les exclus de l’économie urbaine moderne (Gregory et Piché, 1978).
(18) Mentionnons le texte fondateur de Hart (1973).
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(19) Cette hypothèse est particulièrement bien développée dans les premières formulations du
modèle de Todaro (1969).
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Les premiers travaux sur l’entreprise ethnique ont d’abord été réalisés
aux États-Unis (20) et au Canada (21), mais ont également trouvé preneurs dans
d’autres contextes (Boubakri, 1999)(22). De nombreux travaux plus récents ont
été très critiques par rapport à l’approche de l’enclave ethnique. Dans sa criti-
que, Waldinger (1993) conclut que la notion d’enclave conduit à une impasse
conceptuelle et empirique et suggère que pour progresser, il serait utile de
se débarrasser du concept d’enclave et de ne retenir que celui d’économie
ethnique. Les débats lancés par les travaux de Portes ont surtout porté sur
les effets positifs ou négatifs de l’enclave du point de vue de l’insertion éco-
nomique. A contrario des tenants de cette approche, plusieurs chercheurs ont
remis en question le fait que l’enclave ethnique était avantageuse pour les
immigrants (Sanders et Nee, 1992). Dans un texte publié en 2006, Portes et
Shafer sont revenus sur les critiques de l’hypothèse de l’enclave ethnique pour
conclure que leur hypothèse était toujours valable.
Tout en ayant une valeur heuristique certaine, la typologie tripartite de
Wilson et Portes demeure limitée dans la mesure où il existe d’autres modes
d’insertion. En particulier, avec la réémergence des programmes de tra-
vailleurs temporaires dans plusieurs pays développés, un quatrième mode
doit être ajouté, à savoir, l’insertion dans les secteurs caractérisés par le tra-
vail temporaire (domesticité, construction, restauration, etc.). Il s’agit d’une
catégorie d’emplois peu ou pas qualifiés, boudés par les travailleurs nationaux
(voir Sassen, chapitre 8). Ce mode d’insertion est caractérisé par une grande
vulnérabilité, par le non-respect des droits des travailleurs migrants et par la
création de non-citoyens (Piché, 2012).
(20) Le nom de Bonacich est également rattaché à ce type de recherche (Bonacich et Modell, 1980).
(21) Au Canada, ce sont les travaux de Jeffrey Reitz (1980 et 1998) qui ont le plus marqué la re-
cherche sur l’entreprenariat ethnique.
(22) Bien que le concept d’enclave ou d’économie ethnique ne soit pas présent, les travaux
d’Alain Tarrius ont traité des réseaux commerçants informels entre le Maghreb et l’Europe, don-
nant naissance à une nouvelle expression de « mondialisation par le bas » (Tarrius, 1992).
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CHAPITRE I LES FONDEMENTS DES THÉORIES MIGRATOIRES CONTEMPORAINES
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entre migration et développement dont nous avons parlé plus haut, Castles a
déjà suggéré que rien ne prouvait que la migration contribue en quoi que ce
soit au développement des régions d’origine. C’est plutôt par des politiques de
développement économique et social que l’on pourra s’attaquer aux problè-
mes de déséquilibres entre les régions du monde.
Les hypothèses de Castles sont encore très pertinentes dans le monde
actuel. Deux courants de recherche se sont particulièrement développés.
D’abord, presque tous les travaux sur les facteurs d’insertion économique sug-
gèrent que la discrimination joue un rôle important dans les difficultés d’in-
sertion de certains groupes d’immigrants, en particulier ceux que l’on appelle
les minorités visibles, selon le vocable en vogue en Amérique du Nord. Les
travaux sur l’insertion économique des immigrants montrent que l’effet net
de l’origine nationale demeure même après le contrôle des autres facteurs,
indiquant ainsi que la discrimination touche certains groupes, notamment
ceux provenant des pays en développement (Piché, Renaud, Gingras, 2002 ;
Richard, 2004). Le deuxième courant porte sur les effets de l’immigration sur
les identités nationales. Ici aussi, les débats sociaux et politiques sont particu-
lièrement virulents entre les tenants du pluralisme et ceux qui pensent que
l’immigration remet en question les valeurs nationales. La montée des partis
d’extrême-droite un peu partout dans le monde s’appuie entre autres sur des
discours anti-immigration, parfois liés à l’islamophobie.
Les théories migratoires ne servent pas qu’à comprendre et expliquer les phé-
nomènes, elles servent également à justifier les choix en matière de politiques
migratoires. Toutes les politiques migratoires du XXe siècle sont fondées sur
un postulat considéré comme immuable : l’immigration est un privilège et
non un droit. Il s’agit du paradigme qui fonde les politiques migratoires sur
les besoins économiques des pays, et donc essentiellement orientées vers le
marché du travail. Il est, en outre, fondé sur le principe de la souveraineté na-
tionale en matière de politiques migratoires (Piché, 2009). Dans ce contexte,
parler de libre-circulation des personnes comme l’a fait Joseph Carens dès
1987 peut paraître téméraire (chapitre 19).
Carens part du principe que le lieu de naissance et les liens de parenté
constituent des contingences naturelles qui sont arbitraires d’un point de vue
moral. Selon lui, l’idée que l’immigration réduirait le bien-être économique
des citoyens actuels ne prévaut pas sur la priorité à l’immigration. En outre,
l’impact de l’immigration sur l’histoire et la culture n’est pas un argument
valable « tant que les valeurs démocratiques libérales fondamentales ne sont
pas menacées ». Sa discussion du principe communautarien, à savoir la justi-
fication de l’exclusion par les droits des communautés à l’autodétermination,
le conduit à poser la question :
Si la liberté de mouvement à l’intérieur d’un État est si importante
qu’elle l’emporte sur les revendications des communautés politiques
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CHAPITRE I LES FONDEMENTS DES THÉORIES MIGRATOIRES CONTEMPORAINES
(23) Pour une étude de cas détaillée de l’Afrique de l’Ouest, voir Kabbanji, 2010.
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LES THÉORIES DE LA MIGRATION
(24) Les « 3 D » correspondent en anglais aux termes « dirty, difficult and dangerous »
(25) Pour une analyse plus approfondie sur les interventions des Nations-Unies en matière de
multilatéralisme, voir Piché (2009).
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CHAPITRE I LES FONDEMENTS DES THÉORIES MIGRATOIRES CONTEMPORAINES
(26) Kabbanji (2011) présente une synthèse détaillée des politiques migratoires dans le contexte
de l’intégration régionale.
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Comme nous l’avons dit, c’est le spectre de la montée des flux migratoires
irréguliers (clandestins) qui façonne une partie du discours politique actuel
et sert à justifier les mesures restrictives. Malheureusement, la recherche
scientifique concernant ces flux migratoires fait défaut. Le texte de Georges
Tapinos (2000) est une exception et complète bien les analyses de Bimal
Gosh, surtout en ce qui concerne les migrations irrégulières (chapitre 21).
Selon Tapinos, examiner les enjeux économiques et politiques de la migration
clandestine, c’est s’interroger sur ce qu’il y a de spécifique dans la migration
clandestine par rapport à la migration régulière. Au-delà des problèmes de
mesure, c’est l’impact économique de la migration irrégulière qui fait souvent
l’objet de débats. Pour l’auteur, les avantages de la migration irrégulière se
trouvent du côté de l’employeur. L’état d’irrégularité est propice à des pra-
tiques discriminatoires, compte tenu de la situation de précarité du migrant
irrégulier et de son faible pouvoir de négociation.
Selon lui, les migrants employés irrégulièrement sont un des éléments de
l’économie souterraine, ils n’en sont pas la cause. Cependant, l’existence d’une
économie souterraine renforce la possibilité de recruter des migrants clan-
destins et ce, d’autant plus que les réseaux de migrants facilitent l’embauche
de ceux-ci dans le secteur informel. À la question posée précédemment par
Borjas concernant l’impact de l’emploi des immigrants clandestins sur l’em-
ploi et les salaires des natifs et des immigrants légaux, Tapinos propose une
réponse positive. La conclusion de Tapinos va dans le sens de celle de Gosh.
En effet, le problème de la maîtrise des migrations ne se pose pas de façon
bilatérale : la gestion de la migration internationale passe par la coordination
entre les gouvernements. Il s’agit donc d’une gestion multilatérale, car selon
Tapinos, il est anachronique d’envisager le contrôle de l’immigration exclusi-
vement en termes de souveraineté.
La période 1960-1980 aura été caractérisée par des confrontations entre di-
verses théories migratoires, chacune réclamant l’hégémonie. En particulier,
aux théories micro-individuelles centrées sur la rationalité économique et
la notion d’équilibre, on a souvent opposé les théories macro-structurelles,
centrées sur la demande de main-d’œuvre migrante créée par les transfor-
mations de l’économie capitaliste mondiale (Wood, 1982). Comme cela est
souvent le cas, les débats théoriques dépendent de la quantité et de la qualité
des données statistiques sur lesquelles ils se fondent. Grâce entre autres au
développement de l’arsenal des analyses de régressions multivariées, et en
particulier les analyses biographiques, les hypothèses sous-tendant les théo-
ries ont pu être testées simultanément. Par exemple, les analyses empiriques
présentées dans l’ouvrage dirigé par Massey (1998), portant sur toutes les ré-
gions du monde (sauf l’Afrique), concluent que chaque théorie explique une
partie du processus migratoire. En outre, ils affirment que certaines théories
semblent plus pertinentes selon la région considérée, et, ajouterions-nous,
selon l’époque historique.
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CHAPITRE I LES FONDEMENTS DES THÉORIES MIGRATOIRES CONTEMPORAINES
(27) Nous reprenons ici les analyses présentées dans Piché, 2004.
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LES THÉORIES DE LA MIGRATION
Genre Genre
Facteurs Réseaux/ Facteurs
macro- Capital micro-
structurels (B1) social (B3) individuels (B2)
Rétroaction/Causalité cumulative
Rétroaction/Causalité cumulative
Retours/transferts
Genre Genre
Facteurs Réseaux/ Facteurs
macro- Capital micro-
structurels (C1) social (C3) individuels (C2)
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CHAPITRE I LES FONDEMENTS DES THÉORIES MIGRATOIRES CONTEMPORAINES
la société d’origine, les facteurs tels que : les niveaux de développement, d’in-
dustrialisation, d’urbanisation et de scolarisation ; les systèmes politiques ; les
politiques de l’État affectant les migrations ; les guerres ; les catastrophes « na-
turelles », etc. Pour la société d’accueil, des exemples de facteurs (C1) seraient
les conditions économiques et démographiques, la segmentation du marché
de travail, le degré de pluralisme, les niveaux de discrimination, d’urbanisa-
tion et de stratification, les politiques gouvernementales et, en particulier, la
demande de main-d’œuvre et les politiques d’immigration. Les travaux de
Sassen, Castles, Gosh, Zolberg et al. et Tapinos identifient plusieurs de ces
facteurs macro-structurels.
Les caractéristiques « pré-migratoires » individuelles (B2) réfèrent essen-
tiellement au capital humain (l’éducation, la qualification professionnelle,
l’expérience de travail), aux origines sociales et aux caractéristiques démo-
graphiques. Il en va de même pour les caractéristiques « post-migratoires »
individuelles (C2) qui comprennent les mêmes caractéristiques qu’au départ,
mais qui doivent être renégociées dans la nouvelle société. Par ailleurs, il faut
ajouter le statut d’immigration qui constitue une variable clé de l’intégration.
Il s’agit, la plupart du temps, de théories mettant l’accent sur le capital humain
(Sjaastad) ou sur les analyses rationnelles des coûts et bénéfices réalisées par
le migrant individuel (Lee).
Les variables de réseaux impliquent les conditions dans lesquelles s’ef-
fectue la migration en tant que tel (B3) et le processus d’intégration dans la
société d’accueil (C3). Dans les deux cas, il s’agit essentiellement du rôle de
la famille, des réseaux formels (les églises, les communautés ethniques, les
syndicats, les associations patronales, etc.) et des réseaux informels (les in-
termédiaires, les amis, etc.), l’ensemble de ces facteurs constituant le capital
social. En général, les réseaux sont supposés faciliter l’émigration (à l’origine)
et l’intégration (à la destination). On retrouve ici les contributions essentielles
de Stark et Bloom, Boyd et Massey. Par ailleurs, en accord avec la critique de
Krissman (2005), ces réseaux peuvent également comprendre des passeurs et
des employeurs peu scrupuleux, contrecarrant les projets des migrants.
Le genre constitue un facteur-clé et se situe à la fois entre les facteurs de
réseau et les facteurs micro-individuels, d’une part, et entre les réseaux et les
facteurs macrostructurels d’autre part. Comme l’ont montré Morokvasic et
Boyd, il ne s’agit pas uniquement de considérer le sexe comme une variable
individuelle comme les autres, mais bien comme une construction sociale
reflétant les rapports hommes-femmes et la division sexuelle du travail tant
dans la société d’origine que dans la société d’accueil.
Tous les types de facteurs mentionnés ici expliquent, chacun à leur ni-
veau, les modalités multiples d’intégration des immigrants (Wilson et Portes).
Ils interviennent également pour comprendre les effets de l’immigration
tant sur les revenus des natifs (Borjas) que sur la structure sociale (Castles et
Kosack). Le schéma fait également une place centrale au temps et à la durée :
le processus d’intégration est fortement fonction de la durée de séjour dans
la société d’accueil, de même que l’impact de la migration ne se comprend
qu’à long terme. Malheureusement, peu d’études incorporent cette dimension
dans leurs analyses.
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Conclusion
Les textes fondateurs présentés ici s’arrêtent à l’an 2000. Est-ce à dire que
depuis cette date il n’y a pas eu de développement théorique important dans
les études migratoires ? Si l’on se fie aux revues de littérature qui ont vu le
jour depuis 2000, on serait tenter de répondre par l’affirmative. Si on ana-
lyse, par exemple, l’ouvrage dirigé par Alejandro Portes et Josh DeWind en
2007, ou encore celui de Corrado Bonifazi, Marek Okolski, Jeannette Schoorl
et Patrick Simon paru en 2008, les thèmes traités ne se démarquent pas de
ceux qu’ont abordés les textes fondateurs. D’une certaine façon, on peut dire
que les chercheurs ont à leur disposition un corpus théorique fort développé
qu’il s’agit maintenant d’approfondir et surtout d’appliquer dans des contextes
historiques et géographiques spécifiques.
Deux dimensions de la migration mériteraient d’être davantage théorisées
dans l’avenir. La première dimension a trait à l’apparition du nouveau para-
digme migratoire dont nous avons parlé, à savoir celui de la mondialisation
des flux migratoires, qui est en train de changer fondamentalement la donne
en ce qui concerne le rôle des migrations internationales dans les sociétés
actuelles. Même si quelques auteurs ont abordé cette question, il reste l’im-
portant défi d’expliquer les tendances actuelles. En particulier, deux ques-
tions doivent être davantage étudiées : (1) quels sont et seront les nouveaux
52
CHAPITRE I LES FONDEMENTS DES THÉORIES MIGRATOIRES CONTEMPORAINES
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