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Rev. hist. archéol. afr.

, GODO GODO, N° 20 - 2010


© EDUCI 2010

CONSTRUCTION DE LA PUISSANCE ECONOMIQUE IVOIRIENNE


ET DEPENDANCE 1960-2010

N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD


Assistant
Filière Histoire
Universite de Cocody - Côte d’Ivoire

RÉSUMÉ

Les cinquante ans d’histoire économique de la Côte d’Ivoire s’écrivent autour de


deux grandes périodes. La période de 1960 à 1980 marquée par une croissance
fulgurante. De 1981 à 2010, l’économie ivoirienne connaît un bilan mitigé qui oscille
entre crise économique, mesures d’ajustements structurels et retour aux taux de
croissance positifs depuis 2004. Les choix fondateurs à la base de ce progrès
relatif, expliquent également la dépendance économique vis-à-vis des partenaires
multilatéraux et bilatéraux, notamment la France. L’avenir de la Côte d’Ivoire réside
dans la diversification des partenaires dans le cadre de la mondialisation et une
politique économique qui favorise les initiatives nationales.
Mots-clés : Capitalisme-socialisme-privatisation-accord de coopération-
aide-dette-bilatéral-multilatéral-croissance-rééchelonnement-dépendance-
indépendance-dévaluation.

ABSTRACT

The fifty years of the economic history of Cote d’Ivoire cover two great periods.
The period of 1960 to 1980 saw a spectacular growth. From 1981 to 2010, Ivorian
economy is experiencing a mixed balance sheet which fluctuates between
economic crisis, structural adjustment measures and return to positive rates since
2004. The founding choices generating this specific progress, also explain the
economic dependence with respect to multilateral and bilateral partners, mainly
France. The future of Côte d’Ivoire is the diversification of partners in the context
of globalization and an economic policy that promote national initiatives.
Keywords: Capitalism-socialism-privatization-cooperation agreement-aid-
debt-bilateral-multilateral-increase-rescheduling-dependence-independence.
20 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

INTRODUCTION

En 1960, à l’indépendance de nombreux pays africains, le monde vit au


rythme de la guerre froide avec deux blocs : le bloc occidental et capitaliste
avec comme leader les Etats-Unis d’Amérique et le bloc communiste dirigé par
l’URSS avec une économie étatique et dirigiste.
Plusieurs choix s’offrent aux pays africains. En 1957, Kwame N’krumah,
Président du Ghana opte pour le socialisme. En 1958, Sékou Touré rompt avec
la France et fait le choix du socialisme en Guinée. Modibo Keita l’imite en 1960 au
Mali.
La Côte d’Ivoire indépendante opte pour le libéralisme économique, se sin-
gularisant ainsi, à un moment où l’appropriation des moyens de production par
l’Etat est populaire auprès de l’intelligentsia africaine. La deuxième orientation
adoptée est la continuité avec la puissance coloniale française. Ce pays bâtit
son économie à travers une étroite coopération avec la France qui se mue à
une dépendance, dont la base légale réside dans les accords de coopération
signés avec la France en 1961. Les performances économiques sont prodi-
gieuses pendant les vingt premières années connues sous le nom de miracle
économique ou les “vingt glorieuses’’. De 1960 à 1980, l’économie ivoirienne
reposant sur l’agriculture est marquée par une croissance rapide. Le produit
intérieur brut de 140 milliards en 1960 passe à 478,8 milliards en 1977-1978.
Le taux de croissance 3,8% en 1960 atteint 11,4% en 1977-1978 quand pour
l’ensemble des pays africains en développement il est en moyenne de 1,8%1.
En dépit des performances, le Président Houphouët-Boigny reconnaît la
fragilité du système quand il déclare : « Plus nous réfléchissons, plus nous
apercevons que notre liberté sera illusoire si nous ne reprenons pas progres-
sivement en mains la gestion de notre économie afin qu’elle ne soit aux mains
des étrangers »2.
Au moment où la Nation ivoirienne célèbre le cinquantenaire de son indépen-
dance, une interrogation s’impose et constitue notre problématique. Pourquoi
le progrès économique se construit-il dans la dépendance notamment avec la
France ? Autrement dit quelle est la philosophie qui sous-tend cette politique
économique ?
Nous ne saurions entamer cette étude sans consulter les ouvrages géné-
raux et les sources. Parlant des sources, le Professeur d’Histoire Pierre Kipré
écrit « …depuis 1970, constate-t-on la réticence des administrations à se des-
saisir de leurs archives jugées sensibles…la littérature grise et la presse offi-
cielle constituent parfois aujourd’hui l’essentiel de la documentation »3.

1 - Arsène Timothée Usher assouan, Sauvons la Côte d’Ivoire mon message à la Nation, Victoria, Edition
trafford, 2009, 156p ; p.25.
2 -Ibidem, p.22.
3 -Pierre kipre, Côte d’Ivoire la formation d’un peuple, Bayeux, sidex-ima, 2005, 291p ; p.10.
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21

Le constat est certes d’actualité mais aidé par la commémoration du


cinquantenaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, de nombreux chiffres et
analyses sont publiés sous forme de communications, interviews et discours.
Les supports de diffusion sont les journaux tels que l’Inter, notre voie, Fraternité-
Matin. Il y a également la Côte d’Ivoire en chiffres (éditions 1980-1981 et 2007)
qui est un document indispensable pour qui veut écrire l’histoire économique de
la Côte d’Ivoire. Nous citons aussi les ouvrages de Pierre Kipré (Côte d’Ivoire
formation d’un peuple), Jacques Baulin (la politique intérieure d’Houphouët-
Boigny), Samir Amin (le développement du capitalisme en Côte d’Ivoire),
etc. Ces ouvrages permettent d’appréhender la philosophie qui sous-tend la
politique du Président Houphouët-Boigny.
Par rapport à l’analyse de la documentation, nous articulons notre étude
autour de trois axes. Les fondements de la dépendance ; l’évolution économi-
que à travers les “vingt glorieuses’’ et la nouvelle dépendance. Conscient de ce
que les options stratégiques de 1960 ne doivent plus prospérer, nous faisons
pour terminer une réflexion sur les perspectives après avoir analysé les propo-
sitions du Gouvernement.
I. LES FONDEMENTS DE LA DÉPENDANCE

Dès le départ, les dirigeants ivoiriens optent pour la continuité en matière


économique c’est-à-dire, une politique résolument libérale. Cette option
est renforcée par les accords de coopération de 1961. Comprendre cette
dépendance, tel est l’intérêt de cette partie.
1. COMPRENDRE LA PRÉFÉRENCE POUR L’ÉCONOMIE LIBÉRALE
Dans la perspective très proche de la proclamation de l’indépendance de la
Côte d’Ivoire, Houphouët-Boigny ne relègue pas les questions économiques
au second plan. Mieux, il rassure les chefs d’entreprises français. Le 16 juillet
1960, il s’adresse à 300 chefs d’entreprises avec ses collaborateurs Ivoiriens,
Philippe Yacé, Président de l’Assemblée législative et Auguste Denise ministre
d’Etat. Sont également présents à ses côtés les ministres Saller, Monnet et
Miller.4 La teneur de son discours est la suivante : « Je peux vous donner
l’assurance que nous voulons bâtir la Côte d’Ivoire dans la paix et l’amitié de
tous ceux qui vivent ici. L’indépendance ne sera pas l’anarchie, mais l’ordre, la
discipline et le travail, la sécurité des biens et des personnes »5.
S’adressant à travers les chefs d’entreprises à la population française, il
insiste sur leur rôle déterminant auprès de leur personnel européen pour
maintenir la sérénité des esprits. Il rassure également sur la politique libérale
qu’il veut conduire.

4 -Raphaël Saller, Georges Monnet et Jean Millier sont tous de nationalité française. Ils sont respectivement Ministres
de l’Economie des Finances et du Plan ; de l’Agriculture ; des Travaux publics.
5 -Marchés tropicaux et Méditerranéens, n°767, du samedi 23 juillet 1960, p.1655.
22 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

On déduit à travers cette rencontre qu’Houphouët-Boigny compte énormément


sur les hommes d’affaires français et qu’il accorde une primauté au secteur privé
dans l’animation de la vie économique.
Il est vrai que le code d’investissement de 19596 constitue le document qui
détermine le régime des investissements privés en Côte, mais l’exposé fait par
Houphouët-Boigny devant les députés en 1961 a le mérite de donner les gran-
des idées qui sous-tendent son choix économique libéral.
En effet, le 03 janvier 1961, devant l’Assemblée nationale, le Président
Houphouët-Boigny prononce un important discours de politique générale.
En matière de politique économique, il déclare : « Nous nous proposons de
tout faire pour construire la puissance économique et financière de l’Etat, sans
que pour autant l’individu soit sacrifié à cet Etat »7.
Concernant les transferts des capitaux, il entend poursuivre la politique écono-
mique suivie en donnant la possibilité de les transférer ainsi qu’une partie des bé-
néfices. Il souligne également que la Côte d’Ivoire demeurera dans la zone franc.
Selon lui, 95% de la population vivant de l’agriculture, l’effort de développe-
ment devrait porter sur ce secteur tout en le diversifiant. Il promet de ne pas
négliger l’industrie et surtout le secteur électrique8.
Pour la réalisation de cet ambitieux programme, il donne sa recette en ces
termes : « …Ce programme réclame à côté de l’effort privé, un effort prépondé-
rant de l’Etat qui se manifestera sous des formes différentes : en premier lieu,
pour des investissements publics faisant appel aussi bien à l’aide extérieure
qu’au crédit de la Nation ; en deuxième lieu par des participations aux entre-
prises utilisant les ressources naturelles du pays, participations qui seront pro-
portionnelles à l’importance de ces ressources ; en dernier lieu par la création
d’entreprises d’Etat… »9.
Cette expérience qu’il qualifie de neuf doit aboutir au capitalisme d’Etat gage
selon lui de la paix sociale, car l’Etat devenant riche, il a les moyens de lutter
contre les disparités régionales. Il craint qu’en laissant les citoyens au jeu de la
libre concurrence comme l’exige le système libéral, la trop grande inégalité ne
trouble la paix sociale.

6 -La loi n°59-134 du 3 septembre 1959, portant code des investissements privés offre plusieurs avantages.
Entre autres, nous citons les avantages douaniers sous forme d’exonération des droits d’entrée. Il y a aussi
une exonération quinquennale des impôts sur les bénéfices industriels et commerciaux, sur les patentes
accordées aux entreprises ayant obtenu l’agrément du Gouvernement. Certaines entreprises ayant une im-
portance toute particulière peuvent bénéficier d’un régime fiscal de longue durée., etc.
7 - Marchés tropicaux et Méditerranéens, n°792, du samedi 14 janvier 1961, p.83.
8 - Idem
9 - Idem
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23

On relève que le système économique initié par Houphouët-Boigny accorde


une place importante à l’Etat, qui en dehors de ses fonctions régaliennes devient
entrepreneur au même titre que les opérateurs économiques.
Pour mettre à exécution cette politique, la coopération extérieure est
indispensable d’où les accords de coopération signés avec la France.
2. LES ACCORDS DE COOPÉRATION DE 1961 OU LE PACTE DE LA
DÉPENDANCE
Les accords franco-ivoiriens signés en 1961 répondent aux besoins de
renforcement des capacités économiques sociales et sécuritaires de la jeune
Nation ivoirienne. Ils portent sur de grands domaines tels que les ressources
humaines et le contrôle des capacités institutionnelles ; la défense et la sécurité ;
la diplomatie, l’éducation, la culture ; les télécommunications, le transport ;
l’économie, la finance et la monnaie, etc.
Dans le cadre de cette étude, nous n’analyserons pas tous les secteurs.
Nous proposons de mettre en avant des aspects de ces accords qui à nos yeux
créent les conditions de la dépendance.
Au titre de l’accord de coopération en matière économique, monétaire et
financière entre la République française et la République de Côte d’Ivoire, il est
mentionné à l’article premier du titre préliminaire. « La République de Côte d’Ivoire
déclare vouloir poursuivre son développement en étroite association avec la
République française et les autres pays de la zone franc, tout en bénéficiant des
possibilités d’échanges qui s’offrent à elle dans les autres pays du monde »10.
L’article 8 du titre 2 précise : « Conformément au souhait exprimé par la
République de Côte d’Ivoire, la République française continuera, pendant une
durée de cinq ans renouvelable, à apporter son aide et son assistance à la
République de Côte d’Ivoire pour son développement économique et social et
le fonctionnement de ses services publics. L’aide de la République française
se manifestera chaque année notamment par la réalisation d’études, l’envoi
d’experts et de techniciens, l’octroi de concours financiers et la formation des
cadres… »11.
En son article 9, il est écrit : « La partie du concours financier pour le développement
économique et social affectée à des études, à des achats d’équipements ou des
fournitures et l’exécution des travaux donnera lieu à marchés réservés, en principe
aux entreprises de nationalité française ou ivoirienne »12.

10 -Fraternité-Matin, numéro spécial, accords de coopération, mardi 21 décembre 2004, p.5.


11 -Idem
12 -Idem
24 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

Selon Mamadou Koulibaly13 qui a consacré des écrits sur cette question,
« la lecture des dits accords témoigne de la volonté de poursuite de l’idéologie
économique coloniale de l’étatisme français même après la proclamation
officielle des indépendances politiques… »14.
Nous estimons que ces dispositions donnent à la France la possibilité d’être
à tous les niveaux de la vie nationale avec la bienveillance d’Houphouët-Boigny
qui met tout en œuvre pour protéger les intérêts français. Qu’on en juge avec
cette politique menée en 1962.
Voulant réduire le train de vie de l’Etat, le Gouvernement décide de
repartir les sacrifices au niveau de tous les travailleurs du public et du privé.
Les fonctionnaires sont invités à abandonner une part de leur émolument au
bénéfice de l’Etat. Si les salariés gagnant moins de 30.000 francs par mois sont
épargnés, les cadres payent un lourd tribut. La loi votée le 15 janvier 1962 par
l’Assemblée nationale et appelée « contribution nationale » impose 5 à 10%
de surcharge fiscale pour les salariés et 1% à la charge des employeurs (en
majorité des expatriés) du secteur privé. Face aux critiques, l’ordonnance 62-
92 du 03 avril majore de 50% la part patronale, portée ainsi à 1,50%15.
Houphouët-Boigny fait une autre lecture de sa politique d’ensemble. A l’occasion
de sa visite officielle en France en 1961, Houphouët-Boigny prononce une allocu-
tion et répond aux questions des journalistes. Extrait « ...si je n’étais pas passé par
l’école de Paris, au Gouvernement, je me serais laissé entrainer par une africanisa-
tion rapide, au rabais ; j’aurais installé la Côte d’Ivoire dans la médiocrité comme le
sont hélas certains pays qui ont accédé avant nous à l’indépendance mais qui pa-
taugent aujourd’hui, sinon dans la médiocrité…dans l’insécurité politique totale…
Mais j’ai confiance dans les vertus de mon pays, nous savons patienter ; le but est
lointain, ménageons notre monture et nous arriverons à bon port… »16.
Une chose est certaine, le capital étranger, notamment français tire un énorme
profit de la situation favorable. En 1965, l’ensemble des secteurs secondaires et
tertiaires se trouvent sous contrôle du capital étranger. Quelques chiffres. L’analyse
de la liste des électeurs aux chambres de commerce et d’industrie en 1964-1965
montre l’étendue de la présence étrangère française dans l’économie.
Pour les élections consulaires, les entreprises sont divisées en trois catégories.
La première comprend les représentants des sociétés ayant un chiffre d’affaires
supérieur à 500 millions de francs CFA, la seconde, celles réalisant un chiffre

13 -Mamadou koulibaly est économiste agrégé et enseignant-chercheur à l’Université d’Abidjan-Cocody. Il


est le 3ème Vice-président du Front Populaire Ivoirien le parti au pouvoir (fpi). Depuis le 21 janvier 2000, il est
Président de l’Assemblée nationale après avoir été élu député de Koumassi le 10 décembre 2000.
14 -Mamadou koulibaly, Les servitudes du pacte colonial, Abidjan, ceda/nei, 2005, 223p ; p.33.
15 -Jacques baulin, La politique intérieure d’Houphouët-Boigny, Paris, Edition Eurafor. Press 1982, 244p ;
p.109. N.B La date de publication ne figure pas dans l’ouvrage.
16 -Extrait des allocutions de son excellence M. Félix Houphouët-Boigny, Président de la République de
Côte d’Ivoire à l’occasion de son voyage officiel en France en juin 1961, pp.28-29.
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d’affaires de 100 à 300 millions, et la troisième, des entreprises se situant dans


une fourchette de 12 à 99 millions de francs CFA.
Cela donne le partage suivant pour les élections du 03 mai 1964 à la Chambre
de commerce de Côte d’Ivoire.
Français Ivoiriens Divers
1 groupe
er
67 01 -
2 ème
groupe 177 11 01
3 ème
groupe 33 518 91
Source : J. Baulin, op.cit., p.158.

Pour les élections de 1965 à la Chambre d’industrie, la composition se pré-


sente comme suit.
Français Ivoiriens Divers
1 groupe
er
24 01 (Sonitra) -
2 ème
groupe 79 01 02
3 ème
groupe 124 18 07
Source : J. Baulin, op.cit., p.158.

L’analyse de Samir Amin sur la question est sans équivoque. Il parle de


croissance sans développement et il explique : « …c’est-à-dire croissance en-
gendrée et entretenue de l’extérieur, sans que les structures socio-économi-
ques, mises en place permettent d’envisager un passage automatique à l’étape
ultérieure, celle d’un dynamisme auto-centré et auto-entretenu »17. Il estime en
1965 que l’épargne privée ivoirienne n’a pas pris la relève de l’étranger, comme
le suppose la théorie du passage graduel de l’économie impulsée de l’extérieur
à l’économie auto-dynamique. Il ne se dit pas surpris « puisque la domination
du capital étranger exclut la promotion d’une véritable bourgeoisie d’affaires
locale. L’épargne publique locale, si elle a continué à faire des progrès, n’a pas
non plus pris la relève de l’impulsion extérieure » 18
Cette politique conjuguée à l’effort des nationaux fonctionnaires et paysans
ainsi que des autres Africains a permis à la Côte d’Ivoire une longue période de
croissance connue sous le nom de miracle économique.
II. L’ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE 1960-2010

Il est quasiment impossible d’écrire l’histoire économique de la Côte d’Ivoire


sans évoquer son âge d’or connu sous le nom des vingt glorieuses ou la période
du miracle économique. Il y a également la grande crise économique qui suit
avec les mesures d’ajustement structurel qui créent la néo-dépendance.

17 -Amin samir, Le développement du capitalisme en Côte d’Ivoire, Paris, les Editions de minuit production,
1967, 327p ; p.281.
18 -Ibidem, p.287.
26 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

1. LES VINGT GLORIEUSES OU L’ÂGE D’OR DE L’ÉCONOMIE IVOIRIENNE


Pendant les deux décennies 1960-1970 et 1970-1980, la Côte d’Ivoire connaît
un rythme de croissance soutenue. Grâce aux politiques soutenues par l’Etat
depuis le début de l’indépendance, la Côte d’Ivoire est devenue un pays impor-
tant en matière agricole. Au départ le binôme café-cacao constitue le poumon de
l’économie qui compte parmi les plus grands producteurs de ces produits dans le
monde. Suivant une politique de diversification, d’autres spéculations telles que
l’hévéa, l’huile de palme, le coton, la canne à sucre seront initiées.
En 1960, la production de café était de 185.500 tonnes en 1980, elle at-
teint 200.000 tonnes. Le prix garanti au paysan passe de 90 francs CFA le
kilogramme en 1960 à 300 francs CFA en 1980. La manne financière des pay-
sans passe de 16 milliards 695 millions à 60 milliards de francs CFA. Pour le
cacao, la Côte d’Ivoire produisait 93605 tonnes en 1960 avec un prix garanti
par kilogramme aux producteurs qui oscille entre 74 et 89 francs CFA. Pour
cette année, ils engrangent 7 milliards 956 millions de francs CFA. En 1980, la
production est de 336.000 tonnes avec un prix garanti aux producteurs de 300
francs CFA et 100 milliards 800.000 millions qu’ils obtiennent. Pour la première
fois en 1978, la Côte d’Ivoire est passée au rang de premier producteur mondial
avec une production de 312.000 tonnes19.
Le secteur industriel connaît une progression impressionnante au cours des
années qui ont suivi l’indépendance. De 1960 à 1970, la production industrielle
croit à un taux moyen de 15% par an tandis que la part de l’industrie dans la
production intérieure brute passe de 15,2% à 25%. En 1977, le secteur indus-
triel réalise un chiffre d’affaire total de 459 milliards de francs CFA et emploie
63.000 travailleurs. En 1979, on dénombre 619 entreprises de production qui
distribuent des salaires à hauteur de 75,2 milliards de francs CFA20.
De 1960 à 1980, le taux moyen de croissance économique est de 7% com-
paré à un taux d’accroissement démographique de 3,8%. Durant cette même
période, le pays consacre 7% de son budget à la santé, 43% à l’éducation
contre respectivement 4,5% et 25% dans les autres pays africains. De 1960 à
1978, le taux de scolarisation passe de 15 à 70%.21
En dépit de ces résultats somme toute satisfaisants, les grandes entreprises
sont le fait des capitaux étrangers. Ces entreprises, bien qu’opérant en Cote
d’Ivoire, dépendent pour la plupart des centres de décision situés en France
principalement et dans le reste du monde secondairement. Une étude publiée
par la Côte d’Ivoire en chiffres, édition 1980-1981 nous donne une idée de cette
dépendance. La répartition du capital social des entreprises par pays d’origine

19 Ministère de l’Economie, des Finances et du Plan, Côte d’Ivoire en chiffres, éditions 1980-1981, Abidjan,
Société Africaine d’Edition, 1980, 324p ; p.119 et pp.125-126.
20 -Ibidem
21 -Usher assouan, op.cit., p.25.
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donne 45,57% à la partie ivoirienne dont 32,38% pour l’Etat et 13,19% pour les
privés ivoiriens. Sur les 54,43% revenant aux parties étrangères, la France se
trouve à la première place avec 31,94% suivie de la Suisse 5,49%. Les autres
rangs sont occupés respectivement par les USA, 2,8% ; le Liban, 2,77% ; le
Benelux, 2,46% ; la Grande Bretagne, 1,66% ; l’Allemagne de l’ouest, 1,57% ;
le Japon, 1,66%, etc. le premier pays africain qui occupe la neuvième place est
la Haute-Volta avec 0,62%22.
A partir de 1981, l’élan de ces années glorieuses connaît un essoufflement
plongeant le pays dans une longue et grave crise.
2. LA CRISE ÉCONOMIQUE, L’AJUSTEMENT STRUCTUREL ET
LA NÉO-DÉPENDANCE 1980-2010
La crise économique qui débute à la fin de 1980 est le résultat de plusieurs
facteurs. Un communiqué du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) datant du
03 mai 2010 incrimine l’environnement international et les catastrophes naturels
dans la survenue de la crise économique. Il cite la hausse des prix du pétrole, la
baisse des prix des matières premières agricoles, la sécheresse, etc.23
Cette analyse n’est pas erronée mais insuffisante à nos yeux. Les facteurs
externes ne sauraient expliquer à eux seuls les difficultés économiques de la
Côte d’Ivoire. En effet, à l’indépendance, selon l’option voulue par Houphouët-
Boigny, l’Etat de Côte d’Ivoire se veut entrepreneur et crée des sociétés d’Etat
connues sous l’acronyme « sode ». Au total il crée 33 sociétés d’Etat, 200
sociétés d’économie mixte, 33 établissements publics.24 Certaines d’entre
elles, de par leurs implantations doivent lutter contre les disparités régionales.
Toutes, tout en luttant contre le chômage doivent réaliser des bénéfices.
Malheureusement la mauvaise gestion conduit l’Etat à les subventionner pour
les maintenir, accroissant ainsi la pression sur les finances publiques déjà
ébranlées par la conjoncture internationale défavorable.
La création des “sode’’ a nécessité des emprunts sur les marchés financiers
internationaux. Le retour sur investissement n’ayant pas été réalisé, l’Etat s’est
trouvé endetté. A propos de la dette, dans une étude conduite par Fraternité-
Matin à l’occasion du cinquantenaire de la République de Côte d’Ivoire et
dénommée les pages du cinquantenaire, nous lisons sous la plume de Gooré
Bi Hue que « la dette contractée par l’Etat central ne représente qu’en réalité
35% de la dette totale du pays. Les 65% résultent des passifs des sode »25.
Le professeur Kipré explique une des difficultés économiques de la Côte
d’Ivoire par sa trop grande dépendance des matières premières. Il écrit « Au
plan agricole, la Côte d’Ivoire reste prisonnière du comportement des matières

22 - Ministère de l’Economie, des Finances et du Plan, op.cit., p.191.


23 - Communiqué du pdci-rda portant sur la politique de privatisation d’Houphouët-Boigny à Bédié. In Le Nouveau
Réveil, n°2511, du mardi 4 mai 2010, p.6.
24 - Fraternité-Matin, n°13713, du samedi 24, dimanche 25 juillet 2010, p.3.
25 - Gooré Bi HUE, « Dette publique : les grands épisodes de l’enlisement ». In Fraternité-Matin, n°13713, p.3.
28 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

premières agricoles. Bien que leader du commerce interafricain, le pays reste


dépendant surtout de la demande européenne en matières premières agricoles.
65,5% des exportations ivoiriennes en 1995 et encore 50,6% en 1999 »26. Selon
lui, l’extraversion économique que dénonçait Samir Amin trente ans plus tôt
demeure inchangée au moment où la mondialisation de l’économie impose un
autre modèle de développement27.
Dès 1983, la Côte d’Ivoire entre donc en négociations pour obtenir des faci-
lités pour le remboursement de sa dette à travers son rééchelonnement28. Les
institutions de Bretton Woods (Banque Mondiale et Fonds Monétaire Internatio-
nal) exigent de l’Etat une réduction de son train de vie qui passe par le blocage
des avancements des fonctionnaires. Le pic de ses mesures est atteint en 1990
lorsque le Président Houphouët-Boigny décide de façon unilatérale de réduire
le salaire des fonctionnaires et des travailleurs du secteur privé. Face au sou-
lèvement populaire, la mesure est retirée. Alassane Dramane Ouattara, alors
Gouverneur de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest (BCEAO)
est appelé et prend la tête d’un Comité interministériel de stabilisation et de
relance économique. Après la réélection d’Houphouët-Boigny en 1990, il est
nommé Premier Ministre.
Durant son passage au Comité interministériel et à la primature, il prend des
mesures d’austérité. Nous citons entre autres décisions :
- La vente aux enchères de plus de trois milles véhicules administratifs;
- Un contrôle renforcé des baux administratifs ;
- Un recensement des effectifs de la fonction publique, en vue d’éliminer les
employés fictifs ;
- Une réduction des frais de transports et de missions, des dépenses d’eau,
d’électricité et de téléphone ;
- Un programme d’encouragement des départs volontaires à la retraite ;
- La fermeture d’un grand nombre d’ambassades de la Côte d’Ivoire à
l’étranger29.
De son passage à la primature, on retient aussi la réduction des salaires
des nouveaux enseignants instaurant à diplôme égal, différence de traitement.
Les étudiants ne bénéficient plus de la gratuité du transport à travers des cars
spéciaux. Ils sont invités à payer mensuellement des cartes de bus.
La Côte d’Ivoire est donc sous ajustement structurel à travers toutes ses
mesures mais le volet marquant de cette politique concerne les privatisations
à travers lesquelles l’Etat se désengage totalement ou partiellement du capital
des entreprises où il est majoritaire. Lors d’un Conseil des Ministres en 1992, le
26 -Pierre kipre, op.cit., p.244.
27 - Ibidem
28 - Le rééchelonnement est l’établissement sur une période plus longue que prévue, du remboursement et
des intérêts de la dette contractée vis-à-vis des créanciers.
29 - Lemassou Fofana, Côte d’Ivoire la longue marche du RDR (Rassemblement des Républicains), Hérissey à Evreux,
Edition SEPIA, 2009, 17p ; p.105.
CONSTRUCTION DE LA PUISSANCE ECONOMIQUE IVOIRIENNE...
29

Gouvernement adopte le schéma de privatisation qui consiste à maintenir ses


parts à hauteur de 20%, à céder 31% au privé ivoirien et à fixer la participation
du privé étranger à un maximum de 49%30.
Les privatisations ont pour objectif d’améliorer les performances des
entreprises grâce à une meilleure productivité et une plus grande compétitivité,
de réduire les subventions de l’Etat au bénéfice des secteurs productifs, de
maximiser les ressources pour le budget et accroitre la participation du secteur
privé au développement et au financement des activités économiques.
L’économie connaît une embellie à la suite de la dévaluation du franc CFA
de 50% le 12 janvier 1994. Les taux de croissance sont fortement positifs avec
respectivement 2% en 1994, près de 7% en 1995 et 6% en moyenne sur la
période 1994-199831. La privatisation se poursuit malgré la bonne tenue de
l’économie.
Une étude de la Banque Mondiale a démontré que sur la période 1982-1988,
les subventions de l’Etat aux sociétés d’Etat, sociétés à participation financière
publique se sont élevées à 165 milliards pour des résultats d’exploitation de
39 milliards. Les sociétés dans lesquelles l’Etat détient 100% des actions ont
accusé une perte de 85 milliards. Par contre, les entreprises à participation fi-
nancière publique où l’Etat était minoritaire et le privé majoritaire ont réalisé un
bénéfice cumulé de 134 milliards de francs CFA à la même période32. De 1990
à 1999, 80 entreprises sont privatisées. En termes financiers, le programme
rapporte 298 milliards à l’Etat33.
Si certaines opérations ont du succès, force est de reconnaître que la
répartition du capital telle que décidée par le Conseil de Ministre de 1992
n’a pas été toujours traduite en acte comme le prouve celui de la Compagnie
Ivoirienne d’Electricité (CEI). Dans le cas de cette entreprise, la majorité du
capital (51%) est détenu par un consortium étranger conduit par le groupe
français Bouygues34. Le secteur stratégique de l’électricité est dans les mains
étrangères créant une dépendance du pays vis-à-vis de l’extérieur.
Sur la question, le Professeur Mamadou Koulibaly déclare sans ambages
sous forme de confidence en ces termes : « Les privatisations en Côte d’Ivoire
ont vu arriver sur le marché ivoirien des grandes entreprises qui n’achetaient
qu’au gré à gré sans appel d’offres les entreprises publiques ivoiriennes mises
en vente. Belle époque où Alassane Ouattara était Premier Ministre… ça été
une belle foire et un fiasco, toutes ces pseudo –privatisations. Bédié, alors
Président de l’Assemblée Nationale, prenant conscience de la grande braderie
de Ouattara, mobilisent le Parlement qui demande une co-décision ou une
supervision.. Mais, refus de Ouattara. Dans cette ambiance, Houphouët-Boigny
30 - Fraternité-Matin, n°8769, du samedi et dimanche 9 janvier 1994, p.2.
31 - Communiqué du pdci-rda portant sur la politique de privatisation d’Houphouët-Boigny à Bédié, op.cit., p.6.
32 - Idem
33 - Idem
34 - Fraternité-Matin, n°8769, op.cit., p.2.
30 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

meurt et Bédié arrive au pouvoir mais, il lui est reproché de ne pas avoir empêché
que les Américains (qui ont fini par gagner la guerre du cacao à la fin des
années 80), évincent, selon les officiels de Paris, les entreprises françaises…
Puis arrive Gbagbo qui annonce dans son programme de gouvernement vouloir
en finir avec les vestiges du protectionnisme colonial…35.
A toute fin utile, nous soulignons que le contrat de dix ans de l’entreprise
Bouygues arrivé à expiration a été reconduit par le régime du Front Populaire
Ivoirien (FPI) au pouvoir sans appel d’offres.
Laurent Dona Fologo actuel Président du Conseil Economique et Social s’in-
surge contre les mesures d’ajustement structurel des institutions de Bretton
Woods avec leur politique de privatisation. Il fait cette déclaration au colloque
de San-Pédro organisé à l’occasion de la commémoration du cinquantenaire
de l’indépendance de la Côte d’Ivoire et portant sur l’économie : « Sans être
économiste nos Etats dépouillés, il n’y avait plus d’interlocuteur face aux multi-
nationales dont le budget vaut celui de certains Etats africains »36
La Côte d’Ivoire, pour résoudre récemment la question du délestage dans la
fourniture d’électricité décide de relancer le projet de construction du barrage
de Soubré au Centre-ouest. Le partenaire sollicité est la Chine qui ne pose
aucune condition. Or, la Côte d’Ivoire n’est plus autorisée à contracter de
nouveaux prêts lourds sans l’aval des institutions de Bretton-Woods.37 A bien
d’égard, la trop grande présence des institutions de Bretton Woods dans la vie
économique nationale accroit la dépendance.
Un fait jamais démenti rapporté par le journal gouvernemental Fraternité-
Matin situe la dépendance de la Côte d’Ivoire vis-à-vis de la France qui est son
“notaire’’ auprès des clubs de Paris et de Londres.38 Pour expliquer l’absence du
port d’Abidjan au 3ème forum organisé par le cabinet PKD conseil39 à Shanghai
en Chine, le journal sous la plume de F.M Bally donne cette information. « A la
deuxième édition du forum (18 au 22 mai 2009), les dirigeants du Port avaient
pris l’engagement de revenir pour finaliser en août dernier, le lancement d’une
ligne maritime directe entre le port de Shanghai, premier au monde et celui
d’Abidjan. En outre, les chinois, en plus de vouloir participer à la rénovation
du terminal de pêche, devaient investir dans d’autres développements du port
pour lui permettre de doubler son trafic…tous ces projets sont tombés à l’eau
car ils pourraient faire ombrage au groupe Bolloré, l’ogre français…politique-
ment, Vincent Bolloré, le patron du groupe, est un ami de Nicolas Sarkozy »40.

35 - Mamadou koulibaly, op.cit., p.15.


36 - Extrait de l’allocution de Laurent Dona Fologo au colloque de San-Pédro sur l’économie. In Fraternité-Matin,
n°13649, du samedi 8 et dimanche 9 mars 2010, p.4.
37 - Ferro Bally, “Deux obstacles à la conclusion de partenariat’’ In Fraternité-Matin, n°13670, du vendredi 4 juin
2010, p.2.
38 - le club de Paris regroupe les créanciers publics et le club de Londres, les créanciers privés.
39 - C’est un cabinet qui met en contact sociétés d’Etat ou opérateurs privés ivoiriens et entreprises publiques
chinoises.
40 -Ferro bally « Deux obstacles à la conclusion de partenariat ». In Fraternité-Matin, n° 13670, op.cit., p.2.
CONSTRUCTION DE LA PUISSANCE ECONOMIQUE IVOIRIENNE...
31

Une mission de promotion conduite par le Ministre de l’Economie et des


Finances, Charles Diby en juillet 2010 en France permet de noter le poids
des hommes d’affaires français dans l’économie ivoirienne. La Côte d’Ivoire
enregistre l’une des plus fortes implantations françaises en Afrique avec près
de 700 entreprises dont 140 filiales ou à participation française fournissant à
elles seules 40.000 emplois et plus de 500 Petites et moyennes entreprises
(Pme). Ces entreprises contribuent pour 1/3 au produit intérieur brut. Malgré la
crise militaro-politique, la France est demeurée le premier investisseur étranger
avec des investissements d’environ 176 milliards de francs CFA.41
Lisons la déclaration faite par le conseiller économique et commercial de
l’Ambassade de la France en Côte d’Ivoire, Jean Dollé sur l’état des relations
économiques entre la Côte d’Ivoire et la France. « Nos exportations en direction
de la Côte d’Ivoire restent solides et ont représenté plus de 16% des exportations
françaises. Sur les quatre premiers mois de 2010… Notre premier débouché
en zone franc c’est la Côte d’Ivoire devant le Sénégal. Elle est le troisième
débouché d’Afrique subsaharienne en 2009 après le Nigeria, l’Angola »42. Le
modèle économique dépendant est incontestable. Quelle solution face à cette
politique économique ?
III. LES PERSPECTIVES

Nous n’avons pas la prétention d’être un pionnier dans les propositions pour
sortir de la dépendance. Le Front Populaire Ivoirien, dès son arrivée au pouvoir
en octobre 2000 lance le slogan de la refondation de la Nation ivoirienne qui
prend en compte tous les secteurs de la vie nationale (politique, économique,
sociale). L’aspect économique fera ici l’objet d’une analyse suivie de réflexion
que nous voudrons engager autour de quelques pistes de solutions.
1. LE MODÈLE ÉCONOMIQUE DE LA REFONDATION
A la faveur du colloque international et pluridisciplinaire sur le cinquantenaire
de la Côte d’Ivoire, organisé à Yamoussoukro durant la première semaine d’août
2010, une communication est faite par le Directeur Général de l’Economie,
membre important du Front Populaire Ivoirien au pouvoir. Elle porte sur le
modèle économique de la refondation baptisé la politique de l’orphelin43.
Selon lui, l’analyse des cinquante ans d’Histoire de la Côte d’Ivoire doit être
scindée en trois parties. La première qui part de 1960 à 1980 est marquée par
une relative prospérité avec un modèle économique calqué sur le modèle colonial
caractérisé par l’agriculture d’exportation. La deuxième période, de 1980 à 2000
est marquée par la poursuite du modèle colonial avec une forte dépendance ex-
térieure. Il conclut que ce système s’est effondré en 200044. Le nouveau modèle,
41 -Fraternité-Matin, n°13731, du lundi 16 août 2010, p.15.
42 - Idem
43 -L’orphelin, c’est celui qui a perdu son père et sa mère ou l’un des deux. A travers cette image le Gouvernement
demande aux Ivoiriens de compter sur eux-mêmes.
44 - Extrait de la communication du Directeur général de l’Economie. In Notre Voie, n°3649, du jeudi 5 août 2010, p.3.
32 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

selon le conférencier entre en scène à partir de 2001 car soutient-il « on ne peut


pas devenir indépendant avec un modèle économique dépendant »45.
Le modèle économique tourne autour de la philosophie dite de l’orphelin
qui consiste à compter sur ses ressources propres. C’est le sens de la notion
du budget sécurisé qui est élaboré en 2001 par le Ministre de l’Economie et
des Finances Bohoun Bouabré. En terme de résultat, le Directeur général de
l’Economie nous donne des chiffres que nous notons : « A partir de 2001, grâce
aux réformes entreprises dans des secteurs clés de notre économie et aux
mesures d’assainissement des finances publiques, les ressources ont commencé
à augmenter et on a enregistré d’importantes plus-values. Les recettes fiscales
qui dépassaient à peine les 450 milliards de francs CFA ont plus que doublé
aujourd’hui et se situent à plus de 900 milliards de francs CFA. Quant aux recettes
douanières, elles étaient à peu près de 500 milliards de francs CFA en 2000, elles
se situent à plus de 900 milliards de francs en 2009 »46.
L’autre acception de la philosophie de l’orphelin, c’est la diversification des
partenaires extérieurs, et sur cet aspect Simone Ehivet Gbagbo47 est très
explicite. En atteste, son intervention du 30 avril 2010 à l’occasion du 20e
anniversaire de la fête de la liberté48. « Ce que refonder veut dire : la refondation
à l’épreuve du pouvoir », tel est le thème de sa communication. Elle accuse le
Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) d’avoir opté pour une indépendance
sous tutelle. Elle affirme que le PDCI a fait de la Côte d’Ivoire « la chasse
gardée de la France »49. Selon elle, le FPI s’est assigné deux objectifs dans
les rapports de la Côte d’Ivoire avec le monde extérieur, y compris la France.
« Indépendance réelle et souveraineté nationale et internationale…la refondation
dans ce domaine vise à mettre fin à tous les accords de coopération perpétuant
le pacte colonial dans nos relations avec la France » souligne-t-elle.50.
L’objectif, déclare-t-elle est de faire en sorte que la Côte d’Ivoire coopère
librement avec tout pays et tisse des relations diplomatiques avec tout Etat
« selon ses propres choix, ses intérêts et ses objectifs. Ce programme qu’elle
qualifie de courageux, d’ambitieux, et de révolutionnaire doit conduire le pays
dans la modernité et le concert des nations indépendantes et prospères »51.
Comment se traduit cette politique en acte ? Nous procédons par une ap-
proche comparative pour mieux apprécier cette politique. En 1978, au titre de
l’aide52 publique bilatérale, les partenaires de la Côte d’Ivoire sont l’Allemagne
de l’Ouest, la France, les USA, la Grande-Bretagne, le Canada. Au niveau de

45 - Fraternité-Matin, n°13722, du mercredi 4 août 2010, p.5.


46 - Extrait de la communication du Directeur général de l’Economie, op.cit., p.3.
47 Simone Ehivet Gbagbo, épouse du chef de l’Etat ivoirien est universitaire et Vice-président du fpi.
48 - Le 30 avril 2010, la Côte d’Ivoire renoue avec le multipartisme. Le FPI considère cette date comme le jour de la
libération du peuple ivoirien d’où les manifestations organisées à cette date chaque année.
49 - Extrait de la communication de Simone Ehivet Gbagbo, In Fraternité-Matin, n°13644 du 3 mai 2010, p.3.
50 - Ibidem
51 - Extrait de la communication de Simone Ehivet Gbagbo, In Fraternité-Matin, n°13644 du 3 mai 2010, p.3.
52 - L’aide englobe les prêts à conditions favorables, subventions et assistantes techniques.
CONSTRUCTION DE LA PUISSANCE ECONOMIQUE IVOIRIENNE...
33

l’aide multilatérale, il y a la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International,


le Fonds Européen de Développement (FED), la Banque Européenne d’Inves-
tissement (BEI), la Banque Ouest-Africaine de Développement (BOAD) et la
Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEAO).53
On remarque que les partenaires principaux de la Côte d’Ivoire sont du mon-
de occidental. Les pays les plus présents au titre des appuis extérieurs de 2003
à 2005 sont la Chine, l’Iran, l’Arabie Saoudite, l’Allemagne, les USA en ce qui
concerne la coopération bilatérale. On note effectivement une ouverture vers
les pays d’Asie. Ce constat est valable pour la coopération multilatérale qui
s’ouvre aux banques arabes sans toutefois négliger les anciens partenaires. Il
y a comme nouveaux partenaires, la Banque Arabe pour le Développement en
Afrique (BADEA), la Banque Islamique du Développement (BID) et le Fonds de
l’OPEC (organisation of the Petrolum Exporting Countries)54. Avouons que des
efforts certes timides sont réalisés en matière de diversification mais sont-ils
synonymes d’annihilation de la dépendance ?
2. REGARD CRITIQUE
La volonté affichée de diversification des partenaires et surtout de réelles in-
dépendances économiques vis-à-vis de la France connait-elle un début d’appli-
cation au-delà des mots ? Y-a-t-il une volonté politique véritable dans ce sens ?
Est-il besoin de rappeler qu’en février 2008, le trésor français a accordé un
prêt relais de 225 millions d’euros à la Côte d’Ivoire pour rembourser la Banque
Mondiale, puis un autre d’un montant de 200 millions d’euros en mars 200955.
Quelle marge de manœuvre face à un tel partenaire ? Un adage africain ne dit-
il pas que la main qui reçoit est toujours en dessous ?
Que dire de l’opération de charme du Ministre de l’Economie et des finances,
Charles Diby à l’endroit des investisseurs français pour les inciter à investir
davantage en Côte d’Ivoire ? A Paris et à Strasbourg, du 1er au 2 juillet 2010, le
Ministre Diby a présenté les atouts de la Côte d’Ivoire comme il le fait depuis 2007.
Ce pays, selon lui offre en Afrique de l’Ouest les meilleurs atouts et opportunités
aux entrepreneurs en général et aux Français en particulier.56 Il énumère les
avantages qui s’offrent aux entrepreneurs français en ces termes : « Au-delà de
leur présence historique qui fait d’eux des partenaires naturels de l’Etat ivoirien et
des acteurs majeurs, ces opérateurs économiques ne trichent pas. Ils sont mus
par la légalité dans leur entreprise, respectent leurs engagements vis-à-vis de
l’Etat en payant leurs impôts et déclarent leur personnel etc57.

53 - La Côte d’Ivoire en chiffres édition 1980-1981, op.cit. ; pp.70-71.


54 - Ministère de l’Economie et des Finances, La Côte d’Ivoire en chiffres édition 2007, Abidjan, Dialogue Production,
2007, 222p ; pp.58-59.
55 - La Côte d’Ivoire en difficulté de trésorerie avait besoin de l’aide des institutions de Bretton Woods. La condition
était l’apurement des arriérés. C’est cette aide que fournit la France. In Fraternité-Matin, n°13699, du jeudi 8 juillet
2010, p.3.
56 -Fraternité-Matin, n°13699, du jeudi 8 juillet 2010, op. cit , p.2.
57 -Idem
34 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

La dernière intervention58 du Président Laurent Gbagbo sur les relations


Côte d’Ivoire-France recadre le débat. Il n’est plus question pour le leader de
la refondation, de rupture mais de bâtir sur « des digues qui durent demain ».
Selon lui, « les relations entre la France et la Côte d’Ivoire ne sont pas des re-
lations quelconques, banales…jusqu’à une date récente beaucoup d’Ivoiriens
croyaient que tout ce qui est Blanc est Français »59. Il prend l’engagement de
fortifier ces relations.
Ce n’est pas tant la nationalité française des investisseurs qui pose
problème, car en pleine mondialisation, c’est la course aux investisseurs et il
n’est pas question de négliger ses partenaires privilégiés et naturels. Mais, en
même temps il faut éviter d’être dépendant, car se sentant incontournables ils
ont la tentation d’imposer leur vision. A la journée de la Côte d’Ivoire à Paris
et à Strasbourg, certains opérateurs français n’ont pas hésité à dénoncer la
trop grande pression fiscale pratiquée en Côte d’ Ivoire. Or, selon la Banque
Mondiale la pression fiscale est de 45% en Côte d’Ivoire contre une moyenne
de 60% dans l’Union Economique et Monétaire ouest africain (UEMOA). Peut-
on imaginer des Hommes d’affaires ivoiriens demander un rabattement fiscal à
la France où la pression fiscale est de 65% ?60.
Face à la question de la dépendance, nous préconisons la solution de
l’intérieur. Elle consiste en une grande présence des nationaux dans le circuit
économique sans toutefois écarter les non nationaux. Le contrôle de l’économie
par les nationaux permet aux devises de rester sur place alors que l’investisseur
étranger en dehors de l’impôt qu’il paye rapatrie ses bénéfices. La politique de
privatisation conduite par l’Etat ne s’est pas traduite par l’ivoirisation du capital
des entreprises stratégiques comme la CIE (électricité), la SODECI (eau) Côte
d’Ivoire TELECOM (téléphone) toutes contrôlées par les intérêts français. Il faut
songer progressivement à inverser les tendances ou à les équilibrer.
Au niveau de la distribution, il faut aider les jeunes à s’insérer dans le
circuit. Des actions ont été conduites en ce sens dans le passé. Henri Konan
Bédié alors Ministre de l’Economie61 avait initié les chaines PAC (Programme
d’Action Commerciale) qui consistaient à la création de boutiques par l’Etat sur
l’ensemble du territoire et en confier la gestion aux nationaux. Devenu Président
de la République le 7 décembre 1993, il reprend cette politique à travers les
fonds sociaux. Des sommes d’argent sont remises aux jeunes pour créer des
entreprises quitte à rembourser selon des échéanciers souples. Malheureusement
tous ces projets nobles ont connu des résultats mitigés. Les remboursements
n’ayant pas suivi, la chaîne des prêts s’est arrêtée. Pour expliquer les échecs,
le manque de culture d’entreprise des Ivoiriens est avancé. A notre avis, cette
58 -Cette intervention est faite lors de la remise du groupe scolaire français Jacques Prever par le chef de l’Etat à l’am-
bassadeur de France le mardi 31-08-2010. Détruit lors des événements de novembre 2004 où l’armée française a tiré et
tué des Ivoiriens protestant contre la destruction au sol de l’aviation ivoirienne suite à une méprise de ses pilotes, il a été
réhabilité par le Gouvernement de la Côte d’Ivoire.
59 - Fraternité-Matin, n°13745, du mercredi 1er septembre 2010, p.13
60 - Fraternité-Matin, n°13699, op.cit., p.3.
61 -Il a été Ministre de l’Economie de 1966 à 1977.
CONSTRUCTION DE LA PUISSANCE ECONOMIQUE IVOIRIENNE...
35

thèse ne peut prospérer. Il a surtout manqué d’encadrement de proximité de la


part des structures qui en avaient la charge comme l’Office pour la Promotion
de l’Entreprise Ivoirienne (OPEI) remplacé par le Centre pour l’Assistance et la
Promotion des Entreprises Nationales (CAPEN) aujourd’hui dissous.
Tirant les leçons du passé, des nouvelles missions pourraient être confiées
à l’Agence pour la Formation Professionnelle (AGEFOP) et au Fonds de Déve-
loppement de Formation Professionnelle (FDFP).
La solution de l’intérieur passe par la maximisation des recouvrements fiscaux
et cela passe par des actions de communications qui permettent d’acquérir la
culture fiscale. La Direction Générale des Impôts (DGI) a initié des émissions
télévisées dans ce sens et projette d’instaurer des cours de culture fiscale à l’école
primaire et au secondaire. Nous estimons que l’avenir de la Côte d’Ivoire passe
par sa capacité à recouvrer ses impôts. Sur la question, le Directeur Général
de l’Economie semble satisfait par les résultats de la DGI. Nous lisons : « Les
recettes fiscales qui dépassent à peine les 450 milliards de francs CFA ont plus
que doublé aujourd’hui et se situent à plus de 900 milliards de francs CFA »62.
Une étude conjointe Banque Africaine de Développement (BAD) et l’Orga-
nisation pour la Coopération et le Développement en Europe (OCDE) sur la
question des impôts en Afrique prouve que des efforts sont à faire dans ce
domaine. « L’Afrique a-t-elle les moyens de se passer à terme de l’aide inter-
nationale ? Sur quel levier peut-elle agir pour accroître ses ressources fiscales
afin de financer son développement ? »63. Telle est la problématique centrale de
cette étude. On y lit ce qui suit : « Alors que nombre de Nations africaines, cé-
lèbrent le 50e anniversaire de leur accession à l’indépendance en 2010, l’heure
est venue pour un continent qui dépend encore trop des flux financiers venus
de l’étranger, capricieux et imprévisibles de jeter un regard neuf sur les impôts,
un gisement potentiel inexploité de milliards de dollars »64.
Même si la Côte d’Ivoire est fiscalement viable65, l’étude nous apprend que
les revenus fiscaux de la Côte d’Ivoire oscillent entre 20% et 25% du PIB au
même titre que le Cameroun, le Congo, le Maroc et la Tunisie. Sont logés à la
première place, l’Afrique du Sud, l’Algérie, le Gabon, la Lybie et les Seychelles,
les plus riches dont les recettes fiscales représentent environ 35% du PIB, soit
autant que la moyenne des pays de l’OCDE66.
Consciente certainement de la faiblesse du recouvrement fiscal et de ce
qu’elle peut mieux faire, un séminaire sur « la pratique de l’évaluation immobi-
lière en Côte d’Ivoire » s’est tenu du 2 au 3 septembre 2010 à Abidjan, organisé

62 -Extrait de la communication du Directeur Général de l’Economie, op.cit., p.2.


63 -Extrait de l’étude conjointe ocde-bad sur la fiscalité en Afrique. In L’Inter, n°3621, du mardi 8 juin 2010, p.8.
64 - Extrait de l’étude conjointe ocde-bad sur la fiscalité en Afrique, in l’inter, n° 3621, du mardi 8 juin 2010 op.cit., p.8.
65 -Selon Henri-Bernard Solignac-Lecomte, responsable du centre de développement Europe, Moyen-Orient et Afrique
de l’ocde, pour qu’un Etat soit fiscalement viable, la règle veut que les impôts représentent au moins 15% du pib.
66 -Le Bénin, le Burkina Faso, la République Démocratique du Congo, le Mali, le Niger, le Rwanda, le Sénégal et le
Tchad sont sous la barre de 15% du pib.
36 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

par la Direction Générale des Impôts (DGI). Le Directeur de cabinet du Ministre


de l’Economie, présent à l’ouverture souhaite qu’à terme la fiscalité intérieure
soit plus importante que la fiscalité de porte67. Selon lui, « toutes ces initiatives
doivent permettre de faire des impôts adossés à la propriété immobilière un
leader de demain, pour permettre à la Côte d’Ivoire de mobiliser ses moyens
propres pour assurer les besoins futurs de développement… »68.
La solution endogène n’exclut pas le recours à des emprunts extérieurs et
le pays pourra emprunter sur le marché international pour accélérer son dé-
veloppement pourvu que les flux financiers soient orientés dans les secteurs
productifs (les routes, les ports, etc).
CONCLUSION

Depuis son accession à l’indépendance, la Côte d’Ivoire est l’un des pays les
plus prospères de la sous-région ouest africaine grâce aux choix fondateurs de
ses dirigeants : libéralisme économique, développement et diversification des
cultures d’exportation (café, cacao, palmier à huile, hévéa), coopération étroite
avec l’occident notamment la France. La création d’industries de transformation
tant par l’Etat que par le secteur privé grâce au code d’investissement attractif
de 1959 favorise l’émergence d’un secteur productif.
Le développement de l’économie s’est déroulé selon un axe de dépendance
notamment vis à vis de la France qui très vite s’est trouvée à toutes les étapes
de la vie nationale grâce aux accords de coopération de 1961. En 1980, le
modèle économique ivoirien connaît un essoufflement qui appelle des mesures
d’ajustement structurel dictées par les institutions de bretton Woods. Aussi,
l’Etat se désengage totalement ou partiellement des activités industrielles et
commerciales. La cession des capitaux des entreprises stratégiques se fait
au profit de l’extérieur. Les secteurs de l’eau, de l’électricité et du téléphone
passent sous contrôle français. Or, selon les calculs de Raymond Baker,
directeur du “Think Tank’’ américain Global Financial Integrity (GFI) 393.600
à 524.800 milliards de francs CFA s’évaporent clandestinement des pays en
développement dont 65% ont pour origine les entreprises internationales69.
La dépendance est accentuée par le contrôle tatillon des institutions de
Bretton Woods condition pour atteindre le point d’achèvement qui ouvrira au
pays le statut de pays pauvre très endetté (PPTE)70 . Grâce aux premières
mesures liées à l’atteinte du point de décision la dette est de 4000 milliards selon

67 -La fiscalité de porte est du ressort de la Direction Générale des Douanes.


68 -Comte rendu du séminaire sur la pratique de l’évaluation immobilière en Côte d’Ivoire. In Soir Info, n° 4805 du
samedi 4 au lundi 6 septembre 2010, p.5.
69 - Extrait de l’étude conjointe ocde-bad sur la fiscalité en Afrique, op.cit., p.6.
70 - L’initiative PPTE a été instaurée en septembre 1996 par le Comité de développement de la Banque mondiale et
le Comité intérimaire du Fonds Monétaire International. Son but est d’offrir un mécanisme de réduction permettant de
ramener le niveau de dette de certains pays à des proportions soutenables aux fins de ne pas compromettre leur dévelop-
pement. C’est une initiative qui contribue à créer les conditions de croissance économique et de lutte contre la pauvreté.
In Fraternité-matin, n°13713, op.cit., p.2.
CONSTRUCTION DE LA PUISSANCE ECONOMIQUE IVOIRIENNE...
37

le Directeur Général de l’Economie71 . Il est clair qu’avec une telle dépendance


économique, l’indépendance de la Côte d’Ivoire est fragile. L’avenir doit se
conjuguer avec un modèle économique basé sur la capacité des nationaux à
s’approprier les secteurs stratégiques de l’économie, mais surtout la possibilité
d’élaborer le budget de l’Etat à travers des ressources propres. L’initiative PPTE
ne doit pas être vue comme une panacée mais comme un moyen pour réaliser
l’indépendance économique de la Côte d’Ivoire. Concernant les relations avec
la France, sans les dénoncer, il faut les adapter aux exigences du vingt et
unième siècle et de la mondialisation. La Côte d’Ivoire doit être l’amie de tous
et l’ennemie de personne.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1- SOURCES ÉCRITES
Extraits d’allocutions, de communications, d’étude, de compte rendu de
séminaire et communiqué.
Extrait des allocutions de son excellence M. Félix Houphouët-Boigny, Président de la République
de Côte d’Ivoire à l’occasion de son voyage officiel en France en juin 1961, pp.28-29.
Extrait de l’allocution de Laurent Dona Fologo au colloque de San-Pédro sur l’économie. In Fra-
ternité-Matin, n°13649 du samedi 8 et dimanche 9 mars 2010, p.4.
Extrait de la communication du directeur Général de l’Economie. In Notre Voie, n°3649, du jeudi
5 août 2010, p.3.
Extrait de la communication de Simone Ehivet Gbagbo. In Fraternité-Matin, n°13644, du 3 mai
2010, p.3.
Extrait de l’Etude conjointe OCDE-BAD sur la fiscalité en Afrique. In Inter, n°3621, du mardi 8
juin 2010, p.8.
Compte rendu du séminaire sur la pratique de l’évaluation immobilière en Côte d’Ivoire. In Soir
Info, n°4805, du samedi 4 au lundi 6 septembre 2010, p.5.
Communiqué du PDCI-RDA portant sur la politique de privatisation d’Houphouët-Boigny à Bédié.
In le Nouveau Réveil, n°2511, du mardi 4 mai 2010, p.6.

Périodiques officiels
Ministère de l’Economie, des Finances et du Plan, La Côte d’Ivoire en chiffres, édition 1980-
1981, Société Africaine d’Edition, 1980, 324p.
Ministère de l’Economie et des Finances, La Côte d’Ivoire en chiffres, édition 2007, Abidjan,
Dialogue Production, 2007, 222p ; pp.58-59.
Périodiques d’époque et journaux actuels
Marchés tropicaux et Méditerranéens, n°767, du samedi 23 juillet 1960, p.1655.
Marchés tropicaux et Méditerranéens, n°792, du samedi 14 janvier 1961, p.83.
Fraternité-Matin, n°8769, du samedi et dimanche 9 janvier 1994, p.2.
Fraternité-Matin, 13731, du lundi 16 août 2010, p.15.

71- Extrait de la communication du Directeur Général de l’Economie, op.cit., p.2.


38 N’GUESSAN MAHOMED BOUBACARD

Ouvrage ayant valeur de source


ASSOUAN, T.U.A., Sauvons la Côte d’Ivoire mon message à la Nation, Victoria, Edition trafford,
2009, 156p.

2- OUVRAGES GÉNÉRAUX
BAULIN, J., La politique intérieure d’Houphouët-Boigny, Paris, Edition Eurafor-Press,1982, 244p.
FOFANA, L., Côte d’Ivoire la longue marche du RDR (Rassemblement des Républicains),
Hérissez à Evreux, Editions SEPIA, 2009, 105p.
KIPRE, P., Côte d’Ivoire la formation d’un peuple, Bayeux, SIDEX-IMA, 2005, 291p.
KOULIBALY, M., Les servitudes du pacte colonial, Abidjan, CEDA/NEI, 2005, 223p.
SAMIR, A., Le développement du capitalisme en Côte d’Ivoire, Paris, Les Editions de minuit,
1967, 327p.

3-LES ARTICLES DE JOURNAUX


BALLY, F., « Deux obstacles à la conclusion de partenariat ». In Fraternité-Matin n°13670, du
vendredi 4 juin 201, p.2.
HUE, B.G., « Dette publique : les grands épisodes de l’enlisement ». In Fraternité-Matin, n°13713,
du samedi 24, dimanche 25 juillet 2010, p.3.

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