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Au retour de mon dernier séjour au Vietnam en 2005 j’ai écrit un texte illustré, documenté et augmenté

d’une bibliographie substantielle de mon humble point de vue.

J’y ai travaillé plus de 6 mois. J’y abordais des thèmes tels que les diverses religions, les ethnies, le
mandarinat et le confucianisme, l’histoire du Vietnam des origines au communisme en passant par
l’étude des différentes périodes de la colonisation française, les effets à long terme de l’agent orange
(dioxine)…Je me suis naturellement aussi intéressé par extension aux expositions coloniales et aux
zoos humains.

Lorsque j’ai découvert l’existence du Jardin Tropical de Paris en novembre 2005 j’ai voulu
immédiatement en faire l’exploration.

L’endroit, qui se trouve en bordure du bois et d’une rue jalonnée de jolies villas, est discret. On y
pénètre par une reproduction de portique asiatique qui marquait l’entrée de l’exposition de 1907.

J’ai tout d’abord été frappé en constatant l’état d’abandon du lieu, malgré un début d’élagage et de
taille des arbres, et l’absence de toute surveillance publique.

Puis j’ai été senti saisi par cette impression étrange qui vous envahit lorsque vous prenez subitement
conscience que vous vous trouvez dans un endroit « chargé d’histoire ». Un site sans vie, oublié de
tous, à l’écart des foules de la ville ; où pourtant des milliers de personnes se sont promenées pour
observer des femmes et des hommes se livrant à leurs activités quotidiennes ou coutumières. Des
femmes et des hommes directement transplantés de leurs villages d’origine dans des villages factices,
contraints d’y vivre le temps de l’exposition, et directement acheminés dans leur village au retour.

Tel était le principe du zoo humain. A la fois une extraordinaire leçon de géographie humaine, et une
terrifiante démonstration de l’idéologie coloniale de la France de la IIIè République.

Peu à peu je me suis trouvé au milieu d’une « friche » historique et culturelle.  Pourtant les bâtiment,
les monuments, reconnaissables à leur style architectural, leurs décorations, à leurs symboles livraient
le sens de leur présence, la fonction de représentation dans ce qui fut une exposition sous la forme
nouvelle et attractive du musée vivant. Immergé dans ce site comme à Olympie, Delphes, Volubilis ou
Ephèse, ces traces artificielles d’une manifestation éphémère ont été pour moi les supports d’un
voyage imaginaire surprenant et profondément émouvant dans l’histoire. Dans l’histoire des
représentations de l’homme – des « mentalités » de l’époque - ; interrogeant en retour cette fameuse
identité nationale qui fait résurgence depuis deux ans, et ce qui reste encore de la « mission
civilisatrice de la France ».

Dans les notes que j’ai retrouvées ce matin j’avais relevé les traces qui m’avaient particulièrement
touchées :

o Une plaque rappelle que René Dumont, considéré comme l’inventeur de l’écologie politique a
été étudiant à l’école des ingénieurs d’agronomie coloniale qui au début ne comptait que
quelques étudiants.
o Le superbe pavillon du Congo a été détruit par un incendie en 2004, les restes calcinés sont
restés en l’état
o Le monument aux morts malgache, isolé sur une allée est superbe. De style art déco et
probablement en marbre.
o Particulièrement émouvants sont les monuments aux morts laotiens et cambodgiens, qui
contrastent avec l’importance de celui qui est consacré aux vietnamiens

Plusieurs informations, en particulier celles qui figurent sur les panneaux qui présentent les bâtiments
ne sont pas mentionnées dans ce site Internet.

Cependant je ne puis que vous inciter à lire le site de ONAC78, site des anciens combattants des
Yvelines, qui à mes yeux est celui qui restitue le plus fidèlement l’histoire de ce lieu.
Souvenirs coloniaux au bois de Vincennes - le Jardin tropical de
Paris

 Le Jardin tropical de Paris


A l'origine, un jardin d'essai d'agronomie tropicale : 

A la fin du XIXème siècle, la France cherche à accroître les productions agricoles de ses colonies pour améliorer
son approvisionnement en thé, café, cacao, épices… Un jardin d’essai colonial est créé en 1899 dans le bois de
Vincennes pour coordonner les expériences agronomiques et multiplier les végétaux afin de les introduire sur de
nouveaux sites de production outre-mer.

Des serres et différents bâtiments abritent bureaux, laboratoires et bibliothèque. Le travail quotidien permet la
réception de plants en provenance des colonies, leur culture, leur multiplication puis leur expédition vers de
nouvelles colonies.

On cultive des plants de caféiers, de cacaoyers, de vanilliers, de muscadiers, de bananiers.

Chaque année le jardin colonial publie un catalogue de plantes disponibles et expédie 40 000 graines et plus de
10 000 boutures, semis et greffons dans des serres portatives vers les exploitations agricoles des différentes
colonies.

L'exposition coloniale de 1907 :

Un village indochinois reconstitué avec ses occupants pendant l'exposition coloniale de 1907.

De mai à octobre 1907, l’organisation d’une exposition coloniale transforme le jardin. Une transformation à la
fois matérielle mais aussi symbolique: Cinq villages exotiques sont construits. Villages indochinois, malgache,
congolais, ferme soudanaise et campement touareg. Le jardin est divisé en deux parties : l’Asie et l’Afrique.
Pour faire vivre ce décor, on fit venir des « indigènes ». Ils devaient faire vivre les villages, mettre en scène
leurs gestes du quotidien, endossés des tenues traditionnelles souvent inadaptées au climat parisien, participer
à  heures fixes à des « spectacles ethnographiques » tels que des danses rituelles ou la reconstitution de
combats guerriers.
L’agriculture et l’artisanat ne sont pas en reste. Les productions locales typiques sont exposées et
commercialisées dans les pavillons des contrées : tapis, café, chocolat, thé à déguster sur place…
  
Ainsi le jardin n’est plus seulement voué à l’agronomie tropicale, il est, le temps de l’exposition, une vitrine
vivante des colonies dans la capitale, une reconstitution grandeur nature de la splendeur de l’Empire. Et le
succès est au rendez-vous. L’exposition accueille, en six mois, près de deux millions de visiteurs.

Exposition de 1907 - Visiteurs de l'exposition intéressés et femmes des colonies exhibées et dévêtues !

Grande exhibition des Touaregs dans "Le journal des voyages", 19 mai 1907.
Reconstitution d'une attaque fictive du courrier par des vrais Touaregs du Sahara avec chameaux, habits traditionnels et lances .
On présente au public des spectacles du type "combats coloniaux" entre "blancs et indigènes" pour créer un climat de terreur et de fascination à
l'égard de ces "peuples exotiques".

Les vestiges de l'exposition :

Les cinq villages qui symbolisaient les colonies de l’Empire français (Indochine, Madagascar, Congo, Soudan,
Tunisie, Maroc) ont aujourd’hui disparu. Ne subsistent que quelques vestiges souvent en mauvais état de
conservation et camouflés par une végétation envahissante. Il règne dans ce jardin une atmosphère de palais
abandonné, c’est aussi cela qui en fait son charme. Voici quelques vestiges de l'exposition de 1907 en photos :

Cette porte en bois pourrait provenir de l'Exposition coloniale de 1906 au Grand-Palais. Elle marque l'entrée actuelle du Jardin tropical. Elle
matérialise l'axe de symétrie du jardin : à gauche de cette porte se trouve la partie africaine de l'exposition coloniale  et à droite, la partie asiatique.
(coll.ONAC78)
Carte postale ancienne présentant des Laotiens
devant la Porte chinoise lors de l'exposition coloniale de 1907.

Cette porte est composée de nombreux bas-reliefs en bois sculpté


qui représentent des décors floraux, des dragons, des animaux, des scènes théâtrales,
le travail des paysans dans les champs ou des motifs géométriques.

Cette porte a été abîmée par la tempête de décembre 1999.


Le pavillon de la Tunisie : Pavillon du Maroc : Durant l’exposition coloniale, ce bâtiment présente aux
visiteurs les caractéristiques de la religion musulmane mais c’est surtout après
Autre bâtiment construit pour l’exposition coloniale de 1907, le l’exposition coloniale que l’édifice acquiert sa particularité. Le pavillon du Maroc
pavillon de Tunisie. Comme l’écrit un journal de l’époque, « c’est devient une mosquée, certainement la première de Paris et de France. En effet,
une jolie construction mauresque toute blanche au milieu de la dans ce bâtiment était aménagé un lieu de prière où deux Imams officiaient. Le
verdure ». Aujourd’hui, l’édifice est particulièrement abîmé. On ne bâtiment sert aussi pendant la guerre à recevoir les soldats maghrébins
peut pas s’en approcher car un périmètre de sécurité est marqué convalescents après une blessure au front.  Il faudra attendre 1926 et
par des grillages et des bâches en plastique font office de toiture… l’inauguration de la Grande Mosquée de Paris près de la place Monge, pour
De loin, on peut tout de même visuellement l’apprécier. Dans ce que disparaisse ce premier lieu de prière de l’Islam improvisé dans un jardin du
pavillon était présenté la production artisanale de luxe de la bois de Vincennes !
Tunisie (tapis, broderies, soieries, costumes, tentures, meubles en
marqueterie et bijoux) et aussi des produits agricoles
méditerranéens (huiles d’olive, miel, vins, céréales…) 0NAC78

Le pavillon de l’Indochine : La serre du Dahomey :


Bâtiment imposant construit pour l’exposition de Cette serre provient de la partie coloniale consacrée au Dahomey
1907. Lieu de présentation des matières (aujourd’hui le Bénin) à l’Exposition universelle de 1900 au
premières et produits manufacturés de la colonie Trocadéro. Cette serre chauffée est dite d’acclimatation pour les
indochinoise. plantes tropicales. Elle est implantée sur le site du Jardin
(coll. ONAC 78) d’agronomie tropical en 1901.
(coll. photo baudelet.net)

 A la rencontre de l’Autre :

Les parisiens découvrent l’exposition coloniale en famille, lors d’une promenade, après un repas
dominical,un après-midi ensoleillé avec les enfants… Que découvrent-ils ?

C’est d’abord un spectacle fantastique qui s’offre à eux. Pour saisir l’importance de cette
manifestation, on doit se plonger dans le bain de l’époque. Les occasions de s’évader sont rares au
début du XXème. siècle. Le cinéma n’en n’est qu’à ses débuts et la télévision n’existe évidemment
pas. La découverte d’autres cultures et civilisations grâce aux livres ou aux voyages est un privilège
réservé à une élite aristocratique ou bourgeoise, curieuse et aventurière. D’un seul coup, avec ces
exhibitions de « populations exotiques » dans les grandes foires et expositions, coloniales ou
universelles, on touchait le grand public.

Au jardin tropical, les visiteurs découvraient des chameliers en habits d’apparat. Ils pouvaient faire
une tour dans le souk reconstitué du pavillon tunisien. Ils appréciaient les spectacles donnés par des
danseuses malgaches et ils observaient les rites des fidèles dans le temple indochinois… Un grand
voyage dans le monde des colonies et de l’outre-mer, reconstituées en miniature, s’offrait aux yeux
ébahis du petit peuple de Paris. Le spectacle et le dépaysement étaient garantis !
Un objectif de l’exposition coloniale est ainsi rempli : donner à voir aux visiteurs l’Empire dans son
immensité et sa diversité et rendre familières les populations indigènes à une époque où les français
se les représentaient mal.  

 Un zoo humain :

Quelles images des colonisés les colonisateurs ont-ils construites ?

Les peuples sont présentés dans leurs villages respectifs. Ainsi, l’exposition coloniale s’apparente à
un zoo humain. Comme dans un parc zoologique, les indigènes sont rassemblés dans un enclos. 
Comme dans un zoo, les indigènes exhibés doivent être rares, singuliers et exotiques et enfin
comme dans un parc animalier, le public vient à l’exposition coloniale pour voir, non pas les bêtes
mais « des êtres sauvages ».
Carte postale. Exposition coloniale de 1907. Carte postale. Exposition coloniale de 1907.
Jeunes femmes laotiennes. Famille des îles Loyauté (Nouvelle-Calédonie)

L’objectif de ce type de manifestation est de construire une frontière invisible mais tangible entre
l’homme blanc et les peuples des colonies. Il y a « eux », sous-entendu « les bons sauvages » et
nous, les visiteurs, qui sommes « les civilisés ». D’un côté, les peuples montrés et, de l’autre, les
visiteurs qui entendent domestiquer l’Autre – c’est le colonialisme-  et finalement dominer l’ensemble
du monde.

Ces images construites lors de la visite des grandes expositions ne sont pas anecdotiques.

D’abord, parce qu’elles touchent beaucoup de monde. De la fin du XIXème siècle jusqu’aux années
trente, ces manifestations connaissent un grand succès populaire. C’est par millions que l’on se
presse à ces fêtes ( deux millions de visiteurs pour l’exposition coloniale de 1907 au Jardin tropical ).
Tout Paris va voir « les sauvages ! »  On estime à 100 millions le nombre total de visiteurs de ces
exhibitions en France entre 1870 et 1930. C’est un phénomène culturel de masse.

Ensuite, ces images ont marqué des générations dans leur rencontre avec l’Autre. Le premier contact
réel entre l’Occident et « l’ailleurs-exotique » se conclut par une différenciation nette des hommes et
des cultures. Les peuples et les cultures présentés dans ces manifestations sont « infériorisés ». Ces
reconstitutions « pseudo-ethnographiques » des vies rurales africaines et asiatiques révèlent peu de
choses sur les populations autochtones car les peuples présentés sont contraints de jouer des rôles
stéréotypés (danseuses, musiciens, petits artisans, guerriers). Par contre, elles permettent de
construire un imaginaire social et une hiérarchisation des peuples et des cultures qui justifient les
conquêtes et la mission civilisatrice de l’entreprise coloniale européenne.
 Des esclaves ou des acteurs salariés ?

Les populations indigènes qui animaient l’exposition coloniale de 1907 n’étaient pas des esclaves. Si
certains consentaient à participer à cette mise en scène grossière et caricaturale de leurs modes de
vie, c’était contre une rémunération. Ils jouaient contre un salaire le jeu que la France coloniale leur
demander de jouer.

Mais il n’en n’a pas toujours été ainsi.

On se souvient du geste fort accompli par le footballeur d’origine calédonienne Christian Karembeu
lors de la Coupe du Monde de Foot en 1998 en France. Pendant la présentation de l’équipe dans un
stade plein, Il avait  refusé de chanter « La Marseillaise », en souvenir de son ancêtre exhibé en
1931 au Jardin d’Acclimatation, au bois de Boulogne, en marge de l’exposition coloniale.

Une "troupe de Kanaks" exhibée au Jardin d'Acclimatation du bois de Christian Karembeu en Equipe de France.
Boulogne en marge de l'Exposition coloniale de 1931. (coll. L'Illustration) (photo L'Equipe)

Ces Kanaks avaient été « kidnappés » chez eux par des français de métropole et  amenés à Paris
pour être exhibés dans un spectacle particulièrement humiliant. Ils avaient été présentés au public
avec, accrochés aux cous, des pancartes où l’on pouvait lire le mot « anthropophage ». D’autres
devaient nager dans une marre en poussant des cris de bêtes. Enfin, sous le climat parisien hivernal,
les femmes devaient danser « le pilou pilou » poitrines nues…
A leur retour en Nouvelle-Calédonie, ces hommes et ces femmes avaient confié à leurs familles leur
amertume à l’égard des Français. Parmi ce groupe de Kanaks, se trouvait le grand-père de Christian
Karembeu qui se souvenait que son aïeul avait eu « la haine ».
Les monuments aux morts en hommage aux soldats de l’Empire :

Entre 1914 et 1918, la mère-patrie enrôle de grés ou de force plus de 600 000 sujets des colonies
(Algériens, Africains noirs, Tunisiens, Marocains, Indochinois, Malgaches…) pour combler son déficit
démographique et faire face à « l’ogre allemand ». Les pertes des régiments coloniaux sont
importantes mais elles restent moins élevées que celles des régiments métropolitains (12% de ses
effectifs contre 16% pour les régiments métropolitains). La légende qui affirme que les troupes
indigènes ont été sacrifiées lors des grandes offensives est donc à nuancer. Il en sera autrement
durant le second conflit mondial et les guerres coloniales.

C’est en souvenir de leur sacrifice que, dans les années vingt, des monuments aux morts sont érigés
dans le Jardin tropical. C’est à Paris et en France, l’un des trop rares lieux de la mémoire
combattante dédiée exclusivement aux soldats de l’Empire.

Tirailleurs marocains. Tirailleurs sénégalais dans une Tirailleurs cambodgiens.


tranchée.

 Le lieu du souvenir Indochinois :

La partie consacrée aux territoires indochinois (Tonkin, Annan, Cochinchine, Laos et Cambodge) est
la plus riche du jardin. On y trouve, une pagode de couleur rouge élevée sur une esplanade décorée,
une imposante urne funéraire, un pagodon, un pont sculpté, un petit étang où poussent des
bambous… Malgré l’outrage du temps, un paysage de type sud-asiatique a été ici préservé.  
Mémorial vietnamien et copie d'une urne funéraire en bronze du Palais impérial de Hué.
(coll. ONAC 78)

Le site indochinois a connu des modifications architecturales importantes depuis l’exposition de


1907. A l’origine, se dressait sur cette esplanade un vaste temple en bois richement sculpté, copie
conforme d’une maison commune d’un village cochinchinois. On l’appelle "le Dinh". Durant
l’exposition coloniale, cet édifice servait de vitrine à l’artisanat de luxe de la Cochinchine. On pouvait
y admirer de superbes objets de cuivre ciselé, de remarquables sculptures sur bois, des panneaux à
incrustation de nacre de toute beauté… Après l’exposition, le temple en bois se dégrade rapidement.
Pendant la guerre 14-18, des blessés originaires des colonies asiatiques y sont soignés. Au sortir de
la guerre, le gouvernement français confie la gestion du bâtiment à une association de français
ayant vécu en Indochine :

« Le Souvenir indochinois ». Dès lors, le site fut consacré au souvenir des soldats indochinois morts
pour la France et les plus hautes autorités politiques, coloniales et militaires viennent s’y recueillir.

Pour cette consécration du site comme haut lieu du souvenir indochinois, d’importants travaux ont
été réalisés.

Le pavillon Cochinchinois devenu pagode du souvenir conserve des stèles en bois où sont inscrits en
caractères chinois le nom des soldats bouddhistes tombés au champ d’honneur. Face à la pagode,
un monument religieux avec une copie d’une urne funéraire du Palais impérial de Hué. Cet ensemble
est consacré aux soldats vietnamiens. A proximité, est érigé un monument en pierre à la mémoire
des soldats indochinois chrétiens. Enfin, au bout de la perspective, un monument en forme de cloche
pointue, d’inspiration indienne, est dédié aux soldats cambodgiens et laotiens.
Malheureusement, dans la nuit du 21 avril 1984, le site est visité. Les objets d’art entreposés dans le
temple sont dérobés et un incendie criminel ravage l’édifice classé à l’inventaire des Monuments
historiques. Aujourd’hui, il ne reste plus rien de la maison cochinchinoise de l’exposition de 1907. 
Pagode Cochinchinoise construire en 1992 Monument aux Cambodgiens et Laotiens Monument aux Indochinois chrétiens morts
sur l'emplacement de l'ancien pavillon morts pour la France. pour la France. (ONAC78)
indochinois détruit dans un incendie criminel (Coll. ONAC78)
en 1984 (ONAC78).

L’Association Nationale des Anciens et Amis de l’Indochine (l’ANAI), successeur du « Souvenir


Indochinois » entreprend alors, en lançant une souscription, la construction d’un nouvel édifice, plus
petit que le précédent, consacré également à la mémoire des soldats indochinois. L’actuelle  pagode
rouge qui domine l’esplanade  est inaugurée en 1992.
L’ANAI assure l’entretien du site mémoriel et organise chaque année une cérémonie du souvenir
autour de cette pagode.
Le pont Khmer ou pont des najas ou nagas : pont en ciment Pagodon
construit après l'exposition coloniale en 1921 par "Le souvenir dans "le village indochinois"
indochinois". Les najas ou nagas sont, dans la mythologie khmère
des êtres surnaturels, mi-humains, mi-serpents, divinité de la terre (coll. ONAC 78)
et des eaux.
(coll.  photo baudelet.net)
Les autres monuments aux morts en hommage aux soldats des colonies :

Entre 1918 et 1922, trois nouveaux monuments sont édifiés dans le Jardin tropical en hommage aux
soldats malgaches, aux soldats originaires des colonies d’Afrique occidentale et équatoriale et à tous
les soldats coloniaux ressortissant des pays d’outre-mer.
Aujourd’hui l’hommage rendu aux soldats honorés dans ce jardin est également assuré par la
Fédération des Anciens des Troupes de Marine (ex-troupes coloniales). Elle organise
traditionnellement au mois de mai une journée de cérémonies en hommage aux soldats d’outre-mer.

Monument aux soldats noirs de l'AOF et de l'AEF Monument aux soldats coloniaux morts pour la
morts pour la France. (coll. ONAC 78) France pendant la Grande guerre.

  Le Jardin d’agronomie tropical aujourd’hui :

Aujourd’hui, une partie du site reste consacrée à l’agronomie. La partie ouest du jardin est occupé
par les locaux du Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le
Développement (CIRAD). Cette organisme public effectue des recherches sur les productions
agricoles tropicales, sur les territoires, les acteurs et les politiques publiques agricoles dans les pays
du Sud.

Visiter le Jardin tropical du bois de Vincennes, c’est faire une plongée dans l’histoire coloniale de la France et,
c’est  aussi pour les élèves, un excellent moyen de réviser, dans un cadre bucolique,  sa leçon d’histoire !

Le site etait, à l’origine, un jardin d’essai agronomique qui avait pour objectif de tirer le meilleur parti des
productions agricoles de l’Empire.
 
Puis, le jardin devient, le temps d’une exposition, la vitrine de l’Empire et un instrument de propagande. On y
présente au « petit peuple de Paris », les hommes et les produits de « La Grande France ». Ce zoo humain
reconstitué dans un décor en carton-pâte digne de Disneyland, révèle peu de choses sur «  les populations
exotiques ». En revanche, c’est un formidable instrument d’analyse des mentalités françaises du début du
XXème siècle. Quel regard « l’homme blanc » porte-il sur « les peuples indigènes » ?
Au début du siècle, on évolue dans un paradoxe permanent. L’indigène est tantôt présenté comme attirant
tantôt comme terrorisant. On navigue sans cesse entre admiration et rejet. Puis, avec la guerre 14-18 et la
timide reconnaissance des sacrifices consentis par ces peuples sur les fronts armés, la vision que les
occidentaux ont des indigènes change progressivement. Les aspects effrayants, sauvages… tendent à
disparaître au profit de la figure du bon sauvage qu’il faut éduquer. Dans le Jardin tropical, l’édification des
monuments aux morts rendant hommage aux soldats des colonies et la rénovation du Dinh indochinois
participent à ce changement des mentalités.
 
Enfin, l’état d’abandon relatif du jardin actuel reflète le regard que la France porte sur son histoire coloniale. Il
n’est pas question de démolir les vestiges de l’exposition de 1907 mais la mise en valeur du site reste limitée.
L’histoire des zoos humains est gênantes, la mémoire de cet empire est encombrante comme si l’histoire
coloniale n’appartenait plus à l’histoire de France depuis les indépendances !

Il est pourtant nécessaire de prendre à bras le corps ce passé et de diffuser dans la société et dans les salles de
classe un discours historique objectif sur la période coloniale pour éviter les excès de tout bords. L’ouverture au
public de ce jardin y contribue ainsi que la création, non loin de là, à la Porte Dorée, de la Cité de l’Histoire de
l’immigration (ouverture en 2007) dans l’ancien palais colonial de l’exposition de 1931.

 Visite et accès :

Le Jardin d’agronomie tropical est ouvert le week-end (samedis et dimanches) de 11h30 à


17h30.
45 bis, avenue de la Belle Gabrielle
RER A Direction Boissy-Saint-Léger -La Varenne/Arrêt gare de Nogent-sur-Marne
Itinéraire fléché à la sortie de la gare RER.
 Plan du Jardin :
 Remarques sur l'état général du jardin
 (informations mentionnées à l'entrée du jardin) :

« Toute trace de végétation tropicale a disparu ou


presque et les bâtiments inoccupés depuis de nombreuses
années sont pour certains en très mauvais état.

Le jardin d’agronomie tropicale est pourtant un lieu plein


de charme et d’émotion qui se découvre petit à petit,
au rythme de la promenade.

Les bâtiments et les monuments aux morts sont les


témoins des relations parfois douloureuses de la
France avec ses colonies, tout au long de son histoire.
Comme un écrin, la nature a repris ses droits,
contribuant à renforcer l’impression d’intimité qui règne ici.

La Mairie de Paris a décidé de respecter l’équilibre


atteint aujourd’hui. L’aménagement du jardin se fera
Panneau informatif petit à petit, sans bouleversement majeur, ni
à l'entrée du Jardin tropical. restructuration lourde.

L’entretien de la végétation respecte son caractère


naturel. Ni poubelle, ni banc n’ont été installés afin
que l’ouverture au public ne perturbe pas l’atmosphère du
jardin. »
Mur de pierre sculpté de près de 10 mètres de long en face de l'ancien palais colonial de
l'exposition de 1931,12ème. arr. Monument qui rend hommage à la "mission Marchand",
expédition militaire légère partie du littoral Atlantique, au nord du fleuve Congo en 1896
pour rejoindre à l'est, le Nil (1898). L'objectif de cette mission était de conclure des traités
d'amitié et de commerce avec les chefs africains rencontrés dans les régions traversées
entre Congo et Nil. Arrivé à Fachoda, l'expédition française se heurte a la troupe anglo-
égyptienne. Les Anglais veulent rester maître de cette partie stratégique de l'Afrique
orientale. La guerre est évitée de peu.
.
La "mission Marchand" comprend huit gradés dont le futur général Charles Mangin, alors
capitaine et plus de 250 Tirailleurs sénégalais sous les ordres du chef de bataillon Jean-
Baptiste Marchand. Pour  séduire  les chefs  africains, l'expédition Marchand emporte 70
000 mètres de textiles et 16 tonnes de perles vénitiennes  sans compter  les bouteilles de
Cognac, Champagne, Pastis...

(Coll. ONAC 78)

 Bibliographie :

Ouvrage de référence : Nicolas Bancel et Pascal Blanchard, « Zoos humains », Paris, La


Découverte, 2004.

Une synthèse intéressante et richement illustrée : Nicolas Bancel et Pascal Blanchard,


« De l’indigène à l’immigré », Paris, Gallimard -coll. Découvertes n°345, 1998.

Revue mensuel « L’Histoire » Numéro spécial-octobre 2005, « La colonisation en procès ».

Ouvrage collectif, « Le Paris arabe, deux siècles de présence des orientaux et des Maghrébins
1830-2000 »,
Paris, La Découverte, 2003.

Ouvrage collectif, « Le Paris d’Asie, 150 ans de présence de la Chine, de l’Indochine, du Japon
dans la capitale »,
Paris, La Découverte, 2004.

Ouvrage collectif, « Le Paris noir », Paris, éditions Hazan, 2001.

Un roman inspiré de faits réels : "Cannibale" de Didier Daeninckx, Gallimard - Folio n°3290.
Film documentaire :
« Des zoos et des hommes », de François Mécili et Walid Ben Youssef. Nejma productions,
Eurozoom diffusion, 2005.

 Sur le Web :

»Article de N. Bancel, P. Blanchard et S. Lemaire paru dans "le Monde diplomatique" sur les zoos
humains en France :
http://www.monde-diplomatique.fr/2000/08/BANCEL/14145.html
 
»Article de Serge Barcellini sur les monuments en hommage aux combattants de « la
Grande France »
(Armée d’Afrique et Armée coloniale)
http://www.stratisc.org/TC_8.htm
 
»Un dossier de la Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration sur la mobilisation des
troupes coloniales pendant la Première Guerre mondiale :
http://www.histoire-immigration.fr/index.php?lg=fr&nav=16&flash=0

»L'Histoire du Palais colonial de l'exposition de 1931 à la Porte Dorée, ancien Musée des Arts
africains et océaniens. Visite de l'actuel aquarium tropical et du bâtiment.
http://www.palais-portedoree.org/

»Le nouveau musée des Arts et civilisations d'Afrique, d'Asie, d'Océanie et des
Amériques.
http://www.quaibranly.fr/

»Un dossier sur l'Histoire de Fachoda.


http://www.chronicus.com/xixe/dossiers/fachoda/fachoda.htm

»Ecouter le reportage sur le Jardin tropical de Paris (Le Paris arabe (1/2) dans l'émission de
Daniel Mermet,
"La-bas si j'y suis" ,archives de France Inter avec les éclairages de l'historien Pascal
Blanchard.
http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=470&var_recherche=Le+Paris+Arabe

 
La fin de l'Exposition colonial de 1907 au Jardin tropical du bois de Vincennes. Démontage du décor en
carton-pâte...

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